• Aucun résultat trouvé

DEPOUPAGE ADMINISTRATIF DE LA VILLE DE LUBUMBASHI

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "DEPOUPAGE ADMINISTRATIF DE LA VILLE DE LUBUMBASHI "

Copied!
33
0
0

Texte intégral

(1)

TABLE DES MATIERES

AVERTISSEMENT……….………. 6

DEPOUPAGE ADMINISTRATIF DE LA VILLE DE LUBUMBASHI ...7

INTRODUCTION GÉNÉRALE ...8

Parcours et immersion de recherche ... 8

Objectifs de l’étude ... 12

Contexte et problématique ... 13

Hypothèses ... 16

Méthodologie de recherche ... 17

Recrutement des enquêteurs, formation et collecte des données ... 19

Entretiens dans les ménages ... 20

Construction de l’échantillon ... 23

Catégorisation des ménages selon leur statut socio-économique ... 25

Traitement et analyse des données ... 28

Les interactions enquêteurs et informateurs ... 28

Limites de la recherche ... 30

Subdivision du travail ... 30 CHAPITRE 1. CADRAGE THEORIQUE : MENAGES ET SOLIDARITES…Erreur ! Signet non défini.

1.1 Introduction ...Erreur ! Signet non défini.

1.2 Théories sur les notions de la famille et du ménageErreur ! Signet non défini.

1.3 Regards rétrospectifs de la famille à Lubumbashi.Erreur ! Signet non défini.

1.4 Famille et liens de parenté ...Erreur ! Signet non défini.

1.5 Discussion sur la notion de solidarité ...Erreur ! Signet non défini.

1.5.1 Don gratuit comme paradigme de la solidarité ..Erreur ! Signet non défini.

1.5.2 Représentations collectives de la solidarité ...Erreur ! Signet non défini.

(2)

1.6 Conclusion ...Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE 2. STRUCTURES SOCIODEMOGRAPHIQUES ... Erreur ! Signet non défini.

2.1 Introduction ...Erreur ! Signet non défini.

2.2 Caractéristiques des ménages échantillonnés ...Erreur ! Signet non défini.

2.2.1 Volume de la population et nombre de personnes par ménageErreur ! Signet non défini.

2.2.2 Catégories des informateurs ...Erreur ! Signet non défini.

2.2.3 La composition des ménages ...Erreur ! Signet non défini.

2.2.4 Structure par âge et sexe de la population ...Erreur ! Signet non défini.

2.3 Le chef de ménage : niveau d’études et activités économiquesErreur ! Signet non défini.

2.3.1 Niveau d’instruction ...Erreur ! Signet non défini.

2.3.2 Caractéristiques économiques de chef de ménageErreur ! Signet non défini.

2.4 Caractéristiques des personnes dépendantes ...Erreur ! Signet non défini.

2.4.1 Enfants du ménage ...Erreur ! Signet non défini.

2.4.2 Les dépendants dans les ménages ...Erreur ! Signet non défini.

2.4.3 Niveau d’instruction des personnes hébergées ..Erreur ! Signet non défini.

2.4.4 État matrimonial des personnes hébergées ...Erreur ! Signet non défini.

2.4.5 L’année d’arrivée et les lieux de provenance des personnes inséréesErreur ! Signet non défini.

2.4.6 Le temps vécu dans le ménage d’accueil par les dépendants Erreur ! Signet non défini.

2.4.7 Activités lucratives exercées par les dépendants Erreur ! Signet non défini.

2.5 Situations du logement et espace résidentiel des ménages échantillonnés Erreur ! Signet non défini.

2.5.1 Statut d’occupation des maisons ...Erreur ! Signet non défini.

2.5.2 Types des maisons ...Erreur ! Signet non défini.

2.5.3 Ménages et occupation de l’espace dans la parcelle ... Erreur ! Signet non défini.

(3)

2.5.4 Distribution des personnes par nombre de pièces dans le logement Erreur ! Signet non défini.

2.6 Conclusion ...Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE 3. REPRESENTATIONS ET TYPOLOGIES FAMILIALES ... Erreur ! Signet non défini.

3.1 Introduction ...Erreur ! Signet non défini.

3.2 Famille telle que définie par les informateurs ...Erreur ! Signet non défini.

3.2.1 Mamie : déficit définitionnel ou choc de deux logiques culturelles Erreur ! Signet non défini.

3.2.2 Adolphe et les ambiguïtés entre familles nucléaire et élargieErreur ! Signet non défini.

3.3 Théories sur les modèles familiaux ...Erreur ! Signet non défini.

3.4 Typologie des familles ...Erreur ! Signet non défini.

3.4.1 Vers la nucléarisation de la famille à Lubumbashi ? ... Erreur ! Signet non défini.

3.4.2 La famille élargie se sépare de la vaste parenté .Erreur ! Signet non défini.

3.4.3 Synthèse de deux types de famille (nucléaire et élargie)Erreur ! Signet non défini.

3.4.4 L’Eglise entre supplanter la parenté et rompre avec les liens éloignésErreur ! Signet non défini.

3.5 Conclusion ...Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE 4. MODALITES DE TRANSFERT DES PARENTS ... Erreur ! Signet non défini.

4.1 Introduction ...Erreur ! Signet non défini.

4.2 Etat de la question sur l’échange ou le placement d’enfantsErreur ! Signet non défini.

4.3 Solidarités familiales : charges et décharges socialesErreur ! Signet non défini.

4.4 Adaptation, acceptation et assimilation ...Erreur ! Signet non défini.

(4)

4.5 Motivations d’insertion des parents dans les ménagesErreur ! Signet non défini.

4.5.1 Hébergement négocié...Erreur ! Signet non défini.

4.5.2 Hébergement non négocié ...Erreur ! Signet non défini.

4.6 Situation des parents transférés dans les ménages échantillonnésErreur ! Signet non défini.

4.7 Justice rétributive dans l’insertion des parents ...Erreur ! Signet non défini.

4.8 Hébergement des parents dans un logement exigu Erreur ! Signet non défini.

4.8.1 Se loger par la débrouille ...Erreur ! Signet non défini.

4.9 Conclusion ...Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE 5. STRATEGIES CONJUGALES DE CONTROLE DES DEPENDANTSErreur ! Signet non défini.

5.1 Introduction ...Erreur ! Signet non défini.

5.2 Cadrage théorique sur la stratégie sociale ...Erreur ! Signet non défini.

5.3 Les rapports de genre et les relations à plaisanterieErreur ! Signet non défini.

5.4 Codes sociaux et interactions sociales entre les parents dans le ménageErreur ! Signet non défini.

5.4.1 Les interactions entre les conjoints et les dépendants ... Erreur ! Signet non défini.

5.5 Réajustement des stratégies des rapports de genre Erreur ! Signet non défini.

5.6 Négocier un conflit dans le ménage ...Erreur ! Signet non défini.

5.7 Genre social de l’argent et solidarité entre époux .Erreur ! Signet non défini.

5.8 Conclusion ...Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE 6. VIE CONJUGALE ET SEXUALITE DANS LES MENAGES. Erreur ! Signet non défini.

6.1 Introduction ...Erreur ! Signet non défini.

6.2 Décors de la sexualité dans les ménages ...Erreur ! Signet non défini.

6.2.1 Ku profiter occasion ou moments opportuns ...Erreur ! Signet non défini.

(5)

6.2.2 Poser le matelas sur le sol et écouter de la musique ... Erreur ! Signet non défini.

6.2.3 Faire l’amour en dehors du domicile ...Erreur ! Signet non défini.

6.3 Séduction et complicité amoureuses des dépendantsErreur ! Signet non défini.

6.3.1 Les filles et le bipage ...Erreur ! Signet non défini.

6.3.2 Les garçons entre Judas Iscariote, muconfia et pumbafuErreur ! Signet non défini.

6.4 Relations sexuelles normalement interdites ...Erreur ! Signet non défini.

6.5 Secrets familiaux et gestion des rapports sexuels interdits dans les ménages ..Erreur ! Signet non défini.

6.5.1 Résolution du cas de Marc et Arlette ...Erreur ! Signet non défini.

6.5.2 Traitement de l’affaire Charles et Agnès ...Erreur ! Signet non défini.

6.5.3 Gestion des affaires familiales sur la sphère publique : le tribunal .. Erreur ! Signet non défini.

6.6 Conclusion ...Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE 7. SOLIDARITES SOUTERRAINES ET VIOLENCES DANS LES MENAGES . …Erreur ! Signet non défini.

