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Infection virale et bactérienne du système digestif

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0 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 26 janvier 2011 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 26 janvier 2011 189

cas clinique

Un homme d’affaires de 42 ans sans antécédents médicaux vous consulte au mois de juillet en raison d’une diarrhée aqueuse associée à des crampes abdo­

minales apparues il y a trois jours. Deux jours avant l’apparition des symptômes, ce monsieur avait participé à un barbe­

cue entre amis ; il s’avère qu’au moins un des convives présente les mêmes signes cliniques. Il n’a pas récemment voyagé hors d’Europe. Le premier soir, une fièvre à 38,7°C accompagne les symptômes.

Depuis, il est afébrile. Il a vomi seulement une fois. Le patient se plaint de jusqu’à dix épisodes journaliers de diarrhée, sans sang visible, ce qui l’empêche de travail­

ler. Etant à son compte, cette situation ne peut durer et il désire ardemment repren­

dre son activité au plus vite.

Il demande un antibiotique pour accé­

lérer sa guérison. Vous vous assurez qu’il n’y a pas de signes de déshydratation sévère et que le patient est toujours afé­

brile.

Que lui proposez­vous ?

commentaire

Le choix du traitement doit se baser sur la clinique et sur l’information épidémiologi­

que. Il serait, bien sûr, utile de connaître le pathogène en cause, mais un résultat bac­

tériologique ne vous parviendra que dans les deux à trois jours ouvrables si vous effec­

tuez un prélèvement.

Dans les pays développés, les causes les plus fréquentes de gastro­entérite aiguë chez l’adulte immunocompétent non hospitalisé sont deux virus (norovirus et rotavirus) et deux genres de bactéries (surtout Campy- lobacter spp. et, dans une moindre propor­

tion, Salmonella spp.). Dans le contexte

«barbecue», on devrait aussi évoquer les

«STEC» (Escherichia coli, producteurs de Shiga­toxines), plus rares et associés avec

la viande hachée de bœuf insuffisamment cuite, ainsi que les intoxications par les toxines préfabriquées dans les aliments par, entre autres, Staphylococcus aureus et Bacillus cereus. Enfin, Clostridium difficile est une cause émergente d’entérite dans la communauté.

Typiquement, les bactéries invasives de type campylobacters, shigelles et salmonel­

les engendrent une diarrhée plutôt «inflam­

matoire» avec un état fébrile et parfois des selles sanguinolentes. Par contre, les diar­

rhées virales sont normalement aqueuses,

«non inflammatoires» avec moins de fièvre.

Les intoxications par toxines préfabriquées se distinguent par une incubation très courte (normalement l 12 heures) et une guérison en règle générale dans les 24 heures. Des selles sanguinolentes en l’absence de fièvre seraient typiques pour les STEC. La saison est un argument contre les norovirus et les rotavirus davantage prévalents en hiver. «Sta­

tistiquement», dans la situation décrite, la cause la plus probable est un campylobac­

ter. En pratique, dans la plupart des cas, ni la clinique ni les facteurs épidémiologiques ne sont assez tranchés pour permettre un diagnostic étiologique fiable sans recours aux analyses microbiologiques. Le rende­

ment des cultures de selles étant faible,

celles­ci devraient être limitées aux cas sévè res et aux situations évoquant une épi­

démie (plusieurs cas liés).

A ce stade, le traitement va donc être

«empirique» (tableau 1). Une réhydratation adéquate – idéalement avec un soluté de réhydratation oral contenant des électro­

lytes et du sucre – est le fondement incon­

testé du traitement de toute gastro­entérite.

Les patients devraient être encouragés à faire des repas légers. Pour prévenir la trans­

mission du pathogène, il convient de rappe­

ler l’importance de l’hygiène des mains et un entretien adéquat des sanitaires.

Les antidiarrhéiques comme le lopéra­

mide sont très efficaces, mais augmentent le risque de complications des gastro­enté­

rites invasives et inflammatoires et sont par conséquent contre­indiqués dans ces cas.

La prescription d’un antibiotique va­t­elle résoudre le problème ? La réponse n’est guère facile. Les antibiotiques sont indiqués dans les cas compliqués (par exemple fiè­

vre élevée avec diarrhée sanguinolente, ex­

trêmes d’âge, immunodéficience). Cepen­

dant, dans la plupart des gastro­entérites (comme le cas décrit dans l’introduction), le seul bénéfice potentiel d’une antibiothérapie est de raccourcir la durée des symptômes.

