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Rhinocéros et "meilleure réglementation"

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Li\ NFWSLETTER DE L'l,'ISTITLJT SYNDICAL ELJROPÉEN iETLIIJ EN SA'IH ET SÉCLJRITE AU TRAVAII

SOMMAlRE

ÉDIT0$li\L

Rhinocéros et "meilleure réglementation"

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Setter Regulation :

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quel impact sur la santé

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et sécurité au travail en 'L.1.1

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Petit lexique BetReg-Français L.1.1 L'OSHA : laboratoire

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Le chlorure de vinyle :

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quancl l'OSHA résistait aux pressions de l'industrie

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Références bibliographiques

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Amiante : une bataille inachevée la lutte pour une interdiction mondiale mise à mal par les incohérences de l'UE

Eternit sur le banc des accusés pour la mort de plus de 2000 personnes

Convention de Rotterdam : une bonne nouvelle pour les poissons, les travailleurs peuvent attendre jusqu'en 2011

!\GENTS CHIM\Q!,IES Autorisation dans REACH : la montagne va-t-elle accoucher d'une souris ?

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Accord-cadre sur le stress au travail : les partenaires sociaux dressent un premier bilan positif

Ll}'RES .:.NOT.RE SUJCIJ,QN

Rhinocéros

et "meilleure réglementation"

Les rhinocéros ont la réputation d'étre des animaux obstinés et myopes. L'insistance de l'actuelle Commission européenne à

vouloir faire de la "meilleure réglementation" sa contribution historique à la construction européenne relève, elle aussi, de l'obstination et de la myopie.

Une "meilleure réglementation"? Qui pourrait donc s'opposer

à cette formule ? C'est comme si l'on vous demandait si vous avez des objections contre le beau temps. Derrière l'étiquette accrocheuse, le contenu du flacon est une amère potion. De quoi s'agit-il au juste? L'idée de base peut se résumer en deux points.

Le premier est affirmé de façon explicite, le second est implicite:

1. Toute règle publique risque d'entraver le développement des entreprises, en particulier lorsque celles-ci sont tenues de respecter des obligations imposées par la société et de rendre compte de leurs activités sous des formes diverses.

li s'agit donc de réduire la charge administrative des entreprises et, en particulier, leurs obligations d'in- formation;

2. Une règle juridique n'est bonne que si elle assure le développement de l'éco- nomie. La légitimité d'une i ntervention pubi ique doit se mesurer par des calculs d'impact qui supposent différents modèles d'éva-

1

uation des coùts et des bénéfices.

Ces idées remontent à la présidence de Ronald Rea- gan au début des années 80.

Pour l'ancien président des Etats-Unis, l'Etat n'était pas la sol ution aux problèmes, i I était le problème. Affirmation paradoxale de la part de celui qui fut le chef de l'Etat le plus puissant du monde, aux commandes d'un appareil militaire sans précédent. La notion de dérégulation trouva des échos favorables dans la Gran- de-Bretagne de Mme Thatcher. L' arrivée au pouvoir du New Labour introduisit quelques nuances sans jamais rompre avec cet héritage.

N" 35 MARS 2009

ISSN: 1815 - 3550

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Pour sa part, !'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a constitué une sorte de laboratoire idéo- logique de la dérégulation en organisant la coopération entre les dérégulateurs des principaux pays industrialisés. L'OCDE promeut les modèles de calcul des coùts administratifs qui ont séduit la Commission présidée par M. ßarroso. Ces modèles fournissent des résultats dont la fiabilité est presque nulle. Mais qu'importe. Le calcul économique n'est ici qu'un prétexte. L'essentiel est ailleurs:

i I s' agit de développer I' autorégulation par les entreprises, de réduire les informations qu'elles doivent transmettre aux autorités publiques, à leurs travailleurs ou aux consommateurs. L'enjeu est plus politique qu'économique. En accordant au patrona! un pou- voir accru, on met en piace un système de décision politique qui tend à le débarrasser des inconvénients du suffrage universel.

L'actuelle débàcle financière aurait pu refroidir les ardeurs des dérégulationnistes. Elle apporle un nouveau démenti à la vieille croyance libérale selon laquelle la somme des égoismes indivi- duels culminerait dans le bonheur collectif. Des sommes colos- sales sont engagées pour sauver le système financier mais le bilan politique de 25 années de dérégulation n'est pas tiré.

En santé et sécurité au travail, la direction choisie par la Com- mission remet en cause toute l'orientation suivie depuis 1989.

Les obi igations d'information représentent I' apport essentiel des directives communautaires dans la mesure où celles-ci entendent mettre en piace une gesti on systématique des problèmes de santé et de sécurité. Pas de gestion possible sans recueillir, conserver et traiter l'information. Pas de participation des travailleurs sans la communication et la discussion de cette information. Pas de contro le possible des autorités pubi iques sans i nformation de la part des employeurs. Réduire les obligations d'information signi- fie inévitablement réduire l'efficacité de la prévention. L'écono- mie réalisée sur les coùts administratifs sera chèrement payée par les travailleurs et la société sous la forme de maladies et dacci- dents causés par le travail.

La couverture idéologique des "meilleurs régulateurs" est la défense des petites et moyennes entreprises (PME). li importe de détruire ce mythe. Toutes les études disponibles montrent que le temps accordé à la prévention dans les PME est dérisoire. Loin de préconiser une réduction des obligations de gestion des PME en matière de santé et de sécurité, une stratégie de prévention sup- pose un renforcement de celles-ci. Le véritable problème concerne l'efficacité bien plus que la quantité. Trop souvent, les PME pas- sent par des consultants extérieurs dont l'intervention est souvent purement formelle et clont les coùts peuvent ètre très élevés. Dans ce domaine, c'est précisément l'absence de réglementation qui a un coùt et qui représente une entrave. C'est bien le paradoxe des charges des rhinocéros. lls foncent vers un objectif qui, le plus souvent, n'est qu'un leurre. L'objectif réel est ailleurs. lls ne le voient pas et ils ne s'en soucient pas le moins du mondea

Laurent Vogel,

Di recteur du département Santé et Sécurité Institut syndical européen (ETUI)

LE DÉPARTEMENT SANTÉ ET SÉCURITÉ DE l'INSTITUT SYNDICAL EUROPÉEN (ETUI) a pour objectif de promouvoir un haut niveau de santé et de sécurité sur les lieux de travail en Europe. li assure des missions de support et d'expertise pour la Confédération européenne des syndicats (CESI et le groupe Travailleurs du Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu de travail. li est membre associé du Comité européen de normalisation (CENì. li anime des réseaux dexperts syndicaux clans les domaines de la normalisation lsécurité des machinesl et des subs- tances chimiques (classification des suhstanccs dangereuses et établis- sement des valeurs limites cl'exposition).

HESA

ETUI

Département Santé et Sécurité 5 bel du Roi Albert li B-121 O Bruxelles Tél.: +32 /012 224 05 60 Fax: +32 (012 224 05 61 hesa@etui.org

L'ETUI bénéficie du soutien fin,mcier de la Comrnunauté européenne La Communauté européenne ne peut étre tenue responsable de l'utilisation qui pourrait ètre faite de l'information contenue dans celte publication.

ETUI, aisbl 2009

-

Newsletter HESA n' 33, rn.irs 2009

La Newsletter HESA est éclitée trois fois par an en franrais et en anglais.

