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La mentalisation triadique et son lien avec les interactions familiales entre mère, père, enfant : résultats préliminaires

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Texte intégral

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Master

Reference

La mentalisation triadique et son lien avec les interactions familiales entre mère, père, enfant : résultats préliminaires

OSSO, Christelle

Abstract

La mentalisation se réfère à l'habilité humaine de considérer les personnes en tant qu'êtres mentaux. Fonagy, Gergely, Jurist et Target (2002) ont élaboré l'hypothèse théorique selon laquelle la mentalisation favorise la collaboration au sein des relations humaines. Cette hypothèse a été étudiée auparavant dans le contexte de la relation mère-enfant. Le but de notre recherche est d'explorer la mentalisation au niveau triadique. Nous allons tester l'hypothèse de Fonagy et al. (2002) au niveau de la triade mère, père, enfant. Notre hypothèse postule que la mentalisation triadique du père et de la mère est en lien avec le niveau de collaboration des trois membres de la famille. Les résultats obtenus corroborent notre hypothèse pour la mère, tandis que pour le père la relation est tendancielle. Ces résultats préliminaires apportent des implications théoriques et pratiques intéressantes dans le domaine de la famille.

OSSO, Christelle. La mentalisation triadique et son lien avec les interactions familiales entre mère, père, enfant : résultats préliminaires. Master : Univ. Genève, 2011

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:18757

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La mentalisation triadique et son lien avec les interactions familiales entre mère, père,

enfant : résultats préliminaires

Christelle Osso

Maîtrise universitaire en Psychologie Membres du jury :

Nicolas Favez directeur de recherche Francesco Lopes

Martial Van der Linden Université de Genève

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation Section de Psychologie

AA 2009-2011

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Résumé

La mentalisation se réfère à l’habilité humaine de considérer les personnes en tant qu’êtres mentaux. Fonagy, Gergely, Jurist et Target (2002) ont élaboré l’hypothèse théorique selon laquelle la mentalisation favorise la collaboration au sein des relations humaines. Cette hypothèse a été étudiée auparavant dans le contexte de la relation mère-enfant. Le but de notre recherche est d’explorer la mentalisation au niveau triadique. Nous allons tester l’hypothèse de Fonagy et al. (2002) au niveau de la triade mère, père, enfant. Notre hypothèse postule que la mentalisation triadique du père et de la mère est en lien avec le niveau de collaboration des trois membres de la famille. Les résultats obtenus corroborent notre hypothèse pour la mère, tandis que pour le père la relation est tendancielle. Ces résultats préliminaires apportent des implications théoriques et pratiques intéressantes dans le domaine de la famille.

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Table des matières:

1. Introduction.………..…………...p.5 1.1 L’hypothèse de Fonagy et al. (2002) au sein de la triade familiale………...p.5 1.2 Objectifs du travail……….………p.6 2. Partie théorique………....…p.7 2.1 Origine théorique de la mentalisation.………p.7 2.1.1 Définition du concept de la mentalisation……….…...p.8 2.1.2 La mentalisation dans les relations précoces………..….p.9 2.2 La mentalisation et la collaboration ………...……….…...p.10 2.2.1 L’insightfulness et la collaboration mère-enfant ….…………..………...…p.12 2.2.2 La mind-mindedness et la collaboration mère-enfant...….……….……...p.13 2.2.3 La fonction réflexive et la collaboration mère-enfant………...…….p.14 2.2.4 La mentalisation et la collaboration mère-enfant……….……...p.15 2.2.5 La mentalisation triadique……….……….p.16 2.3 L’étude de la triade familiale ……….………...p.17 2.3.1 Le coparentage………...………p.18 2.4 La famille comme système………....…………p.19 2.4.1 La théorie de l’encadrement……….…..………p.21 2.5 L’alliance familiale………...………..………..p.21 2.6 Les caractéristiques individuelles de l’enfant et du couple co-parental………p.23 3. Problématique et hypothèse….….………..…...…...p.24 3.1 Problématique et objectifs du travail………….………...……p.24 3.2 Hypothèse générale………...………...…...p.25 4.Méthode……….…p.25 4.1 Population……….………...…p.25 4.2 Procédure.………...p.25 4.3 Instruments………..….p.26 4.3.1 Lausanne Trilogue Play (LTP)………...p.26 4.3.2 Family Alliance Assessment Scale (FAAS)………..p.29 4.3.3 Family Constellation Interview (FaCI)……….p.32 4.3.4 Addendum for Reflective Functioning Scoring System ………..p.33 4.3.5 EAS Temperament Survey………p.35 4.3.6 Marital Adjustment Test (MAT)………...……p.35

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4.4 Plan de recherche………..………..….p.36 4.5 Hypothèse opérationnelle……….………p.36 5. Résultats………...……….p. 36 5.1 Résultats qualitatifs………...p.36 5.2 Analyse de la fonction réflexive et de l’alliance familiale……….……...p.42 5.2.1 Analyse descriptive de la fonction réflexive et de l’alliance familiale…...…...p.42 5.2.2 Analyse du lien entre la fonction réflexive et l’alliance familiale……….p.43 5.2.3 Analyse de la différence entre la FR inter-parentale élevée vs basse……...….p.44 5.3 Analyse descriptive du tempérament de l’enfant……….………..…...p.45 5.3.1 Analyse du lien entre le tempérament de l’enfant et l’alliance familiale……...p.47 5.4 Analyse descriptive de la satisfaction conjugale………..……...……..p.47 5.4.1 Analyse du lien entre la satisfaction conjugale et la fonction réflexive...…….p.48 5.4.2 Analyse du lien entre la satisfaction conjugale et l’alliance familiale………..p.48 6. Discussion……….…….p.49 6.1 Le lien entre la fonction réflexive inter-parentale et l’alliance familiale………….….p.49 6.2 Le tempérament de l’enfant et la satisfaction conjugale………...p.50 6.3 Les limites de la recherche………p.51 6.4 Implications théoriques et pratiques………...……..p.52 6.5 Conclusion et perspectives futures………p.54 7. Références………..……p.57 8. Annexes……….….……p.61

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1. Introduction

Ce travail de recherche s’inscrit dans le projet de thèse de Francesco Lopes, assistant à l’Université de Genève. Le projet a comme but d’explorer la mentalisation de la mère et du père dans la famille précoce et d’examiner le lien entre la mentalisation au sein de la famille et le niveau de collaboration de la triade père-mère-enfant. Fonagy, Steele, Steele, Moran et Higgitt (1991) ont élaboré le concept de mentalisation qui se définit comme la capacité de percevoir et d’expliquer les comportements des autres en termes d’états mentaux, comme les intentions, les émotions et les croyances. Dans la vie de tous les jours les individus cherchent spontanément à comprendre les comportements des autres afin de pouvoir leur donner un sens et répondre à la question du « pourquoi » quelqu’un a fait telle ou telle action. Par la suite, Fonagy et al. (2002) ont élaboré l’hypothèse théorique selon laquelle la mentalisation favorise la collaboration au sein des relations humaines. Ils soulignent que les états mentaux permettent non seulement de donner un sens à soi-même, mais ils peuvent également être communiqués aux autres et interprétés par les autres afin de favoriser la collaboration entre les individus. Par exemple :

Lors du repas familial, l’enfant cherche plusieurs fois à se lever de la chaise. La mère, qui est très fâchée, l’oblige à s’asseoir pour rester à table jusqu’à la fin du repas. Le père, qui observe la situation, s’aperçoit que l’enfant regard la paille bleu qui est sur le bord de la table. Ainsi, il pense que le comportement de l’enfant est le signe de l’intention de prendre la paille et boire son lait avec la paille comme au petit déjeuner. Grâce à la capacité de considérer l’état mental de l’enfant, le père, au lieu de se fâcher, s’imagine les raisons pour lesquelles l’enfant se comporte de cette façon. Il pourrait dire à la mère « Il se lève parce qu’il veut prendre la paille bleu qu’il a essayé ce matin ». Alors la mère va passer la paille à l’enfant, qui peut maintenant rester assis à boire son lait et les parents peuvent tranquillement terminer le repas.

