• Aucun résultat trouvé

Observateurs et liquidateurs en droit bancaire et financier

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Observateurs et liquidateurs en droit bancaire et financier"

Copied!
22
0
0

Texte intégral

(1)

Book Chapter

Reference

Observateurs et liquidateurs en droit bancaire et financier

BOVET, Christian

BOVET, Christian. Observateurs et liquidateurs en droit bancaire et financier. In: Foëx, Bénédict

; Thévenoz, Luc. Insolvence, désendettement et redressement : Etudes réunies en l'honneur de Louis Dallèves . Bâle : Helbing & Lichtenhahn, 2000. p. 65-85

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:43211

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

(2)

Observateurs et liquidateurs en droit bancaire et financier

Christian Bovet*

Professeur à l'Université de Genève

I.

Contexte et délimitations

La protection des créanciers et des investisseurs a toujours été au centre des préoccupations du législateur dans le domaine du droit bancaire et financier1. Cela se manifeste en premier lieu au travers des règles générales fixant le régime d'autorisation continue2, en particulier celles sur les conditions d'auto- risation et les ratios de fonds propres et de répartition des risques3. En outre, des dispositions spéciales régissent les procédures de faillite et de concordat des établissements bancaires4. Enfin, le législateur a introduit cette priorité jusque dans la loi sur les cartels, qui permet à la Commission fédérale des banques (CFB) de se substituer à la Commission de la concurrence lors- qu'une concentration de banques est jugée nécessaire par l'autorité de sur- veillance bancaire pour protéger les intérêts des créanciers5.

Les observateurs et les liquidateurs font partie de ces mécanismes de protection des créanciers. Ils ont pris au cours des ans de plus en plus d'im-

• L'auteur remercie vivement Claude BRETION-CHEVALLIER, avocate, DES (droit ban- caire), assistante au Centre d'études juridiques européennes de l'Université de Ge- nève, pour l'aide qu'elle lui a apportée dans l'élaboration de cet article, en particulier de son appareil critique.

1 P.ex. A. HlRSCH, "Les objectifs de la loi sur les banques", in U. ZULAUF {dir.), 50 ans de surveillance fédérale des banques, Zurich (Schulthess) 1985, p. 271.

2 Art. 23quinquies al. 1LB,36 al. 1 LBVMetBull. CFB 33 (1997), p. 25,BankRinderkneclu AG.

3 Art. 4 -4tec LB, 12 ss et 21 ss OB, ainsi que 29 ss OBVM.

4 Cf. les références citées infra n. 84 et 85.

5 Art. 10 al. 3 LCart et 10 OCCE. Cf. ég. art. 9 al. 3 LCart et 8 OCCE. Sur ces disposi- tions, cf. p.ex. C. BOVET, "Premières expériences dans le contrôle des concentrations", in C. BOVET (dir.), Journée du droit de la concurrence 1998, Zurich (Schulthess) 1999, p. 83 S.

(3)

CHIUSTiAN BOVET

portânce en raison de l'augmentati9n des activités dans les domaines ban- caire etfmandet, de l'entrée en vigueùr de nouvelles lois ou, simplement, de la surcharge d'une autorité de surv'eillance appelée à de nouvelles tâches sans toujours disposer de nouveaux moyens.

Cette contribution porte sur les observateurs et liquidateurs institués en vertu des lois sur les banques, les bourses et les fonds de placement; ces trois lois forment un tout qui peut, en général, être traité de manière semblable. Cet article n'aborde en revanche pas les questions liées à la dissolution ou à la radiation d'intermédiaires financiers en vertu de la loi sur le blanchiment!>. On peut cependant faire deux remarques à ce propos:

D'une part, cette dernière loi permet de mettre l'accent sur le second objectif de la réglementation concernée, à savoir la protection de la répu- tation de la place financière suisse7. L'ensemble de ces lois aussi tend à mettre en œuvre ce but8.

D'autre part, la réglementation sur le blanchiment ne donne à l'autorité de contrôle en matière de lutte contre le blanchiment que le pouvoir d'or- donner la dissolution ou la radiation de l'intermédiaire financier (art. 20 al. 2 LBA)9. La désignation d'un liquidateur se fera par le juge, confor- mément au,'<. règles du droit civil (art. 740 al. 4 CO par analogie)10.

6 Art. 20 al. 2 de la loi fédérale concernant la lutte contre le blanchiment d'argent dans le secteur financier (RS 955.0, reproduite in L. THÉVENOz/U. ZULAUF, BF 2000: Régle- mentation et autoréglementation des banques, bourses, négociants, fonds de placement et marchés financiers en Suisse, Zurich (Schulthess) 1999 [BF], 20-1.

7 HIRSCH, (n. 1), p. 276-278.

8 Pour souligner les liens évidents entre ces différentes règles, on mentionnera par exem- ple la Circulaire 98/1 de la CFB (Directives relatives à la prévention et à la lutte contre le blanchiment de capitaux) qui prévoit que: "Si l'affaire en cause revêt une certaine importance pour l'image de l'intermédiaire financier ou de la place financière suisse ou encore si elle peut mettre en péril la situation financière de l'intermédiaire financier, celui-ci en informe la Commission des banques" (ch. 34). Eg. l'Annexe I à la Circulaire 96/3 de la CFB (Règles de comportement de l' Association suisse des banquiers pour lesquelles l'institution de révision doit vérifier qu'elles sont respectées par les banques et les négociants en valeurs mobilières). Ces textes sont reproduits, respectivement, in BF/3 IA-20 et BF/31A-14a.

9 S. BERTIIC. GRABER, Das schweizerische Geldwiischereigesetz, Zurich (Schulthess) 1999, art. 20 LBA n° l ss.

IO Sur cette disposition, cf. p.ex. P. BOECKLI, Schweizer Aktienrecht, 2ème éd., Zurich (Schulthess), 1995, p. 1032 n° 1955s-u; P. FORSTMOSERIA. ME!ER-HAYOZ /P. NOBEL, Schweizerisches Aktienrecht, Berne (Staempfli) 1996, p. 853 37.

(4)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS EN DRbIT BANCAIRE ET FINANCIER

II. Bases légales et statut

Même si les textes légaux présentent certaines divergences - parfois même des dissonances, on peut établir de nombreux rapprochements quant au statut des divers observateurs et, respectivement, des liquidateurs.

A. Sources

L'art 23quater LB permet expressément à la CFB de déléguer un expert, en qualité d'observateur, auprès d'une banque dont les créanciers risquent d'être sérieusement lésés p~ des irrégularités graves. De même, lorsque l'autorité de surveillance retire son autorisation à un établissement, elle en désigne le liquidateur et surveille son activité (art. 23quinquies LB).