Editeur responsable: Laurent Vogel, directeur du clépartement Santé-Sécurité de l'ETUI

5 bel du Roi Albert li B-121 O Bruxelles

Rédacteur en chef: Denis Grégoire iclgregoirc(a,etui orgl Secrétaire de rédaction: Géraldine Hofmann

On! participé à la rédaction de ce numéro: Stefan Clauwaert, Roland GJuthy, Denis Grégoirc, Tony Musu, Laurent Vogel Traduction: Evelvne Drevet

Documentation: Jacqueline Rotty

Diffusion : Géraldine Hofmann lghofmann@etui.org!

Réalisation graphique: Coast, Bruxelles Imprimé en Belgique p,1r jacoffset

http://hesa.etui.org

Un nouveau point de départ

L'lnstitut syndical européen pour la Recherche, la Formation et la Santé et Sécurité (ETUI-REHS) a fait peau neuve. li est clevenu tout simplement !'Institut syndical européen (ETUI). Notre nouveau logo renvoie à l'acronyme anglais ETUI pour European Tracie Union Insti- tute. Ce changement de nom s'accompagne d'une nouvelle identité visuelle clont les maìtres mots sont simplicité et modernité.

Visitez notre site internet et inscrivez-vous

à

notre Newsletter électro- nique Hesamail: http://hesa.etui.org

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Better Regulation

Better Regu1ation : que1 irnpact sur

1a santé et sécurité au travai1 en Europe ?

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'" Dossier réalisé

par Laurent Vogel lvogel@etui.org

Toutes les références bibliographiques de ce dossier spécial se trouvent p. 17.

1 Voir, notamment, G. Treubner, Droit et réflexivité. L'auto-référence en droit et dans /'organisation, Paris, LGDJ, 1994.

2 Pour une analyse plus détaillée, voir D. Walters, 2002 et Frick et al., 2000.

La Commission affirme que son plan pour une meilleure réglementation devrait permettre de réaliser une économie de 150 milliards d' euros pour 2012 gräce à la réduction de 25 % des charges administratives des entreprises. Présentée comme bénéfique pour I' économie et la société dans son ensemble, cette opération risque en réalité de profiter exclusivement aux entreprises. Les "allégements" concédés aux compagnies privées devront ètre payés au prix fort par la collectivité à travers une réduction des garanties attachées à la santé publi- que, à la défense de l'environnement, à la protection des consommateurs et à d'autres politiques d'intérèt public.

L'information : substance des règles communautaires

En santé et sécurité, l'orientation suivie par la Com- mission prétend faire la différence entre la substance des obligations des employeurs (par exemple, subs- tituer un produit dangereux, utiliser des machines avec un niveau élevé de sécurité) de leurs "obliga- tions d'information". Une teile approche est inap- plicable dans le domaine de la santé et sécurité au travail (SST). Les directives adoptées par l'Union européenne (UE) mettent l'accent sur la mise en piace d'une gestion systématique des problèmes de santé et de sécurité. Elles ne contiennent qu'un petit nombre d'indications substantielles sur des aspects matériels du travail. Les obligations d'information, comme l'évaluation des risques, l'enregistrement des accidents du travail, le suivi des données résul- tant de la surveillance de la santé, etc. constituent le moteur de toutes les mesures préventives concrètes.

Dès les années 70, l'ensemble des réformes législati- ves en SST sont parties du constat qu'il fallait mettre en piace une gestion systématique des problèmes de santé au travail. La production, le traitement et la transmission d'informations forment des compo- santes essentielles de ce processus. Sans informa- tion systématique, il est impossible d'adopter une approche préventive. On ne peut que réagir au cas oar cas. Sans information, la consultation des tra-

~ailleurs et de leurs représentants n'a aucun sens.

Sans information, les possibilités de contröle par les . autorités publiques se réduisent à des réactions face aux événements les plus graves comme les acci- dents mortels. Sans information, il faut renoncer à la perspective d'intégrer la santé et la sécurité dans les choix stratégiques de l'entreprise.

A cet égard, il existe une différence évidente entre la santé au travail et une mesure fiscale. Pour la fis- calité, il est possible de distinguer une obligation substantielle qui serait le payement d'un impöt déterminé d'obligations d'information de type admi-

nistratif comme le fait de tenir une comptabilité ou d'établir une déclaration fiscale. Pour la santé au travail, une teile distinction est artificielle. En effet, la presque totalité des obligations de prévention ne soni pas déterminées à l'avance dans la légis- lation. A quelques exceptions près, un employeur ne dispose pas d'une liste de substances toxiques qu'il serait tenu de substituer ou d'une indication précise de ce qu'il doit faire pour assurer la sécu- rité des machines. Les législations constituent, dans une large mesure, ce qu'on appelle du droit réflexif.

Cette notion, fréquemment utilisée pour analyser le droit de l'environnement, désigne des règles qui n'indiquent pas de façon précise quel est le résultat substantiel à atteindre mais qui aménagent des pro- cédures devant permettre la réalisation d'objectifs déterminés en des termes assez généraux

1•

Ainsi, la directive-cadre et la plupart des autres directives communautaires concernant la santé et la sécurité contiennent peu d'indications précises sur des normes substantielles (valeurs limites d'expo- sition, examens médicaux, caractéristiques techni- ques des installations et des équipements, etc.). Par contre, elles définissent un certain nombre d'objec- tifs généraux et mettent en piace des organisations et des procédures dans le but de créer un système de gestion et des contre-pouvoirs liés à la tradition des relations collectives de travail. Les procédures de régulation soni complexes puisqu' elles reposent sur une articulation entre l'intégration de la santé au tra- vail dans le système de gestion des entreprises ella reconnaissance d'intérèts sociaux opposés qui ins- crivent la santé au travail dans le système des rela- tions collectives

2•

On peut donc décrire ces normes comme portant principalement sur la mise en piace et le bon fonctionnement d'un système d'informa- tion et de relations impliquant différents acteurs : les travailleurs et leurs représentants, les autorités publiques, les services de prévention et, dans une moindre mesure, d'autres entreprises lorsqu'il existe des rapports de co-activité comme dans le cas des chantiers mobiles ou temporaires.

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La possibilité d'atteindre l'objectif d'assurer la sécurité et la santé dans tous les aspects du travail dépend totalement de ce système d'information et de relations. li est artificiel de prétendre isoler des obligations substantielles qui seraient indépendan- tes des obligations d'information et des activités de gestion demandées aux entreprises.

L'exigence de certains milieux patronaux à réduire ces obligations d'information représente une régres- sion par rapport à la mise en piace d'une gestion systématique de la santé et la sécurité dans les entre- prises. Elle revient à demander une réduction de la qualité de la prévention. Les économies éventuelles réalisées par les employeurs coùteront eher aux tra- vailleurs età la collectivité. Dans les entreprises, il est vraisemblable que les gains financiers à court terme ne tarderont pas à ètre mis en danger par des coùts à plus long terme entrainés par les accidents et les maladies (voir encadré).

Par ailleurs, l'efficacité des politiques de santé au tra- vail dépend de l'existence de stratégies nationales de prévention. Celles-ci ne peuvent ètre élaborées que sur la base d'une socialisation des connaissances et des expériences. Sans remontée systématique d'infor- mation vers les autorités publiques, il est impossible de formuler un diagnostic précis sur les problèmes, de définir des priorités et d'affecter les ressources dis- ponibles en tenant campte de celles-ci.

C'est le fardeau trop léger qui tue !

