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Ingénierie et manipulation de matériaux moléculaires pour l'électronique et l'optique

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Ingénierie et manipulation de matériaux moléculaires

pour l’électronique et l’optique

Jean-Michel Nunzi

To cite this version:

Jean-Michel Nunzi. Ingénierie et manipulation de matériaux moléculaires pour l’électronique et l’optique. Physique Atomique [physics.atom-ph]. Université Paris Sud - Paris XI, 1999. �tel-00011207v2�

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Ingénierie et manipulation de matériaux moléculaires

pour l’électronique et l’optique

Jean-Michel NUNZI

LETI (CEA – Technologies Avancées), DEIN-SPE, Groupe Composants Organiques

Notice d’Habilitation à Diriger les Recherches de l’Université Paris Sud – Orsay, soutenue le 22 Décembre 1999 à l’amphithéâtre de l’INSTN devant le jury :

Mme. E. Giacobino

président

M. J. Delaire

rapporteur

M. C. Hirlimann

rapporteur

M. Y. LeDuff

rapporteur

M. J.-L. LeGouët

examinateur

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Ingénierie et manipulation de matériaux moléculaires

pour l’électronique et l’optique

RESUME :

Nous assistons cette dernière décennie au développement considérable de l'utilisation des matériaux organiques en tant que matériaux fonctionnels pour l’électronique. Les possibilités de la chimie alliées à l’ingénierie moléculaire ouvrent en effet la voie à la réalisation de matériaux optimisés dans leur fonctionnalité depuis l’échelle de la molécule jusqu’à celle du composant.

Notre démarche d’ingénierie consiste à identifier les spécificités des matériaux organiques en optoélectronique, à les modéliser et à les mettre en oeuvre, en exploitant toujours au mieux leur caractère original et innovant au regard de ce que d’autre matériaux font déjà. Elle nous a conduit à mettre en évidence des fonctions propres aux matériaux organiques. Ces fonctions spécifiques ouvrent des applications auparavant inimaginables avec d’autres matériaux. Les applications à la limitation optique et aux diodes photovoltaïques en sont deux exemples typiques. La richesse et la diversité des matériaux organiques permettent d’étendre leur champ d’applications à de nombreux autres domaines comme les bio- capteurs et les nano-technologies. La possibilité d’utiliser des molécules photo-sensibles agissant comme des moteurs moléculaires mus sous l’action de la lumière permet de réaliser des structure photoniques. L’optique non-linéaire est ici utilisée comme outil de fabrication.

(4)

Ingénierie et manipulation de matériaux moléculaires

pour l’électronique et l’optique

SOMMAIRE :

1. Introduction... 4

2. L’optique non-linéaire moléculaire ... 6

2.1. La non-linéarité géante des polydiacétylènes... 6

2.2. La modulation optique dans les états excités... 9

2.2.1. Etude de matériaux pour la modulation spatiale de lumière ... 11

2.2.2. Limitation optique par effets d’absorption à deux photons... 14

2.3. Anisotropie et non-centrosymétrie optique transitoire ... 20

3. Mise en oeuvre de dispositifs optoélectroniques moléculaires ... 24

3.1. Les diodes à semi-conducteurs organiques ... 25

3.1.1. Diodes électroluminescentes ... 26

3.1.2. Diodes photovoltaïques à rectification moléculaire... 32

3.2. Structures photoniques laser à feedback distribué... 39

4. Assemblage et structuration moléculaire photo-induits ... 45

4.1. Manipulation tout-optique de l’ordre polaire ... 46

4.2. Reliefs de surface photo-induits... 53

5. Conclusion... 58

6. Table des illustrations... 59

7. Table des articles reproduits en annexes ... 62

(5)

1.

Introduction

Nous assistons cette dernière décennie au développement considérable de l'utilisation des matériaux organiques en tant que matériaux fonctionnels pour l’électronique. Les matériaux moléculaires permettent la réalisation de composants électroniques et optiques originaux et innovants.1 En effet, les possibilités de la chimie alliées à l’ingénierie moléculaire ouvrent la voie à la réalisation de matériaux optimisés dans leur fonctionnalité depuis l’échelle de la molécule (nanomètres) jusqu’à celle du composant (millimètres). De plus, les progrès récents dans les techniques d’assemblage permettent de maîtriser les propriétés électroniques à l’échelle du transport des charges (dizaine de nanomètres) et les propriétés photoniques à l’échelle de la longueur d’onde (centaine de nanomètres) (Figure 1).

Figure 1 : Barreaux de polymères ingénierés pour l’induction tout optique de non-centrosymétrie (§3.2).

Cette démarche s’enrichit depuis peu des apports de la biologie moléculaire qui ouvrent la voie à de nouveaux concepts fondés sur la combinaison des propriétés intrinsèques de groupements chimiques fonctionnels et des effets liés à la forme ainsi qu’à l’environnement des molécules. Ainsi, la recherche dans le domaine des matériaux moléculaires évolue-t-elle infailliblement vers ce que nous appelons d’ores et déjà nanotechnologies : technologies qui permettent de fabriquer des matériaux (nano-matériaux) dont les propriétés macroscopiques dépendent non seulement des propriétés des molécules les constituant, mais aussi de la façon dont celles-ci sont assemblées (Figure 2).

Molécule

Matériau

Composant

(Assemblage) (Association de motifs fonctionnels élémentaires)

(6)

C’est une partie de cette recherche que je développe dans ce mémoire : il s’agit de la démarche qui consiste à identifier les spécificités des matériaux organiques en optoélectronique, à les modéliser et à les mettre en oeuvre, en exploitant toujours au mieux leur caractère original et innovant au regard de ce que d’autre matériaux font déjà. C’est en appliquant cette démarche que nous avons pu, au sein du Groupe Composants Organiques du CEA (GCO), découvrir certaines fonctions propres aux matériaux organiques qui apparaissent susceptibles d’induire des applications auparavant inimaginables avec d’autres matériaux (Figure 3). Les écrans électroluminescents organiques (§3.1.1) et les diodes photovoltaïques (§3.1.2) en sont un exemple. Ingénierie moléculaire Capteurs Biologiques Photovoltaïque Diodes électro-luminescentes MOLECULES FONCTIONNELLES micro-et nano-structures Limitation optique polymère orientation greffage évaporation solution

Figure 3: Quelques applications de la démarche d’ingénierie moléculaire.2

Le plan de ce mémoire est organisé selon la démarche d’ingénierie moléculaire des composants organiques pour l’électronique et l’optique schématisée en Figure 2. L’optique non-linéaire moléculaire (§2) correspond à la première étape de définition, de caractérisation et d’optimisation des molécules. La mise en œuvre de dispositifs opto-électroniques (§3) correspond à la troisième étape de réalisation du composant organique. L’assemblage et la structuration des molécules organiques (§4) correspond à la deuxième étape de mise en œuvre du matériau moléculaire fonctionnel. L’ordre des chapitres reflète le degré de maturité de la thématique scientifique.

(7)

2.

L’optique non-linéaire moléculaire

2.1. La non-linéarité géante des polydiacétylènes

L’étude et la recherche de matériaux à propriétés optiques non-linéaires a débuté avec l’idée de réaliser des composants de modulation optique (§2.2) permettant de surpasser les dispositifs électroniques en capacité de traitement de l’information. On parle encore aujourd’hui de la thématique opto-Informatique ou optique dans l’ordinateur qui a suscité des efforts considérables jusque dans les laboratoires des industriels des télécommunications et de l’informatique. Citons ici un article de revue sur les phénomènes du troisième ordre dans les polymères.3 Notre recherche au sein du Groupe Composants Organiques du CEA (GCO, anciennement Laboratoire d’Etudes et de Recherches Avancées ou LERA, puis Laboratoire de Physique Electronique des Matériaux ou LPEM) a commencé en 1984 avec l’étude des modulations d’indice induites optiquement dans les polymères semi-conducteurs de la classe des polydiacétylènes. Ces matériaux dont les propriétés optiques non-linéaires remarquables avaient été mises en évidence par C. Flytzanis et ses collaborateurs du Laboratoire d’Optique Quantiquei ont été abondamment étudiés alors au LERA par J. Messier et F. Kajzar dès le début des années 80.4 J’ai donc réalisé une expérience de mélange à 4 ondes dégénéré en configuration de conjugaison de phase à 1064°nm en régime picoseconde afin d’étudier ces modulations d’indice induites optiquement en régime transitoire dans la région de transparence optique des poydiacétylènes.5 Cette expérience était inspirée de celle que nous avions montée à l’école Polytechnique pour ma thèse de troisième cycle.6

A propos de la conjugaison de phase : il s’agit est un processus optique nonlinéaire qui peut être appliqué à la correction d’images (ou ensemble de données) déformées, à l’étude de corrélations entre images (mémoires associatives), ou même à l'adressage optique matriciel (multiplexage). La longueur d’onde proche infrarouge présente l’attrait d’études extrapolables aux longueurs d’ondes utilisées pour les télécommunications optiques et le régime picoseconde présente l’attrait de la recherche de composants pour modulation giga- tera-hertz. De plus, la configuration choisie est bien adaptée à la spectroscopie nonlinéaire à haute résolution, si bien qu’elle procure de riches enseignements sur la photo physique des matériaux.

