DE
2eSérie.N" 898.
LA BRONCHITE PLASTIQUE. ^
THÈSE
PRÉSENTÉE
A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE STRASBOURG
ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT
LE MERCREDI,
10JANVIER 1866,
A 5HEURES,
POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR EN MÉDECINE,
PAR
J. L.
TRIPONEL,
DEKOUFFACH(hAUT-RHIN).
STRASBOURG
,
IMPRIMERIE
m
V. C. HFJTZ, BUE DE l'oUTRE 5„1866.
A LA MÉMOIRE DE MA MÈRE.
A MON PÈRE.
A MON FRÈRE LE DOCTEUR
A.TRIPONEL.
J. L TRIPONEL.
A
M.LE PROFESSEUR MICHEL.
A MONSIEUR FELTZ,
chef descliniques à l'hôpitalcivil de Strasbourg.
J. L TRIPONKL.
FACULTÉ DE MÉDECINE DE SntASBOURG.
PROFESSEURS.
MM, EhrmannO^, Doyen
. . Anatomieet anatomie pathologique.FéeO^
Botanique et histoire naturelle médicale.StoltzO^
Accouchements etclinique d'accouchements.Cailliot^ Chimiemédicale ettoxicologie.
Rameaux
^
Physique médicale et hygiène.G.TounDES^^. ... Médecine légale et clinique des maladies des enfants.
SédillotC^^' Clinique chirurgicale.
RiGAUDîJi' Clinique chirurgicale.
SciiÙTZENBEaGER ^. . . Clinique médicale.
Stoeber^> Pathologie et thérapeutique générales, et clinique ophlhalmologique.
Kûss Physiologie.
| Clinique des maladiessyphi- Michel Médecine opératoire,
j
liiiques.
L. CozF, Thérapeutique spéciale, matière médicale et phar- macie (clinique desmaladies chroniques).
HiRTz^
Clinique médicale.WiEGER
Pathologie médicale.Bach Pathologie chirurgicale.
M. R. CozE 0*-, doyen honoraire.
AGRÉGÉS EN EXERCICE.
MM.
Stuoiil.mm.
Koeberlé.MM.
âubenas.MM.
AR0NSS0IJ^.Heid. Morel. Engel. Sarazin.
îûuschleger. Hecht. p. Schùtzenberger. Beaunis.
Dagonet. Boeckel (E). Dumont. Monoyek.
Herrgott.
AGRÉGÉS STAGIAIRES.
MM. N
,N
,N
,N
,N
M. Dubois, secrétaireagentconjptable.
EXAMINATEURS DE LA THÈSE.
MM.
Michel, président;Bach;
Hecht;
MoREL.
La Faculté aarrêtéquelesopinionsémises danslesilisserlalionstfuiluisontprésentées, 'loivcntêtreconsidérées rommcpropres ti leursauteurs, etqu'elle n'entend ni lesapprouver nilesimpruui>er.
DE LA BRONCHITE PLASTIQUE.
INTHOBUCTION.
Une
affectionobservée parmon
père etque nous avons eu
Toccasion de suivrenous-même, nous
a paru assez intéressantepour en
faire le sujet de notre thèse inaugurale.II est en effet très-rare de voir rejeterparles voies respiratoires, àdes intervalles assez éloignés, par
un homme
bien portantdu
reste, des*masses
solides, sansque
sa santégénérale en soitaucunément
troublée.C'est spécialementde cette
forme
de bronchite plastique chroniqueque nous nous sommes occupé
dans notre travail,laforme
aiguë ne semon-
trant le plus souvent
que comme
complication d'autres maladies.De
plus,au
milieu de toutes les opinions contradictoires qui régnent dans lascience,nous avons eu
envue
denous
faire uiie idée exacte sur lanature et la composition de ces produits pathologiques.
Nous avons
adopté les idées de l'école deStrasbourg,que nous
croyons êtredans le vrai, et qui anettement
séparé la diphtérie, qui estune
affectionnécro- biotique, des affections croupales caractérisées par l'hypertrophie tro-phique
etnumérique
des éléments.Pour
établir notre opinion,nous nous sommes
principalement basé sur l'observation de M. Triponel père, et surune
autreque nous venons
de recueillir à la clinique de M. Schiitzenberger etque nous
rapportons plus loin.1
Nous
diviserons notre travail en plusieurs chapitres.Dans
le premiernous donnerons
les observationsque nous avons pu
recueillir; dans le
second nous
traiterons de l'historique de la question; dans le troisième et quatrièmenous nous occuperons
de l'anatomie pa- thologiquemacroscopique
et microscopique ; dans lecinquième
enfin,nous
traiterons de la physiologie pathologique, quicomprend
lasympto-
matologie, l'étiologie, le pronostic, le diagnostic et la thérapeutique.Nous
termineronsnotre étude parquelques conclusions quirésumeront
les idées
que nous
a suscitées l'analyseexacte de nosobservations.CHAPITRE PREMIER.
OBSERVATIONS.
ObservationI'^.
—
(Bronchiteplastique observée par le Z)' Triponel père, 1855.) M. J., instituteur, âgé de50
ans, né de parentssains, tempéramentmixte, n'a jamais été malade.Au
milieu du mois de novembre 1837,sans cause appré- ciable, il est pris de légères quintes de toux, l'expectoration est complètement nullependantdeuxjours; le troisième M. J. . . . rejette des concrétions blanches qu'ilcompare àdes vermicelles. Ces produits sont expulsés sans liquide, et ne nagent pas dansles mucosités; il neconsulte pas de médecin; pour tout traite-ment
ilprend de ladécoction de lichen d'Islande. La guérison est, dit-il, com-plèteau bout de quinzejours.
En
18S8
aumois de novembre, M. J. . . .sans pouvoirindiqueraucunecause prochaine,recommence
àtousser, toux sèche d'abordcomme
l'annéeprécédente;au bout de quelquesjours apparaissentde nouveau les filaments blanchâtres, leur expulsion nécessite de grands efforts; il prend pendant quinze jours du théd'Is- lande, mais n'en éprouve aucune amélioration; les fausses
membranes
sont de- venues plus grasses. Ilvient à notre consultation; voici l'étatdans lequel nous letrouvons:
Pointde fièvre, facièsbon, santé générale excellente; toutesles fonctionss'exé- cutent bien, un peu moins d'appétitcependant qu'autrefois.
