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Rapport 21-01. Le bon usage des médicaments – Académie nationale de médecine

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RAPPORT ET RECOMMANDATIONS DE L’ANM

Rapport 21-01. Le bon usage des médicaments 夽,夽夽,夽夽夽

Good use of medications

M. Huguier , J.P. Tillement

, J.L. Montastruc , J.P. Olié ,

P. Lechat , G. Bouvenot , G. Milhaud , au nom des commissions VIII (financement des dépenses de santé, assurance maladie), II (thérapeutique, pharmacologie, toxicologie, médicaments et autres produits de santé) et XV (enseignement, recherche, parcours de formation)

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Académienationaledemédecine,16,rueBonaparte,75006Paris,France

Rec¸ule17novembre2020 ;acceptéle26janvier2021 DisponiblesurInternetle11février2021

MOTSCLÉS Coûtsdessoins; Enseignement médical; Certification médicale; Guidedebonnes pratiques; Gestiondela sécurité; Surveillancedela santépublique;

Résumé Les prescriptionsmédicamenteusesinadaptées voiredangereuses,entraînent une pertedechancepourlespatientsainsiquedessurcoûtsdirectsetindirectspourlasociété.De cefait,lesujetaunedimensionéthique.Cetravailreposesurdesrapportsantérieurs,l’un parlementaire,lesautresadministratifsainsiquedel’Académienationaledemédecine.Les principauxobjectifsdelaformationdesétudiantsdanscedomainesontd’apprendreàprescrire juste,àsurmonterlesdifficultésréellesdesprescriptionsencasdepolypathologiesdeplusen plusfréquentes,notammentchezlesmaladesâgés.Letempsconsacréauxenseignementsde lapharmacologie,delathérapeutiquepeutêtreglobalementconsidérécommesatisfaisant.En revanchecesenseignementsetsurtoutleurmémorisationnesontpassuffisammentcontrôlés enfin dedeuxièmecycledesétudesmédicales.Deplus,certainslogicielsd’aide àla pres- criptionmanquentdeclarté,deconcisionetdeprécisioncequilesrendpeuutilisables.Dans lebonusagedesmédicamentsonnesauraitoublierlerôledespharmaciensd’officine,des associationsdepatientsetdela formationcontinue.Cerapportestvolontairementlimitéà troispropositionsquidécoulentdesconstatationsprécédentes:(1)Danslesétudesmédicales,

Rapportprésentéle19janvier2021.

夽夽 Unrapportexprimeuneprisedepositionofficielledel’Académienationaledemédecine.

夽夽夽 L’Académiedanssaséancedumardi19janvier2021,aadoptéletextedecerapportpar136voixpour,3voixcontreet21abstentions.

Auteurcorrespondant.

Adressee-mail:jpmnewtil@orange.fr(J.P.Tillement).

1 CommissionII:GBouvenot,JSassard,JPTillement,JLMontastruc.

2 CommissionXV:F.Richard.

https://doi.org/10.1016/j.banm.2021.02.006

0001-4079/©2021l’Acad´emienationaledeedecine.Publi´eparElsevierMassonSAS.Tousdroitseserv´es.

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Formationmédicale continue;

Recertification

instituerunexamenspécifiqueetautonome,intégréauxépreuvesdel’examenclassantnational (ou de sonéquivalent), portantsur la pharmacologie etla thérapeutique ;(2) Assurerune actualisationdesconnaissancesdanscesdomainesparlaformationprofessionnellecontinue; (3)Etablirunseullogicielclair,concisetprécisd’aideàlaprescription,élaboréparlesConseils nationauxprofessionnelsetquisoitlabélisé.

©2021l’Acad´emienationaledem´edecine.Publi´eparElsevierMassonSAS.Tousdroitsr´eserv´es.

