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Isolement et identification de quelques Dermatophytes du sol dans le sud de la France

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Annales de Parasitologie (Paris), t. 39, 1964, n° 5, pp. 635 à 650

Isolement et identification

de quelques Dermatophytes du sol dans le sud de la France

Par Jean-A. RIOUX, Denise-T. JARRY et Daniel-M. JARRY

Les isolements de Dermatophytes (1) à partir des sols, isolements de plus en plus nombreux dans divers pays, consacrent définitivement l’hypothèse d’une vie saprophy­

tique de ces Ascomycètes kératinophiles.

Dès 1893, R. Sabouraud supposait que certains représentants du genre Tricho­

phyton, cultivant facilement sur les milieux naturels tels que les terreaux riches en débris végétaux, pouvaient être primitivement des saprophytes telluriques. Quelques années plus tard, il précisait sa pensée : « Il semble que ces Trichophytons aient dans la nature une existence saprophyte et libre que nous ne connaissons pas. »

Par la suite, divers auteurs se servaient de ces milieux naturels. Ainsi, en ense­

mençant Microsporum gypseum sur un mélange de terre de forêt, de plumes et de débris épidermiques, A. Nannizzi en obtenait le stade parfait en 1927 (Gymnoascus gypseum). De même, pour éviter le pléomorphisme et rajeunir les cultures, M. Langeron

et S. Milochevitch (1930) recommandaient en particulier les milieux à base de graines de céréales ou de crottin de cheval. En 1932, L. Bonar et A. D. Dreyer cultivaient les agents des Teignes sur des poils, du cuir et des tissus de laine ou de soie. Toutefois, ils ne réussissaient pas à isoler de Dermatophytes à partir du milieu extérieur.

Indépendamment l’un de l’autre, C. W. Emmons (1951) et R. Vanbreuseghem

(1952) apportaient récemment des faits indiscutables qui permettaient de considérer le sol comme un « immense réservoir » de Dermatophytes. Ce dernier auteur, en parti­

(l) Le terme de Dermatophyte est utilisé classiquement pour des Gymnoascacées kératinophiles douées de pouvoir pathogène. Or, ce dernier caractère, indiscutable pour un Mycologiste médical, est cependant variable dans un même genre, d’une espèce à l’autre, et dans une même espèce, d’une souche à l’autre. A la limite, il peut s’atténuer jusqu’à disparaître totalement ; le Champignon se comporte alors comme un saprophyte tellurique strict. Il est d’ailleurs plus logique de considérer comme primitif l’absence de pouvoir pathogène, l’adaptation au parasitisme se faisant de la kératine

« morte » à la kératine « vivante ». Ainsi, Keratinomyces ajelloi, saprophyte habituel, a été isolé de lésions dermatologiques par H. Rieth et A. Y. El Fiki (1959) chez le Cheval et par G. Ehrman et J. Thurner (1962) chez l’Homme. Trichophyton terrestre a été isolé deux fois de petites lésions papuleuses du Cheval.

Dès lors, si l’on admet que les Gymnoascacées kératinophiles peuvent acquérir une certaine pathogénicité, le seul fait de leur kératinophilie doit suffire à les classer parmi les Dermatophytes.

Ainsi faisons-nous pour Ctenomyces serratus et Chrysosporium keratinophium.

Article available athttp://www.parasite-journal.orgorhttps://doi.org/10.1051/parasite/1964395635

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636 JEAN-A. RIOUX, DENISE-T. JARRY ET DANIEL-M. JARRY

culier, se basant sur cette propriété fondamentale des Dermatophytes, la kératinophilie, et en adaptant un procédé original de J. S. Karling (1946), réussissait à mettre au point une technique pratique, depuis universellement adoptée.

Actuellement, à notre connaissance, douze espèces (1) ont été découvertes dans le sol :

Tableau I Découverte princeps

DANS LE SOL Stadeconidien STADE PARFAIT

R. Vanbreuseghem, 1952

(Belgique) * Keratinomyces ajelloi

Vanbr., 1952 Arthroderma uncinatum

Daws, et Gentl., 1961 M. Gordon, L. Ajello

et L. Georg, 1952 (Etats- Unis)

Complexe gypseum :

* Microsporum gypseum (Bodin, 1907)

* Microsporum fulvum Uriburu, 1909.