L’étude des polydiacétylènes nous a permis de mettre en évidence certaines caractéristiques des processus optiques non-linéaires réalisées dans la région de transparence proche infrarouge des matériaux organiques à liaisons π conjuguées. Il s’agit de l’effet de la forte absorption à deux photons subsistant jusqu’à une énergie de photon voisine de la moitié de l’énergie de la transition π → π*. Cette transition à deux photons dans les polydiacétylènes avait été clairement résolue par F. Kajzar et J. Messier,ii ainsi que par M. Lequime et J.P. Hermann.iii Néanmoins, ce sont ses effets qui n'avaient pas été mis en évidence : une non-linéarité géante.

i

C. Cojan, G. P. Agrawal, C. Flytzanis, Phys. Rev. B, 15, 909 (1977). ii

F. Kajzar, J. Messier, Polymer J., 19, 275 (1987). iii

(8)

S0 SN (σ (σTPA) (σ (σE)) E1 EN

Figure 4 : Absorption induite suite à une absorption à 2 photons dans la région de transparence du matériau.

Comme l’illustre la Figure 4, une absorption à deux photons dans la région de transparence d’un matériau, vers un état SN, peut conduire à l’excitation d’un état E1 dont l’absorption ou la polarisabilité (indice induit) est plus grande que celle de l’état fondamental (S0). Il en résulte une non-linéarité « anormalement » élevée (§2.2.2). Ces travaux ont fait l’objet de nombreux articles dont les plus significatifs sont reproduits en Annexe 1,7Annexe 2,8 et Annexe 3.9 Le premier (Two-photon enhanced nonlinearity of polydiacetylene) traite essentiellement des effets cohérents se produisant lors du recouvrement temporel des faisceaux laser. Le second (Picosecond two-photon absorption effects on index variation gratings in polydiacetylenes) traite des états excités et des effets à « durée de vie ». Le troisième (Phase conjugation under two-photon absorption conditions in a polydiacetylene crystal) traite essentiellement des effets de propagation dans les milieux optiquement denses (cristaux). Parallèlement, nous avons mis en évidence des effets d’optique non-linéaire originaux : l’effet Stark10 et la conjugaison de phase avec doublage de fréquence11en sont les deux exemples les plus significatifs, ils étaient en effet l’objet d’actives recherches à la fin des années 80.i,ii Nous avons aussi développé des outils expérimentaux originaux : une technique de mesure de la phase de la non-linéarité pour le mélange à 4 ondes dégénéré,12 et une technique de mesure des susceptibilités complexes du troisième ordre des milieux isotropes : l’ellipsométrie Kerr, technique permettant l’étude de la dispersion spectrale et de la réponse temporelle de la non-linéarité optique des matériaux (Figure 5).13 Cette technique a par ailleurs été aussi étendue au régime femtoseconde en collaboration avec Michel Dumont à l’IOTA.14 D’un point de vue plus fondamental, ces travaux nous ont permis d’aborder les non-linéarités d’ordre élevé (>3) des matériaux organiques,11,15,16,17 problème que nous avons été les premiers à rationaliser.iii,iv L’essentiel de ces travaux a été conduit pendant la thèse de Fabrice Charra.18 J’ai moi même soutenu une thèse d’Université à l’issue de cette même période (une deuxième thèse, faute de thèse d’état).19

i B.I. Greene, J.F. Mueller, J. Orenstein, D.H. Rapkine, S. Schmitt-Rink, M. Thakur, Phys. Rev. Lett., 61, 325 (1988).

ii

M. Ducloy, Appl. Phys. Lett., 46, 1020 (1985). iii

H.J. Byrne, W. Blau, K.Y. Jen, Synth. Metals, 32, 229 (1989). iv

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-0.02 -0.01 0 0.01 0.02 400 500 600 700 800 900 Re (δδφφ) Im (δδφφ) 2 899 c m -1 591 c m -1 532 n m λλ (nm) δδφφ (ra d )

Ellipsométrie Kerr pico TMS

Figure 5 : Dispersion de la non-linéarité Kerr du tétraméthyle silane (TMS). On distingue en bleu, sur la partie imaginaire de l’indice non-linéaire, les bandes Raman de gain du côté Stokes et de pertes du côté anti-Stokes de

la raie d’excitation (à 532 nm), ainsi que la dispersion de l’indice non-linéaire autour de ces raies (trait rouge).

Cette étude des « non-linéarités géantes des polymères semi-conducteurs » a induit plus ou moins directement une grande partie des activités de recherche réalisées par la suite dans le Groupe Composants Organiques du CEA. En particulier, l’analyse des non-linéarités optiques des composés organiques nous a permis d’identifier deux domaines d’application potentielle des matériaux organiques non-linéaires : la modulation spatiale de lumière (§2.2.1) et la limitation optique (§2.2.2). Mais introduisons d’abord la notion de « figure de mérite » pour les composants de modulation optique.

(10)

2.2. La modulation optique dans les états excités

La manipulation optique de faisceaux lumineux est un effet du troisième ordre. Deux configurations de couplage d’ondes peuvent être envisagées. Le mode guide d’ondes et le mode ondes libres (Figure 6). Plusieurs figures de mérite pour la commutation en ondes guidées ont été étudiées par Stegeman.i Cette configuration est étudiée afin de parvenir à traiter des données en régime terahertz, pour les réseaux de télécommunications optiques. La configuration d’ondes libres a été étudiée en régime de modulation spatiale de lumière, afin de réaliser des opérations de traitement massivement parallèle de l’information, pour les applications liées à l’opto-Informatique.ii

2D Optical command Active material Out In Active material >Out In> Optical command e e Active material In > e Mirror > Out Mirror Aperture e z0 Active material Lens In Out

•Guide d’ondes

•MSL

•Etalon bistable

•Limiteur optique

Figure 6: Configurations de couplage d’ondes. Mode guide d’ondes, et modes ondes libres : modulateur spatial de lumière (MSL), valve bistable « étalon » de Fabry-Perot et limiteur optique en « goulot de bouteille » (§2.2.2). e est l’épaisseur « utile » du matériau et z0 est la longueur de Rayleigh.22

Nous avons introduit une figure de mérite relative à la configuration de modulation spatiale de lumière, ainsi que les moyens d’optimiser cette fonction avec des matériaux organiques (§2.2.1).20 Nous avons pu ainsi évaluer de nombreux matériaux et processus optiques non-linéaires à partir des paramètres spectroscopiques microscopiques du problème, ainsi que leurs domaines d’applications respectifs.21 Cette figure de mérite s’est révélée globalement applicable aux différentes configurations de commutation tout-optique.22 En particulier, elle a permis de rationaliser dans un même formalisme les configurations de commutation à un faisceau (auto commutation : étalon bistable et limiteur optique), et à deux faisceaux (MSL). Deux articles ayant jalonné cette étude sont reproduits en Annexe 4: Design of an ultrafast OASLM using photoexcitations in organic thin films, the incoherent-to-coherent conversion efficiency of spectral concentration20 et en Annexe 5: Molecular engineering of

i

G.I. Stegeman, SPIE Procs., 1852, 75 (1993). ii

(11)

organic materials for efficient spatial light modulation.21 Les figures de mérite typiques des matériaux permettant de moduler efficacement la lumière sont données à titre indicatif dans le Tableau 1. Elles sont consignées dans un article de revue sur les applications des effets du troisième ordre.23

Tableau 1 : Paramètres typiques de modulation et figure de mérite pour les matériaux non-linéaires du 3e ordre utilisés dans les dispositifs de modulation optique (Q est le facteur de qualité de la cavité photonique).

Configuration Seuil Épaisseur Figure de Mérite Référence

Guide d’ondes 1 W α-1 χ(3) α≥ ×3 10-20m3V-2 i S L M 1 pJ/µm2 L χ(3) τ≥10-3m2V s-2 -1 20 Valve bistable 1 pJ/µm2 α-1/Q χ(3 ατ≥ 10 ) -9 -2 -1 V s m3 ii

Limiteur optique 1 nJ/µm2 z0 χ(3) τ≥ ×3 10-8m2V s-2 -1 iii

i

G.I. Stegeman, SPIE Procs., 1852, 75 (1993). ii

B.G. Sfez, E.V.K. Rao, Y.I. Nissim, J.L. Oudar, Appl. Phys. Lett., 60, 607 (1992). iii

G.A. Schwartzlander Jr., B.L. Justus, A.L. Huston, A.J. Campillo, C.T. Law, Int. J. Nonlin. Opt. Phys., 2, 577 (1993).

