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Services de vaccination en Afrique et en Asie : qualite des prestations et demande du public

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Academic year: 2022

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Services de vaccination en Afrique et en Asie : qualite des prestations et demande du public

P. H. Streefland,

1

A. M. R. Chowdhury

2

et P. Ramos-Jimenez

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Afin de garantir l'efficacite aÁ long terme de la vaccination envisageÂe en tant qu'instrument majeur de lutte contre les maladies aÁ l'eÂchelle mondiale, il est important que les services de vaccination soient de bonne qualiteÂ. Les eÂtudes meneÂes dans trois pays d'Asie (Bangladesh, Inde et Philippines) et deux pays d'Afrique (Ethiopie et Malawi), dont il est question ici, montrent que les parents sont disposeÂs aÁ consacrer beaucoup de temps et d'efforts pour faire vacciner leurs enfants. Toutefois, il existe un certain nombre de deÂfaillances graves en ce qui concerne la qualite des services de vaccination systeÂmatique, et des tensions s'observent aux points de contact entre les agents de vaccination et les utilisateurs. Ces deÂfaillances nuisent aÁ la durabilite des programmes de vaccination systeÂmatique et favorisent l'apparition de groupes d'enfants non vaccineÂs ou partiellement vaccineÂs. Si l'on veut que ces programmes se poursuivent et que leur couverture soit plus eÂtendue, il faut absolument s'employer aÁ reÂsoudre ces difficulteÂs.

Article publie en anglais dansBulletin of the World Health Organization, 1999,77(9): 722-730.

Introduction

ConfeÂrer, par la vaccination, une immunite aÁ l'eÂgard des maladies infectieuses est devenu une intervention de sante publique largement utiliseÂe et communeÂ- ment accepteÂe (1, 2). Toutefois, pour qu'aÁ long terme la vaccination soit, sur le plan mondial, une strateÂgie efficace de lutte contre les maladies de l'enfant, il est indispensable que les parents continuent aÁ faire vacciner leurs enfants. LaÁ ouÁ la vaccination des enfants s'effectue avec le consentement des parents, comme c'est le cas dans la plupart des socieÂteÂs, il faut que les parents aient confiance en la qualite du service qui leur est offert. Des eÂtudes reÂcemment meneÂes en Afrique et en Asie ont montre que les meÁres font vacciner leurs enfants pour eÂviter qu'ils ne soient malades, pour ameÂliorer leur eÂtat de sante geÂneÂral ou pour atteÂnuer la gravite des maladies dont ils pourraient eÂventuellement souffrir par la suite. La deÂcision de se preÂsenter aux seÂances de vaccination deÂpend eÂgalement de la qualite des prestations telle qu'elle est percËue et veÂcue.

Un projet internationalade recherche compa- reÂe a eÂte lance en Afrique, en Asie, en Europe et aux Etats-Unis d'AmeÂrique en 1994, afin d'ameÂliorer la couverture et la viabilite des programmes de vaccination graÃce aÁ une meilleure compreÂhension de leurs dimensions sociales et culturelles. Le travail a eÂte accompli par des eÂquipes de recherche nationales au Bangladesh, en Inde, au Malawi et aux Philippines,

et trois enqueÃtes transnationales ont eÂte meneÂes sur les theÁmes suivants :

± vaccination et Etat ;

± programmation et deÂveloppement de la techno- logie au niveau mondial ;

± demandes du public envisageÂes par rapport aÁ la qualite des services de vaccination.

Chaque eÂtude de pays a eÂlabore son protocole, mais toutes ont preÂsente de grandes analogies sur le plan des objectifs et de la meÂthodologie. En outre, les mesures deÂcrites ci-apreÁs ont permis de renforcer la coheÂrence entre les diffeÂrentes eÂtudes.

. Les chercheurs de toutes les eÂquipes ont suivi un cours d'anthropologie meÂdicale et un autre sur l'analyse de donneÂes quantitatives, puis ils ont participe aÁ un atelier de surveillance continue qui a traite des meÂthodes d'eÂchantillonnage et de collecte des donneÂes.

. Une liste type composeÂe de questions et d'indi- cateurs de recherche a eÂte eÂlaboreÂe de telle sorte que toutes les eÂtudes de pays comportent un ensemble de questions analogues en plus de celles ayant trait aux conditions propres aÁ des pays particuliers.

. Plusieurs pays ont recËu un soutien technique pour ameÂliorer la qualite de la collecte et de l'analyse des donneÂes.

Les reÂsultats des eÂtudes meneÂes en Afrique et en Asie, dont il est rendu compte ci-apreÁs, montrent que la qualite des services de vaccination laisse encore beaucoup aÁ deÂsirer. L'article fournit eÂgalement des informations sur la facËon dont les parents percËoivent la vaccination ainsi que sur les effets que les

1Institut royal de meÂdecine tropicale, B.P. 95001, 1090 HA Amsterdam (Pays-Bas).

2Research and Evaluation Division, Bangladesh Rural Advancement Committee (BRAC), Dhaka (Bangladesh).

3Social Development Research Centre, de la Salle University, Manille (Philippines).

ReÂf. :0025

aLe projet de recherche sur les sciences sociales et la vaccination est finance par les MinisteÁres des Affaires eÂtrangeÁres danois et neÂerlandais.

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impressions neÂgatives ont sur l'acceptation de celle- ci. De treÁs nombreuses recherches ont eÂte faites sur la qualite des soins de sante et sur les services d'espacement des naissances (3-5). Le cadre ci- dessous a eÂte adapte aÁ l'analyse des services de vaccination. Pour en eÂvaluer la qualite technique, on a eÂtudie les grands aspects suivants des opeÂrations de vaccination :

± compeÂtence technique des personnels de sante directement associeÂs aÁ l'administration des vac- cins ;

± informations donneÂes aux clients par les person- nels de sante ;

± administration des vaccins ;

± suivi et meÂcanismes d'assurance de la continuite ;

± correÂlations et coordination entre diffeÂrents dispensateurs de soins travaillant dans des domaines particuliers.

Les eÂtudes de pays se sont attacheÂes aux perceptions et au veÂcu des utilisateurs, geÂneÂralement les meÁres, en matieÁre de qualite des soins prodigueÂs aÁ l'occasion des vaccinations, et cela du point de vue :

± de la compeÂtence technique ;

± des informations fournies ;

± de l'acceÁs aux services ;

± des relations interpersonnelles vaccineÂs/vaccina- teurs ;

± des effets secondaires.