Sur le plan des principes, I' approche suivie par les adeptes de la meilleure réglementation est contes- table. Les obligations d'information constituent la colonne vertébrale de la prévention plutòt qu'une simple casquette qu'on peut porter ou enlever à sa guise. Mais que faut-il penser du diagnostic suivant lequel les obligations d'information concernant la

SST représenteraient un fardeau très lourd qui

empè-

che les entreprises d'ètre compétitives?

Dans la pratique, le temps accordé à la santé au travail dans les entreprises est largement inférieur aux besoins. Le Royaume-Uni est un des pays dont le gouvernement est le plus mobilisé en faveur de la

"meilleure réglementation" en santé et en sécurité.

L' objectif visé est de réduire la charge administra- tive des petites et moyennes entreprises (PME). Un rapport publié par le Health and Safety Executive démonte le mythe d'un étouffement des PME par leurs obligations dans le domaine de la gestion de la santé et sécurité (Heriot Watt University, 2007).

Ce rapport a été établi sur des bases méthodologi- ques beaucoup plus consistantes que la littérature destinée à quantifier la charge administrative suivant des modèles de calcul de coùt. Les conclusions du rapport montrent que le temps consacré à la santé et la sécurité est très réduit. Les auteurs indiquent :

"De manière surprenante, les PME consacrent très peu de temps aux activités liées à la santé et à la sécurité; 59 % d'entre elles y consacrent une heure ou moins par semaine et une sur quatre pas la moin- dre minute." Les données disponibles dans d'autres pays vont dans le mème sens : le temps accordé à des activités de prévention, au sens le plus large, est insuffisant pour assurer une politique efficace de santé et de sécurité.

Ainsi, en France, 19 % des travailleurs seulement ont reçu une information concernant les risques de leur travail en 2005 (Coutrot, 2008). Ce pourcentage tombe à 15 % dans les entreprises de moins de 1 O travailleurs. li reste très bas, inférieur à 30 %, mème dans des secteurs à hauts risques comme le bätiment, Les femmes reçoivent encore moins d'information que les hommes (13 % contre 25 °/4,). En Espagne, à peine 25 % des travailleurs indiquent qu'on a réalisé une étude des risques à le ur poste de travai I au cours

Explosion chez BP: le résultat d'une gestion au rabais

L'analyse des catastrophes industrielles majeures montre à quel point une réduction des obligations d'information des entreprises débouche générale- ment sur des coùts énormes pour la société et les entreprises elles-mèmes. ·

Le cas de l'explosion survenue le 23 mars 2005 à la raffinerie BP de Texas City aux Etats-Unis est révéla- teur. Cette explosion a tué 15 ouvriers et en a blessé 180 autres. Le Chemical Safety Board (CSB) est une agence indépendante fédérale chargée d'enquèter sur les accidents dans l'industrie chimique. Le CSB a mené une enquète qui a mis en évidence une gestion irresponsable et superficielle de la sécurité destinée à réaliser des économies à court terme. · L'enquète du CSB a montré que dans l'unité d'iso- mérisation où s'est produite l'explosion, huit inci-

dents comparables avaient eu lieu entre 1994 et 2004, sans conséquence tragique pour les person- nes. Dans deux cas cependant un incendie avait éclaté. Le rapport du CSB pointe les manquements dans les enquètes menées à la suite de ces acci- dents et dénonce le fait qu'aucun enseignement significatif n'en a été tiré. Le CSB déplore que les mesures de sécurité mises en piace dans la raffi- nerie ont davantage été orientées vers la sécurité individuelle que collective. La mise en piace d'un système de gestion des risques et de programmes de conception et d'entretien des équipements axés sur la prévention des risques d'accidents majeurs est restée un vceu pieux.

Source : CSB News Release, 30 octobre 2006 : CSB lnvestiga- tion of BP Texas City Refinery Disaster Continues as Organiza- tional lssues Are Probed

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Better Regulation

de l'année 2007 (MTAS, 2008). Les travailleurs avec un contrat temporaire sont nettement moins pris en considération que les travailleurs avec un contrat à durée indéterminée (18,2 % contre 33,8

%).

Une étude menée par le gouvernement irlandais aboutit à une estimation approximative des coüts qui parait assez vraisemblable

3.

L'ensemble des mesures de santé et sécurité représenterait de l'ordre de 1

%

des coüts du travail dans les entreprises hors du secteur de la construction. Dans le secteur de la construction, ce coüt se situerait autour de 2 %. Si l'on pense à l'enjeu, c'est un pourcentage très bas.

Rappelons que près de 160 000 personnes meurent chaque année dans l'UE en raison d'une prévention insuffisante sur les lieux de travail.

Sur la base d'un travail comparati(, le chercheur sué- dois Kaj Frick observait lors d'une récente confé- rence internationale qu'une gestion insuffisante de la SST se retrouve derrière les risques techniques et organisationnels. Dans les petites entreprises (de 1 à 49 travailleurs), celte gestion insuffisante peut ètre décrite comme un type de risque séparé. L'absence de compétence et/ou de planification en santé et sécurité expose très souvent les travailleurs à des ris- ques qu'on aurait pu éviter ou réduire de manière facile et bon marché. Les risques supérieurs rencon- trés dans les petites entreprises sont partiellement dus au fait d'avoir plus de travailleurs manuels et/

ou de travailler dans des secteurs dangereux. Le problème principal provient cependant d'un risque accru en raison d'une gestion insuffisante de la santé et sécurité

4•

La cible principale : I' évaluatmn des risques

Quelles sont les cibles principales de la "meilleure réglementation" en santé et sécurité ?

L'évaluation des risques concentre l'hostilité la plus virulente. Elle était déjà au coeur de I' offen- sive menée en 2004 par la présidence néerlandaise contre la législation communautaire5. Pour les auto- rités britanniques, le coOt de l'évaluation des risques pour les entreprises de l'UE s'élèverait à 5,5 milliards d' euros

(BRE, 2008). Dans une évaluation récente, la

Commission estime à 4 à 5 milliards le coüt total des obligations d'information des travailleurs prévues dans deux directives par rapport à leur environne- ment de travail età leur emploi (Commission, 2009).

L'évaluation des risques représenterait un coüt de l'ordre de 2,5 milliards d'euros, moins de la moitié de l'estimation britannique

!

Si les estimations du coüt de l'évaluation des risques sont variables et plutòt fantaisistes, le problème poli- tique est clairement posé. L'obligation imposée aux employeurs d'analyser tous les facteurs qui, dans l'activité de leur entreprise, pourraient menacer la santé et la sécurité est la condition préalable d'une

activité préventive. Sans évaluation des risques, on ne fait que réagir - le plus souvent avec retard - à des situations inacceptables.

