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Orientation et politique publique, évolutions nationales, enjeux internationaux

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Academic year: 2021

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HAL Id: halshs-00419770

https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00419770

Submitted on 25 Sep 2009

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enjeux internationaux

Isabelle Borras, Claudine Romani

To cite this version:

Isabelle Borras, Claudine Romani. Orientation et politique publique, évolutions nationales, en- jeux internationaux. Formation Emploi. Revue française de sciences sociales, La documentation française/CEREQ, 2010, pp.9-22. �halshs-00419770�

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UMR 5252 CNRS - UPMF

______________________

LEPII

BP 47 - 38040 Grenoble CEDEX 9 - France 1221 rue des Résidences - 38400 Saint Martin d'Hères Tél.: + 33 (0)4 76 82 56 92 - Télécopie : + 33 (0)4 56 52 85 71

lepii@upmf-grenoble.fr - http://www.upmf-grenoble.fr/lepii

_____________________

CAHIER DE RECHERCHE

N° 22

Orientation et politiques publiques

Evolutions nationales, enjeux internationaux

Isabelle Borras1 Claudine Romani2

juin 2009

1 LEPII

2 CEREQ, Marseille

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OORRIIEENNTTAATTIIOONN EETT PPOOLLIITTIIQQUUEESS PPUUBBLLIIQQUUEESS

EEVVOOLLUUTTIIOONNSS NNAATTIIOONNAALLEESS,, EENNJJEEUUXX IINNTTEERRNNAATTIIOONNAAUUXX

Isabelle BORRAS, Centre associé Cereq, Lepii-Upmf, Grenoble Claudine ROMANI, Cereq, Marseille

Article soumis à la revue Formation-Emploi

Accepté – a paraître avec modifications fin 2009-début 2010

Résumé. Le développement d’une politique d’OTLV promue par l’Union européenne met en cause l’organisation des services d’orientation. Sur la base d’une revue de la littérature, cet article analyse les réorganisations conduites en France au regard d’éclairages internationaux.

A partir d’un constat, la segmentation des services aux jeunes et aux adultes, il dresse les grands axes d’évolution, démarches qualité et décloisonnement. Les réformes progressent difficilement en France, car bien que portées par les Conseils régionaux, elles sont peu relayées par l’Etat. Une meilleure articulation des responsabilités entre l’Etat et les Régions semble nécessaire pour que les débats contradictoires aient lieu à propos des réorganisations à engager.

***************

L’orientation est un domaine d’études aux contours difficiles à cerner. Présente dans l’ensemble des interstices de la relation formation-emploi et à tous les niveaux de la régulation du marché du travail, l’orientation constitue un « objet épars ». Il recouvre des questionnements fragmentés tels que l’égalité des chances d’accès à l’éducation, à la qualification et à l’emploi, l’équité sociale, les droits de la personne ou la régulation économique. Interface chargée de concilier les choix individuels, la régulation du système de formation et la demande des entreprises, l’orientation est également une pratique qui s’adosse à une multitude de dispositifs et de procédures, impliquant une grande diversité d’intervenants. Parce qu’elle contribue à toutes les politiques publiques d’emploi et de formation, l’orientation n’a jamais vraiment été constituée en secteur autonome de l’action publique. Ceci est actuellement remis en question sous l’effet conjugué des nouvelles initiatives des instances internationales, dont l’Union européenne et l’OCDE, et du fait d’un nouveau contexte du marché du travail. Des préconisations au plan international prônent l’instauration d’une orientation tout au long de la vie et mettent en cause les structures et les modes de fonctionnements existants1.

De nombreux travaux de recherche se sont penchés sur l’analyse des dispositifs et des pratiques d’orientation. Ces travaux s’intéressent plus souvent à l’orientation scolaire qu’à l’orientation professionnelle et mobilisent des approches psychologiques. Les réflexions de nature institutionnelle, aptes à saisir le sens et les enjeux des réformes et les études abordant de manière globale l’orientation des jeunes et des adultes sont plus rares. Cette rareté relative contraste avec les évolutions institutionnelles en cours, réelles ou annoncées, mettant l’orientation des adultes sur le devant de la scène et interrogeant les organisations héritées de l’histoire. Quel est le sens général de ces évolutions en France ? Correspondent-elles à une transformation de la manière dont l’orientation contribue aux politiques de formation et

1 La première conférence de la Présidence française de l’U.E. organisée par le MENESR les 17-18 septembre 2008 à Lyon avait pour objet emblématique « Gérer les transitions : l’orientation tout au long de la vie dans l’espace européen ». Elle visait précisément à mesurer les progrès dans la mise en œuvre des politiques et principes arrêtés par l’U.E. et à faire apparaitre des convergences.

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d’emploi actuelles ? Telles sont les questions auxquelles cet article apporte des réponses, en trois temps.

La première partie porte un regard historique sur le développement des services d’orientation en France, saisis dans leur cohérence avec les politiques d’éducation et d’emploi. Constitués progressivement dans le temps, trois segments cloisonnés coexistent à ce jour et se distinguent par le statut des publics auxquels ils s’adressent : scolaires, demandeurs d’emplois et salariés.

Dans le cadre de la mise en œuvre d’une politique d’orientation tout au long de la vie, suggérée par les instances communautaires, cette segmentation pose aujourd’hui deux questions fondamentales, objet des réformes en cours. La première est celle de la qualité et la seconde est celle du décloisonnement des services d’orientation.

La deuxième partie traite donc - à partir d’une revue de la littérature nationale et régionale- de la façon dont, en France, sont abordés ces deux enjeux d’action publique. La relative indétermination de la répartition des responsabilités entre l’Etat et les Régions sur l’orientation en France (Borras et alii, 2008) soulève des problèmes particuliers quant à conduite des réformes.