Dans les eÂtudes de pays, les chercheurs ont reÂuni des informations quantitatives, notamment des statis- tiques de couverture, en deÂpouillant des dossiers et parfois en faisant des visites aÁ domicile. Les donneÂes qualitatives ont eÂte obtenues en observant des seÂances de vaccination, en ayant des entretiens approfondis et semi-structureÂs avec des parents, des personnels de sante et des interlocuteurs valables, ainsi qu'en organisant des discussions de groupe autour d'un theÁme.

Il a eÂte rendu compte des reÂsultats de chacune des eÂtudes de pays se rattachant au theÁme trans- national des demandes du public envisageÂes par rapport aÁ la qualite des services de vaccination au moyen d'indicateurs eÂlaboreÂs au niveau central. Une syntheÁse a ensuite eÂte opeÂreÂe afin de mettre en relief les questions neÂcessitant l'attention des deÂcideurs et des administrateurs de programmes. Les reÂsultats provenant des pays ont eÂte assembleÂs en matrices se rapportant aÁ des questions de recherche speÂcifiques.

En se servant de ces matrices et des eÂtudes de pays, on a recherche les analogies et les diffeÂrences entre les pays, et l'on a formule des descriptifs et des conclusions.

Les eÂtudes de pays Bangladesh

Au Bangladesh, la principale eÂtude a eÂte meneÂe dans le district de Kishoreganj, choisi en raison du treÁs faible taux de couverture vaccinale qui ressortait

d'une enqueÃte nationale. Au sein de ce district, le thanade Bhairab a eÂte retenu pour une eÂtude deÂtailleÂe.

La plus grande partie de cette reÂgion est basse, ce qui pose des probleÁmes de communications pendant la saison des pluies. L'eÂtude a eÂte centreÂe sur la ville de Bhairab et plusieurs villages environnants. Deux circonscriptions rurales et deux circonscriptions urbaines ont eÂte seÂlectionneÂes, l'une aÁ forte et l'autre aÁ faible couverture vaccinale. Par la suite, les quatre peÂrimeÁtres ainsi retenus ont eÂte diviseÂs en deux sur la base de la couverture telle que signaleÂe par des personnels de santeÂ, si bien qu'on se trouvait finalement en preÂsence, dans les deux cas, de quatre secteurs d'eÂtude urbains et de quatre secteurs ruraux.

Un total de 100 enfants de moins de deux ans a eÂte seÂlectionne dans chaque secteur, par sondage en boule de neige afin de recenser la couverture. On a tire des sous-eÂchantillons de meÁres d'enfants entieÁ- rement, partiellement ou non vaccineÂs en vue d'une eÂtude approfondie et 97 meÁres ont ainsi eÂte interrogeÂes. Neuf seÂances de vaccination ont eÂte observeÂes et 12 agents de sante ainsi que six encadreurs/gestionnaires des opeÂrations de vaccina- tion ont eÂte interrogeÂs. On s'est eÂgalement entretenu avec 13 chefs de village, sept praticiens biomeÂdicaux non diploÃmeÂs et un gueÂrisseur spirituel.

Ethiopie

En Ethiopie, la zone de Gurage, et en particulier le district de Sodo, reÂpute aÁ faible couverture, et celui de Cheha ouÁ la couverture eÂtait eÂleveÂe, ont eÂte retenus pour les recherches de terrain. Le preÂsent article s'attache aux reÂsultats de Sodo ouÁ les meÂthodes de recueil des donneÂes ont notamment eÂte les suivantes :

± une enqueÃte portant sur 222 meÁres de jeunes enfants ;

± 17 entretiens approfondis et 6 groupes theÂma- tiques de discussion avec des meÁres d'enfants entieÁrement vaccineÂs et non vaccineÂs ;

± 11 entretiens avec des agents de santeÂ, quatre avec des administrateurs du Programme eÂlargi de vaccination (PEV), cinq avec des dirigeants communautaires, et deux avec des gueÂrisseurs traditionnels ;

± 22 entretiens aÁ la sortie des seÂances de vaccina- tion ;

± 8 observations faites dans des centres de sante fixes et 5 dans des antennes mobiles.

Inde

En Inde, l'eÂtude a eÂte d'abord centreÂe sur le district de Surat (Etat du Gujarat), ainsi que sur le district vallonne de Pauri Gharwal (Uttar Pradesh). Par la suite, on y a ajoute un district de plaine de l'Uttar Pradesh, celui de Kanpur Dehat, ouÁ la couverture eÂtait faible, ainsi que le district de Trivandrum dans l'Etat du Kerala, ouÁ la couverture eÂtait eÂleveÂe. Sur la base d'informations extraites de rapports officiels et fournies par des informateurs principaux de chaque district, des secteurs de forte et de faible couverture ont eÂte seÂlectionneÂs dans lesquels on a eÂtudie des

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centres et des sous-centres de sante primaire, ainsi que leurs zones de desserte et les villages aÁ forte et faible couverture. Des donneÂes ont eÂte recueillies en utilisant les meÂthodes suivantes :

± un recensement de 665 meÂnages afin d'identifier ceux ayant des enfants de 0 aÁ 2 ans ;

± 205 entretiens structureÂs et 87 entretiens ethno- graphiques avec des meÁres de famille ;

± 25 entretiens approfondis avec des femmes plus aÃgeÂes ;

± 23 entretiens approfondis avec des anciens du village ;

± des entretiens structureÂs avec 9 agents de sante de base de sexe masculin et 53 de sexe feÂminin, ainsi qu'avec 10 formateurs/eÂducateurs ;

± 41 entretiens ethnographiques avec des agents de sante de sexe feÂminin ;

± des observations faites sur 50 seÂances de vaccina- tion ;

± 34 entretiens se rapportant aÁ des cas de maladies eÂvitables par la vaccination.

Le preÂsent article s'attache aux donneÂes provenant des districts de l'Uttar Pradesh.

Malawi

L'eÂtude portant sur le Malawi a eÂte meneÂe dans les districts de Ntichisi, ouÁ l'on enregistrait les taux de couverture les plus bas du pays, et de Chitipa, ouÁ ils eÂtaient les plus eÂleveÂs. Dans chacun de ces districts, on a seÂlectionne un sous-district aÁ forte couverture et un autre aÁ faible couverture. Le preÂsent article s'attache aux reÂsultats des sous-districts de Chin- tembwe et de Malomo du district de Ntichisi. Dans ce district, le recueil des donneÂes a notamment comporte les opeÂrations suivantes :

± 20 discussions theÂmatiques de groupe avec des meÁres ;

± 100 entretiens approfondis avec des meÁres de famille ;

± 10 entretiens avec des agents de sante ;

± 293 entretiens aÁ la sortie de seÂances de vaccination dans le district de Chintembwe et 504 dans le district de Malomo ;

± 30 observations de seÂances de vaccination dans des centres de sante fixes et mobiles du district de Chintembwe et 50 dans le district de Malomo.