Le matin vers quatre heures il s'éveille; un chatouillement dans la gorge le faittousser, et la toux nes'arrête qu'après le rejet d'unefausse
membrane
de la grosseur d'une plumed'oie et de lalongueur de 5 à 6 cent., figurant une arbori- sation, semblable aux divisions du tube aérien. Vers 9 heures du matin expul- sionde nouvelles fausses membranes.A
2 heures de l'après midimôme
accès, et à 10 heures nouvel accès.Le maladefaitla remarque que les accès viennent 2 heures après les repas;
quandparsuite d'une cause quelconque, la toux est plus fréquente qu'à l'ordi- naire, ce ne sont pas des cylindres pseudo-membraneux qu'il rejette, c'est un li-
quideblanclaiteux.
iill
me
semble, disait-il, que c'est lamême
substance qui n'aurait pas eu le(Itemps des'organiser."
Ces fausses
membranes
sont enroulées sur elles-mêmeset sortent sous forme depetitspaquets; ce qu'il y a departiculier, c'est qu'ellessont toujours expulsées sans mucosités.N'étaient l'inquiétude desa famille et les efforts considérables qu'ilestforcé de
fairepour ses leçons, M,J. . . . nese seraitpas occupé de cette indisposition. Il
aremarqué que les accès sontplus fréquents etlesfausses
membranes
plusnom-
breuses quand il se fatigue àparlerà l'école.Nous avonsexaminé l'arrière-gorge, la couleur est normale, pas la moindre
trace d'inflammation. La percussion pratiquée avec beaucoupde soin et bien des fois ne nous a rien révélé, lapoitrine est très-sonore, pas de matité,
même
rela- tive en aucun point.A
l'auscultation on ne découvrerien, et l'auscultation a été pratiquée touslesjourspendant plusd'un mois.Comme
l'année dernière le lichen lui avait procuré une guérison rapide, lemalade en use largementavant devenir nous trouver, et pendant le traitement que nouslui prescrivons. Outre un régime assez sévère, nous donnons d'abord pendant quinzejours le chlorate de potasse à haute dose sans obtenir aucune amélioration; nous avonsalorsrecours auxpilulesde thérébentine, un à deux gr.
par jour; au bout de quinzejours l'amélioration est sensible, les accès sontmoins fréquents, les fausses
membranes
plus petites et moins nombreuses. Depuis ce temps le malade se refuse à tout traitement, l'amélioration par la thérébentine s'est soutenue; il y a encore 2 ou 3 quintes par jour, mais moins pénibles qu'au- trefois, et rejet à chacune d'elles d'une arborisation de moitié moins épaisse qu'autrefois.La guérisona été obtenue rapidement.
Cependant depuis M. J. . . ., que nous n'avons pas perdu de vue, nous a dit avoirrejeté tousles ans 2 ou3 fois et cette année-ci encore des fausses
mem-
branes, en très-petite quantité, etsansen avoirétéincommodé.
Examen
microscopique.—
L'examen microscopique faitparM. le professeur agrégé Morela porté surlesdifférentes couches de ces concrétions. Les cylindressont composés de cellules épithéliales, les unes entières munies deleurs noyaux,
les autres dans un état de transformation plus ou moins avancé et d'une masse amorphe,résultatde lafusion etde la transformation de ces cellules. Cette masse compose presque la totalité des cylindres. Des globules graisseux se rencontrent çà et là. En aucun endroit iln'a trouvé defibres proprementdites.
ObservationII. (Tirée
du
Canstatt Jahr-Berichl, d853. Bezetli,Merkwardig
gevalvon bronchial-croupbij een twee-en-twintigjarigenMan.
Nederl. Weebl., J.IÎ.p. 181.)—
M. Bezeth cite un cas de bronchite croupale (Broncliiai- Croup)chez unjeunehomme
de22
ans, très-vigoureux, qui avait été atteint de pneumonie l'année précédente, etqui toussait un peu depuis 3 ou 4 semaines.A
la suite d'uneoppression assez considérable il avait rendu laveille une grande quantité decylindres petits et grands, de couleur blanche et qui avaient pris laforme des plus grosses bronches jusqu'auxplusfinesramifications.
Ces cylindres étaient pleins, mous. Aprèscette expectoration il se trouva bien.
Rien àla percussion, etàl'auscultation on n'entendaitque quelquesrâlessibi- lants etronflantsàlapartieinférieure du
poumon
droit, et encore passagèrement.Bezeth administra d'abord du soufredoré auquel il adjoignit plus tard du ca- lomel, et obtintla guérisondéfinitive du maladedansl'espacedequatresemaines.
Pendant ce temps le malade expectora souvent de ces masses solides, et la plupartdu tempssans oppression nidouleur.
Examen
microscopique.—
Le D"'Schmidt qui examina ces cylindres au mi- croscopeles trouva composés d'une masse amorphe, contenant beaucoupde cor- puscules, etcouvertedepetites raies très-fines.On
remarquaitçàetlàdes globules graisseux, mais nulle part d'épithélium.M. Schmidt esttrès-probablement tombé sur des cylindres arrivés au dernier degré de leur évolution.
Je feraiobserverici que l'observation microscopique de Schmidt est en tout conforme à celle de M. l'agrégéMorel.
—
6—
Observation III.
—
(Fâllevonselbstsfândigen Bronchial-Croup,Verhandlun- gcn des nalurahislor. in den Vereins zu Heidelherg, IV,18S7,
p. 90.)Oppenheimercite lesobservations suivantesdebronchite croupale.
a) Unejeune fille de
20
ans, du reste bien portante, rejetait tous lesjours au milieu d'accès de toux et de suffocation des concrétions cylindriques,provenant des bronches de 2'"% 3™' et ordre.Ces concrétions composées de couches concentriques n'avaient pas la
même
consistance dans toute leur épaisseur. La couche externe était dure et composée d'une masse
homogène
avec des lignes parallèles et plus foncées qui devenaient transparentes parl'acideacétique.On
voyait aussi quelques globules de pus. Les couches internes étaient molles, etvisiblement composées de pus et de cellules.Cette observation ressembleànotre première, saufle pus qui indique un degré d'irritation de plus. Ici encore il n'est nullementquestion de fibrine.
Observation IV.
