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SOLIDARITÉ GUATEMALA

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Academic year: 2022

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Texte intégral

(1)

Lettre d’information du Collectif Guatemala

Édito :

ÉLECTION DES MAGIS- TRAT.E.S DE LA CC DU GUATEMALA

Par Juliette von Wuthe- nau.

P. 2

COLLECTIF GUATEMALA 21 ter, rue Voltaire 75011 Paris - France Tél. : 07 62 04 01 40 collectifguatemala@gmail.com

www.collectifguatemala.org

Directrice de publication : Isabelle Tauty Chamale

ISSN 1277 51 69 Ont participé à ce numéro : Juliette von Wuthenau, Olivia Blanc, Julie Lefolle, Béatrice Cosentino, Matias Scatolaro

Photo de couverture : ACOGUATE

L’EXTRACTION EN TEMPS DE COVID 19

Traduction par Olivia Blanc

P. 3

ACTUALISATION DES CAS EMBLÉMATIQUES DE JUS- TICE TRANSITIONNELLE AU GUATEMALA

Traduit par Béatrice Cosentino

P. 4

LA CONSULTATION POPU- LAIRE DU PEUPLE XINCA TERNIE PAR UNE VIOLA- TION CONTINUELLE DE LEURS DROITS HUMAINS par Julie Lefolle

P. 5-6

BRÈVES

NOUVELLE COORDINA- TRICE DU COLLECTIF ! ACTUALITÉS DU TERRAIN

P. 7

Numéro 233 Juillet 2021

GUATEMALA

SOLIDARITÉ

(2)

L

e 14 avril dernier avait lieu, au Centre culturel Miguel Ángel Asturias, la céré- monie d’investiture des nouveaux magistrats et magistrates de la Cour Constitutionnelle (CC), nommés pour une période de cinq ans.

La CC, organe décisif de l’appareil judiciaire du pays, a prononcé des sentences impor- tantes dans des cas de corruption, de justice transitionnelle ou encore de campagnes politiques. Avec un processus plus que jamais controversé et opaque, qu’en est-il de la no- mination de ses magistrat.e.s pour la période 2021–2026 ?

Deux nominations —  bien qu’elles ne surprennent pas  — sont particulièrement préoccupantes. Tout d’abord la réélection de Dina Ochoa, nommée par le Congrès dans un processus décrit par les député.e.s d’opposition comme partial, du fait des pressions exercées et de l’absence de débat autour de sa légitimité et de sa proximité au cercle de pouvoir de Giammattei.

Nommée comme magistrate à la CC en 2016 par Jimmy Morales, elle a notamment voté en faveur de la dissolution anticipée de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG), de l’expulsion de l’ambassadeur suédois, et en faveur de la candidature de Zury Ríos, fille de l’ancien dictateur génocidaire Efraín Ríos Montt, à la présidentielle de 2019.

ÉDITO

Par Juliette von Wuthenau

Élection des magistrat.e.s de la Cour

Constitutionnelle du Guatemala

L

a deuxième est celle de Leyla Lemus Arriaga, nommée par l’exécutif (président, vice-prési- dent et conseil des ministres). Lemus Arriaga était secrétaire générale du gouvernement et son nom apparaît de façon récurrente dans des enquêtes pour corruption. Le vice-président, Guillermo Castillo, a d’ailleurs contesté cette décision publiquement lors du conseil des minis- tres, dénonçant le manque de transparence et votant finalement contre Lemus.

En parallèle, l’investiture de la magistrate Gloria Porras a été bloquée par le congrès dans une manœuvre apparente d’entrave à la justice. Porras s’est démarquée par son labeur en faveur de la justice et pour avoir été à la tête du processus visant à lever l’immunité de l’ex-président Otto Pérez Molina, ouvrant la voie à sa mise en examen dans un cas de corruption historique, qui a mené à sa démission et à son incarcération. On ne peut dès lors que s’inte- rroger sur la légitimité de ces deux processus de nomination des magistrat.e.s de la CC. Leur caractère politique, leur tendance à défendre des intérêts politiques personnels et leur corrup- tion notoire relèvent d’un grand danger pour la justice au Guatemala.