Philippines

Aux Philippines, la recherche sur le terrain a eÂte centreÂe sur les reÂgions suivantes : Mindanao, les Visayas, Luzon et la Capitale nationale. Les sondages, portant notamment sur des zones urbaines et rurales aÁ faible et forte couverture vaccinale notifieÂe, ont abouti au choix de 13 zones d'eÂtude. Trois autres zones ont eÂte ajouteÂes dans lesquelles on a eÂtudie les journeÂes nationales de vaccination. Outre l'eÂtude de publications et de documents, on a notamment utilise les meÂthodes de collecte de donneÂes suivantes :

± une enqueÃte portant sur 2068 meÁres d'enfants d'aÃge preÂscolaire de 0 aÁ 6 ans ;

± 24 discussions theÂmatiques de groupe avec des meÁres plus aÃgeÂes, des meÁres d'enfants entieÁrement vaccineÂs et des meÁres d'enfants partiellement vaccineÂs ;

± 61 entretiens avec des informateurs principaux.

On a enqueÃte sur la qualite des soins en s'attachant aÁ trois centres de sante situeÂs dans des zones aÁ forte couverture et quatre situeÂs dans des zones aÁ faible couverture : 10 administrateurs du PEV et 66 agents de sante ont eÂte interrogeÂs, et des entretiens ont eu lieu avec 320 personnes aÁ la sortie des seÂances de vaccination. Dans les sept centres de santeÂ, on a dresse un inventaire meÂticuleux des mateÂriels et des fournitures, et 19 seÂances de vaccination ont eÂte observeÂes. Le preÂsent article s'attache aux reÂsultats obtenus pour les zones aÁ faible couverture.

ReÂsultats obtenus

Organisation de l'administration des vaccins

Dans chaque pays, l'administration des vaccins eÂtait inteÂgreÂe aÁ d'autres services de santeÂ. Ainsi, les agents vaccinateurs et les centres de sante fixes ou mobiles dont ils deÂpendaient eÂtaient eÂgalement chargeÂs d'assurer d'autres formes de soins. Dans les cinq pays, l'administration des vaccins s'effectuait selon les deux modaliteÂs exposeÂes ci-apreÁs.

. La vaccination eÂtait une activite de routine dont la freÂquence allait de quatre jours par semaine dans les formations fixes, aÁ un jour par semaine ou par mois dans les centres de sante mobiles ouÁ il fallait absolument informer les meÁres en temps voulu et de facËon preÂcise des dates auxquelles des seÂances de vaccination seraient organiseÂes. Des interrup- tions ou des annulations inopineÂes se produisaient parfois.

. Le vaccin antipoliovirus oral eÂtait administre aÁ tous les enfants aÁ l'occasion de journeÂes nationales de vaccination qui eÂtaient largement annonceÂes par les meÂdias. Des politiciens nationaux et locaux ainsi que des personnaliteÂs ceÂleÁbres des arts et des sports incitaient aÁ y participer.

DeÂlai d'attente et ponctualiteÂ

Au Bangladesh, les seÂances de vaccination commen- cËaient invariablement en retard et s'achevaient plus toÃt que preÂvu. L'attente eÂtait habituellement d'une dizaine de minutes.

En Ethiopie, les meÁres qui freÂquentaient une certaine antenne s'attendaient aÁ ce que les agents de sante soient en retard, et les agents de sante s'attendaient aÁ ce que les meÁres le soient aussi : en conseÂquence, les seÂances commencËaient tard ; comme les agents de sante partaient aÁ l'heure preÂvue, les seÂances eÂtaient trop breÁves. On a observe que, presse par le temps, un agent de sante avait vaccine des enfants avec des aiguilles steÂriliseÂes encore chaudes. Ailleurs, on a vu un agent vacciner plusieurs

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enfants avec la meÃme aiguille ; il se peut que le motif en soit exactement ou partiellement le meÃme.

Au Malawi, deux tiers des seÂances observeÂes ont commence aÁ l'heure ; toutefois, le deÂlai d'attente a atteint jusqu'aÁ trois heures.

Disponibilite des fournitures

Au Bangladesh, une peÂnurie de vaccin anti-diphteÂrie/

teÂtanos/coqueluche (DTC) a eÂte signaleÂe aÁ deux des huit seÂances. Des retards se produisaient parfois dans l'expeÂdition des vaccins du deÂpoÃt central ou des centres de distribution. Tant au Bangladesh qu'en Inde, si l'on eÂtait aÁ la veille d'une journeÂe nationale de vaccination, la fourniture de certains vaccins eÂtait parfois jugeÂe moins prioritaire que celle du vaccin antipoliomyeÂlitique.

Au Malawi, le stock de BCG eÂtait eÂpuise dans sept des 30 seÂances observeÂes et, dans respective- ment deux et trois seÂances, on manquait soit de vaccin antirougeoleux, soit d'anatoxine teÂtanique.

Il arrivait que des seÂances de vaccination systeÂmatique soient remises aÁ plus tard afin de permettre le succeÁs de journeÂes nationales de vaccination. Ainsi, dans deux reÂgions d'Ethiopie, des centres fixes n'avaient pas organise de seÂances pendant un mois et des antennes pendant trois mois parce que le personnel eÂtait mobilise pour une journeÂe nationale de vaccination.

Dans la plupart des pays, on manquait assez souvent de fiches PEV. Au Bangladesh, l'approvi- sionnement en fiches PEV enfants a eÂte longtemps interrompu, ce qui a contraint les agents de sante aÁ se servir de fiches treÁs diffeÂrentes concËues pour la vaccination par l'anatoxine teÂtanique.

Aux Philippines, deux des sept centres n'avaient pas d'aiguilles, et quatre n'avaient pas de seringues ; les stocks de fournitures eÂtaient meilleurs dans les zones aÁ faible couverture que dans celles aÁ forte couverture.

APauri Gharwal (Inde), des agents de sante disaient qu'il leur eÂtait difficile de tenir des registres parce qu'ils n'en recevaient tout au plus qu'un quart du nombre preÂvu. L'eÂtablissement de rapports mensuels eÂtait rendu difficile par l'approvisionne- ment insuffisant en fournitures de bureau, que le personnel devait souvent acheter lui-meÃme.

