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Anesthésie pédiatrique et infection des voies respiratoires

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Texte intégral

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M. Malisse W. Habre

introduction

Planifier ou non l’opération d’un enfant atteint d’infection des voies respiratoires supérieures (IVRS) reste un dilemme d’au- tant qu’annuler une opération implique des conséquences émotionnelles, sociales et économiques non négligeables pour l’enfant, son milieu parental et l’hôpital. Cet article permettra de revoir quelques recommandations basées sur l’évidence pour aider à la prise de décision en pra- tique quotidienne.1

L’IVRS est un terme non spécifique, utilisé en pratique clinique pour décrire les infections aiguës de la sphère ORL. Ces infections sont une grande cause de morbidité aiguë chez l’enfant, notamment en âge préscolaire, et la prévalence est très élevée dans le monde.2 Elles sont également une indication très fréquente pour la prescription d’un traitement antibiotique au cabinet médical.

La majorité des IVRS sont d’origine virale (30-40%), à savoir rhinovirus, coro- navirus, virus respiratoire syncytial (VRS),3 virus para-influenza. Néanmoins, des symptômes d’IVRS sont également observés, en l’absence d’infection, dans les cas de rhinite allergique ou vasomotrice ainsi que chez des enfants avec dé- faillance cardiaque congestive.

Les complications survenant dans la période périopératoire chez l’enfant avec IVRS récente (l 1 mois) sont essentiellement respiratoires, avec comme consé- quence la survenue d’une hypoxémie pouvant être de gravité variable. Cette hy- poxémie peut déjà être présente surtout en cas d’atteinte des voies respiratoires inférieures avec anomalie de la fonction pulmonaire (chute CVF, VEMS, VE1 et DLCO), augmentation des sécrétions bronchiques et présence d’atélectasies.

L’anesthésie est un facteur aggravant du fait des changements de la fonction pul- monaire induits par la sédation (diminution de la capacité résiduelle fonction- nelle (CRF), augmentation du shunt intrapulmonaire). L’hyperréactivité bronchique accompagnant les IVRS augmente également le risque d’obstruction des voies aériennes supérieures (laryngospasme) et inférieures (bronchospasme).4,5

physiopathologie del

hyperréactivitébronchique

Lors d’une IVRS, il se produit une invasion de la muqueuse respiratoire par les virus, rendant les voies respiratoires sensibles aux sécrétions et aux gaz anesthé- Paediatric anaesthesia and upper respira­

tory tract infections

Surgery and anaesthesia of the respiratory ill children were in the past systematically post- poned till complete disappearance of symp- toms. We’ll pay more attention about this.

According to latest data children with upper respiratory tract infections are at increased risk for postoperative complications till 6 weeks after the disease. Respiratory events in these children are increased after general anaesthe- sia but there is little residual morbidity ob- served.

Cancellation of the surgery involves important emotional, social and economic consequen- ces for the child, his parents and the hospital.

Any well defined consensus doesn’t exist. The anaesthetic management of any children with upper respiratory tract infection is a real chal- lenge and must be made on a case by case.

We’ll try to review some evidence-based gui- delines for decision making in daily practise.

Rev Med Suisse 2010 ; 6 : 380-3

Par le passé, l’anesthésie d’un enfant avec infection des voies respiratoires supérieures (IVRS) en vue d’un acte chirurgical ou diagnostique était d’emblée reportée jusqu’à disparition complète des symptômes. Actuellement, le sujet mérite de se pencher plus précisément sur la question. Toutes les études cliniques ont bien souligné l’incidence plus élevée de compli­

cations respiratoires dans la période périopératoire et ce parfois jusqu’à six semaines après l’IVRS notamment à virus respira­

toire syncytial (VRS). Néanmoins, des données récentes permet­

tent de mieux stratifier le risque afin d’adapter ainsi la prise en charge anesthésique et anticiper la survenue de complications qui seront ainsi mieux reconnues et traitées.

