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Mieux vaut être riche et bien portant...

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Texte intégral

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674 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 23 mars 2011

actualité, info

Une étude issue des services de médecine communautaire des facultés de médecine léma niques jette une lumière crue sur la réa- lité vécue de notre système de santé.1 Un échantillon représentatif de résidents légaux adultes du canton de Genève a été interrogé sur son renoncement à des prestations de santé durant une période d’un an. 14,5%

avaient renoncé à des soins pour des raisons économiques. Parmi les prestations les plus souvent citées, il y a les soins dentaires dans 74% des cas, des consultations médicales (37%), des dispositifs médicaux tels que lu- nettes et appareils auditifs (26%), des médi- caments (13%) ou des interventions chirurgi- cales (5%). Le renoncement à des soins est très fortement corrélé au revenu, le risque de renoncer à des prestations étant neuf fois plus élevé chez les personnes aux revenus

les plus modestes (l 3000 Fr.) que chez les plus aisés (revenu L 13 000 Fr.). De plus, la probabilité de présenter une comorbidité ou un facteur de risque cardiovasculaires est de 54% supérieure chez les «renonçants». Enfin – c’est un détail qui a son importance – chez ceux qui renoncent à des prestations médi- cales sans pour autant se priver de soins dentaires (lesquels ne sont pas couverts par l’assurance de base), on ob serve la même stratification économique.

Ces résultats n’éton neront pas le lecteur familier des travaux des der- nières décennies sur les détermi- nants sociaux de la santé. Pourtant, ils déboulonnent les convictions simplistes d’une grande partie de la classe politique et des médias suisses : notre système de santé est le meilleur du monde. La qualité des soins est au top et toute per- sonne qui en a vraiment besoin est prise en charge sans mettre la main au porte-monnaie. Ou plutôt si, mais franchises et participations aux frais ne sont là que pour «responsabili- ser le consommateur», c’est-à-dire

pour lui enseigner la vertu. Car voyez-vous, notre système de santé (le meilleur du mon de, je l’ai déjà dit ?) est peuplé de médecins âpres au gain, prêts à administrer des traitements futiles, ainsi que de patients hypocondria ques et gaspilleurs, dont le but dans la vie est de bouffer des pilules sans raison et de passer sur le billard pour le plaisir. Heureusement que le lobby des caisses-maladie est là pour nous remettre dans le droit chemin, celui d’une ges tion frugale de notre «capital-santé».

Sans compter qu’une fois l’an, il susurre à l’oreille de la majorité des citoyens provisoi- rement bien portants que la solidarité avec les malades et les vieux leur coûte beau- coup… vraiment beaucoup !…

carte blanche

Pr Alex Mauron

Institut d’éthique biomédicale Centre médical universitaire 1211 Genève 4

alexandre.mauron@unige.ch

Mieux vaut être riche et bien portant…

Créséide d’argent du roi Crésus

de Lydie (561-545 av. J.-C.) Sourc

e Wikimedia Commons ; auteur Jastrow

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 23 mars 2011 675

1 www.theglobalfund.org/fr/whoweare/?lang=fr

En Suisse comme partout, on est plus souvent malade et on meurt plus tôt au bas de l’échelle sociale. Ce sont donc ceux dont le besoin de soins est le plus grand qui ris- quent de devoir y renoncer, par un arbitrage des dépenses dont les classes supérieures sont exemptées. Couper dans le catalogue des prestations, ou tolérer le choix scientifi- quement absurde et éthiquement indéfen- dable d’en exclure la santé bucco-dentaire et la correction de la vue, c’est donc une quadruple discrimination : elle frappe en prio- rité ceux pour qui ces dépenses sont pro- portionnellement les plus lourdes, qui sont le plus à risque de devoir se priver de soins ou d’en priver leurs enfants, et qui ont le plus de chances d’être atteints plus gravement et plus précocement dans leur santé du fait d’être au bas de la hiérarchie socio-écono- mique ; enfin, comme les cotisations LAMal sont indépendantes du revenu, ce sont les économiquement faibles qui payent propor- tionnellement le plus cher pour des soins dont ils se priveront peut-être in fine. Pas de quoi pavoiser !

1 Wolff H, Gaspoz JM, Guessous I. Health care renun- ciation for economic reasons in Switzerland. Swiss Med Wkly 2011;141:w13165.

Source Wikimedia Commons ; auteur Ferdinand Reus

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