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EGLISE _ MISSIONNAIRE OU EGLISE DEMISSIONNAIRE?

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Academic year: 2022

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ANDRE PIETTRE

EGLISE

_ MISSIONNAIRE

OU EGLISE DEMISSIONNAIRE ?

A

u seuil d'un nouveau pontificat, la question se pose, plus lancinante que jamais : où en est l'Eglise ? Où va-t-elle ? Douze ans après la fin du concile et le début de réformes consi- dérables, comme l'Eglise n'en avait pas connu depuis plus de trois siècles, quels sont les résultats ? Quel en est le bilan ? Quelles sont les perspectives ouvertes sur l'avenir ?

La réponse n'est pas simple, car la situation a rarement été aussi contradictoire.

D'un côté, un incontestable renouveau. Pour les clercs, affranchissement de contraintes pesantes ; liberté de recherche théologique ; collégialité épiscopale tendant à faire de la monar- chie absolue du pape une monarchie tempérée. Pour les laïcs, contact direct avec la Bible ; participation active à la liturgie, à la catéchèse, aux tâches d'Eglise. Pour les « frères séparés », un rapprochement inespéré. Pour les incroyants, une attitude d'accueil et de sympathie, au heu des anathèmes de jadis. En bref, c'est 1' « ouverture au monde » d'une Eglise qui se qualifie justement d'« Eglise missionnaire ».

Mais d'un autre côté, c'est une crise profonde, à tel point qu'on a pu la comparer à celle de la Réforme ou de l'arianisme.

Effondrement des vocations dans la proportion de 10 à 1 ; déser- tion des fidèles (de 41 % en 1964, la pratique dominicale tombe à 13,5 % en 1975) ; divisions et politisation... rien ne manque en France à ce tableau funèbre — et celui-ci, moins sombre dans

(*)Nous reprenons ici les très grandes lignes de notre ouvrage qui paraît sous ce titre aux Editions France-Empire. On y trouvera toutes les références aux citations faites dans cet article.

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certains pays voisins tels que l'Allemagne fédérale (sans parler de l'extraordinaire vigueur de l'Eglise au-delà du rideau de fer), serait plus noir encore dans les pays qui nous dépassent en « pro- gressisme », tels les Pays-Bas et le Canada, sinon l'Amérique latine où la situation est plus complexe.

Assurément, notre société et notre civilisation connaissent de leur côté des mutations sans précédent qui les ébranlent jus- que dans leurs fondements ; et comment l'Eglise n'en eût-elle pas été profondément secouée ? Du moins pouvait-elle apparaître comme un phare dans la tempête, comme un rempart à un monde en déroute, comme une protestation contre les pires égarements, et recevoir de sa résistance même un surcroît de vigueur et d'au- dience. Mais i l eût fallu pour cela que, tout en s'ouvrant au monde, elle entreprît de le « juger » selon l'expression même du con- cile (1). Et c'est ce qu'ont oublié les «progressistes», les clercs d'avant-garde, suivis seulement par une minorité de fidèles, mais placés le plus souvent à certains postes-clés (liturgie, caté- chèse, enseignement, aumôneries, mass média) et qui, sous pré- texte de s'ouvrir au monde, se sont laissé pénétrer par le monde, faisant ainsi d'une Eglise missionnaire, une Eglise démissionnaire.

Qui de l'une ou l'autre, de la « mission » ou de la « démis- sion », finalement l'emportera ? Ce fut tout le drame, véritable calvaire, de Paul V I ; et c'est tout l'enjeu du nouveau pontificat.

L'Eglise démissionnaire

Le poisson pourrit par la tête : l'Eglise, avant d'être atteinte dans sa morale et dans son action, s'est trouvée atteinte dans son esprit.

De l'extérieur d'abord, par l'écho d'une culture dont les maîtres penseurs ont brusquement changé de l'avant à l'après- guerre. A l'intelligentsia de droite qui régnait pratiquement aupa- ravant (Gide et quelques autres exceptés) à succédé après le conflit l'intelligentsia de la révolte : aux maîtres du soupçon, Nietzsche, Freud et Marx, se sont ajoutés Sartre et les philosophes de l'ab- surde, dans le même temps que les « sciences de l'homme » se retournaient chez certains de leurs auteurs (non chez tous) en

« sciences contre l'homme ». A u lieu d'édifier celui-ci, de « faire

(1) GcMdium et Spes, art. 11 § 2, article 44, etc.

