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Les enjeux éthiques des biens communs

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Les enjeux éthiques des biens communs

Proposition pour le numéro d’Éthique publique (http://ethiquepublique.revues.org) qui pourrait être mis en ligne le 17 octobre 2015.

Parution prévue (en ligne seulement, en libre accès immédiat) : Octobre 2015 Date limite pour soumettre un résumé de 150 mots: 5 mai 2015

Date limite pour remettre le texte : 31 juillet 2015

Envoyer le résumé à Florence.Piron@com.ulaval.ca et valerie.peugeot@vecam.org

Sous la responsabilité de Florence Piron, Université Laval et Valérie Peugeot, Orange Labs et Vecam, avec la collaboration de Hervé Le Crosnier, Frédéric Sultan, Alain Ambrosi, Michel Briand (Vecam)

Argument :

Les biens communs – à ne pas confondre avec le concept abstrait de bien commun – renvoient à une nouvelle manière de penser et de prendre soin des ressources qui n’appartiennent ni à un acteur privé (individu ou personne morale) ni à un acteur public (État, collectivité locale) et qui sont partagées et gérées par une communauté qui en définit les droits d’usage (droit d’accès, de partage, de circulation) (Bollier, 2014). Par exemple, l’entretien d’un jardin communautaire suit un protocole de partage des tâches qui est décidé par la communauté qui le gère et qui l’utilise. Parfois, les biens communs, qui sont aussi appelés « les communs », peuvent être le fruit d’un régime mixte, la puissance publique juridiquement propriétaire concédant les droits d’usages à une communauté; ou il s’agit d’usages communs sur des propriétés privées (ex. : le glanage).

Les communs peuvent être des ressources naturelles (forêts, eau, air, pâturages, minéraux, nappes phréatiques), des ressources matérielles (outils, technologies, bibliothèques, archives, musées) ou des ressources immatérielles (science, Internet, patrimoine culturel, langues). Dans le cas des ressources immatérielles comme la langue ou la culture, ces biens sont considérés comme non rivaux (leur usage par une personne ne prive pas d’autres personnes de cet usage) et non excluables (il est impossible d’empêcher une personne de faire usage de ce bien). Ces caractéristiques facilitent l’entrée de ces ressources dans un « régime de communs », sans être pour autant une condition nécessaire. Elles expliquent la place particulière occupée par le numérique qui, en changeant les conditions de circulation des savoirs et œuvres de l’esprit, participe massivement à l’émergence de nouveaux communs (Réseau francophone autour des biens communs, s. d.).

Ce ne sont pas les qualités propres d’une ressource qui en font un commun. Pour qu’il y ait commun, il faut qu’existe une communauté qui décide de s’auto-organiser pour placer cette ressource en bien commun, en gérer les conditions d’accès et la protéger contre les différents risques qui la menacent, notamment son appropriation par des acteurs du secteur privé. Ces risques sont désignés par le terme d’enclosure, en référence au mouvement de clôture des prés communaux en Angleterre et aux violences qui en découlèrent (Linebaugh 2009). Les sources d’enclosures peuvent être multiples : si la communauté n’arrive pas à protéger et à faire fructifier la ressource (par exemple, si les contributeurs de Wikipédia venaient à ne plus être assez nombreux pour assurer la qualité de l’information); si l’État autorise un acteur privé à prendre le contrôle exclusif sur un commun (par exemple, lorsqu’un musée interdit la photographie d’une toile dans le domaine public); si la puissance publique pousse des communautés à commercialiser les ressources en communs pour se financer (par exemple, la production scientifique).

La mobilisation, la participation citoyenne, l’innovation sociale, l’innovation juridique sont les atouts dont disposent les communautés pour développer et faire fructifier de nouveaux communs tout en s’opposant aux enclosures.

Cette façon de penser les ressources collectives en dehors du marché et de l’État se base sur la confiance dans la capacité de collectivités locales d’en prendre soin, de les protéger, au lieu de les spolier et de les exploiter pour augmenter les profits ou les avantages des individus. Les travaux d’Elinor Ostrom (Ostrom & Baechler, 2010) – en réponse au concept de « tragédie des biens communs » énoncé par Hardin (1968) – suggèrent en effet que des communautés de petite taille sont capables de s’organiser « pour limiter l’utilisation des ressources qui les entourent afin d’établir un équilibre entre leur bien-être et la capacité de préserver les ressources à long terme » (Tremblay- Pépin, 2013). En ce sens, la théorie des communs établit en même temps un nouveau système de valeurs que ce

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projet de numéro d’Éthique publique propose d’explorer, à travers des textes théoriques et des récits de pratiques.