Cependant, la mise en perspective du cas français avec d’autres réalités nationales montre des écueils communs. La segmentation du système d’orientation, est questionnée dans la plupart des pays, comme le montre la revue de la littérature réalisée dans une troisième partie. Les pays se distinguent en revanche par les modalités de réponse apportées au double problème de l’amélioration de la qualité et la coordination des services.

I.LA NAISSANCE DES TROIS SEGMENTS DE LORIENTATION

Un survol historique des politiques et des services d’orientation en France est riche d’enseignement, notamment sur leur rôle dans une régulation du marché du travail. Sur ce registre, quatre grandes phases d’évolution peuvent être distinguées. A chacune correspondent une problématique liée à l’état de ce marché, un type de réponses spécifique apporté par les politiques de formation et d’emploi ainsi qu’une structuration des services d’orientation venant en outiller la mise en œuvre2.

I.1. La spécialisation (années 1960 et 1970)

Le trait dominant de cette première phase est la constitution de services publics spécialisés accompagnant des politiques d’élévation des niveaux de qualification de la population active.

C’est à la fin des années 1960 que se concrétisent ces choix organisationnels, par notamment la transformation du conseil en orientation en service public national intégré aux appareils de formation3 et régulé par des professionnels essentiellement formés à la psychologie. Les CIO sont créés au sein de l’Education nationale en 1971. Les personnels de l’orientation disposent, dans ces organisations, d’une grande autonomie. L’Etat a été jusqu’alors peu interventionniste. Leurs pratiques professionnelles auront deux constantes : l’approche psychologique; la défense d’une orientation au service de l’émancipation des individus. Les

2 La relecture historique des services s’appuie, pour les trois premières phases, sur Danvers (1988, 1999), Caroff (2001), Guichard et Huteau (2007).

3 Ce choix organisationnel fait suite à une évolution entamée en 1950. A cette date l’orientation entre à l’école dans le but de gérer les flux d’élèves : elle devient « scolaire » Avant 1950, l’orientation était

« professionnelle ».et délivrée dans des organisations très variées par des professionnels formés à l’INOP (Institut national de l’orientation professionnelle) créé en 1928 et ancêtre de l’actuel INETOP.

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pouvoirs publics seront souvent conduits à entériner ces pratiques ou à céder face à la revendication de principes déontologiques. Un exemple de recul, certes plus tardif, mais qui puise son explication dans l’histoire, est la création par décret4 du statut de COP en 1991, décision prise à la surprise générale (Sénécat, 2004).

Diverses réformes de ces services d’orientation scolaire ont cependant été tentées. L’une d’elles, en 1970, a eu pour visée de réduire le volet « psychologisant » et de rééquilibrer les fonctions de conseil et d’information. « Ainsi en 1970, l’ONISEP se substitue au BUS (Bureau universitaire de statistique) pour produire et diffuser l’information. C’est également à cette date que le CEREQ est créé au sein de l’ONISEP pour alimenter ce dernier en informations actualisées […]». Le premier choc pétrolier limita la portée de cette réforme, en remettant en cause la conception adéquationniste de la relation formation-emploi sous-tendant la planification. Ceci amènera à une nouvelle conception de l’orientation, centrée sur

« l’éducation au choix »5, re-légitimant indirectement les approches centrées sur les individus.

A la même époque, en 1975, chaque université française est dotée par convention d’une cellule d’information et d’orientation. Par ailleurs, en 1966, l’AFPA est créée6 avec deux missions : la formation qualifiante des adultes, délivrée dans ses propres centres de formation ; l’orientation, délivrée dans des centres psychotechniques. Paradoxalement, l’orientation est devenue durant cette période un instrument de planification - adaptée à un contexte de faible taux de chômage et de pénurie de main d’œuvre qualifiée propres aux années 1950-1960- au moment même où cette planification était remise en cause par la crise économique du début des années 1970.

I.2. La généralisation (années 1980)

Les années 1980 marquent un tournant dans le positionnement de l’orientation au sein de l’action publique. En effet, les politiques de scolarisation des décennies précédentes ont portées leurs fruits. Les individus entrent mieux formés sur le marché du travail. Les entreprises ont accès à une main d’œuvre éduquée. Le problème est désormais celui de la réduction d’un chômage de masse qui touche fortement les jeunes à l’entrée dans la vie active et certaines populations à risque, non qualifiés, seniors ou handicapés. Des solutions sont recherchées dans des politiques d’insertion sociale et professionnelle ciblées et l’orientation va devenir un outil au service de ces politiques, conduisant à sa « dilution » au sein d’une multiplication d’intervenants se réclamant de l’orientation tant des jeunes que des adultes (Guichard et Huteau, 2007).

L’orientation reste à cette époque une des compétences des deux acteurs du noyau dur du service public de l’emploi, l’AFPA et l’ANPE. Si l’ANPE a en charge le placement, elle se préoccupe aussi d’orientation, mettant en place des dispositifs spécifiques d’orientation vers l’emploi et recourant à l’AFPA pour ce qui est de l’orientation en formation, dans un partage des tâches au demeurant pas toujours très clair. Mais l’orientation se déploie aussi chez tous les intervenants en charge de la mise en œuvre des dispositifs ciblés de lutte contre le chômage, les Missions locales et PAIO jeunes qui se développent à partir de 1982, le réseau des Cap-Emploi, qui se structure après la loi de 1987 sur l’emploi des travailleurs handicapés,

4 Décrets et arrêté du 20 mars 1991 et loi du 25 juillet 1985 relative au titre de psychologue.

5 Celle-ci fera son entrée dans les établissements scolaires suite à une circulaire en 1996.

6 Elle remplace l’ANIFRMO (Association nationale interprofessionnelle pour la formation rationnelle de la main-d'œuvre) créée en 1949 pour développer la formation accélérée des adultes après la guerre. Sa gestion est tripartite.