1.1 L’hypothèse de Fonagy et al. (2002) au sein de la triade familiale

Depuis quelques années plusieurs chercheurs (Grienenberger, Kelly, & Slade, 2005; Slade, Grienenberger, Bernbach, Levy, & Locker, 2005) ont voulu vérifier l’hypothèse de Fonagy et al. (2002) dans le contexte social de la relation mère-enfant. Ces recherches se focalisent sur la capacité de la mère à reconnaître les états mentaux intentionnels de l’enfant et le lien entre

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cette capacité et la qualité de l’interaction entre la mère et son enfant. Cependant, la mentalisation n’a pas encore été étudiée chez le père, qui fait souvent partie de l’environnement social de l’enfant. En effet, dans une perspective développementale, les relations familiales jouent un rôle crucial dans le développement socio-affectif de l’enfant.

Les interactions dyadiques mère-enfant ont fait l’objet de nombreuses études qui ont démontré l’importance de cette relation pour le développement socio-émotionnel de l’enfant.

De plus, d’autres recherches ont montré que la relation père-enfant a également un grand impact sur le fonctionnement de l’enfant (Phares, Duhig, & Watkins, 2002). Bien que ces travaux sur la parentalité aient amené beaucoup de données sur la relation à deux, l’Office Fédéral de la Statistique (OFS) révèle qu’en Suisse dans les années 2000, 46.5 % des ménages familiaux se composent d’un couple avec enfant(s). Ces données suggèrent qu’un nombre considérable d’enfants sont élevés par les deux parents et grandissent en famille. En effet, les travaux récents de McHale (2007) ont mis l’accent sur l’importance de considérer l’environnement naturel de l’enfant, qui souvent ne vit pas dans un contexte dyadique, mais dans un contexte multi personnes, dans lequel au moins deux adultes sont présents. En effet, le coparentage a des conséquences sur le développement de l’enfant. Plus spécifiquement, McHale (2007) a observé que le développement de l’enfant est influencé par la relation parent-enfant, mais également par le coparentage. Ces travaux suggèrent que pour étudier le développement socio-affectif de l’enfant, il faut considérer les relations de la triade familiale.

Selon l’hypothèse de Fonagy et al. (2002) la mentalisation est un facteur qui influence la collaboration au sein des relations humaines. Ainsi, nous supposons que la mentalisation des parents est en lien avec les relations familiales, qui vont être déterminantes pour le niveau de fonctionnement de l’enfant.

1.2 Objectifs du travail

Dans le but de mieux comprendre l’influence de la mentalisation sur les relations familiales, le présent travail se fixe deux objectifs. Le premier est d’explorer la mentalisation triadique au sein de la mère et aussi du père, le deuxième objectif est d’étudier le lien entre la mentalisation inter-parentale et le niveau de collaboration des trois membres de la famille.

Ceci signifie que nous allons tester l’hypothèse de Fonagy et al. (2002) au niveau triadique.

Pour cette raison, dans notre recherche nous proposons d’étudier la famille en tant qu’unité, en observant les interactions de la triade mère-père-enfant. La capacité d’interagir à trois

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permet de déterminer le niveau de collaboration de la famille en termes d’alliance familiale.

Notre regard portera sur l’étude de la famille en tant qu’unité dans un système à trois personnes, précisément dans le cadre d’une famille composée par deux parents et leur enfant d’un âge compris entre 18 et 24 mois. Dans la partie théorique, une revue de la littérature sera présentée pour permettre d’examiner quelques notions théoriques. Notamment, le concept de la mentalisation, de la fonction réflexive, de la triade mère-père-enfant et de l’alliance familiale. Nous détaillerons les objectifs de recherche et les hypothèses. Par la suite, nous nous pencherons sur les aspects méthodologiques de la recherche, à savoir la description de la population étudiée, puis le déroulement de l’expérimentation d’un point de vue plus chronologique. En outre, nous allons décrire les deux instruments utilisés pour la récolte des données et les deux systèmes de codages adoptés. Enfin, nous allons présenter les résultats obtenus et les interpréterons en suggérant quelques perspectives futures.

2. Partie théorique

Le cadre théorique de notre recherche s’organise de la manière suivante. Tout d’abord nous présenterons le concept central du travail : la mentalisation et le lien entre cette capacité et la collaboration au sein des relations familiales. Nous nous intéresserons spécifiquement aux travaux qui ont montré un lien entre les capacités mentalisantes de la mère et la collaboration mère-enfant dans un contexte d’attachement. Ces travaux présentent différentes opérationnalisations du concept de mentalisation qui permettent de corroborer l’hypothèse théorique formulée par Fonagy et al. (2002) sur l’existence d’un lien entre la mentalisation maternelle et le niveau de collaboration mère-enfant. Par la suite, nous nous focaliserons sur la triade familiale afin d’étudier l’hypothèse de Fonagy et al. (2002) au sein de la famille.

Ainsi, nous présenterons certains principes de l’approche systémique, de la triade mère-père- enfant et de l’alliance familiale.

2.1 Origine théorique de la mentalisation

Le terme mentalisation est né grâce aux principes élaborés par les psychanalystes (Bion, 1962, in Allen, Fonagy, & Bateman, 2008; Winnicott, 1971, in Slade, 2005) et l’école de psychosomatique. Ce concept fait référence au processus psychique de transformation des

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expériences somatiques en représentations psychiques. Plus spécifiquement, la mentalisation est définie comme l’habilité humaine à considérer les personnes en tant qu’êtres mentaux.

Ainsi, elle est une des capacités les plus importantes qui caractérisent l’esprit humain.

2.1.1 Définition du concept de la mentalisation

Un individu mentalisant est capable de se représenter les états mentaux des autres et d’adopter leur perspective. Néanmoins, les états mentaux sont des expériences internes à une personne et, par conséquent, ils ne sont pas directement observables (Allen et al., 2008). Malgré cela, ils peuvent être inférés à partir des signaux comportementaux. En effet, le comportement d’un individu peut être conçu comme un indice visible des états mentaux qui le sous-tendent, permettant de déduire les intentions, les pensées et les émotions des autres et de soi-même.

Dans la vie de tous les jours lorsque les individus cherchent à comprendre les comportements des autres en termes d’états mentaux, ils arrivent à les comprendre et leur donner un sens logique. La mentalisation est un concept qui inclut la caractéristique représentationnelle et opaque des états mentaux, qui peuvent uniquement être supposés. Ainsi, une personne mentalisante est capable de faire des suppositions sur le sens qu’il y a derrière un comportement et considérer les états mentaux comme les causes du comportement. De même, elle arrive à reconnaître que son raisonnement pourrait être faux puisqu’il se base sur des hypothèses. Allen et al. (2008) ont mis en évidence deux niveaux de représentation des états mentaux : le niveau implicite et le niveau explicite. Le niveau implicite se réfère à une composante plus automatique et inconsciente de la mentalisation. Cette composante plutôt intuitive est liée aux émotions et se reflète par une résonance affective envers les autres (Allen et al., 2008). Par contre, le niveau explicite de la mentalisation se caractérise par une réflexion plutôt consciente et délibérée qui se reflète par la verbalisation. Le processus de la mentalisation permet de passer d’une intuition implicite à une verbalisation explicite (Allen et al., 2008). Dans le domaine de la psychologie, le concept de la mentalisation a été largement étudié. Depuis presque une trentaine d’années, de nombreux chercheurs se sont intéressés au fonctionnement de cette habilité humaine et à son développement. Ainsi, la mentalisation a été étudié chez les enfants, les adolescents, les adultes, et chez des populations présentant un développement atypique comme les autistiques. Malgré tous ces travaux se sont focalisés sur des caractéristiques varies de la mentalisation, et l’ont évaluée de manière différente, leur focus d’intérêt est le même. C’est-à-dire la capacité humaine de percevoir les états mentaux

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comme la cause du comportement, et ainsi, d’aller au-delà des simples apparences du comportement.

