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CORPUS HLP. Quand la découverte d autres mœurs fait avancer l imaginaire sur d autres valeurs et représentations

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CORPUS

HLP. Quand la découverte d’autres mœurs fait avancer l’imaginaire sur d’autres valeurs et représentations…

Christophe Colomb (1451-1506), Lettre de Christophe Colomb sur la découverte du Nouveau-Monde, 1493, publié selon la version latine conservée à la BNF, traduction Lucien de Rosny, 1865

Repris de : http://fr.wikisource.org/wiki/Lettre_sur_la_découverte_du_Nouveau-Monde

En outre, cette dite île Hespañola abonde en différentes espèces d’aromates, en or et en métaux ; les habitants des deux sexes de cette île, comme ceux des autres îles que j’ai visitées et ou dont j’ai entendu parler, sont toujours nus et tels qu’ils sont venus au monde. Quelques femmes cependant couvrent leur nudité d’une feuille ou de quelque feuillage, ou d’un voile de coton qu’elles ont préparé pour cet usage. Tous manquent de fer comme je l’ai dit : ils manquent aussi d’armes ; elles leur sont inconnues pour ainsi dire ; et d’ailleurs ils ne sont point aptes à en faire usage, non par la difformité de leur corps, car ils sont bien faits, mais parce qu’ils sont timides et craintifs. Au lieu d’armes, ils portent des roseaux durcis au soleil, et aux racines desquels ils adaptent une espèce de lame de vois sec, terminée en pointe. Ils n’osent même plus s’en servir, car il arriva souvent que députant deux ou trois hommes vers quelques-unes de leurs bourgades afin de conférer avec eux, une foule d’Indiens sortaient, et dès qu’ils voyaient que les nôtres s’approchaient d’eux, ils prenaient promptement la fuite, au point que les pères abandonnaient leurs enfants, et réciproquement, quoiqu’on ne leur fît aucun mal. Cependant ceux que j’ai pu aborder, et avec lesquels j’ai pu échanger quelques paroles, je leur donnais des étoffes ou beaucoup d’autres choses sans qu’ils me donnassent autre chose en échange ; mais je le répète, ils sont naturellement craintifs et timides. Toutefois, quand ils se croient en sûreté, quand la crainte a disparu, alors ils se montrent simples, de bonne foi, et très généreux dans ce qu’ils ont. Aucun d’eux ne refuse ce qu’il possède à celui qui le lui demande. Bien plus, ils nous invitaient à leur demander. Ils ont pour tous une grande affection, se plaisent à donner beaucoup, pour recevoir peu, se contentent de la moindre bagatelle et même de rien du tout.

J’ai défendu qu’on leur donnât des objets d’une trop mince valeur, ou tout à fait insignifiants, comme des fragments de plat, d’assiette, de verre ; ceux qui recevaient des clous, des lanières pensaient être en possession des plus beaux bijoux du monde. Il arriva à l’un des matelots de recevoir pour une lanière autant d’or qu’il en faudrait pour faire trois sous d’or. D’autres hommes de l’équipage dans leurs échanges ont été traités aussi favorablement ; pour de nouveaux blancas [petites pièces d’argent ou d’alliage (NdT)], pour quelques écus d’or, ces Indiens donnaient tout ce qu’on voulait. Ainsi, par exemple, une ou deux onces d’or pour une pièce de monnaie d’or qui n’en valait pas la moitié, ou trente à quarante livres de coton dont ces matelots connaissaient déjà la valeur. Enfin, pour des fragments d’arc, de vase, de carafe, de poterie réfrigérante, ils donnaient du coton ou de l’or dont ils se chargeaient comme des bêtes de somme. Mais comme ces échanges étaient contraires à l’équité, je les défendis et je donnai gratuitement à ces bons Indiens beaucoup d’objets beaux et agréables que j’avais apportés avec moi, afin de me les attacher plus facilement, qu’ils se fissent chrétiens et qu’ils fussent plus portés à

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2 aimer notre roi, notre reine, nos princes, toutes les populations de l’Espagne ; afin de les engager à rechercher, à amasser et à nous livrer les biens dont ils abondent et dont nous manquons totalement.

Christophe Colomb (1451-1506), Lettre aux rois catholiques, 1498 CF http://histoireenprimaire.free.fr/ressources/colomb_textes2.htm

Les gens de ce pays-ci sont de très belle stature et plus blancs que tous ceux que nous avons pu voir aux Indes. (…) L’Écriture sainte témoigne que Notre Seigneur fit le Paradis terrestre, qu’il y mit l’arbre de vie et que de là sort une source d’où naissent en ce monde quatre fleuves principaux: le Gange aux Indes, le Tigre et l’Euphrate en Asie (…) et le Nil qui naît en Ethiopie et se jette dans la mer à Alexandrie. (…) Je suis convaincu que là est le Paradis terrestre, où personne ne peut arriver si ce n’est par la volonté divine. Je crois que cette terre dont Vos Altesses ont ordonné maintenant la découverte sera immense et qu’il y en aura beaucoup d’autres dans le Midi dont on n’a jamais eu connaissance.(…) Et je dis que si ce n’est pas du Paradis terrestre que vient ce fleuve, c’est d’une terre infinie, donc située au midi, et de laquelle jusqu’à ce jour il ne s’est rien su. Toutefois, je tiens en mon âme pour très assuré que là où je l’ai dit se trouve le Paradis terrestre.

