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Considérations le projet de Code

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(1)

Ste ANNEE - No 4541

HEBDOMADAIRE JUDICIAIRE Edmond Picard

11132. 1899

Léon :Hennebieq 1900. 1940 Charles Van Reepinghen

1944-1966

Considérations le projet de Code

Je souhaite vous entretenir aujourd'hui d'une réforme appelée à avoir sur l'administration de la justice une influence profonde et à lu~

donner une nouvelle jeunesse.

Pourquoi faut-il que cette jeunesse soit assombrie par la mort de celui qui, de toutes les richesses de son esprit, avec ardeur, élan, patience aussi, s'est attaché à la créer? Au moins le bâtonnier Charles V an Reepinghen a-t-il eu, en quittant ce monde, la consolation et la fierté que l'œuvre. juridique la plus im- portante de sa vie était achevée. On songe au jeune savant Champollion qui, ayant découvert le secret des hiéroglyphes, remit à son frère, au moment de mourir, la grammaire égyp- tienne qu'il venait de terminer et dit : « Voici ma carte de visite pour la postérité ».

L'étude du nouveau Code judiciaire exigera de longues heures et de tenaces efforts. Cette tâche sera toutefois moins lourde pour la cour que pour les autres juridictions, grâce au concours de M. l'avocat général Krings, qui fut, comme l'écrivait le bâtonnier Van Ree- pinghen (1), son collaborateur non seulement permanent, mais de chaque heure, qui est le dépositaire de sa pensée et lui a succédé dans la charge de commissaire royal.

Min de ne pas abuser de votre patience, je me bornerai à quelques réflexions sur cer- taines dispositions contenues dans la première partie du projet de Code judiciaire, intitulée

«Principes généraux,., ainsi que sur les prin- cipales modifications apportées, par ce projet, à la composition de la cour, aux attributions de celle-ci, et à ;; · ., :-.éd ure de cassation.

1. - Dès l'article 1er (2) se révèle un heu- reux souci de clarté et de méthode : « le pré-

(*) Discours prononcé par M. Raoul Hayoit de Ter- micourt, procureur général près la Cour de cassation, à l'audience solennelle de rentrée du t-er septembre 1966.

(1) Rapport sur la réforme judiciaire (Doc. pari., Sénat, session 1963-1964, n° 60, p. 1).

(2) Dans le projet de loi préparé par le commissaire royal (Doc. pari., Sénat, session 1963-1964, n° 60), l'article ter de la loi contenait le Code judiciaire (art. ter à 1675) et des dispositions complémentaires groupées dans des articles numérotés 1 à 183; pour se référer à un article du Code judiciaire ou à un article des dispositoins complémentaires, il suffisait donc d'énoncer : article . .. du Code judiciaire ou article ...

des dispositions complémentaires du Code judiciaire.

Le texte, tel qu'il a été modifié par les commissions du Sénat- commissions de la Justice, de l'Emploi, du Travail et de la Prévoyance sociale - divise les dis- positions complémentaires en : a) annexe au Code ju- diciaire, comprenant six articles numérotés 1 à 6;

b) dispositions abrogatoires, comprenant 34 articles et insérées dans l'article 2 du projet de loi; c) dispositicns modifiant des dispositions législatives, comprenant 161 articles et insérées dans l'article 3 du projet de loi.

Il s'ensuit, pour ne prendre que deux exemples, que tandis que, suivant le projet de loi préparé par le commissaire royal, l'article 595 du Code de commerce était modifié par «l'article 53 des dispositions com- plémentaires du Code judiciaire», ledit article 595 est,

sent code régit l'organisation des cours et tribunaux, la compétence et la procédure ».

Si la dénomination e: Code judiciaire» n'est pas sans précédent historique, puisque l'article 90 de la loi du 27 ventôse an VIII annonçait

«la formation du Code judiciair~ (3) ~,l'idée

de grouper en un code unique tant les disposi- tions légales relatives à la procédure que celles qui concernent l'organisation judiciaire et éta- blissent les règles de la compétence des diver- ses juridictions, n'est pas davantage nouvelle.

Déjà, lors de l'élaboration du Code de procé- dure civile, le tribunal de cassation et plusieurs tribunaux d'appel avaient demandé que les règles relatives à l'organisation judiciaire et à la nature des actions fussent « expliquées ou au moins résumées dans un livre préliminaire »

(4). En 1841, le procureur général Mathieu Leclercq, devenu ministre de la Justice, souli- gnait à son tour que la compétence « se ratta- che à tout notre système d'organisation judi- ciaire et à notre système de procédure » (5).

Quelques années plus tard Chauveau (6) ensei- gnait que «la science de la procédure s'étend à tout ce qui compose l'administration de Ja justice, à la juridiction des différents tribu- naux, à leur compétence ». On ne s'étonnera donc point que, lorsque le législateur a voulu énoncer, de manière complète et précise, les règles relatives à la compétence en matière civile et commerciale, il les ait insérées dans un livre préliminaire du Code de procédure civile (loi du 25 mars 1876). L'organisation judiciaire demeura toutefois réglée par des lois distinctes.

suivant le projet voté par le Sénat, modifié par « l'ar- ticle 35 contenu dans l'article 3 de la loi contenant le Cbde judiciaire». De même, tandis que pour faiœ référence à la disposition qui modifie l'article 12 de la loi du 19 mai 1949 créant l'Ordre des pharmaciens, il suffisait, suivant le projet initial, d'énoncer «article modifié par l'article 50 des dispositions complémen- taires du Code judiciaire», il faudra dire, suivant le projet voté par le Sénat, « article modifié par l'ar- ticle 32 contenu dans l'article 3 de la loi contenant le Code judiciaire». Le projet de loi contient en outre, en son article 4, des dispositions transitoires, dont l'examen avait été réservé par le commissaire royal, dans l'attente de la suite donnée par les Chambres législatives au projet d~ Code judiciaire.

(3) La doctrine moderne fait I)lention tant6t du

«Droit judiciaire» (Ripert et Boulanger, Traité ae droit civil, t. I, n° 165), tantôt du «Code de droit judiciaire privé » (Solus et Perrot, Droit judiciaire privé, t. I, n° 37bis).