2.1.2 La mentalisation dans les relations précoces

Dans une perspective psychanalytique, Bion (1962, in Allen et al., 2008) s’est intéressé plus spécifiquement à la mentalisation en lien à la relation dyadique mère-enfant. Il a mis l’accent sur l’importance de la mentalisation maternelle pour la régulation émotionnelle de l’enfant. Il a élaboré le concept de containement, qui stipule que la mère « mentalisante » peut percevoir les émotions vécues par son enfant. Elle arrive à « contenir » mentalement les émotions souvent négatives et non gérables par l’enfant tout seul, afin de les transformer en une expérience tolérable pour l’enfant (Bion, 1962, in Allen et al., 2008). Par exemple, lorsque l’enfant ressent de la peur, émotion qu’il n’arrive pas à gérer tout seul, la mère est capable de comprendre l’état interne de l’enfant et, par conséquent, se représente le sentiment de peur de l’enfant. Ainsi, elle répond de manière à réguler les émotions de l’enfant et le rassurer. Grâce à la mentalisation de la mère, l’enfant développe un sens de maîtrise de ses émotions et les expérimente comme reconnues par sa mère (Bion, 1962, in Allen et al., 2008). Toujours dans la même idée, les travaux de Winnicott (1971, in Slade, 2005) suggèrent également que la capacité de la mère d’apprécier les états mentaux de l’enfant favorise la régulation des émotions vécues par l’enfant. La capacité de la mère de donner voix à l’expérience interne de l’enfant va rendre les expériences de l’enfant gérables. Plus précisément, l’enfant peut maîtriser ses émotions lorsque ses parents reconnaissent qu’il possède un esprit, de désirs et de sentiments, qui lui sont reflétés en miroir (Gergely & Watson, 1996, in Slade, 2005). Dans le cadre de la théorie psychanalytique, Fonagy et al. (1991) définissent la mentalisation comme la capacité de percevoir et d’expliquer les comportements des autres en termes d’états mentaux, comme les intentions, les émotions et les croyances. Il s’agit d’une capacité qui est à la base du processus de containement dont Bion (1962, in Allen et al., 2008) et Winnicott (1971, in Slade, 2005) font référence dans leur théorie.

Par exemple, lors d’une situation ménagère, dans laquelle la mère est en cuisine en train de préparer un gâteau pour toute la famille, son enfant tout d’un coup se met à trafiquer sur la table et fait tomber le chocolat par terre. Une mère mentalisante est capable de s’imaginer les raisons pour lesquelles l’enfant s’est comporté de cette façon. Ainsi, elle pourrait penser :

« L’enfant veut m’aider pour me faire plaisir et puisqu’il est curieux il veut aussi apprendre ».

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Dans cette situation la mère est capable de comprendre le comportement de l’enfant par son besoin d’apprendre et, en plus, elle est consciente que l’enfant est capable de reconnaître que sa mère pourrait ressentir du plaisir par son aide. Ainsi, elle pourrait, par exemple, dire à l’enfant : « Si tu veux m’aider, alors vient ici je te donne un tabouret et je te montre quoi faire ».

2.2 La mentalisation et la collaboration

Dans le cadre de la théorie de l’attachement, Fonagy et al. (2002) ont élaboré l’hypothèse théorique selon laquelle la mentalisation favorise la collaboration au sein des relations familiales. En effet, grâce aux principes élaborés par les psychanalystes, Bion (1962, in Allen et al., 2008) et Winnicott (1971, in Slade, 2005), Fonagy et al. (2002) se sont aperçus que la compréhension des états mentaux permet non seulement d’adopter la perspective des autres, mais peut être communiquée également aux autres, produisant des interactions coopératives entre les individus. Grâce à la mentalisation, donc, les individus peuvent prendre en compte les besoins et les désirs des autres et interagir de manière coopérative avec eux. De nombreux chercheurs se sont intéressés à la question de la mentalisation maternelle en lien avec la collaboration mère-enfant dans un contexte d’attachement. Ils ont évalué la collaboration mère-enfant à travers la Situation Étrange (Ainsworth, Blehar, Waters, & Wall, 1978), dans laquelle l’enfant est confronté à la séparation de sa mère. En effet, la situation étrange est une tâche développementale cruciale pour l’enfant. Le comportement d’attachement de l’enfant dans cette situation peut être considéré comme un indice de la collaboration entre l’enfant et sa mère. Par exemple, les enfants avec un style d’attachement sécurisé cherchent le contact avec leur mère dans la phase de réunion après la séparation. Par contre, les enfants avec un style d’attachement évitant prennent de la distance de leur mère et l’évitent activement. La relation d’attachement peut être qualifiée comme une forme de collaboration émotionnelle, dans laquelle l’enfant demande de la protection et recherche le contact avec sa mère. Ces recherches suggèrent que la capacité de la mère de donner un sens à l’expérience affective de l’enfant favorise des sentiments de sécurité et d’authenticité chez l’enfant. Ainsi, l’enfant peut exprimer ouvertement ses besoins et ses émotions pour collaborer avec sa mère et s’approcher d’elle. De même, au cours de cette condition de stress, la capacité de la mère à réguler la peur et la détresse de l’enfant est également un indice de la collaboration mère-enfant. D’après la perspective évolutionniste de Bowlby (1969, in Main, 2000), la mère a la responsabilité de

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s’occuper de la survie et de la sécurité de l’enfant. Ainsi, la relation d’attachement est constituée d’une part du besoin de l’enfant de construire et maintenir une proximité avec sa mère, et d’autre part de la capacité de la mère de le soutenir et de lui fournir sa protection.

Plus spécifiquement, Ainsworth, Bell et Stayton (1971) ont décrit l’habilité des mères à percevoir et à interpréter avec précision les comportements de l’enfant en termes de sensitivité maternelle. La sensitivité permet aux mères de comprendre et répondre de manière appropriée et immédiate aux besoins de l’enfant. Selon Ainsworth, Bell et Stayton (1974) la sensitivité maternelle se caractérise par quatre composantes principales. Tout d’abord, elle présuppose que la mère soit consciente et attentive aux signaux de l’enfant. Elle fournit une interprétation correcte des comportements de l’enfant, et sur la base de cette interprétation, donne à l’enfant une réponse immédiate et appropriée. La caractéristique essentielle d’une mère sensitive est la capacité de répondre adéquatement à la situation vécue par l’enfant, en fonction des besoins et des désirs de l’enfant (Ainsworth et al., 1974). Une mère qualifiée comme sensitive est capable d’interpréter de façon exacte les comportements de l’enfant. Elle est, donc, un partenaire coopératif et interagit de manière empathique et appropriée avec lui. Ainsworth et al. (1974) affirment, par contre, qu’une mère avec une sensitivité limitée n’est pas consciente des signaux de son enfant, puisqu’elle n’arrive pas à les percevoir ou alors elle interprète mal les besoins de l’enfant. Dans ce cas, la mère interagit avec l’enfant exclusivement selon son propre point de vue. Elle interagit de manière peu empathique avec son enfant et produit des réponses inappropriées, car elle considère seulement ses propres besoins et désirs (Ainsworth, Bell, & Stayton, 1971). Ainsi, la mère a une compréhension altérée des comportements de l’enfant. La sensitivité maternelle, est donc, un autre comportement qui fait référence à la collaboration entre la mère et son enfant.

Cela dit au cours des chapitres suivants, nous aborderons les arguments empiriques qui corroborent l’hypothèse théorique formulée par Fonagy et al. (2002) sur l’existence d’un lien entre la mentalisation maternelle et le niveau de collaboration entre la mère et l’enfant. Cette collaboration mère-enfant a été mesurée par la sensitivité de la mère et le style d’attachement de l’enfant. Ces travaux présentent trois différentes opérationnalisations du concept de mentalisation : l’insightfulness, la mind-mindedness et la fonction réflexive.

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2.2.1 L’insightfulness et la collaboration mère-enfant

Koren-Karie, Oppenheim, Dolev, Sher et Etzion-Carasso (2002) ont élaboré récemment le terme de l’insightfulness, qui est défini comme la capacité de la mère de tenir compte des motifs et des émotions qui sous-tendent le comportement de l’enfant. Grâce à cette capacité, la mère arrive à considérer l’expérience émotionnelle de son enfant de façon complète et positive puisqu’elle adopte la perspective de l’enfant. L’étude menée par Oppenheim, Koren- Karie et Sagi (2001) examine le lien entre l’insightfulness maternel et le style d’attachement de l’enfant. Plus spécifiquement, les chercheurs ont d’abord filmé une situation de jeu entre la mère et son enfant. Ensuite, ils ont montré à la mère trois segments de l’interaction mère- enfant, et ils ont posé quelques questions à la mère. Ces questions concernaient les pensées et les sentiments de l’enfant dans la situation visionnée pour évaluer l’insightfulness de la mère.

