• Aucun résultat trouvé

Thérapies ciblées en oncologie digestive

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Thérapies ciblées en oncologie digestive"

Copied!
5
0
0

Texte intégral

(1)

M.-L. Amram D. A. Benamran A. D. Roth

introduction

Le terme de «thérapie ciblée» est utilisé pour désigner cer- taines des nouvelles molécules, disponibles entre autres dans l’arsenal thérapeutique oncologique, qui interfèrent de façon relativement ciblée avec la biologie cellulaire. Ces molécules, développées grâce à notre connaissance toujours plus fine de la signalétique cellulaire des tumeurs, se sont ajoutées et intégrées aux chimiothérapies conventionnelles. Parmi elles, on trouve des substances qui agissent à l’extérieur de la cellule cancéreuse (des anti corps monoclonaux reconnaissables à leur suffixe «–mab») et d’autres qui agissent au sein même de la cellule (les petites molécules en «–inib») Leur mé- canisme d’action, de même que leur mode d’administration simplifié et leur profil d’effets secondaires en ont fait des thérapies rapidement adoptées ; cet article détaillera l’utilisation de certaines de ces molécules en oncologie digestive.

agir auniveaumoléculaire

:

lesvoiesdesignalisation intracellulaire

Au niveau cellulaire, plusieurs voies de signalisation régulent la prolifération, la migration et la différenciation des différents types cellulaires. Dans une cellule saine, ces voies de signalisation sont hautement régulées par l’environnement intra et extracellulaire, et leur activation ne peut se faire que dans des conditions très précises ; c’est en général la liaison d’un ligand extracellulaire à un récepteur membranaire qui les active. Dans la cellule tumorale, cette régulation est altérée.

Par exemple, certaines mutations peuvent aboutir à une activité spontanée du ré- cepteur, fut-ce en l’absence de son ligand ; de même, il est possible qu’une cel- lule cancéreuse surexprime directement le ligand responsable de l’activation de sa voie de prolifération.

Ces voies de signalisation représentent les cibles thérapeutiques des traite- ments ciblés. Schématiquement, les anticorps (AC) monoclonaux empêchent l’inter- action d’un ligand avec son récepteur (en se liant au ligand ou en bloquant direc- Targeted therapies in digestive oncology

Targeted therapies are relatively new mole- cules available for the oncologist. These drugs target a specific step of the cellular develop- ment and interfere with the intracellular signa- lization pathways. Amongst all others, EGF- and VEGF-pathways are currently targeted by these selective therapies. Modulating EGF and VEGF significantly improves overall sur- vival and progression-free survival for many advanced or metastatic tumors as colorectal cancer, gastric cancer, gastrointestinal stromal tumors or hepatocellular carcinoma. Targeted therapies have a specific action site, a simple administration mode and are relatively well tolerated. In the future these molecules will probably be used «à la carte» for tumors that appear to be refractory to other drugs.

Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 1131-6

Les thérapies ciblées désignent de nouvelles molécules ré­

cemment disponibles pour l’oncologue. Ces médicaments ont une action ciblée à une étape du développement cellulaire et interférent avec la signalisation intracellulaire. Les voies de si­

gnalisation de l’epidermal growth factor (EGF) et du vasculo­

endothelial growth factor (VEGF) sont aujourd’hui les cibles thérapeutiques les plus utilisées. Leur modulation par des thé­

rapies ciblées permet d’obtenir des résultats significatifs en termes de survie globale ou de survie sans progression dans de nombreux cancers digestifs avancés ou métastatiques, comme le cancer colorectal, le cancer gastrique, les tumeurs stroma les gastro­intestinales ou le carcinome hépatocellulaire. Grâce à leur mode d’action spécifique, à leur administration aisée et à leur bonne tolérance, ils seront probablement à l’avenir des armes de choix pour un traitement «à la carte» de pathologies jusqu’ici réfractaires.