Ces textes pourront répondre aux questions suivantes en choisissant comme terrain l'un ou l'autre des communs :

 Les pratiques entourant les biens communs depuis leur « renaissance » (Bollier, 2014) donnent-elles plutôt raison à cette confiance dans la capacité des petites communautés d’en prendre soin? Existe-t-il des pratiques exemplaires, pouvant servir d'inspiration? Quelles formes de gestion partagée des communs semblent être à la fois les plus respectueuses de cet idéal et les plus efficaces dans la protection du caractère commun des ressources? Quelles sont les valeurs à la source de ces formes d’organisation? Les expériences historiques de démocratie directe ont-elles une pertinence pour ce questionnement?

 Comment développer le souci de ce qui est partagé et commun dans des sociétés qui privilégient l’unité

« individu » depuis trois siècles? Par quels mots, quels outils, quelles activités déplacer le cœur de l'activité sociale de l'individu vers le réseau solidaire et coopérant? De quelle façon la coopération encourage-t-elle la production de communs? Comment le parti pris des communs est-il un facteur de développement pour un réseau? Comment renforcer cette nouvelle aspiration au vivre-ensemble dans des sociétés marquées par l’accroissement des inégalités et la compétition pour des ressources inégalement réparties?

 L’éthique des communs est aussi une forme de partage qui crée du lien social et peut favoriser le pouvoir d'agir et l'implication des personnes en difficulté sociale. Pourtant, la théorie de communs semble aujourd'hui peu intégrée par les acteurs du milieu communautaire ou de l’économie sociale. Quelles sont les initiatives relevant des communs dans le domaine du lien social et de l'insertion? Quelles sont les initiatives autour des communs qui concernent des groupes sociaux de personnes en difficulté? Comment favoriser une participation aux communs et une implication qui rejoignent d'autres formes de solidarités?

 Comment l’expérience des communs locaux est-elle déclinée pour la gestion des communs de grande taille, déterritorialisés le cas échéant? Quel type de communauté à la capacité de prendre en charge les communs universels ou globaux pour les ressources naturelles? Quelle filiation existe-t-il entre la gestion des communs naturels, par essence rivaux, et les communs numériques?

 La puissance publique peut-elle être le garant, le partenaire des communs et, si oui, à quelles conditions? Si au contraire l’État abandonne la gestion des biens communs aux communautés, quels sont les champs d’actions et responsabilités spécifiques qui lui incombent en propre? Que nous dit le mouvement des communs sur l'État-providence et la Big society britannique de l’autre?

 En quoi les pratiques actuelles de gestion des communs sont-elles équitables? Participatives? Durables?

 Quelles sont les expériences de communs qui n'ont pas fonctionné? Pourquoi?

Ce numéro d’Éthique publique accueillera autant des articles universitaires que des analyses faites par des praticiens et praticiennes, tout en visant la parité de femmes et d'hommes. Les articles s’attacheront à aborder ces questions sous l’angle de l’éthique et des valeurs, tant des individus participants que des communautés, et de la relation entre cette éthique et les droits de propriété, y compris collective.

Références bibliographiques :

Bollier, D. (2014). La renaissance des communs : Pour une société de coopération et de partage. Paris, Charles Leopold Mayer éditions.

Hardin, G. (1968). La Tragédie des Communaux (traduction). Consulté 23 janvier 2015, à l’adresse http://lanredec.free.fr/polis/art_tragedy_of_the_commons_tr.html

Le Crosnier, H., Une introduction aux communs de la connaissance Recueil d'articles, Livre numérique EPUB, C&F éd., 2015.

Linebaugh Peter, The Magna Carta Manifesto - Liberties and Commons For All, University of California Press, 2009

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Ostrom, E., & Baechler, R. scientifique : L. (2010). La gouvernance des biens communs : Pour une nouvelle approche des ressources naturelles (Édition : 1.). Bruxelles, Commission Universite Palais.