En matière de fonds de placement, l'autorité de surveillance peut impo- ser un observateur à une direction ou à une banque dépositaire si les droits des investisseurs semblent sérieusement menacés (art. 59 LFP). Par ailleurs, elle nomme un gérant en lieu et place de la direction ou de la banque déposi- taire qui n'a plus l'autorisation d'exercer son activité; le gérant a alors un délai d'une année pour proposer le remplacement de l'un de ces organes ou des deux, ou encore la dissolution du fonds de placement (art. 60 LFP). La réglementation d'application vient préciser, mais aussi compléter, la loi sur plusieurs aspects (art. 84 OFP).

Par contre, la loi sur les bourses ne contient aucune disposition permet- tant explicitement la désignation d'un observateur. Dans une décision récente, la CFB a cependant considéré que l'art. 35 al. 3 LBVM lui donnait un tel pouvoir, comme pour les banques et les fonds de placement 11En effet, selon cette règle, lorsque l'autorité de surveillance apprend des infractions aux pres- criptions légales ou d'autres irrégularités, elle doit veiller au rétablissement de l'ordre légal. En particulier, elle peut interdire provisoirement au négo- ciant d'exercer son activité. La CFB a donc estimé que la nomination d'un observateur était une mesure moins incisive que l'interdiction, même provi- soire, et que celle-là devait être préférée puisqu'elle permettait d'atteindre le

li Bull. CFB 33 (1997), p. 15, X SA. A ce sujet, cf. C. BOVET/C. BRETTON-CHEVALLIER,

"Jurisprudence administrative récente", in L.THÉVENOZ/C. BOVET (dir.), Journée 1999 de droit bancaire et financier, Berne (Staempfli) 2000, p. 204.

(5)

CHRISTIAN BOVET

même objectif (art. 42 PA)12. Par contre, le législateur a prévu un régime semblable à celui des banques pour le liquidateur: la nomination de celui-ci accompagne le retrait de l'autorisation (art. 36 al. 2 phr. 2 LBVM).

B. Conditions de la nomination

A l'évidence, la nomination d'un observateur est une mesure moindre que le prononcé de la dissolution ou de la radiation d'un établissement et la désigna- tion d'un liquidateur. Dans le premier cas, il y a encore un espoir que l'entre- prise parvienne à rétablir une situation conforme au régime d'autorisation.

Dans le second, la cessation d'activité del' établissement s'impose pour pro- téger les intérêts des créanciers et investisseurs. Il n'en demeure pas moins, cependant, que la désignation d'un observateur préfigure souvent celle d'un liquidateur; les états de fait à l'origine de ces nominations ne sont en effet guère éloignés.

1.

De l'observateur

La loi prévoit expressément que l'organe de révision bancaire peut être désigné comme observateur par l'autorité de surveillance (art. 23quater al. 1 LB). Rien ne s'oppose à ce qu'elle fasse de même pour les négociants et les fonds de placement, nonobstant le silence de la réglementation qui leur est applicable.

De même, d'anciens directeurs de banques ou des avocats d'affaires peuvent être nommés13. Enfin, on soulignera que cette nomination doit en principe demeurer secrètel4.

12 Bull. CFB 33 (1997), p. 15, X SA: application du principe de la proportionnalité, plus exactement de la subsidiarité. A ce sujet, cf. P. MOOR, Droit administratif, vol. I: Les fondements généraux, 2ème éd., Berne (Staempfli) 1994, p. 416 ss; B. KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd., Bâle/Francfort (Helbing & Liechtenhahn) 1991, p. 113

SS.

13 D. BODMER, in D. BODMER/B. KLEINERIB. LUTZ (édit.), Kommentar zum schweizerischen Bankengesetz, Zurich (Schulthess) 1999, art. 23quaterLB n° 6. Ces principes s'appliquent également dans le domaine des fonds de placement. M. DEN ÜTTER, in P. FORSTMOSER

(édit.), Kommentar zwn schweizerischen Anlagefondsgesetz, vol. 1, Zurich (Schulthess) 1997, art. 59 LFP n° 12.

14 Idem, n° 3.

(6)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS ENDROIT BANCAIRE ET FINANCIER

a) En général

La CFB jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour déterminer s'il y a lieu de nommer un observateur. Selon les circonstances, elle peut prendre une autre mesure plus légère ou plus sévère15. En outre, la désignation d'un ob- servateur peut accompagner d'autres dispositions; la première n'a aucun ca- ractère exclusif.

Elle interviendra généralement lorsque l'autorité de surveillance cons- tate des violations graves de la réglementation pertinente: lois sur les ban- ques, bourses ou fonds de placement, ordonnances d'exécution, mais aussi les règlements des établissements ou fonds concernés 16. Ont par exemple été considérés comme des violations graves les états de fait suivants, tirés en partie de la même affaire:

position de gros risques, composée de titres au cours très volatil (socié- tés minières aurifères canadiennes) dépassant de 40% les fonds propres de la banque et garantissant à l 00% des crédits, à un taux de 1 % infé- rieur au marché, à des organes de la banque ou à des sociétés qui leur étaientprochesl7;

malgré la volatilité du cours de ces titres et l'étroitesse de leur marché (limité à des jours isolés), recommandations d'achat à certains clients détenant un dépôt de titres et placement dans les portefeuilles de clients ayant confié à la banque un mandat de gestion. D'où une grave violation

l5 P.ex. ATF 101 lb 437 ss et T. POLEDNA, in N. P. VOGT/R. WATIER (édit.), Kommenlar zum schweizerischen Kapitalmarktrecht, Bâle/Genève/Munich (Helbing & Liechtenhahn) 1999, art. 35 LBVM na 4. Pour une liste exemplative de ces mesures, cf. notamment B. KLE!NER, in D. BODMERIB. KLErNERIB. LUTZ (édit.), Kommentar zum schweizerischen Bankengesetz, Zurich (Schulthess) 1999, art. 23bis LB na 16.

l6 Seul l'art. 35 al. 3 lit. b LBVM est aussi précis. Les autres règles sont rédigées en termes généraux (art. 23quater LB et 57 LFP). La liste de la loi sur les bourses s'appli- que cependant aussi en matière de banques et de fonds de placement. Bien que dé- taillée, cette liste n'a aucun caractère exhaustif; on peut notamment y ajouter, pour être plus précis, les circulaires, directives et autres communiqués de la CFB ou encore des normes d' autoréglementation auxquelles l'autorité reconnaît une force obligatoire. Eg. en faveur de cette interprétation large, POLEDNA (n. 15), art. 35 LBVM na 12 et 20; ainsi que KLEINER (n. 15), art. 23ter LB n° 4, qui inclut notamment dans ce groupe de règles les contrats passés avec les clients.