Extrait d’une lettre d’Amerigo VESPUCCI (1454-1512)

Cette terre est très agréable, pleine d’arbres de haute taille qui ne perdent jamais leurs feuilles et dont émanent des odeurs suaves. On se croirait au Paradis […] Cette terre est peuplée par des gens tous nus, tant les hommes que les femmes.

Ils n’ont ni loi, ni foi aucune, ils vivent selon la nature et ne connaissent pas l’immortalité de l’âme. Ils n’ont rien qui leur soit propre et tout est commun entre eux ; ils n’ont pas de frontière entre provinces et royaumes, ils n’ont pas de roi et n’obéissent à personne.

Lettre d’Amerigo Vespucci à Lorenzo di Pierfrancesco de Medici (donné à Lisbonne le 4 septembre 1504). Amerigo Vespucci a abordé le Brésil le 7 août 1501

Qu’en est-il tout d’abord des hommes? Nous en trouvâmes une telle multitude dans ces régions qu’on ne pourrait à peine les dénombrer, comme on lit dans l’Apocalypse; ces hommes, je les dirai doux et sociables ; tous, de l’un et l’autre sexes, se déplacent nus, sans couvrir aucune partie de leur corps, et tels qu’ils sont sortis du ventre de leur mère ils vont jusqu’à leur mort. Ils ont le corps imposant, bien taillé, bien proportionné, d’une couleur qui tire sur le rouge. Cela tient, selon moi, à ce que, allant nus, ils sont teints par le soleil. Ils portent une chevelure ample et sombre. Ils sont, dans leur démarche, agiles et gracieux. Leur figure est agréable, mais ils s’emploient eux-mêmes à la ravager. Ils se trouent en effet joues, lèvres, narines et oreilles. Ne croyez pas que ces trous soient petits ou qu’ils n’en portent qu’un. J’en ai vu qui, sur le seul visage, portaient jusqu’à sept trous, tous de la taille d’une prune. Ils les obturent avec de magnifiques pierres azurées, du marbre, des cristaux, de l’albâtre, avec des os d’une extrême blancheur, et des objets qu’ils travaillent avec art selon leur coutume. […] Ils n’ont ni étoffes de laine, ni de lin, ni de coton parce qu’ils n’en n’ont nul besoin et ne possèdent aucun bien propre; ils

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3 mettent tout en commun et vivent ensemble sans roi ni autorité: chacun y est son propre maître. Ils prennent autant de femmes qu’ils le veulent, le fils couche avec la mère, le frère avec la sœur, le premier venu avec la première venue, et chacun avec qui il rencontre. Ils défont leurs mariages aussi souvent qu’ils le veulent et n’observent aucune règle dans ce domaine. Ils ne possèdent en outre ni temples ni lois, mais ils ne sont pas idolâtres. Que dire de plus? Ils vivent selon la nature, et peuvent être dits épicuriens plutôt que stoïciens. Il n’est chez eux ni marchands ni commerces. Les peuples se font la guerre sans doctrine ni règles. En quelques harangues, les vieillards amènent les jeunes à leurs vues et les excitent à la guerre, où ils s’entretuent avec beaucoup de cruauté; les prisonniers qu’ils ramènent, ils les gardent afin de les exécuter non pour leur retirer la vie mais pour s’assurer leur propre subsistance. Ils se mangent en effet entre eux: les vainqueurs mangent les vaincus et la chair humaine est chez eux nourriture commune.

in Ilda Mendes dos Santos, La découverte du Brésil : les premiers témoignages, éd Chandeigne, 2000, pages 97-99. Ce témoignage, dont l’original en italien est perdu, a été traduit et imprimé en latin (sous le nom de «Mundus Novus») en 1504 à Augsburg. Trouvé sur books.google.com

Jean de Léry (1536-1613), Histoire d’un voyage fait en la terre de Brésil, 1578, chapitre VIII (extrait) « Du naturel, force, stature, nudité, disposition et ornements du corps, tant des hommes que des femmes sauvages Brésiliens, habitant en l’Amérique : entre lesquels j’ai fréquenté environ un an. »