La compeÂtence technique des vaccinateurs jugeÂe par les meÁres

Les meÁres de famille ont deÂfini la compeÂtence de facËon pluridimensionnelle, en tenant compte de la capacite technique, du sens des contacts sociaux et parfois des caracteÂristiques personnelles importantes sur le plan social et culturel. En geÂneÂral, les donneÂes reÂunies dans les pays ont montre que les meÁres eÂmettaient un jugement positif sur la compeÂtence technique des vaccinateurs. En revanche, cette compeÂtence eÂtait percËue neÂgativement s'il se pro- duisait un saignement, une tumeÂfaction ou un abceÁs, ou si le vaccinateur brisait son aiguille ou en utilisait une qui avait deÂjaÁ servi. C'eÂtaient la clarte des conseils

qu'elles recevaient et la volonte des vaccinateurs de travailler pendant de longues heures et leur souci d'eÃtre au rendez-vous qui influaient sur l'opinion des meÁres. Parfois, les caracteÂristiques personnelles des vaccinateurs, tels que l'aÃge, l'anciennete des bons et loyaux services, la caste, le physique et le comporte- ment moral constituaient eÂgalement des criteÁres importants.

Au Bangladesh, certaines meÁres ont exprime des avis positifs sur la compeÂtence technique des vaccinateurs, mais d'autres ont dit n'avoir aucune- ment confiance dans la formation des agents de sante et dans la facËon dont ils pratiquaient les injections. Le fait que les vaccinateurs soient ou non connus des meÁres et de la population influait sur l'appreÂciation de leur compeÂtence technique.

En Ethiopie, les meÁres se disaient meÂcontentes des agents de sante qui ne passaient que quelques heures dans les antennes mobiles ; elles consideÂraient que ces agents ne s'inteÂressaient pas aÁ ce qu'ils faisaient.

Au Malawi, des meÁres estimaient que certains vaccinateurs ne semblaient pas savoir piquer correc- tement, parce qu'il se produisait un saignement aÁ l'endroit de l'injection et que la reÂgion injecteÂe ne tardait pas aÁ se tumeÂfier ; on disait de certains vaccinateurs qu'ils agissaient « comme s'ils piquaient dans un arbre qui ne sentait rien » ; certains scarifiaient aÁ peine la peau des enfants alors que d'autres piquaient treÁs en profondeur. Des meÁres jugeaient aussi neÂgativement les agents de sante qui n'arrivaient pas aÁ l'heure au dispensaire ou se refusaient aÁ travailler tard pour vacciner tous les enfants preÂsents.

En Inde, les effets secondaires preÂjudiciables reveÃtaient une importance particulieÁre dans l'appreÂ- ciation des vaccinateurs. L'eÂvaluation de la compeÂ- tence technique eÂtait eÂgalement fonction de facteurs jugeÂs importants dans le contexte socio-culturel indien : le fait qu'un vaccinateur appartienne au personnel d'une formation fixe de soins primaires, ce qui sous-entendait une plus grande compeÂtence, ou qu'il soit simplement un agent « de terrain » ; le fait d'eÃtre plus aÃge ou plus jeune et d'appartenir ou non aÁ telle ou telle caste, voire aÁ telle ou telle famille influente ; et le fait d'avoir ou non une bonne preÂsentation et d'eÃtre de bonne moraliteÂ.

Disponibilite de mateÂriel d'eÂducation pour la santeÂ

La plupart des formations fixes disposaient de certains mateÂriels d'information, d'eÂducation et de communication (IEC), mais cela n'eÂtait pas toujours vrai des antennes mobiles. Au Bangladesh, on ne se servait pas d'affiches pour faire de l'eÂducation sanitaire. Au Bangladesh et en Inde, les agents de sante des antennes mobiles se plaignaient de ne recevoir du mateÂriel d'IEC qu'aÁ l'occasion des journeÂes nationales de vaccination. Aux Philippines, les centres de sante des zones aÁ faible couverture vaccinale avaient davantage de mateÂriel d'IEC que

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ceux des zones aÁ forte couverture. Dans la plupart des pays, les affiches eÂtaient geÂneÂralement reÂdigeÂes en langue locale, bien qu'au Malawi l'anglais soit largement utiliseÂ.

ProceÂde et contenu

de l'eÂducation pour la santeÂ

Pendant les seÂances, les agents de sante avaient rarement le temps de fournir des informations relatives aux vaccins. En fait, la vaccination eÂtait apparemment devenue quelque chose de tellement banal que le personnel jugeait souvent inutile d'entrer dans les deÂtails. Au Bangladesh, il s'agissait d'infor- mations geÂneÂrales qui n'avaient pas trait aÁ des maladies ou des vaccins particuliers. Toutefois, en Ethiopie et au Malawi, certains agents de sante donnaient des informations utiles, notamment lorsqu'on leur posait la question. C'est ainsi qu'ils conseillaient aux meÁres de ne pas baigner les enfants qui avaient mal et de ne pas frictionner les endroits douloureux avec de l'huile ou d'y appliquer des enveloppements chauds. APauri Gharwal (Inde), des informations deÂtailleÂes sur les effets secondaires n'eÂtaient donneÂes aux meÁres que si c'eÂtait le premier enfant qu'elles preÂsentaient aÁ la vaccination. Une certaine confusion reÂgnait aÁ propos de la formation d'un nodule apreÁs la vaccination par le BCG ; rares eÂtaient les agents qui demandaient aux meÁres de repreÂsenter l'enfant si aucun nodule n'apparaissait.

Des informations eÂtaient parfois donneÂes sur les contre-indications. Un agent de sante bangladeshi disait : « Si l'enfant a de la fieÁvre, nous ne le vaccinons pas, car si son eÂtat vient aÁ empirer, on nous le reprochera ». En Inde, la plupart des agents de sante eÂtaient incapables de deÂfinir les contre-indications aÁ la vaccination. GeÂneÂralement, ils s'abstenaient tout simplement de vacciner un enfant qui n'eÂtait pas bien, par crainte d'autres complications. Aux Philip- pines, des informations sur les contre-indications eÂtaient donneÂes dans la moitie environ des contacts observeÂs.

Parfois, les informations donneÂes eÂtaient erroneÂes. Au Bangladesh, on avait conseille aÁ une femme de ne pas nourrir son enfant dans la demi- heure suivant la vaccination. Presse de s'expliquer, l'agent de sante a dit : « Lorsque le vaccin entre dans le corps, il ne doit rien y avoir dans l'estomac ». Au Malawi, des meÁres ont deÂclare qu'on leur avait dit qu'un enfant devait eÃtre vaccine toutes les six semaines, et qu'il fallait commencer aÁ l'aÃge de six mois.

