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THESE DE DOCTORAT DE L ETABLISSEMENT UNIVERSITE BOURGOGNE FRANCHE-COMTE PREPAREE A L UNIVERSITE DE BOURGOGNE

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THESE DE DOCTORAT DE L’ETABLISSEMENT UNIVERSITE BOURGOGNE FRANCHE-COMTE PREPAREE A L’UNIVERSITE DE BOURGOGNE

Ecole doctorale n°592 Ecole doctorale LECLA

Doctorat de Langues, Littératures et Civilisation des pays de langues européennes, mention Langues, littératures et civilisations anglaises et anglo-saxonnes

Par

Monsieur Serge Bienvenue MUKONG

Analyse conversationnelle, morpho-syntaxique et intonative des marqueurs discursifs dans le discours politique : cas des débats présidentiels et des

talkshows télévisés.

Thèse présentée et soutenue à l’université de Bourgogne -Franche-Comté le 23 novembre 2020.

Jury

Mme. Gaudy-Campbell Isabelle Professeur, Université de Loraine Présidente Mme. Pennec Blandine Professeur, Université Toulouse Jean Jaurès Rapporteur

Mme. Férré Gaelle Professeur, Université de Poitiers Rapporteur

Mme. Debras Camille Maître de Conférences, Université Paris Nantère Examinatrice M. Szlamowicz, Jean Professeur, Université de Bourgogne -Franche-Comté Directeur de thèse

©2020

(2)

À ma tendre maman

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Remerciements

Je voudrais de prime abord, remercier de tout cœur mon directeur de thèse, Monsieur le Professeur Jean Szlamowicz, pour avoir accepté de me tenir la main tout au long de cette belle expérience. Monsieur Szlamowicz a cru en mon projet dès le départ, a facilité ma venue en France ainsi que mon admission à l’Université de Bourgogne. Grâce à sa disponibilité, ses conseils et son encadrement scientifique, ces quatre années passées sous sa direction m’ont façonné sur le plan scientifique. Je lui en suis véritablement reconnaissant.

Mes remerciements vont également à l’endroit des Professeurs Gaudy-Campbell, Camille Debras et Sandrine Oriez, pour leurs conseils, appréciations et suggestions dans le cadre du Comité de Suivi de Thèse. Leurs conseils et encouragements m’ont permis à chaque fois d’améliorer mon travail et de rester sur la bonne voie.

Je remercie aussi les membres de mon jury, pour l’intérêt qu’ils ont bien voulu porter à mes travaux.

Un merci particulier à AMAZOUZ Djegdjiga, pour son aide dans la manipulation et la prise en main des logiciels de transcription et d’analyse Transcriber et PRAAT.

Merci à ma tendre épouse, ma famille et à mes amis, pour le soutien et les encouragements.

Enfin, merci à Monsieur et Madame Waffo, pour leur soutien.

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Université Bourgogne Franche-Comté 32, avenue de l’Observatoire

25000 Besançon

Résumé

Titre : Analyse conversationnelle, morpho-syntaxique et intonative des marqueurs discursifs dans le discours politique : cas des débats présidentiels et des talkshows télévisés.

Mots clés : Marqueurs discursifs, Oral, discours, analyse conversationnelle, débat présidentiel, gestualité

Résumé : Cette thèse propose une analyse morphosyntaxique, prosodique et conversationnelle des marqueurs discursifs dans le débat présidentiel et dans le talkshow politique télévisuel.

L’objet d’étude principal est le rôle des marqueurs discursifs dans la structuration séquentielle et dans l’organisation énonciative du débat présidentiel aux Etats-Unis. Les marqueurs discursifs, en corrélation avec la gestualité et l’intonation, participent considérablement à la construction de l’échange entre les différents participants au débat. Pour atteindre ses objectifs, cette thèse convoque plusieurs cadres théoriques traitant de l’oral spontané (la Macro et Micro-Grammaire de Benveniste 1990 et Berrendoner 1990, la Grammaire Fonctionnelle Dik 1997 ; la Grammaire Thétique de Kaltenbôck et al. 2011, la Théorie du Paragraphe Oral de Morel et Danon-boileau 1998) et met un accent particulier sur la Grammaire Emergente ou syntaxe cognitive d’Alexander Haselow 2015, 2016, 2017. Pour l’analyse, l’approche proposée par Haselow (2017) a été adoptée car elle émane de la prise en compte de toutes les autres approches citées plus haut tout en y ajoutant les théories cognitives.

Sur le plan de l’organisation de l’interaction pendant le débat présidentiel ou les talkshows, les marqueurs discursifs, accompagnés de la gestualité et de l’intonation, jouent un rôle important dans la gestion des tours de parole et dans l’organisation séquentielle des actions. Sur le plan énonciatif, ils interviennent, accompagnés des gestes manuels et du regard, dans l’expression de l’emphase, de la reformulation et de l’opposition. Ils permettent également aux candidats d’attirer l’attention de leurs interlocuteurs dans le but d’introduire une justification, un changement d’optique, un discours rapporté, ou dans l’optique d’interrompre ces derniers, ou tout simplement pour rassurer les potentiels électeurs. Ils permettent aussi aux candidats d’anticiper ou de prendre en compte le point de vue de leur interlocuteurs (passifs ou actifs), en s’inscrivant ou en se positionnant dans une logique d’acceptation ou de rupture avec ces derniers.

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Université Bourgogne Franche-Comté 32, avenue de l’Observatoire

25000 Besançon

Abstract

Title: A conversational, morpho-syntactic and intonation analysis of discourse markers in political discourse: A case study of presidential debates and televised talkshows.

Keywords : Discourse markers, Oral discourse, Conversation analysis, Presidential debates, gestures.

Abstract: This thesis proposes a morphosyntactic, prosodic and conversational analysis of discourse markers in presidential debates and televised political talkshows in the United States of America. The main object of the study is the role of discourse markers in the sequential structuring and in the enunciative organisation of presidential debates in the United States of America. Discourse markers, in correlation with gestures and intonation, contribute significantly to the construction of the verbal exchange between the various participants in mediated political discourse. To achieve its goals, this thesis draws on several theoretical frameworks dealing with spontaneous speech (Benveniste and Berrendonner’s Macro and micro-grammar, Dik’s Functional Grammar; Kaltenbock et al. Thethical Grammar, Morel and Danon-Boileau’s Oral Paragraph theory) and lays a particular emphasis on Alexander Haselow's Emergent Grammar or Cognitive Syntax. For the analysis, the approach proposed by Haselow (2017) was adopted because it considers all the other approaches mentioned above and takes into account cognitive theories.

Concerning the organisation of interaction during presidential debates or talkshows, discourse markers, accompanied by gestures and intonation, play an important role in the management of turn takings and in the sequential organization of actions. On the enunciative level, in correlation with manual gestures and gaze, they participate in expressing emphasis, reformulation and opposition. They also help candidates to draw the attention of their interlocutors in order to introduce a justification, a change of point of view, a reported speech, or with the aim of interrupting them. Discourse markers in presidential debates, also allow speakers to anticipate or consider the point of view of their interlocutors (passive or active) by positioning themselves in a logic of acceptance or opposition with them.