Par ailleurs, le nouveau président de la CC, Roberto Molina Barreto, magistrat à la CC de 2006 à 2016 et nommé par la Cour Suprême de Justice (CSJ) est également un personnage néfaste. En 2013, il avait voté pour l’annulation de la sentence de condamnation de Ríos Montt pour génocide et crimes contre l’humanité.

Avec cette nouvelle CC, le contrôle presque total de l’État par les pouvoirs obscurs et criminels du gouvernement et de l’oligarchie guatémaltèque est achevé. À moins d’un mois de sa prise en fonction, cette nouvelle CC corrompue a déjà validé une loi menaçant le travail et l’existence des ONG et associations d’opposition ; et elle a bénéficié des politiciens et oligarques impli- qués dans des affaires de financement illégal de campagnes électorales. Le gouvernement semble ainsi poursuivre ses manœuvres pour toujours plus d’impunité...

Un processus opaque et un pas en

arrière pour l’État de droit

(3)

Solidarité Guatemala

3

n°233 juillet 2021

L’EXTRACTION

EN TEMPS DE COVID-19

Texte original d’ACOGUATE Traduit par Olivia Blanc(1)

A

vec les restrictions imposées par le gouvernement du Guatemala, il est devenu plus difficile de continuer d’œuvrer pour la défense des droits humains, en parti- culier pour les droits territoriaux et environnementaux.

Parallèlement, les actions d’intimidation, de menace et de contrainte contre les dirigeant.e.s autochtones et com- munautaires, ainsi que contre diverses organisations pay- sannes, activistes et notamment journalistes ne cessent d’augmenter.(2)

Au début de la pandémie, différentes organisations de peuples autochtones et de défenseur.e.s de territoire ex- primaient leurs préoccupations concernant la façon dont le nouveau contexte sanitaire pourrait affecter les droits humains et le droit à un environnement sain.(3)

Contrairement à ce que les restrictions ont imposé à la population en général (quant à la distanciation sociale et la cessation de multiples activités), les projets d’extraction - de minéraux ou de construction hydroélectriques - n’ont pas diminué leurs activités dans le pays. Bien au contrai- re, les entreprises transnationales ont maintenu leurs opé- rations durant la crise. De ce fait, l’activité extractive a été reconnue comme un service essentiel, ce qui a permis aux entreprises de continuer leurs opérations. (4)

Dans ce contexte, en juin 2020, différentes organisations internationales ont recueilli des données concernant les tendances sur la continuité des activités extractives du- rant la pandémie à niveau mondial (5). Selon l’étude, une des formes d’approvisionnement de la crise en faveur de l’industrie extractive a été l’instrumentalisation de la pan- démie par les exploitations minières transnationales pour se présenter comme ‘« bienfaiteurs de la société ».

Par exemple, le cas de la mine El Escobal, Minera San Rafael, située dans les territoires du people autochtone Xinka (au sud-est du pays), est cité dans cette étude.

La situation dénoncée, tant par le Parlement du peuple

Xinka que par la résistance pacifique contre les exploi- tations minières d’El Escobal, démontre que, durant la crise sanitaire, l’entreprise Minera San Rafael a distribué de la nourriture à la population de San Rafael Las Flo- res en échange de données personnelles (6). Le peuple Xinka a alerté que, comme cela s’est déjà produit dans le passé, ces informations pourraient « être utilisées afin de démontrer qu’ils ont un certain soutien dans la muni- cipalité de San Rafael Las Flores » (7). Le peuple Xinka a maintenu une longue lutte pour la reconnaissance de son statut de peuple autochtone et, à de nombreuses oc- casions, ils et elles ont dénoncé la répression et la crimi- nalisation à son encontre pour avoir défendu leurs droits, ainsi que pour avoir rendu évident les impacts sociaux, environnementaux et économiques que l’exploitation mi- nière a engendrés. (8)

Il existe de nombreux autres exemples sur la situation [alarmante] que traversent les défenseur.e.s de la terre et du territoire dans le cadre de la crise sanitaire au Gua- temala. Les organisations internationales qui travaillent pour la protection des défenseur.e.s dans les Amériques, comme « Front Line Defenders », ont demandé au gou- vernement du Guatemala de prendre des actions et de surveiller les opérations des entreprises d’extraction mi- nière pendant la pandémie, afin de garantir les droits des communautés et des personnes travaillant dans la défense des droits humains.

