Progrèsenurologie(2012)22,701—704
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ARTICLE ORIGINAL
Faut-il envisager un traitement complémentaire après une colique néphrétique drainée par une sonde JJ ? 夽
Should we consider a complementary treatment after a renal colic drained by an ureteral stent?
M. Roumiguié
a,∗,b, J.-B. Beauval
a,b, J. Guillotreau
a,b, B. Bordier
a,b, N. Doumerc
a,b, F. Sallusto
a,b,
M. Mouzin
a,b, L. Bellec
a,b, M. Thoulouzan
a,b, P. Labarthe
a,b, P. Plante
a,b, M. Soulié
a,b, B. Malavaud
a,b, P. Rischmann
a,b, X. Gamé
a,baServiced’urologie,d’andrologieetdetransplantationrénale,CHUdeRangueil,TSA50032, 31059Toulouse,France
bFédérationd’urologie,CHUdeRangueil,31059Toulouse,France
Rec¸ule17juin2011;acceptéle25juin2012
MOTSCLÉS Calculurétéral; SondeJJ; Élimination spontanée; Traitement
Résumé
Objectifs.—Déterminersilamiseenplaced’unesondeJJpourunecoliquenéphrétiquelithia- siquecompliquée(CNLC)peutsuffireautraitementspécifiqueducalculurétéral.
Patientsetméthodes.—Uneétuderétrospectiveaétéréaliséechez95patients,39femmeset 56hommesd’âgemoyen46,4±17,2ans,ayanteuunesondeJJpourCNLCentre2005et2010.
Aprèslapriseenchargeinitiale,était prévueenhospitalisationl’ablationdela sondesous anesthésielocalepuislelendemainune(TDM)abdomino-pelvienneetuntraitementspécifique ducalcul(lithotritieextracorporelle,urétéroscopie).Lesparamètressuivantontétéétudiés pourdéterminer leurrôle dansla persistancedu calcul: âge,sexe,taille, siège,côté. Les valeursqualitativesétaientcomparéesparuntestdeChi2,lesvaleursquantitativesparuntest tdeStudent.Leseuildesignificativitéétaitp<0,05.
夽 Niveaudepreuve:5.
∗Auteurcorrespondant.
Adressee-mail:roumiguiemathieu@yahoo.fr(M.Roumiguié).
1166-7087/$—seefrontmatter©2012ElsevierMassonSAS.Tousdroitsréservés.
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2012.06.008
702 M.Roumiguiéetal.
Résultats.—Les patients ont été hospitalisés en moyenne 1,58±1,84mois après l’épisode aigu. Les calculs mesuraient en moyenne 6,12±2,18mm. Chez 64,2% des patients après l’ablationdelasondeilnepersistaitplusdecalcul.Lescalculsexpulsésmesuraientenmoyenne 5,85±2,33mmetétaientlocalisésrespectivementpour77%,3%et20%descasdansl’uretère pelvien,iliaqueetlombaire.Trente-quatrepatientsavaientnécessitéuntraitementcomplé- mentairedevantlapersistanceducalculquimesuraitenmoyenne6,59±1,84mmetlocalisé pourrespectivement17,5%,5,8%et76,7%descasdansl’uretèrepelvien,iliaqueetlombaire.
Conclusion.—Aprèslamiseenplaced’unesondeJJpourCNLC, 64%despatientsn’avaient pasnécessitédetraitementspécifiqueducalcul,cetauxatteignant90%lorsquelecalculétait pelvien.
©2012ElsevierMassonSAS.Tousdroitsréservés.
KEYWORDS Ureteralstone;
JJstent;
Spontaneous elimination;
Managementand treatment
Summary
Purpose.—Theaimofthestudywastoevaluateifonlyureteralstentremovingaftercompli- catedrenalcolic(RC)couldpreventfromcomplementarytreatment(shock-wawelithortripsy orureteroscopy).
Patientsandmethods.—Datafrom95patients,39womenand56men,whohadanureteral stentfor complicated RC from2005 to2010were retrospectively collected.Meanagewas 46.4±17.2years.Aftertheinitialmanagement,anotherhospitalizationwasorganizedwhere patientshadureteralstentremovingunderlocalanesthesia,thenanabdominalCT-scanwithout injectionandcomplementarytreatment ofureteral stones(noneorESWLorureteroscopy).
Parameters studiedwere age,sex, stonesize, locationofcalcul. Quantitative valueswere comparedwithStudent’sttest.QualitativevalueswerecomparedwiththeChi2.P<0.05was consideredstatisticallysignificant.
Results.—Meanduration between the twohospitalizations were 1.58±1.84months. Sixty- onepatients(64.2%)hadnomoreurolithiasis.Inthesepatients,meansizeofurolithiasiswas 5.85±2.33mm.Locationofurolithiasisindistal,mildandproximalureterwas77%,3%and 20%respectively.Thirty-fourpatients(35.8%)hadpersistantlithiasisafterCT-scan.Locationof stoneindistal,mildandproximalureterwas17.5%,5.8%and76.7%respectively.