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6

Table des matières

Remerciements………… ... 3

Résumé……….. ... 4

Abstract………….. ... 5

Table des matières ... 6

Liste des abréviations ... 11

Index des concepts ... 12

Liste des tableaux ... 13

Liste des figures ………...14

Liste des annexes ... 16

CHAPITRE 1: INTRODUCTION GENERALE ... 17

1. Objet de la recherche et plan général de l’étude ... 17

2. Considérations terminologiques... 23

2 . 1. L’oral dans l’interaction ... 23

2 . 2. Pour une grammaire de l’oral spontané ... 26

3. Les marqueurs discursifs ... 41

3 . 1. Qu’est-ce qu’un marqueur discursif ? ... 41

3 . 2. Caractéristiques des marqueurs discursifs ... 45

3 . 3. Fonctions des marqueurs discursifs ... 52

3 . 4. De l’identification et de l’annotation des marqueurs discursifs dans le corpus ... 53

3 . 5. La grammaticalisation des marqueurs discursifs ... 56

4. Conclusion ... 61

Partie I : CONSIDERATIONS THEORIQUES ET METHODOLOGIQUES ... 63

CHAPITRE 2: CONSIDERATIONS THEORIQUES ET METHODOLOGIQUES.... 64

1. Le débat présidentiel médiatisé et le Talkshow : deux dispositifs particuliers ... 64

1 . 1. Le débat présidentiel ... 66

1 . 2. Le Talkshow télévisé ... 69

2. Présentation et constitution du corpus ... 70

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7

2 . 1. Pourquoi analyser les débats présidentiels et les talk-shows ? ... 70

2 . 2. Description du corpus ... 72

2. 1. 1. Les débats télévisés de la campagne présidentielle 2016 aux USA ... 73

2. 1. 2. Les talkshows télévisés des candidats à la présidentielle ... 74

3. Transcription du discours en interaction ... 75

3 . 1. Transcription orthographique et structuration thématique des différents débats .... 75

3 . 2. La segmentation du corpus ... 78

3. 1. 1. La question du choix l’unité de base ... 78

3. 1. 2. La segmentation du corpus en Turn Constructional Unit ... 79

3 . 2 . 2 . 1 Définition de la TCU ... 79

3 . 2 . 2 . 2 La segmentation du corpus en TCU ... 82

3 . 3. L’organisation interne de la TCU ... 86

3 . 4. Traitement audio/vidéo du corpus ... 87

4. L’analyse prosodique du corpus dans le logiciel Praat ... 90

4 . 1. L’alignement forcé du corpus ... 91

4 . 2. Calcul du débit et du registre des locuteurs ... 92

4 . 3. L’analyse prosodique des marqueurs discursifs dans les TCUs. ... 94

5. L’annotation de la gestualité dans le corpus ... 95

6. Conclusion ... 100

CHAPITRE 3: ANALYSE CONVERSATIONNELLE ET GESTUALITE DANS L’INTERACTION ... 101

1. L’analyse conversationnelle et le discours en interaction... 101

1 . 1. L’interaction au centre de tout échange humain ... 101

1 . 2. Les bases conceptuelles de l’analyse conversationnelle ... 103

1. 1. 1. L’organisation des tours et des prises de parole ... 103

1. 1. 2. L’organisation des séquences et des actions dans l’interaction ... 106

1. 1. 3. La réparation ... 111

2. La gestualité dans l’interaction ... 116

2 . 1. Typologie et phrase gestuelle ... 118

2 . 2. La gestualité dans la construction des tours et la prise de parole ... 122

2 . 3. La gestualité dans le discours politique ... 124

3. Conclusion ... 129

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8

Partie II :……… 131

ANALYSE MORPHOSYNTAXIQUE ET INTONATIVE DES MARQUEURS DISCURSIFS……….. ... 131

CHAPITRE 4: SYNTAXE ET POSITIONNEMENT DES MARQUEURS DISCURSIFS………. 132

1. Quelques rappels ... 132

2. Les marqueurs discursifs dans le champ initial et le champ final ... 136

2 . 1. Les marqueurs discursifs dans le champ initial ... 140

2. 1. 1. Well ... 140

2. 1. 2. You Know ... 142

2. 1. 3. And /But ... 145

2. 1. 4. So ... 148

2. 1. 5. Because ... 152

2 . 2. Les marqueurs discursifs dans le champ final ... 155

3. Les marqueurs discursifs au sein l’unité structurelle ... 159

3 . 1. I mean ... 163

3 . 2. You know ... 165

3 . 3. And/But ... 166

3 . 4. Because ... 168

4. Conclusion ... 172

CHAPITRE 5: LA PROSODIE DES MARQUEURS DISCURSIFS DANS LE DISCOURS POLITIQUE... 174

1. Définitions ... 174

2. Les théories de l’intonation de l’anglais ... 178

2 . 1. Le modèle britannique de l’intonation ... 178

2 . 2. Le modèle américain de l’intonation ... 179

3. Fonctions de la prosodie dans les débats présidentiels et les talkshows ... 180

3 . 1. La fonction linguistique de la prosodie dans le discours politique ... 180

3. 1. 1. La construction des TCUs ... 181

3. 1. 2. La construction des tours de paroles ... 182

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9

3. 1. 3. L’organisation des prises de parole ... 183

3 . 2. La fonction paralinguistique ... 188

4. La prosodie des marqueurs discursifs dans le corpus ... 191

4 . 1. Les marqueurs discursifs dans le champ initial et le champ final ... 192

4. 1. 1. Les marqueurs discursifs dans le champ initial : Profil prosodique et fonctionnement ... 193

4. 1. 2. Les MD dans le champ final : Profil prosodique et fonctionnement ... 196

4 . 2. Les marqueurs discursifs dans l’unité structurelle ... 198

4. 1. 1. Profil prosodique de You know au sein de l’unité micro-grammaticale ... 198

4. 1. 2. Profil prosodique des marqueurs discursifs reliant deux unités micro- grammaticales……….199

5. Conclusion ... 201

Partie III : ANALYSE CONVERSATIONNELLE DES MARQUEURS DISCURSIFS DANS LE DISCOURS POLITIQUE MEDIATISE ... 204

CHAPITRE 6: CORRÉLATION MARQUEURS TEXTUELS ET GESTUALLITE DANS LA GESTION DES TOURS DE PAROLE ... 205

1. La dynamique interactionnelle et gestuelle dans l’organisation interne et la délimitation des TCUs ... 206

1 . 1. Les marqueurs discursifs dans la prise de parole ... 206

1 . 2. Rôle des marqueurs discursifs et de la gestualité dans l’organisation interne des tours de parole ... 211

2. Garder la parole : Ignorer les Transition Relevance Place ... 216

3. Conclusion ... 220

CHAPITRE 7: CORRÉLATION MARQUEURS DISCURSIFS ET GESTUALITE DANS LA CONSTRUCTION ENONCIATIVE DU DEBAT ... 221

1. Marqueurs rhétoriques et gestualité dans l’interaction ... 223

1 . 1. De l’expression de la spécification et de l’opposition : cas des marqueurs Actually, I mean et In fact. ... 224

1 . 2. Organiser sa pensée pour convaincre : La reformulation dans les tours de parole 233 1. 1. 1. I Mean et la reformulation ... 234

(10)

10

1. 1. 2. In fact et la reformulation ... 238

1 . 3. Spécification et reformulation : un continuum ? ... 240

2. Le rôle des marqueurs interpersonnels et de la gestualité dans la gestion mutuelle des échanges. ... 241

2 . 1. Garder l’attention de l’autre et prendre en compte le public : Le cas de Look ... 242

2 . 2. Rassurer ses destinataires : le cas de Believe me ... 252

3. Les marqueurs discursifs et la gestualité dans les interruptions : Cas de Well et And ... 258

4. Conclusion ... 267

CONCLUSION GENERALE ... 274

BIBLIOGRAPHIE ... 279

PRESENTATION DES ANNEXES ... 307

(11)

11

Liste des abréviations

CF : Champ Final CI : Champ Initial

IPA : Alphabet Phonétique International IPU : unités inter pausales

MAUS : Munich Automatic Segmentation System MD : Marqueur discursif

NBC National Broadcasting Company

TCU : Turn Constructionan Unit : Sacks, Schegloff et Jefferson ,1974 TRP : Transition Relevance Place (Sacks et al., 1974)

US : Unité Structurelle

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12

Index des concepts

Basic Discourse Unit: Degand, 2009 Colocution/Co-énonciation: Culioli 1990

Dialogisme (inter/ intra-locutif): Bakhtine , 1929 Emergent grammar: Hopper 1987, Haselow 2016

Grammaire fonctionnelle (Functional Grammar): Dik, 1997

Grammaire Thétique (Thetical Grammar): Kaltenbock, Heine et Kuteva, 2011 Mémoire de Travail (Working Memory): Miller, Galanter, Pribram 1960 Micro/Macro-grammar: Haselow, 2016