(4) Boitard, Leçons de procédure civile, complétées par Colmet-Daàge, t. I, p. 4. Cette demande était d'autant plus justifiée que l'article 59 du Code de procéqure civile - article qui fut abrogé par la loi du 25 mars 1876 - énonçait, à propos des ajournements, quelques dispositions fragmentaires relatives à la com- pétence et faisant allusion, en ce qui concerne la na- ture des actions, à la matière « personnelle », à la matière « réelle » et à la matière «mixte ».

(5) Pasinomie, 1841, p. 67, col. 2.

(6) Lois de la procédure civile. Carré annoté par Chauveau, 1846; t. I, p. VU. Voy. de même Japiot, Traité élémentaire de procédure civile, . p. 1.

17

1~66

EDITEURS:

MAISON FERD. LARCIER, S. A.

39, rue des Minimes BRUXELLES l

Le nouveau code est donc la réalisation de ce qui avait été antérieurement souhaité, mais vainement tenté. Sans doute le bâtonnier Van, Reepinghen considérait-il qu'il eût été cr rai- sonnable ,. (7) de comprendre aussi dans ce code les règles relatives à la compétence et à la procédure en matière répressive (8). Mais si généraux qu'en fJissent les termes, la mission conférée au commissaire royal à la réforme judiciaire (9) fut nécessairement limitée par la désignation d'un commissaire royal à la ré- forme de la procédure pénale (10).

2. - ·Est-ce à dire ·que les dîspositions du Code judiciaire (11) relatives à la compétence et à la procédure, soient sans incidence sur les causes ressortissant aux juridictions pénales 'l La réponse à cette question dépend de la portée qui doit être reconnue à l'article 2 du Code judiciaire.

Suivant cet article, « les règles énoncées dans le présent code s'appliquent à toutes les procédures, sous réserve de l'application des dispositions légales non expressément abro- gées». Ce qui, si l'on s'en tient au sens usuel des termes de ce texte, signifie que, pour qu'une règle énoncée par le Code judiciaire ne soit pas applicable à une procédure détermi- née, il faut . qu'elle soit contredite ou que la procédure soit différemment organisée soit par une disposition légale antérieure, non expres-

(7) Rapport sur la réforme judiciaire (Doc. parl ..

Sénat, session 1963-1964, n° 60, p. 15). Les commis- sions du Sénat ont, d'ailleurs, exprimé le souhait qu'après l'adoption de la réforme de la procédure pé- nale « les dispositions nouvelles soient intégralement reprises dans le Code judiciaire» (Doc. pari., Sénat, session 1964-1965, n° 170, p. 22).

Sous réserve de deux dispositions de compétence (art. 586, 1 o, et 606, 1 °), ne sont pas non plus con- tenues dans le Code judiciaire, les dispositions relatives à l'arbitrage. Le Code de procédure civile est, en effet, abrogé « à l'exception des articles 1003 à 1028, étant entendu qu'est nul de plein droit tout engage-- ment contracté avant la naissance d'une contestation et tendant à soumettre à une décision arbitrale les contestations dont le tribunal du travail connaît en exécution des a1·ticles 578 à 583 du Code judiciaire » (art. 13, 2°, contenu dans l'art. 2 du projet de loi).

La raison pour laquelle l'arbitrage n'est pas régle- menté par le Code judiciaire est que «à l'échelon international la matière de l'arbitrage en droit privé subit un réexamen total» et qu'il convient d'attendre l'achèvement de ce réexamen, « lequel est appelé à influencer profondément les législations internes » (Rapport du commissaire royal, Doc. parl., Sénat, session 1963-1964, n° 60, p. 15).

(8) Le Code judiciaire contient, en revanche, les règles relatives à l'organisation judiciaire, y compris l'organisation des juridictions répressives.

(9) Arrêté royal du 17 octobre 1958 (Moniteur, 22 oct. 1958, p. 7876).

(10) Arrêté royal du 12 juillet 1962 (Moniteur, 16 juill. 1962, p. 5990). Aux termes de l'article 2 de cet arrêté royal, le commissaire royal est chargé de prée senter au gouvernement, à l'intervention du ministre de la Justice: 1° des avant-projets de loi réformant l'instruction criminelle et en particulier l'organisation et l'exercice des fonctions de police judiciaire, la compétence en matière pénale, les règles de procédure à suivre devant les juridictions d'instruction et de juge- ment; 2° des avant-projets d'arrêtés d'exécution de ces réformes.

(11) Il s'agit évidemment des dispositions du Code judiciaire proprement dit. Les articles 2 et 3 du projet de loi contenant ce code, en effet, abrogent, modifient ou complètent diverses dispositions du Code d'instruc- tion criminelle et même du Code pénal.

(2)

sément abrogée, soit par un disposition légale postérieure (12).

Les mots « sous réserve de l'application des

· dispositions légales non expressément abro~

gées » ont été, à l'initiative des commissions de la Justice, de l'Emploi, du Travail et de la Prévoyance sociale, du Sénat, substitués aux termes du projet de loi « à moins que la loi n'en dispose autrement ». Les commissions ont entendu éviter que l'article 2 ne fût interprété comme abrogeant, même tacitement, des dis- positions contraires de lois antérieures. Furent citées par les commissions (13), les dispositions particulières de compétence et de procédure contenues dans. la législation sur les baux à ferme, sur les baux commerciaux et sur l'ex- propriation pour 'cause d'utilité publique. Pa- reille abrogation tacite ne peut davantage être admise en ce qui concerne les dispositions de compétence ou de procédure contenues dans le Code pénal (14), le Code d'instruction cri- minelle (15), les lois sur les impôts ·directs ou dans d'autres lois particulières (16).

(12) Il va de soi qu'une règle établie par une dispo- sition du Code judiciaire, mais que celle-ci limite en termes exprès à la matière civile, n'est applicable qu'à la matière civile ou aux matières assimilées à la ma- tière civile (voy. notamment les art. 478, 480, 645, 682 et 1118 du Code judiciaire). Il ressort aussi du texte de certaines dispositions de compétence ou de procédure du Code judiciaire que celles-ci ou bien ne sont pas applicables en matière répressive (p. ex. l'art. 27, al. 2) ou bien ne sont que partiellement applicables en cette matière (p. ex. l'art. 1132).

(13) Doc. pari., Sénat, session 1964-1965, n° 170, p. 23.

(14) Par exemple la règle de compétence établie par l'art. 495, al. 2, du Code pénal, disposition qui n'est ni abrogée ni modifiée.