—
(Bronchite plastique aiguë.)—
b)Une
jeune fille de 14 ans 1/2 futprise subitement de fièvre et de légère angine tonsillaire avec quelques exsudations blanches.Dès le second jour la malade devint somnolente.L'auscultation ne faisait entendreque quelquesrâles ronflants,mais rien à la per- cussion, pas de toux, pas d'expectoration.
Au
deuxièmejour on trouva de lama-
tité derrière età gauche avec du souffle accompagnéde petits râles et d'autresà grossesbulles. La matité disparut au bout de quelques heures pour se fixer à droite etau milieu.
L'autopsie montra que tous les organes étaient sains à l'exception des pou- mons. Les bronches, depuisla divisionde la trachéejusqu'auxplus finesramifica- tions, étaient recouvertes d'une
membrane
blanche, qu'on pouvaitdétacher par morceaux, etqui étaitcomposée d'une masse amorphe et de beaucoup de glo- bulesde pus. Lamuqueuse
était unpeu rouge danscertains endroits.Nousavons principalement cité cette observation pourfaire voir jusqu'à quel pointla maladie pouvait s'étendre, et embrasserl'arbre aérien tout entier.
Observation V.
—
(Journal hebdom. de médecine,p. 5, 1856.)—
Casper parled'unejeune fillede 12 ans, scrofuleuse, chez laquelle il survint, à la suited'uncatharredesbronches ayant duré cinq joursettraitéparles antiphlogistiques, une toux accompagnée de l'expulsion de quelques fausses
membranes
très-bien formées; cet étatdura l'espace detreizejours; elleen crachaitordinairement unelematinet l'autre vers minuit.Les dixpremièresfurent expulsées aumilieu d'accès de suffocation, mais les autres sortirent facilement, et l'affection disparut sans l'intervention d'aucun médicament.
Observation VI.
— Un
chirurgien hollandais, Dingenburg, raconte dans une lettre adressée àKaaw
(imprimée dansKaaw, Perspiratio dicta Hippocratietc., p. 114, Lugd. Batav.,
1738)
qu'il a craché pendant cinq mois (de janvier àjuin)des faussesmembranes
desbronches en quantité presque incroyable; elles étaient d'un blanc delait, etprésentaient des ramificationstrès-fines.L'expectoration avait lieu le matin, de bonne heure, presque tous lesjours.
11 n'y avait ni fièvre ni dyspnée, niaucune autre douleur affectant l'étatgénéral.
11 n'est pas parlé de thérapeutique. Les mots suivants montrent, du reste,
comment
Dingenburg comprenait la naturede cette affection :wHumorem
in tu- nica glandulosa et vasculosa bronchiorum abundanler excretum,ad
formant bronchiorum relatum causant esseproximum
puto.uObservation VII. (Journal hedom. de Casper, 1837, p. 313.)
—
Chez unhomme
de 39 ans, qui avait eu déjà tous lesjours, depuis plusieurs années, un accès de toux, d'abord convulsive, puis enfin déterminant une expectoration séreuse, unequantité assez considérable de caillots polypiformesfutexpulsée trois jours après qu'il fut survenu chez le malade une exagération de l'expectoration consécutive à un refroidissement éprouvé à la chasse; la toux s'était augmentée,et il était survenu de lafièvre.
De
semblables expectorations se répétèrent ensuite àdesintervallesirréguliers,puisrevinrentàdes intervallesdeune àhuitsemaines.Plus tard,le malade fit usage des eaux d'Ems, et il survint souvent chez lui un enrouement consécutif, tandis que lesaccès de toux diminuèrent de beaucoup en intensité et perdirent leur caractère convulsif; l'étatgénéral n'était pasnon plus troublé. Le maladese sentait plusfortqu'auparavant, etsupportait sansen souffrir, les fatigues de la chasse pendant des journées entières. La remarque suivante
prouve cependant, que les fauses
membranes
n'étaient que d'une grandeurmoyenne
: nLes concrétions polypiformes, roulées les unes sur les autres, atteig- nirent unefois le volume d'unenoisette.»Nous n'avons pas dedonnées exactes sur la durée dela maladie ;mais d'après ce qui a été dit, elle doitavoirétéde plus d'un an.
ObservationVIII. (Casde Brunner,Journal hebd. de Casper,
1841
, p. 92.)— Une
paysanne bien portante et robuste, âgée de30
ans, eut, àlasuited'une toux catharrale violente qui avaitcommencé
enmars1853,
dansleseptièmemois de sa grossesse, unebronchite pseudo-membraneuse telle, quela malade, qui dureste se portait bien, crachait tous les deux jours, à la suite d'une toux très- fortequi duraitdeun àplusieurs jours,des matières depeu de consistanceetd'un blancde lait, et enfinrejetaitune concrétion polypiforme; dans lesintervalles elle
ne toussait pas dutout. L'accouchement, qui sefit fort heureusement au mois de juin, n'eutaucune influence sur la marche de lamaladie. La maladeprit chaque jour cinq fois un scrupule de sel
ammoniac
et ungramme
de soufredoré ; lespseudo-membranes devinrent toujours plus rares, cessèrent
même
de se produire en automne et en hiver, bien que l'usage de ces médicaments eut étésuspendu dès lecommencement
de novembre.Au
printemps de1834,
sa maladierécidiva sous lamême
forme, seprolongea, au direde la malade, sans longs intervalles, et cessa en mars 1840. A cette époque, des hémoptysies s'étaient produites plusieurs fois, lamalade maigrit, etses ongles se recourbèrent, sans qu'il y eut nidouleur danslapoitrine, nidyspnée, nitrouble de digestion,nifièvre hectique.Observation IX.
—
Aumoment
où nous achevons notre thèse, un -cas de bronchite plastique vient de se présenter à l'hôpital et confirmer l'opinion que nous avons adoptéesur la nature et la composition deces expectorations solides.Une
jeunefillede23
ans, deStrasbourg, demeurantrue dela Croix 18,entre le28
décembre1865
dans le service de M. Schûtzenberger, où elle ne reste qu'unejournée.Son père, nousdit-elle, était tailleur de pierres etest mort phthisique à l'âge de
4S
ans, et une sœurde 14 ans a succombéàlamême
affection.—
9—
Jusqu'aumois de novembre\
S&i
elle atoujoursétébien portante et robuste, époqueà laquelle ellefut atteinte de pneumonie dont elle fut assezvite guérie.Au
mois de mai4865,
nouvelle pneumoniequi se termina encore heureusement sans aucune complication.Deux
mois après, au sortir d'un bain, prétend-elle, elle fut prised'un catarrhe quine l'a plus quittée; etdepuis sixsemaines les ex- pectorations sont mêlées de cylindres enroulés sureux-mêmes
et dontle volumeatteint quelquefois la grosseur d'une noisette. Ces cylindres sont d'un blanc de
lait et dichotomiquement divisés, imitant les ramifications bronchiques depuis l'épaisseurd'une grosseplume d'oiejusqu'à celle d'un fd très-fin.