(12)

2.2.1. Etude de matériaux pour la modulation spatiale de lumière

Figure 7 : Couches minces d’oligo-thiophènes (α-nT, n = 2, 3, 4, 5, 6, 8) pour la modulation spatiale de lumière.

Nous avons étudié des matériaux présentant un effet photochrome rapide pour la modulation spatiale de lumière. En particulier, dans le cadre d’un contrat avec la DGA, nous avons développé les règles d’ingénierie moléculaire permettant d’optimiser ces propriétés. Nous avons été beaucoup aidés en cela par la technique d’ellipsométrie Kerr13 qui a été à la technique de base de la thèse de Nicola Pfeffer.24 Les matériaux qui sont à l’origine de cette étude sont les oligomères de thiophène (Figure 7) que nous avons étudiés en collaboration avec Denis Fichou du LMM.i Ces matériaux sont bien mieux caractérisés que des polymères car leur taille est bien déterminée. Leur étude permet d’aborder de façon continue l’étude des semi-conducteurs organiquesii: depuis le maillon élémentaire, jusqu’à la chaîne infinie (Figure 8).22

i

D. Fichou, “Handbook of Oligo- and Polythiophenes”, Wiley-VCH (Weinheim, 1998). ii

« Electronic materials : the oligomer approach », K. Müllen, G. Wegner, eds. Wiley-VCH (1998) ; C. Taliani, W. Gebauer, dans ref. i, “Electronic excited states of conjugated oligothiophenes, p.361-404.

(13)

0 2 4 6 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 Transition S 1 →→SN Transition S0 →→S1 Transition T 1 →→TN Nombre de cycles (1/N) E n e rg ie d e T ra n s it io n (e V ) ETATS EXCITES des OLIGOMERES de THIOPHENE

Figure 8 : Etats excités des oligomères de thiophène : dépendance de l’énergie de transition dans l’état fondamental S0 S1 et dans les états excités singulets S1 Sn et triplets T1 Tn, avec l’inverse de la longueur de l’oligomer 1/N.

Pour l’application de modulation spatiale de lumière, les oligomères de thiophène présentent une propriété que nous avons brevetée : la concentration spectrale25 (Figure 9) qui permet de réaliser un convertisseur de lumière incohérente en lumière cohérente.26 Les articles clef de cette étude sont reproduits en Annexe 6 : Picosecond photoinduced dicroism in solutions of thiophene oligomers27 et en Annexe 7 : Picosecond photoinduced dichroism in sexithiophene thin-films.28 En Annexe 8 : The efficiency of photomodulation and spectral concentration of conjugated oligomers,29 est reproduit l’article dans lequel nous montrons expérimentalement que la concentration spectrale est une propriété générale des oligomères conjugués30 et qu’elle vérifie les règles d’ingénierie moléculaire que nous avions établies lors de l’étude des oligomères de thiophène.20

Figure 9 : Concentration spectrale dans un film de α-6T. Dans l’état fondamental (trait pointillé), l’absorption s’étale sur une large bande spectrale. Dans l’état excité (triplet moléculaire en trait continu), l’absorption est concentrée dans une bande spectrale étroite, permettant la conversion de lumière incohérente en lumière cohérente.

Cette étude sur la modulation spatiale de lumière nous a permis de bien comprendre les états excités des molécules organiques, ce qui est fondamental dans toutes les études que nous

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menons actuellement au GCO. Elle a de plus apporté deux nouveaux sujets au laboratoire : l’holographie temps réel, pour laquelle nous avons obtenu un contrat d’études, (Figure 10)21,22 et la limitation optique (§2.2.2)31. Elle nous a enfin conduit à étudier des processus photochromiques originaux : les trous spectraux à température ambiante en collaboration avec Charles Hirlimann au LPS,32 le transfert de charges inter-moléculaire en collaboration avec Dimitra Markovitsi33 et le photo-dopage par génération de protons.34 Nous avons aussi étudié des processus photochromiques plus classiques : l’ouverture de cycle dans des colorants dérivés du spiro-pyrane35,36 et le photochromisme du dithizonate de mercure,37 en collaboration avec Ivan Petkov de l’Université de Sofia.

Figure 10 : Photographie d’une reconstruction d’image holographique temps réel. Un objet diffusant (parallélépipède gravé DEIN GCO) placé après un prisme en toit est vu à gauche, en même temps que son image holographique, à droite derrière le disque en polymère de couleur rouge. Cette photographie a été publiée en 1997 dans la revue Opto Laser Europe (N°39).

(15)

2.2.2. Limitation optique par effets d’absorption àdeux photons 0.25 0.50 0.75 1.00 0.1 1 10 100 1000 10000 11 photons 4 photons 3 photons 2 photons absorption à Energie incidente (µJ) E ner gi e tr a n s mi s e (µ J )

Courbes idéales d'absorption multiphotonique

Figure 11 : Courbes idéales (faisceau « top hat ») Etransmise/ Eincidente d’un filtre de limitation optique basé sur un processus d’absorption multi-photonique. La limite supérieure de 1µJ est celle qui convient à la protection de l’œil.31

Face aux dangers liés à l'utilisation de lasers de puissance accordables sur de larges gammes spectrales, il est nécessaire de disposer de dispositifs de protection adaptés. On peut utiliser des filtres de raies analogues aux lunettes de protection que nous utilisons en laboratoire mais le danger demeure inchangé si le laser n'émet pas à la longueur d'onde du filtre et grâce au développement des OPO, il existe actuellement des lasers de puissance accordables en longueur d'onde. On peut aussi se protéger à l'aide d'interrupteurs électromécaniques ou électro-optiques, mais les temps d'activation de la protection sont alors trop longs car les lasers de puissance peuvent délivrer des impulsions de durée inférieure à 10-8s. Il faut donc développer des protections auto-activées contre des agressions par des lasers déclenchés accordables ou multi-raies. Ce sont des filtres qui doivent s'opacifier quasi instantanément sous l'action de flux lumineux intenses. Ils permettent d'éviter une dégradation irrémédiable de l’œil ou des détecteurs de vision. Il s'agit de limiteurs optiques dont le fonctionnement est fondé sur l'auto-focalisation, sur la diffusion non-linéaire ou sur l'absorption multi-photonique (Figure 11) dans des matériaux optiques non-linéaires. Seuls ces principes permettent à un dispositif de protection de répondre en toutes circonstances au risque laser.

Tableau 2 : Cahier de charges typique pour un limiteur optique assurant la protection de l’œil.

Domaine spectral de couverture 0,4 – 0,7 µm Réversibilité et seuil de dommage >10 J/cm2

Temps de montée < 1 ns

Temps de relaxation < 20 ms

Transmission en régime linéaire > 70 %

Densité optique activée > 2

Seuil d'activation < 0,1 J/cm2

La recherche de matériaux efficaces en limitation optique nécessite l'analyse des processus d'optique non-linéaire mis en oeuvre. Ce sont ceux qui induisent des variations d'indice (Figure 12) ; les mêmes par exemple qu'en modulation spatiale de lumière ou en holographie temps réel (§2.2). La propagation des faisceaux lumineux est essentiellement

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affectée par l'indice optique complexe n = n' +i n"ω , fonction de la fréquence lumineuse ω = 2πc/λ où λ est la longueur d'onde. L'indice possède une partie réfractive n' et une partie absorptive n". La propagation selon une direction z induit un retard de phaseΦ = 2πn'z/λ et le coefficient d'absorption de l'onde est α = 4πn"/λ. En conditions de propagation non-linéaire telles qu'on les réalise avec les faisceaux lumineux intenses, l'indice n dépend du flux d'intensité

I et à l'ordre le plus bas, on a n = n(0)+ n(2)I . L'indice non-linéaire n(2) s'exprime en fonction de la susceptibilité optique du troisième ordre : n(2) = 3χ(3) 4ε0cn2. Une commutation optique interviendra pour un retard de phase non-linéaire ΔΦ > 1; c'est à dire dans le cas d'une absorption non-linéaire, pour une atténuation proche de 90%. Il est réalisé à partir d'une intensité seuil Is induisant un indice non-linéaire δn = n(2)Is tel que typiquement δne /λ≥0.2 où e est la longueur sur laquelle se produit l'interaction. On constate qu'il est nécessaire de disposer d'un maximum d'intensité lumineuse au niveau du filtre non-linéaire, afin d'en assurer la commutation de l'état passant à non-passant. On disposera donc le matériau non-linéaire au voisinage d'un plan focal intermédiaire situé entre la pupille d'entrée et la rétine (Figure 6).

