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R ythme d’activité atypique chez Aedes aegypti en zone de savane sub-soudanienne de Côte d’Ivoire.

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Academic year: 2022

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(1)

Introduction

A

edes aegypti est vecteur de nombreuses arboviroses d’im- p o rtance médicale et/ou économique. Il transmet notam- ment le virus de la fièvre jaune, celui de la dengue et le virus Chikungunya (10, 2). Ses gîtes potentiels sont constitués de petites collections d’eau. CORDELLIERet al (3) en Afrique de l’Ouest et TABACHNICKet POWELL(14) en Afrique de l’Est distinguent dans une même localité, trois populations diffé- rentes de Ae. aegypti : une population sauvage qui se développe dans les trous d’arbres et de rochers, une population péri- domestique qui se développe dans les récipients abandonnés autour des villages et une population domestique qui utilise les jarres et les pots à l’intérieur des habitations pour leur développement préimaginal. Les deux pre m i è res populations sont tributaires de la pluviométrie Les densités croissent pendant

la saison des pluies et sont minima durant la saison sèche (13).

En revanche, les populations domestiques sont entretenues toute l’année grâce à l’approvisionnement régulier des réci- pients de stockage d’eau qui leur servent de gîtes perm a n e n t s (12). Le rythme d’activité de ce moustique est généralement d i u rne en Afrique de l’Est (3) et en Inde (11). Il est en re v a n c h e c r é p u s c u l a i re en Afrique de l’Ouest (3). Malgré une bonne connaissance du schéma épidémiologique général de la fièvre jaune en Afrique de l’Ouest (1, 6), CO R D E L L I E Rre c o m m a n d e d ’ i n t ro d u i re dans ce cadre général les paramètres écologiques, éthologiques propres aux vecteurs, aux hôtes sauvages et aux hommes pour chacune des régions sous menace amarile. Le présent article fait état de l’observation d’un rythme d’activité atypique chez Ae. aegypti en saison sèche dans un village de savane sub-soudanienne de Côte d’Ivoire.

R ythme d’activité atypique chez Aedes aegypti en zone de savane sub-soudanienne de Côte d’Ivoire.

Summary:Atypical biting activity rhythm of Aedes aegypti in dry season in sub-sudanian savannah of Côte d’Ivoir e

Ae. aegyptiis vector of many arboviruses of medical and/or economical importance. It transmits the yellow fever, dengue and Chikungunya viruses. Small water collections constitute its potential bree - ding sites. Three different populations of Ae. aegyptiare known in Africa: a selvatic population bree - ding in tree holes and rock holes, a population breeding in discarded containers in peri-domestic area and a third population which breeds in drinking water containers and various receptacles inside habitations. The biting activity of this vector is diurnal in East Africa, but it occurs usually at sun set in West Africa. An entomological survey was carried out in a village situated in Sudan savannah zone of Côte d’Ivoire to appreciate Aedini populations in dry season. Mosquito collections were organized from 4 p.m. to 6 a.m. The results showed an atypical biting activity rhythm in dry season, characterized by a permanent activity during the whole night up to 6 a.m., a pronounced tendency to endophagy and a peak biting aggressivity at midnight inside as well as outside houses. The epi - demiological implications of such an atypical rhythm of biting activity are analysed. It is suggested to appreciate the extent of this phenomenon through some more investigations in the villages of the area and determine the induced stegomyian focus.

Résumé :