17 Bull. CFB 29 (1995), p. 11; Rapports de gestion CFB 1995, p. 139, et 1996, p. 157, Rinderknecht Bank.

(7)

CHRISTIAN BOVET

des directives de l 'Association suisse des banquiers sur le mandat de gestion et un sérieux conflit d'intérêts préjudiciable aux clients18;

sociétés s'étant annoncées comme négociants en valeurs mobilières, sans pour autant décrire de façon précise leurs activités, tout en faisant par ailleurs l'objet d'accusations graves (en particulier, des pratiques con- traires aux règles de conduite et de nature à mettre en danger les intérêts des investisseurs). L'impossibilité d'obtenir des entités en question des indications fiables a conduit la CFB à nommer un observateur pour éclair- cir la situation 19;

lacunes dans l'organisation interne de l'établissement, litiges entre les organes responsables de la bonne marche de la banque ou encore rap- ports de domination unilatérale2o.

La condition de gravité doit toujours être remplie21. D'autres règles s 'ap- pliquent lorsque les défauts sont légers, en particulier ceux signalés dans le rapport de révision et corrigés entre le moment de leur constat et de l'envoi du rapport à la CFB22.

Il faut en plus que les intérêts des créanciers ou des investisseurs ris- quent d'être sérieusement lésés23. Il doit exister un lien de causalité entre les irrégularités visées et cette mise en danger: ce sont ces violations qui pour- raient causer des pertes aux créanciers ou aux investisseurs ou, en tous les cas, être à l'origine d'une situation où leurs biens pourraient être affectés négativement. Les exemples qui précèdent illustrent parfaitement la relation étroite qui existe entre ces deux conditions.

Il faut ajouter comme alternative à la seconde condition, les situations où la réputation de la place financière suisse est mise en danger; il s'agit en effet

18 Ibidem.

19 Bull. CFB 33 (1997), p. 15, X SA.

20 BODMER (n. 13), art. 23quater LB n° 2.

21 Pour une présentation de ce principe dans le domaine des fonds de placement, cf. DEN ÛTTER (n. 13), art. 57 LFP n° 9 s. (avec d'autres références).

22 Art. 21 al. 3 LB, 41 al. 1 et 43 al. 2 OB, 19 al. 4 et 5 LBVM. A ce sujet, cf. la Circulaire 96/3 de la CFB (Rapport de révision forme et contenu), ch. Il à 13; reproduite in BF/

31A-14.

23 Terminologie empruntée à l'art. 23quater al. l LB. L'art. 35 al. 3 lit. a LBVM fait réfé- rence à un "danger imminent pour les créanciers". Quant à l'art. 59 al. 1 LFP, il vise les situations où "les droits des investisseurs semblent sérieusement menacés".

(8)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS EN DROIT BANCAIRE ET FINANCIER

de prendre ainsi en compte le second but de la réglementation bancaire et financière24.

b) Moment de la nomination et mesures provisoires

La décision de nommer un observateur devrait en général intervenir après l'octroi de l'autorisation d'exercer une activité soumise à surveillance. Dans la mesure où il s'agit d'un régime d'autorisation continue, la CFB peut retirer celle-ci à tout moment dès qu'elle établit que les conditions matérielles à cette décision sont remplies; en conséquence, elle peut aussi prononcer une mesure plus "douce" dans les mêmes circonstances de temps25.

Dans des situations particulières, on peut envisager que la CFB prenne de telles dispositions même avant l'octroi de l'autorisation. Tel est notam- ment le cas lorsque par le jeu des dispositions finales, les intermédiaires fi- nanciers bénéficient d'un régime provisoire qui leur permet d'exercer leur activité durant une certaine période. Ainsi, au moment de l'entrée en vigueur de la loi sur les bourses, le 1er février 1997, les négociants en valeurs mobiliè- res avaient un délai de deux ans pour se mettre en conformité pour autant qu'ils aient respecté leur devoir d'annonce selon l'art. 50 al. 1 LBVM26.

Durant cette période intermédiaire de "quasi-autorisation", la CFB doit déjà être en mesure de surveiller les requérants en tant que garante des objectifs de la réglementation bancaire et financière27• Ainsi:

"Afin de pouvoir statuer en toute connaissance de cause sur les repro- ches formulés par différentes sources à l'encontre (des sociétés requé- rantes] ainsi que sur la possibilité, pour ces sociétés, d'obtenir une auto- risation de fonctionner en qualité de négociant, la nomination d'un observateur semble la mesure la plus adéquate. La CFB a en effet besoin

24 Cf. supra note 7. Explicite, bien que dans un contexte en partie différent, in Bull. CFB 33 (1997), p. 16 X SA: "la protection des créanciers[ ... ] et des investisseurs ainsi que de la sauvegarde de la confiance du public dans le système financier constituant les principaux critères d'appréciation" (souligné par l'auteur).

25 Supra section 1, A.

26 Sur ces questions, cf. p.ex. D. DAENTIŒR, in N. P. VOGT/R. WATTER (édit.), Kommentar zum schweizerischenKapitalmarktrecht, Bâle/Genève/Munich (Helbing & Liechtenhahn)

1999, art. 50 LBVM.

27 Cet aspect ressort en particulier de l'art. 50 al. 1 in fine LBVM qui permet à la CFB de raccourcir le délai de deux ans.

(9)

de s'assurer de la fiabilité des informations reçues de la part des sociétés et de garantir que les documentspertinents pourront être conservés."28

Selon les constatations del' observateur durant cette phase antérieure à l'auto-' risation, la CFB pourra accorder ou refuser celle-ci ou encore prendre des mesures conservatoires29. · S 'agiss~rit de ce dernier aspect, elle pourra notam-. ment interdire provisoirement au négociant tous actes juridiques et financiers (art. 35 al. 3 lit. a LBVM) et aux collaborateurs incriminés de pratiquer le commerce de valeurs mobilières (art. 35 al. 3 lit. b LBVM). D'autres mesu-.

res provisionnelles s'inspirant de la pratique des autorités administratives - telles que la saisie de documents et le blocage de comptes - peuvent égale- ment être envisagées30.

2. Du liquidateur

L'observateur peut se succéder à lui-même et se transformer en liquidateur.

Toutefois, s'il s'agit du réviseur bancaire de l'établissement en question, il conviendra de désigner en outre un réviseur bancaire indépendant pour la période de liquidation forcée31 .

a) En général

La mise en liquidation d'un établissement constitue une mesure ultime et irré- versible32. Elle n'interviendra dès lors qu'en dernier ressort, lorsque les cir- constances laissent apparaître que les irrégularités sont à tel point graves, au regard du cas d'espèce, que seule la dissolution de l'entreprise permettra de

28 Bull. CFB 33 (1997), p. 19, X SA.

2 9 La quatrième hypothèse, la mise en liquidation de l'entitè, est traitée dans la section qui suit immédiatement.

JO Sur ces questions, cf. A. BIZZOZERO, "Les interventions urgentes de la Commission fédérale des banques", in P. BERNASCONI/R. CHOPARD (édit.), Mesures provisionnelles judiciaires et administratives, Bellinzona (Méta-Editions) 1999, p. 15.