Micro/Macro-syntaxe: Berrendonner 1990, Blanche-Benveniste 2003 On line syntax: Auer Peter, 2009

Paragraphe oral: Morel et Danon-Boileau, 1998

Turn Constructional Unit: Sacks, Schegloff et Jefferson, 1974

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13

Liste des tableaux

Tableau 1: Typologie des MD : adaptation de Crible (2014) ... 52

Tableau 2 : Taxinomie fonctionnelle des MD ... 55

Tableau 3 : Répartition des MD dans le corpus ... 56

Tableau 4 : Potentiels MD ... 90

Tableau 5: Débit et taux d'articulation des locuteurs ... 93

Tableau 6: Registre moyen des locuteurs ... 94

Tableau 7: Nombre de TCUs par thématique ... 94

Tableau 8: Extrait de l'analyse automatique du registre des TCUs ... 95

Tableau 9: Typologie des gestes sélectionnés pour l'analyse (McNeill 1992 ; Cosnier 1997 ; Kendom 2004 ; Colleta et al. 2009). ... 121

Tableau 10 : Registre moyen des candidats lors des débats ... 189

Tableau 11: débit d'articulation des locuteurs (corpus on_immigration) ... 189

Tableau 12 : Principaux MD et leurs fonctions dans le débat présidentiel ... 273

(14)

14

Liste des figures

Figure 1 : Les trois domaines d'études importants pour l'analyse de l'oral spontané

(Haselow 2017 :54) ... 34

Figure 2 Premier débat présidentiel 2016 Trump/Clinton ... 68

Figure 3 : Deuxième débat présidentiel 2016 Trump/Clinton... 68

Figure 4: capture d’écran interface de Transcriber ... 88

Figure 5: Capture d’écran, interface de Sublime Text Manager ... 89

Figure 6 : Capture d’écran, interface de Praat après alignement forcé ... 92

Figure 7: Les gestes manuels du corpus ... 96

Figure 8 : Schéma d'annotation de la gestualité ... 99

Figure 9: Capture d’écran, interface d'Elan ... 99

Figure 10 : Modèle de la gestion de la parole (adapté de Sacks et al. 1974) ... 104

Figure 11 : Expansion séquentielle ... 108

Figure 12 : Forme L ... 125

Figure 13 : Poignée de précision ... 125

Figure 14 : Trump-Bras levés et paumes ouvertes ... 126

Figure 15 : Clinton-bras levés et paumes ouvertes ... 126

Figure 16 : Le pointage ... 127

Figure 17 : Le tranchage ... 127

Figure 18 : Le bec ... 128

Figure 19 : Poignée de précision et pointage ... 128

Figure 20: Distribution des principaux MD dans le champ initial des TCUs ... 155

Figure 21: Distribution des principaux MD dans le champ final ... 159

Figure 22: Distribution des MD dans l'unité structurelle ... 171

Figure 23: Positionnement des MD dans les TCUs ... 172

Figure 24: Illustration de la F0 dans une TCU ... 177

Figure 25: Phrase intonative (Donald Trump Talks media polls) ... 179

Figure 26: Chute de F0 d'une TCU finale ... 185

Figure 27: Contour final montant TCU ... 186

Figure 28: contour final avec F0 constante ... 187

Figure 29 : Poignée de précision accompagnant la démonstration de Clinton... 226

(15)

15 Figure 30: avant et pendant la reformulation ... 236 Figure 31 : mouvement des mains avant et pendant la reformulation ... 240 Figure 32: Déictique accompagnant Believe me ... 257

(16)

16

Liste des annexes

ANNEXE 1 : CORPUS ET CONVENTION DE TRANSCRIPTION ... 307 ANNEXE 2: LISTE DES EXTRAITS ANALYSES PAR CHAPITRE ... 309 ANNEXE 3: PRESENTATION DU REGISTRE DE CHAQUE UNITE DU CORPUS ... 313

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17

CHAPITRE 1: INTRODUCTION GENERALE

1. Objet de la recherche et plan général de l’étude

Ce travail s’inscrit dans le sillage de l’analyse conversationnelle ou de l’analyse des interactions verbales dans un cadre bien particulier : le genre médiatique télévisé, et plus précisément le débat politique. Analyser des interactions verbales dans le genre médiatique télévisuel relève d’une activité assez complexe et sensible étant donné le dispositif énonciatif particulier de la télévision qui obéit à des règles précises qui peuvent de ce fait, à un niveau ou un autre, influencer l’utilisation du langage ou les interventions des différents interlocuteurs. Ainsi, la communication dans les débats politiques se trouve être fondamentalement différente de celle des conversations familières1 , principalement au niveau du cadre de l’interaction, des enjeux de celle-ci et de la gestion des tours de parole2. Toutefois, il serait bon de préciser que le cadre institutionnel du genre médiatique télévisuel n’exclut pas le fait qu’il s’agisse bien d’un échange oral avec des séquences plus ou moins spontanées (nous y reviendrons de façon détaillée dans la section suivante). Il sera donc question pour nous de fonder notre analyse principalement sur deux genres médiatiques télévisuels, notamment le débat politique télévisé (dans notre contexte il sera question des débats de campagne présidentielle entre les deux candidats à la présidence américaine de 2016) et le talkshow télévisé3. Il est tout à fait évident que ces deux genres présentent chacun des particularités qui les caractérisent et les différencient l’un de l’autre. Leur choix a été motivé par notre désir de constituer un corpus vidéo qui présentait les candidats à la présidentielle 2016 aux Etats Unis d’Amérique dans des situations réelles d’interactions verbales pendant la campagne. Nous avons fait le choix d’un corpus filmé parce qu’il nous permettait de faire nos analyses selon une approche multimodale en prenant en

1 Nous concevons la conversation familière ici dans la sens que lui donne Traverso (2016), « un échange langagier à caractère réciproque, organisé par tours de parole dont l’alternance n’est pas prédéterminée. La finalité de la conversation n’est pas interne et les participants y poursuivent un objectif commun. La conversation possède une temporalité particulière du fait qu’elle impose à chaque participant l’abandon de son temps individuel et ordinaire pour l’entrée dans un temps commun. Elle peut se dérouler en tout lieu mais affectionne les lieux permettant la meilleure proximité spatiale et psychologique. Elle fonctionne enfin sur la base d’une égalité de principe entre les participants ». Cette définition rejoint celle de Riou et Axelriade (2017) pour qui « les conversations familières sont de l’oral spontané, et concernent des dyades de participants ayant des liens familiaux ou amicaux forts, ce qui implique une longue histoire conversationnelle ».

2Cet aspect a été révélé par les nombreux travaux de Sacks (1987, 2010), Schegloff (1979,1988,1999,2007), Schegloff et al. (1977,1974) ; et Heritage (1989, 2005).

3Il s’agira ici des émissions de talkshow pendant lesquelles les candidats à la présidentielle étaient invités.

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18 compte les indices mimo-gestuels, prosodiques et morphosyntaxiques du corpus.

Nous avons également été motivés par le caractère direct et confrontationnel des débats télévisés de la campagne présidentielle qui laisse très peu de place au montage et donne beaucoup plus de place à l’improvisation et à la spontanéité.