C'est le malin vers 3 heures qu'elle rejette ces concrétions en plus grande quantité. Leur expulsion est toujours précédée d'oj)pression, d'étoufïementetde quintes de toux très-fatigantes. Dans la journée elle n'en rend que rarement et en petites masses.
Le 2 janvier
1866
nousla visitons dans son domicile. Nous trouvons la malade couchée dans son lit, très-faibleet très-amaigrie. Elle a la peau brûlante, le pouls très-fréquent, la respiration courte, gênée, haletante; elle a de la peine à ré- pondre à nos questions.La percussion ne nous révèle qu'unpeu de matité sous la clavicule gauche, et àl'auscultation nous n'entendons que quelques râles
muqueux
disséminés dans toute la poitrine. Elle nous dit avoir encorerendu une concrétion assez considé- rable le malin.Examen
microscopique faitpar M.
le chef des cliniques Feltz.—
Examinés au microscope, dit M. Feltz, les cylindres expectorés par la malade se présentent sous trois formes différentes :1°Nous y trouvons des cylindresuniquement composés de granulations très- fines (granulations albumino-graisseuses).
2°Des cylindres composés de granulations
comme
les précédents, mais aussi de cellules épithéliales à noyaux très-visibles. Ces épilhéliums ne sontpas juxta- posés, mais irrégulièrement semés au milieu de la substance granuleuse.3°Des cylindresuniquement composés de cellules épithéliales placées les unes à côté des autres
comme
des pavés, sansinterpositiond'une substance quelconque.2
10
—
Nous concluons de noire examen : que les cylindres uniquement composés d'épilhéliums constituent le premier degré de la maladie; que les cylindresde la
deuxième catégorie sont le résultatd'un
commencement
defusion de cesmêmes
cellules, etque les cylindres granuleux constituentle terme ultime de l'affection.
L'aspect striéqueprésentent certains cylindres ne tient pas à laprésence d'un
tissu fibreux quelconque, vu la facilité avec laquelle on modifie ces stries en ser- rant plus ou moins lesdeux verresdu microscope l'un contre l'autre. Ces stries
nous paraissent plutôt être le résultat de la coagulation du principe albuminoïde résultant dela fusion des cellules épithéliales.
SYNONYMIE.
Lesplusanciens
médecins
prenant cette affection pour des polypes de bronches, lui donnèrent lenom
de bronchite polypeuse. Rokitansky avecbeaucoup
demédecins
allemands la désigne sous ladénomination
de Bronchite croupale (lîronchial-Croup],Remack
l'appelle Bronchite fibri-Mcuse croyant avoir affaire à des exsudats fibrineux, M.
Wiedemann
{Thèse, Strasbourg
1854)
adoptant les idées deRemack,
la désigne sousle
même nom.
En
Francenous
trouvons cette affection généralement décrite sous lenom
de Bronchitepseudo-membraneuse.
Quant
ànous,nous
l'avons appelée Bronchite plastique,dénomination
(|ui n'éveille
aucune
idée sur la nature et lacompositon
de ces produits de nouvelle formation.— n —
CHAPITRE
II.HISTORIQUE.
Les concrétions solides des
bronches
paraissent avoir étéconnues
dèslaplus haute antiquité.
Hippocrate déjà, sans
donner aucun commentaire
sur leur nature, s'ex-prime
ainsi : «^Pherecidœ post solstitiumhybernum
nocte laleris dextri dolor^ antemortem
tusiendo rejecit velutex fungos compactos, ex-
crearatautem
et anleaparva
alba lactea.» (Hipp.De Epidemis, LXIL)
Mais les opinionsles plus diverses
ne
tardèrentpas à surgir sur lana- ture, lemode
de formation de ces produits pathologiques. Galien le pre-mier
émit son opinion sur leur nature et les considéracomme
des frag-ments
de vaisseaux, artèreou
veinepulmonaire
: i^Quineliamportionem quandum
vasishaud parvam
hissiendo rejeclam vidimus, etipsam
dis- sectionis peritisdemonstrantem
seex pulmone
esseeductam. Nam guœ ad asperum
in colloarteriam
parveniuntvasa omnia
capillacea sunt.»(De
locis affectis, L. 1, C. 2).Après lui, V. Tulpius (Observ.
médic, Amsterdam 1672)
citedeux
observations demalades
ayant rejeté des concrétionsprovenant
des bronches, et qu'ilprend pour
des fragments de l'artère et de la veine pulmonaires.Bartholin(1648) et
MoUenbrock
{Miscellanacuriosaacademica^
R.C,
Dec. ï.An. II,
1648)
partagèrentégalement
l'opinion de Galien.Les observateurs qui suivirent prirent ces concrétions
pour
despolypes desbronches ou
polypespulmonaires.En
tête,Martin Lister(Mém. de VAcad. de
chir., éd. in-4°, t. V,p. 542) consulté par Rob. Clarke,au
sujetd'unmalade
qui expectorait desmasses
solides, prétend qu'elles sont
formées
parl'humeur muqueuse
de petites glandes qui se durcit dans lesbronches
dont elleprend
la forme, et12
qu'on pourrait les regarder
comme
des polypes pulmonaires. (Transact.pMlosoph.)
Quantité d'observateurs après Lister j)artagèrent ses idées sur la nature de ces concrétions.
Bussierre (1700) ayant eu l'occasion de faire l'autopsie d'un
malade
qui avait expectoré des faussesmembranes, en
trouvalesbronches rem-
plies jusque dans leurs plus fines ramifications ; les veines et artères étaient intactes, et il
appuya
ainsi la théorie de Lister. (Transact.philos.) Morgagni,Ruysch,
avec Nicholls, qui cite l'observation de son propre frère quiétait asthmatique,et quipendant nombre
d'annéesavaient rejeté desfaussesmembranes,
adoptentcettemanière
de voir.Lemery
(Hist.de
l'Acad. des sciences, p. 23, 1704),comparant
ces faussesmembranes aux
polypesdu cœur,
lesprend pour
des polypes qui s'étaient formés dans quelque veineou
artèrepulmonaire
: «Elles doivent être sorties, dit-il, parquelque ouverture quis'était faite à leurvaisseau; aussi étaient-ellesaccompagnées
de sang.»Cette erreur fut partagée parle cél'^brephysiologiste Haller.