31 Bull. CFB 33 (1997), p. 33, Bank Rinderknecht AG. Eg. KLEINER (n. 15), art. 23quinquies LB n° 13.

32 Nous ne traitons ici que des cas où la liquidation est ordonnée par la CFB. A noter que la mise en liquidation volontaire n'entraîne pas automatiquement le retrait de l'autori- sation, mais qu'en revanche une liquidation intervenant dans le cadre d'une procédure d'exécution forcée a cet effet A ce propos, cf. KLEINER (n. 15), art. 23quinquies LB 7.

En matière de fonds de placement, cf. DEN OTTER (n. 13), art. 57 LFP n° 13.

(10)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS EN DROIT BANCAIRE ET FINANCIER

sauvegarder les intérêts des créanciers et investisseurs: il apparaît clairement à l'autorité de surveillance que les chances d'amélioration et de mise en con- formité sont inexistantes ou très faibles33. C'est pourquoi tant l'art. 23quinquies

al. 2 LB que l'art. 36 al. 2 LBVM lient la nomination d'un liquidateur au retrait de l'autorisation d'exercer une activité bancaire ou de négociant34.

Un cas typique est l'affaire Spahr- und Leihkasse Thun où la CFB a nommé une société de révision agréée en tant que liquidateur. Le retrait de l'autorisation était motivé par une situation de surendettement, par de graves lacunes dans l'organisation de l'activité de crédit (notamment l'absence de contrôle de la bonité des débiteurs et des sûretés, qui étaient de surcroît sou- vent surévaluées), par la prise de gros risques qui n'avaientjamais été annon- cés à l'autorité de surveillance35. On ajoutera comme causes de retrait des violations des prescriptions relatives aux crédits aux organes, une domina- tion étrangère illicite ou d'autres circonstances supprimant la garantie d'une activité irréprochab le36.

Evidemment conscient du caractère irréversible d'une liquidation37, le législateur a par ailleurs prévu un régime particulier pour les fonds de place- ment qui, comme nous allons le voir, peut se dérouler en deux temps.

b) Moment de la nomination

Le moment de la désignation d'un liquidateur soulève des questions plus com- plexes que la nomination d'un observateur. Certes, les lois sur les banques et

33 Sur la pesée d'intérêts qui doit intervenir ici, cf. p.ex. POLEDNA (n. 15), art. 36 LBVM n° 4 S.

34 La situation visée par l'art. 36 al. 2 LBVM ne devrait se présenter que très rarement:

dans la mesure où les conditions d'autorisation bancaire sont au moins aussi strictes si ce n'est plus strictes que celles applicables à un négociant, il arrivera le plus souvent que le retrait de l'autorisation de négociant implique le retrait de l'autorisation ban- caire.

35 La décision de la CFB du 18 octobre 1991 a été confirmée par le Tribunal fédéral le 20 novembre 1991 (Bull. CFB 22 [1992], p. 9). La chambre des poursuites et faillites de cette juridiction s'est également prononcée à deux reprises sur ce dossier. Elle a accordé le sursis bancaire (Bull. CFB 22 [1992], p. 22) et a examiné un éventuel conflit d'intérèts entre les fonctions de commissaire au sursis et d'administateur d'une part et de liquidateur d'autre part (Bull. CFB 23 [1993], p. 40).

36 KLEINER (n. 15), art. 23quinquies LB n° 10.

37 Rappelons que l'on se trouve dans cette situation de non-retour dès que la décision de la CFB est entrée en force. KLEINER (n. 15), art. 23quinquies LB n° 9.

(11)

CHRISTIAN BOVET

sur les bourses contiennent des dispositions explicites en cas de retrait d'auto- risation (art. 23quinquies al. 2 LB que l'art; 36 al. 2 LB)38 ; autrement dit, la loi· pose comme principe que le liquidateur intervient dans le cadre de la sur- veillance ordinaire postérieure à l'octroi del' autorisation. De même, on sou- lignera que la CFB est habituée à surveiller la liquidation d'une banque inter- venant suite à une décision de l'assemblée générale des actionnaires39.

La jurisprudence a par ailleurs étendu l'application de ces règles à des états de fait survenant avant ou en l'absence d'autorisation:

La CFB a ainsi fait usage de cette interprétation extensive dans le cadre de la période transitoire instaurée par la loi sur les bourses40. L'autorité de surveillance a invoqué deux arguments convaincants pour justifier cette mesure praeter legem: D'une part, les irrégularités graves consta- tées par l'observateur constituaient des violations de dispositions d'ap- plication immédiate, à savoir les règles de conduite et la garantie d'une activité irréprochable41 . D'autre part, la loi donne la faculté à la CFB de raccourcir le délai de grâce résultant de la formalité d'annonce (art. 50 al. 1 LBVM)42; il en résulte une certaine compétence d'intervenir dans l'intérêt des créanciers et investisseurs durant cette période43. Cepen- dant, on rappellera aussi dans ce contexte l'application du principe de proportionnalité qui devrait conduire la CFB à examiner, préalablement, des mesures qui portent moins atteinte aux intérêts du négociant ayant annoncé son activité44.

38 Cf. supra note 33.

39 Bull. CFB 3 ( 1978), p. 49, Bank X AG.

40 Cf supra section II, A.

41 Il existe un lien évident entre ces deux aspects qui justifie que l'on fasse d'une condi- tion d'autorisation - la garantie d'une activité irréprochable (art. 10 al. 2 lit. d LBVM) - une règle d'application immédiate. Sur ce dernier aspect, cf. Bull. CFB 35 (1998), p. 22, CMG Capital Management Group SA.

42 Bull. CFB 33 (1997), p. 20 s., X SA.

43 Comme le souligne l'autorité de surveillance (idem, p. 23 s.): "Une réduction supplé- mentaire du délai déjà réduit au 31 décembre 1997 [au lieu du 31 janvier 1999] ne saurait en effet suffire et aurait pour conséquence, à l'expiration du délai, qu'une acti- vité qui ne respecte en rien les exigences légales pourrait être poursuivie pour un temps donné du moins. Une mesure qui consisterait à transformer l'activité des sociétés afin qu'elle ne tombe plus dans le champ d'application de la loi sur les bourses ne saurait par ailleurs éviter la mise en liquidation. En effet, même si une société cesse son acti- vité de négociant en valeurs mobilières, la CFB a l'obligation de s'assurer que les biens des investisseurs accumulés pendant l'exercice de l'activité assujettie à la loi soient restitués aux ayants droit. Or, seule une liquidation effectuée en bonne et due forme est

(12)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS EN DR01T BANCAIRE ET FINANCIER

Le cas le plus fréquent demeure cependant celui des sociétés exerçant une activité bancaire ou de négociant sans autorisation. Ces entités peu- vent en effet faire l'objet d'une décision de liquidation par la CFB lors- que cette mesure est la seule à même d'assurer, notamment, l'application du principe d'égalité de traitement entre les créanciers45.