La campagne présidentielle 2016 aux Etats Unis d’Amérique aura été l’une des plus virulentes en termes de communication et d’échanges verbaux entre les deux principaux candidats. Chacun essayant à son niveau de polir son image et d’asseoir sa crédibilité, non seulement à travers le choix des éléments linguistiques et paralinguistiques, mais aussi à travers leur gestualité, car il est évident qu’en pleine campagne présidentielle et surtout en direct à la télévision, le moindre détail (parole, geste ou attitude) peut avoir une influence sur les potentiels électeurs. Les marqueurs discursifs (abrégés MD dans la suite du travail) font partie de ces éléments linguistiques abondamment et stratégiquement utilisés par les différents candidats ou débatteurs dans la co-construction du discours. En effet, que ce soit pendant les face à face de campagnes présidentielles ou pendant les émissions de talkshow, du moment où il s’agit du discours oral, les MD participent abondamment à la cohérence et la cohésion du discours des différents participants. Depuis quelques années les chercheurs ont développé un intérêt particulier pour les MD, étudiant ainsi leurs fonctions dans différents contextes et ce en utilisant une multitude d’approches (Ducrot 1984, Schiffrin1987, Fraser 1996, Blakemore 2004, pour ne citer que quelques-uns). Toutefois, jusqu’aujourd’hui la communauté scientifique n’arrive toujours pas à s’accorder sur les frontières ou les éléments qui doivent être considérés comme MD et aussi, malgré la littérature abondante sur ceux-ci, très peu d’auteurs se sont penchés sur leur utilisation dans le discours politique médiatisé en général et sur le genre télévisuel en particulier, ou encore sur la possible corrélation qu’il pourrait y avoir entre l’utilisation des MD, l’intonation et la gestualité dans le genre politique télévisuel (dans les prochaines sections nous reviendrons largement sur les différentes approches théoriques des marqueurs discursifs dans la communauté scientifique).

Notre projet de recherche part de l’observation selon laquelle lors des débats télévisés des élections présidentielles, les différents candidats font abondamment usage des MD4

4 Notons que leur spécificité par rapport à la langue ordinaire, réside dans le type de MD présents dans le débat présidentiel et aussi dans leur utilisation. Comme nous le verrons dans la suite dans notre analyse, contrairement à la langue ordinaire, les MD de type énnonciatif sont plus présents dans le débat politique. Ceci s’explique davantage par la nature même du débat qui est avant tout, conflictuel. Ainsi, ce facteur influence fortement le type

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19 dans la construction de leur argumentaire, associant ainsi régulièrement à ceux-ci des indices intonatifs et posturo-mimo-gestuels récurrents. Les différents candidats débatteurs utilisent donc cette quasi-synchronisation des gestes dans leurs différentes interventions pour mieux se faire comprendre ou mieux exprimer leurs sentiments, raison pour laquelle il serait important de prendre en compte cette dimension dans l’analyse de la langue car celle-ci est produite dans un contexte précis. Des précédents travaux consacrés à la gestualité ont révélé l’indissociabilité qui existe entre discours, gestualité et intonation dans les conversations (Ferré 2004, 2011, 2019 ; les nombreux travaux de McNeil et de Kendon5, Boutet 2008, Cosnier1982 ; Mondada 2007), toutefois ceux-ci ont été conduits sur des corpus de conversations orales à bâtons rompus loin du cadre institutionnel ou des contraintes liées à la télévision. Nous souhaitons toutefois préciser que notre travail est avant tout fondé sur l’analyse ou la description de la langue à l’aide des outils que nous offre l’analyse conversationnelle. Notre objectif n’est donc pas de rendre compte des débats eux-mêmes. Ainsi, la prise en compte de la gestualité est motivée par le rôle qu’elle joue dans l’analyse des interactions verbales et plus précisément dans la structuration des tours de parole et dans une certaine mesure, dans la stratégie discursive des interlocuteurs.

Nous proposons donc d’organiser notre travail autour de trois objectifs principaux : Il s’agira dans un premier temps de proposer une analyse morphosyntaxique et prosodique des MD dans le débat présidentiel et le talkshow politique télévisuel. Dans cette optique nous définirons et proposerons un profil syntaxique général des MD dans le discours politique en nous basant principalement sur la syntaxe cognitive telle qu’approchée par Haselow dans ses différents travaux (2011, 2016a, 2016b, 2017). Nous partirons de l’hypothèse selon laquelle l’utilisation ou le positionnent des MD dans l’oral spontané est étroitement lié aux tâches ou aux objectifs communicatifs que les interlocuteurs souhaitent réaliser pendant leur tour de parole. Nous analyserons donc les MD sous les angles macro-grammatical et micro- grammatical. En outre, à l’aide des analyses prosodiques que nous mènerons, nous proposerons également un profil prosodique des MD dans notre corpus. Il sera principalement question pour nous ici, en plus de la définition du profil prosodique des MD dans le discours politique

de MD présent dans le débat car chaque candidat cherche principalement à convaincre les potentiels électeurs. La dimension intersubjective étant fortement présente dans ce type de situation, les marqueurs énonciatifs jouent un rôle important. Notons aussi que la spécificité des MD dans le débat présidentiel réside également dans le rôle de certains marqueurs textuels tels qu’And par exemple, qui au-delà de leur utilisation dans la structuration de l’énoncé, sont beaucoup plus utilisés dans une stratégié de conservation ou de prise de parole.

5 Kendon 1967, 1972, 1988 ; McNeil 1992, 2016

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20 médiatique, d’analyser le rôle de la prosodie des MD dans l’organisation et la gestion de l’interaction.

Notre deuxième objectif consistera à mener une analyse conversationnelle des différents marqueurs dans le corpus. Nous analyserons leur rôle dans la construction des tours de parole et des actions, dans la reformulation et dans l’argumentaire des différents intervenants dans le débat politique télévisé de la campagne présidentielle américaine 2016 ainsi que dans les talkshows. Nous partirons ainsi de l’hypothèse selon laquelle les candidats à l’élection présidentielle pendant les débats et leurs interventions dans les talkshows, se servent des MD pour accompagner la construction de leur argumentaire, pour interrompre, s’opposer ou jeter du discrédit sur l’autre dans le but de gagner la sympathie du public ou celle des éventuels électeurs. Il convient néanmoins de mentionner que nous ne mettrons aucunement l’accent sur le contenu politique des différentes interventions, cette dimension ne faisant pas partie de nos objectifs.

Le troisième et dernier objectif de notre étude consistera à analyser la corrélation entre MD, gestualité et intonation en montrant que ces trois éléments sont étroitement liés et participent considérablement à la construction de l’échange verbal entre les différents participants dans le discours politique médiatisé, car l’interaction est un tout qui ne saurait se limiter à l’usage exclusif de la parole. Nous partageons donc le point de vue selon lequel les indices posturo-mimo-gestuels, intonatifs et discursifs contribuent à la structuration de l’information et de la communication orale et ne sauraient être dissociées de la parole humaine (Morel et Bouvet 2002, Ferré 2004, Szlamowicz 2001).

Il est toutefois important de préciser que le choix des débats présidentiels et des talkshows télévisés ne vise en aucun cas une opposition ou une étude comparée de ces deux genres. Notre choix de les associer dans le corpus a surtout été motivé par le fait qu’ils ont tous été produits dans le cadre de la campagne présidentielle de 2016 aux USA et que les principaux protagonistes à chaque fois étaient Donald Trump et Hillary Clinton. Nous pourrons certes de temps en temps, dans le cours de l’analyse évoquer au besoin certaines différences dans l’utilisation des MD entre les deux genres. Aussi, il est important de préciser que des deux corpus que nous utiliserons (débats et talkshows), le corpus des débats est le principal.

Ce travail est divisé en trois grandes parties, précédées d’une introduction générale.

Dans l’introduction, il sera question de circonscrire notre travail dans le cadre de l’oral spontané en passant d’une part en revue ses spécificités et d’autre part, en proposant l’approche grammaticale qui sera adoptée dans notre analyse. Il sera principalement question à ce niveau

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21 de revenir sur les différentes approches de la grammaire de l’oral spontané et de présenter de façon plus ou moins détaillée celle que nous avons adopté pour notre étude.

Nous passerons également en revue de façon détaillée la notion de MD en présentant les différentes contributions des auteurs sur cette notion ainsi que leurs approches théoriques. Ceci nous permettra d’opposer toutes ces approches dans le but d’adopter celle qui cadre le mieux avec nos objectifs. Cette analyse nous permettra de revisiter les principales caractéristiques des MD en remettant en question la pertinence de certaines d’entre elles, notamment leur supposée optionalité syntaxique, les notions de multifonctionnalité et de multicatégorialité, ou encore la question de la vériconditionnalité. Nous proposerons ainsi à la suite de ce passage en revue, une définition que nous avons adaptée pour mieux atteindre nos objectifs. Il sera également question de présenter la méthodologie d’identification des MD dans notre corpus et leur annotation.