Thérapies ciblées en oncologie digestive

synthèse

Drs Marie-Laure Amram et Arnaud D. Roth Service d’oncologie Dr Daniel A. Benamran Département de chirurgie HUG, 1211 Genève 14 Marie-Laure.Amram@hcuge.ch

Revue Médicale Suisse

www.revmed.ch

25 mai 2011

1131

(2)

tement le récepteur) et donc l’activation de la cascade de signalisation en aval de ce dernier. Les petites molécules telles que les inhibiteurs de la tyrosine kinase (TKI) quant à elles exercent leur effet à l’intérieur de la cellule, en blo- quant directement les voies de signalisation du récepteur.

De façon imagée, on peut considérer qu’elles grippent

«l’arbre de transmission» du signal.

En oncologie digestive, en 2011, ce sont principalement deux voies qui sont ciblées par les AC et les TKI dispo- nibles : celle de l’epidermal growth factor (EGF) d’une part, et celle du vasculoendothelial growth factor (VEGF) d’autre part.

Ces deux voies ainsi que les molécules interférant avec elles seront décrites en détail plus loin. Ces molécules, leur cible thérapeutique et les indications cliniques sont résumées dans le tableau 1. Mentionnons également une protéine ki- nase, impliquée dans la croissance, la prolifération et la survie cellulaire, appelée mammalian target of rapamycin (mTOR), dont certains inhibiteurs trouvent désormais leur place en oncologie digestive.

Voie de l’epidermal growth factor

L’EGF fait partie d’une famille de facteurs de croissance impliqués dans le développement et le fonctionnement normal de différents organes. Quatre récepteurs membra- naires ubiquitaires appelés ErbB ou HER régulent l’action de l’EGF. Sans eux, le développement normal des struc- tures épithéliales de la peau, du poumon, du pancréas, du tractus gastro-intestinal ou du SNC (système nerveux cen- tral) ne saurait se faire ; à l’inverse, des surexpressions de ces récepteurs sont notamment présentes dans les cancers du sein, de l’estomac ou du côlon. La liaison de l’EGF à son récepteur induit – via une activité tyrosine kinase intrin- sèque au récepteur – une riche voie de signalisation intra- cellulaire et une prolifération cellulaire (figure 1). Plusieurs mutations peuvent induire la suractivité de la voie de

l’EGF, comme par exemple la surexpression de l’EGFR à la surface de la cellule, la surexpression de son ligand par la cellule cancéreuse ou encore l’activité spontanée du ré- cepteur en l’absence du ligand.

Les AC monoclonaux comme le cétuximab (Erbitux) et le panitumumab (Vectibix) s’attachent au domaine extra- cellulaire du récepteur à l’EGF et empêchent ainsi la liai- son du ligand ; ils se lient sélectivement au récepteur HER1 (appelé EGFR) et occluent le site de liaison naturel de l’EGF.1 Ils préviennent donc la prolifération cellulaire et in- duisent également une internalisation et une sous-expres-

Agents thérapeutiques Cibles thérapeutiques Indications en oncologie digestive Effets secondaires les plus fréquents Cétuximab (Erbitux) EGFR Cancer colorectal métastatique, Réactions cutanées

à l’étude : cancer du pancréas

Panitumumab (Vectibix) EGFR Cancer colorectal métastatique Réactions cutanées

Trastuzumab (Herceptin) HER2 Cancer gastrique localement avancé Cardiotoxicité, réactions immunoallergiques ou métastatique

Erlotinib (Tarceva) EGFR tyrosine kinase Cancer du pancréas (non approuvé Fatigue, maux de tête, troubles gastro-intestinaux,

par Swissmedic) éruption cutanée

Lapatinib (Tyverb) EGFR et HER2 tyrosine A l’étude : cancer gastrique Cardiotoxicité, anorexie, symptômes gastro-

kinase intestinaux

Bévacizumab (Avastin) VEGF-A Cancer colorectal métastatique HTA, microangiopathie thrombotique, fatigue, diarrhée, nausées et douleurs abdominales Sorafénib (Nexavar) VEGFR et PDGFR tyrosine Carcinome hépatocellulaire Syndrome main-pied (érythrodysesthésie palmo-

kinase plantaire), rash

Sunitinib (Sutent) VEGFR, c-Kit et PDGFR A l’étude : cancer œosphagien, cancer Fatigue, troubles gastro-intestinaux, hypertension, tyrosine kinase colorectal métastatique neutropénie