* Nannizzia incurvata Stockdale, 1961.

Nannizzia gypsea Stockdale, 1963

* Nannizzia fulva Stockdale, 1963 W. H. Bridge Cooke, 1952

(Etats-Unis) * Microsporum cookei

Ajello, 1959 * Nannizzia cajetana Ajello, 1961 H. I. Lurie et R. Borok,

1955 (Afrique du Sud) * Trichophyton mentagrophy­

tes (Robin, 1853) * Arthroderma sp. (2).

E. B. Durie et D. Frey,

1957 (Australie) * Trichophyton terrestre

Durie et Frey, 1957 * Arthroderma quadrifidum.

Daws, et Genti., 1961 R. Evolceanu, I. Alteras,

A. Dobrescu et V. Kursky- Erémie, 1960 (Roumanie).

Trichophyton interdigitalis Priestley, 1917

N. M. McLung, 1960 (Panama) in J. W. Carmi­

chael, 1962

Stade Chrysosporium

de Carmichael, 1962 Arthroderma tuberculatum Kuehn, 1960.

S. Szathmary et Z. Herpay,

1960 (Hongrie) * Stade Chrysosporium de

Frey et Griffin, 1961 * Ctenomyces serratus Eidam, 1880.

R. Evolceanu, I. Altéras et I. Cojocaru, 1961 (Rou­

manie)

Trichophyton quinckeanum Zopf, 1890.

C. O. Dawson et J. C.

Gentles, 1961 (Ecosse) Arthroderma curreyi

Berkeley. 1860.

(1) Depuis le dépôt du manuscrit, deux nouvelles espèces d'Arthroderma (A. cuniculi et A. mul­

tifidum) ont été décrites par C. O. Dawson [Samouraudia, 1963, 2 (3), 185-191].

* Stades isolés au cours du présent travail.

(2) Les périthèces obtenus, du type Arthroderma, étaient stériles.

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IDENTIFICATION DE QUELQUES DERMATOPHYTES DU SOL 637 Recherches personnelles

Durant deux ans, plus d’une centaine de prélèvements ont été effectués en diverses localités du sud de la France, de L’Aquitaine à la Provence (Toulouse, Perpignan, Vil- leneuve-de-la-Raho, Sète, Avignon et Nice), et principalement dans la région montpel- liéraine et la Camargue. Ils ont intéressé des biotopes très variés, depuis les milieux dunaires, les « sansouires », les pinèdes et les chênaies sur sable jusqu’aux garrigues, aux vignes et oliveraies ; les parcs urbains, les granges, les caves, les cours de ferme et les écuries ont été également prospectés. Nous donnons ici les premiers résultats de nos investigations.

Méthode d’isolement

La technique employée, inspirée de la méthode princeps de R. Vanbreuseghem

(1952), utilise comme source de kératine le cheveu, le crin, la plume, la laine et la corne.

Après dégraissage au xylol, les phanères sont stérilisées soit par passage à l’autoclave, soit par exposition pendant 24 heures aux vapeurs d’oxyde d’éthylène. L. Ajello (1961) recommande ce dernier procédé pour stériliser crins et terre en vue de l’obtention rapide de la forme parfaite, Nannizzia cajenata, à partir de cultures de Microsporum cookei.

Les phanères sont disposées à l’intérieur et en surface de la terre tamisée, répartie en boîtes de Pétri stériles. Cette méthode donne de meilleurs résultats que celle qui consiste à placer la source de kératine en surface seulement. Une mince couche de coton hydrophile placée au fond de la boîte et imbibée d’eau distillée maintient une humidité optimale dans le milieu.

Au bout de deux à trois semaines, à la température de la pièce (20-22° C), les plumes ou les poils sont réunis entre eux par un lacis d’hyphes vigoureuses, chargées de conidies (fig. 1). Ils sont alors fragmentés aux ciseaux et transportés sur milieu de Sabouraud additionné d’actidione et d’antibiotiques (pénicilline et streptomycine).

Résultats

Cette méthode nous a permis d’isoler les formes conidiennes ou parfaites (marquées d’un astérisque dans le tableau I) de cinq espèces de Dermatophytes s.l. ; à ceux-ci s’ajoutent un Hyphomycète aleuriosporé, Chrysosporium keratinophilum et une Gym- noascacée kératinophile, Ctenomyces serratus.

