R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
E. P ARENT A. C HAOUCHE P H . G IRARD
Sur l’apport des statistiques bayesiennes au contrôle de la qualité par attribut. Partie 1 : contrôle simple
Revue de statistique appliquée, tome 43, n
o4 (1995), p. 5-18
<http://www.numdam.org/item?id=RSA_1995__43_4_5_0>
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5
SUR L’APPORT DES STATISTIQUES BAYESIENNES
AU CONTRÔLE DE LA QUALITÉ PAR ATTRIBUT
PARTIE 1 : CONTRÔLE SIMPLE
E.
Parent,
A.Chaouche,
Ph. GirardDépartement
desMathématiques Appliquées
75732 - PARIS CEDEX 15 - France Rev.
Statistique Appliquée,
1995, XLIII (4),RÉSUMÉ
Les méthodes
classiques
de contrôlestatistique
de laqualité
par attribut recommandées par l’AFNORn’intègrent
pasexplicitement
depréoccupations
d’ordreéconomique
dansla détermination des
règles
de décisionqu’elles préconisent.
En revanche, lesstatistiques bayesiennes
permettent de déterminer la décisionoptimale
d’unpoint
de vueéconomique
et
intègrent
aussi bien les informations issues del’échantillonnage
que celles provenant de connaissancessubjectives.
On montre, àpartir
desprincipes
de lastatistique bayesienne,
comment peut être bâti un
plan
de contrôlesimple.
Ce cas est illustré par le calcul de larègle
de décisionoptimale
pour un modèle béta-binomial avec coût linéaire. Cetteapproche statistique
nonclassique
met en évidence le caractère décisionnel du contrôlestatistique
dela
qualité
par attribut et permet de suivre la remise àjour
des connaissances sur laqualité
duproduit
par apport d’informations issues d’unéchantillonnage simple.
Mots-clés :
Bayes,
Contrôlestatistique
de laqualité, Echantillonnage
binomial,Statistique
décisionnelle.
ABSTRACT
Usual statistical
techniques
advocatedby
the french association for normalisation do notexplicitely
take into account economic concems whendesigning
a decision rule forquality
control. On the contrary,
bayesian
statistics allow to determine theoptimal
decision rule withregards
to economicviewpoints
andthey
canincorporate
informationcoming
fromsampling
and
subjective knowledge.
This paper sketches thedesign
of asimple sampling plan by
attributefrom a
bayesian viewpoint.
This case is illustratedby
the calculation of theoptimal
decisionrule for a beta-binomial model with linear cost. This non classical
approach
underlines the decisional aspects ofquality
controlby
statistical means and reveals howknowledge
aboutproduction quality
isupdated by
information from thesampling plan.
Keywords : Bayes,
Statisticalquality
control, Binomialsampling,
Statistical decisiontheory.
6 E. PARENT, A. CHAOUCHE, Ph. GIRARD Introduction
Les
techniques
lesplus
usitées de contrôle de laqualité
sont fondées sur lesprincipes
de lastatistique
inférentielleclassique.
La démarche d’inférenceclassique s’apparente
à un raisonnement par l’absurde : le statisticien construit uneligne
dedéduction à
partir
d’unehypothèse
debase,
enprincipe
établieaprès
discussion avec ledécideur, puis accepte
ou refuse cettehypothèse
enjugeant
de l’écart entre les résultats mesurés et ceuxplausibles
selonl’hypothèse ayant étayé
sa construction intellectuelle. Cepoint
de vue a été difficile à passer dans lapratique
industrielle : les statisticiens ont donc fait des efforts louables de codification(tables AFNOR, 1988),
de
vulgarisation
et deformation,
ainsi qued’interprétation
de leursconcepts
en termesopérationnels.
Dans cetesprit,
Vessereau(1987)
détaille defaçon approfondie
et trèspratique
les tablesd’échantillonnages préconisées
par l’AFNOR pour les contrôles deréception.
Demême,
Leterme et Van Hoecke(1993) emploient
le terme derisque
d’erreur de
«décision»;
lerisque
depremière espèce
est traduit parl’appellation
de
risque
client et celui de secondeespèce
se cache derrière la notion derisque
fournisseur.