450 500 550 600 650 700 750 800 850 0 1 2 3 4 5 6 Re (ϕ)≡ ϕ0'+δϕ'≡ (2π/λt).t.(n 0+2.n2.Ip) CS2 Cuve 1mm I= 0.45 GW/cm2 @ 1064 nm λ / nm n 2 / (1e-6.cm 2/GW)

Figure 12 : Dispersion de la non-linéarité réfractive n(2) du CS2 mesurée par ellipsométrie Kerr. 38

Un avantage d'une telle configuration est que outre l'auto-activation, elle est aussi sensible aux absorptions induites qu'aux variations d'indice. En effet, un faisceau lumineux se propageant dans un milieu se modifie sous l'action de lentilles auto-induites. La propagation du front d'onde équiphase d'un faisceau convergent est représentée en Figure 13. Dans le cas où l'indice induit est positif (δn > 0), la partie centrale du faisceau dont l'intensité est la plus grande subit un indice de réfraction supérieur à celui du bord du faisceau. Elle se propage donc moins vite que les bords et le faisceau s'auto-focalise. On peut noter que ce phénomène s'il ne se limite pas de lui même, peut conduire à un claquage par effet d'avalanche. Dans le cas où l'indice induit est négatif (δn < 0), c'est la partie centrale du faisceau qui se propage plus vite que les bords et le faisceau s'auto-défocalise. Ce phénomène se limite tout seul et ne conduit donc pas à une dégradation du filtre non-linéaire. Dans tous les cas, le faisceau étant défocalisé, il ira s'étaler sur une surface plus grande au niveau de la rétine, celle-ci subissant donc une intensité réduite.

(17)

a )δn>0 b )δn<0

Figure 13 : Auto-focalisation (a) et défocalisation (b) d'un faisceau convergeant.

La recherche de matériaux pour la limitation optique consiste donc à trouver des matériaux permettant d'induire un déphasage non-linéaire suffisant pour réaliser la commutation du filtre à partir de 0.1 J/cm2. Il s'avère que dans le domaine visible, pour des impulsions de durée > 30 ns, les effets thermiques induits par l'absorption lumineuse dans les liquides sont assez importants pour cet objectif.iii Les effets thermiques s'intègrent sur la durée de l'impulsion lumineuse, ce qui est une qualité intéressante par rapport à une limitation en énergie et non en puissance. D'un point de vue fonctionnel, ils induisent un indice δn < 0 et on disposera donc de préférence le matériau non-linéaire dans la partie divergente du goulot de

bouteille (Figure 6), afin de défocaliser le faisceau. Néanmoins, pour couvrir simultanément

tous les objectifs du cahier des charges, il est nécessaire de rechercher d'autres effets non-linéaires, ce qui nécessite une étude plus approfondie des effets photo-physiques mis en jeu. Les matériaux organiques s'avèrent alors des composants de choix par rapport aux autres technologies (gaz, minéraux, semi-conducteurs).i

Les processus les plus efficaces connus à ce jour sont la diffusion non-linéaire dans les suspensions de particules de carbone (CBS)ii et les processus de réabsorption dans les états excités (RSA).iii Notre connaissance approfondie des non-linéarités d’ordre élevé des polymères semi-conducteurs18 et notre approche photo-physique de l’optique non-linéaire38,39 nous ont conduits naturellement à proposer et à étudier de nouveaux processus de limitation optique. L’étude des états excités intervenant en limitation optique a été un des éléments à la base de la thèse de Stéphane Delysse.38 Notons en particulier l’assignation des états excités des colorant de type cyanine et le bon accord entre les résultats de nature photo-physique (sections efficaces, Figure 14) et la détermination directe des coefficients optiques non-linéaires (χ(3)).38

i

L.W. Tutt, T. F. Boggess, Prog. Quant Electr., 17, 299(1993). ii

K.M. Nashold, D.P, Walter, J. Opt. Soc. Am. B, 12, 1228 (1995) ; K.M. Nashold et al., Nonlin. Opt.,

21, 353 (1999). iii

P.A. Miles, Appl. Opt., 33, 6965 (1994) ; J.W. Perry, K. Mansour, I.-Y.S. Lee, X.-L. Wu, P.V. Bedworth, C.-T. Chen, D. Ng, S.R. Marder, P. Miles, T. Wada, M. Tian, H. Sasabe, Science, 273, 1533, (1996).

(18)

10000 15000 20000 25000 -6 -4 -2 0 2 4 6 8 10 12 -1.57 -1.04 -0.52 0.00 0.52 1.04 1.57 2.09 2.61 3.13 ISQ ε (10 4 .(Mol/l) -1 .cm -1 ) σ 01 & σ1'0' Δσ σ 1'n' sd(Δσ) σ (10 -16 cm 2) λs (cm-1) 1500 1200 900 600 λ s (nm)

Figure 14 : Sections efficaces d’absorption σ1’n’ dans les états excités, différentielle Δσ et erreur, d’absorption linéaireσ01 et d’émission stimulée σ1’n’ de la squarine ISQ. La concentration était de 0.51 10-4 Mol/l dans le toluène. La longueur d’onde de la pompe était λp= 630 nm ( 15 870 cm

-1

), avec une intensité de 5 MW/cm2.

Notre première étude sur la limitation optique a concerné en 1993 le domaine infra-rouge moyen (10,6 µm). Dans le cadre d’un programme d’études soutenu par la DGA, nous avons développé et étudié des nano-matériaux composites efficaces pour cette application. Bien qu’aucun résultat n’ait été publié à ce jour, nous avons acquis une grande expérience de la limitation optique, ainsi que des phénomènes non-linéaires conduisant à de fortes modulation d’indice pour les bandes II et III. Dès 1994, nous avons proposé d’utiliser les effets d’absorption multi-photonique (Figure 11) résultant de l’absorption à deux photons dans les polymères (Figure 4) pour réaliser des limiteurs optiques pour la bande I, totalement transparents dans le visible et très résistants aux forts flux de lumière (plus grande dynamique) que les limiteurs « classiques » de type CBS ou RSA. Cette étude a nécessité une connaissance approfondie des processus d’absorption à deux photons se produisant dans les polymères40,41 et dans les petites molécules.42,43 Un des article sur l’absorption à deux photons qui fait référence pour nous est reproduit en Annexe 9 : Two-photon absorption in non-centrosymmetric dyes.44 On y caractérise deux colorants : le Disperse Red 1 (DR1) et le dibutyl-aminonitro-stilbène (DANS) qui servent de molécules modèles dans nombre de nos travaux sur l’optique non-linéaire au GCO (Figure 15). Mais les processus d’absorption à deux photons « ordinaires » ne suffisent pas, loin de là, à produire une limitation optique satisfaisant le cahier de charges du Tableau 2. Il faut faire appel aux cascades d’absorption que nous avions mises en évidence dans les polydiacétylènes (Figure 4).7 Un article qui tente de donner une voie de réalisation d’une cascade d’absorptions non-linéaires produisant un effet d’avalanche au delà d’un certain seuil d’intensité laser est reproduit en Annexe 10 : Multiphoton absorption in organic dye solutions.45 Le principe est fondé sur l’effet d’addition de photons par transfert d’energie (APTE) proposé par Auzel en 1966 pour expliquer les processus de « up-conversion » de luminescence dans les verres dopés.i

i

(19)

N N N O2N CH2CH3 CH2CH2OH N O2N CH2CH2CH2CH3 CH2CH2CH2CH3 2.0 2.2 2.4 2.6 2.8 3.0 3.2 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 2.0 2.2 2.4 2.6 2.8 3.0 3.2 E / eV (E pump+Eprobe) / eV β / (cm/GW) 0 1 2 3 4 ε / (10 4 .(Mol/l) -1 .cm -1 ) 2.0 2.2 2.4 2.6 2.8 3.0 3.2 3.4 3.6 3.8 4.0 4.2 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 2.0 2.2 2.4 2.6 2.8 3.0 3.2 3.4 3.6 3.8 4.0 4.2 E / eV (E pump+Eprobe) / eV β / (cm/GW) 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 ε / (10 4 .(Mol/l) -1 .cm -1 )

Figure 15 : Coefficient d’absorption à deux photons β (traits pleins) et intervalle de confiance (ligne brisée) en fonction de l’énergie de la transition Epump+Eprobe (axe du bas) dans une solution à 70 g/l de DR 1 dans THF (figure de gauche) et dans une solution à 70 g/l de DANS dans THF (figure de droite). La courbe en pointillés (axe du haut) représente le coefficient d’extinction ε en fonction de l’énergie E. Les structures des molécules sont représentées en haut de la figure.