Par exemple : « Qu’est-ce que votre enfant a ressenti ou pensée dans cet épisode ? ».

Les résultats qu’ils ont trouvés démontrent que les mères avec un bon niveau d’insightfulness ont des enfants avec un attachement sûr. En revanche, les mères qui ne sont pas capables de considérer les motifs et les désirs de l’enfant ont des enfants classifiés comme peu sûr. Les auteurs suggèrent que grâce à l’insightfulness les mères peuvent réfléchir sur l’expérience interne de leur enfant et comprendre les motifs et les émotions sous-tendant ses actions. Ainsi, les enfants peuvent établir un attachement sûr avec leur mère.

Toujours dans le cadre de la théorie de l’attachement, Koren-Karie et al. (2002) se sont intéressés à la question de l’association entre l’insightfulness des mères concernant l’expérience interne de l’enfant et le style d’attachement de l’enfant. De plus, les chercheurs ont étudié aussi la relation entre l’insightfulness maternel et la sensitivité des mères. Plus spécifiquement, ils supposent que l’insighfulness maternel est lié au comportement maternel sensitif et au sentiment de sécurité chez l’enfant. Les résultats trouvés par Koren-Karie et al.

(2002) ont montré que l’insightfulness maternel est en lien avec le comportement sensitif des mères et le style d’attachement sécurisé des enfants. Les auteurs suggèrent que les mères capables d’insightfulness interprètent correctement les comportements de leur enfant et adoptent un comportement sensitif envers l’enfant. De plus, les enfants des mères capables de considérer l’expérience émotionnelle de l’enfant ont une relation d’attachement sécurisé avec leur mère. En revanche, les mères avec un insightfulness limité ne répondent pas de manière appropriée aux besoins de l’enfant et ont des enfants avec un type d’attachement peu sûr.

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2.2.2 La mind-mindedness et la collaboration mère-enfant

Toujours dans la même idée, Meins (1997, in Bernier & Dozier, 2003) se réfère au concept de la mentalisation en termes de mind-mindedness. Elle définit la mind-mindedness comme l’habilité du parent à concevoir l’enfant non seulement comme un agent, mais comme un individu avec un esprit autonome, éprouvant des sentiments et des pensées propres. Meins, Fernyhough, Wainwright, Fradley, et Tuckey (2001) se sont intéressés à la mind-mindedness maternelle et la sensitivité maternelle en tant que prédicteurs du style d’attachement de l’enfant. Plus spécifiquement, ils ont examiné la mind-mindedness maternelle à travers les commentaires verbaux de la mère concernant l’état interne de l’enfant au sein des interactions mère-enfant. Les chercheurs ont donc évalué si les mères produisaient des commentaires se référant aux désirs, aux sentiments et aux pensées de leur enfant. D’abord, Meins et al. (2001) ont observé que les mères disposant d’un niveau élevé de mind-mindedness produisent des commentaires verbaux qualifiés comme appropriés par rapport à l’état interne de l’enfant. Par exemple, lorsque l’enfant se met à éclater de rire suite à une grimace de la mère, elle pourrait dire : « Ah oui t’aime bien quand maman se met à faire le cochon ». Par contre, d’autres mères ont tendance à mal interpréter l’état interne de l’enfant et font des commentaires inappropriés par rapport à l’émotion vécue par l’enfant (Meins et al., 2001). Par exemple, lorsqu’une suspension du jeu se produit la mère ne fait pas des commentaires en rapport à l’état de l’enfant. Ainsi, elle pourrait commencer à le sur-stimuler et à ne pas considérer ce dont l’enfant a besoin, comme lui laisser faire une pause pour se réguler.

Ensuite, les résultats que Meins et al. (2001) ont trouvé sur leur hypothèse de recherche démontrent que les mères avec un niveau de mind-mindedness élevé ont un enfant qui a un attachement sécurisé. Au contraire, les mères avec un niveau de mind-mindedness bas ont un enfant qui a un attachement peu sécurisé. Ces résultats suggèrent qu’il existe un lien entre la mind-mindedness maternelle et le style d’attachement de l’enfant (Meins et al., 2001). En ce qui concerne la sensitivité maternelle, les chercheurs ont observé que la sensitivité maternelle est liée positivement au style d’attachement de l’enfant. Ceci signifie que plus la sensitivité maternelle est élevée et plus le style d’attachement de l’enfant est sécurisé.

Meins et al. (2001) suggèrent qu’une mère sensitive est en mesure de percevoir les signaux de l’enfant, mais elle doit aussi les interpréter correctement. Par conséquent, pour répondre adéquatement aux besoins de l’enfant, la mère doit être capable de comprendre également l’état mental de l’enfant. Ainsi, les auteurs conceptualisent la mind-mindedness comme l’étape précédente au comportement sensible maternelle et pouvant prédire la construction

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d’un attachement sûr entre l’enfant et sa mère (Meins et al., 2001). En effet, si les parents arrivent à interpréter les signaux de l’enfant comme un indicateur de ses états mentaux intentionnels, ils lui apporteront une réponse appropriée qui permettra de le rassurer.

2.2.3 La fonction réflexive et la collaboration mère-enfant

Fonagy et al. (1991) ont élaboré le concept de la fonction réflexive (FR) pour caractériser la capacité à concevoir des états mentaux chez soi et chez l’autre, comme les intentions, les émotions et les croyances. Ils ont introduit ce terme à travers l’étude de l’Adult Attachement Interview (AAI; George, Kaplan, & Main, 1996, in Bernier & Dozier, 2003) qui évalue la capacité des adultes à réfléchir sur la relation d’attachement entre eux et leurs parents.

Récemment, plusieurs chercheurs (Slade, 2005; Slade et al., 2005) se sont intéressés à la fonction réflexive de la mère et sa capacité à reconnaitre les états mentaux intentionnels de l’enfant. Plus spécifiquement, ces travaux se sont focalisés sur l’influence de cette habilité sur la relation d’attachement de l’enfant avec sa mère. À ce propos, Aber et al. (1985, in Slade et al., 2005) ont développé un instrument de mesure permettant d’examiner la capacité du parent à réfléchir sur sa propre expérience émotionnelle et celle de l’enfant, le Parent Development Interview (PDI). Il s’agit d’un entretien semi-structuré qui évalue la capacité de se représenter les comportements de l’enfant en termes d’états mentaux grâce aux descriptions formulées par la mère lorsqu’elle cherche à expliquer le comportement de son enfant. L’étude menée par Grienenberger et al. (2005) a examiné d’une part la relation entre la fonction réflexive de la mère et l’attachement de l’enfant, et d’autre part le lien entre la fonction réflexive de la mère et les comportements maternels. Les auteurs n’ont pas évalué le comportement maternel par la sensitivité, mais grâce à l’Atypical Maternal Behavior Instrument for Assessment and Classification (AMBIANCE, Bronfman, Parsons, & Lyons-Ruth, 1999, in Grienenberger et al., 2005). Il s’agit d’un instrument qui permet d’évaluer si la mère parvient ou ne parvient pas à réguler la détresse de l’enfant lors de la situation étrange. Par exemple, lorsqu’une mère ne réconforte pas l’enfant après une chute ou qu’elle rie pendant que l’enfant pleure. Ensuite, ils ont évalué la fonction réflexive de la mère à l’aide du PDI et l’attachement de l’enfant par la Situation Etrange (Ainsworth et al., 1978).

Les résultats qu’ils ont trouvé démontrent d’abord qu’il existe un lien entre la fonction réflexive maternelle et la relation d’attachement de l’enfant avec la mère. Plus précisément, les mères qualifiées avec un niveau de fonction réflexive élevé sont capables de prendre en

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compte les émotions et surtout les besoins de protection et de réconfort de l’enfant. Ainsi, l’enfant peut chercher le contact avec sa mère et interagir avec elle. De plus, Grienenberger et al. (2005) ont démontré que la fonction réflexive maternelle est associée à un comportement maternel positif. Plus spécifiquement, la capacité réflexive permet à la mère de se représenter l’état négatif de l’enfant et de répondre de manière à réguler les émotions de l’enfant. La mère peut comprendre la peur et la détresse de l’enfant et interagir de manière appropriée avec lui par un comportement positif (Grienenberger et al., 2005). Grâce à la fonction réflexive, la mère devient un partenaire coopératif et par cette attitude elle communique à l’enfant qu’elle reconnait ses émotions. En revanche, les mères avec un bas niveau de fonction réflexive deviennent facilement dérégulées et désorganisées par la détresse de l’enfant (Grienenberger et al., 2005). Elles n’arrivent pas à distinguer entre leurs propres sentiments et ceux de leur enfant. Ainsi, sans la capacité réflexive permettant de se représenter l’état interne de l’enfant, les mères ont tendance à assumer un rôle hostile et renfermé dans la relation avec l’enfant.