Point de vue sur les informations fournies

Sauf au Bangladesh, les meÁres ont dit que les agents de sante eÂtaient leurs principaux informateurs en matieÁre de vaccination. Normalement, les informa- tions, couvrant un large eÂventail de sujets pertinents, eÂtaient fournies dans le cadre de l'eÂducation sanitaire geÂneÂrale et non pas aÁ l'occasion des seÂances de vaccination. Au Bangladesh, les meÁres eÂtaient, semble-t-il, avides d'obtenir des renseignements sur

les vaccins et elles se plaignaient que les vaccinateurs soient trop occupeÂs ou trop presseÂs, et ne leur donnent pas d'explications. En Ethiopie, des meÁres ont fait observer que, presseÂs d'en finir au plus toÃt, les agents de sante ne souhaitaient gueÁre les informer pendant les seÂances de vaccination. En Inde, des meÁres se sont plaintes de ne pas eÃtre au courant des aÃges auxquels les diffeÂrentes vaccinations devaient eÃtre faites. Toutefois, on a observe qu'aÁ Pauri Gharwal les infirmieÁres sages-femmes auxiliaires (ISFA) informaient effectivement les meÁres des aÃges auxquels les vaccins devaient eÃtre administreÂs et, en particulier, leur disaient que la vaccination anti- rougeoleuse devait s'effectuer aÁ l'aÃge de neuf mois.

Plus d'un quart des meÁres malawiennes se plaignaient de ne pouvoir poser de questions lorsqu'elles se rendaient dans des centres de sante si elles-meÃmes ou les agents de sante arrivaient en retard. Aux Philippines, un cinquieÁme environ des meÁres reÂsidant dans des zones aÁ faible couverture preÂtendaient ne pas avoir recËu d'informations.

Annonce de la date et du lieu des seÂances de vaccination

Les agents de sante avaient coutume de dire qu'ils avertissaient le public aÁ l'avance, mais les eÂtudes de terrain ont reÂveÂle que ce n'eÂtait pas toujours vrai.

DiffeÂrentes meÂthodes eÂtaient utiliseÂes pour annoncer les prochaines seÂances : les meÁres eÂtaient informeÂes en personne ; on publiait des affiches et des avis ; on mobilisait les dirigeants locaux ; et l'on faisait des annonces par haut-parleur aÁ partir des mosqueÂes et dans les villages. Il arrivait qu'on ait recours aÁ la meÂthode forte : dans les dispensaires de Sodo (Ethiopie), on refusait de prodiguer des soins curatifs aux enfants non vaccineÂs.

Accessibilite des services de vaccination

L'accessibilite est geÂneÂralement deÂfinie du point de vue des meÁres. Toutefois, l'accessibilite des lieux aux agents de sante peut influer sur la couverture, puisque ceux-ci risquent d'arriver en retard ou de ne pas arriver du tout, notamment dans le cas des antennes peÂripheÂriques. En Ethiopie, les agents de sante se plaignaient de ne recevoir aucune indemnite pour les frais de deÂplacement jusqu'aux antennes peÂripheÂ- riques.

Des obstacles naturels tels que des cours d'eau ou des congeÁres peuvent isoler certains lieux de vaccination aÁ certaines eÂpoques de l'anneÂe. Au Bangladesh, un de ces lieux eÂtait inaccessible aussi bien aux meÁres qu'aux agents de sante pendant la mousson. D'ailleurs, meÃme aÁ la belle saison, le prix du bac qui desservait la reÂgion eÂtait un obstacle aux deÂplacements des agents de sante dans la mesure ouÁ ceux-ci ne pouvaient preÂtendre aÁ aucun rembour- sement.

La condition socio-eÂconomique de l'agent de sante peut eÂgalement constituer un obstacle. Dans trois villages proches de Pauri Gharwal (Inde) ouÁ coexistaient plusieurs castes, les seÂances de vaccina-

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tion avaient lieu dans la demeure d'une femme de haute caste. Les femmes de castes « eÂnumeÂreÂes » et leurs enfants ne pouvaient entrer qu'apreÁs que tous les enfants des femmes de castes plus eÂleveÂes aient eÂte vaccineÂs.bLes meÁres de castes « eÂnumeÂreÂes » en eÂprouvaient une rancúur qu'elles ne pouvaient toutefois pas exprimer directement vu que l'ISFA d'un village voisin, qui vaccinait, eÂtait l'eÂpouse d'un homme politique influent.

Dans tous ces pays, c'est essentiellement la meÁre qui conduit les enfants aux seÂances de vaccination, et les conditions de travail des meÁres influent donc sur la possibilite que leurs enfants soient vaccineÂs. En Inde, les dates et lieux des seÂances de vaccination eÂtaient souvent fixeÂs aÁ la convenance des agents de santeÂ, si bien qu'en dernieÁre analyse c'eÂtaient les horaires des transports publics et les deÂfaillances eÂventuelles de ceux-ci qui faisaient qu'une seÂance de vaccination ait ou non lieu et aÁ quel moment.

La probleÂmatique hommes-femmes peut eÂga- lement influer sur l'accessibilite des seÂances de vaccination. Au Bangladesh, ouÁ les femmes sont freÂquemment isoleÂes du monde, les meÁres ne deÂsiraient pas eÃtre vaccineÂes contre le teÂtanos par des agents de sante masculins mais ne voyaient aucune objection aÁ ce que leurs enfants le soient. En Inde, l'administration de l'anatoxine teÂtanique est rendue difficile aÁ Pauri Gharwal parce que les femmes enceintes ne sont pas censeÂes eÃtre vues en public, notamment par les hommes aÃgeÂs du village. Qui plus est, dans un contexte de violence et de troubles quotidiens, des agents de sante feÂminins ont eÂte molesteÂs et violeÂs dans l'Uttar Pradesh.

Lorsqu'on les interrogeait sur le lieu des seÂances de vaccination, la plupart des meÁres de tous les pays eÂtudieÂs ne mentionnaient ni l'acceÁs difficile, ni les longues attentes, ni meÃme la difficulte de faire coõÈncider horaire de travail et heures de vaccination.