KEYWORDS Healthcare expenditures;

Medicaleducation;

Specialityboards;

Practiceguidelines;

Safetymanagement;

Publichealth surveillance;

Continuingmedical education;

Recertification

Summary Improperordangerousmedicalprescriptionscanleadtomissedopportunitiesfor patientsaswellasdirectorindirectadditionalcostsforsocietyasawhole.Therefore,there isanethicaldimensiontothistopic.Thisworkisbasedonpreviousreports,fromparliament orvariousadministrationsaswellastheNationalAcademyofmedicine.Themainobjectives ofstudents’traininginthisareaaretoteachthemhowtoaccuratelyprescribe,howtomaster thedifficulties ofprescribingmedicationswhendealingwithmultiplepathologieswhichare increasinglyfrequentespeciallyamongolderpatients.Timespentlearningfrompharmacology andtherapeuticcanbeconsideredsatisfactory.However,theseteachingsandabovealltheir memorisationarenotadequatelycheckedattheendofthegraduateyearofmedicalstudies.

Moreover, somesoftwaresusedtohelpprescribingarenotclearenough,notconciseenough andnotpreciseenoughwhichmakesthemnotreallyusable.Fortheproperuseofmedications, you shouldn’toverlooktheimportanceofpharmacists,patientsassociationsandcontinuous training.Thisreportislimitedonpurposetothreeproposalsdeducedfromtheaboveobserva- tions:(1)toimplementaspecificandautonomouspharmacologyandtherapeuticexamduring medicalstudiesaspartofthenationalmedicalexams;(2)ensureanactualisationofexpertise intheseareasthroughcontinuous professionaleducation;(3)implementasingleclearsoft- ware,conciseandspecifictothepurposeofprescriptionsupport,elaboratedbythenational professionaladvisoryboardsandthatcanbelabelised.

©2021l’Acad´emienationaledem´edecine.PublishedbyElsevierMassonSAS.Allrightsreserved.

Introduction

Onrépètecequiestditetcequiestditavaitdéjàétédit.

Commencer un rapport en citant un texte qui date d’environquatremille ansetdont l’auteur,Khâ-Khererrâ- Seneb,vivaitauMoyenempireenl’Égyptepharaonique,a pour but d’attirer l’attention surla discordance entreun consensusglobaletlaquasi-absencedeconcrétisationdéci- sionnelle.Aujourd’hui,ilesttempsd’agir.

Ilyaplusde25ans,l’AcadémienationaledeMédecine adoptaità l’unanimité unvœu concis sur laformation en thérapeutiquemédicamenteusedesétudiantsenmédecine [1]. Quinze ans plus tard, un rapport sur le même sujet constatait«Ilestclairquenosrecommandationssuccessives n’ontpasétéentenduesetqu’ilimportedelesrenouveler» [2].

Commentignorerquelesprescriptionsmédicamenteuses inadaptées, voire dangereuses, entraînent une perte de chance pour lespatients ainsique des surcoûtsdirects et indirectspourlasociétécommecelaaétéévaluéenIrlande du nord ou au Canada [3,4]. En France, un rapport de 2013l’estimaitàplusde10milliardsparan[5]3.Cefutlarai- sonpourlaquellelacommission«Financementdesdépenses desanté»del’Académienationaledemédecines’estoccu-

3Cetteestimationestprobablementsurestimée,mêmeentenant comptedescoûtsindirects,notammentd’hospitalisation,puisqu’en 2018laconsommationmédicamenteusetotaleenFranceétaitde 37,6milliards[DREES,GonzalezL,HéamJC,MikouM,FerrettiC.

Lesdépensesdesantéen2018.Ed2019:page48].

péedecette question. Ilestà souligner quel’iatrogénie, parfoisjusqu’àdesdécèsévitables,comporteunedimension éthiquebienau-delàdel’aspectmédicoéconomique.