Aedes aegypti est vecteur de nombreuses arboviroses dont la fièvre jaune, la dengue et l’infection à virus Chikungunya. Trois populations distinctes sont connues en Afrique . Il s’agit d’une popula - tion sauvage qui se reproduit dans les trous d’arbres ou de rochers, une deuxième population ren - contrée dans la zone péri-domestique se développe dans les récipients abandonnés et une troisième colonise les jarres d’eau de boisson et divers récipients domestiques. Ae. aegyptiest généralement exophile et pique habituellement dans la journée en Afrique de l’Est et au crépuscule en Afrique de l’Ouest. L’objectif de cette étude était d’évaluer les populations d’Aedesen saison sèche dans une zone de savane soudanienne. Une enquête entomologique a été menée dans un village de savane sub-soudanienne de Côte d’Ivoire. Les résultats des captures effectuées de 16 heures à 6 heures du matin ont montré un rythme d’activité atypique se traduisant par une activité de piqûre permanente toute la nuit, une tendance prononcée à l’endophagie (82,1 %), et un pic d’agressivité à minuit à l’intérieur comme à l’extérieur des habitations. Les conséquences épidémiologiques de ce rythme atypique sont analysées et des recommandations sont faites pour évaluer l’étendue de ce phéno - mène et identifier le foyer stégomyien qui en découle en saison sèche.

S. Diarrassouba (1) & J. Dossou-Yovo (1) (2)

(1) Entomologiste médical,docteur 3ème cycle, Organisation de coordination et de coopération pour la lutte contre les grandes endémies (OCCGE),Institut Pierre Richet,01 BP 1500, Bouaké,Côte d’Ivoire Fax :(225) 63 27 38

(2) Manuscrit n° 1846 « Entomologie médicale ».Accepté le 25 juillet 1997.

Key-words:Aedes aegypti -

Biting activity - Dry season - Sudan savannah - Côte d’Ivoire

Mots-clés : Aedes aegypti - Rythme d’agressivité - Saison sèche -

Savane sub-soudanienne - Côte d’Ivoire

(2)

Matériels et méthode

Présentation de la zone d’étude.

Les études se sont déroulées à Kabolo, village Tagwana, situé à 13 km de Katiola (8°8’N - 5°5’W) sur l’axe routier Katiola- Dabakala, en zone de savane sub-soudanienne dans le centre - n o rd de la Côte d’Ivoire. Le climat est tropical avec deux saisons bien distinctes. La saison des pluies va d’avril à octobre . La moyenne annuelle est de 1200 mm. La pluviosité est maxi- male en août-septembre. La température maximale moyenne est de 28°C. La température minimum moyenne est de 21°C.

La saison sèche couvre les mois de novembre à mars. La végé- tation est très arborée.

Les populations autochtones sont les Tagwana du gro u p e Sénoufo du nord de la Côte d’Ivoire. Ils sont part i c u l i è re- ment conservateurs et réfractaires aux influences des Malinké.

Ils sont chrétiens ou animistes. L’activité économique est essentiellement agricole. Les cultures vivrières sont le maïs, le riz et l’igname. Les cultures industrielles sont le coton et l’ara- chide. Les concessions sont bien re g roupées mais elles ne sont pas délimitées par une clôture. Le village est pro p re, sans broussaille entre les concessions, ni déchets industriels dans la zone péri-domestique. Les cases sont rondes, construites en banco et re c o u v e rtes de chaume. Elles sont généralement grandes et servent à la fois de chambres à coucher et de cui- sine quand elles appartiennent à une femme. Le village a une école primaire de six classes. Le centre de santé le plus pro c h e est celui de Timbé, situé à quatre kilomètres. Les inform a- tions recueillies indiquent que c’est seulement après échec du traitement indigène que les populations se rendent au centre de santé pour une consultation médicale. Le village dispose de 3 puits forés depuis 1976.

Capture des moustiques

Les études se sont déroulées durant la saison sèche au cours des mois de décembre 1996 et janvier 1997. La capture des moustiques a été effectuée par trois équipes de quatre per- sonnes à trois points de capture. Quatre captureurs ont tra- vaillé par point de capture. Une pre m i è re équipe de 2 personnes, l’une à l’intérieur et l’autre à l’extérieur, a travaillé de 16 h à minuit. La seconde équipe a pris ensuite le re l a i s jusqu’à 6 h le lendemain. Les captureurs étaient tous vaccinés c o n t re la fièvre jaune et étaient sous prophylaxie contre le paludisme. Le captureur assis, les jambes dénudées, capture individuellement dans des tubes à hémolyse tous les mous- tiques qui viennent se poser sur lui. Dans la nuit, il est muni d’une lampe torche. Les tubes re n f e rmant les moustiques étaient regroupés par tranche horaire et placés dans des sacs pour leur transport au laboratoire. Les moustiques ont été déterminés en utilisant les clés de EDWARDS(4).