Pazopanib (Votrient) VEGFR, c-Kit et PDGFR A l’étude : CHC, cancer neuro- Manque d’appétit, hypertension, diarrhée, nausées, tyrosine kinase endocrine avancé modifications de la couleur des cheveux et fatigue

Imatinib (Glivec) c-Kit, ABL et PDGFR GIST Nausées, vomissements, diarrhée, douleurs

tyrosine kinase abdominales, fatigue, myalgies

Tableau 1. Principales molécules dites de «thérapie ciblée» utilisées en oncologie digestive

VEGFR : Vascular endothelial growth factor receptor ; EGFR : récepteur HER1 ; GIST : Gastrointestinal stromal tumor ; CHC : carcinome hépatocellulaire ; HTA : hypertension artérielle ; PDGFR : Platelet-derived growth factor receptor ; ABL : Abelson murine leukemia.

Figure 1. Schéma simplifié de la cascade de signa- lisation des récepteurs tyrosine kinase à la surface d’une cellule cancéreuse

(Adaptée de Herbst et coll., N Engl J Med 2008).

EGFR : epidermal growth factor receptor ; VEGFR : vasculoendothelial growth factor receptor ; TK : tyrosine kinase.

HER2, c-KIT, autre récepteur à activité

tyrosine kinase

VEGFR EGFR

Transcription génique

Prolifération Invasion Métastatisation Résistance Angiogenèse à l’apoptose

Espace extracellulaire

Cytoplasme

Noyau

TK TK TK

(3)

sion de HER1. L’EGFR est fortement exprimé dans les ké- ratinocytes de la membrane basale de l’épiderme (à un moindre niveau dans les glandes eccrines et sébacées). Au niveau cutané, il a pour fonctions notamment de stimuler la prolifération des kératinocytes et d’assurer leur survie.

Ainsi donc, les thérapies anti-EGFR provoquent une toxicité cutanée, de façon systématique mais avec un aspect et une importance variables (rash, xérose, atteintes unguéales, at- teintes du follicule pileux, etc.). En clinique, leur effet se- condaire le plus fréquent est un rash acnéiforme (75% des cas). Ce rash limite rarement la poursuite du traitement aux doses habituelles et s’est même révélé être significative- ment corrélé avec la réponse au traitement.

Les autres effets secondaires des anti-EGFR incluent une asthénie, des céphalées, des troubles électrolytiques, une dysfonction thyroïdienne ou encore des diarrhées, des nausées ou des vomissements.

Récemment, le trastuzumab (Herceptin), déjà utilisé dans le cancer du sein HER2-positif, s’est également avéré effi- cace dans un sous-groupe de patients avec cancer gastri que exprimant HER2 (qui est un autre récepteur à l’EGF).

Voie du vasculoendothelial growth factor

La croissance des tumeurs solides est largement dépen- dante de son interaction avec son milieu environnant. Pour croître efficacement, une angiogenèse adéquate est requi- se ; en 1971 déjà, Folkman 2 émettait l’hypothèse selon la- quelle le passage d’une phase tumorale latente à une phase agressive était sous contrôle de substances diffusant de- puis la tumeur régulant la vascularisation. Depuis, plusieurs travaux ont révélé le rôle majeur du VEGF dans l’angio- genèse et son implication dans la croissance tumorale. Il existe en réalité une famille entière de VEGF, dont le prin- cipal est VEGF-A. Tout comme pour l’EGF, la liaison du VEGF à son récepteur induit une activité de la tyrosine ki- nase et une cascade de signalisation intracellulaire (figure 1) ; en revanche, sa finalité n’est pas la croissance cellulaire tu- morale mais la stimulation de l’angiogenèse par l’augmen- tation de la perméabilité vasculaire et la prolifération des cellules endothéliales.3

De nombreuses molécules agissent sur la voie du VEGF.

