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Revue de presse PLUS JAMAIS SEUL. Sortie en salles le 03 mai 2017

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Academic year: 2022

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Revue de presse

PLUS JAMAIS SEUL

Sortie en salles le 03 mai 2017

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« Plus jamais seul » : le regard en devenir du chanteur chilien Alex Anwandter

Vedette dans son pays, l’auteur-compositeur s’inspire de l’agression homophobe d’un fan pour un premier long-métrage prometteur.

Plus jamais seul est le premier long-métrage de l’auteur-compositeur Alex Anwandter, jeune vedette chilienne de la chanson, en réponse à l’agression homophobe qui, en 2012, avait frappé l’un de ses fans, Daniel Zamudio, dans les rues de Santiago, et provoqué sa mort à la suite d’ignobles actes de torture.

Pablo (Andrew Bargsted), lycéen, vit avec son père Juan (Sergio Hernandez), associé d’une petite manufacture de mannequins bousculée par la concurrence.

Pablo sort au cabaret, se maquille, prend des cours de danse, entame une relation amoureuse avec Félix (Jaime Leva), un autre jeune du quartier. Un soir, une bande de sales types lui tombe dessus, le tabasse et le laisse sur le carreau, dans un état déplorable. Juan se retrouve au chevet d’un fils défiguré, en l’attente de soins médicaux dont il ne peut assumer les frais mirobolants.

Un souci d’ouverture salutaire

Le film dépasse la simple entreprise de sensibilisation, par le relais surprenant qu’il établit, à mi-parcours, entre le fils, alors hospitalisé, et son père, qui prend les rênes du récit. Le point de vue de la victime n’est pas le seul considéré, mais cède le pas à quelqu’un d’autre, certes proche et forcément atteint par le drame en question, mais qui appartient à une autre génération et ne partage pas la même orientation sexuelle. Alex Anwandter manifeste ainsi un souci d’ouverture salutaire, qui confère une visée générale aux questions qu’il aborde.

Certes, l’ensemble s’éparpille dans une mise en scène brouillonne, trop souvent prompte à verser dans de vaines afféteries esthétiques. La subjectivité des personnages est surinvestie, à l’image de ces longues plages de douleur de la seconde partie, où l’on reste embourbé dans la désolation du père, sans que le film n’en fasse grand-chose. Toutefois, quelques scènes très réussies, comme cette longue et belle conversation nocturne à l’hôpital, entre le père et une infirmière de passage,...

Mathieu Macheret

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A Santiago du Chili, Pablo, 18 ans, sort toutes les nuits et rêve de faire du cabaret. A cause de son homosexualité, qu’il cache de plus en plus mal, des voisins, des vieux copains pourtant, décident un soir de le bastonner. Pablo est retrouvé dans le coma. Son père veut comprendre.

Sans appuyer le trait, mais en croquant avec justesse les bassesses de tout un chacun, le réalisateur Alex Anwandter raconte un fait divers authentique d’une violence inouïe et inexplicable. Le scénario de son premier film n’a pas été choisi par hasard : également chanteur, Anwandter était l’idole de Pablo jusqu’à sa mort.

Pablo, un ado chilien gay, se grime pour faire du cabaret. Puis, un jour, il se fait tabasser par des gros cons homophobes, son père essaie de faire face, et tente de retrouver les bâtards. Curieusement, le film est divisé en deux parties, très distinctes : la vie de Pablo (avec des scènes très crues de sodomie), puis le désespoir de Juan, le père. Inspiré d’un événement authentique, ce film décousu est à la fois touchant et intrigant : la fin, notamment, est obscure (on ne reverra jamais Pablo dans le récit), et l’ensemble est un tantinet frustrant. Il y a tous les éléments d’un film fort, qu’on devine, mais qu’on ne voit pas.

François Forestier

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Un soir à Santiago du Chili, Pablo plonge dans le coma après une agression homophobe. Transi de douleur, son père cherche à comprendre ce qui s’est passé. Sobre et maîtrisé, ce drame saisit par sa violence sourde.

Plus jamais seul raconte l’histoire d’un père qui découvre la personnalité de son fils gay après que celui-ci ait été victime d’une violente agression homophobe.

Il y a, au cœur de ce film chilien, un moment où tout se brise : l’insouciance comme les os de son jeune héros, Pablo. Et ce qui avait démarré comme une romance entre deux ados (l’un s’assumant, l’autre non) bascule. Parce que Pablo, victime d’une agression homophobe filmée avec une puissance tétanisante, se retrouve dans le coma, le film se focalise sur son père, un homme terne, qui n’a jamais vraiment parlé avec son fils, qui ne sait rien de sa vie et qui, alors même qu’il se débat pour trouver sa place dans son travail, doit aussi trouver les moyens de payer les soins de Pablo… Film de non-dits, de rétention, de frustrations, d’incompréhensions, Plus jamais seul parle aussi d’un pays, le Chili, dans lequel l’homosexualité est toujours un combat : le scénario est ainsi inspiré d’un crime homophobe en 2012.

Didier Roth-Bettoni

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Fasciné par le monde des cabarets, Pablo vit son homosexualité dans le plus grand secret, surtout vis-à-vis de son père. Jusqu’au jour où il est victime d’une agression homophobe d’une hallucinante violence… Tragédie à la mise en scène très tranchante, Plus jamais seul n’est pas de ces films qui s’oublient facilement.