À cet égard, ACOGUATE(9) observe que l’accompagne- ment international des personnes défenseur.e.s de la terre et du territoire au Guatemala demeure un instrument im- portant pour rendre visible leur travail, pour accompag- ner leurs parcours, et pour élargir les espaces d’actions pour la défense des droits humains.

1. Texte oiriginal : « Extractivismo en tiempos del Covid-19 », ACOGUATE, 29 décembre 2020, URL: https://acoguate.org/extractivismo-en-tiem- pos-del-covid-19/

2. Felipe Gómez, Jeremías Hernández, Luis Ochoa Fuentes, “Pueblos indígenas en el contexto del covid-19 en Guatemala”, CLACSO, mayo de 2020, URL: .https://www.clacso.org/pueblos-indigenas-en-el-contexto-del-co- vid-19-en-guatemala/

3. CCDA, Nuevo Día, CUC, UVOC, “Economía y agricultura familiar indí- gena y campesina, una oportunidad para la población guatemalteca”, 15 de abril de 2020.

4. Ministerio de Energía y Minas, Acuerdo Ministerial Número 141-2020 Guatemala, 21 de mayo de 2020, URL: https://www.mem.gob.gt/wp-content/

uploads/2020/03/ACUERDO-MINISTERIAL-141-2020.pdf

5. MiningWatch, TerraJusta, Yes to Life Not to Mining, Institute for Policy Studies, War on Want, Earthworks, London Mining Network, “Voces desde

el territorio. Cómo la Industria Minera Mundial se está beneficiando con la pandemia de COVID-19”, junio 2020, URL: https://miningwatch.ca/sites/

default/files/voces_desde_el_territorio_final.pdf

6. “Denuncia ciudadana a través del Parlamento Xinka de Guatemala”, 7 de abril de 2020, https://www.resistescobal.com/denuncia-ciudadana-a-tra- ves-del-parlamento-xinka-de-guatemala/

7. Ibid.

8. Centro de Estudios Conservacionistas (CECON), USAC, Comisión Diocesana de la Defensa de la Naturaleza (CODIDENA), “Desigualdad, Extractivismo y Desarrollo en Santa Rosa y Jalapa”, enero 2019., URL: http://

cdc.usac.edu.gt/wp-content/uploads/2019/03/estudio-de-caso-desigual- dad-extractivismo-y-desarrollo.pdf

9. Projet collectif d’accompagnement international au défenseur.e.s des droits humains dont le Collectif Guatemala fait partie, URL:. https://collec- tifguatemala.org/

©ACOGUATE

(4)

ACTUALISATION DE CAS EMBLÉMATIQUES

DE JUSTICE TRANSITIONNELLE AU GUATEMALA

B

eaucoup de cas de violations graves des droits hu- mains et de crimes contre l’humanité qui ont eu lieu dans le cadre du conflit armé interne (C.A.I) au Guatema- la demeurent dans les tribunaux nationaux du pays. Tous les cas de justice transitionnelle sont chargés de multiples sens, impacts et contenu politique, ce qui continue de fai- re l’objet d’un grand intérêt social. Pour cela, nous avons décidé d’actualiser la situation légale de certains d’entre eux.

En janvier 2016, 8 des 14 militaires à la retraite détenus ont été inculpés pour leur possible implication dans le plus grand cas de disparition forcée d’Amérique latine.

Ce dernier a eu lieu dans la zone militaire 21, connue au- jourd’hui sous le nom de CREOMPAZ (Alta Verapaz). Le lieu a été utilisé comme centre clandestin de détention, torture et exécution de personnes dans le cadre du C.A.I.

À ce jour, 85 fosses clandestines et au moins 565 dépoui- lles de personnes exécutées ont été retrouvées (1). Parmi les personnes détenues, il y avait de hauts commanditai- res comme le chef Benedicto Lucas García qui sera con- damné pour son implication dans des cas tels que celui lié à la famille Moline Theissen.