Une étude ultérieure de Slade et al. (2005) montre également que la fonction réflexive maternelle mesurée à l’aide du PDI est liée au style d’attachement de l’enfant. Ceci signifie que plus la mère est capable de se représenter l’état émotionnel de l’enfant et plus l’enfant développe une relation d’attachement sécurisée avec sa mère.

2.2.4 La mentalisation et la collaboration mère-enfant

Les différentes études que nous avons passées en revue sur les trois concepts liés à la mentalisation, à savoir l’insightfulness, la mind-mindedness et la fonction réflexive corroborent l’hypothèse théorique de Fonagy et al. (2002). En effet, les résultats de ces recherches démontrent qu’il existe un lien entre la capacité de la mère à se représenter l’expérience émotionnelle de l’enfant et la collaboration mère-enfant dans un contexte d’attachement. Plus spécifiquement, deux indices de la collaboration entre l’enfant et la mère ont été évalués, d’une part le style d’attachement de l’enfant, et d’autre part le comportement maternel. Ces travaux suggèrent que la représentation mentale de la mère sur le vécu intérieur de l’enfant est liée positivement à la capacité de la mère à réguler la détresse de l’enfant et à lui fournir des réponses appropriées pour collaborer ensemble (Grienenberger et al., 2005).

Ceci signifie qu’une mère mentalisante qui comprend la peur et la détresse de son enfant est aussi capable d’interagir de manière appropriée avec lui (Fonagy & Target, 1998, in Grienenberger et al., 2005). Elle communique à l’enfant qu’elle a compris son état mental et

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peut interagir en collaborant avec lui. Inversement, une mère qualifiée comme peu mentalisante n’arrive pas à se représenter l’état négatif de l’enfant et devient facilement dérégulée dans la relation avec l’enfant. De plus, ces études suggèrent qu’une mère capable de donner un sens à l’expérience affective de l’enfant, a un enfant avec un attachement sécurisé qui lui permet de s’approcher et de collaborer avec sa mère (Slade et al., 2005). Par conséquent, la mentalisation maternelle pourrait être un facteur déterminant pour l’établissement d’une collaboration entre l’enfant et sa mère.

2.2.5 La mentalisation triadique

Le présent travail s’intéresse à la mentalisation au sein de la famille. Pour cette raison, nous allons étudier la mentalisation de la mère et aussi du père. Plus spécifiquement, nous allons explorer la mentalisation des parents au niveau de la triade, évaluant comment chaque parent se représente la relation entre son enfant et le conjoint. Nous utilisons comme indicateur de cette mentalisation à trois la fonction réflexive. En effet, l’entretien de la fonction réflexive permet d’évaluer la capacité des parents à se représenter les comportements de leur enfant et de leur conjoint en termes d’états mentaux. La récolte de données par entretien permet à chaque parent d’amener des épisodes de la vie de tous les jours qui caractérisent l’identité familiale à trois. Il s’agit d’un instrument de mesure qui fournit une vue d’ensemble des représentations parentales des relations au sein de la famille que les parents construisent. Par contre, les concepts de l’insightfulness et de la mind-mindedness se basent sur une récolte de données par observation directe qui risque de ne mettre pas en évidence la mentalisation triadique des parents. Lorsque les parents jouent avec l’enfant, le risque est qu’ils se focalisent surtout sur l’enfant et que la dimension à trois n’apparaît pas. En effet, l’étude pilote qui nous avons réalisé sur sept familles, a démontré que l’insightfulness était inefficace pour évaluer la mentalisation au niveau de la triade, car les parents n’arrivaient pas à élaborer des représentations sur les relations à trois en visionnant deux minutes d’interaction familiale. De plus, la mind-mindedness a été évaluée pour les mères d’enfants de 6 mois et ne peut pas être utilisée pour des enfants d’un âge compris entre 18 et 24 mois.

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2.3 L’étude de la triade familiale

La littérature sur l’importance de la famille dans le développement socio-affectif de l’individu et son comportement est profondément attachée à l’approche développementale et aux thérapies familiales. En effet, différents chercheurs se sont intéressés à la question de l’influence des parents sur le développement de l’enfant. D’abord, surtout les interactions dyadiques parent-enfant ont fait l’objet de nombreuses études. Plus spécifiquement, les interactions mère-enfant ont été largement étudiées (Laible & Thompson, 2000; Kochanska &

Murray, 2000; Nadel, Soussignan, Canet, Libert, & Gérardin, 2005). Par exemple l’étude menée par Nadel et al. (2005) démontre que la dépression de la mère affecte le développement émotionnel et cognitif de son enfant. Par ailleurs, Laible et Thompson (2000) ont démontré que l’établissement d’un attachement sûr permet à l’enfant de partager avec sa mère des sentiments positifs. Ainsi, la relation entre la mère et son enfant influence le développement social de l’enfant. Kochanska et Murray (2000) ont observé qu’une relation mère-enfant coopérative a des effets positifs à long terme sur la socialisation de l’enfant. En effet, pendant longtemps les modèles d’intervention précoce ont souvent privilégié des interventions centrées sur la dyade mère-enfant. Cependant, d’autres études ont également démontré que la relation père-enfant a un rôle important pour le développement social de l’enfant (Phares, Duhig, & Watkins, 2002; Kane & Garber, 2004; Paquette, 2004). En effet, les résultats de Paquette (2004) accordent une grande importance au père dans la construction personnelle de l’enfant. Contrairement à la relation mère-enfant qui a la fonction de réconforter et calmer l’enfant, la relation père-enfant encourage l’enfant dans la prise de risque et favorise l’indépendance et le bien-être de l’enfant. Même si les deux parents ont des fonctions profondément différentes, ils représentent un apport qui s’installe dès le début de la vie de l’enfant et qui accompagne l’enfant dans son développement. De plus, la méta-analyse de Kane et Garber (2004) suggère que la dépression du père est associée au niveau de fonctionnement de l’enfant. Plus spécifiquement, les enfants des pères dépressifs présentent des problèmes externalisés et internalisés par rapport aux enfants des pères non dépressifs.

Même si, historiquement, les travaux sur la parentalité mère-bébé ont amené beaucoup de données sur la relation à deux, les données statistiques de l’Office Fédéral de la Statistique (OFS) révèlent qu’en Suisse dans les années 2000, 46.5 % des ménages familiaux se composent d’un couple avec enfant(s) et 8.4 % de ménages monoparentaux. Ces données suggèrent qu’un nombre considérable d’enfants sont élevés par les deux parents et grandissent en famille. Plus récemment, les travaux de McHale (2007) ont mis l’accent sur l’importance

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de considérer l’environnement naturel de l’enfant, qui ne vit pas dans un contexte dyadique, mais dans un contexte multi personnes, dans lequel au moins deux adultes sont présents.

Ainsi, dans la plupart des cas, l’enfant se trouve à vivre en interaction avec la mère, mais aussi avec le père. En effet, à l’intérieur de la famille la mère et le père travaillent ensemble, et avec l’enfant ils constituent la triade familiale.

2.3.1 Le coparentage

Depuis plusieurs années beaucoup de chercheurs ont démontré que l’action en commun des parents, nommé coparentage, a des conséquences sur le développement de l’enfant. En effet, les parents constituent un modèle relationnel pour l’enfant qui imite et modifie son comportement en fonction de ce qu’il observe. La notion de coparentage est centrale dans la théorie de la structure familiale de Minuchin (1974, in Frascarolo & Favez, 2005). Ce concept se réfère à l’alliance entre les parents portant sur l’enfant et ses besoins (McHale, 2007).

