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L’étayage scientifique d’une intuition pédagogique, le cas de l’AFPA

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 1/9

L’é tayagé sciéntifiqué d’uné intuition pé dagogiqué, lé cas dé l’AFPA

C’est à partir de notre expérience professionnelle en tant de Manager Ingénierie & Formation et d’un travail d’analyse réflexive de la construction de l’identité professionnelle que nous proposons un article visant à mieux faire connaitre les pratiques des formateurs qui interviennent auprès des actifs peu qualifiés.

Nous nous interrogerons sur l’existence d’une ingénierie pédagogique spécifique liée aux niveaux de formation ou liée aux secteurs professionnels, voire aux métiers. Après avoir situé les fondements de nos principes pédagogiques, nous vérifierons nos pratiques à partir des analyses issues du chantier « Repères pédagogiques » conduit à l’AFPA par sa Direction de l’Ingénierie en 2014. Viendra alors le moment de prendre en compte les recherches dans le domaine des neurosciences ainsi que la mise en œuvre des modalités numériques pour refonder notre modèle à l’ère du numérique.

Enfin, nous proposerons une mise en lisibilité des processus pédagogiques à l’œuvre dans un modèle refondé de la pédagogie des métiers.

Les fondements du modèle historique.

L’AFPA fonde son modèle pédagogique sur l’analyse du travail (Pastré, 2002) dans un souci constant de la place de la personne dans l’activité professionnelle (Clot, 2010). L’AFPA œuvre à ce que la compétence professionnelle soit attachée à la personne et puisse s’exprimer dans la réalisation d’une activité professionnelle pérenne et évolutive. Le postulat est que le sens et la reconnaissance sont les leviers de la motivation et de l’engagement. Aujourd’hui, il s’actualise en référence à la question de l’utilité sociale et de la reconnaissance de la valeur de chacun.

Resituons nos principes pédagogiques :

L’activité de la personne est privilégiée et la personne est considérée dans sa totalité.

L’apprenant s’engage et se forme dans l’action, en réalisant une activité dans une mise en situation professionnelle et construit ses apprentissages lui-même, à partir de consignes pédagogiques, dans un travail en autonomie en s’appuyant sur ses raisons d'apprendre. Il apprend en interaction avec ses pairs car le collectif est source d’apprentissage (Carré, 2005), de réflexivité. La confrontation renforce les compétences relationnelles et comportementales et développe la réflexion pour améliorer ses acquis.

Le formateur, professionnel du métier et médiateur des apprentissages, organise et conduit son action sur la base de situations pédagogiques. Il s’adresse à tous les profils pédagogiques des personnes en combinant gestes professionnels métier et gestes mentaux (La Garanderie, 2013) de l’apprentissage dans une centration sur la compétence professionnelle et les savoirs d’action.

Le modèle pédagogique historique est ancré sur une démarche inductive des apprentissages. Dès le début des années 90, pour répondre aux enjeux de la professionnalisation, l’AFPA renforce l’individualisation des parcours dans une démarche pédagogique centrée sur le processus

« Apprendre » (Houssaye, 1988), pour favoriser les apprentissages durables des compétences

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 2/9 professionnelles (Le Boterf, 1998), par la réalisation d’activité (mise en situation professionnelle) dans une démarche réflexive. Nous clarifierons plus loin ce que nous entendons par modèle pédagogique « apprendre » et démarche pédagogique inductive.

2014, actualiser la « marque pédagogique AFPA»

Dans un environnement bousculé par la toute nouvelle réforme de la Formation Professionnelle et un contexte interne contraint, au moment d’actualiser notre positionnement professionnel pour réaffirmer notre identité professionnelle dans un marché ouvert, une question s’est posée « Qu’en est-il aujourd’hui sur le terrain des 200 centres de formation de l’Afpa ? ». L’enjeu est de savoir comment les formateurs dans leurs pratiques articulent les fondamentaux de la pédagogie. L’objectif est de réaffirmer les principes pédagogiques et mieux partager ce « capital expérientiel ». Nous présentons ci-après des éléments de 2 objectifs du chantier : recueillir des pratiques innovantes du terrain et connaître la corrélation ente la mise en œuvre avec l’énoncé de nos fondamentaux pédagogiques.