Les opposants de l'évaluation des risques formulent des propositions de trois ordres :

1. Pour certains, il faudrait permettre aux entreprises se situant sous un certain seuil de ne pas procé- der à l'évaluation des risques ou de se contenter d'une évaluation virtuelle qui ne serait transcrite dans aucun document. Ainsi, en ltalie, les entrepri- ses de moins de 1 O travailleurs peuvent se limiter à "autocertifier'' qu'elles ont procédé à une éva- luation des risques. Un tel document ne comporle aucune indication des risques évalués ni des mesu- res préventives qui auraient été planifiées. On voit mal comment les représentants des travailleurs pourraient ètre consultés sur le contenu de I' éva- luation des risques s'ils reçoivent une simple copie de celte autocertification administrative ;

2. Pour d'autres, l'évaluation des risques ne devrait pas ètre requise pour des travailleurs temporaires ou intérimaires. C'est notamment une proposition de la Confédération patronale danoise (DI, 2007) qui soutient également une exemption éventuelle pour les plus petites entreprises. Celte proposition est particulièrement cynique quand on sait que ces catégories de travailleurs sont souvent expo- sées à des risques importants sans disposer de l'information et de la formation indispensables ; 3. Pour d'autres encore, on pourrait réduire l'éva-

luation des risques à un simple exercice de bon sens, basé le plus souvent sur des check lists. C'est la conception défendue par les autorités britan- niques qui entendent "démythifier l'évaluation des risques" et combaltre l'aversion pour les ris- ques. Celte conception risque de déboucher sur des évaluations stéréotypées et superficielles. De nombreux risques n'apparaissaient pas comme tels suivant le "bon sens" immédiat des employeurs.

La plupart des risques à long terme sont sous-esti- . més. Parfois, ils sont niés. La prévention n' est effi- cace que si l'on arrive à comprendre les risques dans leurs rapports mutuels et à remonter à des déterminants comme l'organisation du travail et les rapports sociaux au travail. L'ampleur des ris- ques et leur complexité ne sont pas déterminées mécaniquement par la dimension des entreprises.

Pour ne citer qu'un exemple, les travailleuses du neltoyage sont exposées simultanément à d'impor- tants risques chimiques, à des postures ergonomi- ques incommodes, à des horaires difficiles età une organisation du travail despotique. A ces facteurs s'ajoutent souvent une dévalorisation sociale et des discriminations de genre et ethniques.

En dehors de l'évaluation des risques, on trouve un

grand nombre d'autres cibles qui varient suivant les acteurs. Pour certains, l'obligation d'enregistrer les accidents du travail et d'analyser la cause de ces accidents avec les représentants des travailleurs sem- ble poser des problèmes. Les fédérations patronales

3 Daniel Kelly, Economie Impact Asses- sment of Occupational Safety & Hea/th Legis/ation in lreland, présentation faite à la Conférence du 7 novembre 2008 à Brdo pri Kranju (Slovénie).

4 Notes prises durant la conférence du professeur Kaj Frick au Forum Interna- tional Travail et Santé, Paris, 3 novem- bre 2008.

5 Voir la Newsletter du BTS n° 26 de décembre 2004.

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des Pays-Bas contestent mème l'établissement de statistiques européennes concernant les accidents du travail et les maladies professionnelles (VNO, MKB, 2008, p. 24).

La représentation des travailleurs et son röle dans la dynamique de prévention dans I' entreprise sont rare- ment attaqués en tant que tels. Par contre, la reven- dication de réduire la production et la communica- tion d'informations aurait pour effet de transformer les mécanismes de consultation en des formalités sans grande signification. A ma connaissance, il n'y a qu'en Slovénie que la consultation des représen- tants des travailleurs a été remise en question par le ministère de I' Administration publique. Lors d'une conf érence organisée par les autorités slovènes en novembre 2008, il a été proposé de remplacer la consultation de ces représentants des comités de santé et sécurité par un système d'information via intranet. Cette proposition a été rejetée fermement par le ministère du Travail. Lors d'une conférence organisée par notre institut en janvier 2009, le repré- sentant de I' organisation patronale européenne Business Europe a indiqué qu'il ne comprenait pas pourquoi les entreprises devraient consulter les représentants des travailleurs dans le cadre de l'éva- luation des risques. Selon lui, la consultation indivi- duelle des travailleurs pourrait suffire.

Trois autres directives suscitent une irritation parti- culière de la part du patronat et de certains gouver- nements:

1. La directive concernant les chantiers mobiles ou temporaires. Les critiques adressées à cette directive permettent de comprendre que l'attaque contre la législation communautaire est centrée contre l'obligation de se donner les moyens de gérer de façon efficace la prévention des risques.

Cette directive ne comprend qu'un très petit nom- bre d'obligations substantielles. Elle vise à mettre en piace une gestion intégrée des chantiers qui, dès le stade du projet, intègre des exigences de santé et de sécurité et organi se la coopération entre les dif - férentes entreprises qui interviendront sur un mèrne chantier. De I' avis de la Commission, cette direc- tive a produit des résultats positifs qui sont attestés par les rapports nationaux sur son application. Le gouvernement bavarois réclame l'abrogation pure et simple de cette directive. D'autres remettent en cause l'obligation d'établir par écrit un plan de santé et sécurité ;

2. La directive concernant la protection des tra- vailleurs exposés à des agents cancérogènes. La position défendue par la confédération patronale danoise est qu'il faudrait renoncer à une approche fondée sur les dangers intrinsèques des substances pour passer à une approche fondée sur le niveau concret de risque dans une utilisation déterminée (DI, 2007). Cette conception aboutirait à un mor- cellement des situations. Chaque entreprise pourrait décider si elle utilise ou non des cancérogènes en fonction de sa propre estimation d'un niveau de ris-

que acceptable. L'histoire de l'amiante a démontré à suffisance comment une telle politique d'usage autocontrölé débouchait sur des désastres ;

3.

La

directive concernant le travail sur écran. lei, la revendication de réduire la charge administrative sert à demander une révision de la directive dans les quelques obligations substantielles qu'elle formule dans ses annexes. li serait plus logique d'attendre une directive globale sur les troubles musculosque- lettiques avant de se lancer dans une révision par- tielle d'un des rares instruments législatifs existant dans ce domaine.

On peut ainsi observer que le débat sur la "meilleure réglementation" a été fortement instrumentalisé pour déborder les limites d'une discussion sur les charges administratives et pour remettre en cause de nom- breux autres aspects de la santé au travail. Cette ten- dance apparait de façon encore plus évidente dans les propositions soutenues par le groupe Stoiber sur le temps de travail et REACH (voir article page

1 O).

li est vraisemblable qu'une partie de ces proposi- tions devront

ètre

abandonnées. Certaines apparais- sent comme tellement grossières et approximatives qu'elles sont dénuées de toute crédibilité. D'autres, au contraire, risquent d'exercer une influence désta- bilisatrice sur la politique communautaire de santé au travail.

La dimension des entreprises comme critère décisif

Les "meilleurs régulateurs" préconisent de façon sys- tématique de moduler les obligations des entreprises en fonction de leur taille. C'est une approche qu'ils entendent appliquer quel que soit le domaine traité : la fiscalité, l'environnement, la santé au travail, etc.

Une modulation suivant la taille des entreprises peut avoir un sens lorsqu'on définit les modalités prati- ques d'un dispositif.11 est évident que la surveillance de la santé dans une entreprise de 1 O travailleurs ne passe pas par le recrutement d'un médecin du travail dans cette entreprise. Par contre, une telle modulation n'a aucun sens si l'on définit les princi- pes de base d'une gestion systématique de la santé et de la sécurité. Les obligations d'information telles que l'évaluation des risques, l'information aux tra- vailleurs ou aux autorités publiques, I' étiquetage de substances toxiques ou l'information sur les machi- nes dangereuses ne doivent pas dépendre de la taille des entreprises. Les risques du travail sont beaucoup plus liés au processus de production et à la manière dont il est géré qu'à la taille de l'entreprise. La taille est souvent corrélée avec une moindre qualité dans la gestion mais ce lien n'a rien d'automatique. Si l'on devait moduler les obligations essentielles de gestion en fonction de la dimension des entreprises, on favoriserait la pratique de sous-traiter les activités les plus dangereuses en exploitant les failles de la réglementation.

