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L’économie de services contribue au développement
durable
Yuna Chiffoleau
To cite this version:
Yuna Chiffoleau. L’économie de services contribue au développement durable. Travaux et Innovations, 2010, pp.XXIII-XXIV. �hal-02653230�
JUIN-JUILLET 2010 - TRAVAUX & INNOVATIONS NUMÉRO 169 XXIII
Dossier
tion de personnes en diffi culté, préparation de repas et livraison aux personnes âgées iso-lées ou aux entreprises, approvisionnement des cantines scolaires, production et diffusion d’énergies renouvelables… : la liste des nou-veaux services proposés par les agriculteurs est riche, renouvelle une offre plus ancienne telle que l’accueil ou l’hébergement, et sans cesse est complétée par de nouvelles idées. Il aura toutefois fallu à certains le courage de montrer que tout en maîtrisant le cœur du métier agricole, qui consiste à produire, producteurs et exploitations agricoles peu-vent aussi porter des projets plus ambitieux. Les nouveaux venus en agriculture, issus d’un autre métier et/ou de zones urbaines, ainsi que les conjointes d’agriculteurs ou les femmes qui s’installent chefs d’exploitation ont joué un rôle clé en ce sens. Ils sont re-joints aujourd’hui par des profi ls très variés, porteurs de projets toujours plus divers, ce qui aide à légitimer un nouveau rôle et de nouvelles fonctions pour le secteur agricole.
Au delà du revenu, une contribution à de « nouveaux indicateurs de richesse »
Les services proposés par les producteurs per-mettent non seulement de dégager un reve-nu supplémentaire mais aussi de contribuer au développement durable des exploitations et des territoires. L’économie de services favo-rise en effet, entre autres, un apport de tré-sorerie et une moindre dépendance aux sub-ventions directement liées à la production. En valorisant la relation avec les non-agricul-teurs, elle contribue au rapprochement agri-culture-société et
ville-campagne, favorise la création d’emplois et le maintien d’un tissu rural actif, encourage la reconnaissance so-ciale d’une profession souvent mise à mal.
R
econnaître la « multifonctionnalité » de l’agriculture en 1999 était une première étape. L’enjeu est au-jourd’hui de considérer pleinement le secteur agricole comme moteur d’une économie de services, aux personnes comme aux collectivités, dans un contexte en forte muta-tion. Les membres du réseau Trame n’ont pas seulement répondu à de nouvelles attentes : en tant que « pionniers » innovants, ils ont aussi su proposer une large offre de ser-vices inédits, attirant un public varié, montrant par là que l’on peut aujourd’hui être acteur du marché et pas seule-ment soumis aux pressions de la « demande », même dans un contexte de crise. Face à une société « hypermoderne » en quête de sens et de lien social, soucieuse vis-à-vis de sa santé et son alimentation, intéressée par les activités com-binant dimensions culturelle et ludique, le secteur agricole a des ressources et des compétences à faire valoir, comme l’illustrent les initiatives des adhérents des réseaux de Trame présentées dans ce dossier.Des acteurs divers, pour des projets ambitieux
Vente de produits de qualité en circuits courts, éducation à l’environnement, au goût et à l’équilibre alimentaire,
inser-Y . Chif foleau
Un certain regard…
Yuna Chiffoleau est sociologue à l’Inra AgroSup Montpellier, membre du comité scientifi que et technique des Organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR) et animatrice du groupe Alimentation circuits courts du Réseau rural français. Elle nous livrer son regard sur les activités de services réalisées par les agriculteurs.L’économie de services contribue
au développement durable
« PAR LEURS ACTIVITÉS DE
SERVICES, LES AGRICULTEURS
DONNENT DES RÉPONSES AUX
DEMANDES DE LA SOCIÉTÉ ».
Yuna Chiffoleau, sociologue, impliquée dans la recherche de réponses par les agriculteurs aux demandes de la société.
XXIV TRAVAUX & INNOVATIONS NUMÉRO 169 - JUIN-JUILLET 2010
reconnaître, d’autant plus que les activités développées, considérées encore par certains comme « secondaires » ou « marginales », font peu ou pas l’objet d’une production de références qui pourrait faciliter leur soutien. Plus fonda-mentalement, fournir toujours plus de services aux citoyens peut encourager leur tendance à l’hyperconsommation, qui caractérise aussi la société hypermoderne et génère de nombreuses externalités négatives, telles que le gaspillage ou la banalisation des produits consommés.
Pistes et perspectives
Donner du sens aux activités proposées, revendiquer les va-leurs associées et les partager avec les consommateurs-ci-toyens, s’associer à d’autres, producteurs mais aussi acteurs du territoire, pour faciliter la mise en œuvre d’un projet ambitieux au service de la communauté, intégrer davan-tage de nouveaux venus et des personnes à faible niveau de ressources : ces quelques pistes, déjà mises en œuvre notamment par des adhérents de Trame, peuvent aider à construire une économie de services plus durable, source de cohésion sociale et pas seulement de nouveaux pro-duits marchands. Forts de leur expérience, de la position d’intermédiaires qu’ils ont souvent au sein de la profession agricole et de leur ancrage dans les territoires, ces acteurs doivent continuer à montrer l’exemple et innover toujours davantage pour construire la société de demain. ■
Yuna Chiffoleau
Chercheur en sociologie à l’Inra Inra Supagro Montpellier - 2 place Viala - 34060 Montpellier Cedex 2 –
Tél. : 04 99 61 25 57 - chiffole@supagro.inra.fr
Elle permet ainsi de changer l’image du sec-teur agricole, ce qui peut aider à attirer des jeunes pour s’installer. Les initiatives déve-loppées notamment par les adhérents des ré-seaux de Trame témoignent aussi d’une plus grande prise en compte des enjeux environ-nementaux, locaux comme globaux, à travers la mise en valeur du patrimoine et la préser-vation des énergies fossiles. L’économie de services développée aujourd’hui par le sec-teur agricole doit ainsi s’évaluer à l’aide de « nouveaux indicateurs de richesse », de par sa contribution active à un « mieux vivre en-semble ».
Une économie de services soumise néanmoins à des limites
Proposer de nouveaux services suppose tou-tefois de nouvelles compétences, une bonne organisation du travail, des ressources spéci-fi ques : le besoin de temps et de moyens pour assumer plusieurs métiers n’est pas toujours bien anticipé et la pression liée à la gestion et la maîtrise d’un système d’activités com-plexe peut générer stress et fatigue. Atten-tion, alors, au mirage, dans un contexte où les medias peuvent avoir tendance à sur-valo-riser les « success stories » ! De plus, la ques-tion du statut peut poser problème : la plu-riactivité en agriculture reste diffi cile à faire