Nous travaillons actuellement sur la limitation optique par absorption à deux photons (ADP) dans le cadre d’un programme de la DGA associant le CEA (GCO et Philippe Millié au DRECAM), l’équipe de Véronique Dentan au LCR de Thomson, et les équipes de Patrice Baldeck à l’UJF (LSP), André Collet et Chantal Andraud à l’ENS Lyon (STIM), Philippe Nicoud à l’ULP (GMO) et Alain Ibanez au CNRS de Grenoble (cristallographie). Nous avons à ce jour obtenu des résultats qui se situent à un des meilleurs niveaux mondiaux (sinon le meilleur), la concurrence venant surtout des Etats Unis.i Ces résultats ont été obtenus avec un azurant optique commercial de la famille des distirylbiphényls et ses dérivés synthétisés par Christine Denis et Paul Raimond au GCO et Jean-François Nicoud au GMO. Nous avons découvert ces composants alors que nous cherchions à réaliser de la up-conversion de luminescence dans des polymères dopés (Figure 16). Notons que la photographie présentée ici a fait la première page de la revue Condensed Matter News en 1993,46 elle a aussi été publiée en 1997 dans Opto Laser Europe (N°38), dans un article sur les lasers organiques à up-conversion. Ces matériaux ont aussi des propriétés de luminescence intéressantes pour de nombreuses autres applications.47 Les résultats obtenus par Pierre-Alain Chollet en ce qui concerne la limitation optique par cette molécule sont publiés dans l’article reproduit en Annexe 11 : Dispersion of optical power limiting in stilbene 3 solutions.48 Depuis cette publication, nous avons obtenu de bien meilleurs résultats de limitation optique avec un dérivé résultant d’une ingénierie moléculaire plus poussée et préparé par un de nos collaborateurs. Plusieurs publications sont en préparation à ce jour.49,50

i

M. Albota, D. Beljonne, J.-L. Brédas, J.E. Ehrlich, J.-Y. Fu, A.A. Heikal, S.E. Hess, T. Kogej, M.D. Levin, S.R. Marder, D. McCord-Maughon, J.W. Perry, H. Röckel, M. Rumi, G. Subramaniam, W.W. Webb, X.-L Wu, C. Xu, Science, 281, 1653 (1998) ; J.W. Perry, S. Barlow, J.E. Ehrlich, A.A. Heikal,Z.-Y. Hu, I.-Y.S. Lee, K. Mansour, S.R. Marder, H. Röckel, M. Rumi, S. Thayumanavan, X.-L. Wu, Nonlinear Optics, 21, 225 (1999).

(20)

Figure 16 : Luminescence bleue excitée par absorption à 3 photons d’un laser à YAG (1.064nm) dans un barreau de polystyrène dopé au stilbène 3 (collaboration avec Françoise Rondeaux du DAPNIA).

Bien que nous ayons à présent obtenu d’excellentes performances, il nous reste encore certaines voies intéressantes à explorer :i elles concerneront en particulier des superstructures moléculaires et des nano-matériaux composites.

i

R.C. Hollins, “Optical limiters: spatial, temporal and spectral effects”, Nonlin. Opt., 21, 49 (1999) ; “Materials for optical limiters”, Current opinion in solid state and materials science, 4, 189 (1999).

(21)

2.3. Anisotropie et non-centrosymétrie optique transitoire

Les apports de l’optique non-linéaire sont multiples : nous avons étudié certaines applications liées aux fonctions de l’optique non-linéaire et nous avons réalisé de nombreux travaux de spectroscopie des états excités. Nous avons aussi exploré certains aspects liés à la symétrie de l’interaction lumière - molécules. Celle-ci est plus sensible à la nature moléculaire du matériau que les effets décrits plus haut qui peuvent être décrits phénoménologiquement, en ignorant tout de la structure. Nous nous sommes intéressés très tôt à cet aspect de l’interaction car les configurations de mélange d’ondes multiples que nous avons utilisées s’y prêtent bien : les 4 faisceaux lumineux ont des polarisations indépendantes16 (voir aussi l’Annexe 2). Nous avons ainsi contribué à clarifier les règles de polarisation intervenant expérimentalement lors de processus d’interaction cohérents ou incohérents, en collaboration avec le POMA d’Angers.51 Ces « règles de polarisation » ont été inclues dans l’article de revue sur les phénomènes du troisième ordre.3 a) D2O + D3PO4 PD P P Sample OMA Spectro Shutter delay P U M P P R O B E A Nd:YAG 1.06 µm 33 ps ~10mJ BS Filter Filter beam stop Ep x y Es0 δφ δφ Es1 δθ δθA A Ep Es0 P 400 600 800 0 1 2 3

Int. (arb. u.)

wavelength (nm) Continuum : b) Quantel 532 nm 1064 nm F 1 M M M P S S L/2 sample L/2 M M P Lens-pinhole system PMT M F 2 P P Delay line 1 Delay line 2 PD Synchro sampler Micro computer HP Nd:YAG 2ω 2ω SWM signal 1 2 3 4 Sample cell 2ω 2ω ω ω ωω

Figure 17 : (a) : Schéma de l’ellipsométrie Kerr. L’insert montre les schémas de polarisation des faisceaux dans le plan d’incidence : Ep est le champ excitateur et Es0 (Es1) le champ de test avant (après) interaction dans l’échantillon. La rotation de l’analyseur d’un angle δθ autour de la direction d’extinction (courbe en pointillés) permet d’obtenir l’angle δφ de transmission minimale qui correspond au dichroïsme induit par l’excitation. Le spectre du continuum est aussi montré en insert.

(b) : Schéma de l’expérience de mélange à six ondes (SWM). L’insert montre la géométrie d’interaction des faisceaux : les faisceaux 1 et 3 à ω et 2ω inscrivent le réseau de non-centrosymétrie. Le faisceau 2 à ω permet la lecture de se réseau en produisant le faisceau 4 à 2ω qui est conjugué en phase de 3 par le processus de SWM.

Nous avons mis au point une expérience particulièrement adaptée à l’étude des symétries moléculaires et de leur dynamique : l’ellipsométrie Kerr.13 Il s’agit d’une expérience de type pompe sonde, basée sur l’effet Kerr optique, qui permet de mesurer séparément le dichroïsme et la biréfring ence induits par une pompe polarisée linéairement dans un milieu isotrope. Le schéma expérimental du dispositif est représenté Figure 17a. Le processus non-linéaire du troisième ordre est révélateur de l’anisotropie moléculaire (hyperpolarisabilité γ, Figure 18).

(22)

Impulsion d’excitation

0

Δt 30 ps

• Processus cohérents :δϕ''(Δt)∝ Ip(Δt). Im(χ // (3)-χ T (3)) Kerr(λs) Ep

• Processus transitoires :δϕ''(Δt>0) ∝ Nγ pΔσ*(λs).e-Δt / τrel

Ep

Figure 18 : Origines et dynamique de relaxation de l’anisotropie photo-induite.38

L’ellipsométrie Kerr nous a permis de mettre en évidence la direction de polarisation de la transition à transfert de charge inter-moléculaire dans un complexe donneur-accepteur formant des structures colonnaires.33 Nous avons aussi étudié l’anisotropie du processus de saturation d’absorption dans des colorants utilisés comme absorbants saturables infrarouges.52,24 Nous avons pu mettre en évidence le transfert de charge intermoléculaire photo-induit dans des « supra-molécules », en collaboration avec J. McCleverty de Bristol, dans le cadre du projet TMR DELOS.53 Nous avons enfin étudié la symétrie du processus d’excitation des molécules possédant une dégénérescence due à une symétrie élevée dans les états excités : il s’agit des molécules planes possédant un axe C4 (phtalocyanines)54 et des molécules quasi-sphériques du groupe de l’isocaedre (C60).24 Le spectre des états excités singlets et triplets du C60 en solution est représenté en Figure 19. Le dichroïsme induit en régime picoseconde est nul, ce qui signifie que l’excitation de nature dipolaire électrique a très rapidement perdu sa cohérence en relaxant parmi les sous-niveaux dégénérés de l’état excité singulet. L’article qui consigne les travaux réalisés en collaboration avec D. Markovitsi du SCM à Saclay est reproduit en Annexe 12 : Charge-transfer complexes of discogenic molecules, a time-resolved study based on Kerr ellipsometry ;33 celui qui consigne les travaux réalisés en collaboration avec H. Sasabe du RIKEN est reproduit en Annexe 13 : Anisotropy of the transient absorption change of a molecular system with two-dimensionally degenerate transitions.54

(23)

0 0.2 0.4 0.6 0.8 600 700 800 900 absorption T 1 →→Tn dicroïsme absorption S 1 →→Sn εε 4ns ≈≈1.2 10 4 M-1cm-1 εε ≈≈1.8 103M-1cm-1 dichroïsme picoseconde λλ(nm) ΔΔ A C

60dans le toluene excité à 532nm

Figure 19 : Spectre des états excites singlets (en rouge) et triplets (en bleu) du C60 en solution. Aucun dichroïsme (en vert) n’est détectable dans les états excités en régime picoseconde.