6

(7)

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Better Regulation

L'autorégulation : business as usual

Une des croyances les moins fondées de la campa- gne "meilleure réglementation" concerne les vertus de l'autorégulation. L'expérience historique accu- mulée depuis le début de la révolution industrielle n'est qu'une interminable succession d'échecs et de désastres chaque fois que les autorités publiques ont laissé des questions de santé et de sécurité à la discrétion des entreprises. Du phosphore blanc dans la fabrication des allumettes au x1xe siècle à

l'amiante, du travail des enfants dans les mines à la sous-traitance des risques au moindre coèt, l'auto- régulation n'a jamais fourni de résultats probants.

Seule l'articulation entre des mobilisations sociales et des règles publitjues contrölées de manière effi- cace permet d'impulser la prévention.

la distinction entre les "coOts administratifs" et les

"charges administratives" dans les documents sur la "meilleure réglementation" donne une idée pré- cise de ce qui se passerait en cas d'affaiblissement des obligations d'information dans les législations sur la santé et la sécurité. Dans l'évaluation britan- nique, on demande aux employeurs interrogés ce qu'ils feraient si la législation ne leur demandait plus de recueillir, traiter et conserver des informations concernant la santé et la sécurité. Seuls 17

%

d'en- tre eux continueraient à préparer ces données dans une large mesure. 31

%

continueraient à le faire seulement dans une certaine mesure et 52

%

renon- ceraient complètement à cette activité6. Autrement dit, plus de la moitié des employeurs interrogés sont prèts à abandonner toute possibilité de gestion sys- tématique de la santé et sécurité dans leur entreprise si l'on passait d'un régime de contrainte législative à un système d'autorégulation.

les données d'autres pays vont dans le mème sens.

En Slovénie, l'ensemble des activités d'information liées à la santé et à la sécurité serait réduit des deux tiers si la législation le permettait. Sur une évalua- tion totale d' activités estimées pour un montant de 393 millions d'euros, les employeurs abandonne- raient volontiers 67

%

d'entre elles (évaluées à 265 millions d'eurosì/. Dans une évaluation récente concernant les principales obligations d'infor- mation en santé et en sécurité dans l'Union euro- péenne, les activités qui seraient abandonnées par les employeurs en l'absence de contrainte législative dépassent 80

% !

L'ignorance des vrais problèmes

Défendre la législation existante n'implique pas qu'on se voile la face devant les problèmes réels.

la législation est souvent mal appliquée. Des straté- gies cohérentes de prévention ne sont pas mises en piace. le plus choquant dans l'immense gaspillage de ressources que constitue la campagne pour une meilleure réglementation, c'est précisément que les problèmes réels ne sont jamais analysés. Une Du point de vue des droits fondamentaux, il est

inacceptable que des travailleurs ne bénéficient pas d'un rnème niveau de prévention pour leur vie ou leur santé en fonction de la taille des entreprises.

La croisade contre le "goldplating"

Un argument récurrent porte sur la transposition effectuée par les Etats membres. Régulièrement, la DG Entreprises dénonce le "goldplating". Ce terme désigne des situations où les Etats membres ont trans- posé des directives en allant au-delà du contenu des règles communautaires.

Cet argument est irrecevable en santé au travail.

En effet, les directives sont adoptées en vue d'une harmonisation minimale. Cela implique deux choses:

1. Elles ne fixent qu'un seuil de base au-delà duquel il est justifié et légitime que les Etats puissent · assurer une protection plus étendue de la santé et de la sécurité des travailleurs ;

2. Elles n'opèrent jamais une harmonisation totale entre les situations nationales. Très souvent, les directives se réfèrent aux législations et aux pratiques nationales. De très nombreux méca- nismes sont, dans une large mesure, détermi- nés par des règles nationales. leis sont les cas de la représentation des travailleurs en santé et sécurité et de l'organisation des services de prévention pour lesquels l'essentiel des règles restent définies au niveau national. En ce sens, les directives sont volontairement insuffisantes et incomplètes et elles ne pourraient pas fonc- tionner sans "goldplating". De mèrne, les direc- tives ne contiennent aucune indication précise en ce qui concerne l'inspection du travail. Seul le "goldpalting" permet d'assurer une stratégie cohérente en la matière.

Ces deux caractéristiques ont été évidemment pri- ses en compte dans le processus d' adoption des directives. Des Etats ou le Parlement européen ont pu renoncer à certaines exigences et accep- ter un compromis d'un niveau moyen parce qu'ils considéraient qu'au niveau national des normes supérieures et plus cohérentes pourraient suppléer les défauts de la législation communautaire. Pour ne citer que quelques exemples, la valeur limite obligatoire fixée au niveau communautaire pour le plomb (qui remonte à 1983) ne permet pas une protection efficace de la santé des travailleurs concernés. les inconvénients de cette situation sont tempérés par le fait que, dans la plupart des Etats membres, les législations sont plus avancées.

De rnème, limiter aux fonctions visuelles la sur- veillance de la santé des travailleurs effectuant du travail sur écran est absurde. On sait que les problèmes posés par les troubles musculosquelet- tiques sont plus préoccupants encore. Dans plu- sieurs Etats membres, gräce au "goldplating", cette limitation absurde a été évitée.

6 Health and safety Executive, Adminis- trative Burdens of Regulation, 2006.

7 Exposé présenté par S. Patekar du ministère de I' Administration publi- que lors d'une conférence à Brdo pri Kranju, le 7 novembre 2008.

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de la charge administrative. Aucune analyse spécifi- que n'est proposée en ce qui concerne les difficul- tés d'application des règles.

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n'y a qu'à" dresser une liste des doléances patronales et accorder une remise générale de 25 % quel que soit le domaine considéré ou l'objectif poursuivi par la législation.

Une analyse plus sérieuse montre qu'il serait possi- ble de rendre la législation beaucoup plus efficace et d'éviter des gaspillages si l'on s'orientait vers d'autres solutions que la réduction de la produc- tion d'informations pertinentes. Je me limiterai ici à signaler quelques éléments.

La socialisation des connaissances et des expérien- ces est un aspect vital à travers lequel les autorités publiques peuvent aider les entreprises à mettre en ceuvre des politiques de prévention plus efficaces.

Une des plus fructueuses initiatives développées en Europe est certainement celle des Fonds pour le milieu du travail menée dans les pays scandinaves pendant une vingtaine d'années après les réfor- mes des années 70. Quelle que soit la catégorie de risque, l'existence de systèmes d'information et d'échange d'expériences sur les problèmes rencon- trés et les solutions possibles aide énormément les entreprises (et tout particulièrement les PME) à met- tre en piace une politique de prévention.

Différentes enquètes nationales indiquent que les meilleures pratiques de prévention se retrouvent géné- ralement dans des entreprises qui collaborent dans des réseaux, qui s'échangent des informations et se tiennent au courant des développements techniques.

Dans ce domai ne, les stratégies nationales de préven- tion peuvent jouer un röle essentiel et il serait utile que la politique communautaire intègre celte dimen- sion de façon plus active. Dans un secteur comme le bätirnent, qui connaìt un grand émietternent en de multiples petites entreprises dont la durée de vie peut etre courte, l'existence de bases de données sur la

substitution des substances chimiques dangereuses a donné des résultats très positifs. La socialisation part d'une approche totalement différente de la campagne

"meilleure réglementation". Celte dernière repose sur un idéal type de l'entreprise qu'on pourrait décrire comme les pionniers de la Conquète de l'Ouest, des cow-boys solitaires, soucieux de ne pas ètre entravés par des règles publiques et qui entendent ne rendre compie à personne de leur activité. Toute communi- cation verbale, écrite ou autre est un facteur d'irrita- tion insupportable. Devoir rendre des comptes aux autorités publiques, aux travailleurs, aux autres entre- prises constituerait un fardeau.