(15) A titre d'exemples :

a) les articles 1079, 1080 et 1081 du Code judiciaire sont sans application en matière répressive en rai- son des articles 417, 418 et 422 du Code d'instruc- tion criminelle, dispositions non abrogées;

b) de même, l'article 438 du Code d'instruction cri- minelle n'étant pas abrogé, l'article 1082, alinéa 3, du Code judiciaire, qui autorise la réitération d'un pourvoi rejeté pour le motif qu'il avait été préma- turément formé, ne pourra recevoir application en cas de pourvoi contre une décision rendue par une juridiction répressive;

c) l'alinéa l'er de l'article 1110, disposant «lorsque la cassation est prononcée avec renvoi, celui-ci a lieu devant une juridiction souveraine du même rang que celle qui a rendu la décision attaquée» n'est applicable, en matière répressive, que sous réserve des exceptions apportées à l'article 427 du Code d'instruction criminelle par les articles 408, 413 et 429 de ce code;

d) l'article 1115 du Code judiciaire, aux termes duquel

« les arrêts de cassation ne peuvent être exécutés qu'après avoir été signifiés à la partie, à peine de nullité de l'exécution », n'est pas applicable en ma- tière répressive, parce que, d'une part, il ressort de l'article 427 du Code d'instruction criminelle que le

·juge de renvoi est saisi de droit par l'arrêt de ren- voi (Cass., 15 janv. 1900, Bull. et Pas., 1900, I, 97) et, d'autre part, les articles 531, 532, 538 et 548 du même code déterminent les arrêts de la cour qui, en matière répressive, doivent être signifiés. D"ail- leurs, dans son rapport (p. 257), le commissaire royal relève que l'article 1115 est la reproduction de l'article 22bis inséré, par l'article 2 de la loi du 23 octobre 1950, dans la loi du 25 février 1925;

·or, cette dernière loi concerne «la procédure en cassation en matière civile»;

e) les demandes de renvoi pour cause de suspicion lé- .. gitinie ou de sûreté publique sont, en matière ré- pressive, régies non par les articles 650 et suivants du Code judiciaire, mais par les articles 542 à 552, non abrogés, du Code d'instruction criminelle;

f) citons encore- l'article 812 du Code judiciaire :

« L'intervention peut avoir lieu devant toutes les juridictions, quelle que soit la forme de la procé- dure ... ». Cette disposition, malgré la généralité de ses termes, ne concerne ·pas la matière répressive, les articles 63, 67, 152, 153 et 182 du Code d'in- struction criminelle indiquant les seules personnes qui peuvent être parties devant les juridictions ré- pressives (è:ass., 8 avr. 1935, Bull. et Pas., I, 218;

...: 24 mars 1947, ibid., I, 123; - 21 août 1958, ibid., I, 1243), sauf disposition particulière déroga- toire (L., ter juill. 1956, art. 9).

Ajoutons que, même en matière civile, l'article 812 ne peut être appliqué à l'instance en cassation que dans certaines limites. Ainsi un tiers - c'est-à-dire celui qui n'a pas été partie à la décision attaquée - n'est pas

En revanche, là où, à défaut de disposition dans le Code d'instruction criminelle ou dans une autre loi, étrangère à la matière civile (17), la jurisprudence, conformément d'ailleurs à l'enseignement de la doctrine," faisait applica- tion du Code de procédure civile, le Code judi- ciaire se substituera à celui-ci. Ainsi le mode de calcul des délais pour accomplir un acte de procédure, établi par l'article 1033 du Code de procédure civile, était appliqué en matière répressive, dans la mesure où soit le Code d'instruction criminelle, soit une loi pénale particulière ne l'avait point déterminé (18). A l'avenir les article:.; 52 à 54 du Code judiciaire seront, dans la même mesure, pris en considé- ration. Ce seront aussi, non plus les articles 44 à 47 ou 378 à 396 du Code de procédure civile, mais les articles 828 à 847 du Code judi- ciaire, qui régiront la récusation d'un juge d'une juridiction répressive ou d'une juridiction disciplinaire.

3. - Parfois, à défaut de disposition dans une loi particulière, la jurisprudence, bien que cette loi ne fût pas une loi pénale, faisait appli- cation non du Code de procédure civile ou d'une disposition le complétant, mais du Code d'instruction criminelle. Pour déterminer le caractère définitif ou non définitif, au regard de la recevabilité d'un pourvoi, d'un arrêt ren- du par la cour d'appel en matière d'impôts directs, la cour se référait, non à l'article 14 du décret du 2 brumaire an IV - disposition reprise et précisée (19) dans l'article 19 du Code judiciaire - mais à l'article 416 du Code d'instruction criminelle (20). Cette juris- prudence est fondée sur la considération que, bien que la matière des impôts directs « se rapproche de la matière civile», les affaires auxquelles elle donne lieu «touchent à l'ordre public )> et sont « distribuées à la seconde chambre», si bien que «par affinité il y a lieu de suivre la règle de l'article 416 du Code d'instruction criminelle » (21). En matière dis- ciplinaire aussi, alors même que la loi ne se référait pas, en ce qui concerne les délais du pourvoi, aux règles applicables en matière pénale, la cour à décidé qu'il y avait lieu de se conformer à l'article 416 du Code d'instruc- tion criminelle « le pourvoi étant de la com- pétence de la seconde chambre de la cour »

(22).

recevable à intervenir devant la cour et ne peut da- vantage y être appelé en intervention. La mission de la cour est, en effet, de contrôler la légalité de la dé- cision rendue·· entre parties par le juge du fond et à elle déférée par l'une de celles-ci. Il ne lui appartient donc pas - et les articles 1084 et 1100 du Code judi- ciaire le confirment - de connaître d'une demande par laquelle un tiers prétend devenir partie à la cause déjà jugée par le juge du fond ou par laquelle une partie entend contraindre un tiers à devenir partie à cette cause.

(16) Ainsi, bien que l'article 1082, alinéa 2, du Code judiciaire interdise à la partie, sur le pourvoi de la- quelle il a été statué, de se pourvoir à nouveau, sous la réserve de l'alinéa 3, contre la même disposition, cette interdiction ne peut faire échec à l'application de l'article 40, alinéas 4 et 5, de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire, com- plétée par la loi du 8 mars 1948. ·

(17) Dans le présent exposé, l'expression «matière civile » comprend à la fois les causes civiles propre- ment dites, les causes commerciales et les causes res- sortissant aux juridictions du travail.

(18) Cass., 5 sept. 1957 (Bull. et Pas., I, 1386).