Lorsque l’on voit Plus jamais seul, on a le sentiment que c’est extrêmement difficile d’être un adolescent gay au Chili…

Alex Anwandter : Oui, c’est dur. Le scénario est inspiré d’un meurtre très brutal survenu en 2012. Bien sûr, il faut nuancer. Si vous êtes un ado bourgeois d’apparence «normale», vous êtes plus en sécurité. Par contre, si vous êtes un jeune trans pauvre, vous êtes beaucoup plus vulnérable à la violence physique.

Bien qu’il existe toujours au Chili une discrimination légale (il n’y a pas de mariage pour les couples de même sexe, par exemple), le principal souci pour moi tient au climat de machisme qui règne et aux valeurs conservatrices qui dominent toujours.

D’une certaine manière, puisque Pablo est dans le placard jusqu’à ce qu’il subit, Plus jamais seul apparaît comme un coming out tragique…

Alex Anwandter : Selon moi, le centre du film est plus le père que l’adolescent.

C’est une façon de dire : le garçon n’a rien fait de mal, mais à la lumière de ce qui lui arrive, regardons le contexte sociétal et d’abord cette figure du père qui avait le devoir de le protéger et de l’éduquer…

Vous avez présenté votre film devant de nombreux jeunes spectateurs.

Diriez-vous qu’il y a eu des réactions différentes entre jeunes homos et jeunes hétéros ?

Alex Anwandter : Les gays, tous âges confondus, ont été très touchés par le film, parfois intimement. Car si vous êtes gay au Chili, vous avez probablement été victime de discrimination ou d’insultes. Ce que j’ai trouvé intéressant, ce sont les différences de réactions entre jeunes hétéros et spectateurs plus âgés. Ces derniers avaient plus de difficultés à accepter des «images gays» ou celles de sexualité gay. Ils me demandaient si c’était nécessaire, ce qui ne serait jamais arrivé pour un drame hétéro. Leurs vies sexuelles sont visibles alors que les nôtres sont invisibles. Les jeunes hétéros étaient plus tolérants et je trouve cela porteur d’espoir.

Interview réalisée par Didier Roth-Bettoni

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"Plus jamais seul" : premier film de la popstar chilienne gay Alex Anwandter

Alex Anwandter est l’un des chanteurs les plus populaires au Chili. Il est gay. Quand il a appris l’assassinat homophobe d’un de ses fans, il a voulu raconter son histoire.

Synopsis : Santiago du Chili. Pablo, un jeune lycéen, se découvre une passion pour le cabaret. Mais un jour il est victime d’une violente agression homophobe qui le laisse dans le coma. Bouleversé, Juan, son père, met tout en oeuvre pour trouver les

coupables…

Plus jamais seul sera au cinéma le 3 mai. Rencontre avec Alex Anwandter qui attend la sortie de son film avec une grande impatience.

Était-il important pour vous que votre film sorte en France ?

Oui, très important. La France a une culture cinématographique gigantesque et traite de manière très subtile des sujets que j’aborde dans mon film : l’homophobie, intériorisée et extériorisée, les inégalités sociales, comment un système économique protège certains plutôt que d’autres, etc.

Avez-vous le sentiment que le Chili est en retard en ce qui concerne les droits LGBT ?

Absolument. En dépit de sa réputation de pays latino-américain « moderne », le Chili est très conservateur. En partie à cause de sa Constitution imposée durant la dictature – elle est toujours notre Constitution aujourd’hui – qui permet à la droite conservatrice, très minoritaire, de poser son veto sur absolument tout. Donc c’est une élite conservatrice qui nous gouverne. Pour vous donner un exemple : jusqu’à cette année, si une jeune fille de 13 ans était violée par son père et qu’elle était sur le point de mourir, il était toujours illégal d’avorter. Je pense que cela en dit beaucoup sur l’état de mon pays.

La mort de Daniel Zamudio m’a rappelé celle de Matthew Shepard aux Etats-Unis.

Leurs deux noms ont été utilisés pour baptiser des lois de lutte contre l’homophobie… Avez-vous pensé à lui en écrivant votre film ?

Pour être honnête, la mort de Daniel Zamudio et la violence de l’attaque qu’il a subie étaient assez marquantes. Je connais bien sûr l’histoire de Matthew Shepard. Puisqu’ils sont tous les deux des figures de martyrs, j’avais très envie de fictionnaliser l’événement.

C’est une manière de dire que ce n’est pas un garçon, à un moment, il y a quelques années. Non. C’est un problème et ça peut avoir lieu n’importe quand.

Pouvez-vous nous dire ce que vous avez ressenti quand vous avez appris la mort de Daniel Zamudio, qui était l’un de vos plus grands fans ?

Je me rappelle avoir raté un avion à l’aéroport de Mexico parce que je venais de lire la nouvelle. Son assassinat a été un véritable tournant dans ma vie. Ce qu’il a enduré était si

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atrocement violent, et si proche. J’ai des amis qui ont été attaqués physiquement aussi – de manière moins violente, bien sûr – mais j’ai régulièrement des rappels de cette réalité.