7.1 Introduction ...Erreur ! Signet non défini.

7.2 Quelques études sur les violences et l’informel dans les ménages ... Erreur ! Signet non défini.

7.3 Les entraides clandestines ...Erreur ! Signet non défini.

7.3.1 Se souvenir des parents « Kukumbuka bazazi » .Erreur ! Signet non défini.

7.3.2 La cena : « ashinione » et ashiyuwe (qu’il ne le sache pas) . Erreur ! Signet non défini.

7.3.3 Iyi ni yako, ushimwambiye mutu (ça c’est pour toi, ne dis à personne)Erreur ! Signet non défini.

7.4 Les violences verbales et corporelles dans les ménagesErreur ! Signet non défini.

7.4.1 Kutoka apo tuu (quitter simplement l’endroit) ...Erreur ! Signet non défini.

(6)

7.4.2 Violences infligées aux épouses par les belles-familles Erreur ! Signet non défini.

7.4.3 Dépendants comme victimes innocentes et impuissantesErreur ! Signet non défini.

7.5 Conclusion ...Erreur ! Signet non défini.

CONCLUSION GENERALE ... Erreur ! Signet non défini.

BIBLIOGRAPHIE ... Erreur ! Signet non défini.

ANNEXES ... Erreur ! Signet non défini.

Liste des tableaux...Erreur ! Signet non défini.

Liste des photos ...Erreur ! Signet non défini.

Liste des figures ...Erreur ! Signet non défini.

Fiche descriptive sur le ménage ...Erreur ! Signet non défini.

Fiche démographique du ménage ...Erreur ! Signet non défini.

Guide d'entretien avec les conjoints dans le ménage ...Erreur ! Signet non défini.

Guide d'entretien avec les parents insérés dans le ménageErreur ! Signet non défini.

Liste de cents ménages de mon échantillon ...Erreur ! Signet non défini.

(7)

AVERTISSEMENT

Tout au long de cette dissertation j’utilise le mot « hébergement ». L’usage de ce terme n’est pas univoque. « Il peut signifier l’accueil d’un parent ou ami à son propre domicile, séjour ponctuel chez des membres de la famille à l’occasion d’un déplacement loin de chez soi, ... » (Grafmeyer, 2008 : 93). Dans mon entendement, ce concept fait référence aux membres pris en charge et qui vivent totalement ou partiellement aux dépens de conjoints et cela pour un long temps.

Aussi, dans le cadre de cette étude, j’ai deux catégories d’informateurs. D’une part, les conjoints et d’autre part les personnes prises en charge. Pour éviter des fréquentes répétitions, les premiers sont identifiés soit par les termes « conjoint/époux/mari », « conjointe/épouse ». Ces concepts sont alternativement utilisés pour désigner en fait l’informateur qui prend en charge d’autres parents. En même temps, les parents accueillis sont reconnus par les concepts « personnes hébergées »,

« dépendantes » ou « insérées ». Ces différentes appellations renvoient à la même catégorie des personnes les « parents hébergés dans d’autres familles ».

(8)

DEPOUPAGE ADMINISTRATIF DE LA VILLE DE LUBUMBASHI

Source : Observatoire du Changement Urbain, janvier 2013.

(9)

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Parcours et immersion de recherche

La présente thèse est le résultat de mon immersion au sein de l’Observatoire du Changement Urbain, une structure de recherche née de la collaboration entre l’Université de Lubumbashi et les Universités francophones de Belgique. Après avoir terminé mes études de sociologie en juillet 1999, j’étais convaincu d’être nommé

« assistant » à l’Université, vu que je répondais aux critères d’embauche. C’était malheureusement sans compter sur les subjectivités et les intrigues. Des mois passèrent, des réunions se succédèrent au département de sociologie et anthropologie pour statuer sur les candidatures à l’assistanat. Hélas ! Mon dossier déposé n’était jamais présenté au conseil de département. Après plus de six mois d’attente de nomination, j’ai commencé à perdre espoir et désespérais de pouvoir avoir un jour une carrière scientifique. Il me fallait repenser les stratégies d’intégration dans la vie active, tout en sachant que trouver un emploi dans une société où l’économie décline au quotidien restait un parcours de combattant.

En janvier 2000, j’avais décidé de changer de milieu. Ce qui m’avait poussé à aller à plus de mille kilomètres de Lubumbashi. Deux mois plus tard, les conditions socioprofessionnelles ne s’étant pas améliorées, je suis retourné à Lubumbashi. Un jour après mon retour, alors que je prenais le bus vers les cités universitaires de l’Université de Lubumbashi, j’ai rencontré des collègues de promotion. En me voyant, ils ont insisté pour que je descende à l’arrêt ‘Don Bosco’. Là, ils m’ont informé qu’un Belge recrutait des jeunes sociologues et anthropologues.

Nous sommes donc arrivés dans les locaux de l’Observatoire pour être reçus par le promoteur. Il nous a déclaré que le dépôt des candidatures était clôturé. Le jour même, dans l’après-midi, les candidats devaient être soumis au test. Avant de clôturer la rencontre, il nous a demandé si l’un d’entre nous avait eu une distinction dans son parcours académique. J’étais le seul parmi mes collègues à avoir bénéficié d’une distinction : mes collègues, n’entrant pas dans les critères, ont été remerciés. Je suis resté seul avec le promoteur qui, après un bref entretien, m’a donné rendez-vous dans l’après midi pour faire plusieurs tests que j’ai réussis. Je n’aurais jamais pensé que ma carrière scientifique venait de débuter. Je pensais juste que je venais de trouver du travail qui m’éviterait de devoir aller pointer au chômage.

(10)

Embauché comme enquêteur, j’étais l’un des chevilles ouvrières de l’Observatoire du Changement Urbain1 car ma tâche consistait essentiellement à collecter des données empiriques. Néophyte des enquêtes de terrain, et pas du tout en prise avec les problèmes concrets de la société lushoise, je devais subir un premier

« formatage ». J’ai donc suivi plusieurs séminaires de méthodologie afin de me préparer à accorder toute l’énergie nécessaire à la collecte des données empiriques.

Après ces séminaires de formation, je suis allé sur le terrain pour me frotter au vécu de quelques Lushois. Mes premières monographies étaient réalisées avec des étudiants.

Par la suite, j’ai participé activement à une vingtaine de recherches initiées par l’Observatoire du Changement Urbain. De ces études, trois d’entre elles à savoir : les budgets ménagers, l’alimentation et le profil sanitaire des Lushois m’ont permis de questionner les pratiques de solidarité et celles de placement des nouveaux membres dans les ménages. Pour ces trois études, l’approche intensive avait orienté la collecte des données. Les enquêteurs dont je faisais partie devaient fidéliser leurs informateurs.

Pour la première étude « budgets ménagers », l’objectif était comme le souligne Geschiere dans la préface de l’ouvrage qui a résulté de ces recherches (Petit, 2003 : 7), elle ne cherchait pas à saisir la situation des ménages par la réalité statistique mais à parvenir à humaniser les chiffres à travers l’implication des enquêteurs dans la quotidienneté des informateurs.