Le cas CREOMPAZ est arrêté depuis 4 ans dû au grand nombre d’amparos (2) et d’appels déposés qui cherchent à écarter les témoignages d’un nombre important de sur- vivant.e.s. À cela s’ajoutent les retards des tribunaux pro- voqués par la pandémie de la COVID-19 […].

En janvier 2020, Francisco Cuxum Alvarado, ancien mem- bre des Patrouilles d’autodéfense civile de Rabinal (Baja Verapaz) a été extradé depuis les États-Unis d’Amérique (E.-U.A) jusqu’au Guatemala pour avoir été accusé, dans le cadre du cas Violences sexuelles Maya Achí, d’avoir participé à des crimes contre l’humanité contre 35 fem- mes entre 1981 et 1985. L’extradition a permis de réactiver le cas qui était arrêté depuis que les survivantes avaient fait appel de la décision de la Juge Claudette Domínguez de rejeter les charges contre les 6 anciens patrouilleurs en 2019. Les audiences de présentation des preuves contre Cuxum étaient prévues pour mai 2020 mais le procès a souffert de graves retards prenant prétexte de la CO- VID-19.

L’ancien kaibil (3) Gilberto Jordán fait l’objet d’une en- quête pour crimes contre l’humanité et agression sexuelle aggravée dans le cadre de sa participation directe au Massacre de las Dos Erres pour lequel 162 personnes ont été assassinées en 1982. Jusqu’à présent, les cours natio- nales ont uniquement poursuivi cinq anciens kaibiles et un soldat de l’armée. Ces derniers sont liés à ce cas si emblématique pour lequel l’extradition de deux person- nes est encore attendue. L’un d’eux est l’officier supérieur Jorge Vinicio Sosa Orantes qui, selon la déclaration de Gilberto Jordán, est celui qui a donné l’ordre d’assassiner toutes les personnes des Dos Erres. (4)

Le cas emblématique de la famille Molina Theissen, dans le cadre duquel sont jugés les actes de torture et violence sexuelle perpétrés par des membres des forces armées guatémaltèques en 1981 à l’encontre d’Emma Molina Theissen dans la base militaire Manuel Lisandro Barillas de Quetzaltenango et la postérieure disparition forcée de son frère Marco Antonio Molina Theissen, a présenté des avancées. Entre 2015 et 2018, quatre soldats à la re- traite ont été poursuivis en justice. En 2019, les accusés ont fait appel et interposé plusieurs amparos auprès de la Cour Suprême de Justice en avançant l’invalidité et la prescription des charges qui leur ont été imputées.

La date à laquelle la Cour Suprême de Justice rendra une décision quant à ces amparos n’est pas claire. Néan- moins, la possibilité que la sentence de 2018 soit annulée inquiète. Si tel était le cas, l’amparo deviendrait alors un moyen légal détourné pour retarder et faire obstruction aux cas relatifs à la justice transitionnelle. Parallèlement, le cas pénal dans lequel l’avocate Karen Marie Fisher Pivaral accuse la famille Molina Theissen de mentir sur l’état de Marco Antonio se poursuit. La prochaine audien- ce, censée avoir eu lieu en février, est très visibilisée par les médias nationaux, beaucoup plus que le cas contre les membres retraités des forces armées.

Les victimes et survivant.e.s des actes atroces ayant eu lieu durant le C.A.I au Guatemala continuent de se hisser au premier rang pour exiger la vérité et la justice quant à ces crimes. Malheureusement, si la justice nationale est déjà lente, la pandémie de la COVID-19 a provoqué une situation complexe. Plusieurs cas ont souffert de davanta- ge de retards sous l’excuse de l’urgence sanitaire. SweFor (5) rappelle que l’éclaircissement des faits, la vérité et la justice jouent un rôle central dans les processus de guérison collective, mémoire historique et bien-être social du pays. Il est attendu que 2021 soit une année durant laquelle les faits du passé continuent à être éclaircis.