(19) La précision énoncée dans le texte de l'article 19 du Code judiciaire est d'ailleurs conforme à l'interpré- tation que la cour a donnée de l'article 14 du décret du 2 brumaire an IV (Conclusions du ministère public avant Cass., 6 févr. 1930, Bull. et Pas., I, 87; - 23 avr. 1931, ibid., I, 141; - la note sous Cass., 13 mai 1943, I, 177; - 29 sept. 1949, ibid., 1950, I, 43; - 20 oct. 19.55, ibid., 1956, I, 143; - 10 avr.

· 1959, ibid., I, 799; - 26 avr. 1962, ibid., I, 930, et 25 févr. 1965, ibid., I, 652).

(20) Jurisprudence constante voy. encore Cass., 29 janv. 1966 (Bull. et Pas., I, à sa date).

(21) Cass., 20 juin 1910 (Bull. et Pas., I, 354) et les conclusions du ministère public; - 14 juill. 1953 (ibid., I, 941) et 22 sept. 1953 (ibid., 1954, I, 35).

(22) Cass., 11 août 1943 (Bull. et Pas., I, 308); - 6 mai 1957 (ibid., I, 1062).

Cette argumentation ne sera désormais plus pertinente. D'une part, ainsi qu'il sera exposé ci-après (23), les pourvois contre les arrêts de cour d'appel en matière d'impôts directs ou contre les décisions rendues en matière disci- plinaire ne seront plus déférés par la loi à la seconde chambre, mais seront répartis entre les chambres de la cour par le premier prési- dent (Code judiciaire, art. 133); d'autre part, l'article 19 du Code ne fait aucune distinction entre les causes qui sont régies et celles qui ne sont pas régies par des dispositions d'ordre public. Dès lors, en vertu de l'article 2 du Code, le caractère définitif ou non définitif d'un arrêt rendu par la cour d'appel en matière d'impôts directs devra être apprécié conformé- ment à la règle établie par l'article 19 (24);

et cette règle sera applicable aussi aux déci- sions rendues en matière disciplinaire (25).

4. - L'application de l'article 2 du Code judiciaire, dans le texte admis par le Sénat, soulève toutefois une difficulté sérieuse. Des dispositions de ce code contredisent certaines règles que, en matière répressive, la juris- prudence a, sans texte légal les énonçant, dé- gagées de la nature particulière de l'action publique. Ces dispositions deviendront-elles applicablès en matière répressive ? J'exami- nerai, à titre d'exemples, quelques-unes d'entre elles.

Aux termes de l'article 870 du Code judi- ciaire « chacune des parties a la charge de prouver les faits qu'elle allègue». Appliquée.

à la matière répressive, cette disposition signi- fie notamment que, lorsque le prévenu allè- guera avoir commis le fait, qualifié infraction, dans des circonstances constituant la force majeure, ou encore prétendra réunir les con- ditions légales requises pour bénéficier d'une cause d'excuse, il devra prouver le fondement de ces allégations, et que, partant, celles-ci, en cas de doute, seront écartées par le juge.

Ce serait là un bouleversement (26) de nos conceptions sur l'exercice de l'action publique.

Certes, ainsi que le relèvent plusieurs arrêts de la cour, une allégation du prévenu, qui est dénuée de tout élément de nature à lui donner crédit (27), doit être rejetée; mais si l'alléga- tion a quelque pertinence et quelque vraisem- blance, il incombe à la partie poursuivante 'OU,

le cas échéant, à la partie civile de prouver qu'elle n'est pas fondée (28). On ne peut admettre que, bien qu'aucune disposition du Code d'instruction criminelle n'énonce la règle

<<l'accusé est présumé innocent», cette règle ne doive plus être entièrement respectée en raison de l'article 2 du Code judiciaire. A la vérité, les auteurs de ce code n'ont vu dans l'article 870 qu'une «formule plus générale et

(23) Voy. le n° 14 et la note 80.

(24) Il ·en sera de même pour les décisions rendues en matière de taxes communales ou provinciales di- rectes ou de taxes assimilées, et pour les décisions rendues en matière de milice. L'article 19 du Code judiciaire ne sera toutefois applicable tant à ces dé- cisions qu'aux arrêts de cour d'appel en matière d'im- pôts directs que s'ils sont rendus après l'entrée en vigueur du Code judiciaire (Cass., 30 juin 1961, Bull.

et Pas., I, 1201; - 18 oct. 1963, ibid., 1964, I, 180;

art. 6 contenu dans l'art. 4 du projet de loi).

Quant aux pourvois en matière électorale, ils reste·

ront régis par l'article 71 du Code électoral, dispo-

sition non abrogée. ·

(25) II ne pourrait en être autrement qu'à l'égard des décisions disciplinaires qu'une loi soumettrait, quant aux délais du pourvoi, aux règles applicables en ma·

tière répressive. Or, les dispositions légales particu- lières, ayant aujourd'hui cet objet, sont modifiées par l'article 32 contenu dans l'article 3 du projet de loi contenant le Code judiciaire.

(26) Réserve faite_ des cas exceptionnels où le juge répressif doit, en vertu de l'article 16 de la loi du 17 avril 1878, se conformer aux règles du droit civil pour statuer sur l'existence ou l'exécution d'un contrat, exécution à laquelle se rattache l'infraction.

(27) Voy. notamment Cass., 13 janv., 13 avr. et 11 mai 1964 (Bull. et Pas., I, 499, 862 et 972). ·

(28) Cass., 23 sept. 1963 (Bull. et Pas., 1964, I, 76) et 24 mai 1965 (ibid., I, 1027). ·

(3)

plus souple » de l'article 1315 du Code civil (29); or l'application, en matière répressive, de l'alinéa 2 de cet article n'a jamais été admise.

5. - Deuxième exemple : l'article 23 du Code judiciaire dispose que, « pour qu'il y ait chose jugée, il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ». Ce texte est la reproduction de l'article 1351 du Code civil (30).

Par contre, suivant la jurisprudence comme suivant la doctrine, la décision rendue, en ma- tière répressive, par une juridiction de juge- ment sur l'action publique a, en règle (31), l'autorité de la chose jugée erga omnes, tant en ce qui concerne l'existence de l'infraction que son imputabilité (32); même un jugement d'acquittement au bénéfice du doute doit être tenu comme excluant, erga omnes, l'existence de l'infraction imputée au prévenu (33).