L’ellipsométrie Kerr qui est un processus du troisième ordre ne donne accès qu’aux symétries axiales. Nous avons développé une autre expérience, beaucoup plus originale, qui permet d’accéder aux symétries polaires et à leur dynamique. Il s’agit du mélange à six ondes (SWM) dont le schéma expérimental est représenté en Figure 17b.17 Le principe en est le suivant : lorsque deux faisceaux lumineux de longueurs d’ondes ω et 2ω cohérents entre eux « interfèrent » dans un milieu (Figure 20), la moyenne temporelle du champ électrique <E>t est nulle, mais comme on le voit sur figure, la somme Eω + E2ω présente une asymétrie polaire et c’est la moyenne <E3>t qui est non nulle. Ce principe d’holographie à deux couleurs a été décrit par B. Ya Zeldovich en 1987.i Nous avons suggéré son application aux matériaux organiques en 1991.11 Nous avons présenté les premiers résultats d’induction optique de non-centrosymétrie à la conférence SPIE de Quebec : « Photoinduced self-organization effects in optical fibers », en Juin de la même année.17

ω

2

ω

+ = NO2 2 NO <E>t= 0 <E3> tnon nul

Figure 20 : Principe de l’orientation polaire induite par les interférences cubiques.55

i

(24)

De même que les molécules s’alignent sous l’action d’une lumière monochromatique grâce à leur anisotropie de polarisabilité α -α (Figure 21a), elles s’orientent sous l’action d’une lumière bichromatique grâce à leur hyperpolarisabilité moléculaire β (Figure 21b). On mesure l’alignement moléculaire par la biréfringence induite et on mesure l’orientation polaire par génération de second harmonique. Nous avons étudié en détail les différents processus physiques permettant d’envisager une orientation tout optique :56 c’est en pratique le « hole-burning » orientationnel qui domine le processus dans les solutions de molécules organiques, ce qu’ont confirmé deux autres groupes.i,ii L’article de base sur le processus est reproduit en Annexe 14 : Six-wave mixing probe of light-induced second-harmonic generation: example of dye solutions. Hormis le caractère polaire de l’interaction, ce sont les mêmes types d’effets de relaxation qui interviennent en ellipsométrie Kerr (Figure 18) et en SWM.

a) EAC 2 NO NO2 DINDUIT DINDUIT b) E ω 2 NO NO2 D= β.Eω2 D2ω= β.Eω2 E

Figure 21 : Différence entre orientation axiale (alignement) induite en lumière monochromatique polarisée (effet Kerr optique) (a) et orientation polaire induite en lumière bichromatique (effet Kerr harmonique) (b).55

En mélange à six ondes, l’orientation est purement optique, la technique s’applique donc bien à l’étude de molécules ioniques et à leur dynamique de hole burning orientationnel.57 Nous avons ainsi étudié des cations de triaryl pyrillium en collaboration avec D. Markovitsi et M. Veber.58 Ces molécules passent dans un état TICT (twisted internal charge transfer) sous excitation.59 Avec Barbara Paci et Claudia Schmidt, nous avons étudié des stilbènes substitués par un carbocation, en collaboration avec C. Screttas dans la cadre du contrat européen TMR -DELOS,60 et nous avons comparé les dynamiques de relaxation obtenues par ellipsométrie Kerr et par SWM ;61 c’est l’objet de l’Annexe 15 : Nonlinear optical properties of push-pull stilbenes based on a strong carbocation acceptor moiety. La technique s’applique aussi à l’étude des molécules octupolaires qui ne possèdent pas de moment dipolaire permanent mais qui possèdent une hyperpolarisabilité β non nulle. Nous avons réalisé cette étude en collaboration avec Joseph Zyss au CNET-Bagneux, ce qui nous a permis de démontrer que la molécule d’éthyle violet possédait bien la symétrie D3h dans ses états excités62. Cet article est reproduit en Annexe 16 : Transient optically induced noncentrosymmetry in a solution of octupolar molecules. Nous avons étudié de nombreuses autres molécules : cyanine,63 curcumine,57 DBANS,64 dimères de pyrillium.iii Certaines, présentant des non-centrosymétries « originales » seront publiées ultérieurement.

i

J. Zhao, J. Si, Y. Wang, P. Ye, X. Fu, Q. Xingfa, Y. Shen, Opt. Lett., 20, 1955 (1995). ii

S. Lin, D.L. Andrews, I.D. Hands, S.R. Meech, Chem. Phys. Lett., 285, 321 (1998). iii

(25)

3.

Mise en oeuvre de dispositifs optoélectroniques moléculaires

Dans la démarche d’ingénierie moléculaire des composants organiques schématisée en Figure 2, l’optique non-linéaire moléculaire du §2 correspond à la première étape de caractérisation et d’optimisation des molécules. Nous décrivons dans ce qui suit certaines applications de ces mêmes matériaux organiques, molécules et polymères, à la réalisation de composants organiques : diodes et structures photoniques. Il s’agit de la troisième étape de notre démarche d’ingénierie moléculaire des composants organiques.

Nous nous sommes intéressés très tôt à la mise en œuvre de dispositifs optoélectroniques. Nous recherchions les signatures optiques non-linéaires de la présence de charges photo-induites dans les polymères semi-conducteurs.65,66,67 Celles-ci avaient été observées par P.A. Chollet lors d’expériences d’EFISHG sur des films minces de polydiacétylène.i Un projet de recherche sur les polymères photo-réfractifs a été soumis à l’ESA en 198768 et un brevet sur une idée de mise en oeuvre de ces polymères a été déposé.69 Un partie de la thèse de Gwillerm Froc à l’Institut d’Optique a été orientée vers la mise en évidence de signatures photo-réfractives dans des polymères photo-conducteurs.70 Un modulateur spatial de lumière à commande électrique fondé sur l’injection de charges dans les oligomères de thiophènes a été étudié par Fabrice Charra (Figure 7).ii Des matériaux et dispositifs photo-réfractifs organiques sont actuellement étudiés au GCO par François Kajzar, dans le cadre d’une collaboration avec Andrzej Miniewicz de la Technical University of

Wroclaw :iii il s’agit d’assemblages hybrides constitués d’un film mince de polymère photo-conducteur et d’une valve à cristaux liquides, selon le principe de la valve de Hughes.iv

Les récents progrès scientifiques et technologiques réalisés dans le domaine des matériaux plastiques (polymères) motivent un effort croissant de la communauté scientifique internationale en ce qui concerne les semi-conducteurs organiques.71 Notons en effet que :

• Les systèmes de reprographie, photocopieurs et imprimantes laser, utilisent pratiquement tous des polymères comme photorécepteurs. Le polyvinylcarbazole (PVK) et les polycarbonates dopés ont remplacé le sélénium et le silicium amorphes pour des raisons de coût et d'environnement. La stabilité de ces polymères aux conditions d'exposition à la lumière ultraviolette (UV) et aux atmosphères oxydantes des décharges Corona se révèlent satisfaisantes.

• Des diodes électroluminescentes organiques possédant des rendements énergétiques d'émission en lumière bleue voisins de 5 % ont été réalisées, il s'agit d'une prouesse à laquelle personne ne croyait dix ans plus tôt. De plus, sous certaines conditions de fabrication, leur durée de vie dépasse 10000 heures, avec des brillances supérieures à 100 Cd/m2. Leur

i

P.A. Chollet, F. Kajzar, J. Messier, dans “Polydiacétylènes”, D. Bloor, R.R. Chance, 317 (Nijhoff, 1985).

ii

F. Charra, M.P. Lavie, A. Lorin, D. Fichou, Synthetic Metals, 65, (1994) ; F. Charra, Nonlin. Opt.,

10, 287 (1995). iii

F. Kajzar, S. Bartkiewicz, A. Miniewicz, Appl. Phys. Lett., 74, 2924 (1999). iv

J. Grinberg, A. Jacobson, W. Bleha, L. Miller, L. Fraas, D. Boswell, G. Myer, Opt. Eng. 14, 217 (1975).

(26)

développement industriel est aujourd'hui lié à l'identification des marchés porteurs et à la maîtrise des procédés de réalisation …

3.1. Les diodes à semi-conducteurs organiques

Avant toute démarche d'ingénierie moléculaire, il convient d'identifier les caractéristiques essentielles des dispositifs. On parle de semi-conducteurs organiques : des isolants qui conduisent lorsqu'on injecte des charges. Mais les matériaux organiques sont constitués de molécules et même dans le cas des polymères, leurs excitations (chargées ou non) sont localisées spatialement. Pratiquement, les charges dans des matériaux organiques sont simplement des molécules chargées, cations ou anions selon le signe, qu’on peut isoler en solution par électrochimie. La conduction se fait donc par des processus successifs d'oxydoréduction, de proche en proche, selon le schéma : A1- + A2 → A1+ e- + A2 → A1+ A2- où 1 et 2 désignent des accepteurs d'électron voisins. D'un point de vue énergétique, on a affaire à la situation représentée dans un diagramme énergie / position sur la Figure 22.

