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Développement de l’intelligence et de la créativité à l’école : entre association et dissociation

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Academic year: 2021

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Sous la direction du Prof. Frédéric Darbellay

Développement de l’intelligence et de la créativité à

l’école : entre association et dissociation

Présenté au

Centre interfacultaire en droits de l’enfant (CIDE) de l’Université de Genève en vue de l’obtention de la

Maîtrise universitaire interdisciplinaire en droits de l’enfant

par

Manon CHAPON de

Ambilly, France

Mémoire No CIDE 2020 / MIDE 18 – 20 / 17 Jury :

Prof. Frédéric Darbellay, CIDE

Mme Maude Louviot, CIDE

SION Août 2020

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Déclaration d’honneur attestant le caractère original du travail

effectué

Je déclare que je suis bien l’auteur-e de ce texte et atteste que toute affirmation qu’il contient et qui n’est pas le fruit de ma réflexion personnelle est attribuée à sa source et que tout passage recopié d’une autre source est en outre placé entre guillemets.

Nom et prénom : CHAPON Manon

Lieu /date / signature :

****************************************

Ce formulaire doit être dûment rempli par tout étudiant ou toute étudiante rédigeant un travail de mémoire. Il doit être daté et signé manuellement sur la version soutenue et la version finale.

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Remerciements

Je remercie sincèrement Monsieur Darbellay, mon directeur de mémoire, de m’avoir permis de réaliser ce projet passionnant avec lui. Cette immersion dans le domaine de la recherche en interdisciplinarité n’a fait que renforcer mon souhait de poursuivre dans cette voie.

Je tiens également à remercier les participants adultes et enfants qui se sont portés volontaires pour participer à cette étude et sans qui cette dernière n’aurait pas pu être réalisée.

Enfin, je remercie chaleureusement ma famille et mes amis qui m’ont apporté leur soutien inconditionnel durant toute la rédaction de ce mémoire. Je tiens à remercier plus particulièrement mon amie, Louise Dupraz, pour ses conseils avisés ainsi que Corinne Clément pour la relecture de ce mémoire.

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Table des matières

I. INTRODUCTION ... 1

II. CADRE THEORIQUE : LE DEVELOPPEMENT DE L’INTELLIGENCE ET DE LA CREATIVITE CHEZ L’ENFANT : UN LIEN SIGNIFICATIF ? ... 4

A. L’ENFANTVU AU TRAVERS DE SES DROITS, SON EDUCATION ET SA CREATIVITE ... 4

1. Les droits de l’enfant : enjeux développementaux, éducatifs et créatifs ... 4

2. Éducation aux droits de l’enfant et créativité... 7

3. Le développement de la pensée réflexive et de la créativité chez l’enfant ... 9

B. L’ECOLE ET LE DEVELOPPEMENT INTELLIGENCE-CREATIVITE : UNE COHABITATION POSSIBLE ? ... 13

1. L’école traditionnelle : en adéquation avec la société actuelle ? ... 13

2. Les pédagogies alternatives : entre apprentissages théoriques et créativité ... 15

3. Repenser le système éducatif actuel ... 18

C. CREATIVITE ET INTELLIGENCE : ENTRE ASSOCIATION ET DISSOCIATION ... 20

1. Qu’est-ce que l’intelligence ? ... 20

2. Qu’est-ce que la créativité ? ... 24

3. Plus les enfants sont intelligents, plus ils sont créatifs ? ... 29

III. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES DE RECHERCHE ... 33

A. PROBLEMATIQUE ... 33

B. HYPOTHESE DE RECHERCHE ... 33

IV.METHODOLOGIE ... 34

A. PARTICIPANTS ET PLAN D’EXPERIENCE ... 34

B. MATERIEL UTILISE... 34

1. Manuel EPoC ... 34

C. PROCEDURE ... 36

D. ÉTHIQUE DE LA RECHERCHE ... 36

1. Respect fondamental de la personne et de sa dignité ... 36

2. Appréciation et limitation des risques ... 37

3. Consentement libre et éclairé ... 37

4. Respect de la sphère privée ... 37

5. Utilisation des informations ... 37

6. Restitution des résultats de la recherche ... 37

7. Responsabilité personnelle et solidarité collective ... 38

E. ANALYSE DE DONNEES ... 38

1. Mesure ... 38

2. Hypothèses opérationnelles ... 38

3. Analyse statistique ... 39

4. Conditions d’application (cf. Annexe XXXIV) ... 39

V. RESULTATS ... 40

A. T DE STUDENT « INTELLIGENCE »(CF.ANNEXE XXXVII) ... 40

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VI.DISCUSSION ... 41

A. INTERPRETATION DES RESULTATS ... 42

B. LIMITES ET RECHERCHES FUTURES ... 43

1. Conditions de passation ... 43

2. Biais d’échantillonnage ... 44

3. Recherches futures ... 44

C. CAS D’UNE ECOLE DE TYPE PEDAGOGIE ALTERNATIVE : OBSERVATIONS DE TERRAIN ... 45

VII.CONCLUSION ET OUVERTURE ... 48

VIII. BIBLIOGRAPHIE ... 49 IX.ANNEXE ... I A. MATERIEL UTILISE DANS L’EXPERIENCE ... I

1. Annexe I : Feuille de consentement ... I 2. Annexe II : Manuel EPoC ... V 3. Annexe IV : Exemples de dessins réalisés par les enfants ... XIII

B. ANALYSES STATISTIQUES REALISEES SUR LES DONNEES RECOLTEES ... XXXIII

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Résumé – Abstract

Introduction : La Convention relative aux droits de l’enfant (CDE, 1989) et notamment l’article 27 assurent le bon développement de l’enfant tant sur le plan physique, mental que spirituel. Le développement cognitif de l’enfant fait partie intégrante des compétences qu’il acquiert à l’école. Puis, peu à peu, il développe des compétences plus fines à l’instar de la réflexivité. Le développement de ces capacités plus fines ainsi qu’un contexte favorisant le développement de son esprit critique permet à l’enfant d’avoir un regard différent sur le monde, de se poser des questions et ainsi de laisser place à son imagination. Cette imagination représente un point d’ancrage à sa créativité présente et future et peut être favorisée par le type de pédagogie mis en place par l’école. Ainsi, au sein de l’école, il développe en parallèle son intelligence et sa créativité. Le but de la présente étude est de comparer les résultats à des tests de créativité d’enfants tout-venant et d’enfants à haut potentiel intellectuel (HPI) afin d’étudier le lien entre l’intelligence et la créativité chez les enfants. Méthode : 40 enfants (moyenne d’âge=8,93 ans) dont 20 enfants tout-venant et 20 enfants HPI ont été invités à réaliser les subtests de pensée divergente-exploratoire de créativité sous la forme graphique du manuel EPoC (Lubart, Besançon & Barbot, 2011). Résultats : Les résultats de cette étude n'ont pas permis de mettre en évidence un effet significatif de l'intelligence sur la composante fluidité graphique de la créativité chez les enfants (t(36,61)=1.97,p = .056). De plus, ils ont révélé l’absence d’un lien significatif du type de stimulus présenté aux enfants sur la créativité (t(39)= -1.74, p = .090). Discussion : Les résultats de cette étude sont conformes à d’autres études qui affirment qu’il existe une indépendance entre l’intelligence (QI) et la créativité (Guilford, 1950 ; Rossman & Horn, 1972 ; Torrance, 1977 dans Kim, 2005 ; Silvia, 2008). Néanmoins, bien qu’un effet significatif entre l’intelligence et la composante fluidité graphique de la créativité était attendu dans cette étude, elle a tout de même démontré une tendance à un lien entre ces deux variables (t(36,61)=1.97,p = .056). Ces résultats seront essentiellement discutés en termes de types de pédagogie adoptés dans les apprentissages.

