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PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE

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Academic year: 2021

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PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE

Les activités liées au feu occupent vraisemblablement une place centrale dans la vie quotidienne des paléolithiques. La maîtrise du feu offre la possibilité de se chauffer, de s’éclairer, de cuire des aliments et même de transformer certaines matières. Elle implique également une véritable gestion, à court et moyen termes, tant dans l’approvisionnement en combustibles que dans l’entretien des foyers. Malgré cela, les comportements préhistoriques liés au feu restent mal connus et de nombreux débats entourent encore la question de l’usage du feu par les différents groupes préhistoriques. Récemment, les discussions se sont par exemple focalisées autour de la question de « l’usage habituel » du feu chez les néandertaliens (Roebroeks & Villa 2011a et 2011b ; Sandgathe et al. 2011a et 2011b ; Bentsen 2014, p. 141-142 ; Shimelmitz et al. 2014).

Initié par un article de synthèse cosigné par Roebroeks et Villa, le débat porte sur le degré de maîtrise du feu par les groupes néandertaliens (Roebroeks & Villa 2011a). Pour ces

auteurs, il existe de nombreux indices de l’existence d’une véritable pyrotechnologie  au Paléolithique moyen  : la production de mastique d’emmanchement nécessitant la transformation de matériaux par le feu, la cuisson de végétaux ou encore la présence récurrente de foyers – parfois aménagés avec des pierres – à travers les différents niveaux de certains gisements (Roebroeks & Villa 2011a). La maîtrise de l’allumage du feu par les néandertaliens est toutefois contestée par Sandgathe et al., pour qui l’existence de niveaux d’occupation néandertaliens totalement dépourvus de traces de feu suggère, au contraire, un usage largement opportuniste du feu, qui aurait pendant longtemps été « récolté » lors d’incendies naturels (Sandgathe et al. 2011a et 2011b).

Outre l’intérêt de fond de ce débat, qui touche à la problématique symboliquement chargée de l’ancienneté de l’invention du feu, cette polémique met en lumière les importantes lacunes dans la documentation. En effet, la question sous-jacente de ce débat est celle de la

fréquence de l’usage du feu par les groupes préhistoriques des différentes époques. Or,

pour répondre à cette question il faudrait pouvoir comparer les occupations ayant livré des traces d’usage du feu avec les occupations dont celles-ci sont totalement exemptes. Or, toute tentative d’inventaire exhaustif des traces de feu maîtrisé se heurte actuellement à deux problèmes méthodologiques importants.

Premièrement, on constate que dans de nombreux cas l’identification des structures de combustion est incertaine. Conscients de la qualité variable des données, Roebroeks

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catalogue au moyen d’un « indice de confiance »1 (Roebroeks & Villa 2011a). Deuxièmement,

les indices moins spectaculaires de l’usage du feu n’ont pas toujours été relevés.

Dans la majorité des cas, les témoins de combustion non structurés, tels que les os ou pierres brûlés, ne font pas l’objet d’une analyse spécifique. À quelques exceptions près, ces témoins isolés font – au mieux – l’objet d’une mention. Dès lors, la quantification des vestiges de combustion et des activités dont ceux-ci témoignent apparaît à ce stade comme un objectif difficilement atteignable.

Dresser la liste des niveaux d’occupation dont les traces de feu seraient totalement absentes s’avère tout aussi compliqué. Il faudrait pour cela pouvoir exclure l’effet

destructeur de certains phénomènes post-dépositionnels sur les indices parfois ténus de l’usage du feu. Si cette démarche analytique reste difficile pour les gisements récemment fouillés étant donnée la complexité des phénomènes à prendre en compte, elle l’est d’autant plus pour les très nombreux sites fouillés anciennement pour lesquels les données pertinentes font défaut.

Ces lacunes documentaires, qui empêchent à ce stade toute réponse définitive à la question

de l’usage habituel du feu par les Néandertaliens, ne sont pas l’apanage du Paléolithique moyen. Les problèmes – et parfois les erreurs – d’identification des traces de feu sont communs pour toutes les périodes de la Préhistoire. La problématique méthodologique du diagnostic apparait donc fondamentale en archéologie du feu. C’est à cette réflexion

méthodologique générale que ce travail vise à contribuer.