Anesthésie pédiatrique

et infection des voies respiratoires

mise au point

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24 février 2010 Drs Marie Malisse et Walid Habre Hôpital des enfants – HUG 6, rue Willy Donzé 1205 Genève

Marie.Malisse@hcuge.ch Walid.Habre@hcuge.ch

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siques puissamment irritants, jouant de plus un rôle impor- tant dans la bronchoconstriction via des médiateurs chimi- ques et des réflexes neurologiques (composante vagale de la bronchoconstriction).5 De manière physiologique, la stimulation des récepteurs cholinergiques muscariniques (M2) au niveau des terminaisons nerveuses vagales inhibe la libération d’acétylcholine. A l’occasion d’une IVRS, les neu- raminidases virales inhibent les récepteurs M2, induisant une libération accrue d’acétylcholine, d’où bronchocons- triction. D’autres mécanismes entrent probablement dans le processus d’hyperréactivité induite par les virus. Les infec- tions virales augmentent par exemple la réponse du muscle lisse respiratoire aux tachykinines, neuropeptides dans les afférences vagales des fibres C des voies respiratoires, en- gendrant une contraction augmentée du muscle lisse.

facteursderisquedesurvenue decom

-

plicationsrespiratoirespériopératoires La qualification des parents de la présence d’une IVRS représente en elle-même un facteur important à prendre en considération. De plus, l’état général de l’enfant est le mieux évalué par les parents eux-mêmes et il peut aider à la prise décisionnelle.

On distingue les facteurs de risque 3 entre ceux qui sont liés à l’enfant, aux parents et enfin à l’anesthésie elle- même (tableau 1).

L’hyperréactivité bronchique peut persister jusqu’à six semaines après l’infection pour le VRS ou la bronchiolite.

Un délai de deux à quatre semaines pour les autres infec- tions semblerait être associé à un moindre risque.

attitudeetprise encharge

Il est important de bien distinguer un épisode infectieux d’un autre non infectieux.

Toute l’importance réside dans la détection de la pré- sence d’une IVRS, ainsi que dans la prise en considération et l’évaluation minutieuse de l’enfant en phase aiguë ou

de convalescence d’une IVRS, surtout si une intubation s’avère nécessaire.

Des parents étiquetant leur enfant d’«enrhumé» est un facteur primordial à prendre en considération.

La présence de fièvre (L 38,5°C), d’une dyspnée, d’ex- pectorations, d’une toux grasse, d’une congestion nasale, d’une léthargie, d’un wheezing, d’antécédent d’hyperréac- tivité bronchique sont prédictifs d’éléments respiratoires défavorables.

Toute IVRS doit alarmer l’anesthésiste afin qu’il adapte son plan anesthésique pour minimiser les risques au maxi- mum.

Pour les cas de procédures électives, il faut dans tous les cas exclure une atteinte respiratoire basse. Si l’auscul- tation pulmonaire s’avère anormale ainsi que la radiogra- phie du thorax, l’intervention sera reportée.

En cas d’urgence vraie, on procédera à l’acte chirurgical en tenant compte des risques inhérents à la procédure, les anticipant au maximum et au mieux.

Dans le cas particulier des petits patients ORL (adéno et/ou tonsillectomie), de manière générale infectés de façon chronique, et en l’absence de facteurs de gravité, on pro- cédera à l’intervention, seul moyen de mettre un terme au cercle vicieux infectieux.

Le système cardio-pulmonaire de l’enfant avec cardio- pathie congénitale devant subir une chirurgie correctrice ou palliative est compromis et peut l’être d’autant plus en- core par l’IVRS. Ces chez patients, l’IVRS peut être un facteur prédictif de la survenue d’une infection bactérienne post- opératoire et de complications multiples.9

Dans tous les cas, il est impératif de prémédiquer tous ces enfants avec un bêta 2-agoniste, type salbutamol en inhalation.4 Ceci a clairement démontré un rôle bénéfique sur l’hyperréactivité bronchique par diminution des résis- tances respiratoires et de l’incidence de bronchospasmes périopératoires chez ces enfants.

conclusion

En présence de symptômes d’IVRS non compliquée, c’est-à-dire en l’absence d’état fébrile, de sécrétions muco- purulentes, avec un enfant sans signes infectieux et par ailleurs en bon état général, on procédera à l’intervention.