ÎVous
avons
déjàvu
quelle était l'opinion deDingenburg
sur la forma- tion de ces concrétions.Marcoreîle,
médecin
deToulouse, soigna en1751 un
maître de danse qui, après avoir présenté tous lessymptômes
depneumonie,
rejeta des corps ramifiés de 3pouces
de longueur, tubuleux etdichotomiquement
divisés, et traita
en 1762
aveciiarthezune femme
qui présentalesmêmes
s)înpl()nu's. Il hésite à décidersi ces
masses
solides sont formées parlesmembranes
internes desbronches ou
parune
substancemoulée
sur leur cavité.L'Académie
des sciences fut consultée{Mém. de
l'Ac. des sciences,1762,
p. 153), mais ellene
seprononça
pas. Plus tard l'Académie do chirurgie adopta la dernière opinion, à la suite d'une conimunication semblable faite par le chirurgienLebœuf.
Murra) (1770) ayant observé
lui-même
des cas d'expectoration de cra- chats solides, publia sonmémoire {De
polypishronchiormn)
et attribua la formation do cesmasses
solides à la Iransudalion de lalymphe
coagu-— 15 —
lable (sérum)
du
sang. Cesfaussesmembranes
seraientsemblables sous le rapport de leur siège et de leur natureà cellesdu
croup.Les idées de
Murray
furent adoptées parbeaucoup
d'observateurs, entre autres Hayes, Hunter, Michsclis, Canstatt.Lsennec
ne
voulait reconnaître dans lespseudo-membranes que
des polypes vésiculairesou
des concrétions sanguines.Louis aussi,observa des bronchites
pseudo-membraneuses,
etil fait re-marquer que dans beaucoup
de cas, les faussesmembranes
se prolon-geaient jusque dans les ramifications
bronchiques (Mém.
et Rech. path.sur diverses maladies, Paris 1826).
Heurteloup {Thèse
de
Paris,1828)
cite des observations analogues.Lobstein (Arch.
de méd. de
Strasbourg, n°I, 1834; Rech. sur quelques maladiesdu poumon)
parle des maladies dans lesquelles seforment des faussesmembranes
et les diviseen
trois : croup laryngé, croup bron- chique, croup vésiculaire. «Plus l'individu estjeune, dit-il, plus l'inflam-mation
attaqueun
point élevé de l'appareil pulmonaire; plus ilestavancé
en âge, plus cette inflammation descend.Dans
lecroup
des enfants, lamaladie agit de haut enbas; dans le croup des adultes, l'activité patho- logique agit de bas en haut.»
En 1849
M.Thore
fils, publieun mémoire
sur la bronchite fibrineuse.INonat, dans l'épidémie de grippe (Paris, février 1854), observa 8 cas de bronchite fibrineuse qui se
montra comme
complication de lapneu- monie.
11 n'y eut pas defaussesmembranes
expectorées,mais
à l'autopsieon
en trouva lesbronches
rempliesjusque
dans leurs plus fines rami- fications.ïhierfelder (JÎ/e/wo^re sur la bronchite croupale,
1854)
citebeaucoup
d'observations de bronchite croupale, et regarde les faussesmembranes eonmae un
produit de sécrétion.Puchelt, jeune {Ileidelberg
med.,
1848, 13 B., 4 H., p. 479,Lkber
Bronchilis milBildung von
Bronchialgerinnsel)])ar\e de37
casde bron- chite croupale tantaigusque
chroniques._ 14 —
Remack
a découvert des faussesmembranes
jusque dans les ramifica- tions les plus fines desbronches. D'après lui, ces concrétions fibrineuses se retrouveraienttoujours danslapneumonie
et constitueraientlephéno- mène
essentiel de cette maladie, de sorte qu'on pourrait la considérercomme une
bronchite fibrineuse.Wiedemann,
dans sa thèse inaugurale{De
la bronchite fibrineuse etde
ses rapports aveclapneumonie,
1855), adopte les idées deRemack
et divise les inflammationspseudo-membraneuses en
croupou
laryngitepseudo-membraneuse,
trachéiteou
bronchite diphtéritique des grosses bronches, etpneumonie ou
bronchite capillaireou
vésiculaire.Rokitansky (Anat.
pathoL,
T. III, p. 58,1861)
désigneles concrétions bronchiques sous lenom
de croup laryngé, trachéal etbronchique.Bien des opinions etdes idées diverses,
comme nous venons
dele voir, ont été émises et se sont succédées dans la science. 11 est difficile d'en adopter l'uneou
l'autre sans les avoir contrôlées. L'anatomie patholo- gique et l'étude histologique deces concrétionspeuvent
seulesnous
éclai- rer etnous
mettre sur lechemin
de la vérité. Cette étude feradonc
na- turellementl'objetdu
chapitre suivant.CHAPITRE
III.mâtomie
pathologique.Forme
descylindres.—
Les concrétionssonttoujoursrendues en
masse, en pelotes enroulées surelles-mêmes parpetitspaquets,au
milieu d'efforts plusou moins
considérables, tantôt seules, tantôtaccompagnées
dema-
tières liquides. Elles se déroulent lorsqu'on les agite
dans
l'eau, et semontrent
souslaforme
de tubesdichotomiquement
divisésetimitant par- faitement lesramifications bronchiques. Ces tubes sont pleinsou
creux.Les cylindres
provenant
des grossesbronches
sontplutôtformés
de tubes creux, parceque
les grossesbronches ne
fournissentgénéralement
pas assez de matièreplastiquepour
fournir des cylindres pleins;pour
lespe-tites
bronches
l'inverse alieu, là les concrétionsne
restent creusesque
lorsquela matièreplastique estpeu
abondante.Cependant on
pourra ren- contrer des tubesmoulés
sur les plus grossesbronches
pleins, tandisque
d'autres de petit calibre seront creux.La
grosseur des cylindres est variable etdépend
delaplusou moins
grande extension delà maladievers lesgrosses bronches. Puchelten
avu
rejeter del'épaisseurd'undoigt; les concrétionsrendues
par lemalade
observé parmon
pèreprésentaient tous les calibres, depuis l'épaisseur d'uneplume
d'oie jusqu'à celle des plus fines ramifications bronchiques. Quelquefois les concrétions présentent l'aspect de petitslambeaux
demembrane mince. Souvent
les cylindres,au moment
de leur expulsion, sont chargés de bulles d'air.Leur
longueur peut aller jusqu'à7ou
8 centimètresavec
desramifica- tionsnombreuses,
demanière
à former des arborisations complètes.S 2.