A l’issue de cette étude, un portrait nuancé a été peint. Comparativement aux études précédentes de 1973 et 1985 où le nombre de personnes par ménage était de 6,04 et 6,78, il s’observe une augmentation vers une moyenne de 7,48 pour cette étude en 2000. Les chefs de ménages salariés ne représentaient plus que 42% des travailleurs actifs. Les salaires insignifiants ne permettaient pas de subvenir aux différents besoins des ménages. Les salaires perçus ne couvraient que 20% des besoins. Les 80% étaient suppléés par toutes sortes d’activités informelles qui rapportent le principal à la survie des ménages. Ainsi, un « ménage moyen vit de deux ou trois activités informelles » (Kalaba et al., 2003 : 221). Les dépenses ordinaires liées à l’alimentation absorbent plus de la moitié, soit 52%, du budget de la consommation courante. Elles sont suivies des dépenses liées au logement, soit 14%, et l’instruction des enfants, 13%. Dans pareille économie, 12% des ménages n’ont pas accès aux structures sanitaires. Malgré ce sombre décor de la situation économique, les ménages continuaient à héberger d’autres apparentés. Sur 628 personnes ressemblant les 84 ménages de l’échantillon, 133 personnes (soit 21,2%) sont extérieures à la famille nucléaire fondée par le chef de ménage. « 45 d’entre elles se trouvent dans les 17 foyers riches ; 76, dans les 50 foyers moyens et 12, dans les 17 foyers pauvres » (Petit, 2003 : 95). Les mauvaises conditions économiques n’empêchent pas les apparentés de s’entraider. Cependant, la

1 Trois catégories de membres structuraient l’OCU. Les chercheurs séniors (les professeurs), les chercheurs juniors (les assistants et chefs de travaux) et les enquêteurs (diplômés de l’Université de Lubumbashi).

(11)

difficulté se situe dans la prise en charge effective au sein des ménages. Les personnes confiées doivent totalement être entretenues. Le plus souvent, les parents qui transfèrent leurs membres dans d’autres ménages ne contribuent pas au budget des ménages d’accueil. Ils laissent toute charge aux ménages d’accueil. Dans ce cas, il revient aux conjoints des ménages d’accueil de nourrir, vêtir, soigner en cas de maladies les parents insérés.

Or, les résultats de la première étude montrent que les ménages ne survivent que grâce à l’informel et à la débrouille. Ainsi, l’étude sur l’ « alimentation » montre que pour réunir les ingrédients nécessaires pour le repas quotidien, les conjoints déploient des efforts tous azimuts. Ils recourent aux activités formelles et informelles (Vwakyanakazi Mukohya, 2004) lesquels s’étendent jusqu’à inclure des réseaux de sociabilité et de parenté. Dans cette dynamique, l’échange des aliments entre les familles ou les voisins est considéré comme étant des pratiques de solidarité. Dans ce contexte, le réseau d’échange respecte un principe d’un partage équitable et d’un esprit d’ouverture. Quand une femme traite avec générosité sa voisine, ce n’est pas fondamentalement au nom de la charité, mais dans l’espoir qu’elle lui rendra également quand elle sera dans la disette. Cette stratégie fait par exemple qu’un ménage qui n’a pas préparé les chinchards (thomsons) peut en consommer par le biais d’une voisine avec qui les relations sont fructueuses.

Le poids de l’insertion d’autres parents est également ressenti en cas de maladies. Lorsqu’un ménage accueille de nouveaux membres, en cas de maladies de ces derniers, ce sont les conjoints qui se démènent pour les faire soigner. Une tâche qui n’est pas facile et qui pousse certains informateurs à dire que l’hébergement des parents « ni charge », « constitue une charge ». Le réquisitoire de la solidarité et les frustrations que j’enregistrais lors de mes passages dans les ménages m’ont interpelé sur la question de la solidarité familiale et de l’hébergement d’autres parents dans les ménages enquêtés. A chaque fois que je discutais avec les informateurs, ces derniers développaient un double discours sur l’intégration d’autres parents dans leur ménage.

Tantôt ils louaient la consolidation des liens et leur volonté d’aider les autres, tantôt ils déploraient les mauvaises conditions de leur vie et les difficultés qu’ils éprouvaient en ayant des charges supplémentaires.

Plus je partageais leur quotidien, plus je découvrais les contradictions des pratiques de la solidarité, et en même temps je réalisais combien était fructueuse la recherche empirique car elle me permettait de surmonter les réalités inhérentes au terrain tout en créant un électrochoc dans ma perception des réalités sociales, et plus particulièrement, de la famille à Lubumbashi.

Le fait qu’il y ait autour des conjoints des individus provenant d’horizons différents de ceux-ci, me semblait normal. En réalité, c’est parce que mon regard n’avait pas un recul suffisant pour déceler les pratiques latentes des solidarités

(12)

familiales. J’étais influencé par l’ethos de l’objectivation de la « solidarité » dite africaine. Je rejoignais donc à ce niveau Héritier (2004 : 94) quand elle dit que

« chacun dispose d'une manière culturelle d'appréhender les données objectives du milieu dans lequel il se trouve, nous avons tous un regard sur notre propre société ». Je me contentais des apparences sans scruter le latent, or les réalités sociales sont à rechercher souvent dans le caché. Il m’a fallu plusieurs études dans les mêmes ménages pour me rendre compte que l’hébergement des apparentés et non apparentés se faisait en déclenchant beaucoup de susceptibilités. Il n’est pas spontané, comme je le croyais, mais dépend de la volonté des époux, des familles de provenance des époux, de la personne à intégrer et parfois de la pression du voisinage. En même temps, dans les ménages d’accueil, bien d’autres réalités insoupçonnées (l’exploitation excessive des personnes en charge, les frustrations des époux, les rapports sexuels normalement interdits et les conflits) entourent les pratiques de la solidarité. Ces divers faits observés dans les ménages m’ont permis d’avoir un autre regard sur les pratiques de la solidarité. Finalement, mon identification à la collecte des données a fini par convaincre les autorités de l’Observatoire à m’associer aux dépouillements des données et à la rédaction. Ce fut une véritable école initiatique. Progressivement, j’ai appris à contribuer avec des articles dans les différents modules de recherche. Cette plus-value d’écriture et ma passion de la collecte des données empiriques sont devenues des atouts majeurs.

Nommé assistant, ma voie était ouverte à la carrière scientifique. Je devais proposer un projet de recherche. Les enquêtes auxquelles j’ai participé à l’Observatoire du Changement Urbain m’offraient plusieurs possibilités d’étude. Les ambigüités du phénomène ‘enfants de la rue’, les dynamiques des rapports de genre, les représentations populaires des boissons alcoolisées, etc.

De ces différentes possibilités, les pratiques de la solidarité à travers l’insertion des membres dans les ménages ont attiré mon attention de par la présence d’un fossé entre la praxis vécue dans les ménages et les discours développés sur la scène publique. Qu’y avait-il de nouveau à questionner les pratiques de la solidarité ? Plusieurs études en sciences sociales (Marie, 1997 ; Locoh, 1995 ; Pilon, 1997) présentent les solidarités familiales dans leur dimension généreuse (les entraides entre les membres, la consolidation des liens, la socialisation, la scolarisation des membres).

Mais on occulte souvent les scènes douloureuses que vivent les époux et les personnes insérées. Peu nombreuses, à mon avis, sont les études qui approfondissent les disparités et inégalités engendrées par les pratiques de solidarités familiales, ou leurs déterminants et effets dans la vie conjugale. Partant des réalités observées et vécues dans les ménages, j’ai décidé d’étudier les faces cachées des pratiques de la solidarité en focalisant mon intention sur le transfert des parents entre les familles et leur vécu quotidien dans les ménages.

(13)

Aussi cette ambition de questionner les solidarités a été motivée par trois raisons. D’abord, les précédentes enquêtes sur la composition des ménages « n'ont jamais cherché à connaître la composition des ménages qu'elles étudiaient, elles se contentaient d'en donner les effectifs sans chercher à appréhender les liens qui unissaient entre eux les membres » (Petit, 2003 : 91). Ma curiosité fut éveillée.

Ensuite, mes multiples entretiens dans les ménages m’ont permis de vivre plusieurs scènes de ménages et d’observer, en partant de la configuration des ménages, des recompositions familiales passionnantes pour le spécialiste en sciences humaines. Dès lors, j’étais déterminé à connaître les motivations de la présence remarquée des frères et sœurs biologiques des conjoints par exemple, par rapport aux autres apparentés, alors que les Lushois revendiquent la solidarité comme une manifestation de leur identité profonde. Enfin, les ambivalences des discours sur la solidarité et les manifestations de celle-ci nécessitaient une autre lecture.