Toutesfois avant que clore ce chapitre, ce lieu-ci requiert que je réponde, tant à ceux qui ont écrit, qu’à ceux qui pensent que la fréquentation entre ces sauvages tous nus, et principalement parmi les femmes, incite à lubricité et paillardise. Sur quoi je dirai en un mot, qu’encore voirement qu’en apparence il n’y ait que trop d’occasion d’estimer qu’outre la déshonnêteté de voir ces femmes nues, cela ne semble aussi servir comme d’un appât ordinaire à convoitise : toutefois, pour en parler selon ce qui s’en est communément aperçu pour lors, cette nudité, aussi grossière en telle femme est beaucoup moins attrayante qu’on ne cuiderait. Et partant, je maintiens que les attifets, fards, fausses perruques, cheveux tortillés, grands collets fraisés, vertugales, robes sur robes, et autres infinies bagatelles dont les femmes et filles de par-deçà se contrefont et n’ont jamais assez, sont sans comparaison, cause de plus de maux que n’est la nudité ordinaire des femmes sauvages : lesquelles cependant, quant au naturel, ne doivent rien aux autres en beauté. Tellement que si l’honnêteté me permettait d’en dire davantage, me vantant de bien soudre toutes les objections qu’on pourrait amener au contraire, j’en donnerais des raisons si évidentes que nul ne pourrait les nier. Sans doncques poursuivre ce propos plus avant, je me rapporte de ce peu que j’en ai dit à ceux qui ont fait le voyage en la terre du Brésil, et qui comme moi ont vu les unes et les autres.

Ce n’est cependant que contre ce que dit la sainte Ecriture d’Adam et Eve, lesquels après le péché, reconnaissant qu’ils étaient nus furent honteux, je veuille en façon que ce soit approuver cette nudité : plutôt détesterai-je les hérétiques qui contre la Loi de nature (laquelle toutefois quant à ce point n’est nullement observée entre nos pauvres Américains) l’ont toutefois voulu introduire par-deçà.

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4 Mais ce que j’ai dit de ces sauvages est, pour montrer qu’en les condamnant si austèrement, de ce que sans nulle vergogne ils vont ainsi le corps entièrement découvert, nous excédant en l’autre extrémité, c’est-à-dire en nos bombances, superfluités et excès en habits, ne sommes guère plus louables. Et plût à Dieu, pour mettre fin à ce point, qu’un chacun de nous, plus pour l’honnêteté et nécessité, que pour la gloire et mondanité, s’habillât modestement.

Michel de Montaigne (1533-1592), Les Essais (1572-1588), Livre I : « Au Lecteur »

Voici un livre de bonne foi, Lecteur. Il t’avertit dès le début que je ne m’y suis fixé aucun autre but que personnel et privé ; je ne m’y suis pas soucié ni de te rendre service, ni de ma propre gloire : mes forces ne sont pas à la hauteur d’un tel dessein.

Je l’ai dévolu à l’usage particulier de mes parents et de mes amis pour que, m’ayant perdu (ce qui se produira bientôt), ils puissent y retrouver les traits de mon comportement et de mon caractère, et que grâce à lui ils entretiennent de façon plus vivante et plus complète la connaissance qu’ils ont eue de moi. S’il s’était agi de rechercher la faveur du monde, je me serais paré de beautés empruntées. Je veux, au contraire, que l’on m’y voie dans toute ma simplicité, mon naturel et mon comportement ordinaire, sans recherche ni artifice, car c’est moi que je peins. Mes défauts s’y verront sur le vif, mes imperfections et ma façon d’être naturellement, autant que le respect du public me l’a permis. Si j’avais vécu dans un de ces peuples que l’on dit vivre encore selon la douce liberté des premières lois de la nature, je t’assure que je m’y serais très volontiers peint tout entier et tout nu.

Ainsi, Lecteur, je suis moi-même la matière de mon livre : il n’est donc pas raisonnable d’occuper tes loisirs à un sujet si frivole et si vain. Adieu donc.

De Montaigne, ce 12 Juin 1588.

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5 Denis Diderot (1713-1784), Supplément au Voyage de Bougainville, 1772

En 1771, paraissait le Voyage autour du monde, écrit par le navigateur Bougainville qui venait, de novembre 1766 à mars 1769, de faire un long périple autour du monde.

Bougainville avait ramené un Tahitien, Aotourou qu’il « promena » dans Paris et qui provoqua un véritable engouement. Diderot trouva dans le récit du voyageur et dans les témoignages du Tahitien l’occasion d’une double réflexion sur le problème politique et social de la colonisation et sur la question, morale et sociale, de la liberté sexuelle. La remis en cause d’institutions telles que le mariage, la mise en évidence de la relativité des coutumes rejoignent les préoccupations sociales et philosophiques de Diderot.

[…] B. Je n’en doute pas : la vie sauvage est si simple, et nos sociétés sont des machines si compliquées ! Le Tahitien touche à l’origine du monde, et l’Européen touche à sa vieillesse. L’intervalle qui le sépare de nous est plus grand que la distance de l’enfant qui naît à l’homme décrépit. Il n’entend rien à nos usages, à nos lois, ou il n’y voit que des entraves déguisées sous cent formes diverses ; entraves qui ne peuvent qu’exciter l’indignation et le mépris d’un être en qui le sentiment de la liberté est le plus profond des sentiments.