Consistance.
— La
consistance n'est pas lamême
dans toute la lon-gueur
ni danstoute l'épaisseurdelamasse
plastique. Ellevariesuivant les— 16 —
degrés différentsdeformation des cylindres; elle peutallerdepuiscelle
du
caillot sanguin jusqu'à la consistance élastique etdure
du
cuir.Oppenheimer
{loc.cil.)atrouvé lescouches
internes plus duresque
les externes. Pucheltaremarqué au
contraire,que
lescouches
internes étaient plus mollesque
les externes.La
consistancevarie aussi dans la longueur.Le
troncprincipal est gé-néralement
plus dur et plus élastiqueque
les branches, qui sont plus molles et se laissent écrasersous le doigt (Puchelt, Rokitansky).La
con- sistanceest en rapportavec
la durée quisépare les expectorations; plus l'intervalle est grand, plusles concrétions sontdures et résistantes, parce qu'elles onteu
letemps
de se déssécher plusou
moins.Ce
fait a,du
reste, été
remarqué
par lemalade lui-même
qui fait le sujet de notre observation première.§ 3.
Couleur.
— La
couleurde
ces produits pathologiques varie peu. !lssont
généralement
d'un blanc de lait,ou
d'un blanc tirant sur le gris.Quelquefois ces cylindres sont couverts de stries de sang (Samuelson, Thierfelder).
Quant aux
liquides quiaccompagnent
ces concrétions, ilsne diffèrenten riende
ceux
expectorés dans la bronchite ordinaire.—
J7—
CHAPITRE
IV.ANALYSE MICROSCOPIQUE DES CONCRÉTIONS.
Van Swieten
est le premier qui aitexaminé
cesmatières plastiques au microscope, etil les trouvacomposées
defibrineamorphe.
Pour
Puchelt (loc. cil.) ces exsudats sont aussi de la fibrineamorphe {amorpher
Fasersto/f). «Ils diffèrent, dit-il, des coagulationssanguines parlepeu
de globulessanguins qu'ilscontiennent.»Remack
trouveà cesconcrétionsplastiqueslaplus grande ressemblance aveccellesque
rejettent les enfantsatteints de croup{Schœnleins
Klinik).Thierfelder,àlasuitede5observationsde bronchiteplastiquequ'ilpublie dans son
mémoire
[loc. cit.)donne une
analysecomplète
de ces matières solides. Il s'exprime ainsi : «Lorsqu'on examinaitau microscope
des lamelles très-minceson
lesvoyaitforméesà leur tourde plusieurs lamelles plus petites superposées lesunes aux
autres et disposées par couches.Leur
substance presque incoloreassez transparente, offreau premiercoup
d'œil,
un
aspectfinement striéou
fibreux; lorsqu'on les regardaitmieux,
cet aspect semblaitdû
à laprésence deplis légers,extrêmement
lins, qui avaient lamême
directionen
général,mais
qui étaient souvent inter-rompus,
et présentaient quelques faibles ondulations. Ils disparaissaient en partielorsqu'onlescomprimait
sousune
plaque deverre.«La
surface despseudo-membranes
contenait toujoursune
grande quantité de corpuscules de sang, la plupart ayant leurforme
normale, d'autres plussphériques. Cesdeux
éléments se trouvaientcependant
tou- jours au-dessuset au-dessous de l'élémenthomogène.
«Les
couches
internesne
présentaient pas de corpuscules de sang, maisbeaucoup
de granulationsmoléculaires et des corpuscules de pus.«C'étaient surtout les filaments
terminaux
de la faussemembrane
qui paraissaient constitués en grande partie par des corpuscules depus
;on
voyaitcependant, entre leursrangsserrés, les striesde la substancehomo-
3
— 48 —
gène; des corpuscules de
pus en grand nombre,
quelques cellules conte- nant des granulations, constituaient les éléments solidesdu
liquided'ap- parencemuqueuse
quiaccompagnaient
lesfaussesmembranes.»
Le docteur
Schmidt
quiexamina
les concrétionsprovenant du malade
de M. Bezeth {loc. cil.)trouvaune masse amorphe
à laquelle étaientmêlés
des globules très-tenus eten
grande quantité, çà et là des corpuscules graisseux,mais
nulle partd'épithéliums.Rokitansky {Lancet, février
1855)
dit,«que
ces dépôts fibrineux pré- sententun
grandnombre
de corpusculeslogésdansune masse
granuleuse;cescorpusculessont
un peu
pluslongsque
lesglobules, ilsoffrent quelque- fois des points d'ulcération, et contiennent des moléculesamorphes en
apparence.»M.
Wiedemann
adopteles idées de M. le professeurRûss
qui avaitexa-miné
des faussesmembranes provenant
dedeux malades
atteints depneu-monie
fibrineuse. Voici les conclusions qu'avait tirées M. le professeur Kïiss de cetexamen
microscopique :«La
substance de la concrétionres-semble exactement aux
concrétions fibrineusesque
l'on trouve parfois dans les grands vaisseaux. Par triturationon
peut la diviser en petites parcellescomme squammeuses
pareillesaux
caillots microscopiquesdu
sang.La masse
est, à ce qu'ilsemble
à M. Kiiss,formée
decouches
con- centriques. Illacroitformée
sur place,comme
les concrétions croupales,mais
parun
autremécanisme que
l'inflammation. Car, dit-il, l'épithélium a été trouvé intact, et ilne
comprendrait pasune
altération desbronches
sans altération profonde de leurs épithéliums.«J'incline,ditM.Kiiss, à admettre
une
exsudation albumineuse,fournie par lamuqueuse,
en apparence saine.En
raisondu peu
de différencechimique
entrel'albumine et la fibrine,j'admets que, dansle cas en ques- tion, l'albumine, àpeineépanchée
à la surface de lamuqueuse,
se sera concrétée, et ainsi s'expliquent lemieux,
je pense, les couchesconcen-
triques dela concrétion.»Oppenheimer
{loc. cil.) dansdeux
cas de bronchite plastique, voit les cylindrescomposés
decouches
concentriques.Lescouches
externesétaient— 19 —
formées
d'unemasse amorphe
rayée de lignes parallèles avecles globules de pus.Dans
lacouche
interneen
rencontraitdu pus
etdes globules.Oppolzer(4//^em.