A Lubumbashi, le mot « solidarité » (kusaidiyana : litt. s’entraider) revient constamment dans le discours. Celui-ci est présenté tantôt comme une pratique qui propulse les individus, tantôt comme consolidant les liens de parenté et maintenant les individus dans un cycle continu de réciprocité et d’entraide. Ce discours véhicule l’idée de la spontanéité dans l’assistance, la gratuité, le don sans contre-partie. Cette valorisation de la solidarité enchâsse les pratiques de celle-ci dans le vécu quotidien, au point de laisser croire que les Lushois sont si sensibles aux souffrances de l’autre qu’ils ne peuvent s’empêcher de l’assister, quelle que soit la précarité de leurs moyens ; que les Lushois sont si généreux et prêts à se sacrifier pour l’autre. Il est donc intéressant de se départir du discours sur la pratique de la solidarité en questionnant le vécu de celle-ci afin d’éviter une essentialisation. D’où le sujet que j’ai choisi pour ma recherche doctorale : Ménages et pratiques de la solidarité à Lubumbashi. Transfert des parents, stratégies de cohésion et vie conjugale. Etant donné que la famille est le creuset de la solidarité, je me suis résolu de la revisiter dans sa dynamique actuelle et ses recompositions. Je pars des liens de parenté entre les membres composant les ménages pour comprendre le contenu que l’on accorde à la solidarité. Dans une sphère familiale où il y a hétérogénéité des liens de parenté selon que les parents proviennent des divers horizons de deux conjoints, il s’observe des manières et des logiques particulières qui orientent la gestion conjugale. Ces stratégies déterminent l’exercice des solidarités et la transformation des structures familiales à Lubumbashi. Pour ce faire, je poursuis les objectifs suivants.

Objectifs de l’étude

Cette recherche a pour objectif principal d’étudier les modalités d’hébergement des apparentés en rapport avec les deux époux. « Créditer les relations de parenté d’une solidarité spontanée, c’est se limiter au niveau de la sentimentalisation »,

(14)

souligne Burguière (1986). Pour comprendre les logiques qui concourent à la composition des ménages et à l’entraide entre membres de la parenté, il ne suffit pas de se limiter aux effectifs des familles. Il faut posséder une connaissance de leurs agencements. Hannerz (1980 : 219) recommande de « partir d’un réseau afin d’abstraire, pour les besoins de l’analyse, des jeux de relations plus au moins élaborés ». Bon nombre d’études se contentent de relever la typologie des liens de parenté au sein des ménages, la morphologie des ménages, les transferts des apparentés sans dégager les relations entre les conjoints et les personnes hébergées, ainsi qu’avec les familles de provenance. Je tiens à remonter au-delà de la composition résidentielle et à chercher la logique générale qui rend compte des modalités particulières des regroupements (Roussel, 1996). Plus particulièrement, il s’agit dans cette investigation de :

- Faire ressortir les logiques qui concourent à l’intégration des membres et les stratégies conjugales dans la gestion des rapports au sein des ménages ;

- Identifier les règles sociales et morales qui régissent et orientent les interactions entre époux et personnes insérées dans le ménage ;

- Dégager les discours moraux qui dépeignent sur la scène publique et en dehors de celle-ci les pratiques de solidarité ;

- Décrire le revers des pratiques de la solidarité dans la mesure où le ménage apparait comme un lieu de révélation de tensions.

Comme on le constate, cette étude est circonscrite à la ville de Lubumbashi. Ce choix est légitimé par des raisons théorique et pratique. Théorique, car la ville de Lubumbashi est diverse sur le plan culturel, avec un mélange de valeurs occidentales et locales. D’autre part, plusieurs études ont été menées dans cette ville et donnent accès à plusieurs analyses. Sur le plan pratique, c’est depuis 2000 que je mène des enquêtes dans cette ville : ma connaissance du terrain m’a permis de surmonter bien des difficultés.

Contexte et problématique

La famille à Lubumbashi doit son histoire à l’évolution de l’industrie minière qui fit de la ville le fleuron industriel du Congo-Zaïre (Fetter 1976). Pour les besoins de l’industrie, les colonisateurs transféraient de la main-d’œuvre des pays limitrophes et des provinces avoisinantes vers la ville d’Elisabethville. Pour stabiliser les populations ouvrières arrivées en masse suite à la naissance de nombreuses entreprises, les colonisateurs ont instauré une politique sociale paternaliste qui mettait l’accent sur le logement, la scolarité, les soins de santé, l’alimentation, créant un environnement urbain et un cadre de vie jugé agréable (Dibwe dia Mwembu, 2003, Nyumbaiza Tambwe et ali., 2011). Cette stratégie a provoqué une rupture relative avec les

(15)

logiques antérieures de la parenté. Les travailleurs déportés découvrent un autre univers social. Ils composent avec des personnes d’autres origines ethniques. La nature du réseau de sociabilité s’émancipe de la pesanteur des liens familiaux. Segalen (2000) constatait que l’éloignement de l’individu de ses racines familiales favorisait l’éclosion des liens électifs. A Lubumbashi, le processus d’industrialisation a contribué à l’affranchissement de certaines personnes de l’emprise directe de la parenté mais n’a pas promu pour autant le modèle de la « famille nucléaire » cher à Parsons (1955).

Dibwe dia Mwembu (2001) le souligne en disant que l’extension des activités minières a affecté la structure familiale mais que certaines pratiques ont persisté, notamment la prise en charge des membres de la parenté.

La tendance était d’ailleurs d’avoir plus de membres dans le ménage pour bénéficier de plus d’allocations familiales. L’extension de la famille par d’autres apparentés a confronté les colonisateurs à deux logiques de la famille et de droits. La famille, pour les ouvriers, ne se conçoit que dans le cadre élargi de la parenté. Or il est inacceptable pour les colonisateurs de payer des allocations familiales à tous les apparentés de l’employé. Pour contourner les dérives des allocations familiales, l’employeur a légitimé la famille conjugale de l’employé comme ayant droit aux avantages sociaux accordés par l’entreprise. Cette légitimation de la famille conjugale a provoqué une nouvelle perception des rapports sociaux. Le salarié a commencé à mettre des limites entre la famille biologique et les membres de la parenté. Cette distinction a réduit la solidarité extensive en la ramenant au niveau élémentaire, celle des liens de consanguinité. Le salarié accorda la priorité à ses enfants biologiques avant de penser aux autres membres de la parenté. De même, l’insécurité sociale ressentie en dehors des structures de la parenté fut compensée par l’entreprise à travers les avantages sociaux. Une relative indépendance avec la parenté s’affirma, au point que les travailleurs disaient kaji njo baba, kazi njo mama, « mon emploi, c’est lui mon père et ma mère ». Pareille déclaration traduisait un renoncement à la sécurité du groupe. Sangwa Koli-Ndiba (1985) note l’influence de l’industrialisation en termes de règle que chaque citadin travaille avant tout pour lui-même et pour sa famille nucléaire. Ce n’est que dans une certaine mesure et selon des circonstances bien précises qu’un citadin peut venir en aide à l’un des parents de la famille étendue.

Le changement de perception sur la famille n’a nullement contribué à la nucléarisation de la famille. Les ouvriers continuent à recevoir et à intégrer les membres de parenté mais en rétrécissant le champ. Les conditions urbaines exigent une retenue dans les pratiques de la solidarité. L'individu n’est plus absorbé par le groupe et postule à l’individuation de la personne. Il devient électif et privilégie une solidarité de type contractuel comme nous allons le voir dans cette thèse. Ainsi, il s’observe des réajustements tant au niveau des liens de parenté qu’à celui des sentiments communs.

(16)

Dans ce cycle de transformation des structures familiales, les ménages se situent à la croisée de deux mouvements opposés : la solidarité dans la crise et la crise des solidarités, selon Pilon et Vignikin (1996). Pour témoigner de leur attachement à la solidarité, certains Lushois continuent à héberger quelques apparentés qu’ils sélectionnent dans leur proche réseau social.