A. Est-ce que vous donneriez dans la fable de Tahiti ?

B. Ce n’est point une fable ; et vous n’auriez aucun doute sur la sincérité de Bougainville, si vous connaissiez le supplément de son voyage.

A. Et où trouve-t-on ce supplément ? B. Là, sur cette table.

A. Est-ce que vous ne me le confierez pas ?

B. Non ; mais nous pourrons le parcourir ensemble, si vous voulez.

A. Assurément, je le veux. Voilà le brouillard qui retombe, et l’azur du ciel qui commence à paraître. Il semble que mon lot soit d’avoir tort avec vous jusque dans les moindres choses ; il faut que je sois bien bon pour vous pardonner une supériorité aussi continue !

B. Tenez, tenez, lisez : passez ce préambule qui ne signifie rien, et allez droit aux adieux que lit un des chefs de l’île à nos voyageurs. Cela vous donnera quelque notion de l’éloquence de ces gens-là.

A. Comment Bougainville a-t-il compris ces adieux prononcés dans une langue qu’il ignorait ?

B. Vous le saurez. C’est un vieillard qui parle.

II.

LES ADIEUX DU VIEILLARD

Il était père d’une famille nombreuse. À l’arrivée des Européens, il laissa tomber des regards de dédain sur eux, sans marquer ni étonnement, ni frayeur, ni curiosité.

Ils l’abordèrent ; il leur tourna le dos, se retira dans sa cabane. Son silence et son souci ne décelaient que trop sa pensée : il gémissait en lui-même sur les beaux jours de son pays éclipsés. Au départ de Bougainville, lorsque les habitants accouraient en foule sur le rivage, s’attachaient à ses vêtements, serraient ses camarades entre leurs bras, et pleuraient, ce vieillard s’avança d’un air sévère, et dit :

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« Pleurez, malheureux Tahitiens ! pleurez ; mais que ce soit de l’arrivée, et non du départ de ces hommes ambitieux et méchants : un jour, vous les connaîtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voyez attaché à la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au côté de celui-là, dans l’autre, vous enchaîner, vous égorger, ou vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices ; un jour vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu’eux. Mais je me console ; je touche à la fin de ma carrière ; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point. Tahitiens ! mes amis ! vous auriez un moyen d’échapper à un funeste avenir ; mais j’aimerais mieux mourir que de vous en donner le conseil. Qu’ils s’éloignent, et qu’ils vivent. »

Puis s’adressant à Bougainville, il ajouta : « Et toi, chef des brigands qui t’obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive : nous sommes innocents, nous sommes heureux ; et tu ne peux que nuire à notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; et tu as tenté d’effacer de nos âmes son caractère. Ici tout est à tous ; et tu nous as prêché je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagé ce privilège avec nous ; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu féroce entre les leurs. Elles ont commencé à se haïr ; vous vous êtes égorgés pour elles ; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres ; et voilà que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage. Tu n’es ni un dieu, ni un démon : qui es- tu donc, pour faire des esclaves ? Orou ! toi qui entends la langue de ces hommes- Là, dis-nous à tous, comme tu me l’as dit à moi, ce qu’ils ont écrit sur cette lame de métal : Ce pays est à nous. Ce pays est à toi ! et pourquoi ? parce que tu y as mis le pied ? Si un Tahitien débarquait un jour sur vos côtes, et qu’il gravât sur une de vos pierres ou sur l’écorce d’un de vos arbres : Ce pays appartient aux habitants de Tahiti, qu’en penserais-tu ? Tu es le plus fort ! Et qu’est-ce que cela fait ? Lorsqu’on t’a enlevé une des méprisables bagatelles dont ton bâtiment est rempli, tu t’es récrié, tu t’es vengé ; et dans le même instant tu as projeté au fond de ton cœur le vol de toute une contrée ! Tu n’es pas esclave : tu souffrirais la mort plutôt que de l’être, et tu veux nous asservir ! Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas défendre sa liberté et mourir ? Celui dont tu veux t’emparer comme de la brute, le Tahitien est ton frère.

Vous êtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui qu’il n’ait pas sur toi ? Tu es venu ; nous sommes-nous jetés sur ta personne ? avons-nous pillé ton vaisseau ? t’avons-nous saisi et exposé aux flèches de nos ennemis ? t’avons-nous associé dans nos champs au travail de nos animaux ? Nous avons respecté notre image en toi. Laisse-nous nos mœurs, elles sont plus sages et plus honnêtes que les tiennes.

Nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumières. Tout ce qui nous est nécessaire et bon, nous le possédons. Sommes-nous dignes de mépris parce que nous n’avons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vêtir. Tu es entré dans nos cabanes, qu’y manque-t-il, à ton avis ? Poursuis jusqu’où tu voudras ce que tu appelles commodités de la vie ; mais permets à des êtres sensés de s’arrêter, lorsqu’ils n’auraient à obtenir, de la continuité de leurs pénibles efforts, que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l’étroite limite du besoin, quand finirons-nous de travailler ? Quand

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7 jouirons-nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journalières, la moindre qu’il était possible, parce que rien ne nous paraît préférable au repos. Va dans ta contrée t’agiter, te tourmenter tant que tu voudras ; laisse-nous reposer : ne nous entête ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimériques.

Regarde ces hommes ; vois comme ils sont droits, sains et robustes. Regarde ces femmes ; vois comme elles sont droites, saines, fraîches et belles. Prends cet arc, c’est le mien ; appelle à ton aide un, deux, trois, quatre de tes camarades, et tâchez de le tendre. Je le tends moi seul ; je laboure la terre ; je grimpe la montagne ; je perce la forêt ; je parcours une lieue de la plaine en moins d’une heure. Tes jeunes compagnons ont eu peine à me suivre, et j’ai quatre-vingt-dix ans passés. Malheur à cette île ! malheur aux Tahitiens présents, et à tous les Tahitiens à venir, du jour où tu nous as visités ! Nous ne connaissions qu’une maladie, celle à laquelle l’homme, l’animal et la plante ont été condamnés, la vieillesse, et tu nous en as apporté une autre ; tu as infecté notre sang. Il nous faudra peut-être exterminer de nos propres mains nos filles, nos femmes, nos enfants ; ceux qui ont approché tes femmes ; celles qui ont approché tes hommes. Nos champs seront trempés du sang impur qui a passé de tes veines dans les nôtres ; ou nos enfants, condamnés à nourrir et à perpétuer le mal que tu as donné aux pères et aux mères et qu’ils transmettront à jamais à leurs descendants. Malheureux ! tu seras coupable, ou des ravages qui suivront les funestes caresses des tiens, ou des meurtres que nous commettrons pour en arrêter le poison. Tu parles de crimes ! as-tu l’idée d’un plus grand crime que le tien ? Quel est chez toi le châtiment de celui qui tue son voisin ? la mort par le fer : quel est chez toi le châtiment du lâche qui l’empoisonne ? la mort par le feu : compare ton forfait à ce dernier ; et dis-nous, empoisonneur de nations, le supplice que tu mérites ? Il n’y a qu’un moment, la jeune Tahitienne s’abandonnait aux transports, aux embrassements du jeune Tahitien ; attendait avec impatience que sa mère (autorisée par l’âge nubile) relevât son voile, et mît sa gorge à nu. Elle était fière d’exciter les désirs, et d’arrêter les regards amoureux de l’inconnu, de ses parents, de son frère ; elle acceptait sans frayeur et sans honte, en notre présence, au milieu d’un cercle d’innocents Tahitiens, au son des flûtes, entre les danses, les caresses de celui que son jeune cœur et la voix secrète de ses sens lui désignaient.

L’idée de crime et le péril de la maladie sont entrés avec toi parmi nous. Nos jouissances, autrefois si douces, sont accompagnées de remords et d’effroi. Cet homme noir, qui est près de toi, qui m’écoute, a parlé à nos garçons ; je ne sais ce qu’il a dit à nos filles ; mais nos garçons hésitent ; mais nos filles rougissent.

Enfonce-toi, si tu veux, dans la forêt obscure avec la compagne perverse de tes plaisirs ; mais accorde aux bons et simples Tahitiens de se reproduire sans honte, à la face du ciel et au grand jour. Quel sentiment plus honnête et plus grand pourrais- tu mettre à la place de celui que nous leur avons inspiré, et qui les anime ? Ils pensent que le moment d’enrichir la nation et la famille d’un nouveau citoyen est venu, et ils s’en glorifient. Ils mangent pour vivre et pour croître : ils croissent pour multiplier, et ils n’y trouvent ni vice, ni honte. Écoute la suite de tes forfaits. À peine t’es-tu montré parmi eux, qu’ils sont devenus voleurs. À peine es-tu descendu dans notre terre, qu’elle a fumé de sang. Ce Tahitien qui courut à ta rencontre, qui t’accueillit, qui te reçut en criant : Taïo ! ami, ami ; vous l’avez tué. Et pourquoi l’avez- vous tué ? parce qu’il avait été séduit par l’éclat de tes petits œufs de serpent. Il te