En
adoptant
unplan
decontrôle,
lechargé
deproduction
souhaitequant
à luiune aide à la décision
opérationnelle,
sipossible intégrant
ses coûts et sesexpériences passées
de fabrication. Assezrépandue
dans lesproblèmes d’ingéniérie
de l’eau(Duckstein
etal., 1987), l’approche statistique bayesienne
offre une alternative intéressante pour lesproblèmes
du contrôle de laqualité
dans les industries agro- alimentaires(Martz, 1976;
Cressie etSeheult, 1985;
Billion etParent, 1991)
en neséparant
pas lesaspects statistiques
desconséquences économiques
des décisionsqui
en résultent. Elle est
également
d’un aborddidactique
assez facile si oninterprète
larègle
deBayes
comme un «processeur d’informations»permettant
une remiseà jour
des connaissances sur la
qualité
de laproduction.
Notons néanmoins ses limites : ellene
s’applique
que dans un cadrestationnaire,
c’est-à-direquand
ne fluctuent pas les relations structurelles aléatoires entre lesparamètres
inconnus des états de la nature et lesgrandeurs
d’observations que l’on mesure. Plusprécisément
le modèleprobabiliste
doit
explicitement
inclure desparamètres spécifiques
pour décrire lespossibles
nonstationnarités des relations structurelles entre états de la nature et
observations,
si on souhaite utiliser destechnique statistiques bayesiennes
dans ce cas. Le domaine destechniques
defiltrage
et deprévision, champ privilégié
desstatistiques bayesiennes, appartient
d’ailleurs à cette classe deproblèmes
dedynamique
aléatoire àrégimes
non stationnaires.
On cherche ici à
porter
unjugement
sur laqualité
inconnue d’unefabrication, supposée homogène,
et non à détecter un éventueldérèglement
d’un fonctionnementpréspécifié
d’un processus industriel.Ce
papier développe
uneapproche
detype bayesien
pour le contrôle de laqualité
par attribut et en illustre les
potentialités d’application
pour unplan d’échantillonnage simple.
1.
Rappels théoriques
et notationsUn lot de taille N doit être
accepté (décision
par la suite notéedl
oulivrer)
ou refusé
(décision d2
ou mise aurebut ).
Pour cefaire,
onprélève
un échantillon de7
SUR L’APPORT DES STATISTIQUES BAYÉSIENNES
taille n et on
compte
le nombre xd’objets
défectueux. Dans toute la suite du texte,on fera
l’hypothèse
que lerapport n/N
est faible de telle sorte que si l’onappelle
p, laproportion
de défectueux dans lelot,
la loi binomiale deparamètres (n, p)
est laloi de
probabilité
de la variable aléatoire X «nombred’objets
défectueuxparmi
lesn de l’échantillon de contrôle» :
2. Démarche inférentielle
classique
.Le lot n’est
accepté
que si le nombre xd’objets
défectueux dans l’échantillon est auplus égal
à un seuild’acceptation
c. En fonction de ceseuil,
de la taille de l’échantillon et de laproportion
de défectueux effectivementprésente
dans lelot,
onpeut
évaluer laprobabilité P (n, c, p) d’acceptation
du lot par la formule :Le
couple (n, c)
détermine laprocédure
de contrôle : taille de l’échantillon àprélever
et sévérité de larègle d’acceptation.
A(n, c) fixés,
la fonction puP(n,
c,p)
donne la courbe d’efficacité de la
procédure.
Commel’indique
lafigure 1,
le décideur souhaiterait un filtreparfait :
endeçà
d’une valeur po tous les lots devraient êtreacceptés,
et refusés au-delà. Les hasards del’échantillonnage
font que ce filtreparfait
n’estpossible
à obtenirqu’en
situation de contrôleunitaire,
engénéral inacceptable
pour des raisons d’ordrefinancier,
ouimpossible
si la mesure se faitpar contrôle destructif.