Parmi elles, le bévacizumab (Avastin) est le premier AC ap- prouvé comme thérapie ciblée des tumeurs solides. Il cible spécifiquement le VEGF-A (ligand se trouvant dans le mi- lieu extracellulaire), l’empêchant ainsi de se lier à son ré- cepteur sur les cellules endothéliales ; il réduit ainsi la vas- cularisation des tumeurs et leur croissance. Il s’est montré efficace en association à divers régimes de chimiothérapie en améliorant la survie globale de nombreuses tumeurs soli- des. Si ses effets secondaires dangereux sont rares, l’hyper- tension peut tout de même toucher un patient sur cinq (par inhibition de la production d’oxyde nitrique et de pros- tacycline, deux vasodilatateurs, et par raréfication des petits vaisseaux) ; le risque de saignement, de microangiopathie thrombotique, de perforation digestive ou d’infection existe aussi, de même qu’une asthénie, une fièvre, des arthralgies ou des troubles gastro-intestinaux. Signalons encore que le bévacizumab peut compromettre le processus de cicatrisa- tion, ce qui nécessite en pratique son instauration au plus tôt 28 jours après une intervention chirurgicale majeure ou

au contraire son interruption au minimum six semaines avant une chirurgie élective.

Les différents récepteurs cellulaires transmembranaires utilisent différentes TK dans leurs voies de signalisation au noyau. Les TKI ont en commun de bloquer les TK mais leur spectre d’action dépend des différentes affinités de cha- cune de ces molécules. En d’autres termes, une TKI don- née pourra avoir une grande affinité dans la voie de signa- lisation de l’EGFR alors qu’une autre bloquera de façon préférentielle une autre voie. Le spectre d’activité des TK est probablement à l’origine des différentes indications de chacune de ses molécules ainsi que de leur toxicité res- pective. Citons le sorafénib (Nexavar), l’imatinib (Glivec), le sunitinib (Sutent).

Mentionnons également l’évérolimus (Afinitor), qui est un inhibiteur de mTOR influant négativement, non seule- ment sur la prolifération de la cellule tumorale mais aussi sur celle de son milieu environnant.

applications cliniques

Cancer colorectal

Le cancer colorectal métastatique (mCRC) est l’un des can- cers digestifs dont les options de traitement ont considé- rablement changé avec les thérapies ciblées. En l’absence de traitement, le taux de survie est malheureusement infé- rieur à douze mois. Pendant plusieurs décennies, le régime standard composé notamment de 5-FU associé au Leuco- vorin était la seule option efficace avec une survie médiane de dix-huit mois.4 Aujourd’hui, les AC ont fait leurs preuves 5 et plusieurs d’entre eux sont utilisés ; le bévacizumab est désormais utilisé en adjonction aux schémas classiques pour le traitement de première ou de deuxième ligne du mCRC, avec des bénéfices intéressants en termes de réponse cli- nique (jusqu’à 45%) d’overall survival (OS, jus qu’à vingt mois) et de progression free survival (PFS, jusqu’à onze mois).6 Les AC ciblant la voie de l’EGF sont également utilisés, à con- dition que les patients portent un gène KRAS sauvage. En effet, il a été découvert que les patients porteurs d’une mu- tation dans le gène KRAS (30 à 40%) 7 ne répondent pas au traitement anti-EGFR.8,9 Le status KRAS est donc un facteur prédictif négatif de réponse au traitement ; la recherche de la mutation est systématique chez les patients candidats à une thérapie par AC anti-EGFR. L’étude CRYSTAL a conclu à une augmentation significative de la PFS (34% de survie à un an) avec un taux de réponses cliniques de 47% chez les patients recevant du cétuximab en plus du régime stan- dard en première ligne ; l’étude PRIME, quant à elle, a dé- montré une augmentation de l’OS d’environ quatre mois lors de l’adjonction du panitumumab à la chimiothérapie conventionnelle en première ligne (en seconde ligne, en revanche, le panitumumab n’augmente pas l’OS).