L'opposabilité erga omnes, si elle peut être considérée comme sous-jacente aux articles 447, dernier alinéa, du Code pénal, 4 de la loi du 17 avril 1878, 463 du Code d'instruction criminelle et 235 du Code civil, n'est énoncée expressément par aucun texte légal. La vérita- ble raison de cette opposabilité est la nature même de l'action publique; cette action étant exercée au nom de la société et dans son inté- rêt, la décision qu'elle provoque « lie tous les membres du corps social, alors même qu'ils n'ont pas été parties aux débats en nom per- sonnel » (34). Aussi a-t-on pu dire que l'article

1351 du Code civil était «étranger» à l'action publique (35).

Le caractère de la chose jugée erga omnes est si intimement lié à la nature de l'action pu- blique qu'il s'attache aussi à la décision rendue sur une action publique civile, exercée par le ministère public, c'est-à-dire sur une action ci- vile que le ministère public exerce, au nom et

(29) Doc. pari., Sénat, session 1964-1965, n° 170, p. 144.

(30) Sur l'application de cet article en matière civile, cons. notamment Cass., 22 févr. 1965 (Bull. et Pas., I, 632); - 5 nov. 1965 (ibid., 1966, I, 301, et la note). II était certes judicieux d'insérer cette dis- position dans le Code judiciaire; l'article 1351 du Code civil est, en conséquence, abrogé (art. 22 contenu dans l'art. 2 du projet de loi contenant le Code judiciaire).

Sur la distinction entre l'autorité de la chose jugée, s'attachant à un jugement, et la force probante de celui-ci, cons. Cass., 16 mai 1958 (Bull. et Pas., I, 1028); 17 déc. 1960 (ibid., 1961, I, 428) et 20 avr.

1966 (ibid., I, à sa date).

(31) et (32) Voy. notamment Cass., 9 sept. 1963 et 15 juin 1964 (Bull. et Pas., I, 27 et 1106); - 20 mai 1966 (ibid., I, à sa date).

Sur les quelques exceptions à l'opposabilité erga omnes de certains éléments de décisions rendues sur l'action publique, exceptions qui concernent notam- ment des questions de droit civil que le juge répressif a tranchées, mais qui, si elles avaient été soulevées d'abord devant le juge civil, n'auraient point entraîné l'obligation, pour celui-ci, de surseoir à statuer jus- qu'à la décision du juge répressif, cons. la note 2 sous Cass., 10 févr. 1961 (Bull. et Pas., I, 626). A ces exceptions l'arrêt du 21 mai 1965 fait référence, en énonçant que l'autorité de la chose jugée sur l'action publique s'attache à ce qui a été « principalement jugé» sur l'action publique (Bull. et Pas., 1965, I, 1021 et les auteurs cités dans la note 1).

(33) Cass., 26 févr. 1965 (Bull. et Pas., I, 654) et la note 1; - cons. aussi Cass., 21 mai 1965 (ibid., I, 1021).

(34) Cass., 4 juill. 1878 (Bull. et Pas., I, 296).

(35) Cass., · 24 juin 1926 (Bull. et Pas., 1927, I, 23).

Il en est de même de l'action exercée par la partie publique aux fins de faire déclarer une partie civile- ment responsable de la condamnation prononcée, sur l'action publique, à charge du prévenu (Cass., 29 oct.

1956, Bull. et Pas., 1957, I, 196 et la note 4).

En revanche, la décision du juge répressif sur l'ac- tion de la partie civile n'a l'autorité de la chose jugée que dans les limites fixées par l'article 1351 du Code civil (Cass., 5 déc. 1949, Bull. et Pas., 1950, I, 229; - 22 avr. 1966, ibid., I, à sa date).

dans l'intérêt de la société, devant les tribu- naux civils (36).

Enfin, certaines actions civiles, bien qu'elles ne soient point des actions publiques exercées par le ministère public, sont néamoins consi- dérées, par la doctrine et par la jurisprudence, comme donnant lieu à des décisions ayant erga omnes autorité de chose jugée (37). Tels sont les jugements «constitutifs d'état» et même quelques jugements « déclaratifs d'état » (38). Comment, par exemple, l'enfant désavoué par le mari - désaveu admis par un juge- ment passé en force de chose jugée - pour- rait-il demeurer à l'égard des tiers un enfant légitime?

La circonstance que l'article 1351 du Code civil a été inséré dans le Code judiciaire ne peut suffire à justifier l'application de cet ar- ticle à des jugements qui, en raison de la na- ture de l'action sur laquelle ils sont rendus, ne sont pas compatibles avec cette application.

6. - La législation antérieure au Code judi- ciaire ne réglait que fragmentairement la pro- cédure en matière d'action disciplinaire (39).

A cette procédure la jurisprudence appliquait, en principe, les règles du Code de procédure civile. Mais déjà en 1847 (40) la cour préci- sait que les formes établies par le Code de procédure civile étaient applicables en matière disciplinaire « en tant que ces formes sont

·compatibles avec la nature des actions disci- plinaires»; et l'arrêt du 5 décembre 1949 (41) relève à son tour que, si les dispositions de ce code et de la loi du 25 février 1925 sont applicables aux recours contre une décision rendue en matière disciplinaire, des déroga- tions à cette règle « sont énoncées par les lois sur la répression des fautes disciplinaires ou résultent implicitement de ces lois ».

Il serait donc souhaitable que le texte de l'article 2 du Code judiciaire, texte assurément judicieux et utile, fût complété par une dis- position s'inspirant de cette jurisprudence. Les règles énoncées par le code ne seraient ainsi applicables à toutes les procédures que sous deux réserves. D'une part, elles ne devraient être observées que «sous réserve de l'appli- cation des dispositions légales non expressé- ment abrogées », ainsi que le prévoit déjà le- dit article; d'autre part, elles ne seraient pas non plus applicables dans la mesure où elles ne sont point compatibles avec la nature de l'action exercée ( 42).

(36) Cass., 12 janv. 1933 (Bull. et Pas., I, 68); - De Page, t. III, p. 1009, 6°; - Planiol et Ripert, t. II, p. 245, 4°. Sont notamment des actions publiques l'ac- tion exercée par le ministère public sur la base des articles 184 et 190 du Code civil ou 18bis des lois co- ordonnées sur l'acquisition, la perte et le recouvrement de la nationalté, l'action en déchéance de la puissance paternelle (art. ter et 2 de la loi du 15 mai 1912 - aujourd'hui art. 32 de la loi du 8 avr. 1965 relative à la protection de la jeunesse -), la demande en annulation, par le procureur général près la Cour de cassation, sur les instructions du ministre de la Justice, d'un jugement par lequel un juge a excédé ses pouvoirs (art. 80 de la loi du 27 ventôse an VIII, devenu l'art.