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I. Introduction

La Convention relative aux droits de l’enfant (CDE, 1989) a été adoptée à l’unanimité par l’ONU lors de l’Assemblée Générale du 20 novembre 1989. Le texte est aujourd’hui ratifié par tous les pays du monde, à l’exception des États-Unis. La CDE s’impose comme le dénouement de la longue histoire des droits de l’enfant puisqu’elle représente le premier traité international juridiquement contraignant concernant leurs droits (Moody, 2016). Les droits de l’enfant sont des droits humains adaptés aux besoins et à la spécificité de leur âge. Ces droits tiennent compte de la nécessité de développement des enfants tant sur le plan physique, mental, moral, spirituel que social. La notion de développement de l’enfant est reprise notamment par l’article 27 de la CDE (1989) et constitue le point d’ancrage de cette étude.

Durant ces premières années de vie, l’enfant va développer essentiellement des compétence perceptives, sensorielles et motrices (Piaget, 1947, Piaget et Inhelder, 1966). Puis, au fil des années, il va acquérir des compétences cognitives et, plus tard encore, des compétences plus fines telles que la réflexivité et l’esprit critique. Le développement de ces capacités plus fines permet à l’enfant d’avoir un regard différent sur le monde, de se poser des questions et ainsi de laisser place à son imagination. Cette imagination est le fruit de la créativité dont l’enfant pourra faire part et elle est notamment encouragée indirectement par l’article 31 de la CDE (1989) qui accorde le droit à l’enfant au repos et aux loisirs, aux jeux culturels et artistiques (art. 31, CDE, 1989). Ces droits représentent des éléments-clés d’un développement optimal pour l’enfant.

Ainsi, le questionnement émergent est celui du respect des droits de l’enfant, d’une éducation à leurs droits et de l’implémentation de la créativité dans leur vie. L’école représente la première institution favorable au développement cognitif de l’enfant avec une importance considérable accordée aux apprentissages et aux savoirs. Cependant, elle peine encore aujourd’hui à favoriser l’implémentation de la créativité dans ses structures : le caractère émancipateur de la créativité représenterait-il une entrave à « l’élève idéal » qui s’éloignerait ainsi des « normes scolaires » ? (Capron Puozzo, 2016).

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Émerge alors l’idée de repenser l’école d’aujourd’hui pour qu’elle soit en adéquation avec la demande de créativité de la société actuelle. L’idée d’une école permettant d’une part aux enfants de connaître leurs droits et d’autre part de « croiser » les disciplines de manière interdisciplinaire à l’instar des pédagogies alternatives représenterait ainsi un moyen pour l’enfant de développer son esprit critique et sa pensée réflexive (Darbellay, 2019, MIDE, cours Droits de l’enfant, éducation et créativité : introduction générale : de l’éducation à la créativité). Plus généralement, il s’agirait alors de permettre la cohabitation du développement de l’intelligence et de la créativité dans les écoles à travers l’émergence de nouvelles pratiques scolaires. Cette cohabitation intelligence-créativité et plus précisément la nature du lien qu’elles entretiennent a fait l’objet, depuis de nombreuses années, de recherches multiples avec des résultats divergents (Wallach & Kogan, 1965 ; Kershner & Ledger, 1985 ; Sternberg & Lubart, 1991 ; Alfonso, Flanagan & Radwan, 2005 ; Kim, 2005 ; Besançon, Guignard et Lubart, 2006 ; Silvia, 2008 ; Besançon, Zenasni et Lubart, 2010 ; Renzulli, 2016).

La présente étude a donc pour but d’analyser la nature du lien entre ces deux variables et ainsi de voir s’il existe une corrélation entre elles. En partant des recherches théoriques antérieures issues de la psychologie et en important des données quantitatives résultant de ma recherche interdisciplinaire, une discussion sur l’existence du lien entre l’intelligence et la créativité sera permise. Ma recherche sera axée sur l’intelligence et la créativité dans le cadre scolaire et une attention particulière sera également apportée à l’impact de l’école et des pédagogies alternatives sur la créativité des enfants. Pour ce faire, après avoir ancrée la thématique de mon étude dans un cadre théorique, j’exposerai la problématique soulevée par ce travail, à savoir : « une intelligence plus élevée chez certains enfants entraine-t-elle plus de créativité de leur part ? ». Le rôle joué par le type de pédagogie mise en place par les écoles fera également l’objet d’une partie de mon argumentation. J’étayerai ensuite mes hypothèses de recherche, à savoir : l’intelligence a un effet sur la créativité des élèves et le type de stimulus présenté à l’enfant dans une tâche de créativité peut faire varier ses performances créatives. Afin de répondre à mes hypothèses, des élèves HPI et des élèves non HPI passeront un test de créativité issu de la batterie de tests EPOC (Evaluation du Potentiel Créatif)

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(Besançon, Barbot et Lubart, 2011). Les moyennes des résultats au test de créativité de ces deux populations seront ensuite comparées et un « t de Student » permettra de conclure sur la significativité des résultats. Enfin, je terminerai en mentionnant les limites qui auraient pu heurter les résultats de mon étude ainsi que les études futures qui pourraient apporter davantage de connaissances sur ce sujet.

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II. Cadre théorique : le développement de l’intelligence et de

la créativité chez l’enfant : un lien significatif ?

A. L’enfant vu au travers de ses droits, son éducation et sa

créativité

1. Les droits de l’enfant : enjeux développementaux, éducatifs et créatifs Depuis 1989, les États parties à la Convention relative aux droits de l’enfant (CDE) sont contraints d’appliquer les 54 articles qui protègent les droits fondamentaux de tous les enfants (Burger, 2018, MIDE, cours psychologie de l’enfance : Le développement de l’enfant I et II). Quatre principes généraux viennent servir de fil conducteur à la compréhension globale de cette convention, à savoir : la non-discrimination (CDE, art.2.), l’intérêt supérieur de l’enfant (CDE, art.3.), le droit à la vie, à la survie et au développement (CDE, art.6.) et le respect des opinions de l’enfant (CDE, art.12.) (Hanson, 2018, MIDE, cours Enfants et droits humains : Les principes généraux de la CDE). Au cœur des préoccupations de la CDE, se trouve le développement de l’enfant au sens large et de fait, les articles 5, 6 et 27 de la CDE y font référence. L’article 5 de la CDE (1989) incombe à toute personne responsable de l’enfant de lui permettre de jouir de ses droits. Et ce, en adéquation avec le développement des capacités de l’enfant. L’article 6 de la CDE (1989) consacre une importance particulière au droit intrinsèque à la vie pour chaque enfant reconnue par les États parties à la Convention ainsi qu’un intérêt significatif pour la survie et le développement de l’enfant. L’article 27 de la CDE (1989) est le plus détaillé et le plus contraignant concernant le développement de l’enfant. Il s’adresse aux États parties et aux parents qui doivent mettre en œuvre toutes les ressources possibles pour assurer le bon développement de l’enfant compte tenu du contexte dans lequel il vit. Cet article permet de mettre en lumière les différentes modalités du développement sensori-moteur et cognitif de l’enfant en fonction de son âge ainsi que du contexte social et familial au sein duquel il grandit et se développe.

L’article 28 de la CDE (1989) est le premier article ayant attrait à l’éducation et l’importance du rôle de l’État dans sa mise en œuvre est largement remarquable dans cet article car il est placé en acteur principal et responsable.

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Art. 28

1. Les États parties reconnaissent le droit de l'enfant à l'éducation, et notamment, en vue d'assurer l'exercice de ce droit progressivement et sur la base de l'égalité des chances :

a) Ils rendent l'enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous ; b) Ils encouragent l'organisation de différentes formes d'enseignement

secondaire, tant général que professionnel, les rendent ouvertes et accessibles à tout enfant et prennent des mesures appropriées, telles que l'instauration de la gratuité de l'enseignement et l'offre d'une aide financière en cas de besoin ;

c) Ils assurent à tous l'accès à l'enseignement supérieur, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés ;

d) Ils rendent ouvertes et accessibles à tout enfant l'information et l'orientation scolaires et professionnelles ;

e) Ils prennent des mesures pour encourager la régularité de la fréquentation scolaire et la réduction des taux d'abandon scolaire.

2. Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour veiller à ce

que la discipline scolaire soit appliquée d'une manière compatible avec la dignité de l'enfant en tant qu'être humain et conformément à la présente

Convention.

3. Les États parties favorisent et encouragent la coopération internationale

dans le domaine de l'éducation, en vue notamment de contribuer à éliminer l'ignorance et l'analphabétisme dans le monde et de faciliter l'accès aux connaissances scientifiques et techniques et aux méthodes d'enseignement modernes. A cet égard, il est tenu particulièrement compte des besoins des pays en développement.

Intrinsèquement à ce droit à l’éducation, la prise en compte des capacités individuelles de chaque enfant dans l’accès aux enseignements est mentionnée à l’alinéa 1.c), faisant ainsi référence aux différences développementales et cognitives des élèves d’une même tranche d’âge au même titre que l’article 5 de la CDE (1989). Cela sous-entend que les enfants n’ont pas tous le même niveau de développement

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au même âge et que les personnes responsables de l’enfant doivent tenir compte de son individualité et de ses capacités évolutives.

Comme le souligne Stoecklin (2018), l’éducation est le seul droit faisant l’objet de deux articles, le second venant spécifier les termes du premier. L’article 29 de la CDE (1989) vient donc renforcer les dispositions prises à l’article 28.

Art. 29

1. Les États parties conviennent que l’éducation de l’enfant doit viser à :

a) Favoriser l’épanouissement de la personnalité de l’enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités ;

b) Inculquer à l’enfant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et des principes consacrés dans la Charte des Nations Unies ;

c) Inculquer à l’enfant le respect de ses parents, de son identité, de sa langue et de ses valeurs culturelles, ainsi que le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes de la sienne ;

d) Préparer l’enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance, d’égalité entre les sexes et d’amitié entre tous les peuples et groupes ethniques, nationaux et religieux, et avec les personnes d’origine autochtone ; e) Inculquer à l’enfant le respect du milieu naturel.

2. Aucune disposition du présent article ou de l’article 28 ne sera interprétée

d’une manière qui porte atteinte à la liberté des personnes physiques ou morales de créer et de diriger des établissements d’enseignement, à condition que les principes énoncés au paragraphe 1 du présent article soient respectés et que l’éducation dispensée dans ces établissements soit conforme aux normes minimales que l’État aura prescrites.

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L’article 29 de la CDE (1989) souligne un point important relatif à cette étude. En effet, l’éducation offerte à l’enfant doit favoriser à la fois l’épanouissement de sa personnalité, quelle qu’elle soit, et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales. Les « dons » mentionnés par cet article peuvent ainsi faire référence à des talents intrinsèques à chaque enfant et plus largement à des facultés créatives. Enfin, l’article 31 accorde le droit aux enfants de se reposer et de s’adonner à des loisirs, de se livrer au jeu et à des activités récréatives propres à son âge ainsi que de participer librement à la vie culturelle et artistique. Bien que cet article ne mentionne pas le terme de « créativité », il paraît évident qu’il soit enfoui derrière les dispositions y afférent.

2. Éducation aux droits de l’enfant et créativité

a) Le droit à l’éducation et l’éducation aux droits de l’enfant

Au-delà du droit à l’éducation des enfants (art. 28 et 29, CDE, 1989), la CDE met l’accent sur l’éducation à leurs droits. L’article 42 (CDE, 1989) représente un impératif pour les États parties à la Convention d’assurer une large diffusion de la connaissance des droits de l’enfant, tant pour les enfants eux-mêmes que pour les adultes.

Art. 42

Les États parties s'engagent à faire largement connaitre les principes et les dispositions de la présente Convention, par des moyens actifs et appropriés, aux adultes comme aux enfants.

Néanmoins, force est de constater que cette injonction n’est pas idéalement appliquée par tous les pays ayant ratifiés la Convention. En Suisse, par exemple, les Observations finales du Comité des droits de l’enfant (2015) dressent un tableau sombre de l’implémentation de l’éducation aux droits de l’enfant dans le pays. En effet, le comité « constate avec préoccupation que la Convention est mal connue

des enfants, des parents et du public en général. Il s’inquiète aussi de ce que les

activités de formation aux droits de l’enfant pour les professionnels qui travaillent avec ou pour les enfants ne sont pas systématiques ou sont incomplètes » (dans Moody,

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2019, MIDE, cours Droits de l’enfant, éducation et créativité : Éducation aux droits de l’enfant : Concepts, programmes, limites). Ainsi, bien que l’idée selon laquelle l’éducation aux droits de l’enfant favoriserait le développement de compétences diverses chez ses derniers soit largement répandue, l’implémentation de cette pratique semble ne pas être investie de manière effective. En effet, le système éducatif actuel laisse peu de place à l’exercice des droits de l’enfant car la priorité est axée sur un fonctionnement davantage autoritaire que participatif (Louviot, Moody et Darbellay, 2019, p.1).

Aujourd’hui, beaucoup de professionnels de l’enfance s’accordent à dire que l’éducation aux droits de l’enfant, au même titre que les compétences académiques, devraient trouver leur place dans les systèmes éducatifs. En effet, l'école est un acteur prioritaire autant dans la transmission aux enfants des valeurs associées aux droits de l'enfant que dans la transmission des savoirs. Les résultats issus de la recherche ont montré les bénéfices individuels et collectifs d’une éducation aux droits de l’enfant. En effet, il convient de noter que les enfants font preuve d'un plus grand respect des autres dans les contextes scolaires qui privilégient la mise en œuvre des droits de l'enfant (Covell & Howe, 2001 dans Louviot, Moody et Darbellay, 2019, p.2). De plus, il résulte de cette éducation aux droits de l’enfant que les élèves seraient plus optimistes quant à l’avenir (Covell & Howe, 1999 dans Louviot, Moody et Darbellay, 2019, p.3) et auraient également une plus grande estime d’eux-mêmes, une plus grande motivation ainsi qu’un comportement plus altruiste (Louviot, Moody et Darbellay, 2019). Ce sont autant de caractéristiques qui augmentent leur plaisir à travailler à l’école et qui permettent ainsi un plus grand investissement à l’école, de meilleures capacités à débattre entre les élèves de même qu’une meilleure coopération entre eux. En ce sens, la question des droits de l’enfant, leur respect au sein de l’école ainsi que l’éducation aux droits de l’enfant pourraient favoriser le développement de la pensée critique, réflexive et créative chez les enfants et, de ce fait, l’exercice effectif de leurs droits.

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3. Le développement de la pensée réflexive et de la créativité chez l’enfant Au-delà du développement des compétences perceptives, sensorielles, motrices et cognitives de ses premières années de vie (Piaget, 1947, Piaget et Inhelder, 1966), au fil des années, l’enfant va peu à peu développer des compétences plus fines et abstraites telles que la réflexivité et la créativité.

a) Développement de la créativité chez l’enfant

Depuis plus d’un siècle, nous assistons à un nombre croissant de recherches sur la créativité. Cependant, une définition consensuelle de la créativité a été difficile à admettre tant le concept est complexe et les débats scientifiques à ce sujet sont toujours d’actualité. Finalement, la créativité a pu être définie comme « la capacité à réaliser une production qui soit à la fois nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste » (Amabile, 1996 ; Barron, 1988 ; Lubart, 1994 ; MacKinnon, 1962 ; Ochse, 1990 ; Sternberg & Lubart, 1995).

De nombreuses études ont eu pour objectif principal l’observation de changements à la fois qualitatifs et quantitatifs dans le développement des capacités créatives

(Runco & Charles, dans Lubart, Mouchiroud, Tordjman et Zenasni, 2003, p.101).

Torrance (1968) est le premier auteur à mettre en avant des périodes d’affaiblissement temporaire pendant le développement de la créativité. Les résultats obtenus des études sur le développement de la créativité mettent en avant trois phases d’affaiblissement des performances créatives : la première vers 5-6 ans, la seconde

vers 9-10 ans et la troisième aux alentours de l’âge de 13 ans (Besançon & Lubart,

2015, p.26-35).