Toutefois, il a semble que, d'une manieÁre geÂneÂrale, les meÁres d'enfants non vaccineÂs eÂtaient aussi celles qui habitaient le plus loin des lieux de vaccination, qui se situaient au bas de l'eÂchelle sociale, et qui eÂtaient les plus toucheÂes par les pheÂnomeÁnes saisonniers tels que les inondations. Au Bangladesh, des femmes pauvres ne pouvaient pas payer le transport jusqu'aux centres de vaccination fixes. En Ethiopie, certaines meÁres d'enfants non vaccineÂs disaient ne pouvoir, par les fortes chaleurs, porter leurs enfants sur les grandes distances qui les seÂparaient des lieux de vaccination.

En Inde, l'acceÁs aux lieux de vaccination avait une dimension culturelle ± les femmes de castes

« eÂnumeÂreÂes » acceptant mal de devoir attendre que les enfants de castes plus eÂleveÂes aient eÂte vaccineÂs.

Au Malawi, un cinquieÁme des meÁres disaient devoir marcher pendant plus d'une heure pour arriver au lieu

de vaccination. C'est aux Philippines qu'on signalait le moins de probleÁmes. En Inde, au Malawi et aux Philippines, des meÁres rapportaient que certains agents de sante autorisaient leurs parents et amis, ainsi que les meÁres de condition sociale eÂleveÂe, aÁ resquiller dans la file d'attente.

Les relations interpersonnelles jugeÂes par les meÁres

Si le tableau d'ensemble est positif, toutes les eÂtudes de pays n'en relevaient pas moins que les agents de sante faisaient preuve d'impolitesse et meÃme parfois de rudesse aÁ l'eÂgard des meÁres. En Ethiopie et en Inde, on signalait que certains agents de sante quittaient leur poste aÁ la premieÁre occasion. Au Malawi, les agents de sante grondaient les meÁres qui arrivaient en retard, et ils travaillaient lentement, s'interrompant aÁ midi, meÃme lorsque des meÁres attendaient encore que leurs enfants soient vaccineÂs.

Aux Philippines, certains agents de sante s'empor- taient facilement contre les meÁres qui oubliaient la fiche de vaccinations, reportaient leur premieÁre visite, ou arrivaient en retard.

Occasions manqueÂes

Des occasions de vaccination sont manqueÂes dans les circonstances suivantes :

± un agent de sante est absent ;

± une seÂance est eÂcourteÂe ;

± on manque de tel ou tel vaccin ;

± on se trouve en preÂsence de certaines contre- indications perceptibles (fieÁvre, diarrheÂe, toux ou rhume, etc.) ;

± un agent de sante deÂcide de ne pas entamer une nouvelle fiole car il ne reste qu'un ou deux enfants aÁ vacciner.

En Inde, on refusait quelquefois de vacciner les enfants souffrants, les agents de sante craignant qu'une quelconque deÂteÂrioration de leur eÂtat ne soit mise sur le compte de la vaccination. Il arrivait aussi que des agents de sante refusent de vacciner les enfants de meÁres appartenant aÁ des castes « eÂnumeÂ- reÂes » qui n'acceptaient pas la contraception.

Effets secondaires

Les agents de sante informaient geÂneÂralement les meÁres des effets secondaires possibles des vaccina- tions. Tous les agents de sante voyaient des enfants qui preÂsentaient des signes d'effets secondaires post- vaccinaux, le plus souvent une enflure de la reÂgion injecteÂe, de la fieÁvre, une douleur, voire des abceÁs. Ils n'admettaient jamais que ces effets secondaires puissent eÃtre dus aÁ leur neÂgligence, bien que certains de leurs supeÂrieurs aient tendance aÁ penser que ce fut le cas, parce qu'ils avaient utilise des aiguilles eÂmousseÂes, par exemple.

Des conseils eÂtaient eÂgalement donneÂs aux meÁres quant aux mesures aÁ prendre si des effets secondaires se manifestaient chez l'enfant. Un agent de sante du Bangladesh disait : « Quelques jours apreÁs

bLes castes « eÂnumeÂreÂes » sont des groupes de la socieÂte indienne occupant une position treÁs infeÂrieure dans la hieÂrarchie sociale en raison de leur preÂtendue impurete rituelle. Auparavant, on les deÂsignait sous le nom d'Intouchables ou d'Harijans ; aujourd'hui on les appelle Dalits.

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la tika (injection), la reÂgion injecteÂe commencËa aÁ enfler et on m'amena l'enfant pour solliciter mon avis.

Elle fut opeÂreÂe aÁ l'hoÃpital et se reÂtablit compleÁte- ment ». En Ethiopie, une enfant fut saisie de

« paralysie » apreÁs avoir eÂte vaccineÂe, et ses parents imputeÁrent cet eÂtat aÁ une vaccination deÂfectueuse ; conduite aÁ l'hoÃpital, elle s'y reÂtablit.

Des effets secondaires peuvent eÂgalement se produire lorsque la formation des agents de sante est insuffisante. En Ethiopie, tous les enfants vaccineÂs en un certain lieu firent un abceÁs, et il apparut que les vaccinations avaient eÂte pratiqueÂes par un agent de sante qui n'avait pas eÂte preÂpare aÁ ce genre d'actes.

Au Bangladesh, un enfant est deÂceÂde aÁ la suite d'une vaccination. Les parents et d'autres villageois commenceÁrent par rendre l'agent de sante respon- sable de ce deÂceÁs. Bien qu'on les ait ensuite convaincus qu'il n'en eÂtait rien, le PEV essuya un revers dans la reÂgion lorsque la nouvelle se reÂpandit.

Les effets secondaires tels qu'ils sont percËus par les meÁres

D'ordinaire, les meÁres ne font aucune distinction entre les reÂactions indeÂsirables et les effets secon- daires.

Au Bangladesh, des meÁres signalaient de la fieÁvre, de l'enflure, de la douleur et des cicatrices chez leurs enfants, mais elles ne se plaignaient pas car elles s'attendaient que ces troubles disparaissent. Elles eÂvaluaient aussi l'efficacite du vaccin en fonction des effets secondaires qu'elles observaient. NeÂanmoins, des meÁres se disaient meÂcontentes des jambes enfleÂes, des fortes fieÁvres et des douleurs intenses, et certaines deÂcidaient de ne pas repreÂsenter leur enfant aÁ la vaccination ou de s'abstenir de faire vacciner un enfant plus jeune. D'autres meÁres disaient qu'une fois leur enfant reÂtabli, elles conti- nueraient aÁ le faire vacciner. Il y avait des cas ouÁ les meÁres refusaient de faire vacciner leurs enfants par crainte d'effets secondaires. Une meÁre avait vu l'enfant d'une voisine mourir des suites d'une infection aÁ la jambe. Lorsque l'aõÃne de ses enfants fit un abceÁs apreÁs une vaccination, elle deÂcida de ne pas faire vacciner son enfant plus jeune.