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les services d’accompagnement des demandeurs d’emplois, les services insertion des Conseils généraux, suite à la création du RMI en 1988 et sa décentralisation en 2003.

Que ce soit au sein des ML-PAIO, des Cap-Emploi, des services insertion, le conseil en orientation est intégré à une prestation globale d’accueil, d’information, de formation, d’aide au projet, de santé ou de logement dont la finalité est l’accès à l’emploi. On ne peut décompter les effectifs dédiés à l’orientation. L’orientation n’est qu’une de leurs compétences. Ceci constitue une première différence par rapport aux services spécialisés de la période précédente. Par ailleurs, nombre de dispositifs développés dans la période sont adossés à des bases territoriales. C’est le cas des ML-PAIO, guichets uniques de proximité pour les jeunes financés en partie par les collectivités locales. Il en va de même des services d’insertion des bénéficiaires de minimas sociaux, placés désormais sous la responsabilité des présidents de Conseils généraux. Cette « implantation » territoriale de l’orientation est une seconde différence notable comparativement aux choix organisationnels antérieurs de services publics nationaux.

Le paysage de la politique de l’emploi ayant évolué vers une plus grande complexité institutionnelle et le conseil en orientation aux demandeurs d’emplois ayant étant intégré à tous les dispositifs de la politique de l’emploi, il est, de ce fait, également dispersé, peu visible et non coordonné.

I.3. La privatisation (années 1990)

Les années 1990 sont le théâtre de nouvelles inflexions de l’action publique en matière d’orientation. Celle-ci devient un vecteur d’introduction d’une « normalisation » de l’accompagnement des mobilités professionnelles des salariés. Son rôle change. Elle vise à promouvoir des marges de flexibilité des employeurs et à renforcer l’employabilité des salariés. Des dispositifs sont définis par les partenaires sociaux dans le cadre du financement de la formation professionnelle continue. Ils sont mis en œuvre par des prestataires publics et privés qui doivent pour exercer recevoir des agréments de l’administration.

Un constat est à l’origine de ces inflexions. Les politiques d’insertion n’ont pas suffit à réduire le chômage de masse. Les réponses politiques sont de plus en plus recherchées du côté des entreprises, soumises à de fortes contraintes d’adaptabilité afin de faire face à une concurrence exacerbée au plan mondial. La nécessité de former une main d’œuvre à la fois très qualifiée et capable d’ajuster en permanence ses compétences aux fluctuations du marché conduit au développement d’actions spécifiques destinées à renforcer l’employabilité individuelle. L’orientation est mobilisée à cette fin et elle va prendre la forme principale de deux dispositifs, les bilans de compétence (BDC) et la validation des acquis de l’expérience (VAE)7. Si un conseil en orientation à destination des salariés est développé au sein des FONGECIF, les effectifs concernés sont tellement faibles8, que le problème de l’orientation des salariés est réellement pris en compte par ces deux dispositifs. Ils visent de manière complémentaire à faciliter les mobilités professionnelles : le BDC sert à définir un projet professionnel et la VAE permet à toute personne de se voir reconnaître son expérience par la délivrance d’un diplôme, d’un titre ou d’une certification sur présentation d’un dossier évalué par un jury.

7 Le BDC est instauré par la loi du 31/12/1991 et la VAE par la loi de modernisation sociale du 18/01/2002.

8 Voir tableau en annexe.

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Créés au départ pour les salariés et financés par les employeurs, ces deux dispositifs sont rendus accessibles aux demandeurs d’emplois, sur prescription et via des financements du service public de l’emploi9. A ce jour, les BDC et le conseil en VAE sont confiés par les employeurs ou les services publics de l’emploi à des organismes prestataires publics et privés.

Sur les 900 organismes qui délivrent des BDC, 94 sont des centres interinstitutionnels de bilans de compétences (CIBC) institués par la circulaire du 14 mars 1986 du ministère du Travail. Une étude portant sur la mise en œuvre des BDC signale « des pratiques professionnelles très hétérogènes, en raison d’un fort turn-over et d’un statut précaire pour un tiers d’entre eux » (Dares, 2005). De même une étude sur la manière dont les Points-relais Conseil en VAE informent les candidats de leurs droits et les aident à choisir une certification signale «qu’ ils sont venus s’ajouter, sans s’y substituer, aux dispositifs déjà en place dans les ministères valideurs. (Cereq 2006).

A la fin de cette décennie 1990, trois segments de l’orientation sont définitivement constitués ; ils fonctionnent de manière cloisonnée, à la fois du fait de publics distincts mais aussi du fait de statuts et professionnalités très hétérogènes des conseils. A côté des professionnels de l’Education nationale et de l’AFPA spécialistes de l’orientation en formation des jeunes ou des adultes, des professionnels non spécialistes de l’orientation, des salariés du service public de l’emploi, d’associations ou de collectivités locales font du conseil dans le cadre de leur mission d’insertion. Coexiste également un conseil en orientation tourné vers les salariés délivré dans le cadre de dispositifs normés et mis en œuvre par des salariés de droit privé aux pratiques professionnelles hétérogènes.