Vers 5-6 ans, la chute des performances créatives correspond à la période de l’entrée en école élémentaire en France. Pour Torrance (1968), cela s’explique par des effets normatifs de l’environnement au sein de l’école. L’enfant serait, à ce stade de sa scolarité, guidé par « les apprentissages et le respect des règles de vie scolaire au détriment de son expression créative » (Besançon & Lubart, 2015, p.27).

Vers 9-10 ans, une baisse de la créativité est observable chez les enfants en lien avec leur développement cognitif. Torrance (1968) note que cette période correspond au

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niveau scolaire CM1 en France et il propose une interprétation de cette chute basée sur l’influence de l’environnement social. En effet, les enfants auraient la volonté de se conformer aux règles scolaires afin de ne pas sortir de la norme et ainsi d’appartenir à un groupe (Lubart et al., 2003, p.103).

Enfin, vers 13 ans, Torrance met également en avant des facteurs d’ordre environnemental à l'origine de la chute des performances créatives. Cette période de l’adolescence est marquée par des phénomènes de conformisme social (Lubart et al., 2003, p. 107).

Ainsi, les études de Torrance concernant le développement de la pensée créative chez l’enfant et l’adolescent montrent que la créativité peut évoluer tout au long de la vie.

b) La créativité de l’enfance à l’âge adulte

Lorsqu’on parle de « développement de la créativité », cela laisse sous-entendre que ce concept va se développer tout au long de la vie : de l’enfance à l’âge adulte. A l’âge adulte, la créativité se manifeste notamment dans le monde du travail et comme le souligne l’ingénieur américain Maurice Zeldman : « les entreprises qui survivront demain, sont celles qui encouragent la créativité d’aujourd’hui ». A travers cette citation, l’enjeu et l’importance de la créativité dans un monde en perpétuel changement impliquent d’être flexible et créatif face aux différents défis imposés. Ainsi, si la créativité se développe dès l’enfance, elle devrait se perpétuer tout au long de la vie. Néanmoins, force est de constater que « la quantité de productions créatives augmente rapidement avec l’âge pour atteindre un sommet situé en

moyenne autour de quarante ans » (Lubart et al., 2003, p.108).

Les études de Simonton (1997) ont montré qu’au-delà de l’âge, d’autres facteurs peuvent influencer la créativité chez les adultes. En effet, parmi eux, le domaine dans lequel s’exprimera la créativité joue également un rôle important dans son développement. Cette variabilité est observée non seulement entre domaines (e.g. entre les mathématiques et l’histoire), mais aussi entre deux sous-disciplines (e.g. entre

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la chimie et la physique dans le domaine des sciences) (Simonton, dans Lubart et al., 2003, p.112).

Ainsi, certains facteurs importants incluant les facteurs environnementaux (voir partie C. 2. b)) jouent un rôle considérable dans le développement de la créativité tant chez l’enfant que chez l’adulte : c’est ce que met en avant le modèle multivarié de la créativité.

c) Le développement de la réflexivité : pilier à l’émergence de la créativité ?

La CDE (1989) représentée par le Comité des Droits de l’Enfant stipule que l’enfant a des droits. Par conséquent, cette Convention donne le droit aux enfants d’agir en conséquence. Dans cette logique, l’enfant est structuré par ce qui est mentionné dans la Convention mais il est également structurant puisqu’il peut désormais agir sur les institutions grâce aux droits mentionnés dans la CDE.

La théorie de la structuration de Giddens (1984, 1987) rend compte de ce mouvement bidirectionnel entre les individus et la société : l’enfant est à la fois contraint par les structures sociales mais il est également habilité à agir sur celles-ci. Pour que l’enfant puisse agir sur ces structures, il doit être doté d’« agency ». L’agency correspond au « pouvoir d’agir ». Cela suppose que l’enfant fasse des choix : il est actif et acteur de sa propre construction (James, Jenk dans Stoecklin, 2018, Sociologie de l’enfance, cours : l’agency des enfants), et également qu’il produise des changements sociaux dans le monde (Mayall, 2002 dans Stoecklin, 2018, MIDE, Sociologie de l’enfance, cours : l’agency des enfants). Cette interaction entre l’enfant et la société va lui permettre de mettre en œuvre sa réflexivité : il comprend des choses qu’il ne voit pas. En effet, il intériorise les normes sociétales mais il comprend également qu’il peut agir sur la société. Petit à petit, l’enfant devient donc un être capable de réflexivité (Stoecklin, 2018, MIDE, Sociologie de l’enfance, cours : Le système social).

La réflexivité correspond, en fait, à un processus de retour en arrière car : « la réflexion est considérée comme un retour de la pensée sur elle-même en vue d’examiner et d’approfondir un de ses actes spontanés ou un ensemble de ceux-ci » (Blay, 2003,

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dans Morisse, 2014, p. 32). Selon Dewey (2010), afin de se retrouver mieux armé face aux situations inédites auxquelles l’apprenant va faire face, il devra utiliser avec intelligence l’expérience qu’il a actuellement : cela lui ouvrira « l’accès à des expériences à venir » (p.195). Ici, Dewey fait directement référence à l’impact de la réflexivité sur les évènements à venir.

Ainsi, d’après la définition accordée à la créativité selon laquelle une production est qualifiée de créative lorsqu’elle est « nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste » (Amabile, 1996 ; Gardner, 1996 ; Lubart et al., 2003 ; Osche, 1990), la réflexivité pourrait constituer un outil au développement de cette créativité. En effet, l’idée sous-jacente stipule que les êtres humains étant doués de réflexivité et d’un potentiel d’idées abstraites peuvent imaginer des choses qui n’existent pas (Dewey, 2004, p. 43). C’est par cet aspect de la réflexivité que la nouveauté de la production créative peut être expliquée. De plus, dans l’idée de la socialisation de l’enfant, la réflexivité ne traduit pas une simple intériorisation des normes mais également une distanciation que l’individu met en œuvre face aux structures sociales qui guident son action (Dubet, 1996, dans Stoecklin, 2018, MIDE, Sociologie de l’enfance, cours : L’enfant à l’école). De ce fait, à travers sa socialisation, l’enfant développerait sa réflexivité qui, elle-même, favoriserait le développement de compétences créatives. Il serait ainsi possible de voir se tisser un lien entre la réflexivité et la créativité. Pour expliquer ce lien, Piot (2012, p.97) reprend l’idée de Dewey selon laquelle les expériences antérieures, ayant été soumises à un système de résolution de problème pour agir, vont servir de point d’ancrage à la production d’une pensée créative (dans Capron Puozzo & Wentzel, 2016, p.38).

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B. L’école et le développement intelligence-créativité : une

cohabitation possible ?

1. L’école traditionnelle : en adéquation avec la société actuelle ? a) École traditionnelle : enseigner à la conformité ?

L’évolution constante de la société depuis plusieurs années a entraîné une demande croissante de capacités créatives dans la vie professionnelle. Les recruteurs souhaitent désormais faire face à des individus faisant preuve d’innovation et d’adaptation à la société actuelle (Besançon et al., 2005). Néanmoins, le système éducatif actuel reste attaché à la réussite scolaire, à la poursuite d’une meilleure efficacité des élèves et à des tests pour « s’assurer que les élèves atteignent certains standards de performance » (Feyfant et Rey, 2012, p.1). L’inconvénient de ces mesures axées sur les performances est de laisser au second plan une évaluation plus globale et intégrée du développement de l’enfant qui pourrait bien être également très importante pour relever les défis à venir (Denervaud, Knebel, Hagmann & Gentaz, 2019, p.1).

L’école se trouve ainsi partagée entre deux réalités au milieu desquelles elle peine à se positionner. D’un côté, l’époque dans laquelle elle s’inscrit et les multiples changements sociétaux que cela engendre et de l’autre, l’héritage passé d’une école fondée sur des besoins économiques qui ne sont plus d’actualité.

De plus, l’école d’aujourd’hui reste attachée à l’application d’une même méthode pour tous les enfants plutôt que de prendre en compte les spécificités de chacun. La prise en considération des besoins de chaque élève a pourtant fait ses preuves en matière de développement personnel et de motivation à étudier.