Cependant, les portes des solidarités ne sont pas ouvertes à tout membre de la parenté. Pour justifier cette exclusion, plusieurs raisons sont mobilisées : économique, culturelle, mauvaise conduite des personnes à héberger, sorcellerie, etc. Au-delà de ces motivations, je remarque la détermination des époux à contrôler les circonstances qui les obligent socialement à intégrer un nouvel individu dans leur foyer.

Cette relative autonomie des époux fait qu’ils résistent parfois aux pressions extérieures de la prise en charge. Aussi, ils deviennent électifs dans le choix des membres à héberger, étant donné que l’hébergement des parents provoque des charges supplémentaires, des frustrations conjugales, des violences verbales et physiques, parfois des conflits avec les familles d’origine, etc. Les époux recourent à plusieurs stratégies pour intégrer et éloigner des parents. La logique est de favoriser les proches parents et d’exercer les solidarités en fonction de la reconnaissance, tout en posant des gestes ponctuels d’entraide envers les parents éloignés afin de voiler l’ostracisme dans le circuit de la solidarité.

Ces dynamiques familiales invitent à se départir des productions discursives qui présentent la solidarité comme une pratique sociale désintéressée à laquelle des apparentés s’adonnent au gré des circonstances difficiles de la vie. Derrière les pratiques manifestes de la solidarité, toute une logique sous-tend le refus ou l’insertion des membres. Ainsi, la solidarité comme indicateur de la métamorphose des structures familiales est pareille à une médaille. Sur une face, la générosité, l’entraide mutuelle et les vertus sont vantées. Son revers, c’est la charge supplémentaire, les frustrations conjugales, les violences sous-jacentes. C’est dans la quête du caché, des réalités de coulisse que je cherche à découvrir, derrière les apparences, un système de relations propres (Bonnewitz, 1997). Ainsi donc, les questions suivantes me servent de base de réflexion. Comment les informateurs négocient-ils l'insertion et l'identité des parents insérés ? Comment les époux maintiennent-ils l’équilibre familial sur fond de relations de parenté composites ? Quels sont les problèmes sociaux auxquels sont confrontés les conjoints et personnes insérées dans leurs interactions au sein du ménage ? Que pouvons-nous relever comme transformation dans la structure familiale à Lubumbashi ? A ces interrogations, tentons de donner des réponses provisoires.

(17)

Hypothèses

Les solidarités familiales sont constamment réadaptées à Lubumbashi. Elles ne sont pas communautaires mais plutôt électives. Elles ne sont plus cet engrenage interminable de la dette communautaire et de la créance (Marie, 1987). Le cycle de la réciprocité est réduit au cercle familial. Même à ce niveau, l’insertion d’un parent n’est pas désintéressée. Plusieurs critères latents sont mobilisés par les époux pour intégrer un parent dans le ménage. Il s’agit notamment du profil de la personne, de son âge, des types de relations qu’elle entretiendra avec les époux, de sa moralité, etc. La prise en compte de ces critères permet que son insertion ne soit pas une source de tensions entre les conjoints.

Gérer les liens de parenté composites impose aux conjoints de recourir à plusieurs tactiques pour maintenir la stabilité et la cohésion sociale. Ces stratégies sont opérationnelles dans le caché. Ce qui est présenté sur la scène n’est pas ce qui se passe dans les coulisses pour reprendre la présentation dramaturgique de Goffman (1973).

Pour plus d’efficacité dans la gestion des différents liens, l’épouse est celle qui s’occupe de la scène du ménage. Elle est la face visible alors que le mari agit plus dans les coulisses. Ainsi, le camouflage et la ruse sont mobilisés pour maintenir l’équilibre dans les interactions sociales entre les conjoints et les personnes insérées et leur famille de provenance.

Les différentes stratégies atténuent les conflits et le problème sans les faire disparaître. Des rapports sexuels normalement interdits sont entretenus entre les membres composant les ménages. L’étroitesse des logements est souvent source de frustrations conjugales. Les époux sont étouffés par l’omniprésence des personnes insérées. Ils n’ont pas de secrets conjugaux. Pour leur intimité, ils recourent parfois à des moyens insolites. De même, les personnes insérées, vu leur position de dépendants, subissent aussi diverses formes de violence. L’insertion des apparentés n’est de fait pas toujours un processus harmonieux guidé par les émotions et l’altruisme. Elle s’élabore également dans les rapports de forces, dans les inégalités et dans la construction des différences, note Henchoz (2008).

J’estime que la famille à Lubumbashi connait des transformations pas tant dans le sens de la nucléarisation mais plutôt vers des formes familiales mitigées. Comment tester ces hypothèses pour leur (in)validation ? Il me revient de « restituer les observations et les entretiens dans leur contexte comme condition préalable à leur analyse » (Petit et Trefon, 2006 : 9). Je vais à présent exposer la méthodologie afin de montrer la façon dont j’ai recueilli les informations sur terrain.

(18)

Méthodologie de recherche

Je ne suis pas étranger aux réalités de vie à Lubumbashi, et plus particulièrement, aux pratiques d’assistance. Mon immersion dans le milieu d’étude ne peut pas m’empêcher de restituer les réalités les plus variées. Beaud et Weber (1998 : 9-10) trouvent que l’immersion d’un enquêteur dans le milieu d’enquête a un gros avantage car « elle permet le croisement de divers points de vue sur l’objet, éclaire la complexité des pratiques, en révèle l’épaisseur ». Pour y parvenir, l’enquêteur doit se

« mettre en état de vigilance critique pour être prêt, si nécessaire, à réviser ou à abandonner des concepts que le chercheur considère comme analytiquement fondés » (Godelier, 2004 :33). Telle est ma posture. Dans un contexte où la solidarité est revendiquée comme une identité, une valeur collective, je me dois de ne pas sombrer dans l’ethnocentrisme du lyrisme de cette notion. Ne pas me décentrer risquait de me plonger dans ce que Beaud et Weber (Idem) appellent « l’évidence du terrain qui endort la curiosité et trompe le regard trop habitué au monde qui l’entoure ». Pour ce faire, je ne me contentais pas seulement des discours mais aussi de la praxis des pratiques de la solidarité, en partant des réalités qui s’offraient à moi. La collecte des données m’a permis de pénétrer le caché du fait que les enquêtes ont été intensives.

Pour appréhender les rationalités que véhiculent les pratiques de solidarité, je combine les approches quantitative et qualitative. Pourquoi associer les deux approches dans une orientation qui se veut anthropologique ? Ce choix est légitimé par la quête de la « plausibilité » (Olivier de Sardan, 2008). Cette quête n’est pas contre la combinaison du quantitatif et du qualitatif, et ne cherche « pas d’opposer l’un à l’autre » (Ibidem, p.11). Cependant, je ne méconnais pas le débat entre les tenants de deux approches. Dans mon esprit, les deux approches permettent d’étudier les réalités sociales. Aucune de deux ne peut s’auto-suffire. Elles sont toujours limitées dans l’analyse des faits, c’est-à-dire dans les manières d’observer, de récolter les données et de les expliquer.

La méthode quantitative, comme nous le savons, s’appuie sur les fréquences, les indicateurs, les statistiques détaillées ou des pourcentages précis pour mesurer l’ampleur du phénomène étudié. Elle cherche à comprendre et à comparer. Pour ce faire, elle recourt aux chiffres. de Singly (2005 : 112) souligne l’intérêt de l’enquête par questionnaire dans ce sens qu’il « n’a pas pour fonction de recréer une image précise du réel étudié, mais de dévoiler les facteurs sociaux qui contribuent à produire ce réel ».

Les deux approches ont chacune des avantages et des inconvénients. Dan Kaminski (2011), pour sa part, note que la démarche « quantitative » est

« secondaire ». Par ailleurs, insiste-t-il, elle n’est pas dernière, puisque aucun chiffre ne peut être à lui seul significatif sans être retraduit dans des propositions langagières

(19)

communes qui l’interprètent. La construction préalable à la récolte du chiffre et à son interprétation subséquente sont totalement « qualitatives ».