1088 du Code judiciaire).

(37) et (38) Cons. sur ces actions et ces décisions De Page, t. III, n° 997, 2° et s.; - Planiol et Ripert, t. II, n° 313.

(39) Cette lacune est comblée par le Code judi- ciaire.

(40) Arrêt du 2 août 1847 (Pas., 1848, I, 312). Dans ses conclusions précédant cet arrêt, l'avocat général Delbecque disait que «si l'action disciplinaire n'est pas pénale, dans le sens restreint de cette expression, elle n'est pas non plus civile», et plus loin «l'affaire disciplinaire a un caractère de pénalité spéciale».

(41) Bull. et Pas., 1950, I, 226.

(42) La commission de la Chambre des représen- tants, qui examine le projet de loi, est d'ailleurs saisie d'un amendement ayant cet objet.

L'amendement est d'autant plus opportun que, dans le rapport des commissions du Sénat (Doc. pari., Sé- nat, session 1964-1965, n° 170, p. 28), il est affirmé

«que les questions de procédure pénale font l'objet de textes séparés et que les dispositions du Code judi- ciaire ne sont applicables à ces matières que lorsque celles-ci ne font pas l'objet d'une règle expresse».

499

7. - Une troisième disposition du Code judiciaire, qui, à mon sentiment, ne peut être étendue à toutes les procédures est l'article 1084.

Aux termes de cet article, lorsque le litige est indivisible, le pourvoi en cassation « doit être dirigé contre toutes les parties à la déci- sion attaquée dont l'intérêt est opposé à celui du demandeur. Ce dernier doit, en outre, dans les délais ordinaires des pourvois, mettre en cause les autres parties qui ne sont pas déjà défenderesses ou appelées»; à défaut d'obser- vation de ces règles, « le pourvoi ne sera pas admis».

En réalité, dans cette disposition, les auteurs du Code judiciaire se sont inspirés de la juris- prudence de la cour relative à l'indivisibilité en matière civile. Aussi tous les arrêts cités dans le rapport du commissaire royal ont-ils été rendus en matière civile (43).

Or, comme le souligne l'arrêt de la cour du 15 juin 1965 (44), «la procédure pénale ex- clut, en ce qui concerne la recevabilité du pourvoi, l'application des règles suivies en matière civile en cas de litige indivisible, ce caractère ne pouvant éventuellement avoir d'effet que sur l'étendue de la cassation à intervenir».

Comment justifier, par exemple, que le pré- venu condamné pour une infraction aux lois sur les douanes et accises, punie à la fois d'une peine d'amende, sur la poursuite de l'adminis- tration, et d'une peine d'emprisonnement prin- cipal, sur la poursuite conjointe du ministère public, ne puisse se pourvoir contre ce dernier sans se pourvoir en même temps contre l'ad- ministration (45), ou que, l'administration s'étant seule pourvue contre un arrêt d'acquit- tement, puisse être pronont;ée la cassation de la décision d'acquittement rendue sur l'action du ministère public (46), ou que, le prévenu L'amendement évitera aussi que de la dernière phrase de l'article 27 du Code judiciaire, - aux termes de laquelle la règle que l'exception de chose jugée ne peut être soulevée d'office par le juge n'est pas appli·

cable en matière répressive et en matière de défense sociale - il ne soit tiré argument pour soutenir que l'article 23 est, lui, applicable en toutes matières (sur la portée de la dernière phrase de l'art. 27, cons. Ann.

pari., Sénat, séance du 6 avr. 1965, p. 1487).

Enfin, l'amendement permettra de combler une la·

cune non seulement de plusieurs dispositions du Code déjà citées dans cet exposé, mais aussi d'autres dispo·

sitions, notamment de l'article 1122. Aux termes de ce dernier article, la tierce opposition est ouverte contre toute décision judiciaire et l'article 1123 n'ex- cepte que les arrêts de la Cour de cassation; judicieu- sement l'article 1132 exclut de la requête civile les dé- cisions rendues par les juridictions répressives, en tant qu'elles statuent sur l'action publique. Cette exclu- sion, qui résulte de la nature même de l'action pu- blique (Rép. prat. du droit belge, V0 Tierce opposi- tion, n ° 22, et les auteurs cités) eût dû, pour la même raison, être énoncée aussi dans l'article 1122.

(43) Commentaire de l'article 31 du code, Rapport page 31, note 69.

On notera toutefois que la définition de la notion

«indivisibilité du litige», contenue dans l'article 31 du Code judiciaire, est plus stricte que la définition donnée par la cour, dans le dernier état de sa juris·

prudence (cons. notamment Cass., 23 sept. et 14 oct.

1965, Bull. et Pas., 1966, I, 107 et 213, ainsi que les décisions citées dans la note 2 sous le premier de ces arrêts).

(44) Bull. et Pas., 1965, I, 1118.

Sur la distinction entre la notion d'indivisibilité en matière civile et la notion d'indivisibilité en matière répressive cons. aussi la note, signée L. Simont, sou!!

Cass., 7 janv. 1960, J. T., 1961, p. 8, n° 17.

( 45) Cons. R. J anssens de Bisthoven, « Overwegingen omtrent de bestraffing van de sluikerij ter zake van douane », discours prononcé à l'audience solennelle de rentrée de la cour, le ter septembre 1959 (Bull., pp. 15 et 16). De même le condamné a la faculté de limiter son appel ou son opposition à la décision rendue sur l'action du ministère public (Cass., 23 sept. 1940, Bull.

et Pas., I, 224; - 25 avr. 1966, ibid., I, à sa date).

(46) Cons. notamment Cass., 24 févr. 1958 (Bull. et Pas., I, 687); - 20 janv. 1964 (ibid., I, 537) et la note; - en cas de pourvoi du ministère public seul : Cass., 4 juin 1923 (ibid., I, 345); - 18 nov. 1946 (ibid., I, 419) et 20 sept. 1948 (ibid., I, 500).