Sur 222 meÁres de Sodo (Ethiopie), 56 ont dit que leurs enfants avaient preÂsente des effets secondaires : enflure, fieÁvre, diarrheÂe, vomissements et preÂsence de pus ont eÂte citeÂs par respectivement 15, 42, 18, 10 et 9 meÁres.

En Inde, les effets secondaires, et particulieÁ- rement la fieÁvre, eÂtaient geÂneÂralement consideÂreÂs comme normaux. Lorsqu'on demandait aux meÁres ce que les vaccins faisaient aux enfants, la plupart reÂpondaient qu'ils « donnaient de la fieÁvre ». D'ordi- naire, les ISFApreÂvenaient les meÁres de ce qui risquait de se passer, et elles leur conseillaient de donner du paraceÂtamol en cas de fieÁvre. Si les effets secondaires (possibles) se reÂveÂlaient plus graves, il en allait tout autrement et cela pouvait conduire aÁ retarder la vaccination. C'est ce qui se produisait dans les circonstances suivantes : les meÁres ne voulaient

pas que leurs nourrissons soient vaccineÂs par le BCG ; la vaccination de l'enfant souffrant d'effets secon- daires eÂtait interrompue ou retardeÂe ; ou c'eÂtait le cycle de vaccination des autres enfants qui eÂtait interrompu. Lorsqu'un abceÁs se produisait apreÁs une injection, on en voulait aÁ l'agent de sante ou, dans un cas, on imputait le pheÂnomeÁne au destin particulier de l'enfant. Dans un cas comme dans l'autre, la technologie meÂdicale n'eÂtait pas mise en cause et la porte restait donc ouverte aux vaccinations ulteÂrieures.

Au Malawi, on a mentionne les effets secon- daires suivants : gonflement de la reÂgion injecteÂe ; fieÁvre ; pleurs ; durcissement de la reÂgion injecteÂe ; fragments d'aiguilles restant sous la peau apreÁs une rupture pendant l'injection ; faiblesse ; amincisse- ment de la jambe injecteÂe, eÂvoluant en paralysie ; et invalidite des beÂbeÂs. Certaines meÁres ont dit qu'elles cessaient de se preÂsenter aux vaccinations aÁ cause des effets secondaires, mais la plupart ne reÂagissaient pas ainsi. Dans un village, des meÁres ont dit avoir recËu des comprimeÂs pour le traitement des effets secondaires, mais qu'elles avaient eÂgalement utilise des remeÁdes traditionnels. Pendant les entretiens approfondis, deux tiers des 50 meÁres de Chintembwe ont dit que leurs enfants n'avaient jamais preÂsente d'effets secondaires. Certaines des meÁres dont les enfants avaient preÂsente des effets secondaires ont dit qu'elles ne s'en inquieÂtaient pas parce que c'eÂtait pour elles le signe que le vaccin agissait.

Aux Philippines, 34 seulement des 2068 fem- mes composant l'eÂchantillon croyaient que les vaccinations pouvaient nuire aÁ l'enfant. La fieÁvre eÂtait l'effet secondaire le plus freÂquemment citeÂ, suivi par l'inflammation. Mais, dans le groupe de discus- sion theÂmatique, c'est une image plus diffeÂrencieÂe qui s'est deÂgageÂe. Pour la majoriteÂ, la fieÁvre apreÁs vaccination eÂtait normale et pouvait eÃtre soulageÂe par le paraceÂtamol. L'inflammation eÂtait eÂgalement consideÂreÂe comme une reÂaction normale, qui en l'occurrence peut eÃtre soigneÂe par application de compresses tieÁdes. On pensait que les leÂsions cutaneÂes et les cicatrices eÂtaient la preuve de l'activite et de l'efficacite d'un vaccin.

Enregistrement des enfants vaccinables

Au Bangladesh, l'enregistrement eÂtait treÁs ineÂgal, sa mise aÁ jour eÂtait toujours incompleÁte, et la fixation d'objectifs restait donc difficile. Dans les villages indiens eÂtudieÂs, certaines naissances eÂtaient enregis- treÂes, mais ce n'eÂtait pas de cette facËon que l'on recensait les enfants vaccinables ou que l'on deÂterminait les besoins en vaccins. Les pays africains ne signalaient aucun enregistrement.

L'absence de bonnes donneÂes d'enregistre- ment des naissances peut entraõÃner des inexactitudes dans la couverture deÂclareÂe. C'est encore plus vrai si les cibles sont fixeÂes aÁ un niveau eÂleve et lorsque l'absence de fiches de vaccination influe neÂgative- ment sur les conditions d'enregistrement.

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Dans certains lieux de vaccination d'Ethiopie, on ne tenait aucun livre. Aun certain endroit, les enfants vaccineÂs de 1 aÁ 2 ans figuraient dans les rapports mensuels comme ayant moins d'un an. Dans un autre, la somme des chiffres mensuels ne correspondait pas au total annuel. Dans l'Uttar Pradesh (Inde), les dates de vaccination indiqueÂes sur les fiches de vaccination tenues par les meÁres ne correspondaient pas aux dates effectives. Dans bien des cas, les dates de vaccination treÁs espaceÂes inscrites sur le fiche eÂtaient maquilleÂes afin de laisser supposer que le calendrier vaccinal avait eÂte respecteÂ.

Retrouver ceux qui abandonnent

Aucun pays ne posseÂdait un systeÁme creÂdible et efficace permettant de retrouver et de motiver les parents qui abandonnaient la vaccination ou ne l'acceptaient pas. Au Bangladesh, en Ethiopie et en Inde, on ne recensait geÂneÂralement pas les abandons.

Les agents de sante informaient rarement les meÁres de l'eÂtat vaccinal de leurs enfants. En fait, c'est d'elles- meÃmes que les meÁres venaient faire vacciner leurs enfants et, d'ordinaire, les agents de sante s'abste- naient de se rendre chez les meÁres qui n'assistaient pas aux seÂances de vaccination. Au Malawi, les meÁres eÂtaient informeÂes que leurs enfants eÂtaient insuffi- samment vaccineÂs lorsqu'elles venaient pour des soins curatifs.