Cesujetdelaprescriptionmédicaleméritelaplusgrande attentionpouraumoinsquatreraisons:

• La prescription médicale à visée préventive ou cura- tive,pardesmoyensmédicamenteuxouinterventionnels, représente laprincipale finalitédel’activité desméde- cins;

• Lesprogrèsdesconnaissancesetdesmoyensentraînent descoûtsdeplusenplusélevés,pesantsurlasolidarité nationale quiles prend encharge, en moyenne à 90 % [6,7];

• L’efficacitécroissantedesmédicamentsestsouventasso- ciéeàdescontrepartiesnonnégligeablespourlepatient entermesdemorbidité,d’effetsindésirablesetdequa- litédevie;

• Enfin,lesraisonnementsquiconduisentaubonusagedes médicamentspeuventavoirune valeurexemplaire pour lesprescriptionsd’examensbiologiques,morphologiques oudetraitementschirurgicaux,commecelaaétésouli- gnédanslesconclusionsd’unrapportde2013adoptépar l’Académie[8].

Leprésentrapportestlimité,commesontitrel’indique, au bon usage du médicament non seulement par les professionnels médecins et pharmaciens mais aussi par les utilisateurs. Il ne traite ni des dispositifs médicaux, implantables ou non, ni de la prise en charge financière des médicaments malgré son incidence évidente sur la

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prescription comme le montrent des exemples, nord- américain, italien,britannique, belge ou de la Catalogne [9].Iln’abordepasnonplus laquestiondes médicaments vétérinaires.

Matériel et méthodes

Cetravailreposesurlesrapportsetcommunicationsfaitsà l’Académienationaledemédecinesurlesujetdepuis1993, ainsiqu’unrapportparlementaireauxobjectifsplus éten- dusquelenôtre[6],qu’unrapportdel’inspectiongénérale des affaires sociales centré sur lapharmacovigilance [10]

etquedeuxrapportsplusrécents,établisàlademandede ministresdelasanté[5,9].

NotrecommissionaauditionnéDenisVital-Durandancien doyendelafacultédemédecinedeLyon,PhilippeLechat professeur de pharmacologie clinique à l’Université Paris Diderot,DominiquePoltonprésidentedel’Institutnational desdonnéesdesantéetVice-présidenteduConseilscien- tifiquedel’innovationensantéetJeanSibiliadoyendela facultédemédecinedeStrasbourgetalorsprésidentdela conférencedesdoyensdesfacultésdemédecine.

Résultats

L’analysesuccinctedelasituationenpharmacologieeten thérapeutiqueaportésurlaformationinitialedesétudiants enmédecine,surl’actualisationcontinuedesconnaissances desmédecins,surlerôledespharmaciensd’officine,enfin surceluidesmaladesetdesassociations.

Laformationmédicaleinitialeetcontinue

Lesprincipaux objectifs de la formation médicaleinitiale ont été parfaitement exprimés par des pharmacologues dans unarticle intitulé« Prescrirejuste, plutôtquejuste prescrire»parudansunquotidiennational.Lesrecomman- dations étaient les suivantes : prescrire peu mais juste, se méfierdes associationsmédicamenteuses, prescrireen dénominationcommuneinternationale,enfin,savoirpréve- nir,détecteretgérerleseffetsindésirables[11].

Labonneprescriptionmédicamenteuseestmoinssimple qu’ilnepourraitparaîtredanslamesureoùelledoitêtre fondée non seulement sur une justification scientifique, maisaussiprendreencompte,deplusenplusfréquemment, des paramètres particuliers comme les comorbidités et lestraitementsassociésqu’ellesimpliquentsouvent,enfin de bien préciser les conditions d’administration (doses, rythme,etc.).Cesimpératifsconcernenttouslesacteurs: prescripteurs, pharmaciens, patients. Les prescriptions doivent encore intégrer les rapports bénéfices/risques et bénéfices/coûts [5]. Ces difficultés expliquent, en partie, qu’un travail réalisé en France, ayant porté sur 1733 malades hospitalisés, avait montré que 104 d’entre eux (6%)l’étaient àcause desconséquencesd’une iatro- génie médicamenteuse [12]. Une autre étude, également faiteenFrance,avaitmontré,chez483maladesdeplusde 65anshospitalisésdepuisplusdetroisjours,unemoyenne de douze lignes par ordonnance dont 25 % comportaient uneouplusieursassociationsdéconseillées[13].Aucentre

régionaldepharmacovigilancedeTours,32 %deprescrip- tions inappropriées ont été identifiées sur l’ensemble de casd’effetsindésirablesnotifiés[14]4.