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8 donnait ses fruits ; il t’offrait sa femme et sa fille ; il te cédait sa cabane : et tu l’as tué pour une poignée de ces grains, qu’il avait pris sans te le demander. Et ce peuple ? Au bruit de ton arme meurtrière, la terreur s’est emparée de lui ; et il s’est enfui dans la montagne. Mais crois qu’il n’aurait pas tardé d’en descendre ; crois qu’en un instant, sans moi, vous périssiez tous. Eh ! pourquoi les ai-je apaisés ? pourquoi les ai-je contenus ? pourquoi les contiens-je encore dans ce moment ? Je l’ignore ; car tu ne mérites aucun sentiment de pitié ; car tu as une âme féroce qui ne l’éprouva jamais. Tu t’es promené, toi et les liens, dans notre île ; tu as été respecté ; tu as joui de tout ; tu n’as trouvé sur ton chemin ni barrière, ni refus : on t’invitait ; tu t’asseyais ; on étalait devant toi l’abondance du pays. As-tu voulu des jeunes filles ? excepté celles qui n’ont pas encore le privilège de montrer leur visage et leur gorge, les mères t’ont présenté les autres toutes nues ; te voilà possesseur de la tendre victime du devoir hospitalier ; on a jonché, pour elle et pour toi, la terre de feuilles et de fleurs ; les musiciens ont accordé leurs instruments ; rien n’a troublé la douceur, ni gêné la liberté de tes caresses ni des siennes. On a chanté l’hymne, l’hymne qui t’exhortait à être homme, qui exhortait notre enfant à être femme, et femme complaisante et voluptueuse. On a dansé autour de votre couche ; et c’est au sortir des bras de cette femme, après avoir éprouvé sur son sein la plus douce ivresse, que tu as tué son frère, son ami, son père, peut-être. Tu as fait pis encore ; regarde de ce côté ; vois cette enceinte hérissée de flèches ; ces armes qui n’avaient menacé que nos ennemis, vois-les tournées contre nos propres enfants : vois les malheureuses compagnes de nos plaisirs ; vois leur tristesse ; vois la douleur de leurs pères ; vois le désespoir de leurs mères : c’est là qu’elles sont condamnées à périr par nos mains, ou par le mal que tu leur as donné. Éloigne-toi, à moins que tes yeux cruels ne se plaisent à des spectacles de mort : éloigne-toi ; va, et puissent les mers coupables qui t’ont épargné dans ton voyage, s’absoudre, et nous venger en t’engloutissant avant ton retour ! Et vous, Tahitiens, rentrez dans vos cabanes, rentrez tous ; et que ces indignes étrangers n’entendent à leur départ que le flot qui mugit, et ne voient que l’écume dont sa fureur blanchit une rive déserte ! »

À peine eut-il achevé, que la foule des habitants disparut : un vaste silence régna dans toute l’étendue de l’île ; et l’on n’entendit que le sifflement aigu des vents et le bruit sourd des eaux sur toute la longueur de la côte : on eût dit que l’air et la mer, sensibles à la voix du vieillard, se disposaient à lui obéir.

B. Eh bien ! qu’en pensez-vous ? […]

Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, 1755

En 1755, l’académie de Dijon ouvre un concours dont le sujet conduit à chercher « Quelle est l’origine de l’inégalité de condition parmi les hommes, et si elle est autorisée par la loi naturelle ». Rousseau répond par un discours composé en deux parties. Dans la première, il évoque ce qu’il appelle « l’état de nature », qu’il envisage comme une utopie. La seconde partie est consacrée à l’étude de l’apparition de l’inégalité. Le texte suivant est extrait de la 2nde partie du Discours.

L’exemple des sauvages qu’on a presque tous trouvés à ce point1 semble confirmer que le genre humain était fait pour y rester toujours, que cet état est la

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9 véritable jeunesse du monde, et que tous les progrès ultérieurs ont été en apparence autant de pas vers la perfection de l’individu, et en effet vers la décrépitude de l’espèce.

Tant que les hommes se contentèrent de leurs cabanes rustiques, tant qu’ils se bornèrent à coudre leurs habits de peaux avec des épines ou des arêtes, à se parer de plumes et de coquillages, à se peindre le corps de diverses couleurs, à perfectionner ou à embellir leurs arcs et leurs flèches, à tailler avec des pierres tranchantes quelques canots de pêcheurs ou quelques grossiers instruments de musique ; en un mot tant qu’ils ne s’appliquèrent qu’à des ouvrages qu’un seul pouvait faire, et qu’à des arts qui n’avaient pas besoin du concours de plusieurs mains, ils vécurent libres, sains, bons, et heureux autant qu’ils pouvaient l’être par leur nature, et continuèrent à jouir entre eux des douceurs d’un commerce indépendant : mais dès l’instant qu’un homme eut besoin du secours d’un autre ; dès qu’on s’aperçut qu’il était utile à un seul d’avoir des provisions pour deux, l’égalité disparut, la propriété s’introduisit, le travail devint nécessaire, et les vastes forêts se changèrent en des campagnes riantes qu’il fallut arroser de la sueur des hommes, et dans lesquelles on vit bientôt l’esclavage et la misère germer et croître avec les moissons.