Pourquoi avoir choisi de représenter le meurtre de Pablo au milieu du film ? Ensuite, le père devient en quelque sorte le personnage principal…

La structure du film symbolise ce que je ressens à propos du problème de la violence homophobe : j’ai détourné l’attention de la victime pour mieux observer le contexte qui voit passer passivement, accepte ou reproduit cette violence. Les médias mainstream, des journaux à la télé en passant par le cinéma, ont tendance à se focaliser sur le côté « spectaculaire » des meurtres homophobes : quels vêtements portait la victime ? Était- elle maquillée ? Avait-elle pris des drogues ? Etc. Comme pour la violence envers les femmes, rien de tout cela n’explique le fait que des gens puissent attaquer une personne homo. D’autres stratégies sont nécessaires pour comprendre.

Le père est-il donc le personnage principal du film ?

Je dirais que oui. Il est celui qui est en charge de protéger et d’éduquer ce garçon. Il a fait l’autruche toute sa vie, mais maintenant il est bien obligé de se confronter à la réalité.

Son fils allait bien, il n’avait rien fait de mal. C’est le père qui doit réévaluer toute son existence.

La musique occupe une place très importante et elle est très différente de votre propre musique. Avez-vous dû faire des recherches, notamment en classique ? Oui ! Surtout parce que j’avais envie que le film soit appréhendé à travers l’esthétique du père. C’est pourquoi il flotte cette atmosphère old school. On a surtout du boléro et des musiques issues des années 60.

En tant que chanteur, avez-vous un public gay ?

Oui, j’ai beaucoup de fans gays et cela me rend très heureux. Entretenir une connexion entre un ou une artiste et le contexte dans lequel il ou elle vit est très important. Je me sens très connecté avec le public LGBT à qui les artistes parlent rarement de manière directe, au Chili en tout cas.

Vos clips sont très originaux et se rapprochent de la vidéo d’art. Quand avez-vous commencé à mélanger votre musique et votre image ?

J’ai compris très tôt l’importance de l’image pour communique une identité artistique.

En fait, je pense que réaliser des clips m’a appris la valeur de l’image au cinéma. Les images sont connectées aux émotions. Godard dit à propos d’Hitchcock : « On oublie pourquoi Janet Leigh s’arrête au motel. Mais on se souvient du verre de lait, des ailes de l’éolienne, d’une brosse à cheveux. »

Merci beaucoup ! Merci à vous.

Interview réalisée par Adrien Naselli

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En 2012, le chanteur chilien Alex Anwandter apprend le décès d’un de ses fans, Daniel Zamudio, battu à mort à cause de son homosexualité.

Bouleversé par cette terrible nouvelle, l’artiste choisit d’écrire son premier long métrage. Cinq ans plus tard, Plus jamais seul atteint les écrans du monde entier et étend son message d’amour, d’incompréhension et d’impuissance.

Pour éviter de tomber dans la biographie filmée, Anwandter a eu la bonne idée de décontextualiser son récit. La portée de son film ne devait pas se limiter à l’histoire de Zamudio, mais parler au monde entier. La charge en revient donc au jeune Pablo (Andrew Bargstead), lycéen fasciné par le monde de la nuit et du travestissement. Pablo sait qu’il est gay, il fricote même avec un mauvais garçon du quartier. Mais le garçon vit dans un coin peu fréquentable et les voyous des environs lui font régulièrement passer un sale quart d’heure. Pablo résiste grâce à sa passion et le soutien de sa meilleure amie, gay elle-aussi. Et puis un jour, la violence verbale devient physique. Les conséquences, désastreuses. Quant à Juan, le père de Pablo, il ne pouvait imaginer que la simple orientation sexuelle de son fils puisse engendrer autant de cruauté. Aucun de nous ne le peut.

Avec Plus jamais seul, Alex Anwandter s’attaque à deux véritables problèmes de notre société : la violence ordinaire (et extraordinaire !) subie quotidiennement par les personnes LGBTQ et le manque de ressources mises à disposition de leurs proches pour mettre à mal ce harcèlement.

Lors de ses innombrables appels à l’aide, Juan se voit répondre que les voyous devenus criminels seraient condamnés s’ils en venaient à reproduire leur geste. Épouvante des spectateurs. Ce père meurtri, ce pourrait être nous ; cet enfant au corps brisé, notre fils, cousin, ou voisin.

Qu’en 2017, ce genre de réponse puisse encore se faire entendre est tout simplement consternant. Et pourtant, les crimes haineux, qu’ils soient racistes, transphobes, homophobes (…) continuent d’être perpétrés et impunis. Les statistiques et les témoignages sont là. L’indignation aussi.

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L’histoire de Plus jamais seul pourrait se passer n’importe où. Santiago n’est jamais nommée. Son espace, Alex Anwandter le trouble, l’enveloppe d’un brouillard épais, étouffant. Le drape d’une nuit ténébreuse. Dans ce Chili où tout espoir semble avoir disparu, le jeune Pablo rayonne à sa manière. Loin des carcans de l’adolescent de classe moyenne et de la masculinité en général. Cette lumière, c’est tout un système qui se charge de l’éteindre. La violence et la haine d’abord, l’inutilité policière ensuite, l’incongruité de la prise en charge médicale enfin. Car c’est bien connu : après avoir retrouvé son enfant inconscient sur un lit d’hôpital, devoir trouver un moyen de payer les exorbitants frais engagés ne devient-il pas la priorité numéro 1 ? La différence se retrouve donc brimée, l’individualité condamnée. Comment exister dans ce contexte sordide ? Comment comprendre ? Comment respirer ? Dans Plus jamais seul, c’est tout un pan des travers de la société, qu’elle soit chilienne ou autre, qu’Alex Anwandter dénonce avec force et fracas. Avec en épicentre cette scène d’agression, graphique, injustifiable, insoutenable. Les confrontations administratives qui suivront n’en seront que plus aberrantes encore. Les droits des personnes LGBTQ ont beau trouver de plus en plus de reconnaissance de par le monde (une loi anti-discrimination a d’ailleurs été votée au Chili quatre mois après la mort de Daniel Zamudio), le chemin vers l’acceptation semble encore long et de nombreux crimes à la cruauté inhumaine resteront probablement impunis. Une vérité que Plus jamais seul nous rappelle à grand coups de bouteille dans la gueule.