Formationinitiale

Cesconstatssontengrandepartieattribuablesàunemécon- naissance et surtout à une mémorisation insuffisante des médecins en pharmacologie de base, en pharmacodyna- mie etenpharmacocinétique. Lesdifficultés de prescrire sontparticulièrementmarquées chezdes maladesquiont des pathologies complexes et multiples en particulier en gériatrie.Ilenrésultedesprescriptionsà bonescient par desspécialistesdifférentsn’ayantpastoujourseuconnais- sancedesprescriptionsdeleursconfrères.Celasoulignela nécessitéd’unecoordinationdesprescriptionsafind’éviter surdosages dangereux ou interactions médicamenteuses malencontreuses. Il faut parfois savoir déprescrire [15].

Enfin,deslacunessontmanifestesdanslaconnaissanceet lamaîtrisedesévaluationscomparativesbénéfices/risques dansl’emploid’unmédicamentintégrantlesdonnéesdiag- nostiques,pharmacologiquesetthérapeutiquesdupatient, ainsiquedesnotionsdebénéfices/coûts.

En2006,levolumedel’enseignementdelapharmacolo- gieetdelathérapeutiquedansles27facultésdemédecine étaitenmoyennede68havecdesvaleursextrêmesallant de 24h à 141h [2,5]. Néanmoins, la situation a évo- lué.Actuellement,lesenseignantsdepharmacologieetde thérapeutiqueconsidèrentquelevolumehorairedesensei- gnementsestsatisfaisant.Enoutre,lesétudiantsdisposent entreautresdocuments5d’unouvrageéditéparleCollège nationaldepharmacologiemédicaleetl’Associationpéda- gogiquenationaledesenseignantsenthérapeutiqueauquel letitredecerapportaétéemprunté[16].

En revanche, les connaissances ne sont pas ou sont peu validées lorsde l’examen classant national de fin de deuxièmecyclecarpeudequestionsportentsurcesensei- gnements:danscet examen,lesquestionsindividualisées depharmacologie et dethérapeutique sont pratiquement inexistantes ou « noyées » dans la masse des autres

«items».Aussi,lamajoritédesétudiantsfaitl’économie desapprentissagessurcesquestionsetnelesmémorisepas suffisamment.Or,commeledisentlesétudiants,onapprend àréussirunexamenmaispasvraimentlamédecine[17].

Les difficultés sont accrues par des aspects méthodo- logiques. En ce qui concerne les bases scientifiques des recommandations en matière de thérapeutique, chacun saitque les essaisrandomisés restent la méthode appor- tant le meilleur niveau de preuve dans les comparaisons desrésultatsentredifférentstraitements.Mais,cesessais incluent des populations, en général très sélectionnées.

Pourcette raison,les donnéesenvieréelle (études dites

4En2011,uneétudedelaDirectiondelarecherche,desétudes, del’évaluationetdesstatistiques(DREES)aestiméque150000 hospitalisationsdansl’annéeseraientliéesàdesévénementsindési- rablesgravesàlasuitedelaprisedemédicamentsoud’interactions médicamenteusesetplusdes2/3d’entreeuxjugésévitablesinPro- jetdeloidefinancementdelaSécuritésociale,annexe1,maladie, page141.

5Comme:«Dorosz,guidepratiquedesmédicaments»et«Ordon- nances»,ouvragesrevuschaqueannée.