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b) L’exemple des enfants à haut potentiel intellectuel : quelle place pour eux dans les écoles traditionnelles ?

L’offre pour les enfants surdoués en matière scolaire commence à s’étendre. En Suisse, la première école romande destinée aux enfants HPI a fêté ses vingt ans en 2017. D’après Skjellaug (2017), bien que les enfants HPI aient des capacités de raisonnement, de mémorisation et d'invention plus élaborées que la moyenne, ce sont toutefois des enfants présentant un bagage émotionnel lourd. En effet, compte tenu de leur quotient intellectuel supérieur à la moyenne, les enfants HPI se posent beaucoup de questions sur des éléments existentiels du monde tels que la mort et ces questionnements entraînent parfois des situations anxieuses. L’hyper-empathie fait également partie des caractéristiques souvent présentes dans le fonctionnement d’un enfant HPI. Et cet ensemble de composantes requiert généralement qu’une attention particulière soit accordée à ces enfants et à leurs besoins et ce, notamment dans le cadre scolaire.

Dès lors, il existe un double questionnement sur la relation entre les enfants HPI et l’école. La première relève d’un paradoxe : les enfants HPI sont dotés de capacités intellectuelles élevées mais se retrouvent en difficulté scolaire (Tordjman, 2005) et la seconde est axée sur la manière dont les programmes scolaires s’adaptent au potentiel intellectuel de ces enfants largement supérieur à celui d’enfants du même âge (Pereira-Fradin & Jouffray, 2006). La position des systèmes éducatifs face à la question de la scolarisation des enfants HPI relève d’une question essentiellement géographique. En effet, alors que les États-Unis d’Amérique créent leur première école destinée aux enfants HPI en 1901, ce n’est qu’en 2002 que la France publiera un rapport sur la scolarisation des enfants HPI en proposant des projets structurels et institutionnels pour scolariser ces enfants (Pereira-Fradin & Jouffray, 2006).

Ainsi, force est de constater que, malgré des dispositions prises pour tenir compte de la diversité des élèves, l’intégration des enfants HPI dans les systèmes éducatifs reste peu effective et ceci « peut être dû au fait que cette population reste encore assez mal connue » (Reis et McCoach, 2002).

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2. Les pédagogies alternatives : entre apprentissages théoriques et créativité « Chaque enfant possède des capacités et des centres d’intérêt différents ; il ne s’agit donc pas d’attendre que tous développent le même niveau de compétence dans tous les domaines – et encore moins au même moment. » (Alvarez, 2016, p.216)

a) Qu’est-ce que les pédagogies alternatives ?

L’éducation alternative ou l’école « child-friendly » correspondent à des pédagogies qui diffèrent du fonctionnement actuel de l’école traditionnelle. A l’instar des méthodes Montessori, Freinet ou encore Steiner, les pédagogies alternatives ont montré des bénéfices effectifs en matière d’éducation. Maria Montessori a permis l'implémentation de la première école Montessori en 1907 au service des enfants économiquement défavorisés et de ceux présentant un retard mental (Pickering, 1992). Désormais, cette approche est destinée à l’apprentissage de valeurs telles que l’indépendance personnelle, l’autodiscipline et l’initiative en parallèle des apprentissages scolaires (Lopata, Wallace et Finn, 2005). L’idée de Maria Montessori (1965) est de développer du matériel sensoriel et autocorrectif en adéquation avec les demandes des enfants qui deviendra un support aux apprentissages académiques et qui leur permettra de trouver la solution par eux-mêmes. Les interactions pro-sociales et donc non compétitives sont également favorisées grâce au mélange des âges des enfants dans les classes, ainsi « les plus grands peuvent aider les plus petits et y trouver une certaine fierté et les plus petits éprouvent un grand intérêt à interagir avec leurs ainés » (Denervaud & Gentaz, 2015, p.1).

Des études quantitatives ont montré qu’en général, les enfants scolarisés dans les écoles de type pédagogie alternative obtenaient de meilleurs résultats que les enfants scolarisés dans des écoles traditionnelles. Ces résultats concernent en fait les résultats scolaires, créatifs et sociaux dans lesquels les enfants scolarisés dans des écoles de type pédagogie alternative (ici, Montessori) obtiennent de meilleurs résultats que les enfants scolarisés dans des écoles traditionnelles (Denervaud, Knebel, Hagmann et Gentaz, 2019). L’étude de Cox et Rowlands (2000) a également indiqué que l'approche de l'éducation artistique dans les écoles Steiner est propice à

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davantage d’imagination dans les dessins des enfants mais également à des dessins plus précis et détaillés que ceux des enfants issus des écoles traditionnelles.

Denervaud et Gentaz (2015) ont démontré les effets de la « méthode Montessori » sur le développement psychologique des enfants à travers de nombreuses recherches quantitatives. La synthèse de cette recherche a exposé les effets bénéfiques de la méthode Montessori sur « les comportements socio-émotionnels, les compétences académiques et le potentiel créatif des élèves » (Denervaud & Gentaz, 2015, p.1). Ainsi, les approches pédagogiques alternatives à l’instar de Freinet, Waldorf ou encore Montessori « tendent à aborder les programmes scolaires de manière plus globale et interdisciplinaire » (Denervaud, Knebel, Hagmann & Gentaz, 2019, p.1)

b) Une coexistence difficile entre créativité et apprentissages à l’école ? L’école représente la première institution favorisant le développement des connaissances de l'enfant mais elle a également un objectif de support dans l’apprentissage collaboratif et la résolution de problèmes créatifs (Besançon et Lubart, 2015, p.7).

Si la créativité apparaît désormais comme un concept-clé d’actualité dans les écoles et plus tard, comme une injonction dans la sphère professionnelle pour faire preuve de flexibilité, « les enseignants sont souvent démunis quant à son intégration dans le processus d’apprentissage » (Clerc-Georgy, 2016 dans Capron Puozzo, 2016). Selon Capron Puozzo (2016), la difficile intégration de la créativité dans les écoles peut être due à des facteurs multiples. Tout d’abord, la favorisation du développement de la pensée convergente (donner la seule réponse correcte) au détriment de la pensée divergente (donner le plus de réponses possibles) peut expliquer cette mise à l’écart de la créativité dans les apprentissages. Ensuite, il y aurait une relation de « tension » entre les croyances des enseignants concernant la créativité et la conception qu’ils ont de l’« élève idéal ». En effet, c’est l’association de la créativité avec le « non-conformisme » qui constitue un frein à l’implémentation effective de la créativité dans les écoles car l’école est encore « parfois soupçonnée de récompenser la conformité » à travers les examens (Rey & Feyfant, 2012, p.2). Enfin, force est de constater que l’environnement scolaire n’est pas toujours favorable à des pratiques

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innovantes et créatives dans lesquelles les enfants pourraient se montrer pleinement imaginatifs.

Enfin, la créativité reste souvent considérée comme un don extraordinaire (Robinson, 2011) dont seules les personnes qui s’écartent de la norme sont dotées. Ainsi, selon ce principe, il reste difficilement concevable pour certains élèves et enseignants de mettre en œuvre la créativité dans le processus pédagogique afin que les élèves puissent la développer (Craft, 2005 dans Capron Puozzo, 2016).

c) L’enseignement de la philosophie : une réponse aux droits de l’enfant et à la créativité ?

De nos jours, l’enseignement de la philosophie demeure parfois contesté. Néanmoins, le développement de l’enseignement à la philosophie dans les écoles primaires a montré de nombreux bénéfices pour les enfants. Ils apprennent davantage à se décentrer, ils développent leur esprit critique, ils voient leur pensée réflexive s’éveiller et améliorent leur expression grâce aux interactions avec leurs pairs (Boonaert, 2012, p.1). Ainsi, la pratique de la philosophie apporte aux enfants une meilleure maîtrise du langage et de la pensée qui représentent des outils nécessaires à la communication et plus largement à la participation. L’article 13 de la CDE (1989) sur « le droit de l’enfant à recevoir et à répandre des informations et idées ainsi qu’à exprimer son opinion, pour autant que cela ne porte pas atteinte aux droits d’autrui » pourrait rejoindre l’idée selon laquelle la pratique de la philosophie est nécessaire.

