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SPORT D APRÈS. Le nouveau fantasme. Par le Professeur H. A. LORET

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Academic year: 2022

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‘SPORT D’APRÈS’

Le nouveau fantasme

Par le Professeur H. A. LORET

Le contexte est inédit. La pandémie rebat toutes les cartes de la société sportive. Pourtant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, ses effets secondaires ne sont pas tous négatifs. Le coronavirus est en effet un puissant facteur d’accélération du changement sportif. Ce faisant, il introduit dans le débat des biais d’interprétation conduisant à de graves erreurs d’analyse.

En témoignent les nombreuses initiatives qui tentent depuis quelques semaines de baliser le nouvel horizon post-Covid du sport français. Celui-ci est supposé fonctionner dorénavant en mode dégradé. La plupart de ces contributions exploitent une formule un peu fumeuse car bien trop générale : le « Sport d’après » (sic). Elle est présumée poser la question du futur en suggérant qu’il ne pourra être qu’une rupture. C’est très commode car cela évite de devoir problématiser la nouvelle conjoncture. Le raisonnement devient alors exclusivement descriptif. Il repose sur des observations moissonnées au fil du web ou de l’actualité sans aucune méthodologie de recherche ni modèle d’interprétation. Or, sans modèle de ce type il est rigoureusement impossible de travailler sur la prospective d’un secteur d’activité. Il s’agit d’un principe de base en termes méthodologiques.

En temps normal, la transformation sportive relève déjà de problématiques multiples.

Très complexes, elles sont toutefois correctement maîtrisées. Elles s’inscrivent dans des thématiques protéiformes.

- Techniques.

- Technologiques.

- Sociales.

- Sociétales.

- Commerciales.

- Industrielles.

- Economiques.

- Institutionnelles.

- Politiques.

- Géopolitiques.

- Juridiques.

- …

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En temps de crise pandémique s’y ajoute une réalité nouvelle : l’incertitude entropique.

Elle touche aux conditions mêmes de la survie des organisations qui pilotent, commercialisent, déploient et développent le sport. Différents paramètres de fonctionnement sont alors confrontés à des contingences capables de remettre en cause l’existence de ces structures :

- la continuité des pratiques sportives en mode pandémique ; - la continuité de l’événementiel sportif en mode pandémique ; - l’inadéquation sanitaire des règles de certains sports ;

- la dégradation de la demande sociale ;

- l’inadaptation de l’architecture des équipements aux mesures barrières ; - le déclassement des services impropres aux normes sanitaires;

- les risques pour la sécurité des pratiquants ;

- la perte des certaines habitudes et comportements structurants ;

- …

L’analyse devient alors beaucoup plus complexe. Voici, à titre d’exemple, une grille d’interprétation permettant d’évaluer de manière exhaustive le potentiel des innovations, initiatives ou propositions supposées intéressantes pour construire le futur du sport. Elle repose sur douze séquences différentes mais complémentaires.

Dans ces conditions, c’est-à-dire en l’absence de modèle d’analyse approprié, nous ne cautionnons évidemment pas une démarche de recherche ne prenant en compte que les « bonnes pratiques » identifiées en tant que telles sur la seule base de leur nouveauté. La maxime « C’est nouveau donc c’est intéressant » n’a jamais été opératoire pour construire un scénario capable d’éclairer l’avenir. Au-delà, il faut bien comprendre que, hors la dimension pandémique, la structure du supposé « Sport d’après » avait déjà été présentée de longue date dans plusieurs publications universitaires sous la forme d’hypothèses solidement indexées sur le futur. La Covid accélère donc simplement le calendrier de bouleversements déjà annoncés.

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Convenons que ce dernier point est une excellente nouvelle.

Reste que les effets secondaires de la pandémie ne constitueront en aucune manière un paramètre structurel de mutation. Ils ne seront qu’un critère temporel d’évolution.

Ce qui n’est pas du tout la même chose. Cela signifie que sans la Covid-19 le sport possédait déjà « un après » très documenté depuis plusieurs années. Il sera orchestré par le changement social doublé de sa transformation technologique, notamment numérique. Hors pandémie, sa temporalité aurait simplement été différente et sa survenue moins brutale. A ce titre, nous sommes tous d’accord pour dire que le contexte a changé. Dès lors, l’onde de choc du coronavirus nous oblige désormais à gérer une situation de crise à fort impact organisationnel à très court terme.

Nous sommes bien dans une configuration inédite. Personne ne le conteste. Elle repose sur des paramètres inconnus relatifs aux caractéristiques ignorées du virus.

Elle était inimaginable à la fin du premier trimestre 2020. Elle combine étroitement la sidération due à l’ampleur de la crise et le désarroi dû à la rapidité de son émergence.

Sous peine de catastrophes corrélatives à ses multiples effets secondaires, elle doit mobiliser toutes nos capacités d’ajustement immédiat au réel. Elle nous contraint donc à raccourcir le temps de la Recherche & Développement de toutes les solutions appropriées. La production des modélisations capables d’engendrer de nouvelles formes de pilotage du sport en univers Covid doit donc être instantanée. A défaut, des pans entiers du sport politiquement et institutionnellement organisé, exploitant les stratégies 1 & 2 du modèle1 ci-dessous, vont disparaître.