OBJECTIFS

L’objectif de cette thèse est de concourir au comblement des lacunes documentaires sur les activités liées au feu au Paléolithique, en s’attelant plus particulièrement au problème de l’identification des traces de feu maîtrisés sur les sites « mal documentés ». Dans cette catégorie, je regroupe tous les gisements pour lesquels les données de terrain, et en particulier les données contextuelles (données spatiales, contexte géologique et archéologique), sont imprécises, partielles ou totalement absentes, et qui sont dès lors généralement exclus de la réflexion générale sur les comportements liés au feu.

Les gisements fouillés au 19e siècle et début du 20e siècle composent la majeure partie de ce corpus. Les collections issues de ces chantiers anciens sont nombreuses sur le territoire belge, qui a connu une archéologie préhistorique précoce. De très grandes quantités de

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matériel faunique et lithique provenant de gisements anciennement fouillés sont ainsi entreposées à l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique (IRSNB). En visitant ces collections, j’ai pu me rendre compte de l’incroyable richesse de ces ensembles qui comptent souvent des plateaux entiers d’ossements et de silex brûlés inétudiés. Restait à trouver une façon de faire « parler » ces milliers de vestiges dépourvus – le plus souvent – des données de terrain les plus élémentaires.

Les problèmes de diagnostic se posent également pour des gisements plus récemment fouillés. Il s’agit de gisements fouillés avec des méthodes archéologiques modernes mais

qui, pour différentes raisons, ne présentent pas une documentation «  optimale  » en ce qui concerne les témoins de combustion. Les cas de ce type, largement minoritaires, sont généralement issus d’une « histoire » de fouille quelque peu inhabituelle : fouilles effectuées dans l’urgence, changements de fouilleurs, chantiers interrompus en cours d’excavation ou données de fouilles incomplètement publiées. Fréquemment, ce sont uniquement les vestiges de combustion – pas toujours au centre des problématiques de recherches développées par les fouilleurs – qui n’ont pas été aussi bien documentés que ce que l’on pourrait espérer. Quelles que soient les causes des lacunes documentaires liées à ces découvertes, la présence de feu contrôlé sur ces gisements ne peut a priori pas être confirmée sur la base des données publiées. Une démarche de révision, dont les modalités varient en fonction de la situation particulière de chaque gisement, doit donc être entamée si l’on veut pouvoir mobiliser ces découvertes dans le débat.

Ces différents cas de figures seront abordés à travers des études d’ensembles de matériel représentatifs afin de dégager des solutions permettant d’aborder la question de l’usage du feu sur ce type de gisement. Afin de pouvoir effectuer des comparaisons, j’ai choisi de sélectionner des sites appartenant à un même contexte géographique et chronologique global : le Bassin Mosan belge durant le MIS 3. Ces études de cas permettront d’alimenter une réflexion méthodologique générale sur les problèmes d’identification des traces de feu contrôlé dans le cas de fouilles mal documentées.

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quelques pistes de réflexions qui émergent de l’étude du matériel expérimental et archéologique menée dans le cadre de ce travail.

AXES DE RECHERCHE ET MATÉRIEL D’ÉTUDE 

OS ET SILEX BRÛLÉS

Le 1er volet de l’étude vise à contribuer à une meilleure identification des os et silex brûlés, en particulier dans les collections anciennes. Dans sa synthèse sur les traces de feu anthropogéniques datées du Pléistocène inférieur et moyen, James classe ces deux catégories de matériel parmi les types de témoins de combustion les plus fréquemment utilisés comme preuve de la présence de feu, juste derrière les charbons de bois (James 1989). Les charbons ayant été rarement ou mal prélevés par les fouilleurs de la fin du 19e et du début du 20e siècle – cette question sera abordée plus en détails dans le chapitre 2 –, les silex et ossements brûlés constituent souvent les uniques témoins des activités liées au feu exploitables dans les collections anciennes. Or, même si les analyses portant sur ces vestiges brûlés ne sont pas rares, quelques confusions demeurent quant à la reconnaissance des traces d’altérations thermiques. En particulier, des problèmes liés à la terminologie peu standardisée utilisée dans les descriptions compliquent non seulement la confrontation des résultats issus des différentes études expérimentales mais également les comparaisons inter-sites (voir e. a. Mayne Correira 1997 ; Symes et al. 2008).