En anthropologie, un pourcentage élevé ne veut rien dire s’il n’est pas expliqué par les réponses aux questions « pourquoi » ou « comment ». A partir des entretiens, je mets en évidence des pratiques, des attitudes et des représentations. « Cela n’est possible que lorsque les informateurs rapportent leurs expériences et leurs interactions sociales », écrit Paillé (2006).

Si la méthode quantitative soulève des problèmes de fiabilité et de validité, la méthode qualitative n’est en reste. Ici, c’est davantage la notion de subjectivisme qui est brandie. L’enquêteur est inclus subjectivement dans la production des données (Kahola, 2006 ; Paillé, 2006 ; Berger, 2004). A propos, Olivier de Sardan (2008), dans la théorie de la plausibilité, soutient le recours à la démarche de type qualitatif. Pour l’auteur, cette approche est une forme « d’insertion personnelle du chercheur sur terrain, où les interactions entre l’anthropologue et ceux qu’il étudie sont décisives » (Ibidem, p.11). D’où cette question pertinente : comment arrive-t-on à généraliser les résultats obtenus sur base de données en nombre réduit, et dont les acteurs ne sont pas exemptés de subjectivisme ? Quel crédit accorder à ce type de données ?

Après l’étude sur la situation des ménages à Lubumbashi en 2000, huit ans plus tard, l’Observatoire du Changement Urbain voulait réévaluer la situation économique des anciens ménages. Ainsi, une nouvelle enquête sur les ménages a été réalisée à laquelle j’ai participé activement, surtout dans l’actualisation du questionnaire et la collecte des données.

L’objectif de cette enquête répétée était de retrouver tous les anciens ménages, ce qui permettrait de comparer les résultats de deux études. Pour moi, cette nouvelle étude était une grande opportunité. Conscient que les questions sur les pratiques de la solidarité ne seraient pas approfondies, je les ai intégrées au protocole de la recherche.

Les données rapportées se sont révélées factuelles, c’est-à-dire qu’elles se limitaient à donner quelques définitions et perceptions des informateurs sur ce qu’ils entendent par

« solidarité ». Les informateurs affirmaient presque tous qu’il était impossible de vivre en famille restreinte. Cette affirmation cache bien des réalités. Une autre tendance est celle des informateurs qui, tout en admettant la famille élargie, fustigent la charge et les conflits qu’elle provoque dans les ménages d’accueil. Sur base de ces données préliminaires, j’ai pris l’option de concevoir un questionnaire standardisé et un guide d’entretien pour la collecte des données. Vu l’immensité de mon terrain, le temps et les moyens financiers mis à ma disposition, j’ai recruté quelques enquêteurs pour me faciliter la collecte des données.

(20)

Recrutement des enquêteurs, formation et collecte des données

La qualité des résultats de l'enquête dépend en grande partie de la valeur des enquêteurs recrutés. Les enquêtes exigent disponibilité, savoir-faire et capacité de l’enquêteur à surmonter les obstacles. J’ai engagé cinq enquêteurs, deux jeunes femmes et trois jeunes hommes. Ces enquêteurs ont été recrutés parmi ceux qui réalisaient des entretiens dans le cadre des travaux faits par l’Observatoire du Changement Urbain. Ce centre de recherche ne constitue pas seulement une banque de données empiriques pour les chercheurs en sciences sociales mais a aussi formé pendant plus d’une décennie des enquêteurs rompus aux réalités du terrain.

Mon choix pour ces enquêteurs est justifié par leur expérience suite à plusieurs enquêtes de terrain. Ils sont accoutumés aux problèmes de confiance dans les entretiens et connaissent les ménages lushois pour y avoir réalisé plusieurs entretiens.

C’est aussi une manière pour moi de transmettre le savoir-faire des enquêtes empiriques acquise en encadrant les autres sur ma thématique de recherche.

Les qualités indéniables de ces enquêteurs ne m’ont pas empêché d’organiser deux séances de discussion. L’objectif n’était pas de les former pour la collecte des données mais plutôt de leur expliquer l’objet et les attentes de ma recherche.

La première séance consistait à rappeler les notions de base des enquêtes dans les ménages. Les attitudes que doivent observer les enquêteurs et celles qu’ils ne peuvent se permettre, notamment aiguiller les réponses des informateurs et bâcler les entretiens car les enquêtes dans les ménages exigent beaucoup de patience. Aussi, j’ai attiré leur attention sur le fait que l’enquête dans les ménages « requiert la maîtrise des répertoires de connaissance ordinaire et de langage naturel qui ont cours dans le monde de la vie quotidienne » (Cefaï, 2003 : 469).

La deuxième séance était consacrée à la compréhension du questionnaire et du guide d’entretien afin d’avoir la même compréhension sur les questions à poser aux informateurs. Pour chaque questionnaire, la traduction en swahili a été réalisée. Étant donné que le swahili est la langue véhiculaire, il s’avérait indispensable que nous ayons tous le même sens des mots. Après l’analyse des outils de collecte des données, un jeu de rôle était organisé. Deux enquêteurs simulaient un entretien devant leurs camarades. Cet exercice apparemment banal a permis de relever des problèmes de compréhension des questions et d’évaluer le temps que prendrait un entretien.

A l’issue de cette simulation, j’ai demandé à chaque enquêteur de réaliser un entretien avec un époux de son environnement immédiat. Deux jours après, nous nous sommes rencontrés pour un débriefing sur les enquêtes réalisées. La rencontre de restitution était fructueuse. Elle m’a permis de reformuler, de préciser et d’ajouter quelques questions. Notons qu’à l’issue de cette pré-enquête, une catégorie que je

(21)

n’avais pas prise en compte dans le questionnaire initial est ressortie, à savoir le statut du « chef de ménage célibataire ». J’ai intégré cette catégorie pour les enquêtes proprement dites. C’est après cette séance de restitution des résultats de la pré-enquête que les entretiens dans les ménages ont commencé. Mais bien avant la descente sur le terrain, j’ai signifié aux enquêteurs que les entretiens devaient être enregistrés. J’ai sollicité cinq enregistreurs auprès du responsable du projet LUB042. Avec la nouvelle technologie, les dictaphones sont performants. Les enquêteurs n’ont plus besoin de bandes-cassettes, juste de ce petit appareil qui conserve les informations dans la mémoire. Par la suite, les enquêteurs copiaient les fichiers sur l’ordinateur pour les retranscriptions. L’équipement informatique de l’OCU m’a énormément aidé pour les retranscriptions.

L’enregistrement des entretiens était pour moi une manière de me rassurer sur la conduite des enquêtes. Je les auditionnais afin d’en faire ressortir les points qui n’avaient pas été développés ou peu approfondis.

Entretiens dans les ménages

Olivier de Sardan (2008 : 20) note à propos du terrain « qu’il est en effet le lieu central de la production des données, et, pour une bonne part, des interprétations propres à l’anthropologie. C’est dans le rapport au terrain que se joue une part décisive de la connaissance et de l’intelligibilité anthropologique ».

Effectivement, j’ai été sur le terrain pour recueillir les différentes opinions des acteurs. Mon terrain proprement dit a débuté en avril 2009 et s’est déroulé en trois campagnes : avril 2009-janvier 2010, mai 2010-mars 2011 et avril-juin 2011. Soit un total d’environ 24 mois de terrain. L’enquête relevait d’une ethnographie appuyée par le questionnaire, les entretiens approfondis et l’observation.

Les deux années de collecte des données sur le terrain se sont effectuées en trois phases entrecoupées par des séjours de recherches théoriques et documentaires en Belgique à l’Université Libre de Bruxelles. Quand j’étais à Lubumbashi, je me faisais épauler par les cinq enquêteurs. Pour la première collecte, ils ont travaillé pendant deux mois, puis un mois pour la deuxième descente sur le terrain, et enfin, un mois pour la dernière collecte. Dans l’ensemble, les enquêteurs ont recueilli les données pendant quatre mois. Après la collecte des données avec les enquêteurs, j’ai continué avec les enquêtes complémentaires dans les ménages échantillonnés. Les entretiens sur les pratiques de la solidarité ont été approfondis par moi-même. Ainsi, nous avions réalisé dix entretiens sur les pratiques d’inceste et les conflits qui opposent les

2 Dans le cadre de la CUD, les projets de thèse sont regroupés en LUB04 (code d’identification d’activités partant de l’abréviation de Lubumbashi) selon les thématiques de recherche. Chaque LUB a un matériel approprié pour la collecte des données sur le terrain, notamment les enregistreurs.