Nous nous pencherons également sur le phénomène de grammaticalisation et proposerons une taxinomie des MD que nous aurons adaptée et adoptée pour notre analyse.

La première partie sera consacrée à la méthodologie et à la définition de certains concepts clés pour notre étude. Il sera en effet question de faire la lumière sur notre corpus, sa nature et son traitement. Nous présenterons également dans le cadre de notre démarche méthodologique les différents outils informatiques dont nous nous sommes servis pour la transcription du corpus, pour le traitement audio-visuel et l’analyse prosodique des données. En outre, nous mettrons l’accent sur les notions essentielles sur lesquelles repose notre analyse. Il était important de revenir de façon détaillée sur les théories d’analyse conversationnelle ou d’analyse d’interactions verbales en passant en revue les bases sur lesquelles reposent l’analyse du discours en interaction, à savoir les notions de tours de parole, d’organisation séquentielle des actions ou encore de réparation. Nous présenterons également et définirons dans cette partie la notion de gestualité. Il sera d’ailleurs question ici à l’aide des travaux existants, non seulement de nous intéresser au rôle de la gestualité dans l’interaction mais aussi de définir et de présenter la typologie de la gestualité.6 que nous avons adoptée pour notre analyse.

La deuxième partie du travail est consacrée à l’analyse syntaxique et intonative des MD dans le corpus. Sur la base de la syntaxe cognitive ou de la grammaire émergente que nous aurons préalablement définie, nous procèderons de façon systématique tour à tour à l’analyse syntaxique des MD dans le corpus en définissant à chaque fois leur profil dans les trois parties

6Les nombreux travaux de McNeill, Kendon, Mondada, Duncan, Rosano et Ferré sur la gestualité nous ont été d’une très grande utilité dans la mesure où ils constituent de véritables socles sur lesquels s’appuyer pour tout travail sur la gestualité dans l’interaction.

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22 qui constituent la Turn Constructional Unit (TCU) ; à savoir le champ initial, le champ final et l’unité structurelle. Nous montrerons donc par nos analyses qu’au niveau du champ initial, les MD ne se positionnent pas de manière aléatoire puisqu’ils s’insèrent dans une linéarité, et qu’ils servent à faciliter la prise de parole, à fixer l’attention de l’interlocuteur, à atténuer ou évaluer le contenu propositionnel de la TCU précédente, ou à se projeter dans ce qui va se dire.

Très peu représentés dans le champ final dans le débat présidentiel, nous montrerons qu’ils introduisent dans la plupart des cas une unité micro-grammaticale ou un incrément qui modifie la force illocutoire ou le contenu épistémique de l’unité structurelle. Et ce, en établissant un lien discursif entre l’unité structurelle et l’unité qui constitue l’incrément et en participant au renforcement ou à la modification de la certitude épistémique ou illocutoire dégagée dans l’unité structurelle. Nos analyses nous permettrons également de démontrer qu’au sein de l’unité structurelle, les MD se situent soit au sein même des unités micro-grammaticales ou au milieu de deux ou de plusieurs unités micro-grammaticales (dans les cas où l’unité structurelle est composée). A l’aide des exemples tirés du corpus, nous montrerons qu’à cette position, d’une part, ils modifient la certitude épistémique de l’unité micro-grammaticale et « perturbent

» la relation de linéarisation et de dépendance hiérarchique entre les constituants de l’unité, et d’autre part, ils traduisent des relations de causalité, d’opposition ou de continuation entre lesdites unités lorsqu’ils relient deux unités micro-grammaticales au sein de l’unité structurelle.

Ensuite, dans une perspective descriptive, nous procèderons à une analyse intonative des MD dans le corpus après avoir analysé le profil intonatif (débit et registre) de chaque candidat. Cette analyse du débit et du régistre de chaque candidat nous permettra de démontrer la forte implication de ces derniers dans le débat. Nous nous efforcerons à ce niveau à l’aide des analyses intonatives du corpus, de proposer un profil prosodique des MD dans les débats présidentiels et dans les talkshows télévisés. Ainsi, grâce à l’analyse du corpus, nous montrerons que la F0 et l’intensité des MD varient en fonction de leur positionnement dans le tour de parole ou dans la TCU. Nous montrerons également à l’aide des extraits du corpus, que lorsqu’il est précédé d’une marque de travail de formulation telle que la pause, le MD quand il est seul au niveau du champ final, connait une chute de F0 et d’intensité. Aussi, la F0 a tendance à se réinitialiser lorsque les MD relient deux unités micro-grammaticales au sein de l’unité structurelle. Nous relèverons également le fait que, bien que n’étant pas toujours intégrés au contenu prosodique de l’unité structurelle, la prosodie des MD dans le champ initial et le champ final des TCUs joue un rôle capital non seulement dans l’interprétation du message véhiculé par les candidats, mais aussi dans l’organisation même des tours de paroles. Au sein de l’unité

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23 structurelle, ils auront tendance à s’intégrer au contour intonatif de l’unité micro-grammaticale dans laquelle ils se trouvent. Leur profil intonatif sera donc beaucoup plus dicté par le profil général de l’unité structurelle et par l’objectif communicatif que souhaite atteindre le locuteur.

La troisième et dernière partie de notre travail consistera dans un premier temps à mener une analyse conversationnelle des différents marqueurs en mettant l’accent sur les multiples fonctions qu’ils jouent dans l’organisation discursive et énonciative de l’interaction.

Il sera principalement question d’examiner leur rôle dans les mécanismes de prise de parole, de constructions de tours, de construction des séquences et des actions, et dans la dynamique de réparation. Dans un deuxième temps, nous étudierons la co-relation entre MD, intonation et gestualité dans le corpus. Il sera question d’analyser la place des MD dans la phrase gestuelle et de montrer que même inconsciemment les interlocuteurs s’en servent, en plus de l’intonation, pour accompagner leur gesticulation ou encore leur regard en vue d’atteindre leur objectif communicatif. L’analyse de notre corpus nous permettra de montrer que les MD accompagnés de la gestualité, participent considérablement à la mise en place et à la structuration des tours de parole pendant le débat en intervenant non seulement dans la délimitation et dans la mise en relation des différentes TCUs qui peuvent constituer un tour, mais aussi en participant à la construction de la TCU elle-même. Sur le plan énonciatif, nous montrerons que les MD, accompagnés des gestes manuels et du regard, interviennent dans l’expression de l’emphase, de la reformulation et de l’opposition dans le débat présidentiel. En outre, grâce aux analyses que nous mènerons, nous soulignerons le fait que les candidats se servent principalement des marqueurs tels que Look, Believe me et Well non seulement pour attirer l’attention des interlocuteurs dans le but d’introduire une justification, un changement d’optique, un discours rapporté, ou dans l’optique d’interrompre leurs interlocuteurs, ou tout simplement pour rassurer les potentiels électeurs, mais aussi dans le but d’anticiper ou de prendre en compte le point de vue de leurs interlocuteurs (passifs ou actifs) et de s’inscrire ou de se positionner dans une logique d’acceptation ou de rupture avec ces derniers.

2. Considérations terminologiques

2 . 1. L’oral dans l’interaction

Dans le cadre de notre travail, nous avons pensé qu’il était primordial de revenir sur la notion d’oral spontané et sur sa spécificité par rapport à l’écrit. Nous concevons l’oral spontané comme toute parole plus ou moins non préparée, ne disposant d’aucun support écrit, et produite

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« d’instant en instant ou de proposition en proposition » (Szlamowicz 2003, Goffman 1987).

Il s’agit donc ici d’un énoncé oral produit en temps réel dans un contexte précis, loin de toute mémorisation ou de toute lecture à voix haute. Il convient toutefois de préciser le fait que la parole spontanée n’exclut pas la préméditation, car comme le mentionne Kerbrat-Orecchioni (1999), dans certaines situations d’interactions le locuteur planifie d’une certaine façon son propos. La parole spontanée dans certains cas peut être préparée (dans le sens de préméditée).