Gauthier Moindrot

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«Plus jamais seul» s'inspire de la mort du jeune gay chilien Daniel Zamudio.

Comme One Kiss, dont vous nous parlions hier, Plus jamais seul est inspiré d'un fait divers: le meurtre homophobe au Chili de Daniel Zamudio (Lire Meurtre de Daniel Zamudio, gay de 24 ans: L’Onu exhorte le Chili à agir contre les crimes haineux). Daniel était notamment fan de la pop star chilienne Alex Anwandter. Ce dernier, très marqué, par la mort du jeune homme a décidé de lui consacrer un film.

Plus jamais seul ne se réduit pas pour autant à une sorte de biopic du jeune Daniel, renommé ici Pablo. De lui, on sait finalement assez peu de choses.

D'ailleurs, l'agression du personnage survient à la moitié du film et le récit se concentre ensuite sur les problèmes du père pour payer les frais d'hôpitaux et trouver les agresseurs de son fils. Dans une ambiance sombre, quasi crépusculaire, portée par une bande son lancinante, le père, la voisine commère, l'amant qui n'assume pas, le personnel hospitalier et les assurances se retrouvent à gérer les conséquences de la haine homophobe.

Alex Anwandter semble ainsi mettre l'ensemble de la société chilienne face à l'homophobie, reléguant presque la victime au second plan. Un film qui se veut à la fois un électro-choc et un message d'espoir aux jeunes victimes de la haine. Vous ne serez plus jamais seul, leur dit ainsi Alex Anwandter. Pour que la mort de Daniel Zamudio n'ait pas été en vain.

Plus jamais seul a reçu un prix spécial du jury aux Teddy Awards de Berlin en 2016.

Xavier Héraud

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Même en plein jour la lumière entre à peine, par des voies détournées, atténuée par les stores, les rideaux, les volets fermés, brouillée par le nuage de pollution qui recouvre la ville. Le Santiago de Plus jamais seul est une cité sombre. Cette semi-obscurité imprègne des personnages qui disent peu : certains se cachent d’eux-même, d’autres se taisent, beaucoup semblent évoluer dans un climat de crainte indéfinissable.

Du fait divers ayant inspiré le film, seul le prétexte est conservé : en 2012, l’agression puis le meurtre d’un jeune gay avait fait grand bruit au Chili, une loi anti-discriminatoire ayant été votée suite à l’émoi suscité. Le jeune homme assassiné était fan d’Alex Anwandter, artiste pop reconnu au-delà des frontières du pays. Pour son premier long métrage, le musicien devenu cinéaste s’inspire du drame pour construire un récit sombre et mystérieux sur le partage et la filiation.

Pablo et son père Juan vivent sous le même toit, expression à prendre

au pied de la lettre tant ils se croisent seulement, se parlent à peine,

s’évitent parfois et finissent par se louper. Aucune animosité ne les

oppose : leurs échanges matérialisent une indifférence feutrée, le

sentiment de n’avoir rien à se dire. Sans doute s’aiment-ils mais ne le

montrent pas. Le père travaille dans une usine de mannequins, le fils

fait de la danse et sort le soir. Dans leur manière de se confronter au

réel et de le contourner jusqu’à parfois le nier, l’un et l’autre se placent

à la marge. Involontaire chez Juan, la situation répond à une démarche

plus consciente chez Pablo qui vit son homosexualité à visage

découvert.

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Le film avance par collages, les scènes se succédant sans forcément se connecter entre elles. Parfois confus, Plus jamais seul illustre cependant la volonté du réalisateur de sortir d’une représentation terre à terre du fait de société. Il lui semble pourtant nécessaire de montrer l’agression de Pablo de manière plus frontale : violente et sans ellipse, elle crée la rupture séparant l’avant de l’après. L’audace consiste alors à changer de point de vue. Quand le fils perd conscience, le père semble retrouver la sienne, la narration passant naturellement de l’un à l’autre. Portant sur le monde un autre regard, cherchant à retrouver les agresseurs et à connaître la vérité, Juan bouscule ses repères et s’interroge sur sa propre existence. Plus sombre encore, flirtant avec l’abstraction, Plus jamais seul se transforme en voyage intérieur, imaginaire, rêveries et quotidienneté ne faisant alors plus qu’un dans l’esprit soudain actif d’un homme qui n’a plus rien à perdre.

En écho à l’identité visuelle très marquée, le travail sonore devient également facteur de contrastes. Le réalisateur est musicien et cela s’entend. Outre une bande musicale riche et éclectique, le mixage tord tout réalisme et accentue certains sons off, matérialisant ainsi la présence d’un monde au-delà de l’univers circonscrit des personnages.