(22)

conjoints aux personnes insérées. Un temps considérable a été consacré au dépouillement et au traitement des données. Comme on peut s’en rendre compte, les séjours lushois étaient fondamentalement centrés sur la collecte des données et les séjours belges, sur la recherche des données théoriques.

Le travail d’enquête, disait Bourdieu (2001 : 14) « est au prix d’interrogation, en utilisant des moyens, des techniques modernes, le sociologue accouche des autres, de quelque chose qu’ils savent sans le savoir ». Pour cette étude, j’ai recouru aux techniques traditionnelles des sciences sociales, à savoir : le questionnaire, les entretiens, l’observation directe et les études de cas. Privilégiant la proximité avec les informateurs, les enquêtes ont été intensives. Les enquêteurs y retournaient chaque fois qu’il y avait nécessité de compléter une information. Les descentes sur le terrain se faisaient en groupe. Tous les enquêteurs investissaient une commune. Chacun avait un quota bien déterminé de ménages à enquêter et de nombre de jours à y consacrer.

L’enquête a ciblé les époux et quelques personnes hébergées. Les époux sont le centre névralgique de l’organisation familiale. Ils sont les mieux placés pour rapporter leurs expériences de prise en charge, les difficultés qu’ils éprouvent et leur perspective sur la famille lushoise. Cependant, leur seule opinion ne donne pas les contours de la réalité d’hébergement d’autres membres. Pour confronter leurs propos à la réalité, j’ai aussi recueilli les avis des personnes intégrées. Il faut d’emblée souligner que cet autre volet a nécessité une étude spécialisée.

Les enquêtes proprement dites ont été organisées en deux étapes. La première consistait à collecter les informations relatives aux caractéristiques sociodémographiques, économiques et de logement des ménages. A l’aide d’un questionnaire standardisé, les enquêteurs recueillaient des informations circonscrites et codables (Olivier de Sardan, 1995 ; Martin, 2007) auprès des conjoints rencontrés. La consigne donnée aux enquêteurs était de ne pas laisser le questionnaire aux informateurs. J’évitais également que le questionnaire ne soit rempli par une personne non concernée par l’enquête. L’enquêteur posait les questions et rapportait la fiche pour une vérification avant l’encodage. La deuxième étape consistait à attirer, sur base des informations recueillies, l’attention de chaque enquêteur sur les points sur lesquels il devait insister. Ensuite, les enquêteurs retournaient dans les ménages pour des entretiens approfondis en ayant déjà des informations sur le nombre de membres insérés, les liens de parenté rattachant les conjoints aux individus insérés, les enfants des conjoints placés dans les autres ménages, etc. qui leur permettaient de jongler avec les questions.

L’entretien, comme on le sait, est une interaction. Son déroulement, fait remarquer Olivier de Sardan (1995), dépend évidemment aussi bien des stratégies de deux (ou plusieurs) partenaires de l’interaction et de leurs ressources cognitives, que

(23)

du contexte dans lequel ils se situent. Pour maintenir cette interaction, les enquêteurs étaient munis d’un guide d’entretien, un pense-bête qui consistait en une grille reprenant les thèmes à aborder avec les informateurs. La tendance générale fut de briser la logique du guide d’entretien pour passer au récit des expériences sur les pratiques de la solidarité et de la vie conjugale (Beaud et Weber, 1998).

Certes, la question de la sexualité est sensible dans une société où les rapports de genre sont prescriptifs. Contrairement à ce que je pensais, les questions portant sur la vie sexuelle des ménages ont généré beaucoup d’informations. Avec les informateurs, il n’y avait pas beaucoup de difficultés. Parfois, j’avais l’impression qu’ils se livraient à une confession, tellement ils me semblaient se défouler des frustrations de leur vécu quotidien. Certaines informatrices se sont également confiées bien qu’elles se soient montrées plus réservées que les informateurs.

La qualité des données n’étant pas forcément dans le discours que développe l’informateur, j’ai demandé aux enquêteurs d’être attentifs aux faits. Ils devaient accorder de l’intérêt à l’observation. Les regards, les gestes, les attitudes peuvent renseigner sur des faits que les enquêteurs ne pouvaient recueillir par l’entretien.

Aussi, les passages répétés dans les ménages furent un atout majeur dans la saisie de certaines pratiques de la solidarité. Il est difficile pour un informateur d’occulter continuellement les réalités de sa quotidienneté. Il arrivait que les enquêteurs assistent à des scènes imprévues alors qu’ils se préparaient à commencer l’entretien.

L’observation directe a permis de percer parfois la loi du silence car sur base des faits vécus, l’enquêteur posait des questions sur des réalités qui ne pouvaient être relevées autrement.

Des entretiens qui me sont parvenus, j’ai constaté que les thèmes de l’inceste et de la sorcellerie n’étaient qu’effleurés par les informateurs ou abordés par un discours indirect. De plus, je n’avais pas les opinions des personnes hébergées. J’ai alors compris que ces questions relevaient de la sensibilité familiale et qu’il convenait de procéder par des études de cas. Pour les cas d’inceste, par la technique de « la boule de neige », j’ai identifié quelques ménages où il y avait effectivement transgression des rapports interdits et j’y ai mené des entretiens. Certains auteurs des rapports sexuels interdits n’acceptaient pas les entretiens. Dans ce cas, je recourais aux membres impliqués dans la résolution du conflit qui m’expliquaient le déroulement et le dénouement de l’affaire. Aussi, j’ai été dans les tribunaux (tribunal de paix et parquet de grande instance) et à la police de protection de la famille, femme et enfant où j’ai recueilli des informations importantes sur les abus et violences sexuels. Je pouvais approfondir les entretiens avec les auteurs emprisonnés. Pour des raisons de secrets judiciaires et de timing, je me suis contenté des données récoltées auprès d’avocats et d’officiers de police judiciaire, surtout que mon objectif était de discuter de l’inceste par rapport au droit écrit congolais.

(24)

Pour les personnes hébergées, les enquêtes ont ciblé les ménages où il y avait des problèmes et cela me permettait de confronter les opinions des personnes en interaction. Ainsi, nous avons travaillé avec quinze personnes parmi lesquelles celles renvoyées des ménages d’accueil, celles qui étaient en conflit avec l’un des époux et enfin celles n’ayant pas, en apparence, de problèmes particuliers.

Combiner les deux approches est une chose, définir l’échantillon en est une autre. Dans les lignes qui suivent, je décris la manière dont j’ai construit mon échantillon.

Construction de l’échantillon

Pour appréhender les faits sociaux de façon objective, la sociologie dépend, du moins théoriquement, de la méthode statistique. Dans beaucoup de cas, ces statistiques présentent des catégories déjà instituées par l’appareil statistique (Heran, 1984), auxquelles on apporte une interprétation. On procède par la construction d’un échantillon. Cependant, cette construction n’est aisée que lorsque l’administration dispose de données fiables. A Lubumbashi, les statistiques ne sont qu’approximatives et douteuses (Rubbers, 2005). Les chiffres avancés par l’administration sont compilés au niveau de la mairie sur base des rapports que les bourgmestres élaborent en collaboration avec les chefs de quartiers et de cellules. Dans ces chiffres, il y a des disparités qui ne peuvent être corrigées que par un recensement scientifique rigoureux.

En dehors du recensement démographique scientifique de 1984  qui avait couvert l’ensemble de la république à Lubumbashi, le dernier recensement sur lequel on pouvait s’appuyer était celui de 2001 qui estimait la population à 1.180.387 habitants.

Néanmoins, par des relevés dans les quartiers, l’administration évaluait la population lushoise en 2008 à 1.422.739 habitants.