Wiener med. Zeitung,i, 1858)
trouveun
tissufm
de fibrineauquel adhèrent des corpuscules purulentsetdescellules épithéliales.M. Schûtzenberger {Thèse, Strasbourg
18S8, Sur
les expectorations)donne
àpeu
prèslamême
description des cylindresque
Thierfelder.«L'examen
microscopique, dit-il, révèleque
ces concrétions sont for-mées
par desfilaments dirigésparallèlement à lalongueurdu
caillot,très- rapprochés lesuns
des autres.Dans
l'intérieur de lamasse, on
rencontre les élémentsmorphologiques
de nature diverse (corpuscules purulents, cellules épithéliales).La
surface des concrétionsestd'ordinairerecouverte parune couche
très-mincede globules sanguinsetquelquefois purulents.»Enfin M.l'agrégé Morel s'exprime ainsi(Histologie, p. 176) :
«La
bronchiteou pneumonie
fibrineuse tient à la présence de petits cylindres arborescents qui seforment dans
les dernières ramifications bronchiques, et qui les oblitèrenten en
conservant lemoule.
Ces cy- lindres ontl'aspect et la consistance de la fibrine coagulée; de là lenom
de bronchite fibrineuse.
Cependant
enexaminant
la structure de ces pro- duits,on
estbientôtconvaincu
qu'ils résultentd'une hyperplasie del'épi-thélium bronchique, et partant qu'ils
ne
sont pasun
simple exsudât des alvéoles et descanaux
aériens. Leurs caractères histologiques leur as- signentune commune
origine avec lesmembranes du
croup.«Du
reste, lorsmême
qu'onne
trouverait pas des cellules dans toute lamasse
des cylindres,on ne
serait paspour
cela autorisé à conclure àune
origine exsudative ; car,dans
ce cas, la substanceamorphe
qu'on a souslesyeux
provient de lafusion des cellules.Ce
faitn'est pasisolé :on
l'observedans différentsautres produitspathologiquesetnotamment dans
le cancer colloïde
du
péritoine,où
la matière colloïdedu
péritoine est véritablementformée
par la fusion des cellules, dont lecontenu
granu- leux ainsique
lenoyau
semétamorphosent en
matière gélatiniforme et dont les parois disparaissent par résorption. Il est toujours possible de suivre cestransformations dans les produits quinous
occupent, etil n'ya- 20 —
qu'un
examen
trop superficiel qui puisse faire admettre la théorie de l'exsudatpour
expliquer lemode du développement.»
Ce
que
M, l'agrégéMorelavance
dans son Histologie, s'est encore par- faitement observé dans les concrétionsqu'ila eu l'obligeanced'examiner
au microscope : cellules complètesmunies
de leursnoyaux
en petitnombre,
d'autres cellules en voie de transformation et de fusion, et enfinune
substanceamorphe composant
presque la totalité des concrétions, résultat de lafusion des cellules épithéliales. Il en est demême
des cy- lindresqui font l'objet dema neuvième
observation etqui ontétéexami-
nés par M. Feltz.Si les micrographes se sont
trompés
et ont pris cesmasses
solides pour de la fibrineamorphe,
c'est qu'ils les ontexaminées
àune
période tropavancée
de leur évolution, alorsque
la fusion des cellules s'était déjà opérée. Partant de cette idée qu'ils avaient sous leursyeux
de la librineamorphe,
ils ont tous adopté la théorie de l'exsudation, tandisque
ces faussesmembranes ne
sont dues qu'àune
modification deforme
et àune
hyperplasie del'épithélium bronchique.Il est toutefois des cas,
comme
le dit M. le chef des cliniques Feltz (dans son opusculeSur
la phlhisiepulmonaire
1865), où, à la suite d'hémorrhagie intra-parenchymateuse datantde
quelque temps,on
trouve des cylindres bronchiques, de couleur blanchâtre, constitués par de la fibrine et quelques corpuscules sanguins plusou moins déformés
et dé- colorés.Chez un
tailleur de pierres, dont il a cité l'observation et quimourut
d'hémorrhagie pulmonaire, il avu
de ces cylindreshématiques
à leurs différents degrés d'évolution, e'est-à-dire depuis le cylindre rouge jusqu'au cylindre gris blanchâtre.Ce
qui fait toujours reconnaîtreles cy- lindres hématiques, c'est la présence de corpuscules sanguins pusou
moins
bien conservés.—
21—
CHAPITRE
V.S 1". ÉTIOLOGIE.
La
bronchite plastiqueestune
affection plusfréquente chezleshommes
que
chez lesfemmes.
Elle semontre
à tous les âges. D'après M.Voiliez {Dict.de
diagnosticméd.
1862)on
l'observerait plus souvent entre20
et25
ans.Elle peut débuter
d'emblée
et affecter des individus bien robustes et ayant toujours été bienportants;mais
le plus souventun
catarrhe chro- nique précède l'expectoration de fauss.esmembranes.
Quelquefois aussion
la voit succéderàun
catarrhe aigu.Du
reste, toutesles causespouvant
occasionnerune
bronchite ordinaire, doiventpouvoir produireune
bron- chite plastique, etprobablement que
des aptitudes spéciales, des dia- thèses de tissu, déterminent plutôt l'uneou
l'autrede cesaffections.§ 2. SYMPTOMES.
Que
la maladie débute d'emblée, etdans
cecas, elle esttoujours précé- déed'une toux sèchependant
2ou
3 jours,ou
qu'ellesuccède
àun
catarrhe aiguou
chronique, lessymptômes
restent lesmêmes.
Ordinairement lemalade
est pris d'abord d'oppression suivie bientôt de chatouillements dans la trachée avec sensation d'un corps étranger et d'accès de toux qui lui font rejeter des cylindresaprès des effortsplusou moins
considérables.Tout
rentrebientôt dans l'ordre,jusqu'à ceque
de nouvelles causes vien- nent produire denouveaux
accès.Ces concrétions sontle plus souvent rejetées avec
beaucoup
de facilitéparce qu'elles adhèrent
peu
àlamuqueuse.