I.4. L’européanisation du cadre national (années 2000)

Les années 2000 ouvrent à nouveau la voie à des transformations significatives de l’action publique de l’orientation en France, sous l’influence de diverses initiatives communautaires visant à instaurer une formation puis une orientation tout au long de la vie. Depuis mars 2000, l’Union Européenne a engagé une série de réformes de ses politiques de formation et d’emploi dans le but de réaliser l’objectif, à dix ans, fixé lors du Conseil européen de Lisbonne, qui est de « devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ». Les politiques d’orientation professionnelle vont être amenées à occuper une place centrale dans la réflexion sur ces réformes. L’Union européenne précisera plus tard son approche et annoncera un certain nombre de préconisations concernant l’orientation, notamment dans un rapport conjoint avec l’OCDE (2004-a) « Career Guidance.

Handbook for Policy Makers » (voir aussi Cedefop, 2004 et 2005). Ce rapport sera publié en même temps qu’un rapport de l’OCDE (2004-b) devenu depuis une référence « Orientation professionnelle et politique publique, comment combler l’écart ?». Ces rapports font suite à des publications antérieures de l’OCDE (2001 et 2002) ayant posé les termes d’un débat sur la qualité et le pilotage de l’orientation. Ils seront suivis d’autres rapports commandés par l’U.E.

(Sultana et Watts, 2005, Frade et alii, 2005, Personnaz et alii, 2007, Darmon et alii, 2007) focalisés sur l’orientation des adultes et l’orientation au sein du service public de l’emploi.

Le rapport de l’OCDE (2004-b), basé sur les résultats d’un examen des politiques d’orientation professionnelle dans quatorze pays, cherchait à renseigner une question : comment l’organisation et le fonctionnement des services d’orientation contribuent à la réalisation d’objectifs essentiels des politiques publiques ? Deux conclusions s’en dégagent.

9 50 000 bilans réalisés par des salariés et 155 000 par des demandeurs d’emplois en 2003 (Dares, 2005). Sur 70 000 démarches d’information sur la VAE en 2004, 42 %ont concerné des demandeurs d’emplois. (Cereq, 2006).

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En premier lieu, l’orientation est désormais qualifiée de « tout au long de la vie ». Si elle concerne encore les jeunes en scolarité, une inflexion de l’action est nécessaire pour prendre en charge les adultes, de plus en plus confrontés à des mobilités en cours de vie active. En second lieu, les débats sur la modernisation des services publics en Europe atteignent aussi les services d’orientation, mettant en cause les choix organisationnels passés.

Bien qu’absente de l’examen des pays de l’OCDE, la France entreprend dans le même temps une réflexion sur son action en matière d’orientation. Des rapports gouvernementaux sur l’orientation se multiplient (Henoque, Legrand, 2004, Tharin, 2005, MENESR, 2007, Reiss, 2007) mais ne considèrent essentiellement que l’orientation scolaire, son fonctionnement, son évaluation et son articulation avec les politiques éducatives ; l’orientation des adultes demeure marginale dans les débats. Ceci s’explique en partie par un double contexte. Tout d’abord, le questionnement sur l’orientation est en France ravivé par les difficultés massives d’insertion des jeunes et de l’échec scolaire, qui trouveront une expression sociale et médiatique forte lors des émeutes urbaines de novembre 2006. A la même période, l’actualité place sur le devant de la scène la délicate question du transfert des COP aux Régions.

Les diverses initiatives et recommandations formulées par les instances communautaires et internationales ont des incidences indéniables sur la conception et le pilotage des politiques d’orientation dans les différents pays. L’une des conséquences est la prise de conscience de la nécessité de réformer les dispositifs nationaux d’orientation et d’envisager leur décloisonnement afin rendre opératoire la notion préconisée « d’orientation tout au long de la vie » (OTLV). Si la France est un cas emblématique de système d’orientation segmenté, dans la plupart des pays de l’OCDE et de l’Union européenne, une telle segmentation prévaut aussi. La résolution de cet obstacle institutionnel et politique devient un élément-pivot des réformes nationales qui s’engagent.

II.LA QUALITE ET LA SEGMENTATION DES SERVICES DORIENTATION ENDEBAT EN

FRANCE

Le mouvement de réforme en France traduit des évolutions à deux niveaux. Des réformes transversales aux trois segments de l’orientation sont conduites au plan régional en lien avec les responsabilités confiées aux régions depuis les différentes lois de décentralisation10. Les premières initiatives datent de 1993. Dans le même temps, des réformes internes à chaque segment continuent à être menées en parallèle au niveau central.

III.1. Décloisonnement et qualité : des chantiers ouverts au niveau régional

Dès 1993, des Régions pionnières se préoccupent d’orientation dans le cadre de la préparation du volet orientation du PRDF. Elles dresseront le bilan suivant en 2004. « Le système français d’AIO apparaît comme un ensemble de dispositifs ne parvenant pas à se constituer en secteur doté de normes, de valeurs et de pratiques communes. ». Il y a urgence à « poursuivre l’effort de clarification et de simplification annoncé par la loi quinquennale de 1993 afin que chaque citoyen puisse disposer à proximité sur les territoires d’un accompagnement de qualité de ses démarches individuelles autrement d’une orientation active allant bien au-delà de l’information dispensée par un guichet institutionnel » (CCPR 2004). Les Régions adoptent

101982, 1993, 2002… La loi du 13/08/2004 réaffirme l’entière responsabilité des Régions sur l’apprentissage et la formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d'un emploi (dès lors que ces formations ne relèvent pas de l'assurance chômage et de l'entreprise). Leur champ d'intervention est étendu, à l'organisation du réseau des centres et points d'information et de conseil sur la VAE.