Motifs de non-preÂsentation des enfants aÁ la vaccination

Il existe diffeÂrents motifs de non-preÂsentation des enfants aÁ la vaccination.cLa surcharge de travail, la maladie, l'assistance aÁ des funeÂrailles, l'inondation des routes et les treÁs fortes chaleurs figuraient parmi les raisons invoqueÂes par les femmes qui auraient souhaite venir mais en avaient eÂte empeÃcheÂes. Le mauvais fonctionnement ou l'inadeÂquation des services de vaccination eÂtait une autre raison importante d'abandon. Au Bangladesh, les meÁres des villages peÂripheÂriques ne pouvaient se rendre jusqu'aux centres de vaccination. Certaines meÁres, mal informeÂes des dates des seÂances, parcouraient ainsi de grandes distances pour rien. D'autres n'eÂtaient tout simplement pas au courant. En Inde, on mentionnait l'incommodite des heures de vacci- nation, l'impolitesse du personnel et les mesures discriminatoires restreignant l'accessibiliteÂ. En Ethio- pie, on invoquait l'absence de vaccins et de vaccinateurs, ainsi que la distance aÁ parcourir sous la chaleur. Au Malawi, l'inteÂreÃt s'eÂtait eÂmousse parce les vaccinateurs s'abstenaient souvent de se rendre dans les antennes peÂripheÂriques. MeÃme lorsque les meÁres eÂtaient laÁ avec leurs enfants, il arrivait souvent qu'il n'y ait pas de vaccins. Quelquefois, la distance

qu'il fallait parcourir aÁ pied eÂtait trop grande, 20 km dans certains cas. Les femmes se plaignaient eÂgalement de se faire rudoyer par le personnel.

Discussion

L'administration systeÂmatique de vaccinations dans des formations fixes et des antennes mobiles est devenue la pieÁce maõÃtresse des systeÁmes de vaccina- tion viables dans les pays en deÂveloppement. Or des systeÁmes viables sont indispensables aÁ la poursuite de la lutte contre les maladies eÂvitables par la vaccina- tion. Souvent, la vaccination systeÂmatique s'effectue dans des conditions climatiques et infrastructurelles deÂfavorables, neÂcessitant donc des eÂquipes de vaccinateurs motiveÂs et fortement soutenus par les deÂcideurs et les administrateurs. Qui plus est, il est capital que les parents conservent une impression positive du processus de vaccination si l'on veut qu'ils continuent aÁ se preÂsenter avec leurs enfants aÁ toutes les eÂtapes du calendrier vaccinal.

Les meÁres sont nettement deÂcideÂes aÁ faire beaucoup d'efforts pour que leurs enfants soient vaccineÂs. Toutefois, du coÃte des vaccinateurs, il y a place pour de consideÂrables ameÂliorations. Les reÂaliteÂs de la vaccination systeÂmatique et les per- ceptions que l'on a de ceux qui soignent les enfants dans cinq pays africains et asiatiques font apparaõÃtre des deÂfaillances et des tensions aux points de contact entre vaccinateurs et utilisateurs ; celles-ci menacent la continuite et la couverture des programmes de vaccination.

Les principales deÂfaillances dans l'administra- tion des vaccins sont notamment les suivantes :

± insuffisance des fournitures, et particulieÁrement des vaccins, des fiches de vaccination et des documents d'enregistrement ;

± les informations approprieÂes sur les vaccins, les maladies eÂvitables par la vaccination et les calendriers de vaccination sont geÂneÂralement donneÂes en dehors du cadre des seÂances de vaccination ;

± les mauvaises conditions de transport aÁ la disposition des agents de sante nuisent aÁ la freÂquence et aÁ la reÂgularite des seÂances de vaccination ;

± les seÂances de vaccination sont organiseÂes en fonction de contraintes de temps deÂfinies par les vaccinateurs qui compromettent la qualite des soins ;

± des inexactitudes se produisent dans l'enregis- trement des vaccinations ;

± il n'y a pas de suivi efficace des parents qui abandonnent.

Les tensions importantes qui se produisent dans le systeÁme de vaccination et qui retentissent sur les fournisseurs et les utilisateurs sont notamment les suivantes :

± l'impolitesse des vaccinateurs vis-aÁ-vis des meÁres qui arrivent en retard ou qui ont oublie la fiche de

c Un cas de refus collectif persistant de faire vacciner les enfants a eÂte deÂcrit au Malawi ouÁ les membres de l'Eglise africaine de Sion et des TeÂmoins de JeÂhovah s'opposent aÁ la vaccination pour des raisons reli- gieuses ; il en est de meÃme aux Philippines ouÁ les TeÂmoins de JeÂhovah ne font pas vacciner leurs enfants.

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vaccination ruine la confiance dans le personnel soignant et dissuade les meÁres de preÃter l'oreille aux messages d'eÂducation pour la sante diffuseÂs par les vaccinateurs ;

± la survenance d'effets secondaires graves et l'impression de mauvaise qualite de l'acte vaccinal incitent les parents aÁ cesser de preÂsenter leurs enfants aÁ la vaccination ;

± les vaccinateurs techniquement compeÂtents ne sont pas percËus comme tels par les utilisateurs s'ils sont pratiquement deÂpourvus de tout sens des contacts sociaux ;

± le manque de fournitures, l'inaccessibilite des lieux, les contraintes de temps qui s'exercent sur les vaccinateurs, ainsi que l'interruption des calendriers fixeÂs aneÂantissent les grands efforts consentis par les meÁres pour conduire leurs enfants aÁ la vaccination ;

± les meÁres d'enfants non vaccineÂs ont tendance aÁ eÃtre pauvres, aÁ vivre loin des centres de santeÂ

fixes, aÁ eÃtre de condition sociale modeste, et aÁ habiter des reÂgions physiquement isoleÂes, toutes circonstances qui vont aÁ l'encontre de la mise en place d'un systeÁme de vaccination eÂquitable.

Les deÂfaillances dans la fourniture des vaccins et les tensions qui se produisent aux points de contact entre vaccinateurs et utilisateurs nuisent aÁ la viabilite des programmes de vaccination tout en favorisant l'apparition de groupes d'enfants non vaccineÂs ou partiellement vaccineÂs. De grands progreÁs ont eÂte faits depuis 1974 , eÂpoque aÁ laquelle le Programme eÂlargi de Vaccination a commence aÁ promouvoir des programmes natio- naux de vaccination qui s'inscrivent dans la dureÂe.

Le moment est maintenant venu d'ameÂliorer sensiblement la qualite et la viabiliteÂ, mais aussi d'introduire des formules qui soient culturellement et socialement adapteÂes. n

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