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Comment, tout en étant conscient des dangers du greenwashing, la société nous pousse-t-elle irrémédiablement à y recourir?

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Academic year: 2022

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L’avez-vous remarqué ? Le vert est partout autour de nous. Dans nos télés, dans nos rues, dans nos cadis…. Il nous séduit pour être mieux consommé. Alors que le greenwashing repeint tout en vert, ses conséquences sur l’environnement et la population virent au noir.

Avant de s’intéresser à l’omniprésence du greenwashing, passons à la loupe son émergence. Tout commence avec la société de consom- mation. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le but est de reconstruire l’Europe. Cela passe par l’influence de l’American Way of Life, qui incarne le confort de la vie quotidienne. Durant les 30 glorieuses, de 1945 à 1975, la population recherche et représente son bonheur à travers ce qu’elle consomme. À cette période, on peut observer une hausse de la grande distribution avec, pour exemple, un agrandissement des supermarchés en hypermarchés. En France, en 1966, il y avait 2 hypermarchés, en 1975, il y en avait 284[1]par une progression de la consommation de plus de 4% par an.[2]Sa hausse amène à l’apparition du marketing dès 1950, théorisé en 1962.[3]Mais la croissance de la société de consommation produit sa critique : prendrait-elle le dessus sur le consommateur ainsi que sur l’envi- ronnement ? Jusqu’à nos jours, la demande des consommateurs n’a cessée d’évoluer en laissant place à la croissance verte qui consiste à mettre en place une stratégie de développement économique sou- tenable sur le long terme tout en veillant aux ressources naturelles et la biodiversité, d’après un article de green economy.[4]

Cependant le marketing a tiré profit de cette demande par une technique apparue en 1989, celle du GreenWashing : green (vert) et brainwashing (lavage de cerveau).[5]Le greenwashing est popularisé pour la première fois, en 1991, dans le titre d’un article dans la revue américaine Mother Jones.Parfois également appelé écoblanchiment, le greenwashing est une technique de communication mensongère utilisée par une entreprise ou un politique pour tromper délibé- rément le public en montrant une image d’acteur engagé dans le développement durable. Dans les faits, il n’en est rien.[6]Cette ten- dance s’expend principalement à partir des années 2000 et depuis, de nombreuses conséquences sur l’environnement et la population ont été référencées.

Réal Migneault, fondateur de La Ferme de Rue Montréal dans le domaine de l’agriculture urbaine, nous donne un exemple pour ex- pliciter l’impact du greenwashing : « Une société internationale qui

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se targue d’être écologique parce ce que son siège social arbore une certification environnementale, mais dont les activités dans les pays en voie de développement sont à l’origine de désastres écologiques, quand elles ne conduisent pas à l’appauvrissement des populations locales ».[7] Cela ne vous fait-il pas penser au drame de 2013 ? Au Bangladesh, plus précisément à Savar, un immeuble s’est effondré avec plus de 1127 morts. Ce bâtiment abritait des ateliers de confec- tion de vêtements qui étaient exportés vers des marques internatio- nales dont certaines prônent être responsables.[8] Cette catastrophe fût renommée le drame de Rana Palza. Outre que l’appauvrissement et l’exploitation des populations locales des pays en voie de déve- loppement de la part des pays développés, le greenwashing attise la consommation de masse, puisque cette technique a pour but de stimuler l’envie d’achat du consommateur. Maintenant que nous connaissons son émergence, comprenons son expansion avec comme fil conducteur :

Comment, tout en étant conscient des dangers du greenwashing, la société nous pousse-t-elle irrémédiablement à y recourir ? Qui sont les acteurs qui font perdurer cette tendance ? D’après les données de l’ADEME, en 2010, sur 508 visuels publicitaires recensés ayant trait à l’environnement, 12,2% ont fait l’objet de réserves et 5,9% ont été pointés du doigt pour « non-respect flagrant et sé- rieux des règles en vigueur ».[9] En effet les principaux acteurs du greenwashing sont les entreprises et principalement les multinatio- nales des secteurs de l’énergie, de l’automobile et des produits de grandes consommation. Par bien des moyens, ils arrivent à manipuler les consommateurs. Du vert à ne plus pouvoir en voir, des slogans accrocheurs, des labels tombé du ciel… En effet, l’auto labellisation écologique est le moyen le plus persuasif, d’après l’Hal.[10]Néan- moins, le cadre législatif est assez laxiste en Europe et dans le monde puisqu’il n’y aucune sanction pénale contre ces méthodes. La majeure régulation du greenwashing se fait par la loi interdisant la publicité mensongère ou par les entreprises elles-mêmes, bien que plusieurs structures se mettent en place comme l’ARPP, Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité, le CPP, Conseil Paritaire de la Publicité, ou encore la JDP, Jury de Déontologie Publicitaire.[11]

Plusieurs multinationales, par le lobbyisme, réussissent à déjouer les

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lois. Pour exemple, il est très actuel de constater un dédouanement de responsabilité de la part des entreprises concernant leur impact environnemental. Elles rejettent les conséquences de leur implica- tion sur les consommateurs, en leur réprimandant l’usage de leur consommation.