Compte-tenu
de la nature aléatoire des informations obtenues paréchantillonnage,
le statisticienpeut indiquer
de combien la courbe d’efficacités’éloigne
de la forme idéale de «marche d’escalier» par deuxrenseignements :
lerisque
depremière espèce
a, c’est-à-dire ledegré
d’inefficacité pour unevaleur p,,
inférieure à po, et le manque de
puissance
de laprocédure (ou risque
de secondeespèce (3)
pour une valeur p,3 au delà de po. La formule(2)
donne alors :Du
point
de vue de lastatistique classique,
cetterègle
revient à effectuer un testd’hypothèse
nulleHo :
p = Pa au niveau a contrel’hypothèse
alternative p > p, telle que lapuissance
du test soit(3
en p = P {3. Le statisticienpeut cependant
avoirquelques
difficultés à obtenir du décideur la valeur d’uneproportion acceptable
de8 E. PARENT, A. CHAOUCHE, Ph. GIRARD
FIGURE 1 :
Courbe
d’acceptation p ~ P(n, c, p) à (n, c) fixés et filtre parfait
défauts
présents
dans lelot p,,,,
notée alorsNQA,
et unrisque
clientcorrespondant
a,généralement
5 ou 10%. Lepoint
dequalité « j uste »
tolérable(NQT)
del’hypothèse
alternative est souvent encore
plus
délicat àpréciser.
3.
L’approche Bayesienne
Lorsqu’on adopte
lepoint
de vue duparagraphe précédent,
on raisonneconditionnellement à une
proportion
p de défectueux dans lelot, proportion supposée
déterministe mais non observable. C’est d’ailleurs la raison pour
laquelle
pfigure
en abscisse de la
figure
1. En d’autres termes, on demande à l’industriel dejuger
de la réalité
tangible
donnée par les résultats del’échantillonnage
en fonction d’une référence absolue et cachée. Cecipeut
lui sembler difficile àconceptualiser compte-
tenu de son ambition
opérationnelle
strictement inverse : il veut mieux cerner laqualité
inconnue du lot en fonction d’informations nouvelles
apportées
parl’échantillonnage.
La démarche
bayesienne
consiste pour l’essentiel àemployer
une variable aléatoire pour décrire l’incertitude relative aux valeurs duparamètre
p et à en conditionner la distribution aux résultats del’ échantillonnage.
Nous n’entrerons pas ici dans le débat(Weber, 1973)
à propos del’interprétation
de cette variablealéatoire,
liée à la naturesubjective
desprobabilités
associéesquantifiant
la connaissancepartielle
relative àun événement et non la
fréquence possible
de son occurrencematérielle,
mais nous nous bornerons à remarquer que l’alternativebayesienne peut
semblerplus
naturelleS UR L’APPORT DES STATISTIQ UES BAYÉSIENNES
9selon le
point
de vue du décideur et à cetitre,
dupoint
de vue dupédagogue, plus
facile à
expliquer.
D’autre
part,
le statisticien rencontregénéralement
des difficultés à obtenir du décideur lespoints
«durisque
fournisseur» et du«risque
client»qui permettent
depréciser
lescaractéristiques
duplan d’échantillonnage classique.
De cepoint
de vue,les
appellations
«Niveau deQualité Acceptable»
et «Niveau deQualité
Tolérable»ont constitué un pas vers une
interprétation
de nature décisionnelle de laprocédure
decontrôle, permettant
d’asseoir desprocédures adaptées
auxexigences spécifiques
dediverses industries. Comme on le verra dans cet
article, l’approche bayesienne
rendl’interface décisionnelle
plus explicite
enintégrant
directement lesconséquences
denature
économique
dans l’élaboration de lastratégie
de contrôle.Enfin,
du fait de sonexpérience
de contrôles antérieurs sur un mêmeproduit
ou sur des
produits similaires,
leresponsable
du servicequalité
enentreprise possède
souvent une évaluation de nature
subjective,
de laproportion
de défectueuxprésents
dans le lot
qu’il
examine : le contrôlestatistique bayesien permet
de combiner dansun même cadre
conceptuel les
résultats del’expérience
de contrôle et cetteexpérience
de connaissance du
terrain, trop
souventnégligée
par lesprocédures classiques.
4.
Éléments
de la DémarcheBayesienne
4.1. Ensemble des états de la nature
Il
s’agit
de l’ensemble des valeurspossibles
duparamètre
p, soit ici[0,1].
On définit aussi une loi de
probabilité,
dite «loi apriori»,
pour p,7r(p)
afin dedécrire la connaissance
imprécise
que l’industrielpossède
sur les valeurs de p. Il est commode de choisir pour7r(p)
une loi detype
béta(la figure
2présente
la fonction de densité deprobabilité
d’une telleloi)
dont les coefficients a et b serontappelés
icihyperparamètres.