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« d’usage »), sur des populations plus larges avec un suivi plus prolongé sont indispensables, notamment pour l’observation d’effets indésirables qui doivent amener à alerterlescentresdepharmacovigilanceetl’Agencenatio- naledesécuritédesmédicaments(ANSM)[9].Eneffet,s’il yaenFranceunebasededonnéesmédico-administratives puissante (Système national d’information inter régimes d’assurance maladie SNIIRAM), son utilité est limitée par l’absenceoul’insuffisance dedonnéescliniques associées etdedonnéesconcernantlespatientshospitalisés[9].Par ailleurs, les nombreuses bases incluant de telles données cliniques6,sontsouventtrèsciblées,notammentencancé- rologie.Ellesrestent,deplus,locorégionalesethétérogènes d’uneétudeàl’autresurunmêmesujet[9].

Actualisationdesconnaissances

Rappelons que l’enseignement dela pharmacologie et de lathérapeutiqueaucoursdesétudesdoitencorepréparer celuidudéveloppementprofessionnelcontinu.Aujourd’hui, il est assumé par des périodiques de bonne qualité, par desenseignementssousformederéunionsessentiellement financées par les laboratoires pharmaceutiques, par des

« visiteurs médicaux », salariés deces laboratoires, ainsi queparl’Agencenationaledudéveloppementprofessionnel continu.

Lespharmaciens

Entre le médecin prescripteur et le patient,les pharma- ciensassumentunrôlefondamentaldansleslimitesdeleurs attributions.Lesdossierspharmaceutiquesquirecensentles médicamentsdélivrésaucoursdesquatrederniersmoissont aujourd’huilargementdiffusés.Ilsycontribuent[5,18].Le pharmacien d’officinea un rôledéterminant pour alerter les médecins prescripteurs sur certaines incompatibilités médicamenteuses et effets indésirables qui lui auraient échappées. Vis-à-vis des malades, son rôle est, lui aussi essentiel,enparticulierdansl’améliorationdel’observance despatients.

Laformationetl’informationdesusagers.

Lesassociationsd’usagerssontd’importantsatouts.Lefait qu’elles soient, en général, focalisées sur une pathologie ne les empêche pas pour autant de jouer un rôle extrê- mement positif dans plusieurs domaines comme l’impact de l’automédication sur les autres prescriptions ou bien lesconditionsdesécuritéetd’efficacitédanslesquelleson peutproposerl’utilisationdegénériquesoudebio-similaires ouencorelaluttecontre lesfausses informations.Rappe- lons que l’automédicationreprésenterait 17 %du nombre demédicaments vendusenofficine [6]etque l’économie liée à chaque augmentation d’un point dans le pourcen- taged’utilisationdesgénériquesaétéestiméeà25millions d’euros[19].

6À titre d’exemples, citons les acronymes de cohortes : Constances,Hepather,OFSEP,FHDH,CKD,ENTRED...

Discussion

L’enseignementdelapharmacologieetdelathérapeutique adeux incidences bénéfiquesfondamentales :sur laqua- lité des prescriptions avec son intérêt pour les malades etpour son poids économiquesur la solidarité nationale.

Cet enseignement comporte ainsi une forte connotation éthique.Cependant,onconstateunediscordanceentreun large consensus sur ces points et le mésusage trop fré- quentdesmédicaments. Commeilaétédit,ils’explique enpartieparlacomplexitédesprescriptionsdanslespoly- pathologiesdeplusenplus fréquenteschezlespersonnes âgées.Cependant,contrairementàcequiapuêtrepensé, ilrelève beaucoup moinsd’une insuffisanceau niveaude l’enseignement que d’une insuffisance du contrôle de la mémorisationdecesmatièresparlesétudiantsaucoursde l’examenclassantnational.