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l'homme » comme disaient Montaigne et la longue suite des humanistes, on s'est plu à le dé-faire.

A l'intérieur même du christianisme en outre a commencé de se répandre autour des années 55-60 la « nouvelle théologie protestante » dont l'inspirateur, l'exégète et théologien allemand R. Bultmann, s'était donné pour tâche de « démythologiser » l'Ecriture et de remplacer la religion et ses dogmes par la foi et sa chaleur au cœur.

Au temps de la Science, « Dieu est mort », a-t-on répété après Nietzsche, mais dans un autre sens et en croyant surmonter son défi. Les représentations que nous nous faisons de l'Etre suprême, a-t-on dit, tout comme les récits de l'Evangile du Christ, ne sont que des « mythes », des images, pour ne pas dire des fables d'une humanité encore dans l'enfance. Débarrassons-nous donc de cette

« mythologie » ! Qu'importent au surplus dogmes et exégèse ! Une seule chose demeure et elle est capitale : c'est le message, le « kérygme », la Parole qui nous « interpelle » au plus intime de nous-mêmes, et qu'il faut à tout prix sauver dans le naufrage des croyances*

Or cette théologie véhiculée par les Harvey Cox, Hamilton, Michalson, etc., traduits en France de 1955 à 1960, a eu sur le clergé une influence considérable. « Sur Dieu, nous devons nous taire », avait écrit l'auteur de la Nouvelle Théologie pro- testante (2). « Pour la première fois dans l'histoire, ajoutait-il, nous avons affaire à une théologie-sans-Dieu. » Telle a été exac- tement la position reprise par certains théologiens catholiques.

Ils n'essaient plus de construire une nouvelle métaphysique. Ils s'avouent battus d'avance. Ils démissionnent au sommet de l'esprit.

« A la limite, écrit l'un d'eux, professeur de philosophie à l'Institut catholique de Paris, être chrétien ne veut plus rien dire, puisque ce Dieu réfèrent du christianisme ne peut plus être dit (3). » Dieu ne relève que « du pur vécu ».

De même pour le Christ. Que savons-nous de sa nature ? de ses miracles ? de sa résurrection ? (dont saint Paul disait : « si le Christ n'est pas ressuscité, notre foi est vaine » !) L a vérita- ble résurrection, c'est celle qui s'opère dans nos cœurs et dont l'ardeur nous dit assez la présence intérieure. Si bien qu'un abbé

(2) J. Sperna Weiland, la Nouvelle Théologie protestante, D.D.B. 1969.

(3) Abbé J . Delure, in revue Catéchèse, rf> 74, juillet 1976, p. 273 et s.

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progressiste ne craindra pas de parler non plus de Jésus ressus- cité, mais ré-suscité (avec un seul s) pour bien signifier la réalité purement intérieure, purement mystique, de ce qu'on croyait être un événement historique.

La divinité du Christ, dogme suprême, est elle-même mise en doute. On ne dira plus que le Christ est Dieu, mais qu'il est de Dieu — sa plus fidèle « image », un génie de sainteté rempli de l'esprit de Dieu, un sublime prophète, un super-Socrate, un

« signe de la présence de Dieu dans le monde » selon l'expres- sion d'une revue religieuse, mais encore une fois : un homme rien qu'un homme. On pourrait citer quantité d'auteurs et non des moins influents, professeurs de séminaires ou d'instituts catho- liques, qui ne craignent pas d'affirmer qu' « on ne doit pas cher- cher un Dieu derrière l'homme Jésus, c'est l'homme Jésus qui est présence de Dieu dans la réalité humaine » (4).

Dès lors, comment enseigner le Christ et le christianisme ? Et comment s'étonner de la crise de la catéchèse dans les clergés progressisants de France, de Hollande, du Canada, comme le synode de 1977 sur ce sujet n'a pas craint de la dénoncer ?

Pendant des semaines, voire des mois, on interdira au caté- chiste de parler de Dieu ou de toute chose religieuse. Pendant des mois, la catéchèse deviendra une collection de « faits de vie », replongeant l'enfant dans son milieu d'existence (on lui fera des- siner le plan de son quartier, raconter ses vacances, les occupa- tions ou même les lectures de ses parents, etc.). Un aumônier de lycée cité déclarera qu' « il n'hésite pas à passer quelquefois deux ans sans prononcer une fois les noms de Dieu, Evangile, Messe... ». Et, nous assure-t-il, « ce qui pourrait être un simple témoignage... reflète un courant parmi les aumôneries de l'ensei- gnement public en France ». On ne le sait que trop.