ΔΔ

électron

1 2

0

Figure 22 : Conduction par sauts.

L'électron (ou le trou) est confiné sur un site accepteur. Il se déplace de site en site à travers des barrières de potentiel constituées par le milieu intermoléculaire (solvant, vide, matériau de structure ...). Son mouvement peut être activé thermiquement ou par un champ électrique. Une description phénoménologique est fournie par le modèle de Poole-Frenkel:

(

( E )kBT

)

exp 0 12

0 β

μ

μ= −Δ− qui donne la mobilité électrique μ en fonction de la hauteur de la barrière de potentiel Δ0, de la température T et du champ électrique E. β est une constante dépendant de la permittivité diélectrique du milieu. Un modèle plus rigoureux doit prendre en compte les propriétés d'oxydoréduction et la nature désordonnée du milieu. On reconnaît immédiatement une règle d'ingénierie simple : le matériau doit être compact (agrégé), la barrière Δ0 sera ainsi réduite au minimum ; il faut de plus utiliser des molécules aussi conjuguées que possible (on est limité à 1 ou 2 nm à cause de la localisation), afin de gagner sur µ0. La mobilité dépend fortement du champ E appliqué ou régnant à l’intérieur de la structure

(champ rectificateur).

Ces isolants conduisent lorsqu'on y injecte des charges. Cela peut être dû à un dopage (les polymères semi-conducteurs sont en général dopés n par l’oxygène). Cela peut aussi avoir lieu au contact d'une électrode métallique, sous application d'un champ E, selon le schéma de la Figure 23. S.C. organique Or B.V. B.C. électron E E.F.

(27)

Figure 23 : Injection de trous à une électrode.

Les électrons circulent depuis la bande de valence (BV) du semi-conducteur (SC), vers le niveau de Fermi (EF) du métal. Nous avons choisi l'or dans la figure ci-dessus car son affinité électronique est supérieure au travail de sortie de l'électron dans la majorité des semi-conducteurs organiques. Pour injecter des électrons dans la bande de conduction (BC), Il faut choisir des métaux à faible travail de sortie. Il peut s'agir de l'aluminium, du calcium et de certains alliages (MgAg). Il y a toutefois ici une difficulté car les métaux réducteurs seront fortement oxydés à l'air libre, ce qui nécessite de travailler sous atmosphère contrôlée lors de la préparation du dispositif.

L'injection au contact d'une électrode métallique permet de drainer les charges dans les dispositifs photovoltaïques. Dans ce dernier cas, l'injection à proprement parler est réalisée par excitation optique, comme dans le schéma de la Figure 24. Le processus inverse se produit lors de la recombinaison dans les diodes électroluminescentes

BV BC Vide ν h excitation dissociation E E, kT

Figure 24 : Processus de photo-génération.

Revenant à une description moléculaire de la photo-génération, une molécule neutre contient deux électrons appariés sur son niveau de valence. Lorsqu’un photon hν excite la molécule, un électron transite vers le niveau de conduction, mais il n'y a pas de charge « injectée » car la molécule reste neutre et l'exciton ainsi formé ne demande qu'à se recombiner. C'est avec le champ appliqué E ou l'agitation thermique kT qui l'exciton va se dissocier en paire électron-trou (anion - cation), laquelle pourra migrer dans la structure. Le rendement quantique de photo-génération φ dépend du champ E et de la température T. Le modèle de Onsager, qui considère que vont se dissocier les paires crées avec une énergie supérieure à l'attraction coulombienne de la paire, donne une expression de φ en série de puissances de E :

( )

[

+ +⋅⋅⋅

]

= rkeET r r B c c ! 2 1 exp 0 0 φ

φ , où rc= e2/4πεkBT est la distance critique en dessous de laquelle

l'attraction devient supérieure à l'énergie cinétique et où r0 est la longueur de thermalisation de

l'excitation (taille de l'exciton). Le rendement φ a un comportement exponentiel sur une large gamme de champ E. Le champ régnant à l'intérieur de la structure a donc un impact déterminant sur le rendement de photo-génération. Il peut varier pratiquement de 10-5 à 1. Ce processus de dissociation activée par le champ inhibe la luminescences dans les diodes électroluminescences fonctionnant sous forte tension, lorsque le régime de courant limité par charge d’espace est atteint par exemple.

3.1.1. Diodes électroluminescentes

Le domaine de la visualisation est en perpétuelle mutation afin de satisfaire une attente de plus en plus exigeante de la part des utilisateurs. Il existe en particulier une demande croissante d’afficheurs plats, légers, bon marché, consommant peu d’énergie et générant une image lumineuse visible sous un grand angle de vue. C’est pourquoi ces cinq dernières années, d’importants efforts de recherche ont été entrepris à travers le monde pour développer des

(28)

dispositifs de visualisation à base de matériaux organiques. Ces derniers peuvent constituer une alternative intéressante aux écrans plats à cristaux liquides ou de type FED (Field Emission Display), les démonstrateurs présentés aujourd’hui par les compagnies japonaises sont en effet d’une excellente qualité visuelle.72

Les premières études sur l'électroluminescence des matériaux organiques datent du milieu des années 60. Si ces premiers travaux n'ont jamais débouché sur de réels dispositifs d'affichage, ils ont en revanche permis d'identifier et de comprendre les principaux processus mis en jeu dans l'électroluminescence. En 1987, Tang et Van Slyke de Kodaki furent les premiers à mettre en évidence une émission intense de lumière verte à partir de films organiques sublimés. L'idée novatrice de ce travail était de contrôler, grâce à un système bicouche, l'équilibre du flux d'électrons et de trous à l'intérieur de la diode. Une nouvelle étape fut franchie en 1990 avec la découverte de l'électroluminescence dans le poly(paraphénylènevinylène) (PPV), un polymère π conjugué, à l'Université de Cambridgeii. Ces dernières années ont été marquées par l'amélioration constante des performances des diodes électroluminescentes organiques ou OLED (petites molécules et polymères), liée à une meilleure maîtrise de la préparation et de la purification des matériaux ainsi que de leur mise en œuvre.iii Tous les résultats reportés jusqu'ici montrent qu'une amélioration du rendement d'émission nécessite l’utilisation de couches de conduction de trous et d'électrons mais aussi de blocage contre l'injection d'ions dans les couches émissives. Ce dispositif multicouches (Figure 25) améliore significativement la balance de recombinaison des trous et des électrons.

V V + -Glass Anode : ITO

Hole injecting layer (HIL) Hole transporting layer (HTL)

Emitting layer (EL)

Electron transporting layer (ETL) Cathode

Figure 25 : Structure multicouche d’une diode électroluminescente organique (OLED).

Les deux principales méthodes de préparation des dispositifs électroluminescents organiques mettent en œuvre soit des polymères en couches minces déposés par spin-coating (PoLED) soit des molécules ou des oligomères évaporés sous vide (VSLED). Ces deux technologies présentent des aspects complémentaires et sont aujourd’hui menées de front en raison d’un même état de l’art en terme de performances et de développement industriel. Par ailleurs, les applications envisagées par chacune d’elles sont étroitement liées à la mise en œuvre des matériaux et ne présentent par conséquent qu’un faible recoupement. Les performances des dispositifs actuellement les plus avancés sont données dans le Tableau 3.

i

C. W. Tang, S. A. Van Slyke, Appl. Phys. Lett., 1987, 51, 913. ii

J. H. Burroughes, D. D. C. Bradley, A. R. Brown, R. N. Marks, K. Marckay, R. H. Friend, P. L. Burns, A. B. Holmes, Nature, 1990, 347, 539-541.

iii

R.H. Friend, R.W. Gymer, A.B. Holmes, J.H. Burroughes, R.N. Marks, C. Taliani, D.D.C. Bradley, D.A. Dos Santos, J.L. BreÂdas, M. LoÈgdlund, W.R. Salaneck, Nature, 397, 121 (1999).

(29)

Tableau 3 : Performances actuelles de dispositifs électroluminescents organiques.

Tension de commande ≈ 3 à 5 V

Emission R V B

Rendement lumineux > 5 lm/W

Luminance > 10000 Cd/m2

Durée de vie > 10000 heures à 100 Cd/m2

Nous avons commencé les études sur les OLED au GCO dès le début des années 90, en utilisant comme matériau organique un oligomère de thiophène (α-6T, Figure 7).73 Les LED réalisées à cette époque avaient des performances très modestes (10-4%, Figure 26). Cette étude a néanmoins permis d’appréhender les différents processus physiques gouvernant l’électroluminescence dans les organiques.74

Figure 26 : Diode électroluminescente mono- α- 74

En bref, lorsqu'ils sont portés dans des états excités, certains matériaux retournent à

l'équ : ils sont luminescents.