Texte original de SweFor

Traduction par Béatrice Cosentino

1. https://www.ijmonitor.org/2017/06/tied-up-in-appeals-creompaz-enfor- ced-disappearance-case-remains-stalled/

2. L’amparo est un mécanisme juridique qui permet aux particuliers d’exercer une requête directe en contrôle de constitutionnalité. Il est surtout présent dans les systèmes juridiques hispanophones

3. Forces spéciales guatémaltèques

(5)

Solidarité Guatemala

5

n°233 juillet 2021

L

’industrie extractive au Guatemala ne cesse de se déve- lopper et de générer des violations des droits humains, en particulier ceux des peuples autochtones, ainsi que le non-respect de l’environnement. L’année 2020 a été une année particulièrement difficile pour les défenseur.e.s des droits humains au Guatemala. L’unité de protection des défenseurs des droits humains du pays (UDEFEGUA) a enregistré plus de 1  000 agressions, 22 tentatives d’as- sassinats et 15 meurtres de défenseur.e.s. (1) Parmi les victimes de ces violations des droits humains on compte les hommes et les femmes, membres du peuple autochto- ne Xinca, qui se battent contre le mégaprojet El Escobal incluant la mine San Rafael. C’est un projet d’extraction d’or, d’argent, de plomb et de zinc. Il est situé dans le département de Santa Rosa, à 40 kilomètres de la capi- tale. En avril 2013, le ministère des Énergies et des Mines (MEM) a accordé à la compagnie Tahoe Resources une licence d’exploitation du projet minier. L’entreprise cana- dienne Pan American Silver Corp a fait l’acquisition de la compagnie et ainsi du projet minier en 2019.

Les défenseur.e.s Xincas sont la cible d’attaques depuis le début du projet minier et ils et elles sont devenu.e.s la cible de campagnes de diffamation. Ces campagnes médiatiques sont diffusées sur les réseaux sociaux et dans les principales radios du pays dans le but d’influencer l’opinion publique, principalement en niant l’existence du peuple Xinca. De plus, lors des manifestations pacifiques, les résistant.e.s font face à des actions d’intimidation réa- lisées par des agents de sécurité et autres groupes liés à l’entreprise minière.

Après plusieurs recours en justice du Centre guatémal- tèque d’action juridique, environnementale et sociale (CALAS), la Cour suprême du Guatemala a ordonné, en 2017, la suspension provisoire de l’exploitation minière et la réalisation d’une consultation du peuple Xinca. Dans un jugement historique, en date du 3 septembre 2018, la Cour Constitutionnelle a confirmé la décision de la Cour Suprême en reconnaissant l’existence du peuple Xinca et l’obligation pour l’État de réaliser une consultation libre et préalable concernant le projet minier. Ce type de con- sultation est prévu par la Convention 169 de l’Organisa- tion internationale du travail relative aux peuples autoch- tones de laquelle le Guatemala est signataire.

À la suite de ce jugement, le discours de la compag- nie minière a changé et cette dernière a déclaré vou- loir rechercher un dialogue et une réconciliation avec les communautés. Cependant, la compagnie n’a dialogué qu’avec des personnes n’étant pas reconnues comme des

représentant.e.s du peuple Xinca et les membres de la résistance pacifique ont subi de nouvelles agressions. (2) Ils sont devenus la cible d’une nouvelle campagne de di- ffamation diffusée sur les réseaux sociaux et par le biais de tracts distribués anonymement. Cette campagne se base sur des mensonges qui accusent les défenseur.e.s d’être payés pour s’opposer à la mine, d’avoir des ambi- tions politiques ou de promouvoir des actions violentes.

Ces actions de l’entreprise constituent des violations à la décision de la Cour Constitutionnelle qui interdit « toute forme de pression, persécution, extorsion, coercition, dé- formation de l’information, tromperie, ruse, ou tout autre comportement » pouvant influencer l’avis des communau- tés et ainsi vicier leur consentement qui doit être libre, informé et éclairé.

Au niveau national, des campagnes médiatiques génèrent de la confusion quant au rôle de l’exploitation minière dans la consultation, et la résistance pacifique a dénoncé, à plusieurs reprises, l’inaction du ministère des Énergies et des Mines (MEM) et du ministère de l’Environnement et des Ressources Naturelles (MARN) en charge d’assu- rer la continuité du processus de consultation du peuple Xinca.