(4)

et la partie civilement responsable de celui-ci ayant été condamnés sur l'action publique exercée en raison d'une infraction de droit commun, la recevabilité du pourvoi de l'un soit subordonnée à la mise en cause de l'autre dans les délais légaux du pourvoi ? Ou encore que le ministère public ne puisse se pourvoir contre le prévenu acquitté, . sans mettre en cause la partie civile ou que la partie civile ne puisse exercer le même recours sans mettre en cause la partie publique (47), ou enfin que la recevabilité du pourvoi du condamné contre le ministère public soit subordonnée soit à l'introduction d'un pourvoi contre la partie civile, soit à la mise en cause de celle-ci ?

Appliquer à la matière répressive l'article 1084 du Code judiciaire serait méconnaître que les articles 187, 202 (loi du 1er mai 1849, art. 7), 203bis, 205 (loi du l'el' mai 1849, art.

8) et 408 à 413 du Code d'instruction crimi- nelle impliquent qu'en cette matière le recour~

qu'une partie exerce contre telle partie déter- minée est distinct du recours qu'elle pourrait exercer contre une autre partie comme de tout recours exercé contre elle-même, et qu'au surplus ces divers recours peuvent être soumis à des formes et à des délais différents.

8. - Méritent aussi de retenir l'attention les dispositions relatives aux désistements.

ll faut louer les auteurs du Code judiciaire d'avoir réglé avec précision la forme et les effets du désistement et d'avoir fait une nette distinction entre le désistement d'action et le désistement d'instance (art. 820 à 827).

Toutefois de ce que l'article 823, alinéa 2, dispose que le désistement d'instance est admis en toutes matières (48) il serait à tort déduit que le code rejette la jurisprudence (49) sui- vant laquelle l'époux, aux torts de qui le di- vorce a été autorisé par un jugement ou par un arrêt, ne peut valablement se désister de l'appel ou du pourvoi par lui formé contre cette décision, si le désistement implique un acquiescement à ladite décision. En pareil cas, le désistement n'est pas un simple désistement d'instance, puisqu'il constitue en même temps un acquiescement. Or les dispositions légales qui garantissent la stabilité du mariage sont établies non point dans le seul intérêt des conjoints, mais encore dans l'intérêt de la société. De même qu'un désistement d'action ne peut, ainsi que l'énonce l'article 823, alinéa 1er, « avoir lieu que s'il porte sur un droit au- quel il est permis de renoncer », de même un acquiescement ne saurait être valablement donné à un arrêt ou à un jugement qui dénie à l'auteur de l'acquiescement un droit ou le prive d'un droit auquel il ne lui est pas permis de renoncer (50).

On ne saurait davantage admettre que le ministère public pût, en raison des articles 2 et 823, alinéa 2, du Code judiciaire, se désister d'un recours par lui formé contre une décision rendue sur l'action publique, que, par cette décision, le prévenu ait été renvoyé des pour- suites ou qu'il ait été condamné. Le recours

(47) Cons. Cass., 25 oct. 1965 (Bull. et Pas., 1966, 1, 273).

( 48) Le rapport du commissaire royal précise : « Les textes qui règlent le désistement concernent les deux degrés de juridiction. Devant la Cour de cassation, ils sont applicables aussi » (p. 202). ll ajoute toutefois que devant la Cour de cassation « seuls le désistement d'instance et le désistement d'un acte de procédure peuvent être pris en considération » et, suivant la note 148, «il ne peut y avoir de désistement de l'ac- tion devant la Cour de cassation». Cette considération_

ne paraît pas être entièrement exacte, le désistement d'un pourvoi pouvant, dans certains cas, comporter un désistement de l'action: voy. le no 9, ainsi que les notes 51, 56 et 58.

(49) Cass., 20 févr. 1947 (Bull. et Pas., 1, 73); - 12 juin 1958, motifs (ibid., 1, 1136) et note 1 p. 1137;

- 12 juin 1959 (ibid., 1, 1043).

(50) Cass., 11 déc. 1958 (Bull. et Pas., 1959, 1, 379);

- 14 mai 1964 (ibid., 1, 980).

du ministère public est, en effet, exercé au nom de la société et tend à l'exacte application de la loi; il peut donc entraîner une décision favorable au prévenu comme une décision dé- favorable, de sorte que la nature de ce recours et la disposition de l'article 823, alinéa 2, ne sont pas compatibles (51).

9. - L'article 824, alinéa 2, qui règle la forme du désistement exprès - qu'il s'agisse d'un désistement d'action ou d'un désistement d'instance - , appelle de plus longues expli- cations. Suivant cette disposition le désistement exprès « est fait par un simple acte, signé de la partie ou de son mandataire, nanti d'un pouvoir spécial, et signifié à la partie adverse, s'il n'est préalablement accepté par elle». Le Code judiciaire fait ainsi sienne la jurispru- dence de la cour relative au désistement d'un pourvoi en matière civile (52).

Notons d'abord qu'il ressort de l'article 479 que, si le mandataire de la partie qui se désiste d'un pourvoi en cassation est un avocat à la Cour, celui-ci n'est pas tenu de justifier d'un mandat spécial. Les termes « mandataire muni d'un pouvoir spécial» de l'article 824, alinéa 2, sont donc trop généraux (53).

Ensuite si, en vertu de l'article 2 du Code judiciaire, l'article 824, alinéa 2, sera applica- ble non point seulement aux désistements ex- près en matière civile et dans les matières assi- milées à la matière civile, mais encore aux · désistements exprès en matière d'impôts di- rects, de taxes communales ou provinciales directes et en matière de milice (54), devra-t-il être aussi observé en matière répressive ?

Aux termes de l'article 6 de la loi du 16 février 1961 (55), disposition non abrogée par le projet de loi contenant le Code judiciaire,

« le désistement de l'instance 'peut être fait et accepté devant toute juridiction répressive, soit par les parties personnellement, soit par avoué (56), soit par avocat porteur des pièces (57).

(51) Bien que la loi, par une disposition particu- lière, autorise certaines administrations publiques, telle l'administration des Douanes et Accises, à renoncer à une action pénale par elles introduite, ces adminis- trations ne peuvent valablement se désister d'un re- cours, si ce désistement n'implique pas un désistement de l'action, précisément pour la raison que pareil re- cours est, en raison de la nature de l'action, exercé tant au profit du prévenu que de l'administration elle- même (cons. Cass., 4 janv. 1960, Bull. et Pas., 1, 487, et la note 1; - 30 janv. 1961, motifs, ibid., I, 573; - 12 févr. 1962, ibid., 1, 662, et la note 2; - 30 juin 1964, ibid., 1, 1167; - 4 et 11 oct. 1965, ibid., 1966, 1, 167 et 195; - 7 févr. 1966, ibid., 1, à sa date).