Plus jamais seul illustre la manière dont un cinéaste s’empare d’une réalité insupportable pour la placer en résonance avec un questionnement plus intime : qu’est-ce qu’un homme, un père, un fils ? Les femmes qui gravitent autour des personnages, l’amie de Pablo, la voisine dragueuse, répondent à leur tour à une représentation féminine en dehors des normes. C’est après avoir vécu si longtemps en évitant toute prise de conscience que Juan semble se réveiller. Radicale et salvatrice, la direction qu’il prend ne prévoit pas de retour.

Épousant progressivement la forme d’un poème filmique mélancolique, ce premier long métrage manie le clair-obscur avec une détermination qui ne faiblit pas. D’une beauté sombre, parfois inconfortable, le film d’Alex Anwandter explore une voie narrative audacieuse et captivante.

Pierre Guiho

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Alors que son fils, homosexuel, commence une relation et s'apprête à passer une importante audition, un père se bat pour que son entreprise survive, en y investissant son propre argent. La communication entre eux n'est pas facile tous les jours, d'autant que le père n'est pas souvent pas à la maison, mais un événement terrible va obliger le père à mieux connaître son fils...

Une touchante approche de l'amour paternel

Ce film chilien évoque l'adolescence au travers du portrait fugace d'un jeune homme à la fois plein d'espoir et confronté aux désillusions liées au contexte économique et social. La mise en place est efficace, présentant les deux personnages, leur complicité silencieuse et leur respect mutuel, tout en posant clairement la différence de caractère. Une seule scène suffit d'ailleurs à montrer le fossé entre une entre une génération combative, persuadée d'une possibilité d'ascension et de justice sociale, et l'autre, confrontée à la précarité et la violence, se préparant toujours au pire.

Choisissant de se concentrer sur les relations intimes entre les personnages (le fils et sa meilleure amie, le fils et la voisine envahissante, ou le père et une médecin cynique), le scénario de Alex Anwandter appuie là où ça fait mal et pose la puissance de l'amour paternel en dernier rempart face à un monde à la cruauté frontale, où lâcheté et trahisons font loi. Servi par une mise en scène qui utilise les couleurs ternes des décors, le brouillard lié à la pollution atmosphérique, pour illustrer la tristesse du quotidien, cette rude histoire émeut aux larmes. Usant du principe de la « cocotte minute », en faisant du père un personnage sous pression grandissante, et dont on ignore la propension à exploser réellement, le film réussit à instaurer un sombre suspense.

Plongé dans une ambiance poisseuse où la musique lancinante résonne comme un signal d'alerte, le film crée également un intelligent parallèle entre le métier du père (constructeur de mannequins à la plastique lisse et parfaite) et le devenir du fils. La vie secrète de ce dernier est abordée par bribes, le film évoquant les sorties ou le milieu gay de manière très distanciée, lors de passages où la musique prend tout à coup le dessus sur le bruit d'une foule ou d'un spectacle. Moins timoré concernant la sexualité de ce dernier, "You'll never be alone", utilise le hors champs à bon escient, lorsque la violence se déchaîne. Découvert dans la section Panorama du Festival de Berlin 2016, le film est reparti avec une mention spéciale aux Teddy awards (prix des meilleurs films de thématique LGBT). Un prix fort mérité pour un film tout simplement bouleversant.

Olivier Bachelard

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Plus jamais seul : le poignant combat d'un père contre l'homophobie

S’inspirant du meurtre de David Zamundo, victime d’un crime homophobe qui est survenu à Santiago en 2012, le réalisateur et musicien Alex Antwandter signe son premier long métrage, Plus jamais seul (distingué du Teddy Bear à la Berlinale 2017) , qui sort en salles mercredi prochain et qu'on a eu la chance de voir en avant première grâce au Distributeur Epicentre Films. Une oeuvre étonnante et profondément émouvante :

Voilà un beau film chilien qui risque de passer inaperçu mercredi lors de sa sortie en salles qui nous raconte le lien difficile mais plein d'amour d’un père pour son fils, avec en toile de fond de la difficulté d'être homosexualité au sein d'une société chilienne visiblement très masculine et pour qui l'homosexualité n'a hélas rien de naturel.

Il est l'oeuvre d'un musicien électro célèbre en Chili et toute en Amérique latine qui a été marqué comme tout le pays par un atroce meurtre homophobe survenue en 2012 et a choisi d'en faire l'objet de sa première fiction. Un meurtre homophobe dont la portée médiatique fut si vive que le Chili promulgua une loi au nom de sa victime, la loi Zamudio.

En suivant dans sa première partie un jeune un peu à part qui suit des

cours de danse, qui s'habille en femme et aime aussi se maquiller, et

qui tombe amoureux d’un garçon, et qui va subir une agression

particulièrement violente, le film pourrait être un réquisitoire contre

la violence homophobe mais en fait est finalement plus et mieux que

cela du fait de son découpage particulier et du virage qu'il prend à mi

parcours du film.

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Scindé en deux parties, la première centrée sur le jeune homme et le deuxième sur son père, Plus jamais seul parvient à s'affranchir de la simple retranscription d'un terrible fait divers, et d'un coté dossiers de l'écran qu'on pouvait craindre en axant son propos sur une difficile mais touchante relation père-fils dans un Chili rongé viscéralement par une intense crise économique.