La métallurgie et l'agriculture furent les deux arts dont l'invention produisit cette grande révolution. Pour le poète, c'est l'or et l'argent ; mais pour le philosophe, ce sont le fer et le blé qui ont civilisé les hommes et perdu le genre humain ; aussi l’un et l’autre étaient-ils inconnus aux sauvages de l’Amérique qui pour cela sont toujours demeurés tels ; les autres peuples semblent même être restés barbares tant qu’ils ont pratiqué l’un de ces arts sans l’autre ; et l’une des meilleures raisons peut- être pourquoi l’Europe a été, sinon plus tôt, du moins plus constamment, et mieux policée que les autres parties du monde, c’est qu’elle est à la fois la plus abondante en fer et la plus fertile en blé.

1. A ce point : la formule renvoie à un passage qui précède, où Rousseau parle d’un état de la société naissante qui aurait été, selon lui, « le meilleur à l’homme » ; ce serait un moment du développement humain, une époque « tenant un juste milieu entre l’indolence de l’état primitif et la pétulante activité de notre amour-propre ».

Voltaire (1694-1778), Lettre de Voltaire à Jean-Jacques Rousseau , Aux Délices, près de Genève, 30 août 1755

J'ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre le genre humain ; je vous en remercie ; vous plairez aux hommes à qui vous dites leurs vérités, et vous ne les corrigerez pas. Vous peignez avec des couleurs bien vraies les horreurs de la société humaine dont l'ignorance et la faiblesse se promettent tant de douceurs. On n'a jamais employé tant d'esprit à vouloir nous rendre Bêtes. Il prend envie de

marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. Cependant, comme il y a plus de soixante ans que j'en ai perdu l'habitude, je sens malheureusement qu'il m'est

impossible de la reprendre. Et je laisse cette allure naturelle à ceux qui en sont plus dignes, que vous et moi. Je ne peux non plus m'embarquer pour aller trouver les sauvages du Canada, premièrement parce que les maladies auxquelles je suis

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10 condamné me rendent un médecin d'Europe nécessaire, secondement parce que la guerre est portée dans ce pays-là, et que les exemples de nos nations ont rendu les sauvages presque aussi méchants que nous. Je me borne à être un sauvage

paisible dans la solitude que j'ai choisie auprès de votre patrie où vous devriez être.

J'avoue avec vous que les belles lettres, et les sciences ont causés quelquefois beaucoup de mal.

Les ennemis du Tasse firent de sa vie un tissu de malheurs, ceux de Galilée le firent gémir dans les prisons à soixante et dix ans pour avoir connu le mouvement de la terre, et ce qu'il y a de plus honteux c'est qu'ils l'obligèrent à se rétracter.

Dès que vos amis eurent commencé le dictionnaire encyclopédique, ceux qui osaient être leurs rivaux les traitèrent de déistes, d'athées et même de jansénistes.

Si j'osais me conter parmi ceux dont les travaux n'ont eu que la persécution pour récompense, je vous ferais voir une troupe de misérables acharnés à me perdre du jour que je donnai la tragédie d'Oedipe, une bibliothèque de calomnies ridicules imprimées contre moi…. […]

Mais, Monsieur, avouez aussi que ces épines attachées à la littérature et à la réputation ne sont que des fleurs en comparaison des autres maux qui de tout temps ont inondé la terre. Avouez que ni Cicéron ni Lucrèce, ni Virgile ni Horace ne furent les auteurs des proscriptions de Marius, de Sylla, de ce débauché d'Antoine, de cet imbécile Lépide, de ce tyran sans courage Octave Cépias surnommé si lâchement Auguste. Avouez que le badinage de Marot n'a pas produit la Saint-Barthélemy, et que la tragédie du Cid ne causa pas les guerres de la Fronde. Les grands crimes n'ont été commis que par de célèbres ignorants. Ce qui fait et ce qui fera toujours de ce monde une vallée de larmes c'est l'insatiable cupidité et l'indomptable orgueil des hommes, depuis Thamas Kouli Kan, qui ne savait pas lire, jusqu'à un commis de la douane qui ne sait que chiffrer. Les lettres nourrissent l'âme, la rectifient, la

consolent ; et elles font même votre gloire dans le temps que vous écrivez contre elles. Vous êtes comme Achille qui s'emporte contre la gloire, et comme le père Malebranche dont l'imagination brillante écrivait contre l'imagination.

Monsieur Chapuis m'apprend que votre santé est bien mauvaise. Il faudrait la venir rétablir dans l'air natal, jouir de la liberté, boire avec moi du lait de nos vaches, et brouter nos herbes. Je suis très philosophiquement, et avec la plus tendre estime,

Monsieur,

Votre très humble et très obéissant serviteur Voltaire

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11 VOLTAIRE (1694-1778), Le Mondain, 1736 – début

Regrettera qui veut le bon vieux temps, Et l’âge d’or et le règne d’Astrée1,

Et les beaux jours de Saturneet de Rhée2, Et le jardin de nos premiers parents ; Moi, je rends grâce à la Nature sage,

Qui, pour mon bien, m’a fait naître en cet âge Tant décrié par nos pauvres docteurs :

Ce temps profane est tout fait pour mes mœurs.