Cependant cela aboutit à un débat d’ordre éthique : Quelle est la position du citoyen ? Doit-on laisser aux entreprises toute la liber- té dans leur communication publicitaire ? Bien que nous puissions remarquer un scepticisme croissant des consommateurs envers la publicité pour déjouer les stratégies du marketing, le greenwashing consent à la décrédibilisation de la croissance verte et plus globale- ment à la décrédibilisation de la pensée écologique. Le 25 juin 1998, 39 États ont signé la convention d’Aarthus concernant le droit à l’in- formation concernant l’environnement. Ce droit permet d’agrémenter les concepts de participation et de la transparence puisque cela vise à inciter la participation de la population aux décisions politiques et, par cela, à la démocratie participative. Nous pourrions donc penser qu’il serait illégal de faire usage de la technique du greenwashing, en raison du manque de transparence et de la manipulation faite sur les consommateurs. Lors de cette signature, la France a déclaré :”Le gouvernement français veillera à la diffusion des informations pertinentes pour la protection de l’environnement tout en assurant la protection des secrets industriels et commerciaux, en se référant à la pratique juridique établie applicable en France”.[12]Et si l’État était aussi responsable du recoure perpétuel du greenwashing ? D’ailleurs la politique ne fait-elle pas usage de cette stratégie ? Vous avez peut-être eu l’opportunité de remarquer l’intérêt écologique que peuvent avoir les politiciens durant leur campagne électorale.

En septembre, une enquête réalisée pour Le Monde montrait, qu’en 2019, la protection de l’environnement est devenue la première pré- occupation pour 52% des Français interrogés, avant même l’avenir du système social.[13]De ce point de vue, peut-on remettre en cause l’engagement et l’honnêteté des promesses électorales concernant l’environnement ?

Jusqu’ici, nous avons pu observer certains des acteurs de cette stratégie publicitaire, qui ont pour but d’influencer le comportement d’achat. Alors que nous connaissons les responsables du greenwas- hing et les conséquences dramatiques que cela peut avoir, intéres- sons-nous maintenant à : Comment font-ils pour nous susciter l’envie

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de consommer un produit dit écologique ?

Nous cessons de comparer notre environnement, et c’est pourquoi ce fonctionnement nous destine particulièrement aux pièges des publicitaires, d’après Dan Ariely.[14]Comment font-ils pour orienter les achats du consommateur ? “Pour apporter un début de réponse, il est essentiel de comprendre la manière dont les consommateurs décryptent les messages environnementaux dans les publicités et de tenir compte de leur capacité à formuler un jugement critique les concernant.”[15]En effet, le greenwashing repose sur des per- ceptions écologiques artificielles dans l’esprit des consommateurs.

Mais maintenant, que nous savons que la publicité se base sur le fonctionnement sensible et symbolique du traitement de l’informa- tion, par quel processus manipulent-ils les consommateurs ? Début le XXe siècle, la discipline de la psychologie du consommateur se développe et a mis en évidence le processus d’influence. Walther Scott avec la publication, en 1908, du livre Psychologie of Advertsing (la psychologie de la publicité) corrobore que ce processus repose sur plusieurs points clés.[16]Il faut récupérer les personnes déviantes afin de rendre tout le monde semblable. Cela permet d’estomper la particularité et l’individualité des personnes.[17]Selon le psychosocio- logue Serge Moscovici “Plus on pousse loin le processus d’identifica- tion et de désindividualisation, meilleure est l’adaptation de chaque individu aux autres et à l’environnement”. Donc, les stratégies du marketing comme celle du greenwashing repose sur le conformisme et l’appartenance à la société de consommation. Cependant, cela favorise et perpétue le fichage de profil. Mais si le greenwashing se maintient, c’est parce que ce processus est adapté à notre système…

Un système économique. Alors pour stopper, ces mécanismes qui incitent à la catégorisation et à la réduction d’un citoyen à un simple consommateur, ne faudrait-il pas faire un virage à 180° ? Comme l’a exprimé Kenneth Boulding, philosophe et économiste américain du 20e siècle « Celui qui croit que la croissance peut être infinie dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste. » Alors, pourquoi pas se lancer dans la construction d’un mode de vie qui admettrait l’im- possible croissance éternelle. Sommes-nous toujours à la recherche du bonheur ? Si c’est le cas, devons-nous le laisser s’accomplir par la consommation ? Pas si sûre, et vous ?

Aurore Tanguy

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éléments d’exécution. HAL aechives-ouvertes. [PDF en ligne] Publié le 12/01/2012. [consulté le 22/03/2020] Disponible sur : https://halshs.

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[11] Nicolas GARDÈRES. Greenwashing: la publicité est-elle bien encadrée? 20 minutes. [en ligne] Publié le 4 avril 2012. Mis à jour le 13 septembre 2014 [consulté le 1 mars 2020]. Disponible sur : https://

www.20minutes.fr/planete/910895-20120404-greenwashing-publicite- est-elle-bien-encadree

[12] United Nations Treaty Collection. Convention on Access to Information, Public Participation in Decision-Making and Access to Justice in Environmental Matters. [en ligne] Chapitre 27 sur l’environnement. Publié le 05-04-2020. [consulté le 25/03/2020]

Disponible sur : https://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.

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[13] Matthieu Goar. L’écologie, ce nouvel horizon politique. Le Monde. [en ligne] Publié le 28/02/2020. Mis à jour le 29/02/2020.

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