Les nombres d’échantillons positifs s’établissent comme suit :

1. Complexe Microsporum gypseum (Bodin, 1907)... 60

2. Microsporum cookei Ajello, 1959 ... 25

3. Keratinomyces ajelloi Vanbreuseghem, 1952 ... 7

4. Trichophyton terrestre Durie et Frey, 1957 ... 17

5. Trichophyton mentagrophytes (Robin, 1853)... 5

6. Ctenomyces serratus Eidam, 1880 ... 45

7. Chrysosporium keratinophilum (Frey, 1961) ... 4

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638 JEAN-A. RIOUX, DENISE-T. JARRY ET DANIEL-M. JARRY

Fig. 1. — Isolement d’un Dermatophyte du sol par la méthode de Vanbreu- seghem (Microsporum gypseum sur cheveux)

1. Complexe MICROSPORUM GYPSEUM (Bodin, 1907)

On sait actuellement que ce « complexe » comprend trois formes parfaites : Nan- nizzia incurvata Stockdale 1961, N. gypsea Stockdale 1963 (1) et N. fulva Stockdale 1963, et deux formes conidiennes : Microsporum gypseum (Bodin, 1907) Guiart et Grigoraki 1925 sens. lat. et M. fulvum Uriburu 1909. Rappelons que les cléistothèces des formes parfaites diffèrent essentiellement par les hyphes du péridium qui s’incur­

vent en s’éloignant du centre chez N. incurvata, mais qui se recourbent dans sa direc­

tion chez N. gypsea et N. fulva ; de plus, en ce qui concerne ce dernier, certaines (1) Rappelons que les règles de nomenclature utilisées en zoologie et en botanique phanéroga- mique ne s’appliquent pas aux Ascomycètes et aux Basidiomycètes. Ainsi l’article 59 (Section 4) du Code international (1961) relatif aux Champignons à cycle évolutif pléomorphe stipule : « Pour les Asco­

mycètes et les Basidiomycètes à cycle évolutif pléomorphe(sauf les champignons-lichens), mais pas pour les Phycomycètes, le nom ou l'épihète légitimes les plus anciens appliqués au stade parfait priment les autres. Cependant, les dispositions de cet article ne s’opposent pas à l’emploi des noms de stades imparfaits dans des travaux portant sur ces stades. L’auteur qui décrit le premier un stade parfait peut adopter l’épithète spécifique du stade imparfait correspondant ; toutefois, le binôme du stade parfait doit lui être attribué et ne doit pas être considéré comme une nouvelle combinaison. »

(5)

IDENTIFICATION DE QUELQUES DERMATOPHYTES DU SOL 639 hyphes sont peu arquées, ce qui fait apparaître le péridium plus lâche que chez N. gyp- sea, et les appendices et branches naissent souvent sur les côtés des cellules péridien- nes, éventualité très rare dans les deux autres espèces. Les filaments conidigènes de N.

incurvata et N. gypsea sont très ramifiés dès les stades jeunes, les branches naissant à angle aigu d’une hyphe en raquette ; ceux de N. fulva, plus simples, ne présentent pas cette disposition.

Ce groupe de formes est certainement cosmopolite si l’on se réfère aux travaux publiés depuis 1952. Il a été mentionné dans les sols pour la première fois en France, en 1962, par deux groupes de chercheurs : d’une part, dans un jardinet de la banlieue

FIG. 2. — Macroconidies de Microsporum gypseum (1). (Isolement direct sur crins) de Pau, par J. Bailenger et E. Lagarde ; d’autre part, dans une petite plate-bande abritée du soleil, à Schiltigheim près de Strasbourg, par C. Vermeil et J. Alt. Dans les deux cas, la recherche du Dermatophyte a été entreprise à partir de la terre sur laquelle avaient joué des enfants atteints de mycose à Microsporum gypseum.

En ce qui nous concerne, les prélèvements ont été effectués sans mobile propre­

ment clinique. Sur 107 échantillons de sols, 60 ont permis d’isoler le complexe gypseum.