Qu'on s'étonne, dans ces conditions, des progrès de l'in- croyance, en particulier chez les jeunes. On dirait que pour cer- tains qui sont chargés de les instruire, il n'y a de foi adulte que celle qui doute.

Démissionnaire devant l'athéisme, toute une partie de l'Eglise a de même démissionné dans son éthique et dans sa propre dis- cipline, devant le culte de la liberté.

(4) Cf. J. Galot, les Christologies modernes, cahier Lumen Gentium, 1977. Pour les citations, cf. notre ouvrage, p. 167 et s.

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Ce fut en particulier le fait de l'existentialisme que de chan- ger celle-ci en Absolu. « Oui Dieu est mort » a proclamé Sartre en continuant Nietzsche. « Ou plutôt il n'a jamais été. Car s'il existait, je n'existerais pas. C'est à moi, en effet, de me créer moi-même, de créer librement mon existence, mes valeurs, ma morale... » Philosophie de total subjectivisme menant à l'anar- chisme révolutionnaire pour qui toute morale n'est que tabou, toute autorité que répression.

Or, si étrange qu'il soit, on trouve des échos directs de pareille révolte chez les clercs et laïcs, et jusque dans les manuels offi- ciels de catéchèse. « Il y a de la morale à faire, lit-on dans l'un d'entre eux, mais il n'y a pas de morale toute faite, pas de loi tombée du ciel, pas de code inscrit dans la conscience... » Ecouter, laisser parler, recueillir des « faits de vie » et les pren- dre comme norme : telle est la ligne générale dont on trouvera dans notre ouvrage exemples et références.

De là, le passage d'une extrême rigueur à une extrême indul- gence dans la morale sexuelle ; de là, une véritable rébellion contre telle encyclique ou telle déclaration du pape à ce sujet ; de là, une remise en cause du célibat des prêtres, voire de l'indis- solubilité du mariage, etc.

En quelque matière que ce soit, on minimise le péché : le noyant dans l'amour de Dieu ou le diluant dans le collectif. On escamote la pénitence (absolutions collectives, proscrites en vain par Rome). On se rebelle contre la discipline à l'intérieur même du clergé.

C'est ici que nous touchons à un des points les plus sensibles de la crise de l'Eglise.

Vatican II, dans une double réaction contre une sépara- tion excessive du clergé et des laïcs et contre une centralisation abusive de la monarchie pontificale, a, d'une part, restauré (et non pas inventé comme on le dit à tort) la notion d'Eglise « peuple de Dieu », ensemble des croyants, et proclamé, d'autre part, la la collégialité épiscopale : il renouait ici encore, par-delà les con- ciles antérieurs, avec une lointaine mais authentique tradition.

Or sur ces deux points, comme sur d'autres, les clercs pro- gressistes, dépassant le concile, le trahissent. Ils changent le

« Peuple de Dieu » en une démocratie — se plaisant à faire du prêtre un « homme comme un autre », et du simple fidèle un ministre d'Eglise. L a crise de « l'identité du prêtre » qui a fait tant de ravages dans le clergé jeune et moins jeune... prend là

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son origine. L a réforme des séminaires dans un sens qu'il faut bien dire « laxiste » n'a fait que l'aggraver.

Quant à la collégialité épiscopale, elle comporte, à côté d'incontestables bienfaits, des risques trop certains (danger de restaurer des Eglises nationales, de subordonner les évêques aux commissions et aux bureaux, etc.). Qu'importe ! rien n'empê- che les esprits avancés d'y voir l'annonce d'on ne sait quelle poly- synodie — au moment précis où jamais l'Eglise et le monde désemparé n'ont eu tant de besoin d'une voix « autorisée » !

On sait à quel point Paul V I , si ferme dans la doctrine et si patient dans les actes, a souffert de ceux qui, sous prétexte de

s'ouvrir au monde, se fermaient à ses appels, lui opposant le silence comme à une voix d'outre-tombe. Qu'en sera-t-il de son nouveau successeur ? Il n'y a pas grand risque à parier que, venu de l'Eglise du silence, i l saura surmonter celui-ci et élever îa voix contre ceux qui voudraient l'étouffer. Dès son premier message Jean Paul II n'a-t-il pas annoncé que la collégialité devrait être développée, mais développée dans une étroite union iivec son chef : selon les indications du concile lui-même. De toute manière on voit mal qu'une Eglise-Parlement serait plus apte à surmonter ses discordes internes et le désordre du monde d'une Eglise-Sacrement d'unité.