J’aime le luxe, et même la mollesse, Tous les plaisirs, les arts de toute espèce, La propreté, le goût, les ornements : Tout honnête homme a de tels sentiments.

Il est bien doux pour mon cœur très immonde De voir ici l’abondance à la ronde,

Mère des arts et des heureux travaux, Nous apporter de sa source féconde Et des besoins et des plaisirs nouveaux.

L’or de la terre et les trésors de l’onde, Leurs habitants et les peuples de l’air, Tout sert au luxe, aux plaisirs de ce monde.

Ah ! Le bon temps que ce siècle de fer3 ! Le superflu, chose très nécessaire, A réuni l’un et l’autre hémisphère.

Voyez-vous pas ces agiles vaisseaux Qui de Texel4, de Londres, de Bordeaux, S’en vont chercher, par un heureux échange, De nouveaux biens, nés aux sources du Gange, Tandis qu’au loin, vainqueurs des musulmans, Nos vins de France enivrent les sultans ? Quand la nature était dans son enfance, Nos bons aïeux vivaient dans l’innocence, Ne connaissant ni le tien ni le mien.

Qu’auraient-ils pu connaître ? Ils n’avaient rien, Ils étaient nus ; et c’est chose très claire

Que qui n’a rien n’a nul partage à faire.

Sobres étaient. Ah ! Je le crois encor ; Martialo5 n’est point du siècle d’or.

D’un bon vin frais ou la mousse ou la sève Ne gratta point le triste gosier d’Eve.

La soie et l’or ne brillaient point chez eux : Admirez-vous pour cela nos aïeux ? Il leur manquait l’industrie6 et l’aisance : Est-ce vertu ? C’était pure ignorance.

Quel idiot, s’il avait eu pour lors

Quelque bon lit, aurait couché dehors ?

Mon cher Adam, mon gourmand, mon bon père, Que faisais-tu dans les jardins d’Eden ?

Travaillais-tu pour ce sot genre humain ? Caressais-tu madame Eve, ma mère ? Avouez-moi que vous aviez tous deux Les ongles longs, un peu noirs et crasseux, La chevelure un peu mal ordonnée, Le teint bruni, la peau bise7 et tannée.

Sans propreté l’amour le plus heureux

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12 N’est plus l’amour, c’est un besoin honteux.

Bientôt lassés de leur belle aventure, Dessous un chêne ils soupent galamment Avec de l’eau, du millet et du gland ; Le repas fait, ils dorment sur la dure8 : Voilà l’état de la pure nature.

Le poème se termine ainsi, au vers 129 : Le paradis terrestre est où je suis.

1. Astrée est la fille de Zeus et de Thémis, qui a répandu parmi les hommes les sentiments de vertu et de justice, du temps de l’âge d’or (et c’est aussi le nom de l’héroïne du roman d’Honoré d’Urfé (début XVIIe)). 2.

Saturne (nom latin de Cronos) et Rhée (ou Rhéa), chassés de l’Olympe, avaient fait régner l’âge d’or sur terre.

3. Selon la mythologie, les grandes périodes de « l’histoire » étaient : l’âge d’or, l’âge d’argent, l’âge d’airain et l’âge de fer. L’âge d’or, c’est l’époque où règne Cronos – époque de paix et d’abondance. L’âge d’argent commence avec l’arrivée au pouvoir de Zeus. Cet âge est caractérisé par la faiblesse et l’inertie des hommes, ne situation de régression par rapport à leurs ancêtres de l’âge d’or. C’est grâce à Prométhée qu’ils sortirent de cet état léthargique : armés de la chaleur et de la lumière (du feu de dieu !), ils se défendirent contre les intempéries et les bêtes sauvages, créèrent l’industrie et améliorèrent leurs conditions de vie. L’âge d’airain est marqué par les violences nées du sentiment de supériorité des hommes qui pensent alors pouvoir rivaliser avec les dieux. Zeus les châtia en enchaînant leur protecteur, Prométhée, et leur infligeant le déluge. Seuls quelques privilégiés, le fils de Prométhée, Deucalion, et sa femme, Pyrrha, échappèrent au cataclysme et obtinrent de Zeus de recréer la race humaine. L’âge de fer désigne les temps historiques, marqués par le progrès mais aussi par la violence des guerres et des crimes. La croyance dans la possibilité d’un retour à l’âge d’or, de manière cyclique, fait partie des légendes anciennes. 4. Ile de Hollande. 5. Auteur d’un traité de gastronomie. 6.

Industrie : activité propre à développer un savoir-faire. 7. Bis, bise - adjectif : d’un gris tirant sur le brun. 8.

Dormir ou coucher sur la dure : sur la terre.

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