A noter que le blocage simultané des deux voies EGF et VEGF n’apporte aucun bénéfice, d’où leur utilisation dans des lignes de traitement séquentielles.

Cancer gastrique et de la jonction gastro-œsophagienne

Le cancer gastrique métastatique est généralement as- socié avec un pronostic sombre ; la survie médiane après

1134

Revue Médicale Suisse

www.revmed.ch

25 mai 2011

(4)

diagnostic est environ de dix mois. De même que dans le cancer du sein, environ 25% des adénocarcinomes gastri- ques ou de la jonction gastro-œsophagienne (JGO) (princi- palement les types intestinaux) surexpriment le récepteur HER2. A ce titre, le trastuzumab est désormais utilisé avec succès chez les patients HER2 positifs10 (selon le marquage effectué sur les biopsies ou les spécimens réséqués). L’étu- de de phase III ToGA11 a en effet démontré un taux de répon- ses supérieur (47 vs 35%) et une OS médiane prolongée (13,8 vs 11,1 mois) par l’usage du trastuzumab en combinai- son avec la chimiothérapie traditionnelle à base de 5-FU et cisplatine pour les cancers avancés. Le lapatinib, inhibi- teur de l’EGFR comme d’HER2, déjà utilisé avec succès dans le cancer du sein, est à l’étude pour les cancers gas- triques non traités. Les agents ciblant l’angiogenèse sont également étudiés, mais aucun d’entre eux, AC ou TKI, n’a encore montré d’efficacité dans le cancer gastrique.

Carcinome hépatocellulaire

Quarante pour cent des patients sont éligibles pour un traitement potentiellement curatif (résection, ablation locale ou transplantation hépatique) et 20% pour une chi mio em bo- lisation. Cependant, pour les patients porteurs d’un carci- nome hépatocellulaire (CHC) avancé auxquels ces options ne s’appliquent pas, il manquait jusqu’à récemment une op tion de traitement systémique. L’étude européenne de phase III SHARP12 a démontré la supériorité du sorafénib par rapport à un placebo en monothérapie en termes d’OS (10,7 vs 7,9 mois). D’autres thérapies ciblées, comme le bé- vacizumab, le sunitinib ou le cétuximab sont en cours d’in- vestigations.

Tumeurs stromales gastro-intestinales

Les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) sont les tumeurs mésenchymateuses les plus fréquentes du tube digestif et forment le modèle exemplaire du succès des thérapies ciblées. En effet, l’immense majorité des GIST surexpriment l’antigène CD117, une protéine composant le récepteur à activité tyrosine-kinase c-Kit. L’imatinib, initia- lement utilisé pour contrer l’effet de la protéine abl de la leucémie myéloïde chronique, inhibe également l’activité de c-Kit. Grâce à lui, la médiane de survie des patients por- teurs d’un GIST avancé a progressé de 17 à 58 mois.13 Pour les patients réfractaires, le sunitinib est le traitement de seconde intention.

Tumeurs neuroendocrines

Tout récemment, deux études publiées dans le New En- gland Journal of Medicine ont démontré l’efficacité du suniti- nib14 et de l’évérolimus15 dans le traitement des tumeurs neuroendocrines (TNE) pancréatiques avancées, avec un gain de PFS d’environ six mois. Ces deux médicaments se- ront très probablement enregistrés dans cette indication dans les mois à venir.