(52) Voy. notamment Cass., 30 nov. 1962 et 14 févr.

1963 (Bull. et Pas., 1963, 1, 411 et 677); - cons.

aussi Simont, Des pourvois en cassation en matière

civile, n° 49. '

L'article 1112 dispose toutefois que «le désistement de l'instance en cassation produit ses effets sans qu'il appartienne au défendeur de l'accepter» (comp. l'art.

825).

(53) L'article 479 du projet initial disposait : «En toutes matières soumises· à la cour, l'avocat à la Cour de cassation représente valablement la partie sans avoir à justifier d'une procuration, sauf lorsque la loi exige un mandat spécial»; ces derniers mots ont été supprimés par les commissions du Sénat (Doc. pari., Sénat, session 1964-1965, n° 170, p. 87). Cette suppres- sion semble avoir été perdue de vue lors de l'adoption de l'article 824.

(54) Jusqu'ici les désistements en ces matières ne devaient pas être signifiés à la partie adverse ni être acceptés par elle (cons. notamment Cass., 13 nov.

1961, Bull. et Pas., 1962, 1, 301; - 2 juin 1964, ibid., 1, 1045; - 10 nov. 1964, ibid., 1965, 1, 254).

(55) Loi modifiant la législation en ce qui concerne la représentation des prévenus, des parties civilement responsables et des parties civiles devant les juridic- tions répressives.

(56) Bien que ·te Code judiciaire supprime le minis- tère des avoués, le terme « avoué » n'a pas perdu toute signification dans l'article 6 de la loi du 16 février 1961, puisque les avocats à la Cour de cassation sont, en ce qui concerne les affaires soumises à cette cour, des avoués. C'est ainsi que les qualifie l'article 93 de la loi du 27 ventôse an VIII; si cette loi est abrogée par l'article 1.,.., 17°' contenu dans l'article 2 du projet de loi, l'article 8, contenu dans l'article 3 du même projet dispose que «les fonctions d'avoué sont suppri-

Or le désistement d'un appel ou d'un pour- voi formé par le prévenu ou par la partie civi- lement responsable n'est qu'un désistement d'instance. L'article 6 de la loi du 16 février 1961 ne faisant mention ni d'une signification ni d'une acceptation du désistement d'instance, l'article 824, alinéa 2, en tant qu'il subordonne la validité d'un désistement exprès d'instance à une signification à la partie adverse ou à une acceptation de celle-ci, ne sera point ap- plicable. Il ne le sera pas davantage en tant qu'il autorise le désistement par tout manda- taire muni d'un pouvoir spécial, puisque l'ar- ticle 6 de la loi du 16 février 1961 ne recon- naît comme mandataire apte à se désister au nom de la partie mandante que l'avocat por- teur des pièces ou l'avoué, - ce dernier terme signifiant désormais l'avocat à la Cour de cassation, en ce qui concerne le désistement d'un pourvoi.

Restent les désistements de recours, faits soit par une partie civile, soit par une partie intervenante. Le désistement de la partie civile ou celui de la partie qui est volontairement intervenue devant le juge du fond peuvent être soit des désistements d'instance, soit des dé- sistements impliquant le désistement. de l'ac- tion; le désistement du pourvoi d'une partie appelée en intervention forcée devant le juge du fond ne sera qu'un désistement d'instance.

L'article 6 de la loi du 16 février 1961 de- meurera applicable aux désistements d'instan- ce.

Quant aux désistements impliquant le dé- sistement de l'action, ils sont étrangers à l'ar- ticle 6 de la loi du 16 février 1961 et ni le Code d'instruction criminelle ni une aùtre loi de procédure pénale n'en règlent la forme. Dès lors, en vertu de l'article 2 du Code judiciaire, l'article 824, alinéa 2, leur sera applicable et partant le mandataire devra être nanti d'un pouvoir spécial (58), à moins. toutefois qu'il ne s'agisse d'un désistement de pourvoi, fait par un avocat à la Cour de cassation.

L'article 824, alinéa 2., devra-t-il, en cas de désistement impliquant le désistement de l'ac- tion, être observé aussi en tant qu'il prescrit la signification du désistement e~près à la par- tie adverse, sauf acceptation préalable de celle- ci? On n'aperçoit guère l'utilité de pareille si- gnification dans une cause soumise au juge répressif; mais cette prescription de l'article 824, alinéa 2, n'est ni contredite par une dis- position de procédure pénale ni incompatible avec la nature de l'action de la partie civile ou de la partie intervenante.

10. - Intéressante et importante est la ré- glementation nouvelle des nullités. « On ne saurait nier, a écrit le commissaire royal (59), mées, sans préjudice des dispositions réglant le minis•

tère des avocats à la Cour de cassation», et partant sans préjudice de l'article 479 du Code judiciaire.

Sur ce que l'avocat à la Cour de cassation ne doit, en vertu de l'article 6 de la loi du 16 février 1961, ni justifier d'un pouvoir spécial ni être porteur des piè- ces, pour se désister, au nom d'une partie, d'un pour- voi en matière répressive, lorsque ce désistement n'est qu'un désistement d'instance, voy. Cass., 9 et 23 mai 1966 (Bull. et Pas., 1, à leur date).

(57) Sur ce que l'avocat porteur des pièces ne doit pas, en matière répressive, justüier d'un pouvoir spé- cial pour faire, au nom de la partie qu'il assiste, un désistement d'instance, voy. Cass., 24 mai 1965 (Bull.

et Pas., 1, 1030).

(58) La justification d'un mandat spécial est, d'ail- leurs, aujourd'hui déjà exigée, par la jurisprudence, du mandataire qui, au nom de la partie civile, se désiste d'un pourvoi, lorsque ce désistement implique un dé- sistement de l'action (Cass., 22 mars et 24 mai 1965, Bull. et Pas., 1, 771 et 1035; - 18 oct. et 22 nov. 1965, ibid., 1966, 1, 219 et 392; - 18 avr. et 23 mai 1966 (ibid., 1, à leur date).

Il en est de même du désistement, par mandataire, de l'administration des Finances, partie poursuivante en matière de douanes et accises (Cass., 25 oct. et 29 nov.

1965, Bull. et Pas., 1966, 1, 275 et 423).

(59) Rapport, p. 207.

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