En cas de symptômes modérés, l’anesthésie peut avoir lieu, de manière prudente sur argument d’anticipation et de traitement aisé des problèmes, et l’absence de séquel- les au long cours.

En présence de symptômes sévères comme des sécré- tions muco-purulentes, une toux grasse, une température supérieure à 38,5°C, une léthargie et des signes d’atteinte pulmonaire, il faut retarder prudemment l’intervention d’au moins deux à quatre semaines 8,10 ainsi qu’en cas d’infec- tion bactérienne qui doit faire l’objet d’un traitement anti- biotique. Le risque de complications respiratoires péri- opératoires semble alors diminué.

En cas d’infection établie à VRS ou de bronchiolite, l’hy- perréactivité bronchique est davantage prolongée et l’on attendra d’emblée six semaines.

Une telle décision n’est pas toujours facile à prendre compte tenu qu’un enfant avec peu de symptômes, mais

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Tableau 1. Facteurs de risque pour l’anesthésie pédiatrique

Enfant

• Tout enfant avec une histoire de prématurité (l 37 semaines) notamment dysplasie broncho-pulmonaire, de pathologie pulmonaire chronique (asthme, mucoviscidose, hypertension pulmonaire, ronfle- ment…)

• Présence d’un état fébrile supérieur ou égal à 38°C, d’une congestion nasale et/ou rhinorrhée colorée et épaisse, d’une toux grasse avec sécrétions purulentes, d’une otite (directement liée à une hyperréactivité bronchique)

• Les risques sont d’autant plus augmentés qu’il existe des signes témoignant d’une atteinte infectieuse basse : wheezing, présence d’une pneumonie…

Parents

• Environnement de tabagisme passif (un ou deux parents fumeurs)

• Histoire de terrain atopique présent chez les parents Anesthésie

• Anesthésie elle-même, liée à l’acte chirurgical : la nécessité d’instru- mentation des voies aériennes supérieures (intubation) ou procédure sur les voies aériennes inférieures (bronchoscopie) sont des facteurs primordiaux6-8

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devant subir une intervention nécessitant absolument une intubation, se situe entre les lignes de conduite à tenir. La balance risques-bénéfices doit être pesée à chaque fois et les décisions seront prises de manière multidisciplinaire lorsque nécessaire et au cas par cas. Seront également pris en compte la présence de symptômes ou non, l’âge de l’enfant, la notion d’urgence ou pas, les facteurs de comor- bidité, le type de chirurgie et la fréquence des infections respiratoires qui déterminent l’importance de l’hyperréac- tivité bronchique.

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Implications pratiques

L’enfant en bas âge, allant à la crèche ou à l’école, présente fréquemment une atteinte avec infection des voies respiratoi- res supérieures (IVRS), surtout en période hivernale Une chirurgie ORL (adénotonsillectomie) est très souvent indiquée chez ces petits patients «enrhumés» chroniquement Il est important de détecter l’IVRS, son stade, sa gravité, afin de décider raisonnablement si l’anesthésie et l’opération peuvent avoir lieu sans risque majoritairement accru. On choisira un plan anesthésique le plus adéquat possible, c’est-à-dire le moins invasif et stimulant pour les voies aériennes

En cas d’IVRS sévère, en dehors des situations urgentes, on préconisera un délai de deux à quatre semaines pour procé- der à l’intervention, six semaines en cas d’infection établie par le virus respiratoire syncytial ou de bronchiolite

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9 Malviya S, Voepel-Lewis T, Siewert M, et al. Risk factors for adverse postoperative outcomes in children presenting for cardiac surgery with upper respiratory tract infections. Anesthesiology 2003;98:628-32.

10 Berry FA. The child with a runny nose. In Berry FA, editor. Anesthetic management of difficult and routine pediatric patients. New York : Churchill Livingstone, 1990;267-83.

* à lire

** à lire absolument

Bibliographie

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