Dans cette partie, je propose de remettre à plat les données bibliographiques à propos de l’altération thermique de l’os et du silex. Cette synthèse bibliographique est complétée par de très nombreux exemples expérimentaux et archéologiques afin de pouvoir servir de référentiel. Je m’attarderai également sur les problèmes liés à l’interprétation des os portant des traces noires qui sont souvent à l’origine de diagnostics erronés. En offrant une description précise des critères d’identification permettant la reconnaissance de traces de thermoaltération, cette partie de l’étude vise à faciliter et systématiser l’identification de ce type de témoins encore trop souvent délaissés par les chercheurs non spécialistes des questions liées au feu.

LA COLLECTION DUPONT DU TROU MAGRITE (PONT-À-LESSE)

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de témoins brûlés isolés issus de fouilles anciennes est également abordé : sur quels indices peut-on fonder l’analyse en l’absence de données contextuelles précises ?

Dupont est l’un des fouilleurs les plus dynamiques du 19e siècle, avec une soixantaine de gisements à son actif. Il fut également directeur du Musée Royal d’Histoire Naturelle de Belgique – l’ancêtre de l’IRSNB – durant quarante ans. Les fouilles menées sous sa direction peuvent donc être considérées comme représentatives de cette période de l’archéologie préhistorique.

J’ai choisi le gisement du Trou Magrite parmi les très nombreux sites fouillés par Dupont pour plusieurs raisons. D’une part, une révision complète du matériel faunique est en cours dans le cadre d’une thèse de doctorat menée par E.-L. Jimenez, ce qui offre la possibilité de profiter de données paléontologiques et archéozoologiques actualisées (Jimenez en préparation). D’autre part, contrairement à d’autres gisements fouillés par Dupont, comme le Trou de Chaleux par exemple (Dupont 1867a, p. 39-40), aucune information concernant des éventuelles traces de feu n’avait été mentionnée par le fouilleur pour le Trou Magrite. L’analyse partait donc a priori de zéro, ce qui rendait cette étude de cas particulièrement intéressante pour la mise en place d’une approche méthodologique adaptée à des collections anciennes, au sein desquelles les témoins de combustion ont rarement été identifiés –ou en tout cas mentionnés – par les fouilleurs.

LES « FOYERS » DU TIÈNE DES MAULINS (ROCHEFORT)

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2005a). Au fil des campagnes de fouilles, de nombreuses autres structures de ce type sont dégagées. À partir de 2008, j’entreprends l’étude de ces « foyers » – dont l’identification est présentée comme acquise – dans le cadre de mon mémoire de maitrise d’abord, puis dans le cadre de cette thèse de doctorat (Smolderen 2009 ; Groenen et al. 2013).

Au fil des analyses et des campagnes de fouilles, des doutes émergent cependant quant à l’interprétation de ces structures  : d’une part, certaines données de laboratoire semblent en contradiction avec le diagnostic originel et, d’autre part, les données archéologiques apparaissent biaisées par la méthode de fouille. Il m’apparaît dès lors nécessaire de reprendre «  à zéro  » l’analyse et la détermination de ces structures. Parallèlement, la Direction de l’archéologie de la région Wallonne décide de ne pas renouveler le permis de fouille en 2012 suite à la mise en évidence de manquements méthodologiques importants. Le chantier est dès lors fermé, et il n’est plus possible d’effectuer de nouvelles observations de terrain ou de nouveaux prélèvements afin de vérifier l’identification de ces « foyers ». Une nouvelle analyse du matériel archéologique déjà excavé et conservé à l’Université Libre de Bruxelles s’avère également impossible, étant donné que mon accès à ce matériel est depuis lors contesté par le fouilleur.

Afin de réévaluer le diagnostic initial, j’ai par conséquent été contrainte d’opter pour une démarche de révision fondée exclusivement sur les données existantes. Si ce type de démarche n’est pas inhabituelle en archéologie (voir e. a. Svoboda 2008 ; Dibble et al. 2005 et 2009b), l’étude que je propose a cependant la particularité de consister, avant tout, en un travail autocritique puisque j’ai moi-même conduit une partie des analyses nécessitant une réévaluation. Ce travail comporte dès lors une dimension volontairement réflexive. Étant donné l’impossibilité d’effectuer de nouvelles analyses, j’ai en outre choisi de focaliser mon attention sur les aspects méthodologiques et épistémologiques de ce cas d’étude : quels sont les arguments avancés pour démontrer la présence de feu contrôlé et de structures ? Quels sont les éventuels biais qui ont pu influencer la démonstration  ? Les arguments sont-ils pertinents et suffisants pour confirmer l’interprétation proposée ?

UNE PERSPECTIVE HISTORIOGRAPHIQUE

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