C’est le cas par exemple dans le débat où les candidats sont parfois appelés à se justifier ou à apporter des réponses aux questions ou aux préoccupations soulevées par leurs interlocuteurs.

Dans de tels contextes, ces derniers préparent dans une certaine mesure leur tour de parole, anticipant ainsi sur le contenu de leur propos. Il convient également de préciser que dans le cas du débat télévisé ou du talkshow, il s’agit certes de l’oral spontané mais avec des spécificités précises en quelques sortes dictées par leur contexte ou leur cadre de production. Dans le chapitre suivant nous reviendrons avec plus de détails sur les particularités orales de notre corpus.

Ayant défini ce que nous entendons par oral spontané, nous procèderons ici à la lumière des différents résultats des travaux de plusieurs auteurs sur l’oral, à une présentation de ses principales caractéristiques. Notons néanmoins que celles-ci peuvent varier en fonction de la nature du contexte dans lequel la parole est produite (séquence de type monologue ou interaction contrôlée comme dans les débats, ou encore les dialogues). 

i. La parole spontanée est produite en temps réel sans possibilité d’être rééditée car sa planification et sa production sont quasi-synchronisées. Il n’y a presque pas de temps entre sa conception et sa réalisation (Auer 2000, 2009,). La parole sort une fois pour toute, rien ne s’efface. Elle peut juste être reformulée et l’information peut être réparée.

ii. La parole spontanée est produite par des interlocuteurs dans des contextes d’interactions en face à face. Les différents interlocuteurs se doivent donc dans de tels contextes de respecter les contraintes liées à l’interaction ou à la conversation, à savoir la gestion des tours de parole, l’organisation séquentielle des actions ou encore la gestion des faces (Sacks, Schegloff et Jefferson 1974).

iii. L’oral spontané comporte une dimension acoustique importante car la plupart des informations importantes pour l’interprétation du message proviennent des indices

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25 prosodiques comme le rythme, l’amplitude, les pauses, l’intensité ou la fréquence fondamentale (Morel et Danon-Boileau 1998 ; Haselow 2017).

iv. La parole spontanée est le plus souvent accompagnée du regard et de la gestuelle. Tous ces éléments participent à la construction du message (Férré 2003, 2019, Debras 2017).

v. L’élaboration discursive de l’oral étant progressive, la parole spontanée contient des marques souvent considérées comme des « ratés » du langage du point de vue de la grammaire de l’écrit mais qui en fait en font sa spécificité. Ainsi, les hésitations, les répétitions, les faux départs, les auto-corrections, les mots inachevés ne sont pas des défauts mais des éléments qui justifient le caractère spontané de l’oral car la parole est dynamique et les énoncés sont construits en temps réel (Linel 2005, Auer 2009, Szlamowicz 2001).

vi. Le discours oral est ponctué, de façon récurrente, de marqueurs à l’ancrage syntaxique et à la portée variables comme les MD, les ligateurs, les ponctuants ou encore les interjections (Szlamowicz 2001 ; Haselow 2017, Gaudy-Campbell et Horgues 2019).

vii. Contrairement à l’écrit, les unités discursives dans l’oral spontané ne sont pas délimitées uniquement par la syntaxe mais bien plus par la prosodie, la pragmatique et dans certains cas par des facteurs mimo-gestuels (Ford et al. 2002 ; Schegloff 1996). On pourra donc dans l’analyse des corpus d’oral spontané rencontrer, en fonction des approches théoriques des chercheurs, des unités à l’oral telles que la Turn Constructional Unit (Sacks, Schegloff et Jefferson 1974), la Basic Discourse Unit (Degand 2009) ou encore le paragraphe oral (PO) (Morel et Danon-Boileau 1998). Toutes ces différentes approches rendent bien compte du fait qu’on ne s’aurait décrire la structure de l’énoncé oral en prenant pour repère la structure de la phrase écrite (pour plus de détails, voir chapitre 2 section 3.2).

viii. La longueur d’un énoncé oral spontané est fonction des capacités mémorielles de l’allocutaire. En effet, la Mémoire de Travail7 de ce dernier lui impose des limites sur la quantité des informations qu’il peut traiter et retenir, considérant le fait que la parole est produite en temps réel (Chaffe 1994 ; Cowan 2001 ; Haselow 2017).

ix. Sur le plan syntaxique, l’oral spontané diffère considérablement de l’écrit dans la

7 En linguistique Cognitive la Mémoire de Travail est une mémoire qui sert à retenir les informations dans un temps court.

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26 mesure où il intervient au-delà de la phrase ou de la proposition telle que définie par la grammaire traditionnelle. La grammaire de l’oral spontané prend en compte non seulement les éléments basés sur les relations de dépendance et de hiérarchie entre les constituants au sein des unités propositionnelles ou micro-syntaxiques, mais aussi les éléments qui interviennent au-delà de la proposition car étant syntaxiquement non intégrés8 à cette dernière. Ces derniers participent à l’organisation conversationnelle et discursive de l’échange (Haselow 2015, 2016, 2017 ; Auer 2009). Dans la section suivante nous reviendrons en détail sur la conception de la grammaire de l’oral que nous avons adoptée dans le cadre de notre travail.

2 . 2. Pour une grammaire de l’oral spontané

Parler d’une grammaire de l’oral spontané revient à dire qu’elle diffère de celle de l’écrit ou encore de la grammaire traditionnelle (la linguistique saussurienne, le structuralisme américain ou encore la grammaire générative de Chomsky entre autres). En effet, plusieurs auteurs ont souligné le fait que l’oral spontané ne saurait être décrit en prenant pour repères les règles définies par la grammaire traditionnelle9 (Berrendonner 1990 ; Benveniste 1984, 1990 ; Linel 2005, 2009 ; Auer 2009 ; Hopper 1987, 1998, 2004 ; Morel et Danon-Boileau 1998 ; Dik 1997, Kaltenböck et al 2011 ; Haselow 2015, 2016, 2017 ; Gaudy-Campbell 2016). En outre, la grammaire de l’oral spontané ne saurait se limiter à la sémantique, à la phonologie et à la morphosyntaxe car elle prend également en compte les phénomènes discursifs.

Elle englobe ainsi tous les éléments linguistiques, communicatifs et cognitifs qui participent à la structuration et à l’organisation de l’énoncé (Traugott 1995 ; Diewald 2006, 2011).

Parlant de morphosyntaxe, Linell (2005, 2009) mentionne le fait que contrairement à l’analyse de l’écrit, les règles et principes établies par la grammaire traditionnelle sont inappropriés pour la description des structures produites à l’oral spontané car plusieurs phénomènes inhérents à l’oral (par exemple les MD, les interjections, les ligateurs, les

8 La non-intégration syntaxique ici concerne uniquement la hiérarchisation des constituants car les éléments qui interviennent au-delà de la proposition sont intégrés syntaxiquement à l’énoncé.

9 Comme exemples récents de description syntaxique et grammaticale qui ferait l’impasse sur cette différence entre oral/ écrit on notera la syntaxe minimaliste introduite par Chomsky dans le cadre de la syntaxe X-barre et présentée dans les multiples travaux de Radford (2004, 2009), ou encore l’Introdution à la Linguistique Contemporaine de Moeshler et Auchlin (2009). Ces derniers présentent d’ailleurs la syntaxe comme ayant « pour objet d’étude l’unité de la linguistique par excellence, la phrase, ainsi que les règles présidant à l’organisation des groupes de mots dans la phrase ». Cette position mériterait d’être clarifiée car il faudrait encore se rassurer de la conception qu’ont les auteurs de la notion de phrase.