Concrètement, les parents s’engagent et se soutiennent mutuellement pour s’occuper de l’enfant. Inversement, les parents sont caractérisés par un coparentage hostile lorsqu’ils sont en conflit. Ce cadre conflictuel peut se manifester ouvertement par des attaques mutuelles, dans lesquelles chaque parent va discréditer et contredire les décisions de l’autre (McHale, 2007). En outre, à cause des divergences coparentales, un parent peut se désengager de la vie familiale. Le coparentage risque donc de devenir froid et colérique. McHale, Kuersten, et Lauretti (1996) ont démontré qu’un coparentage hostile affecte le sens de sécurité et d’intégrité familiale de l’enfant. Pour cette raison, nous nous intéressons à étudier le fonctionnement du contexte familiale multi personnes, c’est-à-dire la famille composée par la mère, le père et l’enfant. En effet, le développement de l’enfant est influencé par la relation parent-enfant, mais également par le coparentage. Plus spécifiquement, nous considérons l’influence de tous ces facteurs parentaux et inter-parentaux établis par la triade familiale, à travers un parcours qui lui est propre et qui ne peut être réduit aux dyades qui la composent.

De nombreuses études (McHale & Fivaz-Depeursinge, 1999; McHale, Kuersten-Hogan &

Rao, 2004, McHale, 2007) suggèrent que l’étude de la triade familiale est un facteur unique et différent des relations dyadiques pour le développement socio-affectif de l’enfant. Ces travaux confirment l’importance d’utiliser des mesures plus larges par rapport à celles centrées sur l’interaction d’un seul parent avec l’enfant. Ainsi, regarder au-delà des dyades mère-enfant et père-enfant révèle une myriade d’influences et de dynamiques de socialisation.

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2.4 La famille comme système

Au milieu des années quatre-vingts, Minuchin (1985) a souligné que les modèles théoriques basés sur les interactions dyadiques étaient insuffisants pour étudier la dynamique familiale, puisque la dyade parent-enfant ne représente pas le quotidien de l’enfant. Elle conçoit les relations familiales selon une perspective structuraliste en termes de systèmes et sous- systèmes. L’approche systémique considère la famille comme un système social particulier. À partir de cette approche nous nous intéressons à étudier comment le système familial fonctionne. Plus spécifiquement, notre recherche se focalise sur la collaboration du système familial. En effet, plusieurs études ont montré que la collaboration au sein des relations parent-enfant et parent-parent a un rôle crucial pour le développement de l’enfant. Ainsi, nous allons étudier cette caractéristique au sein du système familial triadique père-mère-enfant.

L’approche systémique est issue de la théorie générale des systèmes (Bertalanffy, 1973, in Minuchin, 1985). Selon cette théorie, un système est défini comme un « ensemble d’éléments en interaction dynamique, l’état de chacun des éléments étant déterminé par l’état des autres éléments » (Miller, 1978 in Salem, 1987). Un système est conçu comme ouvert lorsque ces éléments peuvent s’influencer mutuellement et être influencés par l’extérieur. Trois principes de base caractérisent le fonctionnement des systèmes dits ouverts : le principe de totalité, de circularité et d’homéostasie. Tout d’abord, le principe de totalité se base sur l’idée qu’un système ouvert est un tout qui diffère de la somme de ses parties. Dans une perspective systémique, la famille obéit à ce principe. Selon Minuchin (1985), la famille est un système qui se compose de plusieurs sous-systèmes corrélés entre eux et interdépendants. La mère et le père avant d’être parents, sont d’abord des époux qui constituent le sous-système conjugal.

Après la naissance de l’enfant, le système devient plus complexe formant une triade père- mère-enfant. Des nouveaux sous-systèmes vont ainsi se produire : le sous-système mère- enfant, le sous-système père-enfant et le sous-système mère-père en tant que parents de l’enfant. Néanmoins, la famille a des propriétés qui ne peuvent pas être comprises en tenant uniquement compte des caractéristiques individuelles de chacun de ses membres. Au contraire, il est nécessaire d’étudier la dynamique du système familial selon l’organisation de sa totalité. Par exemple, lorsque l’enfant interagit seul avec sa mère il fait des caprices, mais dès que son père est présent, il change de comportement.

Deuxièmement, selon le principe de circularité, les interactions à l’intérieur du système sont circulaires plutôt que linéaires. Plus précisément, les éléments d’un système s’influencent réciproquement par un jeu de boucles rétroactives. Selon une perspective systémique, le

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système familial suit aussi ce principe et il produit des interactions circulaires. Chaque membre de la famille peut influencer directement ou indirectement les autres et être influencé en retour. Par exemple, une relation solidaire entre les parents a un impact sur leur manière d’interagir avec l’enfant. De même, la disponibilité de l’enfant à interagir avec son entourage en sera affectée et vice-versa.

Le principe d’homéostasie suppose qu’un système ouvert réagit à tout changement qui se produit dans l’environnement et à l’intérieur du système par une série de mécanismes régulateurs qui maintiennent l’ensemble dans son état initial. À travers ces mécanismes dits aussi feed-back négatifs, la famille rétablit son équilibre en cas de déséquilibre. Ce processus d’autorégulation de la famille assure une identité et une stabilité dans le temps de l’organisation interne du système (Minuchin, 1985). Par exemple, la transition de l’enfant à l’adolescence est un changement qui arrive à l’intérieur du système. L’auto-stabilisation adaptative du système permet à la famille de se réorganiser en fonction des changements internes ou externes. Cependant, Minuchin (1985) suggère que dans des familles dysfonctionnelles, le processus d’autorégulation peut amener à des comportements mal adaptatifs lorsque ces mécanismes régulateurs empêchent le changement. Dans ce cas, les familles sont qualifiées comme inflexibles et rigides lorsqu’elles maintiennent des rôles et des règles strictement définies. En effet, une autre condition nécessaire pour qu’un système soit ouvert est le changement. Pour pouvoir s’adapter à une situation nouvelle, le système met en œuvre des feed-back négatifs qui permettent à la famille de retrouver son état d’équilibre en fonction des demandes de l’environnement. Par exemple, lorsqu’un enfant de 18 mois ne veut plus que ses parents lui donnent le yogourt à la bouche, mais il veut prendre la cuillère tout seul, car il a le désir de s’affirmer. Ainsi, les parents doivent s’adapter à ce changement développemental pour favoriser l’autonomie de l’enfant. L’exploration des alternatives et la réorganisation du système en fonction des circonstances qui ont changées amène à une évolution progressive du cycle de vie familiale. L’équilibre entre la stabilité et le changement détermine le fonctionnement optimal familial. Pour se développer, la famille doit rester stable tout en étant capable de s’adapter. Pour cette raison le fonctionnement familial répond également au principe d’homéostasie.

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2.4.1 La théorie de l’encadrement

Nous considérons la famille selon la théorie de l’encadrement, qui a été développée par Fivaz- Depeursinge, Fivaz et Kaufmann en 1982. Ce modèle distingue deux sous-systèmes dans l’évolution du système familial : le sous-système parental comme le système encadrant et l’enfant comme système encadré. Selon cette théorie, le système encadrant a la fonction d’assurer l’encadrement et l’évolution du système encadré. Dans le cas de la famille, le but de la relation entre le système encadrant et celui encadré est de favoriser le développement du système encadré, l’enfant, l’amenant progressivement vers l’autonomie (Fivaz-Depeursinge et al., 1982). Les deux sous-systèmes familiaux ont des fonctions différentes. D’un côté les parents doivent faciliter et guider leur enfant vers l’autonomisation, et de l’autre côté, l’enfant, en retour, communique son état aux parents et les oriente pour assurer leur rôle éducatif. Afin de créer un contexte favorable au développement de l’autonomie de l’enfant, les parents doivent adapter leurs comportements en fonction des capacités de l’enfant (Fivaz- Depeursinge et al., 1982). Les deux sous-systèmes sont en asymétrie puisque le système encadrant possède des connaissances et des compétences dont le système encadré ne dispose pas. Il s’agit d’un modèle qui s’applique non seulement au système familial, mais également à tous les systèmes ayant pour fonction l’encadrement. Par exemple, le thérapeute et son patient ou l’enseignant et son élève. De manière générale, les deux sous-systèmes doivent se coordonner pour accomplir leurs tâches respectives.