Après la mort de Dieu, après l'absolu de la liberté, le marxisme aura été la troisième « hérésie » de notre époque. Pas plus qu'aux autres, l'Eglise démissionnaire n'a échappé à sa conta- gion.

La révolution de 1968 a été, comme pour les deux pré- cédentes, un révélateur et un ferment. Mais, auparavant, bien des clercs s'étaient laissé séduire par la puissante idéologie du

« sens de l'histoire ».

Impossible de prêcher l'Evangile, a-t-on dit dès l'après- guerre, dans un monde capitaliste radicalement pervers : com- mençons par abattre les structures ; ensuite, mais ensuite seule- ment, pourra passer le message du Christ. Impossible, de même, d'échapper à la lutte des classes ; elle est un fait inéluctable, à tel point qu'on aboutira, selon le mot d'un évêque, à la « sacra- liser » (Mgr Elchinger).

Bien des causes ont entraîné cette démission. L a trans- formation de la C.F.T.C. en C.F.D.T. ; l'évolution de la J.O.C.

dont le récent cinquantenaire a été l'occasion renouvelée d'ex-

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primer des positions officiellement marxisées ; des publications comme Témoignage chrétien ; des mouvements comme Vie nou- velle ; des organismes religieux comme la Mission de France, encore que celle-ci ne comprenne pas tous les prêtres au travail (tels ceux qui restent attachés à un diocèse), et que plus d'un prêtre-ouvrier échappe au marxisme.

La liberté des options politiques proclamée par l'épisco- pat en 1972, relevant le socialisme d'une longue condamnation, a favorisé la voie déclive de certains militants vers la dangereuse idéologie — jusqu'au moment où ont été publiées en juillet 1977 la mise en garde du conseil permanent et celle, plus réservée, de la commission ouvrière de l'épiscopat à l'égard du marxisme.

Tardives, sans doute, ces mises en garde recevaient dans le même temps un double appui extérieur, du fait de la dénon- ciation du marxisme par les témoins du communisme en acte (Soljénitsyne et autres) et par suite de sa décomposition théorique sous le coup d'une jeune intelligentsia qui reniait brutalement ses « maître-penseurs » de la veille. Les déchirements de la gau- che politique en France ne pouvaient qu'accentuer ce renver- sement.

Pour une nouvelle mission

C'est ainsi que, suivant la courbe même des événements, l'Eglise en est arrivée aujourd'hui à un changement de pente.

Non pas que l'ouverture de Vatican II ni les multiples réfor- mes qu'il a suscitées puissent être remises en cause. L'erreur est, à notre sens, totale de ceux qui suivent l'évêque isolé d'Ecône : autant i l était et i l reste juste de dénoncer les bavures, les outran- ces et les erreurs frôlant l'hérésie de ceux qui, dépassant le con- cile, l'ont trahi ; autant i l est déraisonnable de vouloir effacer de l'histoire de l'Eglise des textes votés par une quasi-unanimité de plus de deux mille évêques (sans même tenir compte du carac- tère « dogmatique », s'imposant à la foi, de certaines constitu- tions conciliaires, telle la première de toutes, Lumen Gentium, sur l'Eglise).

C'est au contraire par un retour au concile authentique que l'Eglise éliminera les dangereuses exaltations de certains clercs

— et cette démarche est déjà commencée.

Ce fut tout le long de son règne celle de Paul V I , dont la fermeté n'eut d'égale que la patience... Les déclarations très fermes

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de son éphémère successeur, Jean Paul F ' , allaient exactement dans ce sens. Et l'on ne s'avance pas imprudemment en écrivant que le nouvel élu s'engagera résolument dans la même voie.

A ce redressement, la France n'est pas restée étrangère.