Conclusion.—Aftermanagementofcomplicatedrenalcolicbyureteralstent,64%ofpatients hadspontaneouseliminationofstonesafterremovingofureteralstent,especiallyinwomen andpelvicureter.
©2012ElsevierMassonSAS.Allrightsreserved.
Introduction
EnFrance,la colique néphrétique aiguë (CNA) lithiasique constitue chaque année 1à 2% des entrées dans les ser- vicesd’urgences,sontauxderécidiveestde15%àunan, 35%àcinq anset50% àdixans[1—3].Selon l’étudeSui- vimax débutée en 1994, les hommes sont deux fois plus touchésque lesfemmes [4].Le traitement dela CNAest l’associationd’antalgiqueetd’anti-inflammatoirenonsté- roïdiens[3].Dansenviron6%descasdevantunerésistance auxtraitementsmédicamenteux,unétatfébrile,uneanu- rieoudevantunterrainàrisque(reinunique,insuffisance rénale)laCNAestcompliquéeetilestalorsrecommandéde dériverlesurinesparlamiseenplaced’unesondeurété- raleoud’unesondedenéphrostomie[5,6].Dansunsecond temps à distance d’une CN simple,le comité lithiase de l’Associationfranc¸aised’urologie(CLAFU) recommandeun traitementspécifiqueducalculquipeutêtrelalithotripsie extracorporelle(LEC)oul’urétéroscopie(URS)[7,8].
L’objectifdenotre travailétaitd’évaluer sila miseen placeenurgenced’unesondeJJpourunecoliquenéphré- tique compliquée pouvait suffire au traitement du calcul urétéraletéviterainsiuntraitementcomplémentaire(LEC etURS).
Patients et méthodes Population
Une étude rétrospective monocentrique a été réalisée chez tous les patients ayant eu une sonde urétérale de type JJ pour colique néphrétique lithiasique compliquée entre 2005et 2010. La colique néphrétique était consi- dérée comme compliquée selon les critères du CLAFU lorsque de la fièvre, un syndrome hyperalgique malgré un traitement médicamenteux bien conduit ouunterrain à risque (rein unique, insuffisance rénale) étaient asso- ciés.Au-delà dequatresemainesaprèsl’épisodeaigu,les patients étaienthospitalisés pour ablation de lasonde JJ sousanesthésielocalepuislelendemainétaientprévusune tomodensitométrieabdomino-pelvienne(TDM)sansproduit de contraste et un traitement spécifique du calcul (LEC, urétéroscopie).
Laséquencethérapeutiqueétaitclairementexpliquéeau patient et son adhésion était obligatoire. C’est ainsi que nous avons recensé 95patients, 39femmes et 56hommes d’âgemoyen46,4±17,2ans.Lamiseenplacedelasonde JJ remontait en moyenne à 1,58±1,84mois. Les cal- culs étaient localisés respectivement chez 38, quatre et
QueltraitementaprèsunecoliquenéphrétiquedrainéeparunesondeJJ? 703
Tableau1 Caractéristiquesdescalculsexpulsésetnonexpulsés.
Localisation Présencecalculn=34 Absencecalculn=61 Totaln=95 p
n(%) n(%)
Lombaire+Iliaque 26+2(66,6) 12+2(33,3) 38+4 <0,0001
Pelvien 5(9,6) 47(90,4) 52
Taille(mm) 6,58±0,31 5,84±0,31 6,12±2,18 ns
Âge(an) 49,9±3,3 44,5±2,0 46,44±17,20 ns
Sexe
M 25 31 56 0,04
F 9 30 39
Côté
Droit 18 30 48 ns
Gauche 17 30 47
Suivi(mois) 1,77±0,44 1,46±0,16 1,58±1,84 ns
52patients dans l’uretèrelombaire, iliaqueetpelvien.Ils mesuraientenmoyenne6,12±2,18mm(Tableau1).
Analyse statistique
Lecritèreprincipaldejugementétaitl’absencedecalculà laTDMaprèsablationdelasondeJJ.Pourdéterminers’ils jouaientunrôlesurl’éliminationducalcul,lesparamètres suivant ont étéétudiés: âge etsexe des patients, taille, siègeetcôtédescalculs.
Lesvaleurs qualitativesontété comparéesenutilisant untestdeChi2etlesvaleursquantitativesparuntesttde Student.Leseuildesignificativitéétaitfixéàp<0,05.
Résultats
Aprèsl’ablationdelasondeJJ,ilnepersistaitplusdecal- culàlaTDMabdomino-pelviennesansproduitdecontraste chez 61patients (64,2%). Les calculs éliminés mesuraient en moyenne 5,85±2,33mm et étaient localisés respecti- vement pour 77% (47),3% (2) et20% (12) dans l’uretère pelvien,iliaqueetlombaire.Trente-quatrepatients(35,8%) avaientnécessitéuntraitementcomplémentairedevantla persistanced’uncalculàlaTDMdecontrôle.Trentepatients onteuuneURSetquatrepatientsonteuuneLECpourdes calculs mesurant en moyenne 6,59±1,84mm. Ils étaient respectivementpour17,5%(6),5,8%(2)et76,7%(26)dans l’uretèrepelvien,iliaqueetlombaire(Tableau1).