Deux phénomènes plus généraux contribuent à expli- quer les enlisements dans ce domaine. Le premier est l’inflation législative et réglementaire, souvent dénoncée envainquiaboutitàdestextesinapplicables,nefut-cepar leurnombre,etinappliqués.Citonsdeuxexemples:unan aprèsl’entréeen vigueur del’obligation légale pour tous lesmédecinsdeprescrirelesmédicamentsendénomination communeinternationale,uneenquêtesur815ordonnances comportantplusde2700médicaments,amontréque73% restaientprescritssous lenomdelamarque,cepourcen- tageatteignantmême85%pourlesspécialistes[6,20].Un autre exemple est celui du baclofène : prescritpour une alcoolo-dépendance il devait faire l’objet, dans le cadre d’une Autorisation temporaire d’utilisation (ATU), d’une information[21].Enfait,seulement5%des prescripteurs répondaient à cette condition [9]. Le second phénomène estlamultiplicationdesrecommandationsquisuiventcer- tainsrapports.L’undestextesdel’Académiedemédecine étaitsuivide25recommandations,maislerecordestcelui durapportparlementairesuivide92propositions[6,22].Le bonsenssuggèrequepluscesrecommandationssontnom- breuses,moinselles ontdeprobabilitéd’êtreretenueset suivies.

Formationinitiale

Pourremédier à l’insuffisance actuelle des connaissances desétudiantsenfin dedeuxièmecycle etdeleurmémo- risation, une première stratégie serait d’augmenter leur poidsspécifiquedansl’examenclassantenfindedeuxième cycle des études (ou de son équivalent). Cela implique- rait de développer la placede la pharmacologie et dela thérapeutiquedanslestroisépreuvesdecetexamen:dos- siersprogressifs, question individualisées, lecturecritique d’article.Maiscetexamenal’inconvénientmajeurden’être queclassantetdenepasavoirpourobjectiflecontrôledes connaissances.Aussi,l’autrestratégie,seraitd’instituerun telcontrôleparuneépreuvespécifiqueetautonome,inté- gréeauxépreuvesdel’examenclassantnationaloudeson équivalentquidevraitluisuccéder.Cecontrôledoitêtreexi- geanttoutenétantlimitéauxprescriptionscourantes(par exemplehypertensionartérielle,diabète,asthme,proctolo- gie,etc).Cettemesureestdudomaineréglementaire.Elle semblemieux répondreà l’objectiffixé etprésentedeux

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autres avantages :sa réussite conféreraità l’étudiant un

«permistemporairedeprescrire»7indispensablepourpas- seren3ecyclepuisquecelui-cicomporteuneresponsabilité pratiquedeprescripteurentantqu’interne.Cetenjeujus- tifieraitl’exigenced’unenotesuffisante,équivalenteàune mentionbien.Iljustifieraitencorequ’ils’appliqueàtousles étudiantseuropéensquisouhaitentfaireuntroisièmecycle enFrance.

Actualisationdesconnaissances

Encequiconcerneledéveloppementprofessionnelcontinu, plutôtquedecritiquerlelargefinancementparleslabora- toiresetlerôledes«visiteursmédicaux»dontlenombre adiminuéilseraitpréférabledemieuxformerlesétudiants etlesmédecinsàunecertainerigueurscientifiquequileur permettraitdenepasacceptersansespritcritiquelesinfor- mationsquileursontdonnées.Outrelesconnaissancesen biostatistiques, les étudiants devraient être habitués aux évaluationsdebénéfices/coûts.Ilconvientderappelerque, selonlecodededéontologie,silesmédecinssontlibresdans leursprescriptions(article 16),ils sonttenusàlimiterces prescriptionsàcequiestnécessaire(article9)etd’observer la plus stricte économie compatible avec l’efficience du traitement[22].L’organisationdecedéveloppementprofes- sionnelcontinudoitêtresimple.Unrapportdel’Inspection générale des affaires sociales avait proposé une simplifi- cation des procédures et une remise à plat du dispositif existant [23]. L’actualisation continue des connaissances pourrait être organisée sous l’égide de la trentaine de Conseilsnationauxprofessionnelsdesspécialitésconcernées dontlamédecinegénérale.