1 Ce modèle monte entre autres choses que les organisations fédérales tournées vers la rétrospective (stratégies 1 & 2) vont devoir sans délai passer à la stratégie 3. Celle-ci combine une conjoncture inédite (les conséquences de la Covid) à une capacité de projection dans le futur du sport organisé via la prospective.

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Les fédérations

au risque de la Covid-19

En raison de la distanciation physique, ce qui se joue pour les organisations sportives est à la fois très simple dans l’énoncé et très complexe dans la mise en œuvre. Il s’agit de leur capacité à poursuivre leurs activités en exploitant de nouvelles façons d’opérer. Dans tous les cas de figure, c’est leur système d’information, c’est-à-dire leur capacité à communiquer en interne comme en externe, qui est mis à mal. En phase avancée de déconfinement, rétablir le contact avec et entre tous les acteurs d’une fédération (dirigeants, pratiquants, salariés, partenaires institutionnels et économiques, médias…) est une priorité absolue. Si, malheureusement, dans la majorité des cas elles n’ont pas encore été identifiées, des solutions souvent disruptives en termes de management dématérialisé nécessiteront une activation rapide. Pour autant, elles ne devront surtout pas s’inscrire dans une simple logique de réponses à l’urgence des nouvelles contraintes crées par la crise. Ce n’est pas la seule capacité de ces organisations à fonctionner en milieu anormal qui est aujourd’hui en jeu. Si elles doivent poursuivre leur mission d’utilité sociale, c’est d’abord en assurant la stabilité de leur « métier » non plus en univers concurrentiel mais, pour un temps au moins, en environnement critique. C’est une question de survie à court terme pour celles dont les clubs fonctionnent en mode dégradé depuis trois mois. La figure suivante présente les options possibles en fonction du « processus-métier » de chaque fédération. Les points d’interrogation suggèrent l’émergence d’un nouveau champ de concurrence particulièrement actif comme les sports d’endulience, de lenteur ou de connivence, par exemple.

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Dans le nouveau contexte qui s’impose désormais au sport organisé, il ne s’agit pas seulement de réduire l’impact des effets secondaires de la Covid-19 comme beaucoup de responsables le pensent. Il faut le faire sur des bases fonctionnelles qui s’inscrivent dans une configuration budgétaire défavorable. Ce qui évidemment change la donne. Elle devra pourtant permettre de baliser une nouvelle frontière en termes de gouvernance. Elle circonscrira un futur politique encore inconnu pour tous les acteurs du sport (Etat compris).

C’est toute la difficulté. A défaut, les organisations institutionnelles qui le gouvernent ne seront plus opérantes à court terme (2022 !). Elles deviendront donc très vulnérables lorsqu’en phase post-coronavirus leur écosystème concurrentiel se réactivera. La figure suivante présente les quatre options possibles pour les milieux fédéraux. Deux sont à proscrire. Nous vous laissons imaginer lesquelles…

Non au « Sport d’après », oui au « Sport autrement »

Avec l’arrêt brutal de la saison de NBA le 11 mars dernier, l’analyse du sport s’est singulièrement compliquée. Première organisation internationale à prendre cette décision, elle fut suivie par toutes les autres en l’espace de quelques semaines. Le système des sports si bien agencé et réglé depuis des décennies est alors devenu un monde saturé

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d’entropie. C’est-à-dire de désorganisation, de désordre et d’imprévisibilité. Au point qu’il est aujourd’hui une véritable terra incognita. Une telle situation est inédite. Elle ne peut pas durer sous peine de catastrophe économique, institutionnelle et politique à brève échéance. Or, en l’absence de vaccin aucun retour à la normale ne sera possible. Tout au plus les Etats se risqueront à des initiatives de déconfinement plus ou moins avancées sans aucune maîtrise des paramètres à mobiliser. Il est donc indispensable de développer de nouveaux modèles capables de théoriser le sport autrement. Ils devront être organisés et structurés par la nouvelle donne imposée par la pandémie.

Depuis la fin du premier trimestre 2020, une forme bien spécifique de dommages touche l’ensemble des principes organisateurs du système des sports. L’un des éléments les plus perturbants provient du fait que l’information que produisent ses principaux acteurs (Etat, Ligues professionnels, Fédérations, Médias, Collectivités) ne possède plus aucune fiabilité.

La dimension probabiliste de nature quantitative et mesurable qui structure le sport habituellement (score, résultats, classements, calendriers, subventions, taux de pratique…) a disparu. La conséquence est problématique au sens académique du terme. Ce qui signifie qu’il faut l’appréhender sous tous ses aspects et de manière systémique. Or, aucun des observateurs qui tentent actuellement d’analyser la situation n’est en mesure de le faire. La raison est simple à comprendre : ils ne l’évaluent qu’à l’aune de leurs propres intérêts ou de ceux des secteurs commerciaux ou institutionnels qui sont leurs employeurs ou leurs clients.

Dans ce contexte très orienté politiquement on observe que la dimension critique, pourtant indispensable à la construction d’une problématique robuste, est singulièrement absente.

C’est le résultat d’une inquiétude grandissante. Loin d’alimenter le débat, toute critique est invariablement jugée agressive et entraîne souvent des « blocages » intempestifs. Notre expérience personnelle (ci-dessous) montre que ceux-ci proviennent de twittos insuffisamment armés pour supporter la contradiction.

Il est probable que cette tribune ne dérogera pas à cette règle…

___A_L____17_juin_2020_______________________________________________________________

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