-conducteurs conduisent l'électricité lorsqu'ils sont à l'état dopé. Ils s trous dans la bande de valence. Ces deux espèces peuvent s'annihiler en se recombinant, laissant le matériau dans

Néanmoins, si les semi- -crist

il est toujours difficile de réaliser des matériaux organiques

semi-luminescents à l'état solide. En effet, le désordre entraîne l’existence de pièges d’énergie. On

peut alors incorpore 10 %

en masse) afin qu’ils jouent eux mêmes le rôle de pièges d’énergie.

l’électrode métallique polarisée négativement. Des charges positives (trous) et des charges Figure 25

recombinent pour former un état excité (exciton) qui revient à l’état fondamental en émettant électroluminescentes sont caractérisées par le spectre de la lumière émise, par la tension à partir de laquelle il y a émission de lumière et par le

(30)

matériau, de l’épaisseur de la couche organique mais également de la nature des électrodes injectrices. Les meilleurs métaux injecteurs d’électrons sont malheureusement les plus facilement oxydables (faible travail d’extraction de l’électron Wf), donc les plus fragiles. Le

rendement quantique interne ηη dépend de trois facteurs : ηη = γγ ηηrφφf.

1. γγ est le taux de paires électron - trou : il faut les deux pour former un exciton. γγ est optimal lorsque trous et électrons sont injectés dans le polymère dans une même proportion. La plupart des matériaux organiques semi-conducteurs stables sont de très bons conducteurs de trous mais de très mauvais conducteurs d’électrons. Augmenter γγ revient donc soit à augmenter le nombre d’électrons injectés, soit à diminuer le nombre de trous injectés. Cette balance électron - trou est un paramètre crucial pour le fonctionnement des LED. En effet, les charges excédentaires qui circulent librement chauffent la structure et la détruisent en favorisant les réactions d’oxydoréduction parasites aux électrodes.

2. ηηr est la probabilité pour que l’état excité formé par recombinaison des porteurs de

charges opposées soit radiatif. Dans les organiques électroluminescents elle est généralement de 1/4 (3 triplets de spin pour un singulet radiatif).

3. φφf est le rendement de fluorescence, c’est à dire la probabilité que l’état excité radiatif

se désexcite en émettant un photon. Dans les colorants laser, cette probabilité est optimisée et vaut typiquement 1.

Figure 27 : Diodes électroluminescentes organiques (PoLED) réalisées au GCO.

Nous avons apporté notre contribution scientifique à la thématique PoLED lors de la thèse d’Emmanuelle Gautier-Thianche,75 dans le cadre d’un projet de collaboration avec Magneti-Marelli.76 Nous avions travaillé avec un polymère commercial bien connu : le polyvinylcarbazole (PVK) déposé par centrifugation. L’originalité du travail a consisté à doper le PVK par des colorants afin d’augmenter les rendements d’électroluminescence.77 Le dopage du PVK permet de choisir la couleur d’émission à loisir (Figure 27). Cette étude a par ailleurs permis de mieux comprendre le fonctionnement des diodes et de se faire une bonne idée des difficultés technologiques liées à ce type de dispositifs. Une des principales causes de dégradation des diodes organiques est liée à la nature de l’interface entre le métal et le matériau organique (Figure 28), ce que nous avons pu observer par réflectivité d’X-rasants, en collaboration avec Jean-Jacques Benattar du DRECAM.78

(31)

a) b)

Figure 28 : LED verte en fonctionnement (l’électrode de droite n’est pas sous tension). Des îlots sombres apparaissent après un certain temps, témoins du vieillissement de la diode (a). Photographie au microscope optique de la dégradation de la surface de la cathode (b).

Les performances de nos diodes en polymères dopés sont raisonnables (0.1%) et elles ont été publiées dans l’article joint en Annexe 17 : Coumarin concentration effect on PVK based blue light emitting diodes.79 En particulier, nous avons pu mettre en évidence l’effet du dopage par le colorant sur le piégeage des trous et l’amélioration de la balance d’injection des électrons (Figure 29).

+

+

-• piégeage des charges + • réduction barrière /injection charges -= balance électron-trou améliorée ITO POLYMERE METAL

Figure 29 : Effet du dopage par le colorant sur l’injection des charges : les trous sont piégés, le niveau de conduction est rabaissé et le champ régnant à la jonction avec le métal est accru.79

Les performances de ces diodes sont néanmoins inférieures à celles des diodes en PPV publiées par les groupes leader à travers le monde. La raison principale ne vient pas d’un mauvais choix des matériaux ou du type de technologie (dépôt du polymère par voie humide) mais d’une mauvaise maîtrise de la technologie associée. Nous n’avons pas préparé et caractérisé les diodes sous atmosphère contrôlée, comme le font d’autres groupes. D’autre part une purification adéquate (élimination de l’eau dissoute dans le polymère et dans les solvants utilisés) est également nécessaire à l’amélioration des performances. Ce sont en partie la pureté des matériaux et le contrôle de l’atmosphère (humidité et oxygène) qui déterminent la longévité de la diode. Au cours de la thèse d’E. Gautier-Thianche, des solutions techniques originales ont également été étudiées, comme l’injection de courant à travers un canal métallique (Figure 30),80 ce qui à donné lieu à un dépôt de brevet.81 L’article correspondant est reproduit en Annexe 18 : Field-effect electroluminescence in a polymer channel.

(32)

Figure 30 : Vu en microscopie à force atomique du canal gravé dans un film d’aluminium pour l’électroluminescence par effet de champ dans un polymère.80

Nous avons aussi mis en œuvre une méthode de caractérisation originale de la structure et de l’injection dans les diodes par microscopie de luminescence à effet tunnel, en collaboration avec Fabrice Charra au DRECAM.82 Nos études de diodes au GCO par microscopies en champ proche ont fait l’objet d’une note technique de la société Burleigh.83

0.0 2.0 4.0 6.0 Tension (V) 0.0 1.0 2.0 3.0 I( m A /c m 2) ITO/CuPc/TPD/Alq3/LiF/Al 0.0 2.0 4.0 6.0 Tension (V) 0 10 20 30 40 50 B r illa n c e (C d /m 2) ITO/CuPc/TPD/Alq3/LiF/Al

Figure 31 : Caractéristiques courant / tension (à gauche) et brillance / tension (à droite) de diodes électroluminescentes organiques multicouches (VSLED) réalisées au GCO selon la technologie « Kodak ». Elles émettent dans le vert à 517nm, leur brillance maximum atteint 104 Candela/m2 et leur rendement lumineux 3 Lumen/W. Leur durée de vie en fonctionnement est de plusieurs centaines d’heures à température ambiante.

L’objectif actuel des études que nous menons dans le cadre de l’électroluminescence organique consiste à réaliser un prototype d’afficheur permettant de rivaliser avec les meilleurs groupes mondiaux.72,84 Nous collaborons pour cela avec un vaste panel de partenaires. La Figure 31 illustre les performances des diodes réalisées par Bernard Geffroy, André Lorin et André Rosilio, par dépôt sous vide d’une structure multicouche (Figure 25) de petites molécules (VSLED). Nous avons ainsi accru la durée de vie des diodes de plusieurs ordres de grandeur. Ce résultat s’explique par une plus grande compacité et par une meilleure pureté des différentes couches constituant la structure VSLED. Le procédé nous permet aussi de réaliser des diodes émettant dans les trois couleurs fondamentale (RVB). De plus, les différentes molécules actives sont généralement disponibles commercialement.

Comme on peut d’ores et déjà le constater à travers la littérature scientifique,i l’évolution probable de l’électroluminescence organique va tendre vers des solutions de confinement de l’émission lumineuse, afin d’augmenter l’efficacité externe des dispositifs. En effet, dans les dispositifs d’affichage actuellement réalisés, les photons sont émis par le film

i

Figure

Figure 7 : Couches minces d’oligo-thiophènes (α-nT, n = 2, 3, 4, 5, 6, 8) pour la modulation spatiale de  lumière.
Figure 8 : Etats excités des oligomères de thiophène : dépendance de l’énergie de transition dans l’état fondamental S0   S1 et dans les états excités singulets S1   Sn et triplets T1   Tn, avec l’inverse de la longueur de l’oligomer 1/N.
Figure 10 : Photographie d’une reconstruction d’image holographique temps réel. Un objet diffusant (parallélépipède gravé DEIN GCO) placé après un prisme en toit est vu à gauche, en  même temps que son image holographique, à droite derrière le disque en po
Tableau 2 : Cahier de charges typique pour un limiteur optique assurant la protection de l’œil.
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