Ces deux coefficients confèrent unegrande souplesse
au choix de la distribution apriori
duparamètre
p. Une dizaine de différentesfaçons d’apprécier
etde déterminer
7r(p)
sontprésentées
dansBerger( 1985) ;
Box et Tiao( 1973)
s’attachentplus particulièrement
au cas délicat de la construction de7r(p)
àpartir
d’informationsdisponibles limitées,
avec uneapproche
fondée sur des loi apriori
«non informatives » deJeffreys ( 1961 ).
Pour une telle
loi,
onpeut
facilement établir queE7r(p) (p) = a a + b
et queV ar 7r (P) (p) = a b ab 1 a b ce qui permet
d’en estimer les paramètres
par
(a+o+l)(a+o)
la méthode des 2
premiers
moments, si l’on a choisi de résumer les informationsdisponibles a priori
sur p enajustant
une telle distribution béta. Le cas a = b = 0.5correspond
à la loi non informative deJeffreys
pour un modèled’échantillonage
binomial. Le cas a = b = 1 donne la loi
uniforme,
distribution apriori
maximisant10 E. PARENT, A. CHAO UCHE, Ph. GIRARD
FIGURE 2 :
Exemple
de loi apriori
de type béta.l’entropie
utilisée comme mesurequantitative
de l’incertitude par Tribus(1969)
etqui
tire sajustification
de considérations de traitement dusignal.
4.2. Ensemble des actions
Dans le cas du contrôle
bayesien statique
de laqualité,
cet ensemble se réduit à :dl :
«livrer»d2 :
«mettre au rebut»4.3. Fonction de coût
La fonction de coût W associe à
chaque
action ét àchaque
état de la nature une évaluationnumérique
despertes
occasionnées par l’ action. Nous utiliserons ici la fonction de coûtsimple,
définie dans Ulmo et Bemier(1973),
soit :Si l’on choisit de livrer
(décision dl ), parmi
les Nobjets
dulot,
on admet quepN produits
défectueux seront retournés à l’industriel. La valeurCpN représente
alors une évaluation des frais de retour et de
perte d’image
de marque : c’est le coût de la«non-qualité»;
si l’onexprime
C dans la même unité de coût que celle duprix
de fabrication d’un
objet,
Cprend
des valeurssupérieures
à 1. Le coût de la mise aurebut est dans ce cas
simplement
estimé à une unité monétaire pour chacun des Nobjets
de la fabrication contrôlée.SUR L’APPORT DES STATISTIQUES BAYÉSIENNES
11 4.4. Lesinformations
Il
s’agit
des résultats del’expérience,
c’est-à-dire le nombre xd’objets
défectueux observés dans un échantillon de taille n, réalisation de la v.a. X. La loi de X sachant p est une binomiale donnée par
l’équation
1.4.5.
Règles
de décision etrisque
Une
règle
est définie comme uneapplication D
de l’ensemble des informations(ou
résultatsd’expérience)
dans l’ensemble des actions. Considéronsici,
à titred’exemple
comme dans le casclassique,
la famille derègles De
indicée par un seuil entierd’acceptation
c, telle que :On
peut
alors évaluer lerisque
associé à unerègle 8
et à l’état de la nature p par :Ainsi,
pour lesrègles
detype 8c l’équation
9 devient :Ce
risque représente
le coût moyen desconséquences économiques
de ladécision,
évalué sur tous les résultatspossibles
del’expérience d’échantillonnage.
L’équation (9)
nepeut
pas servir de base pour choisir unerègle
dedécision;
ellepermet
seulement d’éliminer lesrègles
nonadmissibles,
c’est-à-dire uniformément dominées en p. Unerègle 8
est dite dominée(ou
nonadmissible)
si :On
peut
d’ailleurs établir que la famille derègles 8 c
est formée de toutes lesrègles
nondominées,
d’où leur utilitépratique
en contrôlestatistique. Néanmoins,
selon la valeur de p, un seuil c
peut
se révélertrop
sévère outrop
«laxiste».Notons aussi que l’on aurait retrouvé
R(8c,Pa)
= a etR(8c,p{3) = 0 si,
dansle
paragraphe précédent,
on avait choisi un coût W tel queW (dl, p) - lp>p,, et
W(d2,p) = Ip~po :
c’est cette fonction de coût peu réalistequi
estimplicitement
adoptée
dans le cadrestatistique
conventionnel.12 E. PARENT, A. CHAO UCHE, Ph. GIRARD
4.6.