L'histoire économique n'apporte guère d'arguments en faveur de celte conception. Loin de constituer une entrave à l'activité directement productive, les täches qui relèvent de la gestion constituent un facteur de développement. Les marchés ne fonc- tionnent que sur la double base d'une production et d'un échange systématiques d'informations et de mécanismes de régulation. li y a une énorme déma- gogie à épouser tels quels les ressentiments et la har- gne d'une partie du monde patrona! à l'égard de la régulation publique, alors que les mèrnes patrons n'arrètent pas de demander encore et plus de règles et d'intervention publiques lorsqu'ils y trouvent un bénéfice immédiat.

Un deuxième élément d'efficacité est constitué par le développement de la participation organisée des travailleurs pour la santé et la sécurité. Diffé- rentes enquètes européennes indiquent que là où il existe une représentation des travailleurs défendant de façon autonome la santé et la sécurité et dotée de moyens d'intervention suffisants, les pratiques de prévention sont beaucoup plus systématiques, concrètes et permeltent de mieux aborder les problè- mes à long terme. Celte perspective s'inserii aussi en opposition complète avec la campagne "meilleure réglementation" suivant laquelle le fonctionnement d'une représentation des travailleurs n'est jamais qu'un coüt additionnel.

Plus catholique que le pape

Dans son programme législatif et de travail pour 2009, la Commission européenne, dont le man- dat devrait prendre fin vers le milieu de l'année, s'adresse à la Commission suivante: "Au début de son mandat en 2004, la Commission a examiné de près la conformité des propositions pendantes avec les objectifs stratégiques et les normes visant à mieux légiférer et a ensuite établi une liste importante de retraits. La Commission actuelle à l'intention de proposer à la prochaine Commis- sion d'entreprendre un exercice similaire. Le pro- gramme législatif et de travail de la Commission inclut des propositions pendantes supplémentai- res que la Commission entend retirer."

Celte exhortation est stupéfiante. Après avoir sévi pendant cinq ans avec une approche dérégulation- niste marquée, la Commission actuelle demande à ses successeurs de se montrer encore plus catho- lique que le pape. Elle recommande le retrait de propositions en souffrance. Quand on sait com- bien la Commissiona été parcimonieuse en initia- tives législatives pour traiter les problèmes les plus importants de la population en matière de santé au travail, d'environnement ou de droits sociaux, on se demande ce qui pourrait encore etre retiré !

Source : Communication du 5 novembre 2008, Document COM(2008) 712 final

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Better Regulation

Le troisième élément est canstitué par une inspection du travail efficace, campétente et crédible. Dans ce domai ne aussi, la campagne "meilleure réglementa- tion" cansidère que l'inspection du travail canstitue un coùt administratif pour !es entreprises. L'analyse de la directive-cadre de 1989 canfiée à un cansor- tium de sociétés privées de cansultants en manage- ment tente de chiffrer ce coùt camme si les systèmes d'inspection du travail avaient été mis en piace par la législation cammunautaire. Au stade actuel, on ignare quelles pourraient ètre les recammandations que la Commission formulera pour permettre aux entreprises de réduire ce coüt.

Bien des entreprises ont externalisé une partie importante des activités de prévention. C'est notam- ment le cas pour l'évaluation des risques dans un grand nombre de pays. li s'est développé un mar- ché peu régulé de cansultants en tous genres où le meilleur cötoie le pire. Souvent, !es évaluations réa- lisées par des cansultants externes sont cansidérées camme de simples formalités bureaucratiques. Elles ne débouchent pas sur des plans systématiques de prévention et font rarement appel à l'expérience des travailleurs et à la cansultation de leurs représen- tants. Cette situation est probablement à l'origine d'importants gaspillages. Elle a été mise en lumière par un rapport parlementaire britannique (Work and Pension Committee, 2008). Face à ce problème réel, le gouvernement britannique et !es "meilleurs régulateurs" restent passifs. La raison est purement idéologique. Pour réduire !es gaspillages et amélio- rer la qualité des services externes de prévention, il faudrait définir un cadre réglementaire plus précis et

étendre !es droits des représentants des travailleurs à cantròler l'activité de ces services externes. Une teile solution pratique est rejetée avec horreur par ceux qui ne croient qu'aux vertus de l'autorégula- tion par les forces du marché.

Les prochaines étapes

La transparence n'est pas le point fort de la campa- gne "Meilleure réglementation". Au stade actuel, il est impossible de savoir quelles propositions cancrè- tes seront formulées dans le domaine de la santé et de la sécurité. La ligne dérégulationniste de la DG Entreprises se heurte à des oppositions à l'intérieur mème de la Commission. Différents Etats membres sont de plus en plus agacés par les accusations de

"surréglementer" alors mème qu'ils ont à mettre en ceuvre des directives minimales qui doivent ètre camplétées au plan national. Les seules propositions cancrètes formulées jusqu'à présent par le groupe Stoiber manquent de crédibilité (voir article, p. 10).

En général, elles se limitent à répéter une recette magique : il faudrait multiplier !es exemptions en faveur des PME.

Le Conseil européen qui se tiendra au printemps 2009 sous la présidence tchèque sera cansacré à la campagne "meilleure réglementation". C'est alors que I' on cannaìtra probablement !es orientations adoptées cancernant la santé et la sécurité. li imporle donc de rester vigilants. La pression du monde patrona! et d'un certain nombre de gouvernements pourrait amener à une régression de la réglementa- tion cammunautaire en santé au travail. •

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1 Pour en savoir plus sur cette consul- tation : http://ec.europa.eu/enterprise/

admin-burdens-reduction/form_en.htm

D epuis quelques années, la Commission euro- péenne multiplie les instances bureaucrati- ques destinées à "combattre la bureaucratie" ou plus exactement à combattre ce qui, dans les poli- tiques publiques, constitue des facteurs d'irritation pour le patronat. Une des dernières créations, en aoùt

2007, est un "Groupe de haut niveau", censé

représenter des parties prenantes indépendantes. li est composé pour l'essentiel de représentants des milieux d'affaires. Sur les quinze membres, un seul représente le monde du travail. La présidence de ce groupe a été confiée à Edmund Stoiber, un ancien ministre-président de la Bavière. Edmund Stoiber est un politicien de la droite chrétienne pas parti- culièrement enthousiaste de la construction euro- péenne. Une de ses campagnes les plus fameuses en ce qui concerne l'Europe s'est déroulée au début des années 2000. Elle remettait en cause l'adhésion de la République tchèque en raison du contentieux historique sur les Allemands des Sudètes expulsés en 1945.

Le mandat du groupe Stoiber est de trois ans mais il semble bien que certains de ses membres désirent le transformer en une sorte d' organe permanent.

Le groupe a été composé de manière à assurer une majorité automatique aux positions dérégulationnis- tes les plus radicales.

Le groupe Stoiber est associé à une initiative de la DG Entreprises qui propose une consultation en ligne destinée à recueillir des propositions patro- nales de révision de la réglementation commu- nautaire

1.

