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Observations sur la presence de sols sodiques en Vaucluse
P. Gouny, B. Cabibel, Annie Lecocq
To cite this version:
P. Gouny, B. Cabibel, Annie Lecocq. Observations sur la presence de sols sodiques en Vaucluse.
Comptes Rendus de l’Académie d’Agriculture de France, Académie d’agriculture de France, 1968, 54
(3), pp.923-928. �hal-02730543�
Extrait du procès-verbal de la Séance du 16 Octobre 1968 pp. 923 à 928
OBSERVATIONS SUR LA PRÉSENCE DE SOLS SODIQUES EN VAUCLUSE par P. Gouny, B. Cabibel et A Lecocq (Note présentée par M. S. Hénin)
En divers points des plaines alluviales situées au carrefour des Vallées du Rhône et de la Durance, on rencontre parfois des sols présentant une salure non négligeable. L'origine de celle-ci est liée au mécanisme de mise en place des dépôts fluviatiles lors de la glaciation wurmienne. Le remblaiement a laissé subsister de légères dépressions occupées par des marais saumâtres ou des étangs d'eau douce et désignées sous le terme général de Paluds.
Ces dépressions peu à peu comblées par l'alluvionnement actuel ont été mises en culture à une époque récente. Les sols sont constitués essentiellement d'éléments calcaires à granu- lométrie très fine. Ils renferment un taux élevé de matière organique et sont faciles à travailler.
C'est principalement dans la zone de Paluds qui s'étend à l'est d'Ai. ignon depuis le Thor jusqu'à Bédarrides que les sols ont conservé la marque de leur imprégnation par les eaux saumâtres. La salure encore forte au siècle dernier lors de leur mise en culture, tend semble-t-il à diminuer, mais les années sèches les récoltes se trouvent encore compromises par des accidents salins. C'est ainsi qu'au cours de l'année 1967, on signalait de nombreux échecs sur les cultures annuel- les telles que menthe, glaïeul, carotte, oignon, laitue, etc.
Dans les zones les plus affectées le sol formait croûte en sur- face et laissait même apercevoir des efflorescences salines.
L'analyse de ces croûtes superficielles révélait des taux élevés de sels minéraux (SO, = 25 t — Cl = 21 L).
Ces faits sont bien connus localement et les agriculteurs redoutent particulièrement la sécheresse printanière. L'amé- lioration éventuelle de cette situation repose cependant sur une meilleure connaissance des phénomènes en jeu : consti- tution du sol, nature des sels, déplacement éventuel des sels dans le sol au cours des saisons.
— 924 —
Les observations dont il est fait état dans cette note ont été recueillies dans une exploitation située au centre de la zone palustre et ont été confirmées par des sondages effectués en divers autres points.*
10 — CONSTITUTION PHYSICO-CHIMIQUE DU SOL
L'examen du profil de sol montre entre 0 et 50 cm une formation grisâtre de texture limoneuse apparemment homo- gène. Au-dessous se trouve une formation blanchâtre très friable ou pulvérulente reposant à 2 m de profondeur sur le cailloutis durancien accumulé à l'époque wurmienne.
Les caractéristiques physico-chimiques essentielles de ces divers horizons sont données dans le tableau I qui fait appa- raître l'importance de la fraction granulométrique inférieure à 50 [2., la proportion considérable de carbonate de calcium, le taux de matière organique en surface supérieur à la moyenne régionale, le pH alcalin, la faible capacité d'échange, l'importance du magnésium et du sodium.
On notera enfin la capacité de rétention en eau particulière- ment élevée qui rend ces sols peu sensibles à la sécheresse.
Les agriculteurs considèrent l'irrigation comme superflue, mais ils deviennent ainsi tributaires des conditions clima- tiques.
TABLEAU I
CONSTITUTION PHYSICO-CHIMIQUE DU SOL
Granulométrie
HORIZON
0-10 cm 50-60 cm
Fraction < 2 u. 200 187
2-20 p. 385 465
20-50 p. 135 146
50-200 g 125 99
200-2 000 p. 58 42
Humidité équivalente % 33 37
Analyse chimique :
CO3Ca 807 918
pH 8,05 8,55
Matière organique 31 16
P,0 5 (Joret-Hébert) ppm 365 35
Capacité d'échange (me /100) 6,80 2,60
Potassium échangeable (me /100) 0,16 0,02
Magnésium échangeable (me /100) 3,60 1,76
Sodium échangeable (me /100) 0,36 0,08
(*) Nous remercions M. MAGNY, agriculteur au Thor, qui a bien voulu nous permettre de procéder sur sa propriété aux divers contrôles néces- saires.
2° — RÉPARTITION DES SELS SOLUBLES DANS LE PROFIL
Un premier examen portant sur la répartition des sels dans le profil effectué au cours de l'année 1967, a donné les résul- tats du tableau II. Ceux-ci montrent d'une part qu'il s'agit essentiellement des anions chlorure et sulfate associés avec les cations Na, Mg ou K, et d'autre part, que ces sels sont localisés dans la partie supérieure du profil. Les taux relevés dans la couche 0-30 cm sont au moins 10 fois supérieurs à ceux des couches plus profondes.