Règles
de décisionbayesiennes
Pour une
règle quelconque 8,
on définit lerisque bayesien
enpondérant
les valeurs du
risque
par la distribution desprobabilités a priori
pour les valeurscorrespondantes
de p :La règle
de décisionbayesienne
8* est cellequi
rend minimum lerisque bayesien Rn ( . ) .
Tellequelle, l’équation
11 n’est pas facile à résoudrepuisqu’on
rechercheune
application
de l’ensemble des informationspossibles {0,
...n}
dans celui desdécisions {dl d2};
la section suivante montre comment la formule deBayes permet
de construire une tellerègle
de décision.La liaison entre la modélisation
statistique
et la modélisation ducomportement
du décideur est illustrée par lafigure
3.Synthèse:
recherche de larègle
de décisionoptimale
FIGURE 3 :
Schéma
conceptuel
de ladémarche bayesienne
4.7. La
formule
deBayes :
un «processeurd’information »
En
appliquant
la formule deBayes,
la loi aposteriori
de p, c’est-à-dire la distri- bution duparamètre
paprès
avoir eu connaissance du résultat x del’échantillonnage,
13
SUR L’APPORT DES STATISTIQUES BAYÉSIENNES est donnée par :
En utilisant
l’équation 5,
il vient :La loi a
posteriori
de p reste dans la même famille detype
béta que la loi apriori.
Pour cetteraison,
la loi béta est dite«conjuguée
naturelle» de la loi binomiale.L’incorporation
de l’information x se traduit ici par unsimple décalage
des
hyperparamètres :
On
peut
aussi évaluer la loi non conditionnelle de la variable aléatoireX, appelée
aussi loiprédictive.
Elle est donnée par :On reconnaît dans la formule
(15)
un modèle d’ume dePolya (Feller, 1966) :
audépart,
ondispose
d’une urne avec a boules blanches et b boules noires.Après chaque tirage
on remet dans l’urne deux boules : celle tirée et une de la même couleur. Bernier(1993)
a montré que la loiprédictive
de x est ainsigénérée
par un mécanisme detype
«bootstrap»
parsuréchantillonnage
àpartir
d’unerépartition
apriori
de référence des valeurspossibles
de cette variable.5.
Risque bayesien
etrègles
de décisionsbayesiennes
La distribution de p a
posteriori joue
un rôleimportant
pour la construction de larègle
de décisionoptimisant
lerisque
deBayes.
Sous les conditionstechniques
duthéorème de
Fubini,
les formules 11 et 12permettent
dechanger
l’ordred’intégration
pour le calcul du
risque bayesien
et doncd’écrire,
en utilisant le fait que la loiconjointe
de x
et p
s’écrive soitg(x)03C0’(p|x),
soit Prob(.r/p)7r(.r) :
14 E. PARENT, A. CHAOUCHE, Ph. GIRARD
Dans
l’équation 16,
les termesg (x)
étant touspositifs
ounuls,
il suffit que larègle
de décision réalise pour tout x le minimum deE7r/(p/x) (W(8(x),p),
coûtmoyen a
posteriori.
A xfixé,
pour choisir entre8 (x)
=dl
ou8 (x)
=d2,
on évaluedonc :
La
règle
de décisionbayesienne
8 * est donnée par :Dans notre cas, la
règle
8*correspond
à unerègle
admissible de la famille des8c
Il 1. d, .. n + b -
(C - 1)a
0telle que le niveau
d’acceptation
soit c =n + b -(C - 1)a C.
On note que, pour un niveau donné d’incertitude sur p apriori exprimé
par(a, b)
et une taille d’échantillonn
fixé,
le niveaud’acceptation
diminue(le
contrôle estplus strict) lorsque
le coût denon
qualité
Caugmente.
Ce seuil varie dans le même sens queb, l’hyperparamètre pouvant
êtreinterprété
comme unéquivalent
du nombre de résultatspositifs
apriori.
L’impression
relative à lanon-qualité
décrite parl’hyperparamètre a
intervient aussi dansl’expression
de ceseuil,
avec unepondération
liée au coût denon-qualité.