2.5 L’alliance familiale

Le concept d’alliance familiale a été élaboré par Fivaz-Depeursinge et al. (1982) à partir du niveau de coordination entre le système encadrant et le système encadré. Plus particulièrement, ce concept correspond à la capacité de la famille à se coordonner et à créer un contexte favorable de communication à trois. Cette capacité permet à la famille de se coordonner pour réaliser une tâche. L’alliance familiale est caractérisée, d’une part, par la solidarité et la coopération entre les parents composant le système encadrant, qui arrivent à remplir leur rôle à travers leurs pratiques coordonnées, d’autre part, par la motivation de l’enfant à communiquer, permettant aux parents d’ajuster progressivement leur encadrement.

À travers l’alliance familiale, nous allons examiner le contexte familial multi personnes et évaluer la capacité de la famille à se coordonner pour accomplir une tâche. En effet, elle est

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considérée comme une propriété des interactions de la triade père-mère-enfant. Nous considérons que l’alliance familiale est révélatrice du fonctionnement de la famille, puisqu’elle met en évidence différents aspects de la communication au sein de la famille.

Reiss (1989, in Favez et al., 2006) affirme que la famille régule le développement et le bien- être psychologique de l’enfant à travers les pratiques coordonnées de tous les membres.

L’alliance familiale s’observe dans toutes les activités de la vie quotidienne impliquant la mère, le père et l’enfant, par exemple, dans les repas, dans les moments de jeux ou dans les moments de stress. L’alliance familiale se base sur quatre fonctions d’interaction de la relation à trois. Il s’agit de quatre dimensions constituant les aspects structurels des interactions : participation, organisation des rôles, focalisation et contact affectif. L’alliance dépend de ces quatre fonctions qui sont essentielles à la communication d’une triade. Ces fonctions sont hiérarchiquement emboîtées puisque chacune est nécessaire pour l’accomplissement de la suivante (Favez et al., 2009). La participation permet de vérifier si tous les partenaires présents sont inclus dans le jeu ou si l’un ou l’autre en est exclu. Des problèmes se posent si pendant l’interaction familiale un parent regarde ailleurs manifestant peu d’intérêt pour l’activité des autres. La deuxième fonction qui se met en place est l’organisation des rôles. Cette fonction concerne la manière dont les partenaires se positionnent et s’orientent en fonction de l’activité spécifique à réaliser. Des problèmes se posent, par exemple, lorsque un parent interfère sur l’activité de l’autre parent. La focalisation se réfère à la capacité de la famille à partager un centre d’intérêt commun autour de la tâche.

Des problèmes se posent, par exemple, lorsque le père propose une chanson à l’enfant et la mère au lieu de chanter s’oriente vers un autre jouet. Plus spécifiquement, d’une part elle reflète la manière dont les parents se coordonnent pour structurer le jeu et, d’autre part, l’aptitude des parents à offrir un cadre et des stimulations adaptées à l’âge et aux capacités de l’enfant. D’abord, pour évaluer la co-construction du jeu, il faut observer si chaque partenaire contribue à l’évolution de l’activité. Ensuite, il faut évaluer si l’attitude des parents assure l’encadrement de l’enfant. Plus précisément, si les parents proposent à l’enfant des activités qui correspondent à ce qu’il peut faire et comprendre. Enfin, la dernière fonction est la chaleur et le contact affectif. Cette dimension se réfère au partage d’affects entre les membres de la famille. Elle permet de vérifier si tous les membres de la famille sont affectivement en contact les uns avec les autres. Cette fonction témoigne également d’un climat affectif familial chaleureux et des affects positifs partagés par tous les partenaires présents. Ils échangent des affects congruents avec la situation expérimentée et cohérents avec le climat affectif partagé. De même, cette fonction permet d’analyser si les parents sont attentifs aux

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signaux émotionnels de leur enfant et les interprètent adéquatement. Lorsque la famille a respecté les quatre fonctions d’interaction l’alliance familiale est qualifiée comme coopérative. Par conséquent, plus les quatre fonctions d’interactions sont remplies plus le niveau de coopération de l’alliance familiale est élevé.

La figure suivant de Lavanchy Scaiola, Favez, Tissot, & Frascarolo (2008) illustre le modèle hiérarchique des fonctions d’interaction de l’alliance familiale.

Figure 1. Modèle de l’alliance familiale.

2.6 Les caractéristiques individuelles de l’enfant et du couple co-parental

Dans notre travail nous avons également considéré les caractéristiques individuelles de l’enfant concernant son tempérament. Par ailleurs, nous nous sommes aussi intéressés à la vie du couple co-parental concernant la satisfaction conjugale. Nombreux travaux (Favez et al., 2009, Allen et al., 2008) ont montré que ces deux variables sont liées aux relations familiales.

Plus spécifiquement, Favez et al. (2006) ont mis en évidence que le tempérament de l’enfant est lié à l’alliance familiale. En effet, plus le tempérament de l’enfant est difficile, moins l’alliance familiale est coopérative. En outre, le conflit conjugal influence négativement le fonctionnement des relations au sein de la famille (Favez et al., 2009). D’ailleurs, l’étude d’Allen et al. (2008) a mis l’accent sur le lien entre la satisfaction conjugale et la capacité de

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mentaliser. Plus précisément, ils suggèrent que le stress au sein du couple est lié à une capacité de représentation des états mentaux moins élevée. Pour cette raison, ces deux concepts pourraient avoir une influence sur le lien entre la mentalisation triadique des parents et l’alliance familiale.

3. Problématique et hypothèse

3.1 Problématique et objectifs du travail

Les différentes études sur la mentalisation maternelle (Koren-Karie et al., 2002;

Grienenberger et al., 2005; Meins et al., 2001; Slade et al., 2005), que nous avons passées en revue, s’accordent toutes sur le fait que les capacités mentalisantes de la mère sont en lien avec le niveau de collaboration mère-enfant. Cependant, la mentalisation paternelle n’a pas encore été étudiée, même si le père fait souvent partie de l’environnement social de l’enfant et influence son fonctionnement. Pour cette raison, le premier objectif de ce travail est d’explorer la mentalisation de la mère et aussi celle du père au niveau de la triade familiale.

Nous utilisons comme indicateur de cette mentalisation à trois la fonction réflexive inter- parentale. En effet, la fonction réflexive inter-parentale nous renseigne sur comment la mère et le père se représentent la relation entre leur conjoint et l’enfant.

Ensuite, les recherches sur les relations de la triade familiale se sont centrées surtout sur les comportements et peu sur « l’état d’esprit » des membres de la famille. Dans le but de mieux comprendre l’influence de la mentalisation sur les relations familiales, le deuxième objectif est de tester l’hypothèse de Fonagy et al. (2002) étudiant le lien entre la fonction réflexive inter-parentale et le niveau de collaboration des trois membres de la famille. Nous utilisons comme indicateur de cette collaboration triadique l’alliance familiale. En effet, l’alliance familiale nous renseigne sur comment le système familial structure ses interactions. Pour cette raison, notre regard portera sur l’étude de la famille en tant qu’unité, en observant les interactions de la triade mère-père-enfant. Ainsi, nous avons étudié dix familles tout-venant, composées par la mère, le père et un enfant d’âge compris entre 18 et 24 mois.

Enfin, au niveau pratique les objectifs de la recherche sont de transcrire verbatim les entretiens, d’apprendre le système de codage de la fonction réflexive et de suivre une formation pour l’attribution des scores aux transcriptions des entretiens.

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3.2 Hypothèse générale

Nous supposons que la mentalisation triadique de la mère et du père corrèle positivement avec le niveau de collaboration de la triade père-mère-enfant. Ceci signifie que nous nous attendons que plus la mentalisation triadique de la mère et du père est élevée plus le niveau de collaboration à trois est élevé.

4. Méthode

4.1 Population

Pour notre recherche, 10 familles tout-venant ont été recrutées dans les cantons de la Suisse romande et dans la France voisine. Chaque famille est formée par la mère, le père et un enfant d’âge compris entre 18 et 24 mois. Les parents, pouvant avoir des origines diverses, maîtrisent bien la langue française et habitent dans le même foyer. Plus spécifiquement, l’âge moyen des mères est de 31.63 ans et l’écart-type de 5.99 ans. L’âge moyen des pères est de 35.58 ans et l’écart-type de 7.06 ans. Les enfants des familles que nous avons analysées sont 4 filles et 6 garçons. Donc, la répartition du genre des enfants est presque équivalente. L’âge moyen des enfants est de 1.68 ans et l’écart-type de 0.16 ans.