La loi prévoit un régime spécial lorsque la CFB retire à la direction d'un fonds de placement ou à une banque dépositaire l'autorisation d'exercer son activité46. Il s'agit en effet de prendre en compte les spécificités de cet instrument: d'une part, ces fonds sont des véhicules de placement collectif fondés sur le long ou moyen terme et, d'autre part, le faisceau d'autorisations mis en place par le législateur est centré sur un produit47,

non sur un intermédiaire financier comme une banque ou un négociant.

En conséquence, l'autorité de surveillance nomme dans un premier temps non pas un liquidateur, mais un gérant. Celui-ci commencera par se subs- tituer à l'organe "démissionné" (art. 60 al. 1 LFP), puis, au plus tard au terme d'un délai d'une année, proposera ou bien de nommer un (nouvel) organe de remplacement ou bien de faire procéder à la dissolution du fonds (art. 60 al. 2 LFP). Ce n'est que dans cette dernière hypothèse qu'un liquidateur interviendra. Ce principe de la subsidiarité ressort aussi expressément de l'art. 58 al. 2 LFP qui prévoit, en premier lieu, que la CFB peut prescrire à la direction d'un fonds de placement non autorisé

susceptible de garantir ce résultat (cf. Bull CFB 25 [1994], p. 11 ss)". Bull. CFB 35 (1998), p. 23 s., CMG Capital Management Group SA. Il convient de souligner que cette dernière décision est la continuation de celle citée à la note précédente et con- cerne les mêmes sociétés.

44 Parmi ces mesures, on citera notamment l'interdiction, assortie des peines de l'art. 292 CPS, d'exercer une activité bancaire ou de négociant. A ce sujet, cf. Bull. CFB 32 (1997), p. 59 s., Self Finance SA. Voir ég. la décision citée à la note suivante.

45 A souligner par ailleurs qu'en l'occurrence, cette mise en liquidation respectait aussi le principe de proportionnalité dans la mesure où, selon la pratique de la CFB, la société incriminée aurait évité la liquidation, si elle avait respecté les conditions posées par l'autorité de surveillance pour sa mise en conformité avec le régime légal. Cf. Bull.

CFB 38 (1999), p. 28 s., P. AG c. EBK. Sur ces aspects, cf. ég. KLEINER (n. 15), art.

23quinquies LB n° 2 et 11. Pour d'autres cas de mise en liquidation de sociétés exerçant une activité financière sans autorisation voir ég. ATF du 17 juin 1999 in Bull. CFB 38 (1999), p. 25; Bull CFB 29 (1995), p. 17, Fidenas SA; Bull. CFB 25 (1994), p. 11, European Kings Club; Rapport de gestion CFB 1994, p. 145, Club 2000; Bull. CFB 6 (1980) p. 5; Bull. CFB 20 (1990), p.16.

46 Art. 60 al. 1 LFP.

47 Art. 10 LFP (direction), art. 19 LFP (banque dépositaire), art. 22 LFP (distributeurs de fonds suisses) et art. 45 LFP (distributeurs et représentants de fonds étrangers).

(13)

. . . : . . .

dedonner·à celüi~dune fonneréportdantaüx prescriptions de la loi; ce

··· n'estqu'èri.sècond lieu, que cette disposition mentionne la dissolution du

fonds4&.

La foi sur les foridS de placeme1lfëst silencieuse sur les circonstances qui conduisent à de telles mesures. On peut toutefois appliquer par analogie les principes que nous avons présentés jusqu'à maintenant: la nomina- tion d'un gérant, respectivement d'un liquidateur, n'interviendra que si l'on est en présence d'irrégularités graves qui mettent en danger les inté- rêts des investisseurs. Il faut toutefois que, dans un premier temps du moins, on puisse considérer que les investisseurs ont un intérêt au main- tien du fonds. Lorsqu'on constate que les irrégularités ne peuvent être

"guéries" par le temps, il y a lieu de procéder à la liquidation du fonds49.

Enfin on rappellera que dans tous ces domaines, la CFB peut immédia- tement exécuter ses décisions, dès leur prononcé (art. 39 lit. b PA cum art. 111 al. 2 OJF): un éventuel effet suspensifne peut résulter que d'une décision du président de la cour du Tribunal fédéral saisie d'un recours de droit administratif5°. L'autorité de surveillance peut aussi décider d'elle- même d'assortir sa décision d'un effet suspensif ou de prononcer un re- trait conditionnel de l'autorisation, la décision de dissolution et de nomi- nation d'un liquidateur ne devenant alors exécutoire que si la condition prévue se réalise. La CFB peut aussi se montrer plus stricte, et non seu- lement prévoir que la décision est exécutoire au moment de la notifica- tion mais encore ordonner des mesures provisionnelles qui s'appliquent avant cette notification51.

48 A ce propos, cf. DEN ÜTTER (n. 13), art. 58 LFP n° 9 ss.

49 Idem, art. 60 LFP n° 3, qui s'appuie essentiellement sur un argument historique.

50 Bull. CFB 29 (1995), p. 16, Bank X. Eg. BOVETIBRETION-CHEVALLIER (n. 11), p. 205.

Sur la possibilité de procéder à une exécution sans avis comminatoire en cas de péril en la demeure selon l'art. 41 al. 3 PA, cf. POLEDNA (n. 15), art. 35 LBVM n° 26.

51 Pour une présentation détaillée de la pratique de la CFB dans ce domaine, cf.

A. B!ZZOZERO (n. 30), p. 25 ss. Eg. KLEINER (n. 15), art. 23quinquies LB n° 6.

(14)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS EN DROIT BANCAIRE ET FINANCIER

C. Contenu de la mission

Au premier abord, la mission du liquidateur paraît aisée à définir: il procé- dera pour l'essentiel conformément aux art. 742 SS C052. En outre:

"[ ... ] la tâche des liquidateurs est d'accomplir tous les actes nécessaires à la conservation et à la réalisation de la masse ainsi que de représenter celle-ci en justice (art. 3 l 6d al. 3 LP) [ ... ] les liquidateurs - agissant sous la raison de la banque débitrice, avec l'adjonction 'en liquidation concordataire' -ont notamment les attributions conférées par l'art. 585 al. 1 et 2 CO aux liquidateurs d'une société en nom collectif ou d'une société en commandite (cf. art. 619 al. 1 CO) et par l'art. 240 LP à l'administration de la faillite. Ces compétences consistent à gérer la masse en liquidation, en terminant les affaires courantes, en exécutant les en- gagements, en faisant rentrer les créances de la société, en représentant la société pour les actes juridiques impliqués par la liquidation; les liqui- dateurs doivent également déterminer la masse en liquidation et les créan- ciers participants, puis réaliser et répartir l'actif abandonné aux créan- ciers".53

Pour le surplus, la réglementation spéciale applicable aux banques et négo- ciants se contente d'indiquer que la CFB doit surveiller l'activité du liquida- teur (art. 23quinquies al. 2 LB in fine et 36 al. 2 pbr. 2 LBVM); concrètement, cela signifie que le liquidateur doit informer l'autorité du déroulement de sa mission et faire approuver par celle-là les décisions importantes qu'il prend54.