6. Valeur de l’information dans un contexte décisionnel
bayesien
Dans la
pratique,
la formule 14permet
uneapplication séquentielle
de la formule deBayes
pour remettre àjour
leshyperparamètres
décrivant la connaissance de laqualité.
Dans cettepartie
dutravail,
nous cherchons à évaluer la valeur de l’informationapportée
par unéchantillon,
defaçon
à enprévoir
la tailleoptimale.
Imaginons qu’après
un certain nombred’expériences,
l’état de connaissance de laqualité
soit initialementreprésenté
par une loi apriori 7r(p)
detype
béta avechyperparamètres (a, b). Supposons
que dans cet état de connaissance la décision soit delivrer,
c’est-à-dire queE03C0 (W (dl, p)) E03C0 (W (d2, p)),
soit encore, avec les choixprécédents
de fonction de coût :C "7
1.Que peut-il
se passer si on réalise unéchantillonnage
de nobjets ? D’après l’équation 18,
si le nombred’objets
défectueuxobservés est tel q ue x n + b -
(C - l)a ,
la décision antérieure ne chan g e p as et observés est telque x ~ n + b - (C - 1)a C,
la décision antérieure nechange
pas et15
SUR L’APPORT DES STATISTIQUES BAYÉSIENNES
la livraison continue. Dans le cas
contraire,
la décision antérieure est remise en causepour mettre le lot au rebut. La connaissance d’un tel nombre
d’objets
défectueux x dans l’échantillonpermet
ainsi de réaliser une économie de NCa + x a + b + n
a + b + n Naprès expérience.
Pourévaluer,
relativement à l’état de connaissance dequalité
avant
expérience,
laprobabilité
d’obtenir un tel x, on utilise la loiprédictive g(x).
L’économie moyenne
B (n,
a,b) procurée
parl’échantillonnage
de taille npeut
alors être évaluée par :Plus
généralement
et selon laterminologie
de TRIBUS(1969), B (n, a, b)
la valeurmoyenne de l’information
apportée
parl’échantillonnage (Expected
Value ofSample Information)
est la somme desgains pondérés
par laprobabilité qu’ils
se réalisent(probabilité
que l’on observe xobjets défectueux).
En notantdO
la décisionoptimale prise a priori, W ( dO , p)
son coût associé et 8* larègle bayesienne après tirage
dun-échantillon,
la formule 19 est un casparticulier
de :Si comme sur la
figure 4,
construite pour un apriori
detype
béta avec a =1,
b =10,
C =10,
N =1000,
la courbe n ~B(n,
a,b)
est monotone croissante etmarginalement décroissante,
onpeut
alorsl’exploiter
enportant
sur le mêmegraphe
le coût d’un contrôle de n
objets.
La taille de l’échantillon ne doit pasdépasser
lavaleur nmax où le bénéfice
potentiel
est annulé par le coût du contrôle. Onpeut aussi,
en utilisant des
arguments économiques,
retenir la valeurn*, quand
elleexiste,
telleque bénéfice
marginal potentiel
et coûtmarginal
ultérieur secompensent.
7. Discussions
complémentaires
et conclusionsNotons d’abord que Vessereau
(1980) appelle
«contrôlebayesien »
la démarche suivante : àpartir
d’une distribution apriori
de laproportion
de défectueux et de l’observation d’unéchantillon,
il construit la distribution àposteriori
decette
proportion (par
la formule deBayes).
Ilappelle
«courbed’acceptation»
de la distribution a
posteriori
lecomplément
à l’unité de la fonction de cu- mul deprobabilité.
Ilappelle
«solutionbayesienne équivalente»
à unerègle
dedécision
classique,
définie par la taille n de l’échantillon et un seuil derejet,
donc par une courbe
d’acceptation,
la distribution aposteriori
dont la courbed’acceptation
se confond avec la courbed’acceptation
de la solutionclassique.