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27 répétitions, les faux départs etc.) produits en temps réel ne sauraient être décrits ou analysés en prenant pour repères la syntaxe de la phrase. Notons qu’il s’agit ici de la phrase à l’écrit par opposition à l’énoncé à l’oral. En effet les unités descriptives ainsi que leur délimitation à l’oral sont différentes de celles de la phrase à l’écrit. Là où la phrase à l’écrit ne considèrera que la syntaxe comme critère de délimitation, l’oral prendra en compte, en plus de la syntaxe, d’autres facteurs tels que l’intonation, la gestualité et certains éléments qui lui sont propres tels que les MD. Le fait est que certains de ces éléments ne sont d’ailleurs pas présents dans la langue écrite (le cas de certains MD qui sont considérés comme redondants à l’écrit ou encore les phénomènes d’hésitations)10. Au vu de cette réalité, plusieurs chercheurs ont jugé nécessaire de mettre sur pied ou d’élaborer un cadre permettant d’analyser la structure des énoncés spontanés. Nous nous proposons de nous appuyer dans le cadre de notre travail, principalement sur les multiples travaux d’Haselow sur la structure de l’oral spontané anglais (2013, 2015, 2016, 2017), travaux s’inspirant eux même de ceux de Auer 2009 (on line syntax) et de Hopper 1987, 1998, 2004, 2011 (Emergent grammar).

Dans ses nombreux articles et, plus précisément, dans son ouvrage publié en 2017, Haselow propose un modèle pour la description grammaticale de l’anglais oral spontané. Il part ainsi de l’observation selon laquelle plusieurs phénomènes linguistiques propres à l’oral spontané ne sont que partiellement pris en compte par les approches grammaticales génératives car ces dernières analysent la langue plutôt du point de vue de l’écrit. Il évoque donc le cas des constituants extra-clausal11 (ou extra-propositionnels) qui apparaissent en dehors de la proposition à laquelle ils sont attachés et qui n’entretiennent par conséquent pas de relation syntagmatique ou syntaxique avec cette dernière. Il s’agit ici des éléments tels que les MD, les unités parenthétiques, les particules finales, ou les incréments pour ne citer que ceux-ci. En plus de ces éléments extra-clausal, Haselow identifie d’autres structures linguistiques propres à l’oral spontané telles que les ellipses, les auto-corrections, les mots inachevés et les répétitions

10 Précisons que certains éléments jouent à la fois le rôle de connecteurs à l’écrit et de marqueurs discursifs à l’oral.

C’est le cas du MD but qui est une conjonction de coordination à valeur oppositive à l’écrit mais qui joue le rôle de MD ayant une valeur d’addition ou de recadrage à l’oral. Ce passage de conjonction à marqueur discursif se justifie par le phénomène de grammaticalisation (voir la fin de ce chapitre sur la grammaticalisation des marqueurs discursifs). Aussi, quand bien même les MD sont présents dans un texte écrit, il s’agit en effet de ce que Gadet (2007) désigne par l’oralisation, c’est-à-dire cette volonté pour certains auteurs de se rapprocher des faits de l’oral dans leurs écrits (le cas des contes ou des journaux).

11 Terminologie de Dik 1997 désignant les éléments dans l’oral spontané qui ne sauraient être analysés en tant que proposition ou segments de proposition. Ils ne jouent jamais un rôle déterminant dans la structure de la phrase qui les intègres et leur interprétation est étroitement liée à la pragmatique.

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28 qui sont analysées à tort par la syntaxe de la phrase comme des erreurs ou des anomalies.

Il souligne le fait que ces expressions considérées comme non-intégrées ont longtemps été marginalisées12 dans la description grammaticale en dépit du rôle crucial qu’elles jouent dans la structuration interne de l’énoncé et dans la cohérence du discours, d’où la nécessité de proposer une approche grammaticale pour pallier ces manquements. Dans l’exemple ci-dessous tiré de notre corpus les éléments en gras représentent les constituants extra-clausal.

Extrait 1:D_thinking about it

1 Clinton well actually (0,530) erm i have thought about this quite a bit (0,176)

2 Trump (xxx) yeah for thirty years

3 Clinton and i have erm (0,190) (xxx)+ [laughs]

4 well not quite that long

Il est néanmoins important que nous observions la difficulté qu’a la description de l’oral à se détacher de l’écrit du fait même de la terminologie employée qui dans une certaine mesure, prend pour référence la syntaxe de l’écrit et plus précisément la proposition (constituants extra- clausal ou non-intégrés par rapport à la proposition). Nous pensons qu’un énoncé oral est un tout, raison pour laquelle nous préférons utiliser la terminologie unité structurelle en lieu et place de l’appellation unité propositionnelle (voir chapitre 4 sur la syntaxe des MD).

L’unité structurelle de notre point de vue se rapprocherait ici du rhème13 tel que présenté dans la théorie du paragraphe oral en français (Morel et Danon-Boileau 1998) dans le sens où nous la considérons comme le noyau de l’énoncé (de la Turn Construction Unit dans notre travail). Comme le précise De Rossi (1999), le rhème « représente le cœur informatif14 de l’énoncé, siège de l’opération de véridiction et par voie de conséquence foyer du contenu

12 Comme exemple contemporain de descriptions grammaticales excluant ce type de constituant, voir Tellier (1995, 2003), Éléments de syntaxe du français

13 Les deux éléments présentent néanmoins quelques divergences car l’unité structurelle englobe en plus de ce qui est considéré comme rhème certains éléments du préambule tels que le modus, le cadre ou le support lexical disjoint. Déjà qu’en anglais oral ces trois derniers éléments sont assez rares (voir Szlamowicz 2003, Ferré 2004).

Dans notre approche de la TCU, le préambule (champ initial) dans la plupart des cas ne se limite qu’aux éléments extra-clausals et plus particulièrement aux MD et aux interjections.

14 Nous n’excluons pas le fait que les autres éléments de la TCU contiennent ou donnent aussi des informations indispensables à la compréhension et à l’interprétation de l’énoncé. D’ailleurs les éléments situés en dehors de l’unité structurelle sont porteuses d’informations sur les rapports intersubjectifs entre les locuteurs.

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29 propositionnel ». Il est également le segment qui permet au locuteur de se positionner15 par rapport à la pensée qu’il attribue à son co-locuteur (Morel et Danon Boileau 1998).

Notons également que dans l’exemple présenté plus haut, il ne s’agit évidemment pas de phrases mais de l’unité de segmentation des énoncés oraux que nous avons choisie dans le cadre de notre étude, à savoir la Turn Construction Unit (voir chapitre suivant). La phrase ou la proposition pour Haselow ne saurait en effet être considérée comme l’unité grammaticale de référence pour analyser des phénomènes ou des séquences discursives. Il partage ainsi le point de vue de Berrendonner (1990, 2004) qui souligne la difficulté qu’a la phrase à segmenter et à analyser des séquences discursives car les éléments non-intégrés que nous avons présentés dans l’exemple précédent ne partagent pas de relations morphosyntaxiques étroites avec la proposition et ne sont par conséquent pas pris en compte dans la grammaire de la phrase.

Pour pallier les difficultés que rencontre la description de la parole spontanée, Haselow propose un modèle grammatical de l’anglais oral spontané qu’il appelle Grammaire Emergente (Emergent Grammar), terme emprunté à Hopper (1987, 1998). Cette approche conçoit la grammaire comme « un système de connaissances permettant à des locuteurs d’engager des rapports interlocutifs avec des allocutaires et de produire ainsi du texte, c’est-à-dire un fragment de discours informé de sens dans un but spécifique et dans un cadre contextuel donné.

Ce système de connaissances inclut la capacité à produire et à manipuler (revoir, interrompre, reconfigurer) des suites d’unités linguistiques porteuses de divers types de sens » (Haselow 2016a : 516). Notons que les suites d’unités linguistiques dont il est question ici englobent à la fois les éléments dont les constituants sont liés par des relations morphosyntaxiques (la proposition, le rhème), mais aussi des éléments qui sont syntaxiquement disjoints. Elles sont construites en temps réel et s’adaptent aux conditions contextuelles et cognitives qui les entourent.

“the structure of emergent speech cannot be properly understood and analyzed without considering the cognitive conditions under which it is produced as these conditions serve as an important explanatory factor. Spontaneous spoken language is produced in real time with a minimal time gap between thinking and

15 Pour Morel et Danon-Boileau (1988, p.45), le rhème « exprime toujours un positionnement singularisé par rapport au jugement que l’on prête à autrui ».