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une conception proche de celle de l’U.E. Les actions des régions pionnières, qui feront progressivement tâche d’huile, visent à coordonner les services et abordent le sujet de la qualité.

En matière de coordination régionale, Rhône-Alpes est précurseur avec la mise en place en 2004 du Pôle Rhône-Alpes de l’orientation (PRAO) chargé de l’amélioration et du développement des services d’AIO (Amnyos, 2005). Le PRAO propose aujourd’hui à ses vingt et un réseaux adhérents des outils « communs et fédérateurs », définis à partir d’une analyse des besoins des publics. L’Ile de France est engagée dans une démarche similaire de coordination par une instance régionale, le CARIF en charge depuis 2002 de l’information sur les métiers, la professionnalisation des acteurs et leur mise en réseau. Outre ces exemples emblématiques, des outils variés sont développés ici et là : centres de ressources et mise en ligne d’informations pour les professionnels et les publics (Réseau nouvelle chance d’Aquitaine, programme @-toile du Centre, TIC en Pays de la Loire, prao.org et RhôneAlpes- Orientation.org), lieux uniques d’accueil (projet des Maisons Communes Emploi Formation en Midi-Pyrénées en 2002).

Les Régions effleurent également aussi le chantier de la qualité (Cheynet, Normand, 2005).

Ce terme apparaît dans les diagnostics et programmes d’action établis à la demande des Conseils régionaux du Languedoc-Roussillon et de Bourgogne par le cabinet Amnyos (2006 a- et b-). Les quatre axes d’action du Languedoc-Roussillon sont : l’organisation et l’animation des acteurs dans le territoire, le développement d’une culture et de professionnalités partagées, la mutualisation des méthodes et des ressources et l’approche régionale de la qualité des services. La Bourgogne envisageait en 2006 la mise en place d’une charte fédérative en vue de l’amélioration de la pertinence, de la qualité et de l’efficacité de l’AIO. Rhône-Alpes se distingue : dans le cadre du projet « DROA11 » elle définit en 2006 un

« référentiel qualité de l’orientation » propre à favoriser une meilleure guidance professionnelle tout au long de la vie. Si le chantier de la qualité est ouvert dans les projets d’intentions, il reste à mettre en œuvre concrètement.

III.2. Des initiatives régionales peu relayées par le niveau central

Malgré la décentralisation, la prise de responsabilité sur le champ de l’orientation a été lente et différenciée selon les régions (CCPR, 2002), notamment parce que les moyens, financiers et légaux ont été longs à se mettre en place. Une autre raison explique cette lenteur. En dépit de l’obligation faite aux Conseils régionaux de produire un « plan d’action pour la mise en œuvre d’une politique d’information et d’orientation au sein du PRDFPJ » (art 53), la loi quinquennale de 1993 a laissé planer une grande ambiguïté au terme de son article 49 : « La Région aura compétence pour l’ensemble de la formation professionnelle continue en faveur des jeunes de moins de vingt-six ans et disposera à ce titre des compétences exercées par l’État en matière de formation professionnelle sur le réseau d’accueil, d’information, d’orientation et de suivi des jeunes. » Autrement dit, pour les public-jeunes, les Régions auraient compétence pour l’orientation en formation, tandis que l’État garderait celle des activités des ML-PAIO ayant trait à l’insertion. Dans le partage de la « relation formation- emploi » – qui délègue aux Conseils régionaux une attribution générale en matière de formation professionnelle et conserve à l’État la maîtrise de la politique de l’emploi – la question des fonctions d’orientation n’a pas été vraiment tranchée et demeure en aujourd’hui en suspens (Berthet, Gayraud, 2003)

11 Projet conduit entre 2003 et 2006 dans le cadre d’un programme européen Léonardo da Vinci en partenariat quatre régions d’Europe. Il consistait à comparer les organisations et pratiques locales d’orientation.

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Ce partage, peu clair, des responsabilités entre les niveaux régional et central ne permet pas aux Régions d’avoir toute la latitude pour décliner opérationnellement leurs orientations politiques, d’autant plus que les réformes engagées au niveau central ne prennent pas toujours le relai des initiatives locales, comme le montrent quelques exemples récents.

Après l’échec du transfert aux Conseils régionaux de l’animation du réseau des COP et la crise des banlieues de l’automne 2006, le Premier Ministre nomme un délégué interministériel à l’orientation (DIO). Suite à une mission de réflexion sur la réforme du dispositif national d’orientation, un schéma national de l’orientation a été élaboré en mars 2007. Les principales lignes d’action sont la réduction des sorties sans qualification et le développement d’une meilleure connaissance des métiers et du monde du travail dans l’enseignement secondaire ; la réduction du décrochage en première année à l’université et la facilitation des transitions vers l’emploi pour le supérieur. La « Délégation », bien qu’à vocation interministérielle, prend donc à bras le corps de premières réformes limitées au seul segment de l’orientation scolaire.

Concernant l’orientation des demandeurs d’emploi, les choix récents conduisent à renforcer l’isolement institutionnel de ce segment et la subordination à l’objectif de placement. En effet, alors que l’AFPA vient d’être décentralisée, le gouvernement annonce que les 750 psychologues du service d’orientation quitteraient l’association pour être intégré d’ici 2011 au nouvel organisme issu de la fusion de l’ANPE et des Assedic. Dans le contexte de cette fusion, l’activation des chômeurs, les droits à indemnisation sont désormais soumis à des devoirs de recherche active et d’acception « d’offres raisonnables d’emploi », le plus souvent dans les métiers en tension. L’intégration de l’orientation au service public de l’emploi conduira à mobiliser ces services dans cet objectif précis.