Afin de réaliser ces objectifs, les liquidateurs pourront notamment requérir des mesures provisionnelles et introduire des actions en responsabilité contre les anciens dirigeants de la société.

La difficulté principale tient à l'activité spécifique des établissements financiers: on ne peut généralement pas leur appliquer des principes de liqui- dation en tous points semblables à ceux retenus pour la plupart des entrepri- ses industrielles et commerciales. Pour certaines opérations, une vision plus

"dynamique" s'impose: notamment, il convient parfois d'attendre le dénoue- ment d'une transaction à moyen terme plutôt que de procéder à une exécution rapide, dans une pure perspective statique.

52 Outre les tâches évoquées dans l'ATF 123 cité ci-dessous, on retiendra la préparation d'un premier bilan au moment de l'entrée en fonction, les appels aux créanciers dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) et la consignation des créances connues mais non annoncées.

53 ATF 123 III 64 S.

54 P.ex. dépôt d'une requête de mise en faillite de la banque ou du négociant (art. 743 al. 2 CO).

(15)

CHRlSTIANcll~~~ ~;t; '\ic\• : . .. · · .·

Pour conclure sur ce<

~~J& li~ ~:~ J~ \\~~~~~ori,

On soulignera que l'art. 84 OFP est la sëule;dispùgitiortàddiffiet

une

liste, non exhaustive, des tâches du gérant dêforid.s ciépl~ce1Il~nfCette règle n'apporte cependant aucun élémentnoûvê~Üqiiârit

âti:k. dêvciiis

généraux des liquidateurs dans les do- maines ba~ëair'è'.~t fînhncierss. Elle tend essentiellement à préciser la double fonctibttdtigéI"aht; .•.

qti1

peut se transformer en véritable liquidateur, selon le résultat de son examen de la situation du fonds.

La mission de l'observateur est définie au cas par cas; elle dépend en effet de la situation de l'établissement et des objectifs poursuivis par la CFB.

La loi sur les banques se contente d'indiquer que "l'observateur surveille

l'activité des organes dirigeants de la banque. Il veille en particulier à l'exé-

cution des mesures ordonnées par la commission" (art. 23quater al. 2 phr. 1 et 2 LB). Sa position lui permet en outre de proposer des mesures concrètes à la CFB56. A titre d'illustration, dans sa première décision CMG Capital Mana- gement Group SA, l'autorité de surveillance avait confié à l'observateur les tâches suivantes:

"Il devra établir un rapport à l'intention de la CFB sur la situation juri- dique et financière et les activités des cinq sociétés qui précisera notam- ment le statut juridique de chacune de ces sociétés (actionnaires, admi- nistrateurs, participations croisées, etc.) et les activités effectivement exercées et évaluera les risques encourus par les investisseurs. Il répon- dra en outre en lieu et place des cinq sociétés à différentes questions énumérées dans le dispositif de la présente décision et relatives à leur activité, ce qui permettra à la CFB de déterminer si cette activité est sujette à autorisation. [ ... ] L'examen approfondi effectué par l'observa- teur permettra également, le cas échéant, d'établir si les transactions exécutées constituent des infractions pénales. "57

Les conclusions de cette mission allaient conduire à la mise en liquidation des sociétés visées58.

Pour accomplir sa mission, l'observateur jouit d'un droit de regard illi- mité dans les affaires, les livres et les dossiers de la banque ou du négociant (art. 23quater al. 2 phr. 3 LB)59. Il peut notamment exiger de la banque ou du

55 Pour une analyse approfondie de cette disposition, cf. DEN ÜTTER (n. 13), art. 60 LFP 10 SS.

56 BODMER (n. 13), art. z3quaœr LB 3.

57 Bull. CFB 33 (1997), p. 19 s., X SA.

58 Cf. Bull. CFB 35 (1998), p. 13, CMG Capital Management Group SA.

59 Cette disposition est applicable directement aux banques et par analogie aux négo- ciants. Sur ce dernier aspect, cf. la décision citée supra n. 57.

(16)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS EN DROIT BANCAIRE ET FINANCIER

négociant tous les renseignements et tous les documents dont il a besoin dans l'exécution de sa tâche60. Ces principes sont à mettre en relation avec l'art.

47 ch. 1 LB, qui inclut les liquidateurs et observateurs dans la liste des per- sonnes pouvant être punies pour une violation du secret bancaire. Par contre, l'art. 43 LBVM - le pendant de l'art. 47 LB pour les négociants - ne men- tionne que le liquidateur. Si l'on s'en tient à une interprétation stricte fondée sur les principes généraux du droit péna161, les observateurs de négociants ne devraient pas tomber dans le champ d'application de cette dernière règle. Au plus, pourrait-on invoquer le fait que les observateurs sont généralement membres d'une "institution de révision agréée" et que les informations obte- nues l'ont été "dans le cadre de [leurs] fonctions" (art. 43 al. l lit. a LBVM);

cette solution nous paraît toutefois aussi peu satisfaisante qu'incertaine. Il semble toutefois que l'on doive plutôt s'acheminer vers un comblement de lacune - non pas tant pour sanctionner l'observateur qui violerait son secret professionnel, que pour protéger les clients du négociant. L'enjeu peut en effet être de taille lorsque l'observateur est appelé à témoigner devant une juridiction civile qui reconnaît le droit au secret, de manière absolue ou rela- tive62.

Le pendant de ce droit absolu au renseignement est l'obligation pour l'observateur de faire rapport à la CFB. La loi sur les banques précise que cette autorité doit être tenue "constamment" au courant63 . En réalité, ils' agit de rapports réguliers64, dont la fréquence est définie en accord avec la CFB65.

A celas' ajoutent des communications ponctuelles, par exemple lorsque l' ob- servateur découvre de nouvelles irrégularités. Par ailleurs, l'observateur adresse un rapport final à la CFB lorsqu'il a terminé sa mission66.

Contrairement au liquidateur, l'observateur n'est pas "autorisé à inter- venir dans l'activité même de l'établissement" (art. 23quater al. 2 LB; ég. art. 59

60 Application analogique des art. 23bis al. 2 LB et 35 al. 2 LBVM. Explicite, art. 59 al. 3 phr. 1 LFP: "requérir tous les renseignements voulus".

6J Principe "nullum crimen, nulla poena sine lege". A ce sujet, cf. p.ex. S. TRECHSELI P. NOLL, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil I (Allgemeine Voraussetzungen der Strajbarkeit), 5ème éd., Zurich (Schulthess) 1998, p. 51 ss.