En se focalisant dans sa deuxième partie sur Juan, le père, responsable de production et associé dans une usine de fabrication de mannequins, qui va peu à peu découvrir ce que subissait ce film, et qui va se retrouver face aux failles des systèmes judiciaire et médical le réalisateur tend à l'universalité et rend la portée de son oeuvre plus grande..

On pense à un autre film d'Amérique du Sud, le radical Despies de Lucia de Michael Franco, mais avec ici plus d'empathie et d'humanité dans le regard porté sur ses personnages. et surtout le scénario de Plus jamais seul évite le coté revenge movie qu'on aurait pu craindre en naviguant sur des contrées moins attendues, quitte à en devenir frustrante dans un dénouement un peu trop ouvert..

En effet, comme Alex Antwandter le dit lui même dans le dossier de presse de son film : " Avoir un homme d’âge mûr, hétérosexuel, comme personnage principal a le mérite de faciliter l’identification du plus grand nombre et de mettre en lumière les préjudices de cette violence quotidienne »,

De même on appréciera également le très beau travail sur la bande sonore et musicale, variée et large spectre qui varie de l’opéra à la musique pop, pour conférer encore plus d'émotion à ce récit rendant une vraie dignité aux laissés pour compte.

Une oeuvre étonnante et émouvante qui fait croire en l'homme et en

sa capacité résistance et de solidarité face à la barbarie.

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Hasard de calendrier, deux films sur la détresse adolescente face à la discrimination sexuelle sortent à une semaine d’intervalle sur les écrans français. Plus jamais seul du Chilien Alex Anwandter (distingué du Teddy Bear à la Berlinale 2017) et One Kiss de l’Italien Ivan Cotroneo permettent, en dépit des écarts géographiques, un seul et même constat : la vie en rose n’est toujours pas d’actualité.

Exit les mines contrites des héros des Lunettes d’or (1987, Montaldo) ou du Secret de Brokeback Mountain (2005, A. Lee), le gay d’aujourd’hui est un sémillant ado libéré, toqué de narcissisme aigu, ventouse décomplexée devant la glace (ou sa meilleure copine) et doté d’une langue agile qui n’est pas seule à être bien pendue. En ce sens, élus de castings pointus, l’ingénu Andrew Bargstead de Plus jamais seul et l’éclatant Rimau Grillo Ritzberger de One Kiss, incarnent des natures volontaires et candides aux grands yeux de faon, bercés par l’illusion que la vie est cadencée au rythme de leurs beautés apprivoisées et de leurs sensualités débordantes. Pour ainsi dire, ces enfants si doux et si différents, rejetons de la modernité, de la liberté et d’Internet, ne veulent ni se cacher ni s’adapter au monde, mais bien l’inverse. Ivres de fantasmes puérils, ils ignorent que les autres, tapis dans l’enfer sartrien, n’ont pas bougé d’un iota et qu’ils libéreront, le moment venu, une violence sourde et démesurée à leur encontre. De fait, cinéphile révolutionnaire, passe ton chemin : le constat désespéré des deux films répond comme l’écho au cynisme du Prince Salina qui, plus d’un demi-siècle en arrière, déplorait dans Le Guépard : « Il faut que tout change pour que rien ne change ». Dur, dur…

Dès lors, rien de neuf pour la cause ? En premier lieu, Plus jamais seul, premier film d’Alex Anwandter, musicien électro et star au Chili, met toute son âme dans le récit réel de l’assassinat de l’un de ses fans, un meurtre homophobe si vif que le Chili promulgua une loi au nom de sa victime, la loi Zamudio. La mise en scène enflammée de l’artiste chilien prend corps dans un jeu subtil de contre-pieds.

Lorsque l’agression, filmée avec maîtrise et intégrité, nous prive de son héros, un portrait en creux de ce dernier naît alors au travers du regard de son père (Sergio Hernandez, bouleversant). Nimbé des déchirements atmosphériques proches de Low de David Bowie, le spectateur en ressort le cœur battant et révolté.

Olivier Bombarda

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Plus jamais seul n’est guère un film gay comme les autres. L’immense majorité des histoires homosexuelles sorties sur les écrans du monde entier depuis environ un quart de siècle a eu pour vocation de faire la promotion, doucement mais fermement, de cette orientation sexuelle très longtemps considérée comme infâme. Il y avait presque toujours quelque chose de réconfortant, voire de galvanisant à tirer de cette appropriation par des cinéastes en faveur d’une plus grande tolérance d’un sujet délicat – surtout pour les spectateurs directement concernés – qui avait été jusque là la cible de raillerie ou pire encore de haine. L’intrigue type de cette vague rose, qui a hélas tendance à diminuer ces dernières années, était le douloureux processus de coming out d’un personnage adolescent, sauvé in extremis de la tragédie par un amant insoupçonné ou un environnement social ouvert d’esprit. Dans le cas de ce film chilien, la donne est sensiblement différente. D’un, par sa structure narrative qui porte autant et même plus d’attention au chemin de croix du père qu’à l’existence à l’ombre de son fils. Et de deux, à cause du pessimisme tenace du propos qui plonge le récit dans une tristesse noire difficilement supportable, au plus tard à partir du moment où tout bascule. En somme, il s’agit d’un film aussi beau que déprimant, sauvé d’un point de vue formel par trois séquences sublimes qui compensent amplement la vacuité esthétique à laquelle le réalisateur débutant Alex Anwandter ne sait pas toujours résister.