Résultats

O

n a récolté au total 662 moustiques sur 36 hommes/nuits durant les deux enquêtes. Les moustiques du genre A e d e s représentent 44,2 % des captures. La répartition par espèce a montré que Ae. aegypti, avec 44,1 %, constitue de ce fait le moustique le plus abondant dans le village à cette période de l’année. Il constitue en outre 99,5 % des Aedes capturés. Son taux d’agressivité moyen a été de 8 p/h/n. Outre Ae. aegypti, un seul specimen d’Ae. fowleri a été capturé.

Le rythme d’activité (figure 1) a montré que Ae. aegypti piquait toute la nuit dans ce village avec une endophagie ( 8 2 , 1 %) significativement plus importante que l’exophagie

(

χ

2= 241,8 ; ddl =1 ; p < 0,001). A l’intérieur, le nombre d’individus capturés croît régulièrement jusqu’à minuit où on e n re g i s t re un pic d’activité très important (41, 2 % des cap- t u res effectuées à l’intérieur). L’activité générale décroît ensuite p ro g ressivement, mais avec un léger regain au petit matin.

A l’extérieur, l’activité est irr é g u l i è re avant 21 heures. Elle c roît ensuite pour marquer un pic très élevé à minuit (23,4 % des captures à l’extérieur). On enre g i s t re ensuite une chute nette d’activité, puis un pic secondaire à 3 heures du matin ( 1 7 % des captures à l’extérieur). L’activité décroît pro g re s s i- vement jusqu’au lever du jour.

Discussion

L

e nombre de piqûres d’Ae. aegypti par homme et par nuit est très élevé pour cette période avancée de la saison sèche.

Les gîtes qui pourraient entretenir une importante popula- tion sauvage sont asséchés, car les dernières pluies de la sai- son sont tombées depuis plus de deux mois. L’ a b o n d a n c e d’Ae. aegypti ne peut donc s’expliquer que par la présence des nombreux gîtes domestiques observés dans ce village (5).

Ces gîtes domestiques sont constitués essentiellement de jarre s et de canaris à médicaments traditionnels. En effet, l’utilisa- tion des pots à médicaments est très répandue chez les Ta g w a n a animistes de cette région de Côte d’Ivoire et elle constitue une source de pullulation des A e d e s vecteurs en saison sèche.

Ces densités importantes et inhabituelles d’Ae. aegypti pour la période considérée pourraient avoir des conséquences épi- démiologiques graves. Les moustiques produits dans les mai- sons y restent pour se nourr i r, d’autant plus que ce vecteur ne se disperse généralement pas au-delà de 20 mètres autour de son gîte (9). Par ailleurs, son cycle gonotrophique est court (7) et les repas de sang sont très fréquents (8).

Ae. aegypti est généralement exophile (12) et a une activité essentiellement crépusculaire dans cette zone (2, 15). A Kabolo, Ae. aegypti a une forte tendance à l’endophagie en saison sèche. En effet, 82,1 % des captures sont effectuées à l’inté- rieur des habitations et le pic d’activité se situe à minuit, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des maisons. Alors que HE RV Y

(13) a observé un pic d’agressivité d’Ae. aegypti de 5 heures à 8 heures et un deuxième de 14 heures à 16 heures en zone de savane au Burkina Faso. Cet auteur a obtenu les plus faibles récoltes de 0 heure à 5 heures et de 20 heures à 24 heures. Le rythme d’activité observé à Kabolo est donc atypique et ne peut s’expliquer que par la localisation intérieure des gîtes de pro-

Figure 1.