62 M. AUBERT/ET AL., Le secret bancaire suisse, 3ème éd., Berne (Staempfli) 1995, p. 135 s.

63 En allemand: "erstattet ihr hierüber laufend Bericht". En italien: "egli tiene costante- mente informa ta."

64 Cf. art. 59 al. 2 phr. 2 LFP: "Il fait régulièrement un rapport à l'autorité de surveillance."

65 Pour plus de détails, cf. BODMER (n. 13), art. z3quater LB n° 5.

66 A titre d'illustration, voir Bull. CFB 35 (1998), p. 13, CMG Capital Management Group SA.

(17)

. : .

... •. : .:•:•. •:·.:· ···· · · . .. • · : :: .• . . . • . •.· .. · . • . ... . ··. • . • . . · . • . · . : · ; · ·· · · · . · . . /}:, }t\}., . • . . • . · . ···. • . · . • . ·.··, . · • . . • . • . : . : . ... • . . .. • ::. · , •.·. : .:.•.; ;>.?i!~J:Ji''.?i'') :; /•••N n .i i>

ii•••·J···

. . . .. ··

..

···•c

HRISTIAN

'. \ : •·.· '· ...

B> OVET

n~JW aL

3 phr. 2

L~).rrraut

toutefois iecônnaître que la limite est parfois ténue:

Y

la.CFB

s'

esf~fi p~rticulier estimée fondée à interdire, à des sociétés auxquel-

. i îbsuti

ôbs~tvâfem avait été désigné, de conclure des transactions sans l'auto-

·.·,··.iis<ltibhdêcedemier67.

LeS obsetvatetirs et les liquidateurs ont droit à une rémunération, ainsi qu'au remboursement de leurs dépenses68. Ces frais sont à la charge:

pour les observateurs, des établissements défaillants, c'est-à-dire la ban- que ou le négociant et, en matière de fonds de placement, la direction ou la banque dépositaire qui ne peut imputer ces coûts au fonds (art. 59 al. 4 LFP);

pour les liquidateurs, des établissements ayant fait l'objet de la décision de dissolution, c'est-à-dire à nouveau la banque ou le négociant, mais par contre dans le cas des fonds de placement, le fonds lui-même. La loi contient encore une particularité dans ce dernier domaine: elle donne la faculté à l'autorité de surveillance de faire rembourser au fonds, par la direction ou la banque dépositaire remplacée, tout ou partie des frais découlant de l'activité du gérant (60 al. 3 LFP). Cette règle a un carac- tère spécifique qui tient à la nature et aux particularités structurelles des fonds de placement; elle ne s'applique pas à la liquidation de banques et de négociants.

Ces aspects font l'objet d'une décision formelle de la CFB.

Al' évidence, la mission del' observateurs' achève lorsqu'il a accompli les tâches qui lui ont été assignées: dans le meilleur des cas, une situation conforme à la loi a été rétablie; dans Je pire, l'observateur est remplacé par un liquidateur ou l'administration de la faillite69.

67 Bull. CFB 33 (1997), p. 20, X SA. A ce sujet, cf. ég. DEN ÜTTER (n. 13), art. 59 LFP n° 8 (avec d'autres références). Contra BODMER (n. 13), art. 23quater LB n° 3. DEN ÜTTER (n. 13) montre aussi des réticences (art. 59 LFP n° 7).

68 Cela est prévu expressément dans la loi pour les observateurs de banques et de fonds de placement (respectivement, art. 23quater al. 1 in fine LB et 59 al. 4 LFP). Pour les observateurs de négociants, il faut en revanche recourir à une interprétation analogique de l'art. 35 al. 4 LBVM. Sous réserve de l'art. 60 al. 3 LFP, qui ne traite pas directe- ment de cette question, la réglementation est en revanche silencieuse sur la rémunéra- tion du liquidateur. Quant aux tarifs applicables, il s'agit habituellement de celui des sociétés de révision, éventuellement des avocats, BODMER (n. 13), art. 23quater LB n° 7.

69 Voir ég. les références citées supra n. 31.

(18)

OBSERVATEURS ET LIQUIDATEURS EN DROIT BANCAIRE ET FINANCIER

D. Nature juridique

L'observateur est une personne privée, physique ou morale, au bénéfice d'une délégation del 'autorité de surveillance70. Dans les limites de sa mission, il est investi d'un mandat officiel et est soumis aux principes généraux du droit administratif(p.ex. légalité et proportionnalité).

Par contre, le statut du liquidateur est double:

sur le plan du droit public, sa désignation émane de la CFB et son acti- vité est soumise à la surveillance de cette autorité (art. 23quinquies al. 2 in fine LB et 36 al. 2 phr. 2 LBVM). Il est un auxiliaire de la CFB71. Si besoin est, l'art. 84 al. 3 et 4 OFP vient confirmer sans ambiguité ce statut: d'une part, la CFB peut donner au gérant des instructions pour sauvegarder les droits des investisseurs; d'autre part, les décisions prises par le gérant peuvent faire l'objet d'un recours à l'autorité de sur- veillance 72;

sur le plan du droit privé, il répond de ses actes comme un liquidateur désigné selon le droit commun73.

E. Régime de responsabilité

Comme 1 'observateur n'intervient pas directement dans la gestion de 1 'éta- blissement bancaire ou du négociant, il ne peut pas être qualifié d'organe (art.

23quater al. 2 in fine LB)74. Sa responsabilité ne peut donc se fonder que sur les règles régissant la réparation du dommage causé par des actes illicites (art. 41 ss CO).

Il en va différemment dans le domaine des.fonds de placement où l' ob- servateur est soumis au même régime de responsabilité que les personnes exerçant une fonction active dans la gestion du fonds, la distribution de ses

70 P. MooR, Droit administratif, vol. III: L'organisation des activités administratives;

Les biens de ! 'Etat, Berne (Staempfli) 1992, p. 91 ss.

71 K. AMONN, "Die Aufgaben des Sachwalters nach dem Bundesgesetz über die Anlagefonds", Wirtschafi und Recht 22/I 970, p. 57. ATF 100 lb 110, Denner AG.

72 Il faut souligner qu'il s'agit de véritables décisions administratives au sens de l'art. 5 PA. Voir DEN ÜTTER (n. 13), art. 60 LFP n° 7.

73 A ce sujet, cf. la section suivante.

74 Cf. supra section II, C.

(19)

CHRISTIAN Bo VET

parts ou sa liquidation (art. 65 LFP)75_ Pourtant, l'observateur d'un fonds de placement a les mêmes prérogatives et limites que ses collègues en charge d'une banque ou d'un négociant (art. 59 al. 3 LFP)76 . Ni les travaux prépara- toires ni la doctrine ne donnent la moindre explication quant à cette diver- gence77. Ce constat n'est pas étonnant, puisqu'il n'existe a priori auclUl motif justifiant ce régime différencié.