L’enquête terrain a été réalisée sous la forme d’entretiens avec les formateurs. Les entretiens ont été conduits de janvier à juillet 2014, auprès d’un échantillon de formateurs en charge d’actions de formation qualifiantes et certifiantes du niveau V au niveau III issus de 3 secteurs professionnels (Bâtiment, industrie, services). Un guide d’entretien a été élaboré et accompagné de quelques recommandations afin de privilégier une posture d’accueil et d’ouverture.

Une 1re vague des entretiens permet « de repérer les valeurs qui animent les formateurs et de donner des indications pour appréhender les grands principes sur lesquels ils fondent leur pédagogie… pouvant se résumer à « faire en sorte que le stagiaire agisse en professionnel ».

Concrètement, cela se traduit par une construction des apprentissages autour de situations de travail, qui développent l’autonomie, qui maintiennent l’intérêt des stagiaires, qui utilisent la dynamique du groupe pour renforcer les apprentissages et développer les compétences transverses essentielles dans l’exercice du métier. »

Lors de la 2

e

vague, pour analyser les verbatim, le groupe de travail, dans une co-construction itérative, élabore une grille des marqueurs pédagogiques pour caractériser les pratiques pédagogiques des formateurs enquêtés à travers la diversité à l’œuvre sur le terrain. Disposant du concept pragmatique « Marqueurs », dont la solidité s’avère au fil des analyses des entretiens, une synthèse s’en dégage. Les caractéristiques de ces marqueurs sont centrées sur 8 « thèmes » : méthodes et techniques pédagogiques, démarche pédagogique, situations de travail et métier, apprenant, collectif, modalités, numérique, organisation : « Apprendre avec et par les pairs, prendre en compte et s’appuyer sur les acquis expérientiels des stagiaires, faire un lien permanent avec le métier et construire une identité professionnelle, développer le sentiment de compétence de l’apprenant, diversifier les modalités et les méthodes, favoriser une pratique réflexive et l’auto- évaluation, prendre en compte les styles préférentiels d’apprentissage, s’appuyer sur le numérique ».

Une question vient « Pour faire face aux difficultés d’apprentissage des publics, comment font les

formateurs ? ». C’est dans les verbatim que les formateurs livrent leur savoir-faire, ils imaginent et

combinent des actions multiples pour faire face à chaque situation spécifique. « Se centrer sur les

stratégies d’apprentissage utilisées plus que sur le résultat obtenu. Amener le stagiaire à prendre

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 3/9 conscience de sa façon de procéder et à en faire une analyse critique. Organiser cette réflexion individuellement ou la partager avec le groupe, pour faciliter l’analyse des procédures et des erreurs éventuelles. Organiser des échanges entre pairs, faire reformuler par les apprenants.

Prendre en compte les styles d’apprentissage, diversifier les méthodes, les ressources. Construire de nouvelles ressources pédagogiques. Mettre à disposition des ressources complémentaires. Ouvrir les espaces de formation en dehors des horaires de formation pour permettre un travail complémentaire tenant compte des rythmes d’apprentissage de chacun. Décomposer l’objectif en objectifs intermédiaires. S’appuyer sur le collectif des formateurs et passer le relais à un autre formateur »

Il apparait rapidement que le mode d’animation participatif, centré sur des méthodes pédagogiques actives dans une démarche inductive, s’avère le plus fréquent, même si nous constatons la mise en œuvre de variantes notamment lorsque le champ technique porte un corpus technologique important. Le temps contraint (durée de formation compressée) amène des formateurs à entrer dans une démarche pédagogique moins active du point de vue de l’apprentissage en utilisant davantage des méthodes pédagogiques directives (magistrales et interrogatives).

L’analyse des verbatim et la synthèse des résultats semblent valider la pertinence et la persistance du modèle pédagogique. A travers les entretiens conduits se lisent les principaux fondamentaux et les

« marqueurs pédagogiques » valident le lien, entre les promesses et les pratiques pédagogiques.