Il s’avère répandu dans tous les biotopes, aussi bien les dunes, les « sansouires » et les garrigues que les écuries et les caves. Au surplus, sur des échantillons provenant d’une chênaie verte (Quercetum gallo-provinciale) aux Matelles (Hérault) et d’une populaie (Populetum albae) au Grand Travers (Hérault), se sont formées le long des cheveux et sur la terre les fructifications du stade parfait, Nannizzia incurvata (fig. 3 et 10) ; sur d’autres, prélevés dans une cave à Montpellier (Hérault) et dans une pinède au Grau- du-Roi (Gard), celles de Nannizzia fulva (fig. 10).

(1) Echelle : voir fig. 6.

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640 JEAN-A. RIOUX, DENISE-T. JARRY ET DANIEL-M. JARRY 2. MICROSPORUM COOKEI Ajello, 1959

A partir de fragments de laine mis en terre durant six semaines, W. H. Bridge

Cooke isolait en 1952 un Microsporum que C. W. Emmons rapportait à sa variété « A » de M. gypseum. En 1959, L. Ajello retrouvait ce Dermatophyte dans le sol d’une grange à Saginaw (Michigan) ainsi que sur le pelage d’une Sarigue et de divers

Fig. 3. — Périthèces et macroconidies de Nannizzia incurvala(Microsporum gypseum). (Isolement direct sur cheveux)

Rongeurs. Il établissait alors la validité de l’espèce qu’il dédiait à Cooke, lui faisant ainsi l’hommage de la découverte princeps.

Probablement cosmopolite, M. cookei est actuellement connu de l’Amérique du Nord, des Indes et de l’Australie. En Europe, il n’a jusqu’à présent été rapporté que des environs d’Oslo (Norvège) par K. Lindqvist (1961) et de Stettin (Pologne) par H. Prochacki et S. Bielunska (1962). Le présent travail fait donc état de la troisième découverte en Europe et de la première en France.

Ecologiquement, cette espèce paraît liée aux sols de lieux boisés (feuillus ou coni­

fères), ainsi qu’aux friches abandonnées au pâturage. Toutefois, M. cookei a été égale­

ment isolé de terres de grange, de jardin et de plates-bandes.

Originedessouches.

Nous-mêmes, au Jardin des Plantes de Montpellier, sur 12 prélèvements, avons

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Mémoire

J.-A. Rioux, I). T. Jarry & D. M. Jarry

Ann. Parasitol. Hum. et Comp.

Tome 39. 1964. N° 5

Fig. 4 — Primo-culture de Microsporuin cookei sur milieu de Sabouraud.

Remarquer l’endroit de la colonie, poudreux, chamois, et l’envers rouge vermillon.

Masson & Cie %éditeurs, Paris

(8)
(9)

IDENTIFICATION DE QUELQUES DERMATOPHYTES DU SOL 641 isolé 10 fois cette espèce (1). Les échantillons de sols positifs ont été respectivement prélevés : sous les bancs de pierre des allées du Jardin anglais (3 éch.), derrière le monument dédié à Rabelais (2 éch.), au pied de Chênes verts sur le versant Nord de la

« Montagne » de Richerde Belleval (2 éch.), au bord de l’allée Ch. Flahault et de l’allée J. Daveau (2 éch.) et près de la prise d’eau du Lac aux Nélombos (1 éch.).

Les deux échantillons où ne se trouvait pas M. cookei, mais qui renfermaient par contre

Fig. 5. — Macroconidies de Microsporum cookei (2). (Isolement direct sur crins) M. gypseum, concernaient d’une part une terre maigre, pulvérulente, contenue dans un vase d’Anduze inoccupé et, d’autre part, du sable d’allée à peu près pur.

M. cookei a été également isolé d’un sol en bordure de « roubine », au lieu-dit Les Bruns en Camargue (B.-du-R.), dans un sous-bois de Lierre (Hedera helix) et d’Arum (Arum maculatum), sous un rideau de Chêne blanc (Quercus pubescens), au mas du Petit-Saint-Jean en Petite-Camargue (Gard), dans un sous-bois de pinède (Pinus pinea), ainsi que dans une vigne sur marnes, près du village des Matelles (Hérault). M. cookei paraît constamment accompagné d’autres saprophytes kératinophiles dont Ctenomyces serratus.

(1) Nous adressons nos vifs remerciements au Docteur Ajello qui a bien voulu confirmer la détermination des souches de M. cookei et de T. mentagrophytes que nous lui avons adressées, de même qu’au Docteur Rivalier pour celles de M. fulvum.