Cancer du pancréas exocrine

Deux études randomisées testant l’efficacité du bévaci- zumab d’une part, et du cétuximab d’autre part, n’ont pas réussi à démontrer un bénéfice de ces deux AC dans le traitement du pancréas exocrine. Une étude canadienne

de phase III16 a montré un gain de survie médian de deux semaines par l’adjonction de l’erlotinib (Tarceva, un TKI ci- blant la transmission de l’EGFR) au traitement classique de gemcitabine. Même si cette étude est positive d’un point de vue purement statistique (IC 95% : 0,64 - 0,92 ; p = 0,004), la différence de deux semaines de survie n’a pas convaincu les autorités helvétiques, raison pour laquelle son indica- tion dans le traitement de première ligne du cancer pan- créatique avancé n’a pas été retenue.

mise engardeimportanteconcernant les inhibiteursde latyrosinekinase

La prudence est de mise lors de l’administration simul- tanée des inhibiteurs des tyrosines kinases et de certains médicaments. En voici les plus importants :

– inhibiteurs enzymatiques (augmentent les concentrations plasmatiques des TKI et donc la toxicité) : certains antifon- giques (kétoconazole, itraconazole), antibiotiques (cipro- floxacine, érythromycine, clarithromycine) ;

– inducteurs enzymatiques (diminuent les concentrations plasmatiques des TKI) : rifampicine, inhibiteurs de la pompe à protons (oméprazole), antagonistes H2 (ranitidine) ; – anticoagulants coumariniques : augmentations de l’INR avec risque d’hémorragies, avec dans certains cas, une is- sue fatale ;

– statines : augmentation du risque de myopathies.

conclusion

Les thérapies ciblées sont de plus en plus couramment utilisées en oncologie en raison de leur efficacité, y com- pris pour les tumeurs résistant à la chimiothérapie conven- tionnelle (cancer du rein, CHC). Elles représentent un for- midable espoir pour le patient comme pour l’oncologue ; il existe déjà des indicateurs prédictifs de réponse au traite- ment (status KRAS pour les AC anti-EGFR dans le cancer colorectal uniquement), et la validation de nouveaux mar- queurs de réponse permettra un véritable traitement «à la carte». Pour l’instant réservées aux situations avancées ou métastatiques, ces thérapies sont probablement appelées à jouer un rôle central plus général ; l’industrie pharmaceu- tique consent de gros efforts dans le développement de nouvelles thérapies ciblées et de nombreuses études res- tent à être conduites pour apprécier tout le potentiel thé- rapeutique de ces molécules.

Implications pratiques

Les thérapies ciblées sont de nouvelles options thérapeu- tiques pour les patients avec cancers digestifs avancés ou mé- tastatiques

Ces molécules inhibent la prolifération tumorale en modulant l’activité des facteurs de croissance de la tumeur

Elles améliorent la survie globale ou la survie sans progres- sion de nombreux cancers digestifs et sont généralement bien tolérées

Les études futures préciseront encore les indications de ces nouvelles molécules

>

>

>

>

(5)

1136

Revue Médicale Suisse

www.revmed.ch

25 mai 2011 1 ** Baselga J. The EGFR as a target for anticancer therapy – Focus on cetuximab. Eur J Cancer 2001;37 (Suppl. 4):16-22.

2 * Folkman J. Tumor angiogenesis : Therapeutic im- plications. N Engl J Med 1971;285:1182.

3 ** Schaleppi JM, Wood JM. Targeting vascular en- dothelial growth factor (VEGF) for anti-tumor therapy, by anti-VEGF neutralizing monoclonal antibodies or by VEGF receptor tyrosine-kinase inhibitors. Cancer Me- tastasis Rev 1999;18:473-81.

4 Modulation of fluorouracil by leucovorin in patients with advanced colorectal cancer : Evidence in terms of response rate. Advanced colorectal cancer meta-ana- lysis project. J Clin Oncol 1992;10:896-903.

5 * Cohen SJ, Meropol NJ. Targeting signal transduc- tion pathways in colorectal cancer-more than skin deep.

J Clin Oncol 2005;23:5374-85.