Quelquefois cependant, les accès sont précédésd'enrouement
de la voix, dedyspnée
très-considé- rable, d'angoisse, d'étouffements, etdans ces cas, lesfaussesmembranes
ne
sont expulsées qu'avecune
difficulté extrême. Jamaisou
presqueja- maison
n'observe defièvre.5. DIAGNOSTIC.
Le
diagnostic se fondepresqueuniquement
surlaprésencedecesmasses
solidesdans
les crachatsavec
apyrexie plusou moins
complète.Larésonnance
de lapoitrine est presque toujoursnormale;
l'ausculta- tionne
fait entendreque
quelques râles ronflantsou
sibilants, et biensouvent
les signes sthétoscopiquesmanquent complètement.
Si j'envisageais les
pneumonie
etbronchite fibrineuses aiguës,j'aurais à faire ici le diagnostic différentiel avec toutes les autres maladies aiguës de la poitrine;dans mon
cas je puism'en
tenir à la recherchedu
signepathognomonique. L'examen microscopique
sera toujoursnécessairepour
se fixer sur lanature des cylindres, leurmode
d'évolution etla terminai- son probable dela maladie.§ 4. PRONOSTIC.
Le
pronostic à porter sur cette affectionest assez favorable.Dans
toutes les observations de casfranchement
chroniquesque nous avons
cités, laguèrison a été obtenue. Mais
cependant
lamort
par obstruction desbronches
et partant, par asphyxie, pourrait survenir, siles concrétionsne
se détachaient pas,ou
touten
se détachant, n'étaient pas expulsées au-dehors.La
gravité de la maladiedépend
de lagrosseur des cylindres, et parconséquent
de la plusou moins
grande extension de la maladie vers lesbronches
degrand calibre, et surtout de samarche.
§ 5. TRAITEMENT.
Nous avons deux
indications à remplir dans le traitement de cette affection:r
Favoriserl'expulsion des cylindres.A
cet effeton
administrera: les antimoniaux,la scilleetc. Ilest inutilede direque
si lesmalades
prenaient des accès de suffocation très-violents, les vomitifs seraient indiqués.2" Modifierles surfaces. Or,
conime
jusqu'icinous ne
connaissons pas la loi d'évolution des épithéliunis,nous ne pouvons
pas indiquer de médication directe,mais nous pouvons
toujoursdonner
ceque
l'expé- riencenous
a appris.Ainsi
on
prescrira les alcalins, les altérants, etparmi eux
lemercure
qui a été regardé par lesmédecins
anglaiscomme
leremède
le plus efficace.Les balsamiques seront très-utiles
dans
cetteforme
chronique. L'inspi- ration de vapeurschaudes
rendra l'expectoration des concrétions plus facile. Les vésicants sur la poitrine, des frictionsau
tartre stibiéou
à l'huile de croton,une
fontanelle entretenuependant un
certain temps, pourront hâter la guérison.Le changement
d'air, l'usage de flanelleou
de laine sur la poitrine, seront aussi très-favorables.Vu
l'analogie de la bronchite plastique avec le croup, et l'avantagereconnu du
traite-ment
parles caustiques de cette dernière affection,nous nous demandons
si
maintenant qu'on
ades appareils à inhalation si perfectionnés, les ins- pirationsde vapeurs caustiquesne
pourraient pasrendre des servicesim-
portantsen modifiant directementlesmuqueuses
?— 24 —
GONGLUSÎONS.
I.
— Le
plus souvent la bronchite plastique est le résultat del'hyper- trophie et de l'hyperplasie de l'épithéliumbronchique
antérieurement modifié dans saforme
parune
cause d'irritation.II.
— La
formation des cylindrestient àlanon-liquéfaction descellules épithéliales et à leurpeu
detendance
à là suppuration, ce en quoi elle diffère de labronchite ordinaire.III.
— Une
autre différence est lamoindre
exsudation vasculaireou
transudation séreuse,IV.
— La
maladie est d'autant plus graveque
les cylindres se forment plus rapidement, s'étendent davantage et se détachentplus difficilement.V.
—
Lessymptômes ou
laphysiologiepathologique setire directement dela présence desbouchons
dans les bronches.VI.
— Le
diagnosticse fondeuniquement
sur la présence des cylindresdans
les crachats.VII.
— Le
pronosticdépend
dela nature, de l'étendue et de l'épaisseur des cylindres.VIII.
—
Lesindicationsthérapeutiquesserésument
à obtenirle décolle-ment
des cylindres, leur expulsion et la modification des surfaces.Vu
parlePrésidentde la thèse, Strasbourg, le 28décembre 18G5,MICHEL.
Permis d'imprimer, Strasbourg, le28 décembre 1865,
Le Recteur, DRLCASSO.
QUESTIONS
POSÉES PAR LA FACULTÉ ET TIRÉES AU SORT, EN VERTU DE l'aUUÈTÉ DU CONSEIL DE l'instruction PUBLIQUE DU
22
MARS1842.
1.
Analomie. — Des
replisformés
par le péritoine.2.
Anatomie
pathologique.— De
laprésence de
l'airdans
diversorganes
etde son
effet sur l'économie.5. Physiologie.
—
Propriétés et fonctionsdu nerf pneumo-
gastrique et
de son
influencesur
la voix.4. Physique médicale.
— De
la compressibilité des tissus et des corps organisés. Effets physiologiques, pathologiques et thérapeutiques produitspar
descompressions.
5.
Médecine
légale.—
Faireconnaître
la législation et les quos-, lions médico-légales relatives à la grossesse.Indiquer
les règles à suivredans
les expertises auxquelles la grossessedonne
lieu.6.
Accouchements. —
Quelles sont les différentes espècesde
tra is-formations que
le fœtus peut subirdans
le seinde
lamère
lorsd'une
grossesse extra-utérine?7. Histoire naturelle médicale.
— De
la falsilication des huiles volatiles.8.
Chimie
et Toxicologie.— Des eaux minérales
: classification, caractère.9. Pathologie et Clinique externes.
— Exposer
lesphénomènes
successifs
de
laformation du
cal.10. Pathologie et Clinique internes.