Synopsis: Le jeune Pablo, fils unique de Juan le gérant d’une petite fabrique de mannequins, vit assez mal son homosexualité. Il a beau avoir trouvé une confidente en sa meilleure amie Mari et un partenaire sexuel occasionnel en son voisin Félix, l’adolescent passionné de danse n’ose pas en parler à son père et ne peut pas toujours se soustraire aux attaques, souvent verbales et parfois physiques, des garçons plus âgés de son quartier. Alors qu’il s’entraîne avec acharnement pour une audition, Pablo devient la victime d’une première, puis d’une deuxième agression homophobe.

Un justicier dans la ville à la chilienne ?

« Le combat d’un père pour sauver son fils » : cet argument de vente affiché en gros sur l’affiche française du film ne rend pas vraiment justice à Plus jamais seul, comme on l’a déjà écrit plus haut une œuvre plutôt inclassable dans le genre du cinéma gay. En effet, pendant la deuxième moitié du film, alors que Pablo est en pleine agonie à l’hôpital et donc absent de l’intrigue, Juan cherche moins à secourir son fils dans le coma que lui-même, aux abois face à une misère

financière et affective à laquelle il peine à trouver une issue. Dans un tel fossé du désespoir, il aurait été facile de recourir aux réflexes d’une vengeance aveugle ou au contraire à une prise de conscience extrême, à l’image du téléfilm tout de même remarquable « Bobby Seul contre tous » de Russell Mulcahy où une mère très croyante se rend compte à quel point son harcèlement religieux a poussé son

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fils gay au suicide. Ici, c’est avant tout le jeu intériorisé de Sergio Hernandez dans le rôle du père qui traduit admirablement toute l’impuissance de son personnage désormais seul et abandonné. De la même façon, la première partie du film

fonctionne grâce à l’innocence d’ores et déjà empreinte de tristesse de Pablo, joué sans trop de fausse pudeur par Andrew Bargsted. Car la mise en scène n’est point d’un grand secours, ni lors de l’introduction, ni lors de la conclusion, avec son rythme temporel décousu et par conséquent faible en termes d’intensité

dramatique, ses parenthèses oniriques déroutantes, ses trop nombreux plans de Santiago dans la brume au lever du jour et son travail trop appuyé sur la bande son.

Le choc des sentiments

Et pourtant, Alex Anwandter fait preuve d’une incroyable adresse dans l’agencement de trois séquences cruciales au cœur du film, qui valent à elles seules le déplacement ! Le premier coup de poing, viscéral à la limite du soutenable, s’opère bien sûr lors de l’attaque très violente qui laissera le protagoniste présumé au seuil de la mort jusqu’à la fin du film, étrangement ambiguë. Toute l’horreur de la haine homophobe est condensée sans le moindre aménagement complaisant dans ces quelques minutes hautement éprouvantes, qui continueront de peser comme une chape de plomb sur le reste du film. Peu de temps après, une séquence pas non plus si plaisante fait écho à ce moment

cataclysmique, lorsque Juan croise dans les couloirs de l’hôpital une femme médecin, qui accepte d’écouter ses jérémiades tout en gardant ses distances par rapport à ce proche meurtri d’un patient. Le réalisme affectif de cette rencontre fait, elle aussi, froid dans le dos, bien qu’elle sonne tout à fait juste, puisque elle représente sans fioritures la solitude du père, brutalement privé de tout repère rassurant. Enfin, toujours pendant cette même partie magistrale du film, Juan se rend dans l’école de danse où son fils moribond s’adonnait autrefois à sa passion.

Il y observe une chorégraphie sur une musique de Gustave Mahler, depuis un point de vue passif que l’on peut facilement qualifier de nostalgique. S’y mêlent à la fois la découverte d’un monde auquel le père n’avait guère prêté attention auparavant et le regret amer d’un avenir radieux qui ne sourit plus à son fils.

Conclusion

Nous sommes sortis profondément affectés de la vision de ce film très dur, qui braque sans ménagement le projecteur sur l’homophobie au quotidien.

Plutôt que de donner une lueur d’espoir, Plus jamais seul – un titre par ailleurs presque ironique tellement les tentatives de protection tardive de la part du père se soldent par un isolement croissant – nous a touchés par la sincérité de son propos pessimiste. Après, nos réserves à l’égard de son cadre formel sont malheureusement un brin trop importantes pour qu’on y ait adhéré complètement, en dépit de ces trois morceaux de bravoure crus et poétiques qui indiquent néanmoins un certain talent cinématographique chez Alex Anwandter.

Tobias Dunschen

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Inspiré d’un fait divers, ce film nous offre un réflexion nouvelle sur l’homophobie mais aussi sur le désarroi d’un père, le tout dans une ambiance musicale.

Un fait divers atroce

Scandalisé par le meurtre du jeune Daniel Zamudio, victime d’un crime homophobe, Alex Anwandter, musicien et cinéaste chilien très populaire dans son pays, décide de passer à la réalisation. Il est d’autant plus ému par ce meurtre que le jeune Daniel était l’un de ses fans et qu’ils s’étaient rencontrés à plusieurs reprises. Inconcevable en France ? En effet, imaginerait-on Pascal Obispo réaliser un film pour défendre la mémoire d’un fan travesti assassiné par des homophobes ? Au Chili, apparemment ça peut se dire, ça peut se faire ; d’autant plus surprenant que ce premier film, venant en plus d’un artiste qui n’est pas de la profession, est plutôt une réussite.