(2) Echelle : voir fig. 6.

(10)

642 JEAN-A. RIOUX, DENISE-T. JARRY ET DANIEL-M. JARRY Description.

Huit jours après le repiquage sur milieu de Sabouraud (20-22° C), les fragments de phanères chargés de macroconidies donnent de belles colonies, à disque finement poudreux, de teinte chamois à reflets gris-vert, auréolé d’une étroite zone duveteuse.

L’envers est entièrement pigmenté en rouge vif, pigmentation visible à travers la partie duveteuse (fig. 4).

Fig. 6. — Macroconidies de Microsporum canis. (Culture sur milieu de Sabouraud) Après trois repiquages sur milieu de Sabouraud, un début de pléomorphisme peut apparaître au centre de la culture, dont la pigmentation s’atténue alors considérable­

ment ou vire, sur certains tubes, au rouge vineux.

Les microconidies assez rares, piriformes, sont portées en acladium. Les macro­

conidies (fig. 5), de même type que celles décrites par L. Ajello, sont très nombreuses, elliptiques, de 50-65 µ X 12-15 µ, pluriloculaires (7 à 9 cloisons en moyenne sur les formes caractéristiques), à parois et cloisons épaisses (3 à 4 µ) et surface échinulée.

Les colonies de M. cookei se distinguent aisément de celles de M. canis et de M. gypseum. La pigmentation rouge sang de l’envers des colonies de M. cookei est tout à fait spécifique et bien différente de celle, jaune d’or, de M. canis ou des variétés rou­

geâtres de M. gypseum. Les macroconidies, par leur forme régulièrement elliptique et non en navette très effilée, écartent la diagnose de M. canis (fig. 6) et, par leurs parois et leurs cloisons épaisses, celle de M. gypseum (fig. 7 et 8).

(11)

IDENTIFICATION DE QUELQUES DERMATOPHYTES DU SOL 643 Dans un échantillon (Les Matelles, Hérault), nous avons obtenu les cléistothèces de la forme parfaite, Nannizzia cajetana, décrite par L. Ajello en 1961.

Isolé de sols et du pelage d’animaux qui ne présentaient aucune lésion clinique, M. cookei a fait l’objet de nombreux essais d’infestation sur les animaux de laboratoire ; jusqu’à présent, toutes ces tentatives ont échoué. Cependant, W. Kaplan (cité in L.

Ajello, 1959) a isolé cette espèce chez un Chien de Pennsylvanie à partir d’un herpès circiné. Les produits de râclage de la lésion ne révélaient pas d’éléments fongiques à l’examen direct, mais fournirent une culture positive.

FIG. 7. — Macroconidies de Microsporum cookei

Fig. 8. —- Macroconidies de Microsporum gypseum (Isolement direct sur crins) Le pouvoir pathogène de nos souches de M. cookei a pu être testé sur deux d’entre nous et sur trois Cobayes. Les cultures âgées de dix jours, triturées dans le miel, ont été étalées sur la peau préalablement épilée et scarifiée. Dès le troisième jour, les lésions étaient cicatrisées, sauf dans le cas de l’unique Cobaye ayant reçu également de la cor­

tisone par voie locale et qui présentait quelques pustules folliculaires d’origine staphy­

lococcique.

3. KERATINOMYCES AJELLOI Vanbreuseghem, 1952 (fig. 9).

Cette espèce est la première en date isolée par la méthode de Vanbreuseghem. Retrouvée maintes fois depuis 1952, elle apparaît à présent comme un hôte fréquent des sols, très largement distribué dans le monde.

Dans le « Midi » méditerranéen nous l’avons isolé de sept prélèvements dont un particulièrement riche effectué sous un Pin parasol (Pinus pinea), à proximité du Grau-

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644 JEAN-A. RIOUX, DENISE-T. JARRY ET DANIEL-M. JARRY

du-Roi (Gard), dans un territoire correspondant à un ancien lido stabilisé où se ren­

contrent de nombreuses déjections de Chevaux. Cette même station a fourni par ailleurs Nannizzia fulva, Trichophyton terrestre et Ctenomyces serratus.

Nous n’avons pas pu obtenir les cléistothèces de la forme parfaite, découverte par C. O. Dawson et J. C. Gentles en 1959 et décrite deux ans plus tard comme Arthro- derma uncinatum.