Ceci a été démontré pour la campylobacté­

Infection virale et bactérienne du système digestif

Quadrimed 2011

T. Haustein

Dr Thomas Haustein Service prévention et contrôle de l’infection

HUG, 1211 Genève 14 thomas.haustein@hcuge.ch

Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 189-90

Tableau 1. Options thérapeutiques pour les gastro-entérites non compliquées STEC : Escherichia coli producteurs de Shiga-toxines.

Avantages Inconvénients, risques

Réhydratation Traitement de base de toute

gastro-entérite

Antidiarrhéiques Réduisent la fréquence de Réduisent l’élimination des pathogènes : (par exemple défécation risque d’aggravation dans les cas d’infections

lopéramide) invasives

Antibiotiques • Recommandés d’office pour les • Sélection de bactéries résistantes (surtout cas sévères ou compliqués (par au niveau oropharyngé et intestinal) exemple patients immunosup- • Prolongation du portage de Salmonella spp.

primés, bactériémie, dysenterie • Possiblement induction de production de

sévère) toxines par STEC

• Peuvent raccourcir la durée de • Sélection de Clostridium difficile

symptômes dans certains cas de • Exacerbation d’une colite à Clostridium difficile gastro-entérite non compliquée existante

de 1-2 jours • Effets secondaires spécifiques de la molécule

Ciprofloxacine Active contre la plupart de Campylobacter spp. souvent résistant aux souches de Salmonella et Shigella fluoroquinolones in vitro

in vitro

• Erythromycine Actives contre la plupart d’isolats Absence d’efficacité prouvée contre la plupart

• Clarithromycine de Campylobacter spp. des autres pathogènes causant fréquemment

des gastro-entérites

Azithromycine Active contre la plupart de Demi-vie longue, effet sélecteur de bactéries

souches de Campylobacter, résistantes prolongé

Salmonella et Shigella

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Implications pratiques

Une grande partie des gastro-entérites sont virales, même chez les adultes La grande majorité de cas de gastro- enté rites sont autolimitées

Les bénéfices potentiels d’une antibiothé- rapie (qui sont relativement modestes et varient en fonction du pathogène en cause) doivent être mis en balance avec les complications et les effets secondai- res, en particulier avec la problématique d’augmentation des résistances liée à cette prescription

Si les symptômes sont assez sévères pour motiver un traitement antibiotique, ou dans le contexte d’une épidémie poten- tielle, des selles devraient être envoyées au laboratoire pour rechercher le patho- gène en cause

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Bibliographie

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riose, la shigellose et la turista (réduction de un à deux jours). Le bénéfice d’un traite­

ment antibiotique semble être maximal au tout début de la maladie mais diminue avec la durée des symptômes. En même temps, il y a aussi des risques associés à la pres­

cription d’antibiotiques. Les antibiotiques peuvent prolonger la période d’excrétion de salmonelles non typhoïdiques et augmen­

teraient le risque de complications dans les infections à STEC ; ils perturbent la flore in­

testinale et peuvent avoir d’autres effets se­

condaires liés à la molécule choisie. D’un point de vue communautaire, le risque le plus important de toute utilisation d’antibio­

tiques est sans aucun doute l’augmentation de la résistance bactérienne. L’effet de sé­

lection de souches résistantes au niveau de la flore oropharyngée et intestinale peut du­

rer jusqu’à un an après traitement, favorisant la transmission ultérieure de ces bactéries à d’autres sujets.

conclusion

Il découle de ces considérations que pour les patients souffrant de gastro­entérite non compliquée, vous devriez limiter la prescrip­

tion d’antibiotiques à des cas exceptionnels.

Vous devez rassurer le patient décrit précé­

demment en lui expliquant que sa maladie

sera autolimitée et lui signaler que la pres­

cription d’antibiotiques est associée à des risques, surtout dans la situation où la cause de la maladie est incertaine, et que le gain potentiel est modéré.

Si, après avoir tenu compte de ces consi­

dérations, le bénéfice potentiel de raccour­

cir la maladie de un ou deux jours semble clairement dépasser tous les risques asso­

ciés, vous pourriez prescrire un traitement par ciprofloxacine (500 mg toutes les 12 heu­

res PO) ou azithromycine (500 mg une fois par jour PO) pendant trois jours.

Remerciements

Tous mes remerciements à Mme S. Longet-Di Pietro et au Pr S. Harbarth pour leur relecture attentive et leurs commentaires.

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Références

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