En 2019, notre projet d’accompagnement aux défenseu- r.e.s des droits humains, ACOGUATE, a relevé un nombre élevé d’incidents de sécurité dans les villes de Casillas et Mataquescuintla situées respectivement dans les dépar- tements de Santa Rosa et de Jalapa. (3) Les membres de la résistance ont fait l’objet d’agressions verbales, de campagnes de désinformation relatives au processus de consultation, de tentatives de cooptation et d’actes de provocation. ACOGUATE accompagne également des fe- mmes membres de la résistance pacifique qui sont souvent invisibilisées. Les femmes, bien qu’elles soient essentielles pour la lutte et la défense des droits de la communauté, sont souvent écartées des positions de leadership. Ces fe- mmes sont pourtant omniprésentes et substantielles, car non seulement elles sont responsables de la cuisine dans les lieux de résistance, mais elles (mères et filles) soutien- nent au quotidien les défenseurs et défendent leurs terres et leur identité au même titre que leurs homologues mas- culins. De plus en plus de femmes sont reconnues comme défenseures des droits humains et du territoire. Elles s’or- ganisent, elles affirment leur volonté de continuer la lutte, et elles informent d’autres femmes sur les risques liés à leur genre. Au sein du parlement Xinca elles ont créé une

« commission de la femme » qui traite de la place des fe-

LA CONSULTATION POPULAIRE DU PEUPLE XINCA TERNIE PAR UNE VIOLATION CONTINUELLE DE LEURS DROITS HUMAINS Par Julie Lefolle

Depuis 2011, les habitants des départements de Jalapa et Santa Rosa luttent pacifiquement contre le mégaprojet El Escobal. Leur résistance pacifique a pour but de faire cesser les violations de leurs droits humains, l’ingérence de l’entreprise minière dans le tissu social des communautés et l’expansion d’un projet minier polluant et nocif pour l’environnement.

(6)

mmes dans la résistance et dans la communauté. En tant que femmes, elles doivent affronter des campagnes de diffamation liées à leur genre et font face à des critiques au sein de leurs propres communautés leur reprochant de délaisser leurs responsabilités « premières » : s’occuper de la maison et des enfants. De plus, les violences sexuelles contre les femmes défenseures et leurs filles sont utilisées comme des techniques d’intimidation par les opposants à leurs combats.

En 2020, les attaques contre les défenseur.e.s continuent.

Les leaders de Mataquescuintla et l’avocat du parlement Xinca, Quelvin Jiménez, ont fait face à des campagnes de diffamation et de criminalisation, à des agressions phy- siques, et à des menaces de mort. Suite à ces actes, des plaintes ont été déposées au Ministère Public (MP) mais elles n’ont pas fait l’objet d’un véritable suivi. Amnesty In- ternational a dénoncé l’inaction de la Police nationale ci- vile qui n’a pas mis en place les moyens de protection or- donnés par le MP, alors que l’avocat Jiménez a fait l’objet d’appels téléphoniques menaçants, d’actes d’intimidation en rentrant chez lui et qu’il a dénoncé la présence d’un homme armé à son domicile. (4) En janvier 2021, Julio David Gonzalez Arángo, membre du parlement Xinca a été la cible d’une attaque à main armée dans sa proprié- té. Lui et son frère ont été sérieusement blessés par balle par un homme ayant des liens supposés avec l’entreprise minière. Plusieurs organisations internationales appellent la procureure générale du Guatemala à diligenter une enquête indépendante et impartiale de cette attaque et sur toute autre agression antérieure visant le peuple Xinca. (5) Trois semaines plus tard, en février 2021, Luis Fernando García Monroy, membre du parlement Xinca, a reçu des menaces de mort dans la commune Aldea El Volcancito.