Prendre en compte les apports des neurosciences

Après avoir mesuré la vivacité du modèle pédagogique à travers les pratiques professionnelles des formateurs, vient le moment d’aller à la rencontre des avancées des neurosciences à travers les recherches nouvellement disponibles en se posant une question « ces apports théoriques viennent- ils étayer les théories pragmatiques mises en œuvre par les formateurs de l’AFPA ? »

Stanislas Dehaene

1

propose aux pédagogues de retenir 4 piliers favorisant l’apprentissage :

« l’attention, l’engagement actif, le retour d’information, la consolidation ».

Jean-Philippe Lachaud (2013) démontre que notre cerveau sélectionne en permanence et mesure la valeur que l’on donne « aux choses, aux êtres » : déterminant pour comprendre comment capter l’attention. Selon lui, pour éviter des effets de diversion, l’attention est à canaliser et à orienter. Or, les habitudes et les émotions, « tels des vents violents », nous font dévier de notre cible pour revenir dans une zone de confort. Ce point intéresse les formateurs, soulignant l’importance de recentrer sur l’essentiel pour soutenir l’attention des apprenants dans une économie raisonnable de l’effort demandé. Le degré d’intégration des apprentissages est lié à la mobilisation de notre attention, de nos sens et perceptions par les activités.

De son côté, Philippe Revy, Professeur en sciences cognitives, dans son intervention 11

e

rencontre FFFOD (déc. 2013), propose de privilégier une démarche pédagogique inductive. Il souligne l’importance de partir des points forts d’une personne apprenante et de choisir une mise en situation pédagogique dans une juste tension des apprentissages à faire. Ce point est partagé par Lachaud qui souligne la difficulté à gérer des conflits motivationnels en faisant deux choses à la fois. La répétition

1 Conférence au Collège de France http://www.paristechreview.com/2013/11/07/apprentissage-neurosciences/

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 4/9 et la mémorisation nous dit-il permettent de fonctionner à l’économie grâce aux automatismes acquis, de gagner un bénéfice en terme d’effort.

Nous savons que la tension est nécessaire pour apprendre (Jobert, 2000), sans provoquer une trop grande sensation d’effort mental et des situations de stress, sinon les émotions viennent barrer nos capacités cognitives (Damasio, 1995). L’apprentissage oscille entre deux phases : contrainte et plaisir.

Le plaisir est notre moteur du long terme.

Nous ajouterons que le cycle peut alors recommencer lorsque les automatismes libèrent le cerveau pour de nouveaux apprentissages. En aidant la personne à situer l’utilité de l’activité en cours, le formateur oriente, canalise son attention et soutient son action. En revenant à plusieurs reprises sur une situation professionnelle (par le vécu, par l’analyse, par la compréhension, par le transfert) dans une progression des objectifs à atteindre, les savoirs professionnels s’ancrent dans la mémoire (cf Hermann Ebbinghaus).

Ces apports viennent consolider un modèle pédagogique empirique et éprouvé par l’expérience. La démarche pédagogique inductive (Kolb, 1984) prend en compte le cheminement naturel des circuits cérébraux pour faciliter « l’apprendre ». Elle privilégie une entrée partant de la sphère des représentations de l’hémisphère droit du cerveau (pratique, expérience, vécu, analogique) pour aller vers la conceptualisation située dans l’hémisphère gauche: expression, communication, concepts, stratégies (Chalvin, 1995).

L’impact du numérique sur notre modèle et nos pratiques pédagogiques.

Le numérique, compétence-clé indispensable à maîtriser au XXIe siècle, permet à chacun d’interconnecter son environnement professionnel et personnel. Toute formation doit permettre aux personnes en formation de faire l’expérience de se former à distance. La modalité de formation distancielle est à vivre dans une expérience concrète pour permettre à ce que l’acte d’apprendre puisse se poursuivre au-delà de la formation formelle, mettre en place la compétence à accéder aux savoirs, à donner vie au concept d’apprenance (Carré, 2005), dans un environnement numérique et développer en autonomie ses apprentissages dans un mouvement d’auto-, éco- et co-formation (Pineau, 1989).