Le manque de rigueur dans le traitement des statistiques suscite l’inquiétude quant à leur validité, surtout quand il faut prélever un échantillon. Petit (2003, se rendant bien compte de la difficulté d’avoir des statistiques fiables, conclut néanmoins que « quelles que soient les imperfections de ces chiffres avancés par les administrations, ils ont le mérite de faire au moins ressortir la proportion relative de chaque quartier dans l'ensemble de la ville, ce qui permet de définir un échantillon qui respecte la distribution spatiale » (p. 35).

Faute de trouver des statistiques démographiques fiables pour construire mon échantillon, je me suis basé sur les estimations de la population en 2001, qui paraissaient plus systématisées. Je me propose de travailler avec cents ménages. Les moyens mis à ma disposition ne me permettaient pas de travailler avec un plus grand nombre. De plus, les ressources humaines étaient limitées. Dans ce cas, la rationalité exige que je travaille avec un nombre réaliste, que je pouvais couvrir, étant donné que

(25)

je voulais faire personnellement des enquêtes intensives. Pour connaître le nombre de ménages à enquêter par quartier, j’ai appliqué la règle de trois:

=Population du quartier 2001 x 100 (Nombre de ménages dans léchantillon) 1.180.357 (Population de la ville en 2001)

Après arrondissement des chiffres, nous arrivons à la répartition suivante en tenant compte du poids démographique des communes et quartiers3.

Tableau 1: Répartition des ménages enquêtés par communes et quartiers

Annexe Kamalondo Kampemba Katuba Kenya Lubumbashi Ruashi

Luwowoshi 1 Kitumaini 1 Bel-Air I 3 Bana Katanga 2 Luvua 3 Gambela 2 Bendera 3 Naviundu 1 Njanja 2 Bel-Air II 5 Bukama 1 Luapula 2 Kalubwe 2 Congo 2 Kalebuka 1 Bongonga 6 Kaponda Nord 1 Lualaba 3 Kiwele 1 Kalukuluku 2 Kasungami 1 Industriel 1 Kaponda Sud 2 Lido-golf 3 Kawama 2

Kisanga 2 Kafubu 6 Kisala 2 Lumumba 2 Luano 0

Munwa 1 Kampemba 3 Lufira 2 Makutano 1 Matoleo 3

Kasapa 1 Kigoma 3 Musumba 4 Mampala 7 Shindaika 1

Kimbeimbe 2 Nsele 4

Upemba 3

10 3 27 21 8 18 13

Comment avons-nous opéré le choix des ménages ? L’échantillon est bâti selon la méthode de quotas. Il respecte le poids démographique de la population dans les différents quartiers. Personnellement, j’ai capitalisé les acquis des enquêtes conduites par l’Observatoire dans les ménages en 2000 et 2008. Les résultats de ces enquêtes font état des statuts socio-économiques (riches, moyens et pauvres) sur base des indices de richesse qui avaient été dégagés. Il aurait été intéressant de retrouver tous ces ménages et d’y poursuivre mes enquêtes, mais vu la mobilité des familles, cette entreprise s’est révélée infructueuse4. Parmi les 24 ménages riches de l’étude de 2008, j’en ai retrouvé 225. Ceux-ci ont accepté de se soumettre à nouveau aux enquêtes. Pour les catégories « moyen » et « inférieur », j’ai sélectionné les ménages manquants dans les mêmes espaces urbains en vue de disposer de la même configuration que celle de 2008.

Pourquoi n’ai-je pas tiré tous les ménages au hasard ? Sans préjugés, certains des indicateurs objectifs déterminent le statut économique d’un ménage notamment la

3 Le tableau de la répartition de la population par commune est annexe.

4 Sur les 84 ménages qui constituaient l’échantillon de 2000, 30 ménages (soit 35,7%) ont été retrouvés. Les 54 autres ménages (64,3%) avaient changé de résidence.

5 Je précise ici que l’indice de richesse a été calculé pour tous les ménages y compris les riches présélectionnés.

Ceci pour vérifier si ces ménages riches ont effectivement conservé leur statut socioéconomique.

(26)

taille du ménage, le type de logement, etc. En tirant les ménages au hasard, je courais le risque de ne pas avoir les différentes catégories de la population étant donné que mon échantillon n’est pas très grand. L’étude précédente ayant dégagé les indices de richesse et les ménages ayant accepté de participer à l’étude, il s’avérait important de capitaliser cet acquis. Un autre avantage est que les ménages riches recouvraient l’étendue de mon champ d’étude. Je devais plutôt veiller sur les 78 restants pour ne pas tomber dans la surestimation des ménages riches dans mon échantillon.

Pour contourner cette difficulté évidente, j’ai recouru à la base de données disponible à l’OCU (fiches descriptives) qui renseignait les ménages des précédentes enquêtes. J’ai identifié les quartiers et les avenues où les enquêtes avaient été menées.

J’ai réalisé une cartographie des endroits où mes enquêtes devaient être réalisées pour conserver les caractéristiques de l’échantillon précédent. C’est pourquoi j’ai, à l’instar de l’enquête précédente, recouru au critère de calcul des indices de richesse pour une meilleure catégorisation. Cette orientation est motivée par le souci d’appliquer la même logique à tous les ménages, étant donné que j’avais déjà retenu 22 ménages riches. Appliquer d’autres critères aurait contredit ma cohérence.

Catégorisation des ménages selon leur statut socio-économique

Pour calculer les indices de richesse afin de typifier les ménages, Petit (2003)6 avait tenu compte à la fois du patrimoine (mobilier et immobilier) et du volume de consommation courante. Les patrimoines sont des signes visibles de richesse témoignent indirectement de la consommation et du niveau de vie du ménage.

D’ailleurs, Petit (2003) décrit ce principe avec finesse: « la société lushoise, comme toute la société congolaise d'ailleurs, est un univers où la richesse se donne à voir à travers une série de signes ostentatoires. Pour ceux qui peuvent se le permettre, tenir ses GSM en main, rouler dans une grosse Jeep 4X4, porter des habits de marque, multiplier le nombre de télévisions dans le salon sont autant de manières de se faire reconnaître comme un « grand », un « patron », ou, comme l'on dit ironiquement, comme un « bwana » (terme qui se référait autrefois aux blancs, tous riches par définition). Même l'obésité est une qualité cultivée pour se positionner au sein de ce groupe des puissants : signe d'aisance dans une société où tout le monde ne mange pas tous les jours » (p. 43).

L’extériorisation de ces signes ostentatoires est également liée à la perception populaire selon que les ménages sont bamu ville7 (les habitants du centre ville) ou bamu cité (les habitants de la cité). Ces caractéristiques relèvent de la morphologie multiforme de la ville d’une part, mais aussi de la vision ségrégationniste de l’occupation de l’espace à l’époque coloniale. Ainsi, la ville de Lubumbashi présente

6 Il faut préciser que ce sont les mêmes indices de richesses qui étaient appliquées pour l’étude de 2008.

7 Cf. le rapport d’enquête sur les identités lushoises.

Références

Documents relatifs

REAFFIRMS the current Joint Programme Review Missions concept with its definition of measurable targets that respond to national priorities and the delivery of

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des

Le fait de pouvoir déceler aisément par PCR des délétions du gène NPH1 est d'une importance fondamentale pour le diagnostic, puisqu'il permet, d'une part, d'affirmer

Les sujet présentés sont toujours d’une grande variété, qu’ils s’appuient sur des expériences montées avec du matériel «simple» du laboratoire du lycée

Après tant de préparatifs, tant de renseignements, nous avons peine à croire que Frédéric n'est pas allé chez Pestalozzi. C'est pourtant la réalité. Et comme nous aimerions

Danielle Allet-Zwissig, historienne, Rue de Lausanne 38 A, 1950 Sion Georges Andrey, historien, Rue Jubinbus 9, 1762 Givisiez Thomas Antonietti, ethnologue, case postale 2037, 1950

— la probabilité que le test soit positif (c’est-à-dire qu’il indique qu’il s’agit d’une copie) sachant que le produit est une copie est 0,85;?. — la probabilité que le

On considère que le traitement le plus efficace est celui pour lequel le pourcentage de per- sonnes non dépendantes, parmi les personnes ayant suivi le traitement, est le plus