16 Traduction de la rédaction de Modèles linguistiques, http://journals.openedition.org/ml/1895

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30 verbalizing the product of thought – that is, speech planning and speech production occur in quasi-simultaneous way”. Haselow (2017 : 21)

Ces précisions ayant été faites, Haselow (2016a, 2016b, 2017) opte pour une organisation binaire ou dualiste de la grammaire de l’oral anglais spontané.

Il soutient ainsi l’idée selon laquelle la grammaire de l’oral spontané serait composée de deux systèmes qui interagissent entre eux ; l’un prenant en compte les relations de dépendance et de hiérarchie entre les constituants internes de l’unité syntaxique, et l’autre prenant en compte les éléments syntaxiquement non-intégrés du point de vue de la grammaire des constituants, autonomes des points de vue morphosyntaxiques et sémantiques, et relevant de l’organisation conversationnelle et discursive. Le premier système ici renvoie au domaine de la micro- grammaire et le second renvoie à celui de la macro-grammaire. En effet, cette conception dualiste de la grammaire a été abordée par plusieurs chercheurs sous différents angles.

Nous pouvons ainsi citer les travaux de Berrendonner (1990) et de Blanche-Benveniste (2003) pour qui la grammaire s’étend aux domaines de la micro-syntaxe et de la macro-syntaxe.

La micro-syntaxe ici « étudie les configurations rectionnelles liées aux catégories dans les frontières de la phrase à l’écrit ou de la clause à l’oral » (Gaudy-Campbell et al 2016), tandis que la macro-syntaxe décrit « des relations qui ne peuvent être décrites à partir des rections de catégories grammaticales » (Blanche-Benveniste et al. 1990 : 113). Toutefois, il serait convenable de préciser que la conception de la macro-syntaxe diffère chez ces deux auteurs car comme le précise Avanzi 2007, chez Blanche-Benveniste la macro-syntaxe dont le noyau constitue l’unité minimale, se limite strictement au domaine de la syntaxe et rend compte des productions orales et écrites plus ou moins longues dans lesquelles les constituants ne sont pas régis par des relations de dépendance gouvernées par le verbe, contrairement à la conception de Berrendonner qui en plus du domaine de la syntaxe, prend en compte la pragmatique. En effet, il identifie la clause qui relève du domaine de la micro-syntaxe et qui rend compte des liens de séquentialité et de détermination entre les morphèmes et les syntagmes.

L’enchainement des clauses formera la période17 et ce sont justement les liens entre les clauses qui relèvent du domaine de la macro-syntaxe car ils font appel aux présupposés, à l’implicite, aux indices mimo-gestuels ou encore aux données prosodiques partagées par les interlocuteurs.

17 La période est une unité démarquée par l’intonation. Elle est constituée d’une suite d’une ou de plusieurs énonciations dont la dernière est assortie d’un intonème conclusif signalant ainsi que le locuteur a atteint la fin de son tour de parole.

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31 La critique que l’on peut faire concernant les approches de Blanche-Benveniste et de Berrendonner est que la distinction micro-syntaxe et macro-syntaxe est en fait une extension de la syntaxe traditionnelle. Dans une perspective analytique, ces deux conceptions de la syntaxe ne prennent pas toujours en compte la dimension temporelle de l’oral construit en temps réel loin de toutes règles fixes et préétablies. Ainsi, comme le précise Haselow (2016a :393), le cadre de la micro-syntaxe et de la macro-syntaxe est fondamentalement une approche syntaxique qui cherche à décrire les relations structurelles dans le discours parlé d'un point de vue analytique, sans toutefois prendre en compte les mécanismes cognitifs qui entourent la production du discours.

« Les éléments extra-propositionnels ne relèvent pas d’une syntaxe de niveau supérieur, mais sont vraisemblablement le fait de règles cognitives de production rendant compte de l’ordre dans lequel se manifestent les mécanismes sous-jacents à la construction des énoncés » Haselow 2016b :3

Dans une conception similaire, Dik (1997) propose un modèle de grammaire fonctionnelle (functional grammar, FG) dans lequel il fait la distinction entre la proposition (clause) et les constituants extra-propositionnels (extra-clausal). Ces derniers ne peuvent être analysés ni comme des propositions ni comme des fragments de propositions car ils échappent aux règles grammaticales qui prévalent dans le cadre de la phrase (Kaltenböck et al. 2016). Ils dépendent donc largement du contexte et sont autonomes par rapport à la proposition. Concernant leur positionnement dans l’énoncé, ils peuvent soit se manifester en toute indépendance, soit précéder ou suivre la proposition, ou encore se retrouver à l’intérieur de celle-ci.

“Especially in spoken discourse … we often produce a variety of expressions which can be analysed neither as clauses nor as fragments of clauses. These expressions may stand on their own, or precede, follow, and even interrupt a clause, being more loosely associated with it than those constituents which belong to the clause proper.

These expressions will here be called extra-clausal constituents (ECCs)”. Dik 1997 : 379

Au rang de ces constituants extra-propositionnels, on compte des éléments linguistiques tels que les MD, les interjections, les constructions parenthétiques, les ligateurs etc. Ces éléments non intégrés rentrent également dans la grammaire thétique (TG) telle qu’élaborée par

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32 Kaltenböck, Heine & Kuteva 2011 ; Heine et al. 2013. En effet, ces derniers suggèrent l’existence d’une grammaire thétique (Thetical Grammar) aux côtés d’une grammaire de la phrase18 (les phrases, les expressions, les mots, les morphèmes, ainsi que l’équipement syntaxique et morphologique pour relier les constituants les uns aux autres), les deux étant des composantes d’un domaine grammaticale plus vaste, la grammaire du discours (Discourse Grammar). Cette dernière renvoie ici à toutes les ressources linguistiques disponibles pour construire des textes écrits ou oraux. La grammaire thétique relève du domaine de la macro- syntaxe et joue un rôle important dans la structuration du discours. Les thétiques sont constituées de différentes unités linguistiques qui peuvent soit être autonomes, soit être insérées dans des unités hôtes. Il s’agira ici des constructions parenthétiques, des interjections, des formules d’échange social, des vocatives ou des impératifs (Kaltenböck 2016b :369). Ils sont (i) syntaxiquement non-intégrés ou indépendants de leur entourage co-textuel, (ii) Ils sont détachés du reste de l’énoncé par un marquage prosodique, (iii) Leur sens n’est pas restrictif c’est-à-dire qu’il n’est pas déterminé par la structure sémantique de la phrase d’accueil ou de ses constituants, (iv) ils sont mobiles car ils peuvent occuper n’importe quelle position dans la phrase d’accueil, et (v)leur structuration interne relève de la grammaire de la phrase, mais elle peut être elliptique (Kaltenböck 2016a). L’une des différences majeures entre cette approche et celle de Dik (1997) est qu’elle ne prend pas pour repère la proposition ou ne se définit pas par rapport à celle-ci. Les deux grammaires (thétique et phrastique) qui relèvent de deux domaines différents, sont à égalité et interagissent à plusieurs niveaux.

Pour ce qui est du modèle de Kaltenböck, Heine & Kuteva 2011, Haselow souligne le fait qu’il ne permet pas d'expliquer les modèles de sérialisation récurrents des unités « extra-clausales ».

La grammaire thétique, par exemple, postule une variabilité de placement des éléments thétiques étant donné leur mobilité. Cependant, un examen plus attentif du fonctionnement de l’oral spontané montre que de nombreux éléments qui ne contribuent pas à la grammaire de la phrase ne se produisent pas de manière aléatoire au sein d'une énonciation. Ils ont plutôt tendance à être produits dans des phases temporelles particulières de la construction linéaire d'une énonciation. C’est le cas de certains MD qui se trouveront presque toujours en début d’énoncé ou encore des ligateurs dans la théorie du paragraphe oral (Morel et Danon-Boileau 1998).

18 Ou d’une grammaire des constituants

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