L’intégration de ressources numériques (simulateur, serious games) et surtout la mise en œuvre de modalités distancielles en utilisant les apports du numériques ont été expérimentées sur différents dispositifs de formation et démontrent la souplesse de notre démarche pédagogique.

En effet, du point de vue de la pratique pédagogique du formateur, après un temps d’appropriation,

nous constatons que le numérique permet de renforcer davantage le lien et de la présence à l’autre

et de développer la relation pédagogique. Philippe Revy explique « en réglant des paramètres de

départ, par bienveillance, l’environnement numérique permet de recommencer plusieurs fois et

autant que nécessaire » donc de s’adapter aux besoins et aux rythmes de chacun. Davantage centré

sur la personne, le formateur, faciliteur et médiateur, porte son attention au développement des

personnes, il pose et tient le cadre pédagogique, articule les modalités (présentiel, distantiel), les

temps d’apprentissage encadrés/tutorés (collectifs et individuels) et intègre les temps d’auto-

formation.

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 5/9 Nous pouvons affirmer que le numérique est au service de la pédagogie et en facilite la mise en œuvre sans créer de renversement pédagogique. L’AFPA a entamé une révolution pédagogique dès 1989. Cette nouvelle démarche pédagogique est formalisée, dans un premier temps par un Colloque qui a donné lieu à une double publication (Jobert, 1989) (Courtois & Pineau 1991). Expérimentée, la démarche est déployée à l’interne, dans la collection « Carrée » (1992-1994).

Le chantier de 2014 a permis de faire l’état des lieux des modalités, méthodes et techniques pédagogiques en vue d’actualiser les fondamentaux des principes pédagogiques à l’ère du numérique. Un constat, si dès 2000, le collectif « Chasseneuil »

2

, auquel l’AFPA a participé, a posé les essentiels de l’accompagnement pédagogique et organisationnel

,

la pratique de la formation à distance, est loin d’être aujourd’hui généralisée « la modalité du présentiel est la plus fréquente».

Or, le nouvel environnement juridique

3

va impulser une demande accrue de formations multimodales. Dans un marché concurrentiel dynamique, Les grands commanditaires publics et les entreprises formulent dans leurs cahiers des charges l’exigence d’actions de formations courtes, alternatives comportant une part de formation distancielle. Le numérique est au cœur des demandes et de l’offre du marché de la formation. La demande émane également des individus et constitue un enjeu stratégique pour l’AFPA.

Au-delà des conditions matérielles nécessaires à mettre en place et de la nécessaire maîtrise des outils par les formateurs, cette demande impacte fortement le métier de formateur. La formation à distance renforce le rôle et la posture d’accompagnement dans les organisations pédagogiques multimodales et transforme inéluctablement la place du formateur dans le dispositif, redéfinissant le contour d’une nouvelle identité professionnelle.

La Refondation pédagogique pour former les actifs les moins qualifiés.

« Former les hommes, ce n’est pas remplir un vase, c’est allumer un feu » nous dit Aristophane. Dès lors, « comment allumer, entretenir ce feu », se demande le formateur ?

A l’aide des apports de la didactique professionnelle (Pastré, 2011), le formateur articule sa pratique dans un triple système « travail – apprentissage - sujet ». Sa démarche pédagogique, centrée sur l’activité des apprenants, prend appui sur l’ensemble des ressources de la personne : corporelles, émotionnelles et cognitive. Pour conduire son activité pédagogique il s’appuie sur une démarche pédagogique comportant deux axes : action, réflexion.