6 ** Hurwitz H, Fehrenbacher L, Novotny W, et al.

Bevacizumab plus irinotecan, fluorouracil, and leuco- vorin for metastatic colorectal cancer. N Engl J Med 2004;350:2335-42.

7 Andreyev HJ, Norman AR, Cunningham D, et al.

Kirsten ras mutations in patients with colorectal can- cer : The «RASCAL II» study. Br J Cancer 2001;85:692-6.

8 De Roock W, Piessevaux H, De Schutter J, et al.

KRAS wild-type state predicts survival and is associated to early radiological response in metastatic colo rectal cancer treated with cetuximab. Ann Oncol 2008;19:

508-15.

9 Di Fiore F, Blanchard F, Charbonnier F, et al. Clini- cal relevance of KRAS mutation detection in metastatic colorectal cancer treated by cetuximab plus chemo- therapy. Br J Cancer 2007;96:1166-9.

10 Okines AF, Cunningham D. Traztuzumab in gastric cancer. Eur J Cancer 2010;46:1949-59.

11 Bang YJ, Van Cutsem E, Feyereislova A, et al. Tras- tuzumab in combination with chemotherapy versus chemotherapy alone for treatment of HER2-positive advanced gastric or gastro-oesophageal junction cancer (ToGA) : A phase 3, open-label, randomised con trolled trial. Lancet 2010;376:687-97.

12 Llovet JM, Ricci S, Mazzaferro V, et al. Sorafenib in advanced hepatocellular carcinoma. N Engl J Med 2008;

359:378-90.

13 Blanke CD, Rankin C, Demetri GD, et al. Phase III randomized, intergroup trial assessing imatinib mesy- late at two dose levels in patients with unresectable or metastatic gastrointestinal stromal tumors expressing the kit receptor tyrosine kinase : S0033. J Clin Oncol 2008;26:626-32.

14 Raymond E, Dahan L, Raoul JL, et al. Sunitinib ma- late for the treatment of pancreatic neuroendocrine tumors. N Engl J Med 2011;364:501-13.

15 Yao JC, Shah MH, Ito T, et al. Everolimus for ad- vanced pancreatic neuroendocrine tumors. N Engl J Med 2011;364:514-23.

16 Moore MJ, Goldstein D, Hamm J, et al. Erlotinib plus gemcitabine compared with gemcitabine alone in patients with advanced pancreatic cancer : A phase III trial of the National cancer institute of Canada clinical trials group. J Clin Oncol 2007;25:1960-6.

* à lire

** à lire absolument

Bibliographie

Références

Documents relatifs

In this brief paper, taking as my starting point two introductions to collections of poems and short stories in Scots, I have outlined certain sociolinguistic questions which

La pratique de la sage-femme Néerlandaise de 1ère ligne permet une prise en charge optimale, dans le respect de la physiologie, de la grossesse et de l'accouchement à bas

(2003) A role of CXC chemokine ligand 12/stromal cell-derived factor-1/pre-B cell growth stimulating factor and its receptor CXCR4 in fetal and adult T cell development in

En effet, comme précédemment cité dans ce travail, les patients RAS wild-type atteints d’un cancer colorectal métastatique et traités par un anti-EGFR en

Concernant les autres membres de la famille des récepteurs à l’EGF, les thérapies ciblées anti-HER2 largement utilisées dans le traitement des cancers du sein

Ce dernier était le médicament utilisé, pendant 12 mois après le trastuzumab, dans l’étude de phase III ExteNET, conduite chez des patientes atteintes d’une tumeur HER2+, dont

Cependant, leur utilisation s’élargissant, leurs effets indésirables oculaires – initialement peu fréquents (ou rarement décrits) – sont maintenant mieux identifiés, et

Par exemple, sous évérolimus, on observe une hyper- glycémie chez 50 % des patients (contre 23 % dans le groupe placebo) dans l’étude RECORD-1 concernant le traitement du cancer