C’est donc au niveau régional que diffuse, timidement, une conception de services d’orientation unifiés, caractéristique d’une politique d’OTLV promue par l’Union. Au niveau national l’orientation continue à être vue prioritairement comme un instrument des régulations institutionnelles, au service des objectifs des appareils de formation et des dispositifs de la politique de l’emploi. Pour que les réformes engagées au niveau central prennent le relai des réformes conduites en région, il faudrait qu’elles se fondent sur une plus grande coopération Etat-Région. C’est rarement le cas. Les protocoles d’expérimentation de la formation professionnelle conclus en 1999 par l’État avec sept régions12 et qui visaient la mise en réseau des services d’AIO constituent une exception notoire. L’initiative toute récente de la DIO et du Haut commissaire à la jeunesse qui travaillent ensemble à produire une circulaire interministérielle concernant le repérage et le traitement des jeunes sans qualification va dans le même sens. Cette circulaire prévoit de s’appuyer sur les « bonnes pratiques régionales » de coordination des acteurs de l’orientation scolaire et post-scolaire13. Il y a ici un pas en avant vers plus de transversalité du fait de l’enjeu à unifier des services aux jeunes.

III.ET EN DEBATS A LETRANGER

Rémanents au sein de l’ensemble des pays de l’OCDE, les deux grands enjeux de politique publique - amélioration de la qualité des services d’une part et décloisonnement des segments de l’orientation d’autre part- suscitent dans chaque pays des voies de réformes spécifiques. La

12 Aquitaine, Centre, Pays de la Loire, Midi-Pyrénées, Réunion, Basse-Normandie, Rhône-Alpes. Circulaire DGEFP n° 2002-8 du 21/3/2002

13 Le Quotidien de la formation, 20/02/2009

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mise en perspective des diverses expériences nationales donne à voir, sous un angle plus large, les termes des débats actuels et la diversité des solutions recherchées.

II. 1. Des « démarches qualité » qui percutent les régulations professionnelles

Les diagnostics sur la nécessité d’améliorer la qualité des services convergent dans la plupart des pays : les enjeux portent sur un meilleur usage des TIC, une réduction de l’approche psychologique et un développement de l’information, un développement des services aux adultes et un meilleur ciblage des services… (OCDE, 2004-b). En revanche, des divergences apparaissent dans les solutions envisagées. Dans son rapport de 2001, l’OCDE explore deux pistes. La première prend appui sur la création de standards nationaux de qualité, de procédures d’accréditation et de mise en concurrence des prestataires publics et privés. Cette piste consiste à introduire dans le domaine de l’orientation des régulations de type « quasi- marché ». La seconde privilégie la définition, par les professionnels, de référentiels de compétences et de codes de déontologie, confortant par là même les régulations professionnelles des services.

L’exemple le plus abouti de standards de qualité et d’accréditation est celui au Royaume-Uni (OCDE, 2004-b). Dans ce pays, le National Information Advice and Guidance Board assure une coordination de l’orientation professionnelle mise en œuvre par les ministères de l’Éducation et des Qualifications et du Travail et des Retraites. Un autre organisme, le Guidance Council définit les standards de qualité des multiples acteurs de l’orientation. Afin de s’assurer de la réalisation de ces recommandations, les organismes chargés d’effectuer l’orientation professionnelle ne sont subventionnés qu’à la condition qu’ils respectent les standards. En parallèle, un programme de formation a été créé à l’University of East London qui offre depuis le début des années 2000 un diplôme de troisième cycle en orientation professionnelle tous publics. Les titulaires sont membres de l’Institute of Career Guidance (ICG).

Cette évolution s’insère dans des pratiques de réforme des services publics en Europe qualifiée de « nouvelle gestion publique », consistant à « importer » dans les services publics des instruments issus privé. Deux arguments justifient en théorie les « quasi-marchés ». Ils répondent d’une part au problème d’aléa moral, selon lequel les prescripteurs des services - ici les conseillers- chercheraient d’abord à défendre les intérêts de leurs membres et non ceux des usagers. Ils répondent d’autre part au problème de l’opportunisme de certains usagers opportunistes, qui consomment des services gratuits au détriment d’usagers moins avertis mais qui en auraient le plus besoin. L’introduction d’un contrôle, par la mise en place de standards et d’un principe de concurrence entre prestataires, est dans ce cas supposée améliorer l’efficacité et l’équité en limitant ces comportements.

D’autres expérimentations nationales visant à une amélioration de la qualité s’ancrent sur la promotion de référentiels de compétences professionnelles élaborés de manière concertée.

Ceci est le cas au Canada où un « Guide canadien pour les professionnels en développement de carrière » a été mis au point grâce à une large implication de l’ensemble des professionnels. Ce Guide a connu une forme de généralisation car il a inspiré les normes internationales mises au point par l’Association Internationale d’Orientation Scolaire et Professionnelle (AIOSP). Cette association de professionnels a pour mission est de

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promouvoir au plan international des services d’orientation de qualité14. Le référentiel de l’AIOSP a été ratifié par un groupe de 700 praticiens de trente-huit pays en 2003.

Les régulations professionnelles de l’orientation sont donc interrogées au niveau international par le développement de régulations marchandes. Mais l’avenir semble ouvert, la pertinence des « quasi-marchés » suscitant de vifs débats, y inclus au sein de l’OCDE. Les arguments avancés (2001, 2002, 2004-b) se teintent de nuances : certains rapports insistent sur la rareté des évaluations régulières et systématiques de la qualité des services ; d’autres pointent la difficulté de développer une mesure fiable de l’impact des services d’orientation.