La concentration des sels dans la partie superficielle du sol est indiscutablement à l'origine des difficultés rencontrées actuellement par les agriculteurs dans la mise en place des cultures annuelles au printemps. Lorsque l'état d'humidité du sol correspond à la capacité de rétention en eau, on peut esti- mer la concentration de la solution de sol par NaC1 seul à plus de 16 g/1 dans l'horizon superficiel, concentration incom- patible avec le développement normal de la végétation. Par contre, l'absence de réserves de sels en profondeur constitue
TABLEAU II
RÉPARTITION DES SELS SOLUBLES DANS LE PROFIL
PROFON- DEURS
CONDUC- TIVITÉ EXTRAIT 1 /5 (mmitos /cm)
SO4 (mg /kg)
CI (mg /kg)
Na (mg /kg)
K (mg /kg)
Mg (mg /kg)
0-30 4,34 7 960 3 'cO0 1 970 185 325
30-60 0,27 858 75 75 11 225
60-90 0,18 549 18 35 11 23
90-120 0,13 377 29 22 Traces 16
120-150 0,10 308 23 18 Traces 12
150-180 0,11 308 35 18 Traces 11
180-210 0,11 307 35 18 Traces 12
un élément encourageant permettant d'entrevoir une solution technique aux difficultés actuelles.
3° — MOUVEMENT DES SELS SOLUBLES DANS LE SOL
Compte tenu des observations précédentes, il fut demandé à l'agriculteur de mettre en place lors de la campagne 68,
TENEUR EN 55M.
0 500 1003 1500
40
6
15 Sept. I5Nov.
2 0 ) SODIUM (Na)
3 Fev.
raphIque N°I: VARIATION SAISONNIERE DES TAUX DE CHLORE ET DE SODIUM
• 1000 2W0 3 )0 5
5Aout (0 Mars
co 5qo 00()r5,00 ok 50 1000 15.00
— 926 —
un dispositif d'irrigation sur l'une de ses parcelles afin d'exa- miner les possibilités de migration des sels en profondeur.
Des contrôles analytiques furent effectués sur l'ensemble du profil à intervalles variables en fonction des conditions pluvio- métriques.
Les conditions de sécheresse relative de l'année 1967 se poursuivirent jusqu'au 3 février 1968. A partir de cette date, les précipitations devinrent plus abondantes. Elles furent de 87 mm pour le mois de février et de 220 mm pour la période du Pr mars au 5 août, auxquelles viril ent s'ajouter 160 mm d'eau d'irrigation.
Une culture de carotte fut mise en place le 3 avril et récoltée le 15 août 1968.
3.1. les ions Cl et Na (gi aphique n° 1). — Du fait de leur grande mobilité, les ions Cl se sont déplacés dans le profil en fonction des mouvements de l'eau. Ils étaient pour l'essentiel localisés dans le niveau 0-30 cm au cours de l'été 1967. A partir
I.) CHLORE (CI)
TENEUR EN 55M
du mois de février, on assiste à leur migration dans les cou- ches plus profondes, tandis qu'ils sont pratiquement éliminés de la couche 0-30 cm. Le phénomène s'accentue ensuite.
Les ions Na bien que moins mobiles suivent une évolution sensiblement parallèle.
3.2. Les ions SQ. K. Mg. — Les ions SO, sont présents en quantités très élevées dans le niveau 0-30 où leur taux dépasse 7 p. mille. Au cours de l'année d'observations, on assiste à une légère migration en profondeur, mais l'ampleur de celle-ci demeure réduite.
Des observations de même sens peuvent être faites pour les ions K et Mg présents à l'état soluble en quantités sensibles dans le niveau 5-20 cm. La tendance à la migration vers la profondeur s'est également manifestée, mais avec une inten- sité très réduite surtout pour K.
40 — CONCLUSIONS
Les accidents culturaux parfois observés dans certains Paluds du Vaucluse, sont liés à la présence dans la partie la plus superficielle du sol, de quantités relativement impor- tantes de sels solubles, tandis que les couches profondes en sont pratiquement exemptes.
Ces sels sont constitués par des sulfates accompagnés de quantités importantes de chlorures. Les cations associés sont le potassium, le magnésium et surtout le sodium.
La fréquence d'apparition des accidents culturaux est irré- gulière du fait des mouvements verticaux que peuvent subir les sels solubles en fonction des conditions climatiques. Mais la présence de ces sels constitue en permanence un facteur limitant pour les rendements.
L'élimination des sulfates ne peut être envisagée à court terme. Par contre, celle des chlorures et du sodium ne semble pas poser de difficultés et constituerait une amélioration manifeste. L'absence de sels en profondeur devrait faciliter la recherche d'une solution technique. Les superficies ainsi polluées sont limitées à quelques milliers d'hectares, mais du fait de leur situation au centre d'une zone de production horticole intensive, elles méritent de retenir l'attention.
I.N.R.A. — Station d'Agronomie 84-Montfavet.
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE
(1) GEORGE (P.). — La région du Bas-Rhône, Baillère, Paris, 1935.