18-19 19-20 20-21 21-22 22-23 23-24 00-01 01-02 02-03 03-04 04-05 05-06

0 10 20

Intérieur Extérieur

Figure 1: Cycle d'activité horaire de Aedes aegypti à l'intérieur et à

pourcentage d'Aedes aegypti capturés

Cycle d’activité d’Aedes aegypti à l’intérieur et à l’extérieur des habitations en saison sèche (décembre 1996 - janvier 1997) à Kabolo (Côte d’Ivoire).

Pour chaque tranche horaire, les captures sont exprimées en pourcentage des captures de la nuit.

horaire

(3)

Rythme d’activité atypique chez Aedes aegypti en zone de savane sub-soudanienne de Côte d’Ivoire.

S. Diarrassouba & J. Dossou-Yovo

duction (5). Ce comportement inhabituel du moustique pour- rait exacerber le contact homme/vecteur et augmenter le risque d’épidémies, car la situation est très favorable à la transmis- sion vectorielle des arboviroses. Il est donc nécessaire d’étendre les enquêtes entomologiques à d’autres villages de la région pour évaluer l’étendue du phénomène et identifier le foyer stégomyien qui en résulte durant la saison sèche.

Remerciements

Les auteurs remercient le ministère français de la Coopération pour son soutien financier et logistique à l’Institut Pierre Richet.

populations d’Aedes aegypti en saison sèche dans un village de Côte d’Ivoire (à paraître).

6. GERMAIN M - La fièvre jaune en Afrique de l’Ouest : une dyna- mique spatiale. ORSTOM Actualités, juillet-août 1986.

7. HERVY J-P - Expérience de marquage-lâcher-recapture portant sur Aedes aegypti Linné, en zone de savane soudanienne ouest africaine. 1. Le cycle trophogonique. Cah ORSTOM, sér Ent méd et Parasitol, 1977, 15, 353-364.

8. McDONALD PT - Population characteristics of domestic Aedes aegypti (Diptera : Culicidae) in villages on the Kenya coast. I.- Adult survivorship and population size. J Méd Entomol, 1977, 14, 42-48.

9. McDONALD PT - Population characteristics of domestic Aedes aegypti Diptera: Culicidae) in villages on the Kenya coast. II.

Dispersal within and between villages. J méd Entomol, 1977, 14, 49-53.

10. MONDET B, CORDELLIER R, CHAUVANCY G, MONTANGE L - Rapport d’activité de l’année 1991 du Laboratoire d’entomolo - gie médicale Antenne ORSTOM auprès de l’Institut Pasteur de Côte d’Ivoire. Abidjan, 6 pp.

11. PANDIAN RS & DWARAKANATH SM - The biting activity rhythm in Aedini mosquitoes of Madurai. Comparative physiology and Ecology, 1992, 17,66-70.

12. PICHON G & GAYRAL P - Dynamique des populations d’Aedes aegypti dans trois villages de savane d’Afrique de l’Ouest.

Fluctuations saisonnières et incidence épidémiologique. Cah ORSTOM, sér Ent méd et Parasitol, 1970,VIII,49-68.

13. SUBRA R & HEBRARD G - Fréquence d’Aedes aegypti L i n n é , 1 7 6 2 (Diptera : Culicidae) en milieu humain à Mayotte (Archipel des Comores). Cah ORSTOM, sér Ent méd et Parasitol, 1 9 7 7 ,1 5 ,6 7 - 7 2 . 14. TABACHNICKW J & POWELL JR - Genetic structure of the East African domestic populations of Aedes aegypti. Nature UK, 1978, 272, 535-553.

Références bibliographiques

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2. CORDELLIER R,BOUCHITE B, ROCHE J-C,MONTENY N, DIACO B

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3. CORDELLIER R, GERMAIN M,HERVY JP & MOUCHET J - Guide pratique pour l’étude des vecteurs de fièvre jaune en Afrique Occidentale et méthodes de lutte. Documentation technique ORSTOM,1977,33.

4. EDWARDS FW - Mosquitoes of ethiopian region. III; Culicidae adults and pupae. London Brit Mus Nat Hist, 1941.

5. DIARRASSOUBA S & DOSSOU-YOVO J - Importance des jarres et des canaris à médicaments traditionnels dans le maintien des

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