C’est dans ce climat de violence que le 5 avril 2021, le MEM a convoqué les représentant.e.s titulaires et su- ppléant.e.s de différents secteurs à participer à la pre- mière réunion du bureau du groupe de préconsultation

du projet minier El Escobal. Cette réunion avait pour but de préparer la première session de consultation populai- re, ordonnée par la Cour Constitutionnelle le 3 septembre 2018. Cette session qui devait avoir lieu le 20 avril au siè- ge du parlement du peuple Xinca à Cuilapa, Santa Rosa a été repoussée au 21 mai. Cette session réunira, entre autres, des représentant.e.s du conseil municipal de San Rafael Las Flores, du parlement Xinca, du MARN et de la compagnie Pan American Silver Corp.

Néanmoins, cette première session du bureau de précon- sultation, en application du jugement de la Cour Constitu- tionnelle, est ternie par la continuité des tensions autour du projet minier. Les actes d’intimidation, de violence et de diffamation contre le peuple Xinca ne cessent pas. Le 14 avril 2021, le parlement Xinca a dénoncé une attaque contre l’un de ses 59 représentant.e.s: un homme armé a tiré 3 fois sur la maison d’un défenseur du territoire. ACO- GUATE dénonce l’augmentation des actes d’intimidations et de menaces contre les défenseur.e.s Xinca en 2020 et l’inaction de la police nationale civile chargée de mettre en place des moyens de protection ordonnés par le MP pour protéger les défenseur.e.s Xinca. (6)

1. “Augmentation historique des agressions contre les personnes défenseur.e.s au Guatemala”, 20 novembre 2020, UDEFEGUA, URL: https://udefegua.

org/comunicados/aumento-hist%C3%B3rico-en-agresiones-contra-perso- nas-defensoras-en-guatemala-registra

2. Selon le rapport annuel 2018 d’Acoguate, URL: https://acoguate.org/

wp-content/uploads/2019/05/ACOGUATE-informe-final-2018-peq.pdf 3. Selon le rapport annuel 2019 d’Acoguate, URL: https://acoguate.org/

wp-content/uploads/2020/06/Informe-anual-2019-alta.pdf

4. “Guatemala: Un avocat qui défend le peuple xinca est en danger”, 10 mai 2019, Amnesty International, URL: https://www.amnesty.org/download/

Documents/AMR3403362019FRENCH.pdf

5. Guatemala: Un chef indigène blessé par balle: Julio David González Arango”,25 janvier 2021, Amnesty International, URL: https://www.amnesty.

org/download/Documents/AMR3435722021FRENCH.pdf

6. “L’extractivisme au temps de la COVID 19”, 29 décembre 2020, Acoguate, URL: https://acoguate.org/extractivismo-en-tiempos-del-covid-19/

(7)

Solidarité Guatemala

7

n°233 juillet 2021

BRÈVES

Nouvelle coordinatrice du Collectif Guatemala !

L

e Collectif Guatemala souhaite la bienvenue à notre nouvelle coordinatrice Coline Morterolle ! Depuis son arrivée, au cours de février 2021, Coline s’est très rapidement intégrée à l’équipe et, avec enthousiasme et professionna- lisme, elle a su faire face aux multiples enjeux du poste et aux défis inhérents de la lutte pour les droits humains et pour l’État de droit au Guatemala. Même si cet espace reste bref, nous tenons à te dire bienvenue et merci Coline ! Nous tenons aussi à remercier énormément Yali Sequeira, notre ancien coordinateur, qui nous a accompagné avec force, sérénité et professionnalisme dans cette lutte. Nous te souhaitons la meilleure des chances, Yali, et nous sommes convaincu.e.s que tu continueras à grandir professionnellement.

Nous profitons enfin de cet espace pour rappeler que les sources vitales du Collectif Guatemala sont, certes, les béné- voles, mais que c’est aussi grâce au travail réalisé depuis la coordination (poste à mi-temps) que notre association vit, survit et continue d’offrir une voix et de l’accompagnement international aux défenseur.e.s guatémaltèques des droits humains, de la justice, et de l’environnement.

Encore merci à Yali, Coline et à tou.te.s nos ancien.e.s coordinatrices.teurs. ¡La lucha sigue!

Actualités du terrain !

S

uite à une période d’accompagnement à distance, principalement par téléphone, les accompagnements physiques aux personnes défenseures de droits humains ont repris ! Grâce à l’équipe de quatre volontaires présent.e.s au Guatemala, des accompagnements ont eu lieu dans les régions de Nebaj et Rabinal.