Faut-il rappeler le courageux appel du nouveau président de la conférence épiscopale, Mgr Etchegaray, à Lourdes en octo- bre 1976, après l'orage déclenché par Mgr Lefebvre et l'alarme de certains sondages ? Or, depuis lors, le redressement n'a fait que s'accentuer : distances prises par les évêques à l'égard du marxisme comme on le rappelait plus haut ; remontrances du pape aux évêques de France (automne 1977) ; synode sur la caté- chèse ; éloquence du Père Bro dans la chaire de Notre-Dame, s'élevant contre ces « bavardages des mandarins » ; prédications à la T V du Père Serge Bonnet, le défenseur du catholicisme populaire ; déclarations du Bureau d'études doctrinales de l'épis- copat sur la divinité du Christ — et critique de certaines publi- cations expressément mentionnées ; édition en juin 1978 du Credo ues évêques ; sans parler de la timide résurgence en latin, de la réapparition de la confirmation dans maintes paroisses qui l'avaient mise en chômage, et de bien d'autres signes.

Or ce redressement trouve un puissant appui au sein comme à l'extérieur de l'Eglise.

Au-dedans, i l surgit chez les jeunes que le progressisme se flattait de séduire, et qui, s'éloignant de son « sécularisme », témoignent d'un extraordinaire renouveau spirituel, qu'il s'agisse du mouvement de pointe comme le charismatisme ou Taizé, qu'il s'agisse des centres spirituels mieux contrôlés de Montmartre ou* de Notre-Dame, ou encore des Foyers de charité ou d'Eau vive, de revues comme Résurrection ou Communio, etc.

Même ferveur du côté des clercs, qu'il s'agisse de leur pré- paration au sacerdoce ou à l'apostolat, en dehors même des sémi- naires (on songe par exemple à l'Ecole de la foi du Père Loew) ; ou de l'essor des vocations monastiques et des nouvelles formes de monachisme, telle la Communauté Saint-Gervais à Paris, les Sœurs de Bethléem, les Filles de Sainte-Thérèse, et combien d'autres !...

Quelle espérance aussi que les progrès de l'œcuménisme, qu'il s'agisse de questions d'exégèse (Bible commune), d'Eucha- ristie, voire de la reconnaissance par les protestants, comme par

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les orthodoxes, de la nécessité d'un commun pasteur : « chose impensable, a écrit le Père Congar, il y a seulement vingt ans ».

Et l'on ne parle pas des contacts multipliés avec les non-chrétiens (juifs, musulmans, religions d'Orient).

Or, dans le même temps, venant cette fois du dehors, s'élève, d'un monde tourmenté, un puissant appel au spirituel. Sur tous les plans, philosophique, politique, économique, moral, le maté- rialisme a failli, et l'humanité commence à réapprendre avec Pascal que « l'homme dépasse infiniment l'homme ».

La science de l'univers elle-même pressent dans la matière quelque chose qui la dépasse : c'est toute la « gnose de Prince- ton » qu'il faudrait citer ici. Et l'on assiste aujourd'hui, après Heidegger et avec certains jeunes philosophes catholiques, à une véritable renaissance de la philosophie de « l'être ».

En bref, i l semble que commence à se vérifier la prophé- tie d'un philosophe bien oublié, O. Hamelin : « ... La mode est variable, écrivait-il au début de ce siècle, et l'humanité pour qui on avait fait de Dieu un obstacle à ses aspirations les plus légitimes ou à tout le moins de ses préoccupations plus pro- chainement urgentes... serait bien capable de repenser à lui quand il ne la gênera plus et qu'elle aura accompli les tâches qu'elle ne pouvait remettre (5). » A moins, ajouterions-nous, que cette même humanité ressente le besoin de Dieu pour accomplir les tâches (de paix, de justice, d'élévation morale) qui pourraient seules la sauver d'une course au suicide.

elles sont, croyons-nous, les vastes et nouvelles perspectives J- ouvertes à l'Eglise et, à travers elle, au « sentiment reli- gieux », à l'aube d'un nouveau pontificat. On ne craint pas de l'écrire : vingt ans, dix ans peut-être, ne se seront pas écoulés que la profonde crise où l'a plongée la « démission » de certains de ses fils devant un monde lui-même en désarroi apparaîtra finalement comme une felix culpa, une catharsis, une purification douloureuse mais salutaire, dont l'Eglise sortira réellement « mis- sionnaire », rayonnante, une fois de plus, de ses promesses immor- telles.

(5) O. Hamelin, Essai sur les éléments principaux de la représentation, Alean, 1925, p. 490.

A N D R E PIETTRE de l'Institut

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