II.2. Des décloisonnements institutionnels qui transforment les liens entre orientation et politiques publiques

La réflexion sur la qualité des services a en arrière plan la contrainte budgétaire, de contrôle des dépenses publiques. La « dualisation » de l’offre de services de l’Agence Connections au Royaume-Uni est une réponse à cette contrainte. L’Agence a mis en place des services en lignes téléphoniques 24/24 tous public, moins coûteux qu’un service « en face a face », ce qui permet d’élargir l’accès au service tout en réservant le face à face à des publics particuliers.

Le transfert de responsabilités aux collectivités locales ouvre également la perspective de nouvelles ressources financières. De même le décloisonnement institutionnel devient source d’économies de divers points de vue. La création de services « tous âges » permet théoriquement de rééquilibrer le poids des services aux jeunes et aux adultes par une gestion des emplois plus souples.

Concernant ce décloisonnement, diverses solutions institutionnelles sont expérimentées à l’étranger (OCDE, 2004-b). Les unes font appel au pouvoir d’unification de l’État central, d’autres s’appuient sur la mise en place d’instances de gouvernance infranationales ; d’autres encore privilégient l’instauration de guichets uniques locaux. Quelques exemples illustrent ces trois modalités de décloisonnement. Seul le Royaume-Uni15 semble avoir réussi à développer une cohérence d’ensemble des politiques d’orientation. Outre les standards de qualité et l’accréditation, l’Angleterre privilégie donc une coordination centralisée par un Ministère.

D’autres pays, souvent à tradition décentralisée privilégient des instances de gouvernance régionale. En Espagne un conseil général pour l’apprentissage – regroupant le ministère de l’Emploi et des Affaires sociales, les gouvernements régionaux, les communautés autonomes et les partenaires sociaux – est chargé d’assurer la coordination des politiques et de poser les bases d’un système intégré d’orientation. Les expérimentations ne sont pas toujours probantes, car la coordination ne nait pas de simples recommandations et malgré le principe d’égalité de traitement, des disparités territoriales apparaissent. Ce problème peut être contourné par la mise en place conjointe de commissions nationales.

Enfin se dessine un troisième niveau de coordination opérationnelle, avec des guichets uniques locaux de services tous publics. Ce choix est illustré par Career Wales service inter- âges d’orientation professionnelle créé en 2001, au Pays de Galles. Careers Wales est responsable des services destinés aux jeunes, de l’orientation professionnelle des adultes, du réseau learndirect de centres d’appel, du Youth Gateway (un cours bref et intensif d’acquisition des compétences nécessaires au passage à la vie active conçu à l’intention des jeunes à risque âgés de 16/17 ans) et des rapports entre l’éducation et l’entreprise. Il soutient

14http://www.iaevg.org;

15 Exception faite des différences pouvant exister entre Écosse, Pays de Galles, Angleterre.

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les programmes d’orientation professionnelle organisés dans les écoles et les collèges. Ses services pluridimensionnels sont ouverts sans rendez-vous aux personnes de tous âges. Des services aux adultes sont organisés par prestations itinérantes, par téléphone ou en ligne. Si le personnel de Career Wales travaille avec des jeunes et des adultes, il est en général spécialisé.

L’appartenance à un seul organisme donne de la souplesse de gestion et autorise les mobilités professionnelles. Careers Wales est une confédération composée de sept entreprises régionales rassemblées sous une appellation commune.

Ces évolutions institutionnelles nationales sont de nature à transformer profondément les liens entre orientation et politiques publiques. Développer des services unifiés d’orientation signifie aussi « éloigner » voire « sortir » l’orientation des appareils de formation, des dispositifs de la politique de l’emploi et de la formation continue. Ceci conduit à réduire son rôle d’instrument de régulation des flux dans ces systèmes. L’orientation est traditionnellement située au confluent des logiques individuelles et des régulations institutionnelles (Berthet T., Grelet, Y., Romani, C., 2008). L’OTLV et le décloisonnement invitent à un rééquilibrage au profit des logiques individuelles, principe somme toute, en concordance avec la vision de l’U.E. d’une

« orientation active », à savoir un service public « accessible à tous et à tous âges de façon à ce que l’approche de ces services cesse d’être axée sur l’offre pour s’orienter vers la demande ».

****

Malgré quinze années d’initiatives régionales et de fortes incitations de l’Union européenne, les questionnements institutionnels sur l’OTLV en France sont à peine émergents. Le problème de la transversalité des services n’a jamais vraiment été abordé de front et l’idée de services unifiés « tous âges » n’est pas à l’ordre du jour. Le Délégué interministériel à l’orientation le confirme : « Bien que la segmentation des réseaux d’information et d’orientation soit unanimement critiquée, il semble que le grand service public de l’orientation qui engloberait l’initial et le tout au long de la vie n’a jamais été envisagé en tant qu’institution »16. La question de la réforme de l’action publique en matière d’orientation se pose donc avec acuité.

Ce mouvement de réforme à engager implique que l’Etat s’empare du sujet de manière volontariste, reprenant ainsi le leadership stratégique dans le domaine. Ceci appelle aussi une nouvelle architecture de l’action publique en matière l’orientation, basée sur une réflexion conjointe entre l’Etat et les Conseils régionaux. Les acteurs régionaux sont en effet désormais incontournables. La place des professionnels dans cette nouvelle architecture devrait également être précisée, du fait de la prégnance historique des régulations professionnelles de l’orientation en France. Enfin, la place des « usagers », tant du côté des employeurs largement absents jusqu’alors des régulations de l’orientation, que des représentants des jeunes, des familles ou encore des salariés et des demandeurs d’emplois mérite d’être discutée. Quelle voix peuvent-ils et doivent-ils apporter aux débats ? Les associations internationales de professionnels sont sensibles au développement d’une implication « citoyenne ». Celle-ci est de nature à renforcer leur conception du conseil en orientation : les conseillers n’orientent pas en faisant les choix « à la place de …» ; ce sont les citoyens qui s’orientent, éclairés par un conseil de qualité.