4.2 Procédure

Les parents ont reçu un formulaire d’information concernant les objectifs et le déroulement de l’étude, en précisant que toutes les données sont soumises au secret professionnel et restent totalement anonymes. De plus, les parents peuvent à tout moment, pendant ou après les rencontres, changer d’avis et interrompre leur participation. À travers le formulaire de consentement, les parents ont certifié qu’ils acceptent de participer à l’étude, recevant un montant de 70.- chf pour leur participation et également pour leurs enregistrements des situations de jeu.

La récolte de données de la recherche combine deux ensembles de mesures : une situation d’observation portant sur les interactions de la triade évaluées en termes d’alliance familiale et des entretiens individuels portant sur l’évaluation de la fonction réflexive inter-parentale.

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Ainsi, le même expérimentateur a rencontré deux fois chaque famille avec un intervalle de temps d’environ 2-4 semaines. De plus, chaque parent a rempli deux questionnaires évaluant le tempérament de l’enfant et la satisfaction conjugale.

4.3 Instruments

4.3.1 Lausanne Trilogue Play (LTP)

Dans la première rencontre, les familles participent à un jeu familial, appelé le Lausanne Trilogue Play (LTP, Corboz-Warnery, Fivaz-Depeursinge, & Bettens, 1993, in Fivaz- Depeursinge et al., 1998) afin d’évaluer l’alliance familiale. Il s’agit d’une situation d’observation des interactions familiales semi-structurée qui met en scène le père, la mère et l’enfant, dont la durée est d’environ 12-15 minutes. Concrètement, les parents et leur enfant sont réunis pour jouer ensemble et pour partager un moment ludique à trois. Le jeu familial se déroule dans une salle du laboratoire du Centre d’Etude de la Famille de Lausanne. Dans une salle adjacente il y a une régie, où se trouve l’équipement technique qui permet de filmer l’ensemble du jeu. Le matériel d’enregistrement comprend deux caméras. L’une filme les parents de trois-quarts, de la tête aux genoux, tandis que l’autre filme l’enfant en gros plan de face. Les deux enregistrements sont synchronisés par un chronomètre commun et codés séparément.

La situation d’observation directe a lieu après un moment d’accueil dans la salle du laboratoire. Une fois que la famille se dispose sur les chaises, le chercheur invite la famille à jouer ensemble, comme d’habitude, en suivant un scénario en quatre parties. La consigne suivante est donnée : « Nous allons vous demander de jouer en famille avec X. Essayez de faire comme vous faites d’habitude. Le jeu se déroulera en quatre parties. Pendant la première partie, l'un de vous joue avec X et l'autre est simplement présent. On a tiré au sort et c'est à vous Monsieur (Madame) de commencer si vous voulez bien. C’est donc vous, Monsieur (Madame) qui commencez à jouer avec X, vous essaierez de faire faire au bébé ce qu'il/elle sait faire d'habitude avec vous, pendant que vous Madame (Monsieur) resterez tout simplement présent(e). Deuxième partie, après quelques minutes, comme vous le sentez, vous changerez les rôles et c'est Madame (Monsieur) qui jouera avec X pendant que Monsieur (Madame) sera simplement présent(e). Après quelques minutes, vous passerez à la troisième partie, où vous jouerez les deux ensemble avec X pendant quelques minutes. Et enfin, pendant

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la quatrième et dernière partie, vous discuterez entre vous et c’est X qui joue de son côté. Vous prenez votre temps, c'est vous qui décidez le passage d'une partie à l'autre. En général, ça peut prendre entre 10 et 15 minutes. Vous pouvez commencer dès que vous êtes prêts. Moi, je serai là derrière la vitre. Vous m'appelez ou vous me faites signe dès que vous avez fini ou s'il y a un problème ». Le chercheur indique quel parent doit commencer le jeu afin de pouvoir contrebalancer un effet d’ordre possible. Plus spécifiquement, la moitié des familles commencent le jeu avec le père qui joue avec l’enfant et l’autre moitié des familles avec la mère. L’ensemble du jeu est filmé afin d’évaluer les interactions de la triade père- mère-enfant par observation systématique.

Le setting du jeu se compose d’une table ronde et trois sièges déterminés, placés par l’expérimentateur, formant un triangle équilatéral à une distance proche qui favorise l’interaction et le dialogue entre les membres de la famille (Frascarolo et al., 2009). La figure 2 donne une vue aérienne de l’installation.

Figure 2. Vue aérienne du setting du LTP.

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Cet arrangement donne la possibilité à chaque partenaire de percevoir ce que font les autres et facilite l’échange affectif. Ce contexte permet également de mettre en évidence les positions corporelles des partenaires. Plus spécifiquement, l’enfant est assis sur une chaise haute autour de la table avec ses parents, sur laquelle plusieurs jouets ont été positionnés. Les jouets se composent de 3 chaussettes, 3 cuillères et 3 figurines Playmobil et 8 pièces de construction Duplos. Ces jouets ont été choisis pour stimuler les jeux au niveau symbolique et pour inciter à une co-construction des activités. Malgré le fait que les parents reçoivent des instructions précises signalant de ne pas bouger leurs sièges, ils peuvent se tourner sur leur chaise, dont la surface est lisse et plate. Une fois que la famille est assise, l’expérimentateur invite la famille à jouer ensemble comme d’habitude. La tâche est présentée à la famille comme un jeu, invitant à développer l’aspect ludique de la situation et à avoir du plaisir ensemble. Le LTP est divisé en quatre parties qui reflètent les quatre configurations qui existent dans la relation à trois de tous les jours (Favez et al., 2009). La figure 3 illustre les quatre parties du jeu familial.

Figure 3. Les quatre parties du LTP.

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Dans la première partie, l’un des parents joue avec l’enfant pendant que l’autre est simplement présent, puis dans la deuxième partie, les parents inversent leurs rôles. Ensuite, au cours de la troisième partie, les deux parents jouent avec l’enfant et dans la quatrième partie, les deux parents discutent ensemble pendant que l’enfant est en position de tiers (Fivaz- Depeursinge et al., 1998; Frascarolo et al., 2009; Favez et al., 2009). Chaque partie est clairement spécifiée et définit le rôle actif ou d’observateur des partenaires (Fivaz- Depeursinge et al., 1998). Néanmoins, il revient aux parents de décider combien de temps dure chaque partie (Fivaz-Depeursinge et al., 1998).

Pour notre hypothèse de recherche, la 3ème partie du LTP sera mise en rapport avec le score de la RF inter-parentale du FaCI. En effet, l’objectif du LTP est l’observation et l’évaluation de différents aspects de la communication au sein de la famille (Frascarolo et al., 2009). Cette situation permet d’observer comment la famille gère les quatre configurations, que ce soit dans les moments de plaisir où ils réalisent le but du jeu, mais aussi dans les inévitables moments d’incertitudes (Fivaz-Depeursinge, 2003). Plus spécifiquement, l’expérimentateur s’intéresse à l’alliance familiale, reflétant comment la famille se constitue en équipe pour réaliser la tâche. L’observateur se base principalement sur la coordination triadique et les processus qui se déroulent au niveau de la famille. En effet, le changement d’une partie à l’autre du jeu familial permet de tester comment la famille négocie les transitions et se réorganise lors de chaque partie du LTP (Favez, 2009).

4.3.2 Family Alliance Assessment Scale (FAAS)

Le interactions familiales sont ensuite codées à l’aide du Family Alliance Assessment Scale (FAAS, Lavanchy Scaiola et al., 2008) par un codeur différent de celui qui a administré le LTP. Le FAAS est un système de codage qui permet d’évaluer les interactions entre les membres de la famille en termes d’alliance familiale. Plus spécifiquement, le codeur évalue le degré de coordination avec lequel la famille accomplit la tâche afin d’obtenir une mesure de la collaboration triadique (Favez et al., 2009). Le codage de l’alliance familiale est fait à partir d’enregistrements vidéo où l’on voit de face les parents et l’enfant. Le FAAS permet d’évaluer les interactions familiales à travers cinq fonctions différentes. Plus spécifiquement, quatre fonctions sont relatives aux aspects structurels des interactions, à savoir la participation, l’organisation des rôles, la focalisation et la chaleur et le contact affectif. La

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