Pour engager la personne dans ses apprentissages, il mobilise des méthodes et techniques pédagogiques orientées d’abord sur les fonctions émotionnelles (action & sentiment), puis sur les fonctions cognitives (réflexion & conceptualisation) pour ancrer les savoirs dans une double approche analytique et synthétique. Dans la phase perception, il facilite le passage de l’expérience concrète à l’observation réflexive. Dans la phase traitement, il accompagne le mouvement de la conceptualisation à l’expérimentation active. Toutes les ressources des apprenants sont mobilisées : intelligence émotionnelle dans un vécu singulier et la perception des situations de travail contextualisée, intelligence émotionnelle et cognitive dans le discours produit au cours de l’analyse de la situation, intelligence cognitive dans la compréhension des éléments généralisation des

2 Conférence http://www.centre-inffo.fr/IMG/pdf/chasseneuil.pdf

3 Publication du décret d’application relatif à la FOAD 22/08/2014, complétant la circulaire DGEFP 2001

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 6/9 situations (dé-contextualisation) et des connaissances. Le formateur conduit l’alternance pédagogique sur 4 temps. 2 moments où la personne se saisit d’une situation (sensible/

compréhensible) où s’intercalent 2 moments de transformation (intériorisation / extériorisation).

Nous en proposons une représentation graphique.

Les processus pédagogiques de la pédagogie des métiers.

Le chantier « Repères Pédagogique » a constitué, pour nous, l’opportunité de faire émerger les processus d’apprentissage de l’ingénierie pédagogique à l’œuvre pour former les actifs les moins qualifiés, public majoritaire de l’AFPA.

L’ingénierie pédagogique intègre 3 sphères : la personne (sujet engagé & apprenant), le collectif d’apprenants (formateur & collectif des pairs), l’entreprise. Le formateur conduit et organise les apprentissages au-delà de la situation « formative » formelle, car celle-ci tend à gommer la richesse des interactions d’un modèle global et perd des opportunités d’élaboration du savoir et de transformation personnelle. Or former, au sens plein, c’est embrasser l’ensemble des processus à l’œuvre dans la construction des situations d’apprentissage.

C’est pourquoi, nous proposons d’intégrer à l’environnement d’apprentissage dans une synergie retrouvée (Santelmann, 2014) les situations de travail et les collectifs de travail de l’entreprise (sphère « Emploi ») et dépasser le triangle pédagogique étendu : apprenant, savoir, formateur, pairs en formation proposé par Richard Faerber

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. Notre approche systémique, liant davantage la formation à l’emploi, ouvre de nouvelles articulations entre 3 pôles (apprenant, formation, entreprise) et met à jour les processus pédagogiques dans un écosystème reliant l’activité pédagogique (situation formative) ou l’activité de travail (collectif de travail en entreprise).

4Actes du Colloque EIAH 2003, Strasbourg. http://archiveseiah.univ-lemans.fr/EIAH2003/Pdf/n021-147.pdf

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 7/9

Dans une dynamique réflexive, la personne est incitée à prendre appui sur le déjà-là (acquis et

expérience professionnelle), elle est interpellée à analyser ce qu’elle mobilise, à formaliser sa trajectoire et ses compétences professionnelles et personnelles (DSPP

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pour la certification, Curriculum Vitae pour un emploi, voire (e) portfolio pour capitaliser et donner du sens à ses projets et rendre possible une mobilité professionnelle (souhaitée ou subie).

Après l’action, le temps de la réflexivité est le moment où l’apprenant travaille ses 3 points ancrages temporels. L’ancrage avec le passé, c’est faire des liens et des associations entre l'ancien et le nouveau. Il s’agit de réactiver la mémoire pour remobiliser des connaissances, expériences antérieures. L’ancrage dans le présent est porté par une activité cognitive consciente par la gestion active de ses démarches d’apprentissage, sa manière personnelle d’apprendre pour retrouver la confiance en ses capacités. L’ancrage vers l’avenir est soutenu par la motivation en se projetant pour réaliser un objectif professionnel en lien avec son projet d’emploi/désir métier.

Apprendre, c'est créer des liens entre passé, présent et avenir, pour transformer, pour relier et intégrer au déjà connu. Accompagner la compréhension de l’acte d’apprendre, c’est redonner aux personnes, le savoir et le pouvoir d’agir, la responsabilité de porter leur projet professionnel et leur réussite dans une autonomie restaurée.