16 AEF 4/02/2009

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Quelles inflexions donner aux institutions de l’orientation pour qu’elles répondent au nouveau contexte du marché du travail ? Dans quelles directions entreprendre des réorganisations institutionnelles pour améliorer la qualité des services ? Si l’Etat, et toutes les parties prenantes, s’engagent dans une telle réflexion de redoutables questions vont émerger. La conception de services « tous âges » n’est-t-elle pas d’abord une réponse à des contraintes budgétaires ? De tels services unifiés présentent en effet des avantages en termes de coûts, notamment parce qu’ils autorisent une gestion plus souple des emplois et une mise en concurrence public-privé. Sans cette contrainte, les services spécialisés, régulés par les professionnels, ne pourraient-ils s’étoffer et perdurer ? Par ailleurs, initier une réflexion sur des services « tous âges » conduit à remettre en cause la diversité des choix organisationnels, la coexistence de services publics et privés, plus ou moins spécialisés ou intégrés à des services d’accompagnement. Ceci ne manquerait pas de soulever de fortes résistances du fait des enjeux de statuts, mais aussi des interrogations légitimes sur les liens entre qualité du service et compétences professionnelles. La spécificité des problèmes d’emploi des jeunes et des adultes ne suppose-t-elle pas un certain degré de « spécialisation », garant d’une réelle qualité de service ?

Des réponses objectives à de telles questions n’existent pas à ce jour. Les apports de la recherche semblent ici plus que jamais nécessaire. Il conviendrait donc de mieux articuler de tels débats avec de nouvelles investigations sur l’orientation. L’approche psychologique, jusqu’alors largement prédominante dans les recherches sur l’orientation ne peut couvrir seule les questionnements. Il s’avère nécessaire de multiplier les approches, de croiser les disciplines, d’investir plus fortement le champ de l’orientation des adultes (Cereq, 1999, Cuntigh et alii, 2006) et sans doute, de développer les approches institutionnelles. Sur ce plan, le développement de comparaisons internationales pourraient offrir des perspectives d’accumulation de connaissances indispensables à une meilleure compréhension de l’action publique et son efficacité.

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Glossaire.

AFPA : Association pour la formation professionnelle des adultes AIO : accueil, information, orientation

BDC : bilan de compétence et BDCA : bilan de compétence approfondi CARIF : Centre d’animation, de ressources et d’information sur la formation

CCPR : Comité de coordination des programmes régionaux d’apprentissage et de formation professionnelle continue

CIO : centres d’information et d’orientation COP : Conseiller d’orientation psychologue

DECOP : diplôme d’état de conseiller d’orientation psychologue DIO : délégation interministérielle à l’orientation

DRTEPF : Direction régionale du travail de l’emploi et de la formation professionnelle FONGECIF : Fonds de gestion des congés individuels de formation

INETOP : Institut National d’Etude du Travail et d’Orientation Professionnelle MENESR, Ministère de l’Éducation Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche

ML-PAIO : mission locale-permanence d’accueil d’information et d’orientation ONISEP : Office national d’information sur les enseignements et les professions OTLV : Orientation tout au long de la vie

PRC : Point relais conseil sur la VAE RMI : Revenu minimum d’insertion UE : Union Européenne

VAE : validation des acquis de l’expérience

(18)

Tableau.

Les services d’orientation en France

Sous tutelle Education nationale/Orientation scolaire

CIO SUIO

3 757 COP

518 directeurs de CIO

Environ 1 000 personnels administratifs des CIO, remplissant, entre autres, celle de personnel d’accueil ;

Pilotage : 117 inspecteurs de l’Éducation nationale chargés de l’orientation, conseillers techniques des inspecteurs d’académie en département ; 30 chefs des services académiques d’information et d’orientation (CSAIO) et conseillers techniques des recteurs

Sous tutelle Travail/Orientation professionnelle

AFPA 800 psychologues du travail (70 % d’orientation, 10 % d’accompagnement des transitions professionnelles, 20 % de suivi psychopédagogique des stagiaires en formation et conseil en recrutement et gestion des emplois et compétences), appuyés par 200 agents techniques d’orientation (30 % information et 70 % d’appui administratif et technique).

22 directeurs de Centre régionaux d’orientation professionnels, assistés de 45 chargés de direction responsables de l’orientation

ANPE 1 300 agences locales de l’emploi et 27 631 collaborateurs Trois métiers : directeur, cadre opérationnel et conseiller polyvalent APEC (Cadres) Environ 400 consultants en mobilité dans 48 centres

APECITA (Cadres agriculture) Plus de 20 délégués régionaux et conseillères emploi-formation Missions locales et PAIO

(Jeunes)

10 000 personnes

70 % des effectifs exercent une activité d’orientation sur trois métiers : chargé d’accueil, conseiller, chargé de projet

CAP EMPLOI (Handicapés)

119 organismes de placement spécialisé

1 100 professionnels spécialisés de l’accompagnement des personnes handicapées vers l’emploi

Établissements interinstitutionnels et paritaires/Orientation professionnelle

CIBC 1 300 conseillers bilan de compétences

PRC

FONGECIF 200 à 220 conseillers en mobilité professionnelle.

Source : Centre Inffo (2007) complétée par Borras et Campens

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