Lipman fonde en 1974 une pratique pédagogique qui vise à développer l’intelligence en mettant en œuvre la recherche philosophique dans l’éducation, plus communément appelée « Philosophy for Children » (P4C). Il s’agit d’une pratique éducative aboutissant à un renforcement de la pensée multidimensionnelle chez les enfants tout en leur offrant des circonstances éducatives qui rendront possible cette pratique (Jusso, 2007, p.221). Lipman explique cette pensée multidimensionnelle par trois composantes : l’habileté de penser critique, l’habileté de penser créative et l’habileté de penser attentive. (Hirschi, 2019, MIDE, cours Droits de l’enfant, éducation et créativité : La philosophie du sens, philosophie pour enfants).

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En ce sens, l’enseignement de la philosophie pourrait favoriser la participation des enfants et donc, plus largement, l’exercice de leurs droits conformément à la CDE (1989). Mais elle permettrait également, comme l’a souligné Lipman (1974), de développer des habiletés de penser dont l’habileté créative fait partie intégrante avec comme composantes sous-jacentes, des capacités d’imagination, d’invention et holistiques (Jusso, 2007, p.71).

3. Repenser le système éducatif actuel

Les recherches actuelles mettent en avant l’importance de la créativité chez l’enfant (Barbot & Lubart, 2012 ; Besançon, Barbot & Lubart, 2011 ; Besançon, Georgsdottir et Lubart, 2005 ; Denervaud, Knebel, Hagmann & Gentaz, 2019 ; Feyfant & Rey, 2012 ; Lubart, Mouchiroud, Tordjman & Zenasni, 2003). Toutefois, elles soulignent également les difficultés que rencontre l’école à faire face à une baisse constante du potentiel créatif des élèves. Se pose alors la question de l’élaboration d’un enseignement au service de la créativité, « dans lequel la créativité de l’élève est à la fois un but et un moyen pour apprendre » (Coppey Grange, Moody & Darbellay, 2016, p.96). Le constat selon lequel l’école pourrait représenter un environnement peu favorable au développement de la créativité des élèves va plus loin en affirmant que les études mesurant la créativité montrent qu’elle chute significativement à des âges bien précis de la scolarité en parallèle avec le développement de compétences plus fines (Lubart & al, 2003). Cependant, certaines facultés, comme la pensée divergente ou la prise de risque, pourraient permettre de résister à cet affaissement et ainsi favoriser l’essor de la créativité (Clifford, 1988 ; Lubart, 2003 ; Robinson, 2008).

Dès lors, si le développement de certaines facultés permettrait de maintenir un certain niveau de créativité, force est de souligner que l’influence des enseignants et notamment leur personnalité, jouent un rôle considérable sur le développement de la créativité des élèves. En effet, un enseignant motivé et capable de prendre des risques, plutôt que soucieux de perpétuer les méthodes conservatrices d’enseignement, représente un facteur essentiel à l’implémentation de la créativité dans sa classe (Feyfant et Rey, 2012, p.11). Au-delà de ce facteur intra-personnel propre à chaque enseignant, les apprentissages transversaux, à l’instar de l’éducation aux droits de l’enfant (voir partie A. 2. a)) et l’enseignement de la philosophie dès le

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plus jeune âge (voir partie B. 2. c)), peuvent jouer un rôle considérable dans le développement de l’enfant. En effet, l’éducation aux droits de l’enfant vise à la fois le développement de connaissances et de compétences mais également l’acquisition d’attitudes et de valeurs fondamentales (Moody, 2019). Quant à l’enseignement de la philosophie, le but de sa pratique est de permettre l’éveil des pensées critiques, créatives et attentives des élèves (Hirschi, 2019).

Le type de pédagogie adoptée devrait également jouer un rôle dans le développement créatif. En effet, au Danemark par exemple, « les enfants sont évalués non sur ce qu’ils ont appris par cœur, mais sur leur capacité à exprimer un point de vue original sur un sujet discuté en profondeur en classe » (Taddéi, 2009 dans Rey &

Feyfant, 2012). Ainsi, au-delà du développement de leur esprit critique et réflexif, les

enfants font davantage connaissance avec l’originalité et leur potentiel créatif et ce, dans toutes les matières enseignées. En ce sens, il serait alors intéressant d’avoir recours à des pédagogies favorisant des liens entre les différentes matières et le développement de la pensée divergente pour ainsi favoriser la créativité (Besançon, Georgsdottir et Lubart, 2005, p.53). En reprenant l’idée de l’éducation aux droits de l’enfant et en faisant collaborer différentes disciplines autour de ce thème, il peut être envisagé d’accompagner les élèves à construire des liens entre ces disciplines afin qu’ils deviennent les acteurs de leur propre processus d’apprentissage (Louviot, Moody et Darbellay, 2019). Ainsi, force est de constater que plusieurs facteurs jouent en faveur de l’implémentation d’une pédagogie tournée vers les besoins réflexifs, critiques et créatifs des élèves, et notamment : la formation des enseignants, leur motivation et celle des élèves ainsi que la structure de l’école et la pédagogie qu’elle adopte.

Face à ce constat quant au système éducatif actuel, il serait intéressant de se demander quelle est la nature des liens qu’entretiennent les apprentissages, l’intelligence et la créativité chez les enfants.

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C. Créativité et intelligence : entre association et dissociation

1. Qu’est-ce que l’intelligence ? a) Définitions

De nombreux auteurs se sont penchés sur le large domaine de l’intelligence et ont conclu qu’il est difficile de donner une définition concise de l’intelligence tant ce concept réunit de multiples variables. Bien que la plupart des chercheurs admettent une définition de l’intelligence comme « capacité d’adaptation, plus précisément comme capacité d’un organisme à s'auto-modifier pour adapter son comportement aux contraintes de son environnement » (Liratni & Pry, 2007, p.215), la généralisation de l’intelligence semble compromise. Binet et Simon affirment qu’ils ont été « conduits à distinguer plusieurs formes d’intelligence, qui jusqu’ici ont été confondues, et dont la distinction offre un intérêt pratique » (Binet & Simon, 1904, p.74). Ces auteurs ont alors mis en exergue la distinction entre l’intelligence et les aptitudes scolaires car l'aptitude scolaire relève également du domaine de « l’attention, de la volonté, de la continuité dans l’effort ainsi que du caractère de chacun » (Binet & Simon, 1904, p.75). L’intelligence seule ne suffirait alors pas à la réussite scolaire et l’étude de Binet et Simon (1904) a montré que les enfants jugés les plus intelligents ne sont pas toujours les plus avancés dans leurs études. En effet, il existerait un certain nombre de connaissances acquises en dehors du contexte scolaire qui peuvent devancer l’âge ordinaire de l’acquisition (Binet & Simon, 1904). Ce constat fait inévitablement référence à la place que prennent l’inné et l’acquis dans le concept d’intelligence. En effet, si la génétique est un marqueur fondamental du développement futur de l’intelligence de l’enfant, un milieu socio-culturel favorable comprenant l’éducation, la famille et un environnement riche favorisent un épaississement du cortex entraînant un nombre de connexions synaptiques croissant. Ainsi, la multiplication des connexions synaptiques se développerait proportionnellement à l’intelligence (Rosenzweig & Bennett, 1996).

Afin de mesurer l’intelligence et ainsi de diagnostiquer les enfants à haut potentiel intellectuel (HPI), il est communément admis d’avoir recours au quotient intellectuel (QI) mesuré grâce à des tests psychométriques. Le WISC V est une échelle d’intelligence internationale développée par Weschler en 2014 destinée aux enfants de 6 à 16 ans et 11 mois. Dans les épreuves prévues par ce test, la moyenne du

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quotient intellectuel est de 100 et l’écart type est de 15 points. Autrement dit, si l’enfant obtient un score entre 85 et 115, il est considéré comme étant dans la moyenne d’une distribution gaussienne. Cependant, si son score au test de QI est égal ou supérieur à 130, l’enfant sera considéré comme HPI. Cette norme standardisée fixée à 130 et plus pour le diagnostic d’un enfant HPI correspond à environ 2,2% de la population éligible (Liratni & Pry, 2007).