Fig. 9. — Macroconidies de Keratinomyces ajelloi. (Isolement direct sur cheveux) 4. TRICHOPHYTON TERRESTRE Durie et Frey, 1957

Ce Dermatophyte, découvert en Australie par E. B. Durie et D. Frey (1957) dans sa forme conidienne, a été signalé ensuite en plusieurs occasions, un peu partout dans le monde, en particulier en Europe occidentale (Angleterre, Allemagne et France).

La forme parfaite, Arthroderma quadrifidum, apparue spontanément sur gélose inclinée, a été décrite par C. O. Dawson et J. C. Gentles (1961).

Au cours de nos recherches, nous avons pu obtenir T. terrestre dans 17 pré­

lèvements. Il s’agissait de rizières sur sol lourd à Sylveréal (Gard), de vignes non labou­

rées à Malamousque (Gard), d’une bordure de roubine aux Bruns (B.-du-R.) (ces deux derniers sols ont également fourni le stade parfait, fig. 10), de sables à Tamaris (Tama- rix gallica) et Arroche (Atriplex halimus) près de la Digue à la mer (B.-du-R.), de pinè-

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IDENTIFICATION DE QUELQUES DERMATOPHYTES DU SOL 645 des au Grau-du-Roi (Gard) et d’une forêt mixte (Quercus ilex, Quercus pubescens et Populus alba) au Grand-Romieu (B.-du-R.).

5. TRICHOPHYTON MENTAGROPHYTES (Robin, 1853)

Par injection péritonéale au Cobaye et culture directe, H. I. Lurie et R. BoroK isolaient pour la première fois (1955) Trichophyton mentagrophytes. Trois ans plus tard, grâce à la technique de Vanbreuseghem, J. Rodriguez retrouvait ce Dermatophyte dans plusieurs terres d’Amérique du Sud. Depuis, sa présence dans le sol a été signalée en Inde par S. K. Shome et en France par G. Percebois en 1964.

Nous l’avons isolé de 5 prélèvements : sous les deux formes conidienne et pér- théciale (stérile), dans deux creux de Chênes verts (Quercus ilex) au nord de Montpel- lier ; sous la seule forme sexuée dans des sols de garrigue à Lavande (Lavandula vera) et Cade (Juniperus oxycedrus) dans l’Hérault, et de talus à Brachypode (Brachypodium phoenicoides) au bord d’une route, dans les Pyrénées-Orientales. Les isolements sont lents à pousser (4 semaines) et donnent, par repiquage sur gélose de Sabouraud, de bel- les cultures comportant de nombreuses microconidies et quelques rares macroconidie.

Ces cultures, inoculées au Cobaye, provoquent, sans exception, d’importantes lésions du type ectothrix microïde.

6. CTENOMYCES SERRATOS Eidam, 1880

Le genre Ctenomyces a été créé par E. Eidam pour un Champignon saprophyte de plumes d’Oiseaux : Ctenomyces serratus.

Jusque vers 1956, date des travaux de R. K. Benjamin, ce binôme a couvert à la fois le Ctenomyces d’EIDAM et les stades ascogènes d’autres Gymnoascacées, en particu­

lier d’Arthroderma curreyi. De nombreux auteurs ont signalé C. serratus dans les mêmes conditions que l’auteur, mais S. Szathmary et Z. Herpay (1960) paraissent être les premiers à l’avoir isolé du sol par la méthode de Vanbreuseghem.

Nous-mêmes l’avons mis en évidence dans 45 de nos échantillons de sols où l’espèce semble extrêmement commune. En plus des lieux fréquentés par les oiseaux (cours de fermes, jardins, volières), C. serratus se rencontre également dans les dunes boisées, les sansouires, les garrigues, et les vignes. L’espèce est rarement isolée ; le plus souvent on l’observe associée à d’autres Gymnoascacées, en particulier aux représentants du complexe Microsporum gypseum.

La forme conidienne se présente sous l’aspect d’amas jaunâtres d’aleuriospores finement échinulées correspondant au stade Chrysosporium de D. Frey et D. M. Grif-

fin (1961). Les périthèces caractéristiques s’obtiennent rapidement, aussi bien sur cheveux et crins que sur plumes. Ils sont ornés des classiques appendices pectinés (fig. 10, 11 et 12), bien représentés dans les travaux d’EIDAM, et contiennent des asques octosporées typiques. Les cultures, très difficiles à obtenir, sont plates, granuleuses, d’un blanc crème à revers ocracé.