Les incohérences ne s'arrêtent pas là: alors que la responsabilité du li- quidateur d'une banque et d'un fonds de placement fait l'objet d'une disposi- tion spéciale (respectivement art. 43 LB et 65 LFP), celle du liquidateur d'un négociant est ignorée par la loi sur les bourses. Ce silence n'a que peu de conséquences pratiques lorsque le négociant est organisé sous la forme d'une société anonyme: les règles précitées, qui posent les conditions matérielles de la responsabilité, sont calquées sur l'art. 754 al. l C078. Le régime de la prescription varie dans la mesure où l'action en responsabilité contre l' obser- vateur ou le liquidateur d'un fonds de placement se prescrit par dix ans à compter du jour où le dommage s'est produit, mais par une année au plus à compter du jour du remboursement d'une part (art. 67 LFP). Par contre, les délais de prescription sont identiques pour les banques et les négociants or- ganisés sous forme de sociétés anonymes (délai absolu de dix ans et délai relatif de cinq ans; cf. art. 45 LB et 760 CO). Pour le surplus, on rappellera que le Code ne prévoit pas de régime particulier de responsabilité pour les liquidateurs de sociétés en nom collectif (art. 582 ss CO) ou en commandite (art. 619 CO).

L'un des aspects les plus intéressants dans cette matière tient aux limites mises par le Tribunal fédéral aux compétences des liquidateurs pour agir en responsabilité contre certains tiers. En effet, selon une jurisprudence

75 Sur cette règle, cf. P. FORSTMOSER, in P. FORSTMOSER (édit.), Kommentar zum schweizerischen Anlagefondsgesetz, vol. I, Zurich (Schulthess) 1997, art. 65 LFP.

76 Cf. supra section II, C.

77 CONSEIL FÉDÉRAL, Message concernant la révision de la loi fédérale sur les fonds de placement, FF 1993 I 255. P. FORSTMOSER (n. 75), art. 65 LFP n° 70 ss. Tout au plus, ce dernier auteur indique que l'extension du champ d'application personnel de cette nonne de responsabilité vise à inclure les personnes en relation directe avec le fonds et ses parts. Idem, n° 71.

78 On rappellera simplement, si cela est nécessaire, que ces conditions sont l'existence d'un dommage, la violation d'un devoir ou d'une obligation, une faute et un lien de causalité. A ce sujet, cf. p.ex. FORSTMOSERiMEIER-HAYOz!NOBEL (n. 10), p. 419 SS.

(20)

OBSERVATEURS ET LlQUlDATEURS EN DROIT BANCAIRE ET FINANCIER

constante79, la banque en liquidation n'a pas qualité pour agir en réparation du dommage subi par les créanciers à la suite d'une surveillance déficiente de la CFB ou de fautes commises par les réviseurs bancaires dans l'accomplis- sement de leurs tâches80. En effet, "les réviseurs bancaires, qui ne sont pas un organe de la banque81 , n'encourent pas, envers les créanciers sociaux, une responsabilité fondée sur les art. 41 ss LB, mais sur l'art. 41 CO. [ ... ] les prétentions en dommages-intérêts des créanciers sociaux envers les réviseurs bancaires sont des créances contre des tiers"82. Une cession fiduciaire, par certains créanciers en faveur de 1' établissement en liquidation, est nulle dans la mesure où elle constitue une fraude à la loi et crée une inégalité de traite- ment entre les créanciers cédants et les non cédants83.

F. Relations avec d'autres lois

La réglementation financière ne vit pas une existence isolée, entièrement sé- parée du reste du droit. On vient de voir par exemple que les règles ordinaires de la responsabilité aquilienne sanctionnaient les éventuels manquements des observateurs de banques et de négociants (art. 41 ss CO). Il y a ainsi plu- sieurs interactions entre différents groupes de normes. En particulier:

Les dispositions bancaires spéciales obligent par exemple le juge de la fai1lite ou l'autorité de concordat à consulter la CFB avant de nommer l'administration de la masse ou du concordat d'un établissement ban- caire84. Ce principe devrait notamment s'appliquer lorsqu'une décision

79 ATF 123/1997 III 60, X SA c. Y. en liquidation concordataire. Eg. ATF 106/1980 lb 357 et 117/1991 II 315. Cpr art. 84 al. 2 OFP qui prévoit que "le gérant fera valoir les prétentions des investisseurs et établira les faits qui justifient la responsabilité de la direction, de la banque dépositaire ou d'autres personnes à l'égard des investisseurs".

A ce sujet, cf. DEN ÜTTER (n. 13), art. 60 LFP n° 20 ss.

80 Incidemment, on notera que cette jurisprudence permet d'éviter un conflit d'intérêts pour le liquidateur lorsqu'il a été désigné par la CFB ou lorsqu'il est l'ancien réviseur de la banque en liquidation (art. 18 ss LB). Sur ces questions, cf. ég. P.-L. MANFRINI,

"Réflexions au sujet de l'indépendance des réviseurs bancaires", in B. KNAPPIX.

ÜBERSON (édit.), Problèmes actuels de droit économique, Mélanges en l'honneur de C.-A. Junod, Bâle/Francfort (Helbing & Lichtenhahn) 1997, p. 259.

81 ATF 117/1991II315.

82 ATF 123/1997 III 63, X SA c. Y. en liquidation concordataire.

83 ATF précité, p. 63 ss.

84 Art. 50 du Règlement d'exécution de la loi sur les banques et les caisses d'épargne (RS 952.821). Ce texte est reproduit in BF/12-6.

Références

Documents relatifs

• Si le Régulateur doit « entrer » dans les sociétés cotées car il doit protéger le marché, qui est l’associé minoritaire lui- même, alors la Régulation et la.

Si l'Autorité des marchés financiers fait connaître son intention de procéder à la notification des griefs, le procureur de la République financier dispose d'un délai de quinze

L’arrêt retient un premier chef de responsabilité de la société fiduciaire qui, en rai- son de la relation de confiance établie entre les parties, aurait dû “signaler qu’elle

Un tel contrat de conseil en placements peut être conclu avec la banque ou, plus souvent, avec une société spécialisée dans la vente de conseils en matière de gestion de fortune,

22 Sur la notion de prestation de consommation courante en matière de contrats de ser- vices financiers selon la LDIP et le CPC, voir Romy (n.. portant sur un bien destiné à un

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la question de savoir si le client d’une banque jouit de la qualité de consommateur doit être examinée selon la position de cette

Les notes obtenues dans l’université partenaire aux enseignements suivis lors d’une même année universitaire en application de la convention de coopération peuvent être

13 LPCC fut introduit : les gérants de fonds suisses sont assujettis à autorisation et les gérants de fonds étrangers qui le souhaitent peuvent également demander