Un examen de ces propositions donne un aperçu de l'hostilité du monde patrona! à l'har- monisation des conditions de vie et de travail au sein de l'Union européenne. Le principe mème de la consultation est biaisé. Elle n'offre aucune possi- bilité de défendre des réglementations existantes ou d'argumenter en faveur de leur renforcement. Tout ce qu'on demande, ce sont des propositions desti- nées à réduire le "fardeau des entreprises".

En janvier

2009, le groupe Stoiber a adopté un avis

sur certaines de ces propositions. C'était la pre- mière fois qu'il se prononçait sur la santé au travail.

Un examen de cet avis est révélateur de la ten- dance ultralibérale et dérégulationniste qui inspire la grande majorité des membres du groupe.

Le groupe exprime son soutien aux propositions de la Commission visant à réviser la directive sur le temps de travail dans le sens de la régression sociale. li considère en mème temps que ces pro- positions sont insuffisantes. Elles ne doivent etre considérées que comme un début et il faudrait les compléter par d'autres initiatives visant à déréguler

davantage le temps de travail. Cette prise de posi- tion apparait comme une véritable provocation un mois à peine après que le Parlement européen a rejeté une partie importante des propositions de la Commission et a proposé une révision de la directive sur le temps de travail plus compatible avec la santé et la sécurité des travailleurs. On peut ainsi constater que le groupe adopte des positions qui vont largement au-delà de son mandat limité à la charge administrative et cherche à exercer des pressions sur le législateur communautaire.

Le rnèrne constat s'applique à REACH, le nouveau règlement européen sur les substances chimiques.

l'approche générale de REACH est basée sur une modulation des obligations en fonction de deux critères : le volume de production annuel des subs- tances chimiques par producteur ou importateur et le niveau de danger associé à certaines subs- tances (par exemple, celles qui sont cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction). Les dispositions adoptées ont fait l'objet de six ans de discussions intenses et représentent un équilibre politique délicat entre le Parlement, le Conseil et la Commission. Pour le groupe Stoiber, REACH devrait ètre revu afin d'y introduire un critère lié à la taille des entreprises. Une teile proposition remet en cause l'orientation fondamentale de la régle- mentation. En effet, le fait qu'une substance soit produite ou importée par une petite ou moyenne entreprise ne modifie rien aux éventuels dangers de cette substance. Rien n'empèche une PME de produire une substance cancérogène ! De rnème, rien ne lie de façon mécanique le volume de pro- duction ou d'importation à la taille de l'entreprise.

Un importateur de volumes élevés de substances peut parfaitement ètre une PME. Moduler les obli- gations de REACH en fonction de la taille de l'en- treprise affaiblirait inévitablement les niveaux de protection de la santé des travailleurs, du public et la défense de l'environnement.

Dans le domai ne du transport routier, le groupe Stoi- ber veut limiter l'utilisation de tachygraphes digitaux qui permettent de contröler les temps de conduite et de repos des transporteurs routiers de façon beaucoup plus efficace que les anciens tachygra- phes analogiques. lei encore, le groupe demande des adaptations ou des exemptions qui tiendraient compte de la dimension des entreprises.

li est pourtant clair que, tant du point de vue de

la santé et sécurité des chauffeurs routiers que du

point de vue de la sécurité routière en général, les

risques liés à des temps de conduite trop longs

n'ont aucun rapport avec la taille de l'entreprise

de transport. •

(11)

Better Regulation

Petit lexique BetReg-Français

T

oute bureaucratie tend à sécréter son propre lan- gage. Entre initiés, on se comprend plus vite et un jargon spécialisé est une marque de distinction qui tieni à l'écart le commun des mortels. La montée en force d'une branche spéciale de l'administration chargée de contröler la conduite des autres bran- ches ne pouvait pas échapper à ce phénomène. li existe désormais dans l'Union européenne comme aux Etats-Unis, un jargon BetReg (pour Better Regu- lation) dont nous ne reprenons ici que quelques éléments. Ce jargon est souvent formulé en anglais et présente quelques difficultés de traduction. Cela dit, méme en anglais, la terminologie BetReg tend à se distinguer de la langue commune. li y a fort à parier que dans les années qui viennent le lexique BetReg connaìtra de nouveaux développements qui feront la passion des linguistes et le supplice des lecteurs ordinaires de la prose de la Commission européenne.

Better Regulation (Meilleure réglementation) : Mar- garet Thatcher avait créé une Deregulation Taskforce transformée rapidement en un organe permanent sous la forme d'une Deregulation Unit (Unité de dérégulation). Avec l'arrivée au gouvernement du New Labour, le gouvernement a maintenu l'idée de soumeltre toute nouvelle réglementation à un organe séparé des administrations en charge du dos- sier et représentant fondamentalement le point de vue

patrona!

La terminologie fut adaptée et la Dere- gulation Unii est devenue Belter Regulation Unii en 1997. C'était une sorte de "troisième voie" lexicale.

L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a activement promu celte invention qui a fini par dominer le vocabulaire de la Commission européerine. li reste cependant en concurrence avec d'autres vocables comme "regu- latory reform" (réforme réglementaire), "simplifica- tion". Plus sobrement, la Fondati on Bertelsmann, partenaire de choix des BetRegs, opte pour l'ex- pression "Réglementation moderne". Les principaux acteurs de la dérégulation évitent généralement l'usage de ce mot considéré comme trop cru.

Charge administrative : on peut observer que le mot anglais est plus dénigrant. On parie de "burden", c'est- à-dire de fardeau, un mot repris notamment de la

litté-

rature colonialiste où, bien entendu, il n'y avait d'autre fardeau que celui que portai! l'homme blanc. La Com- mission déclare qu'elle fait mesurer les coüts adminis- tratifs et qu'elle entend réduire de 25 % les charges administratives. Toute la question est donc d'établir la différence entre ces deux notions. On aurait pu penser que la notion connotée très négativement de "charge administrative" faisait allusion à des coùts inutiles ou poursu ivant des objectifs futiles ; pas du tout. Le per- sonnage de Lewis Carroll, Humpty-Dumpty disait :

"C'est moi le maìtre, et les mots veulent donc dire ce que je leur dis de signifier - d'ailleurs, je les paye pour

cela." La Commission considère le patrona! comme le Humpty-Dumpty qui décide à son bon vouloir du sens des mots "coùts" et "charges". Celte opération est expliquée dans les termes suivants : "li est impor- tant d'établir une distinction entre les informations qui seraient collectées par les entreprises, méme en l'absence d'une législation, et les informations qui ne seraient pas collectées si les dispositions législatives ne l'exigeaient pas. Les premières sont qualifiées de coùts administratifs, les secondes de charges adminis- tratives" (Commission, 2006, p. 4). En d'autres mots, une information vitale pour la société, les travailleurs ou les autorités publiques peut ètre néanmoins qua- lifiée de charge si les employeurs considèrent que la production et la comrnunication de celte information représentent une contrainte pour eux. Au contraire, s'ils continuent à la donner mème en l'absence de toute législation, cela reste un simple coùt, Une teile proposition est politiquement choquante; elle est éga- lement absurde sur le simple plan de la logique. Elle suppose que les employeurs considèrent les obliga- tions d'information de manière uniforme, ce qui est évidemment très éloigné de la réalité.