Lescalculspelviensétaientéliminésàl’ablationdelaJJ dans90,4%contreseulement33,3%descalculsiliaqueset lombaires(p<0,001).
L’expulsion spontanée ducalcul chezles femmes était plusfréquentequechezleshommes,respectivement76,9% contre55,35%(p=0,04).
La taille des calculs, l’âge et, le côté n’avaient pas d’influencesignificativesurl’éliminationducalcul.
Discussion
Lesrecommandationspourletraitementdescalculsurété- raux sont largement décritesdans la littérature [7,8]. En
revanche,laprise enchargethérapeutiquedeces calculs après la mise en place d’une sonde JJ en urgence pour uneCNcompliquéenefaitpasl’objetderecommandations spécifiques. Aucune étude dans la littérature n’a évalué l’élimination spontanée du calcul après la mise en place d’unesondeJJenurgencepourCNAlithiasiquecompliquée.
Dans notre étuderétrospective monocentriqueportant sur95patients,nousmontronsquedansplusde90%descas aprèsl’ablationdelasondeJJ,ilnepersistaitplusdecal- culspelviens.Cependant,lorsquelecalculétaitensituation lombaireletauxd’expulsionaprèsl’ablationdelaJJn’était quede33%.
Dansleurstravaux,Shieldsetal.ontrapportélerôlede préparationdel’uretèreparlasondeJJavantlesurétéroso- copiesfacilitantlaprogressionendo-urétéraledanslescas difficiles.Dansnotre travail,lamiseenplacedelasonde JJenurgence avaitpermis unedilatation de l’uretère et favorisél’éliminationspontanéedescalculsenclavés[9].
Nosrésultatssurl’éliminationdescalculsaprèslamise enplaced’une sonde JJen urgence pour CNcompliquée étaientconcordantsaveclesdonnéesdelalittératuresurla migrationspontanéedescalculsaucoursdescrisesdeCN.
Eneffetselonlesséries,l’expulsiondescalculspelviensde moinsde6mmvariaitde45%[10]à70%[11].Lesfacteurs qui influenc¸aient l’expulsion spontanée étaient le degré d’obstruction,laduréedescrisesdouloureusesetlataille [12,13].Enrevanche,dansnosrésultatsiln’apparaissaitpas dedifférencestatistiquementsignificativeentrelatailledes calculsexpulsés et la taille des calculs persistants. Cette observationdifférentedelalittératureétaitprobablement dueàunmanquedepuissancedel’étudeetunepopulation decalculslombairestropfaible.
Enfin dans notre cohorte, les femmes avait un taux d’élimination des calculs supérieur aux hommes ce qui ne correspond pas aux observations faites dans l’étude deDonsimoni etal. [14]. Ils ont rapporté que les calculs s’expulsaientplusfacilementchezl’hommeetqu’ilexistait une influence de la composition du calcul sur son élimi- nation. Cette différenceétait probablement liée à notre population féminine qui présentaitun plus grand nombre decalculspelviensquelombaire.
De plus, il existait probablement dans notre tra- vail un biais de sélection car c’est le chirurgien avec
704 M.Roumiguiéetal.
l’accord dumalade qui avait inclusle patient dans cette stratégie thérapeutique. On peut alors concevoir que les cas compliqués (calculs supérieurs à 10mm, calculs multiples...) n’avaient pas bénéficié de cette prise en charge.
Cesrésultatsnouspermettentd’envisagerdeuxprisesen chargethérapeutiquesdifférentesenfonctiondelasitua- tionurétéraleducalcul.Eneffet,sicedernierestpelvien, l’ablation de la sonde JJsuffit à la prise en charge dans plus de 90% des cas. Le contrôle par imagerie n’apporte uneinformationpertinentedanscescasprécisquechezun patientsurdixetdoncl’envisagersystématiquementcontri- bueàaugmenterlesdépensespour lasociétéet,pour les patients,l’expositionsauxradiations.Enrevanche,silecal- culestenpositionlombaireilfautenvisageruntraitement complémentaireducalcul.
Uneétudemédico-économiqueestnécessairepouréva- luerlaréductionducoûtapportéeparcettenouvelleprise encharge.
Conclusion
Après la mise en place d’une sonde JJ pour colique néphrétique compliquée, 64% des patients avaient une élimination spontanée de leur calcul, ce taux attei- gnant les 90,4% lorsque le calcul était en situation pelvienne.
Déclaration d’intérêts
Lesauteursdéclarentnepasavoirdeconflitsd’intérêtsen relationaveccetarticle.
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