La«solution
bayesienne équivalente»
est leplan d’échantillonnage qui possède
la mêmeefficacité que la solution
classique;
Vessereau montre que l’information apriori
setraduit par un
gain égal
à la somme desparamètres
de la loi apriori
moins l’unité.La démarche
bayesienne
tellequ’exposée
parVessereau,
et àlaquelle
nousn’adhérons pas, ne
possède
pas un des caractères essentiels d’uneapproche
16 E. PARENT, A. CHAOUCHE, Ph. GIRARD
FIGURE 4 :
Valeur de
l’information
additionnelleapportée
par un n-échantillon(a = 1, b
=10,
C =10,
N =1000)
décisionnelle, qui
est lasynthèse
d’unproblème statistique
et d’unproblème
éco-nomique
par l’intermédiaire d’une fonction de coût réaliste. A l’instar deBerger
ont
peut qualifier l’approche
décrite par Vessereau de«statistique bayesienne
non-décisionnelle».
Comme le montre
l’exemple
du contrôlestatistique
parattribut, l’approche bayesienne
décisionnelle fournit un «mécanisme»simple
et cohérent de dimension- nement derègles
de décision enprenant
encompte
les coûtséconomiques
et lesincertitudes :
l’équation
9 définit lerisque
comme le coût moyen desconséquences
d’une
stratégie
décisionnelle si l’état de la nature estsupposée
connu;l’équation
11
prend
encompte
les incertitudes sur le ou lesparamètres
du modèle utilisé pour évaluer lerisque;
etl’équation
16 montre que cetteapproche
est cohérente avecun cadre
statistique
inférentield’apprentissage
par «la formule desprobabilités
descauses» due à
Bayes (1763).
Lafigure
3 schématise les relations entre lesconcepts d’incertitudes, d’aléas,
de coûts et de décisions.Dans le cas du contrôle par
attribut,
la mise en oeuvre calculatoire est favorisée par le modèled’échantillonnage simple (loi binomiale), l’emploi
deconjuguées
naturelles
(loi béta)
pourprobabiliser
lecomportement
duparamètre
p décrivant laqualité,
l’utilisation de fonction de coûtparticulière (linéaire
enp)
et le faibledegré
de
complexité
décisionnelle.Néanmoins,
sous des conditionstechniques larges (Ferguson, 1967; Berger,
1985; Robert, 1992),
l’ensemble desrègles
de décisionsbayesiennes (avec
leurs17
SUR L’APPORT DES STATISTIQUES BAYÉSIENNES
limites)
obtenu par variation de lois apriori
dont lesupport
n’exclut aucunevaleur,
est
identique
à l’ensemble desrègles
non dominées. Parconséquent,
et pour revenir à notreapplication, l’appartenance
de 8* à la famille desrègles
admissibles que sont les8c (formule 18)
est un résultatgénéral, garantissant
que lesrègles
obtenues parapproche bayesienne répondent
par construction à cetteexigence
minimale de boncomportement.
A la connaissance des auteurs, aucune
propriété
de convexité concernant la valeur attendue de l’informationapportée
paréchantillonnage
n’a été démontrée dans la littérature pour le casgénéral :
uneinterprétation économique,
bien queséduisante,
ne
peut
donc pastoujours
être avancée pour enrichir la formule 20. D’autrepart,
lafigure
4fige
enquelque
sorte le futur : elle donne une vision moyenne del’apport supplémentaire
d’information à un état de connaissance donné.Or,
cette vision vaévoluer de
façon dynamique
au fur et à mesure que progresseral’échantillonnage,
ce
qui plaiderait plutôt
pour une utilisation itérative de l’estimation de la valeur de l’information.Le
problème
del’échantillonnage séquentiel peut
d’ailleurségalement
êtreétudié selon un
angle bayesien.
Enfin, l’approche bayesienne
renverse lepoint
de vueclassique
enadoptant
uneapproche
directe conditionnelle aux donnéesplutôt qu’un
raisonnement indirect vis- à-vis d’événementspotentiels
d’unehypothèse
nulle. En ce sens, cette démarchepeut
éviter de désorienter certainspraticiens,
peu rompus aux raisonnements par l’absurde et favoriser ainsi uneplus large
utilisation destechniques
destatistiques appliquées
au sein du monde de l’industrie.
Remerciements
Les auteurs ont bénéficié des
critiques
etsuggestions
de C. Billion et J. Bernier.Cet article
s’appuie
sur unrapport scientifique
de fin d’études(Girard, 1994)
réaliséconjointement
à l’Ecole Nationale du Génie Rural des Eaux et des Forêts et à l’Institut NationalAgronomique Paris-Grignon.
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