Aidesàlaprescriptionetpharmacovigilance Par ailleurs, les logiciels d’aide à la prescription se sont multipliés. Certains manquent de clarté, de concision et de précision ce quiles rend peu utilisables. Il suffitpour s’enconvaincredeconsulterlessitesdelaHauteautorité de santé [8,24]. En outre, « Les résumés des caractéris- tiquesdesproduitsontdeslibellésquicorrespondentplus à des problématiquesréglementairesetindustrielles qu’à des objectifs de santé publique » [5]. Sur ce plan, on a assisté à un élargissement des missions attribuées aux Agences eten conséquence des effectifs depersonnel et des moyens financiers qui leur étaient alloués alors que leurefficiencediminuait.L’Agencenationalepourledéve- loppementdel’évolutionmédicalecrééeen1991(ANDEM) était proche des sociétés savantes qui étaient ses parte- naires,assurantunebonnediffusiondesrecommandations pourlapratiquecliniqueauxquellesellesavaientlargement contribué[25]Ceteffets’estestompéavecl’Agencenatio- naledel’accréditationetdel’évaluationensantéde1996 (ANAES)pour amorcerlacréationen2004,d’une autorité publique indépendante,la Haute autorité de santé (HAS) [26].Quantàl’Agencenationalededéveloppementprofes- sionnel continuquidispose d’unbudgetannuel del’ordre de200millions,elleafait l’objeten2019d’unréféré du

7SuggestiondeGillesBouvenot.

présidentdelaCourdescomptesentermesextrêmement sévères[27]. Ilappartient encore au développement pro- fessionnel continu dedévelopper la pharmacovigilance et de contribuer à la pharmacoépidémiologie en persuadant lespraticiensqu’ils doiventen êtredes acteurs indispen- sablesenfacilitant lanotification deseffets graves et/ou inattendusdestraitementsetenprenantencompteleser- viceapportéparl’observateur[28].Pourmieuxsensibiliser lesmédecinsàl’importancedelapharmacovigilanceetles stimuler,ilseraitsouhaitabled’assurerdesretourssurinfor- mation à l’exemple, pour le traitement des cancers, du

«learningintelligencenetworkforquality»(CancerLinq) auxÉtats-Unisoupardesaidesàladécisioncommecequi aétéfaitpourleschimiothérapiesenFranche-Comté[9].

Propositions

Ellessontlimitéesàtrois.

L’importancedelaconnaissancepharmacologiqueetdu savoir faire thérapeutique dans l’activité médicale justi- fie d’individualiser le contrôle des connaissances et des aptitudesauraisonnementdesfutursprofessionnelsparun examenspécifiqueetautonome enfin dedeuxièmecycle intégréauxépreuvesdel’examenclassantnational(oude sonéquivalent)portantsurletraitementdebasedespatho- logieslespluscourantes[2].Saréussiteseraitindispensable pourpasseren3ecycle.

L’évolution de la thérapeutique est un domaine dans lequell’actualisationdesconnaissancesestfondamentale.

Ildoitobligatoirement enêtre tenu comptedans lespro- grammes de développement professionnel continu et le processusderecertification.

Les informations destinées aux professionnels doivent êtreaccessiblesetclaires.ElaboréesparlesConseilsnatio- naux professionnels de la spécialité elles devraient être unifiéesetpourraientalorsêtrevalidées,parexemplepar les académies, avec un portail d’information unique et labellisé[5,10].

Déclaration de liens d’intérêts

Lesauteursdéclarentnepasavoirdeliensd’intérêts.

Remerciements

Nousremercions pour leurs conseils Mme Durand-Zaleski, directricedel’Unitéderecherchecliniqued’économiedela santéIle-de-France;MM.O.Chassany,professeurdethéra- peutiqueàParis,M.Molimard,professeurdepharmacologie cliniqueà Bordeauxet pour leurs remarques,MM.J. Sas- sardsecrétairede lacommission IIetD. Houssin, JP.Olié membresdelacommissionVIII.

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