Figure 1 : Prignon, S. (2013). Consultée sur

https://cabinet-hi-mind.ch/wp-content/uploads/2017/06/loi-normale-surdoues-suisse.png 1

Cependant, bien que les tests de QI permettent désormais de diagnostiquer les enfants HPI et ainsi de représenter une intelligence dite générale, leur utilisation est désormais remise en question par les professionnels de l’enfance car la dissociation des formes d’intelligence semble être nécessaire pour « mieux décrire et comprendre les particularités des enfants HPI chez qui nous constatons une forte hétérogénéité dans l’organisation de leur architecture fonctionnelle cognitive » (Liratni & Pry, 2007, p.219).

1 Figure 1 : Le schéma représente la distribution standard du quotient intellectuel de moyenne

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b) Les théories de l’intelligence

Face à un concept aussi complexe que l’intelligence, de nombreux chercheurs ont tenté une interprétation afin de tracer les frontières de l’intelligence. Alors que Spearman (1907) « démontre l’existence d’un facteur commun de réussite en se basant sur un calcul de corrélations entre les scores des individus dans des épreuves variées » (Liratni & Pry, 2007, p.215) appelé « facteur g » faisant référence à un « facteur général d’intelligence », Gardner (2004) ne soutient pas cette idée. Selon lui et grâce aux nombreuses contributions de la neuropsychologie, il existerait une indépendance entre les différentes formes d’intelligence. Il met en avant sept formes d’intelligence indépendantes les unes des autres (logico-mathématique, linguistique, musicale, spatiale, corporelle-kinesthésique, interpersonnelle, intra-personnelle). La théorie des sept intelligences de Gardner a contribué à la réforme de l’éducation car il est désormais reconnu que chaque individu a un profil d’intelligence différent et l’évaluation de l’identification de l’intelligence est nécessaire pour que chacun puisse identifier ses forces et ses faiblesses (Gardner et Hatch, 1989, p.6).

Carroll (1993) a tenté de démontrer la coexistence d’une part du « facteur g » développé par Spearman et d’autre part de plusieurs facteurs d’intelligence développée par Gardner à travers une approche multifactorielle hiérarchique combinant ces deux postulats (Liratni et Pry, 2007). La théorie Cattell-Horn-Carroll ou « CHC » (Schneider & McGrew, 2012) sur les capacités cognitives associe 10 grandes composantes au « facteur g » et plus de 70 capacités étroites liées à ces 10 grandes composantes. Il s’agit du modèle actuel de référence de l’intelligence.

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Figure 2: Booth-Butterfield, S. (2013). Consultée sur

http://healthyinfluence.com/wordpress/wp-content/uploads/2015/06/CHC-Framework-Large-e1435173950626.jpg 2

c) Intelligences fluide et cristallisée : leur implication dans la créativité De 1950 à 1970, Cattell met en avant la distinction entre l’intelligence fluide et l’intelligence cristallisée. D’une part, il considère l’intelligence fluide comme une capacité de raisonnement inductive et déductive liée aux facteurs biologiques et neurologiques. D’autre part, il postule que l’intelligence cristallisée correspond aux capacités acquises de l’individu confronté à d’autres cultures (dans Alfonso, Flanagan et Radwan, 2005).

L’intelligence fluide est communément connue pour représenter une capacité à raisonner logiquement et à faire face à des situations nouvelles, elle est considérée comme étant indépendante des apprentissages préalables ou d’expériences (e.g. faire un puzzle). En revanche, l’intelligence cristallisée correspond à l'habileté à

2 Figure 2 : Le schéma représente les 10 grandes composantes du « facteur g » développé par

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exploiter les connaissances acquises et les expériences passées. C’est ainsi, en accumulant le plus de connaissances et de compréhension possibles, que nous développons notre intelligence cristallisée (e.g. résoudre un problème mathématique).

De ce fait, en se référant à la définition même de la créativité et plus précisément au caractère « nouveau » de la production créative, l’intelligence fluide semble être la plus à même d’être favorable au développement du potentiel créatif. Néanmoins, la complémentarité de ces deux intelligences ne représenterait-elle pas l’alliance parfaite pour réaliser une production créative ?

L'intelligence fluide et cristallisée sont complémentaires du fait que certaines tâches d'apprentissage ne peuvent être maîtrisées qu'en exerçant à la fois l'intelligence fluide et l’intelligence cristallisée (Alan Boyd Knox, 1977).

2. Qu’est-ce que la créativité ? a) Définitions

« Je ne pense pas que le cœur humain puisse ressentir un plus grand frisson que celui de l’inventeur qui parvient au succès d’une découverte […] de telles émotions font tout oublier à un homme, la nourriture, le sommeil, les amis et l’amour. » Nikola Tesla Depuis plusieurs années, le concept de créativité a intéressé de nombreux auteurs à l’instar de Lubart, Mouchiroud, Tordjman et Zenasni. Ces auteurs stipulent que la créativité représente l’un « des traits qui nous distingue le mieux des autres espèces » mais que sa définition représente un « sujet de recherche en soi » (Lubart & al., 2003, p.1,10). En effet, il a fallu de nombreuses années avant de trouver un consensus autour de la définition de la créativité. Aujourd’hui, la définition la plus largement admise par les chercheurs est la suivante : « la capacité à réaliser une production qui soit à la fois nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste » (Amabile, 1996 ; Barron, 1988 ; Lubart, 1994 ; MacKinnon, 1962 ; Ochse, 1990 ; Sternberg & Lubart, 1995). Ainsi, le caractère nouveau et adapté d’une production représente la double condition pour parler de créativité effective. Cependant, bien que cette définition pose un cadre à la créativité, il reste difficile de mesurer cette variable abstraite qui dépendrait du jugement d’autrui.

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Il faut, en premier lieu, distinguer la pensée divergente de la pensée convergente. La pensée convergente est mesurable par les tests de QI et correspond à la capacité à générer l’unique réponse considérée comme correcte à des questions standardisées. La pensée divergente reste explorable par les tests de créativité et correspond à la capacité à générer le plus de réponses possibles (Wahl, 2017, p.83). Ainsi, la mesure de la créativité s’est retrouvée au centre des intérêts de plusieurs auteurs et chacun d’eux a contribué à ce que nous savons aujourd’hui sur le potentiel créatif des individus. Au début du 20ème siècle, Binet propose à des enfants de 10-11 ans d’inventer des phrases à partir de trois mots donnés. Par la suite, Guilford (1950) souligne l’importance de la pensée divergente dans l’étude de la créativité. En 1976 et sur la base des travaux de Guilford, Torrance (1976) lance un programme de recherche duquel naît la batterie de tests de Torrance basée sur les dimensions verbales et graphiques de la créativité. Grâce à ses travaux, Torrance inclut des indices quantitatifs permettant de mettre en lumière des différences interindividuelles de la pensée divergente. Urban et Jellen (1996) ont contribué à ces avancées en proposant d’ajouter la pensée convergente/intégrative afin de mettre en exergue l’implication d’autres facteurs responsables du potentiel créatif (cognitif, conatif-affectif et environnemental). Enfin, l’outil EPoC (Evaluation du Potentiel Créatif) « permet de mesurer divers aspects de la pensée créative : d’une part, la composante de pensée divergente exploratoire (proposer de nombreuses solutions à partir d’un seul stimulus), d’autre part la pensée convergente-intégrative évaluée par des épreuves dans lesquelles une seule proposition, la plus originale possible est demandée » (Besançon, Barbot et Lubart, 2011, p.5-7). Les dimensions graphiques et verbales sont utilisées dans le manuel EPoC.

b) Modèle multivarié de la créativité

A travers la définition de la créativité, plusieurs facteurs émergent et sont à l’origine d’une production créative. L’approche multivariée de la créativité permet de mettre en exergue ces facteurs et cette approche est actuellement la plus pertinente pour modéliser la créativité. Dans cette perspective, « les différences de performance créative observées entre les individus sont le résultat d’une combinaison de facteurs

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cognitifs, conatifs-affectifs et environnementaux » (Batey et Furnham, 2006 ; Lubart et al., 2003 dans Besançon et Lubart, 2015, p.12).