Réseau francophone autour des biens communs. (s. d.). Les (biens) communs - Contours et repères. Texte complet consulté à l’adresse : http://fr.slideshare.net/VEBC/contours-et. Version résumée en diaporama. Consulté à l’adresse http://fr.slideshare.net/VEBC/biens-communs?related=1

Tremblay-Pépin, S. (2013, juillet 8). Qu’est-ce que la tragédie des biens communs? Consulté à l’adresse http://iris- recherche.qc.ca/blogue/quest-ce-que-la-tragedie-des-biens-communs

Vecam (coord.), Libres savoirs : les biens communs de la connaissance. Produire collectivement, partager et diffuser les connaissances au XXIe siècle, C&F éd., 2011, 351 p.

Résumé

Les biens communs – à ne pas confondre avec le concept abstrait de bien commun – renvoient à une nouvelle manière de penser et de prendre soin des ressources qui n’appartiennent ni à un acteur privé (individu ou personne morale) ni à un acteur public (État, collectivité locale) et qui sont partagées et gérées par une communauté qui en définit les droits d’usage (droit d’accès, de partage, de circulation). Parfois, les biens communs, qui sont aussi appelés « les communs », peuvent être le fruit d’un régime mixte, la puissance publique juridiquement propriétaire concédant les droits d’usages à une communauté; ou il s’agit d’usages communs sur des propriétés privées (ex. : le glanage). Ce numéro d’Éthique publique accueillera autant des articles universitaires que des analyses faites par des praticiens et praticiennes, tout en visant la parité de femmes et d'hommes. Les articles s’attacheront à aborder ces questions sous l’angle de l’éthique et des valeurs, tant des individus participants que des communautés, et de la relation entre cette éthique et les droits de propriété, y compris collective.

Démarche qualité de la revue

Avant publication, tout article fait obligatoirement l’objet d’une double évaluation par les pairs, lesquels évaluent son acceptabilité. En cas de controverse sur un article ou sur une partie d’un article, l’auteur est avisé et est invité à modifier sa communication à la lumière des commentaires des évaluateurs. Le comité de direction de la revue peut refuser un article s’il ne répond pas aux normes minimales d’article scientifique ou s’il n’est pas en lien avec la thématique choisie.

Modalités de soumission

Les chercheurs désireux de publier un article doivent faire parvenir une proposition d’article aux responsables scientifiques du numéro (adresses ci-dessus) et au secrétariat de rédaction de la revue ethiquepublique@enap.ca. Les propositions d’article doivent compter de 250 à 300 mots.

Le comité de direction de la revue fera part de sa décision dans les quinze jours suivant la date limite de remise des propositions. Les auteurs dont la proposition aura été retenue pourront envoyer leur article complet. Les articles doivent compter un maximum de 40 000 caractères (espaces et bibliographie comprises) et inclure un résumé d’environ 120 mots de même qu’une bibliographie complète. Le résumé sera publié en français et en anglais.

Les articles complets remis seront ensuite soumis à une double évaluation par les pairs (le processus est anonyme).

Après l’évaluation, des modifications peuvent être demandées aux auteurs si l’article est accepté.

Comité de rédaction

Christian Arnsperger (Université catholique de Louvain), Luc Bégin (Université Laval), Ryoa Chung (Université de Montréal), Didier Froidevaux (directeur des études de la police cantonale de Genève), Diane Girard (consultante), Steve Jacob (Université Laval), André Lacroix (Université de Sherbrooke), Jean-Marc Larouche (Université du Québec à Montréal), Georges A. Legault (Université de Sherbrooke), Denis Mûller (Université de Lausanne), Florence Piron (Université Laval), Fernand Harvey (chaire Fernand-Dumont - INRS), Franz Schultheis (Université de Neuchâtel), Martine Xiberras (Université Paul-Valéry, Montpellier)

Comité scientifique

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Claude Corbo (Université du Québec à Montréal), Robert E. Goodin (Australian National University), Guy Laforest (Université Laval), Frédéric Lesemann (INRS), Louise Melançon (Université de Sherbrooke), Patrice Ouellet (Bureau de dévelop¬pement économique du Canada), Jacques Racine (Université Laval), Guy Rocher (Université de Montréal), Pierre Rosanvallon (École des hautes études en sciences sociales), Charles Taylor (Université McGill), Louise Vandelac (Université du Québec à Montréal), Philippe Van Parijs (chaire Hoover de l'Université de Louvain- la-Neuve), Johan Verstraeten (Université de Leuven)

Références

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