Dépassant l’exigence de l’acquisition des compétences professionnelles liées à un emploi, ces professionnels-formateurs portent, une vision humaniste et anthropologique du métier (« Donner, recevoir, rendre ») et par là même une vision non- adéquationniste de la formation professionnelle.

L’engagement et le sens du métier les conduisent à dépasser le travail prescrit (commande), renouant avec le réel des situations de travail. La variabilité des situations de travail est une donnée essentielle. Les formateurs accompagnent les futurs professionnels dans la prise en compte des singularités de ces situations en intégrant l’environnement de travail et les collectifs. Initiés à l’évaluation par l’analyse du travail, entraînés à identifier les invariants et les variations d’une

5 Dossier de Synthèse et de Pratiques Professionnelles

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 8/9 situation de travail, ces professionnels sont alors capables de transférer des compétences professionnelles

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ou mobiliser des compétences transversales, dans de nouvelles situations.

Dans une ambition d’être à l’œuvre à la transformation de quelque chose, les formateurs savent que professionnaliser c’est participer au développement de la personne en accompagnant sa (re)reconstruction de l’identité professionnelle (Pelvillain, 2014). L’enjeu pédagogique pour les formateurs, est d’enclencher un geste mental connectiviste car la connexion, l’interconnexion, sont au cœur de la construction de nouveaux savoirs, nouvelles relations pour grandir et se développer.

Aussi, les apprentissages coopératifs sont encouragés en incitant les apprenants à une connexion globale (à relier et se relier) en s’appuyant sur ses réseaux d’appartenance, à son environnement (professionnel, personnel) dans un environnement numérique maîtrisé.

Cet « art » singulier (mailler situation de travail, pédagogie, centration sur l’apprenant) peut être qualifié de pédagogie des métiers, et constitue la marque pédagogique de l’AFPA, dans un faire, dire et penser (Jobert, 2000) le métier dans une situation de travail contextualisée. L’ingénierie pédagogique, qui en découle, n’est pas spécifique mais elle est efficiente pour former les actifs les moins qualifiés en proposant un modèle alternatif, original face au modèle dominant. Aujourd’hui, porter et généraliser notre démarche pédagogique originale en environnement numérique, pour entrer de plein pied dans le XXIe, est l’un des enseignements du Chantier « Repères Pédagogiques » et un enjeu pour l’AFPA.

Bibliographie

Carré, Ph. 2005. L'Apprenance, vers un nouveau rapport au savoir. Paris, Dunod.

Chalvin, D. 1995. Utiliser tout son cerveau. Formation permanente en Sciences Humaines. Paris, ESF Clot, Y. 2010. Le travail à cœur. Paris, La Découverte.

Courtois B, Pineau G. (dir. publ.).1991. La formation expérientielle des adultes, recherche en formation continue. Paris, La Documentation Française.

Damasio, A. 1995. L'Erreur de Descartes : la raison des émotions. Paris, Odile Jacob.

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Jobert, G. 2000. Dire, penser, faire, Education Permanente n°143, p. 7-28.

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Pastré, P. 2011. La didactique professionnelle, approche anthropologique du développement chez les adultes. Paris, PUF.

Pastré, P. 2002. L’analyse du travail en didactique professionnelle. Revue Française de Pédagogie, n°

138, p.9-17.

6Selon Guy Le Boterf, la compétence est un savoir agir en situation. Elle combine 5 composantes : savoir, savoir-faire technique, savoir méthodologique & organisationnel, savoir relationnel & comportemental, savoir réflexif.

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Article EP 2015 – N. Pelvillain Page 9/9 Pelvillain, N. 2014 Devenir coach, praticien de l’accompagnement professionnel personnalisé. Sujet dans la Cité, Actuels 3. Paris, L’Harmattan.

Pineau G. 1989. La formation expérientielle en auto-, éco- et co-formation, Education Permanente, n°

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Santelmann, P. (Coord.) 2014. Les Synergies Travail-formation. » Education Permanente, hors-série

AFPA n°6.

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