Coüts administratifs (1) : d'après la Commission,

"les coùts administratifs sont les coùts supportés par les entreprises, le secteur associatif, les pouvoirs pubi ics et les citoyens pour satisfaire aux obligations légales de fournir des informations sur leurs activités (ou production) aux pouvoirs publics ou au secteur privé" (Commission, 2006, p. 4). Dans une défini- tion aussi large, l'obligation d'indiquer la date de péremption d'une denrée alimentaire, la signalisa- tion d'un danger sur un chantier, le fait de lenir un registre des travailleurs exposés à l'amiante sont des coüts administratifs.

Coüts administratifs (2) : ceux dont on ne parie jamais. Pour la machine BetReg, la bureaucratie dispendieuse, c' est les autres et notamment tous les services qui ont des compétences spécifiques en matière de santé, d'environnement, de droit du travail, etc. Par contre, les coùts élevés de l'activité dérégulationniste avec ses montagnes de papier d'évaluations sans grande fiabilité, les innombra- bles contrats de sous-traitance avec des consultants externes ne sont pas pris en compie. Dans l'Union européenne, on observe une croissance exponen- tielle de ces coùts depuis quelques années.

Fast track (Voie rapide) : une des obsessions de la machine BetReg est d'éviter un contröle parlemen- taire, présenté comme forcément excessif. Cela donne un paradoxe intéressant. Toute proposition qui n'émane pas des fonctionnaires BetReg est ralentie par un grand nombre d'étapes préalables : étude d'impact, évaluation coùts-bénéfices, etc. li se produit une véritable ossification du processus réglementaire. Les organes désignés par l'exécutif

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exercent une sorte de censure sur ceux qui émanent du suffrage universel. Les partisans de la machine- rie BetReg estiment que toute proposition en vue d1abroger, de simplifier ou d'amender des législa- tions existantes devrait au contrai re bénéficier d'une procédure rapide qui réduit fortement la possibilité d'un contròle parlementaire.

Gold plating : on pourrait traduire ce terme par

"plaqué

or". Dans certa ins documents de la Com- mission, la métaphore passe du monde des orfèvres

à

celui des salles de venie. La traduction française devient un peu terne : "surenchère réglementaire".

C'est un des termes favoris du commissaire euro- péen à !'Industrie, Günter Verheugen. Une recher- che sur Google associant !es termes "gold plating"

et "verheugen" ne donne pas moins de 1640 occur- rences (recherche effectuée le 11 décembre 2008).

Dans de nombreux domaines, la législation com- munautaire ne met en piace qu'une harmonisation minimale. Les Etats membres peuvent maintenir ou adopter des règles qui assurent une meilleure pro- tection de la santé au travail, de l'environnement ou des droits sociaux. Les BetRegs considèrent que c'est une erre ur et que les Etats devraient éviter d' aller au- delà du contenu des directives. Juridiquement, cette vision s'oppose au Traité par lequel les Etats ont tenu à conserver des compétences propres. Exem- ple pratique : la directive concernant les travailleu- ses enceintes n'accorde aucun congé de maternité aux travailleuses domestiques. L'ensemble des Etats membres a été au-delà de ce minimum communau- taire. C'est gräce au "goldplating" tant décrié que

!es femmes de ménage ne sont pas contraintes de reprendre le travail dès le lendemain de leur accou- chement. Les documents officiels de la Commission utilisent aussi parfois le terme "surréglementation".

Mesure des coüts standard : pendant longtemps les BetRegs ont préconisé l'analyse coùts-béné- fices comme la technique la plus importante des- tinée à évaluer la réglementation. La Commission européenne, inspirée par l'expérience des Pays-Bas, préconise aujourd'hui une nouvelle méthodologie appelée la Mesure des coùts standard (MCS). Pour la MCS, !es bénéfices n'ont pas à ètre pris en compie, seuls les coùts doivent ètre mesurés.

De façon très pudique, cette méthode est qualifiée de "pragmatique". Une méthode de calcul peut ètre correcte ou erronée, elle peut impliquer une certaine marge d'erreur également. La MCS est dite pragma- tique en ce qu'elle fournit des résultats totalement incontròlables. En effet, elle se base sur un nombre élevé d'hypothèses qui impliquent une teile marge d'erreur possible que le chiffre obtenu est tout sim- plement dépourvu de signification. La MCS consiste généralement à passer un coup de fil à un nombre réduit de patrons et à généraliser une estimation des dépenses sans procéder ensuite à un contròle en termes réels. Le passage du MCS néerlandais à un MCS communautaire a rendu !es données moins

fiables que jamais. La Commission estime qu'il n'est mème pas nécessaire d'enquèter dans l'ensemble des Etats membres. li "suffirait" d'un certain nombre d'Etats pour pouvoir extrapoler ensuite !es données au niveau de l'UE.

Dans les documents préparés par la Commission ou ses consultants, on constate des variations inexpli- cables des mesures de coùts d'une version à l'autre d'un mème document. On a l'impression que der- rière des chiffres précis, ce qui compte c'est d'étout- fer le sens critique des lecteurs par l'accumulation de millions et de milliards d'euros. (Voir aussi : Sto- rytelling.)

Obligation d'information : la notion d'obligation d'information apparait comme un synonyme de coùts administratifs dans de nombreux textes. En fait, les coùts désigneraient un montant global tan- dis que !es obligations d'information permettraient d'établir une liste détaillée. La tendance des BetRegs est d'étendre considérablement la définition d'obli- gation d'information quand il s'agit des entreprises.

Ainsi, dans certains documents, la visite d'un ins- pecteur du travail constituerait une obligation d'in- formation à charge des entreprises.

Red tape : celte expression est intraduisible en fran- çais. Le ruban rouge désigne ici la paperasserie administrative. L'expression désigne généralement

!es documents prescrits par une autorité publique.

Par exemple, dans la plupart des pays communau- taires, il est interdit de faire des travaux de désa- miantage si une entreprise n'est pas inserite dans un registre qui permet à l'inspection du travail de véri- fier si elle dispose des compétences nécessaires. En qualifiant ces mesures de paperasserie, on attribue une connotation négative à des outils qui permet- tent aux autorités publiques età d'autres parties de savoir ce qui se passe dans !es entreprises.

Risques : ce mot est étrangement absent des tex- tes communautaires sur la BetReg. Et pourtant c'est l'enjeu centrai des débats. Au Royaume-Uni, il est omniprésent depuis une dizaine d'années. Comme le commente une analyste britannique : "Un enga- gement initial pour une 'meilleure régulation' a été progressivement remplacé par un soutien explicite à la dérégulation. Une réduction de la portée des réglementations avait aussi été promue par les gou- vernements Thatcher et Major. L'état-major du New Labour partage le souci des précédentes adminis- trations (conservatrices) d'associer !es entreprises aux prises de décisions en matière de dérégulation.

Cependant, ( ... ) il existe une différence significative dans l'approche dérégulationniste du New Labour:

une nouvelle acceptation du risque. La dérégulation est désormais décrite comme un correctif apporté aux réactions exagérées des législateurs par rapport aux risques perçus qui, clament-ils, constituent des entraves aux progrès économiques et technologi- ques" (Dodds, 2006).

Références

Documents relatifs

Les principaux résultats de cette thèse sont que : (i) les préventeurs en entreprise ne consacrent que très peu de temps aux visites de sécurité, (ii) ce phénomène

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Les initiales sont

Le vieil homme, la vieille femme, la grande vache brune, les deux cochons ventrus et les trois chats noirs tirèrent sur le navet.. Alors l’un des chats agita la queue et s’en alla

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