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646 JEAN-A. RIOUX, DENISE-T. JARRY ET DANIEL-M. JARRY

Nannizzia fulva

Ctenomyces serratus

Nannizzia incurvata

Arthroderma quadrifidum

Fig. 10. — Ornementation du périphèce chez Nannizzia fulva, Nannizzia incurvata, Arthroderma qua­

drifidum et Ctenomyces serratus

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IDENTIFICATION DE QUELQUES DERMATOPHYTES DU SOL 647

Fig. 11. — Périthèce de Ctenomyces serratus

Fig. 12. — Détail des appendices pectinés du périthèce de Ctenomyces serratus.

A la partie inférieure droite de la figure une asque octosporée. (Isolement direct sur crins)

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648 JEAN-A. RIOUX, DENISE-T. JARRY ET DANIEL-M. JARRY 7. CHRYSOSPORIUM KERATINOPHILUM (Frey, 1961)

Le genre Chrysosporium a été créé, en 1833, par Corda pour un Hyphomycète aleuriosporé poussant sur le cuir, Chrysosporium corii, tombé en synonymie avec Spo- rotrichum merdarium décrit par Link en 1818.

Jusqu’à la révision de J. W. Carmichael (1962), « de nombreux genres mal défi­

nis, des espèces inappropriées et de nouvelles combinaisons avaient été proposées et la situation taxonomique était semblable à celle qui avait prévalu pour les Dermatophytes avant la révision d’Emmons (1934) ».

Cet auteur reconnaît dix espèces dans le genre Chrysosporium dont plusieurs res­

semblent beaucoup, à quelques différences mineures, aux stades Chrysosporium de Trichophyton sp., d’Arthroderma tuberculatum et de Ctenomyces serratus.

C. keratinophilum a été découvert par D. Frey, en 1961, dans des sols d’Austra­

lie et de Nouvelle-Guinée, et retrouvé aux Etats-Unis et au Canada, toujours dans des endroits souillés par des animaux (Chevaux, Porcs, Chiens, Coyotes, Volailles).

Originedessouches.

Nous n’avons isolé que quatre fois cette espèce dans une écurie et une niche à Chien, aux Salins-de-Badon et au mas du Roure (Camargue). C. keratinophilum (1) était associé à M. gypseum et C. serratus.

Description.

Les colonies à croissance relativement rapide sont plates, denses et sèches, à sur­

face granuleuse, d’abord blanche, puis jaune soufre. L’envers est de couleur crème. Les aleuriospores sont portées à l’extrémité des hyphes, sur des pédicelles de longueur varia­

ble ; elles sont piriformes-tronquées, hyalines, pratiquement lisses, et mesurent en moyenne de 7-8 µ sur 10-12 µ.

Résumé

Grâce à la méthode de Vanbreuseghem, nos recherches, entreprises depuis deux ans dans le sud de la France, nous ont permis d’isoler des sols deux espèces du complexe Microsporum gypseum ainsi que Microsporum cookei, Keratinomyces ajelloi, Tricho­

phyton terrestre, Trichophyton mentagrophytes, Ctenomyces serratus et Chrysosporium keratinophilum. Nous avons testé sans succès la pathogénicité encore controversée de Microsporum cookei.

(1) La détermination nous a été aimablement communiquée par le Docteur Ajello, qui nous signale (in litt. 6 fév. 1964) « avoir isolé l’espèce plusieurs fois de sols américains et européens ».

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IDENTIFICATION DE QUELQUES DERMATOPHYTES DU SOL 649 Summary

Our survey in the southern region of France, for two years, has used Vanbreu-

seghems hair-bait method. We have been able to isolate from the soil the complex Microsporum gypseum together with Microsporum cookei, Keratinomyces ajelloi, Trichophyton terrestre, Trichophyton mentagrophytes, Ctenomyces serratus and Chry- sosporium keratinophilum. We have unsuccessfully investigated the controversed patho­

genicity of Microsporum cookei.

Bibliographie

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Laboratoire de Parasitologie

de la Faculté de Médecine de Montpellier (Hérault).

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