Les facteurs cognitifs représentent une condition essentielle à une production créative et selon Guilford (1950), la recherche active d’un grand nombre d’idées face à une situation est une bonne représentation de la cognition. Il fait alors référence à la pensée divergente. En effet, il paraît cohérent d’admettre que « plus un individu génère d’idées sur un problème, plus il a de chances de trouver une idée nouvelle et originale » (Besançon et Lubart, 2015, p.13). Néanmoins, bien que la connaissance semble essentielle à la créativité, elle peut exercer un effet négatif sur cette dernière. Et ce, notamment, car elle pourrait conduire à une certaine rigidité mentale comme l’ont prouvé Frensch et Sternberg (1989, dans Lubart et al., 2003) dans une étude où l’expérience de joueurs experts en bridge a entravé la souplesse de leur pensée contrairement aux novices qui n’ont pas été affectés par un changement d’apparence de jeu.

Les facteurs conatifs-affectifs représentent l’ensemble des traits de personnalité, de la motivation et des styles affectifs. Besançon et Lubart (2015) parlent alors de « façons d’être » qui faciliteraient l’activation des capacités cognitives responsables de la créativité. Les cinq traits de personnalité qu’ils ont estimés comme étant importants pour développer une pensée originale sont : la prise de risques, la persévérance, la tolérance à l'ambiguïté, l’ouverture aux nouvelles expériences ainsi que l’individualisme (Sternberg et Lubart, 1995 dans Besançon et Lubart, 2015). La motivation, qu’elle soit intrinsèque ou extrinsèque, joue également un rôle important dans la performance créative (Amabile, 1996). Amabile (1996) considère que la motivation intrinsèque tient une place plus importante dans les productions créatives que la motivation extrinsèque car elle prend naissance dans les besoins de l’individu, ce qui lui donne un caractère plus saillant. Néanmoins, ces deux formes de motivation doivent être développées pour réaliser une performance créative. Concernant les émotions, les résultats des études de Lubart et al. (2013, dans Besançon et Lubart, 2015) ont montré que les émotions positives aidaient à désactiver « des mécanismes d’inhibition cognitive de manière temporaire et ainsi laisser place à l’expression d’idées novatrices » (Besançon et Lubart, 2015, p.20).

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constat actuel concernant l’école suggère que les écoles traditionnelles ne favoriseraient pas ces dimensions pourtant favorables à la créativité.

Enfin, le facteur environnemental englobe autant l’environnement physique de l’enfant que son environnement social. Il comprend donc à la fois la sphère familiale, scolaire et culturelle dans laquelle il se développe. Simoton (1984) a montré à travers ses travaux que les stimulations culturelles au sein de la famille (e.g. présence de livres) favorisent la créativité des enfants. Au-delà de la famille, les enfants passent une grande partie de leur temps dans les écoles où les projets d’inclure la créativité sont d’actualité. En France, Beaudot (1973, 1980) s’est penché sur la question de la créativité à l’école. Selon lui, la pédagogie mise en place dans les écoles traditionnelles ne laisse que très peu de place à la créativité et très peu d’occasions aux élèves de l’exprimer (Besançon et Lubart, 2015). La question qui se pose alors est de savoir s’il existe un effet significatif du type de pédagogie sur la créativité des élèves. Les élèves issus d’une pédagogie alternative obtiennent-ils de meilleurs résultats en performance créative que les élèves issus des pédagogies traditionnelles ? Enfin, l’environnement social joue le rôle de juge sur le caractère créatif d’une production. « Une production est généralement jugée par une ou plusieurs personnes qui vivent dans le même milieu culturel » (Besançon et Lubart, 2015, p.22). Csikszentmihalyi (2006) explique qu’il existe un consensus social autour de ce qui est considéré comme créatif qui légitimerait qu’une production soit effectivement créative (dans Besançon et Lubart, 2015).

Dès lors, d’après le modèle multivarié de la créativité, l’alliance de ces trois facteurs cognitif, conatif-affectif et environnemental serait essentielle à des performances créatives optimales.

c) Le haut potentiel créatif

« Tout le monde est un génie, mais si vous jugez un poisson par sa capacité à grimper aux arbres, il vivra toute sa vie en croyant qu’il est stupide » Albert Einstein

Dès le début du 20ème siècle, Binet porte une attention particulière au processus créatif. Selon lui, ce processus représente un mélange de bon sens, de raisonnement et d’imagination. En récoltant des données, Binet propose l’idée selon laquelle

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l’imagination devrait être prise en compte dans l’évaluation de l’intelligence (Mouchiroud et Lubart, 2006). Si de nombreux auteurs défendent « une conception modulaire de l’intelligence » (Gardner 1983 ; Feist, 2004), cette idée semble être également présente pour le concept de créativité (e.g. un enfant peut avoir de grandes capacités créatives en physique mais avoir du mal à inventer une histoire). Alors que la connaissance du haut potentiel intellectuel (HPI) est largement répandue, celle du haut potentiel créatif n’est pas aussi populaire. Il s’avère toutefois maladroit de les distinguer de manière catégorique car ces deux notions font preuve de complémentarité. En effet, Besançon, Zenasni et Lubart (2010) stipulent que de nombreux auteurs ont avancé l’idée selon laquelle la créativité représente une « composante importante du phénomène du haut potentiel » (p.77). En termes d’explications neurocognitives, cela peut s’expliquer par la meilleure coordination du fonctionnement inter-hémisphérique des enfants HPI essentielle à la flexibilité cognitive et à la pensée divergente. En d’autres termes, les enfants HPI auraient une plus grande flexibilité cognitive et une pensée divergente plus développée que les enfants tout-venant ce qui boosterait leur potentiel créatif (Besançon, Zenasni et Lubart, 2010).

Ainsi, force est de constater que le haut potentiel créatif est une forme distincte de haut potentiel et qu’il implique « que certaines capacités cognitives soient plus développées que celles des enfants à haut potentiel académique » (Besançon et al., 2010, p.82). Et ce sont leurs capacités en termes de pensée divergente et plus précisément les liens que ces enfants arrivent à faire entre les différents concepts qui sont à l’origine d’un potentiel créatif supérieur. Les facteurs conatifs tels que le perfectionnisme et la curiosité jouent également un rôle dans la performance créative. Tout comme l'environnement qui est essentiel à la créativité et certaines pédagogies semblent favoriser son développement (Besançon et al., 2010).

Renzulli (2006) souligne que les « deux types de haut potentiel sont importants, qu’il existe généralement une interaction entre les deux et que les programmes spécifiques devraient être en mesure d’encourager ces deux types de haut potentiel et procurer de nombreuses occasions d’interaction entre les deux » (Renzulli, 2006, p.3). Il affirme que les concepts de haut potentiel intellectuel et de haut potentiel créatif-productif se distinguent. En effet, alors que l’élève à haut potentiel intellectuel apprend des

Figure

Figure 1 : Prignon, S. (2013). Consultée sur https://cabinet-hi-mind.ch/wp- https://cabinet-hi-mind.ch/wp-content/uploads/2017/06/loi-normale-surdoues-suisse.png  1
Figure 2: Booth-Butterfield, S. (2013). Consultée sur http://healthyinfluence.com/wordpress/wp- http://healthyinfluence.com/wordpress/wp-content/uploads/2015/06/CHC-Framework-Large-e1435173950626.jpg  2
Figure 4: Renzulli, J. (2005). Operation houndstooth.
Tableau 1 : Répartition des épreuves par domaine d’expression et mode de pensée évalué pour chaque  forme  Domaine d’expression  Pensées divergente exploratoire  Pensée convergentes intégrative
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