Acoguate, notre partenaire sur le terrain, a par ailleurs poursuivi ses actions de veille et de plaidoyer. Fin mars, une réunion a été organisée avec l’ambassade allemande ainsi que diverses organisations et personnes défenseures des droits humains, afin de rendre visible la situation particulièrement préoccupante des communautés de la microrégion d’Ixquisis et de Finca La Primavera, en Alta Verapaz.

Une réunion de coopération a également été mise en place avec le Bureau technique de coopération de l’Agence de coopération espagnole AECID. Celle-ci ouvre la voie à de possibles coopérations dans le domaine des droits humains, jusque-là peu abordés par l’agence.

Le 8 avril a été l’occasion de présenter, à travers une discussion en ligne, le bulletin d’informations annuel d’Acoguate, présentant la situation relative aux droits humains, les organisations et personnes accompagnées, les stratégies d’ac- compagnement et le travail de l’ONG au cours de l’année. L’événement en ligne a été accompagné d’une discussion autour de la restitution des terres aux peuples autochtones et il est disponible sur la page Facebook d’Acoguate. (1) Le rapport complet est disponible en espagnol et en anglais sur le site web d’Acoguate. (2)

1. https://acoguate.org/informe-anual-2020/ 2. https://facebook.com:/Acoguate/videos/230321828820294

Yo Soy Todas

M a t i a s

S c

a t

o l

a r

o

(8)

LE COLLECTIF GUATEMALA

Qui sommes-nous ?

Fondé en 1979 par des réfugié.e.s guatémaltèques et des militant.e.s français.e.s, le Collectif Gua- temala est une association loi 1901 de solidarité internationale qui a pour objet d’apporter un soutien matériel et moral aux luttes des popula- tions guatémaltèques pour le respect des libertés publiques, des droits humains, de la justice sociale et de l’environnement. Il est constitué de bénévo- les et d’une coordinatrice sur lesquels repose la vie de l’association.

lesactivitésducollectifauguatemala

•L’accompagnement international

— des populations autochtones victimes du conflit armé, im- pliquées dans des procès contre les responsables de crimes de génocide, crimes contre l’humanité, disparitions forcées et violations sexuelles,

— des personnes et organisations menacées du fait de leurs activités de défense des droits humains et des droits collectifs (droits des peuples autochtones et défense du territoire).

Comment ?

— à la demande des groupes, victimes ou témoins menacés,

— en recherchant et en préparant des volontaires qui reste- ront au minimum 6 mois sur le terrain.

Pourquoi ?

— pour établir une présence dissuasive,

— pour avoir un rôle d’observateur,

— pour relayer l’information.

Les accompagnateurs/trices sont des volontaires majeur.e.s, de tous horizons, désirant s’engager sur le terrain. Des ses- sions d’information et de préparation ont lieu en France avant le départ. Au Guatemala, les accompagnateurs/trices sont intégré.e.s au projet international d’accompagnement ACO- GUATE.

lesactivitésducollectifenfrance

•L’appui aux organisations de la société civile guatémaltèque qui luttent pour plus de justice et de démocratie

— en relayant des dénonciations de violations des droits humains,

— en organisant des campagnes pour soutenir leurs revendica- tions,

— en recherchant des financements pour soutenir leurs projets

— en recevant en France et en Europe des représentant.e.s de différentes organisations pour leur permettre de rencontrer des décideurs/euses politiques ainsi que d’autres mouvements sociaux et de défense des droits humains.

•L’information et la sensibilisation du public français Sur quoi ?

— la situation politique et sociale au Guatemala,

— la situation des droits humains,

— l’action des organisations populaires, autochtones et paysannes.

Comment ?

— par la diffusion d’une lettre d’information trimestrielle, Solida- rité Guatemala,

— par l’organisation ou la participation à des conférences, débats, projections documentaires,

— par des réunions mensuelles ouvertes à toute personne intéres- sée,— par la diffusion d’informations via les réseaux sociaux (Twitter, Facebook),

— par l’organisation de réunions de plaidoyer.

• Le travail en réseau avec différents types de partenaires présents au Guatemala

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