Se transformer, séduire

Il raconte l’histoire de Pablo, jeune lycéen homosexuel, qui vient de se prendre pour passion pour le transformisme. Avec sa copine, qui en pince franchement pour lui, Pablo va se maquiller, s’habiller en femme et donner des récitals amateurs. Seul au foyer avec un père qui aime bien se servir un whisky en rentrant tous les soirs fort déprimé, la vie de Pablo n’est pas bien gaie. D’ailleurs, les couleurs et les éclairages maronnasses de leur appartement n’incitent pas à la joie de vivre. Son père, interprété par Sergio Hernandez, acteur chilien et collaborateur de Raul Ruiz, travaille dans une fabrique de mannequins, qui l’entourent et servent de décor à de nombreuses séquences. Ce sont pour la plupart des mannequins masculins mais privés bien sûr de leurs organes sexuels. Corps sans vie, pâles et blanchâtres copies de la réalité, ils servent de prolepse à la condition des hommes anonymes et inertes qui entourent le jeune Pablo. Et cette image renvoie aussi à la problématique du père qui ne s’occupe pas vraiment de l’éducation de son fils et le considère presque comme un de ces objets à forme humaine qui l’entoure et sert parfois de présentoirs.

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Choquer, souffrir, disparaître

Dans un Santiago imaginaire, toutefois aussi sordide que fut le Bronx des années 70, la vie s’écoule pour Pablo, entouré de vagues copains, d’un petit ami homosexuel honteux, mais surtout d’une kyrielle de femmes, notamment une voisine envahissante qui a jeté son grappin sur le père de Pablo. Le film commence d’ailleurs par une scène où l’on voit Pablo se préparer, se maquiller pour revêtir une robe de femme. La voisine tape à la porte, elle peut d’ailleurs l’apercevoir à travers le verre dépoli, mais Pablo se cache et lui répond sans lui ouvrir. Elle devra attendre le retour de son père.

Un père entouré de mannequins

Un jour, alors qu’il s’est fait teindre en blond en compagnie de sa copine, il est agressé par la petite bande à laquelle appartient son ami. Personne n’intervient pour le défendre, pas même son amie, et Pablo sera laissé pour mort sur le sol, tabassé violemment par de jeunes homophobes, incités à la haine par un garçon légèrement plus vieux et plus sadique. Commence alors la deuxième partie du film. Tandis qu’on pensait regarder un film sur un jeune voulant devenir travesti, voire transgenre, on découvre cependant que le personnage principal devient le père, avec le combat qu’il va entreprendre pout tenter de sauver son fils, actuellement à l’hôpital et complètement défiguré.

Un monde de violence

Le film pose bien sûr la question de la violence faite aux homosexuels encore de nos jours, même si on nous rebat les oreilles en parlant de changement et de tolérance. Les corps des homos et les corps des femmes sont toujours autant en danger. Et lorsque la violence a été accomplie, on se sent bien démuni, désespéré, enragé, comme ce père qui ne saura comment réagir autrement qu’en commettant l’irréparable. Film de musicien, avec un travail intéressant sur la musique alliant l’opéra, la musique folk et l’adaptation espagnole de Lucio Battisti, Plus jamais seul est aussi une belle métaphore sur la grande solitude de notre monde assourdi de bruit et de fureur.

Jean-Max Méjean

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Plus jamais seul est un très beau et émouvant film chilien parlant de l’amour d’un père pour son fils et du traitement des homosexuels au Chili.

En effet, le jeune personnage principal de l’histoire suit des cours de danse, aime s’habiller en femme, se maquiller et est amoureux d’un garçon. Cela va lui valoir des ennuis poussant son père à essayer de réagir.

Le film est en deux parties, la première centrée sur le jeune homme et le deuxième sur son père.

Les deux acteurs sont formidables et leur interaction est vraiment très bonne, donnant à croire sans problème la grande tendresse qui les unit. Andrew Bargsted est émouvant en homme vivant aimant la danse et Sergio Hernandez très puissant en personnage dévoué à son travail et aimant par-dessus tout son fils.

Le long métrage est une œuvre parfois intimiste dans laquelle les expressions des personnages, surtout celle du père, sont extrêmement importantes et participent vraiment à l’ambiance du film.

La mise en scène d’Alex Anwandter suit au plus prêt ses acteurs, tout en osant des cadrages originaux permettant de découvrir l’histoire sous des angles surprenants.

Le réalisateur, et scénariste, a mis beaucoup de cœur dans son histoire, inspirée d’un fait divers ayant fait grand bruit au Chili, qu’il filme avec délicatesse, offrant un bel espace à ses personnages et permettant à ces derniers d’exprimer les joies et aspirations, ainsi que les peines de leurs personnages.

L’histoire permet aussi de découvrir le Chili et la vie de la classe moyenne travailleuse dévouée à son entreprise et sa famille, et d’entrapercevoir le fonctionnement des banques, et du système médical chilien.

Plus jamais seul est une œuvre vraiment touchante portée par deux très bons acteurs dont un Sergio Hernandez émouvant réussissant à faire passer beaucoup de messages sans un mot. Avec une réalisation sobre au service des acteurs, un sujet délicatement traité et l’histoire universelle de l’amour d’un père pour son fils, le long métrage est très beau à découvrir.

Sensible et émouvant.

Isabelle Arnaud

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