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Vue de La vanité et le tragique existentiel dans l’œuvre durassienne

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Academic year: 2022

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Anna Ledwina

Université d ’Opole

La vanité et le tragique existentiel dans l ’œuvre durassienne

Chez Duras, l ’idée de  la  vanité reste associée à  celle de  la  fatalité et  du non-sens de la vie. De ces derniers découlent le tragique existentiel ainsi que l ’absurde. De cette façon, le monde est « surplombé par l ’avoir été… et le jamais plus. […] Tout se passe comme si [l ’auteure] ne pouvait s ’attacher qu ’ à des événements fragiles, évanouis, éteints » (Bajomée, 1989, p. 125, 137). Nous chercherons à prouver que l ’homme, contraint à vivre dans un univers malheureux où toutes les tentatives afin de chan- ger l ’état de choses actuel semblent inutiles, renonce à toute action et accepte son sort incertain. Nos conclusions aboutiront à démontrer que par rapport à la vanité de la condition humaine, les personnages durassiens se soumettent à un destin inexo- rable. La notion de vanité sera entendue dans notre étude en tant que vide et néant.

1. Du dégoût de la vie vers l ’obsession de la mort

Les textes de Duras véhiculent une aversion éprouvée par rapport à la vie. Ce qui donne à l ’auteure la possibilité de percevoir la mort comme une fatalité. De cette façon, dans La Vie tranquille, elle analyse son existence, dressant le bilan de sa vie écoulée :

Voici l ’aurore, la nuit craque de tous les côtés. On la croyait éternelle. On aurait dû dor- mir. Puisque voici un nouveau, un immense jour jusqu ’ à ce soir. Tout est déjà passé. Tout est déjà passé de l ’autre côté, déversé dans le gouffre où les jours s ’entassent lorsqu ’ils ont

n Anna Ledwina – maître de conférences à l ’Institut de Culture et Langue françaises, professeur ex- traordinaire de l ’Université d ’Opole. Adresse pour correspondance : Institut de Culture et Langue fran- çaises de l ’Université d ’Opole, pl. Kopernika 11, 45-040 Opole, Pologne ; e-mail : aledwina@uni.opole.pl Quêtes littéraires nº 8, 2018

https://doi.org/10.31743/ql.3487

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été vidés, et la mort de Jérôme, et ma vie qui traîne le long des années et de mon âge sans y entrer jamais. […] J ’ai vécu de leurs attentes […]. J ’attendais ce qui suivrait […], un matin le soleil s ’est levé mais sur leurs cadavres et il n ’y a rien eu à voir. La maison s ’est refermée […]. C ’est tout. (Duras, 1944, p. 141-142)

L ’aveu de la narratrice, Francine, suggère qu ’elle a l ’impression de ne plus exister.

Elle porte un regard synchronique sur sa vie, privée de sens. Une telle vision est mise en relief par la conception discontinue du temps, ici, à travers le passé composé. Mais, aussi d ’autres temps, le présent et le futur rendent compte de l ’absence. Cette dernière se distingue en tant que trait pertinent des récits durassiens : « autobiographiques ou non, tout a déjà eu lieu : ainsi, ce que raconte Le Navire Night est une histoire déjà morte […]. Toute aventure se bâtit ici sur sa fin, toute relation commencée est déjà rompue partout, quand commence le récit qui fera qu ’elle n ’aura pas de fin » (Bajomée, 1989, p. 136).

Le commencement, qui annonce déjà la fin et montre la vie menacée dès le début par la mort, se manifeste également dans Madame Dodin, dont l ’un des personnages principaux, Gaston, le balayeur, affronte chaque jour la disparition et l ’écoulement du temps :

Il a assisté à tous les événements publics ou privés, qui arrivent dans les rues qu ’il ba- laie. C ’est trop pour un seul homme. […] Et de toutes les réjouissances ou les deuils hu- mains il  n ’aperçoit que  l ’usure, et il n ’intervient que  pour en  accomplir l ’acte dernier, la liquidation des vestiges. (Duras, 1954, p. 151-152)

La perception subjective du temps, qui reste saisi sous un aspect phénoménolo- gique (voir : Merleau-Ponty, 1945, p. 480), aboutit au bouleversement de la dimen- sion narrative en la rendant instable. Obligé de s ’occuper des ordures, le balayeur est très conscient de la fin inévitable de tout. Cela ne lui permet pas d ’oublier le passé, de vivre l ’actualité, mais aussi d ’envisager le futur. Il se trouve dans une incertitude permanente. La même situation concerne Madame Dodin, la concierge, responsable des déchets, qui est désintéressée par l ’existence, car elle n ’observe que l ’effacement des objets.

Le dégoût de la vie rend l ’existence vaine et tue l ’espoir. L ’exemple en constitue la mère d ’Un barrage contre le Pacifique, qui décide de planter un guau, un arbre qui met cent ans à pousser :

Il y avait quelques mois elle avait planté un guau. Les guaus mettent cent ans à devenir des arbres et servent alors à l ’ébénisterie. Elle l ’avait planté un jour de tristesse où sans doute elle désespérait tout à fait de l ’avenir et où elle se trouvait à court d ’idées. Une fois qu ’elle l ’eut planté elle considéra le guau en pleurant et en se lamentant de ne pouvoir lais- ser de traces plus utiles de son passage sur la terre qu ’un guau dont elle ne verrait même pas les premières fleurs. (Duras, 1950, p. 115)

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Ce fragment véhicule l ’obsession de  la  mort, propre pour les  personnages qui n ’envisagent leur existence que  par rapport à  la  fin attendue. Pour cette raison, la coexistence de la vie et de la mort reste indéniable dans le discours durassien.

On y reconnaît, semble-t-il, l ’apport de la vision des contraires de Georges Bataille qui refuse la distinction traditionnelle entre le Mal et le Bien, entre Eros et Thanatos.

Les protagonistes de Duras se rendent compte de l ’inutilité de leur existence et de son caractère momentané. Emblématique à cet égard s ’avère le sort des enfants indigènes dans Un barrage contre le Pacifique :

Ils jouaient. Ils ne  cessaient de  jouer que  pour aller mourir. De  misère. Partout et  de  tout temps. À  la  lueur des  feux qu ’allumaient leurs mères pour réchauffer leurs membres nus, leurs yeux devenaient vitreux et leurs mains violettes. Il en mourrait sans doute partout. Dans le monde entier, pareillement. […] Et bien qu ’il en mourût par mil- liers il y en avait toujours autant sur la piste de Ram. […] Les enfants apprenaient à mar- cher, à nager, à s ’épouiller, à voler, à pêcher, sans la mère, mouraient sans la mère. (Duras, 1950, p. 330-331)

Ainsi, l ’on appréhende la fin du monde, la vanité des actions humaines. Une telle vision exprime un  tragique moderne, d ’après l ’Holocauste et  la  Seconde Guerre Mondiale. India Song présente une image apocalyptique de la réalité. Voici le com- mentaire de Duras à ce propos :

Je pense qu ’India Song est aussi un film sur la fin du monde. Je pense qu ’on est là dans la fin du monde. […] Je pense […] à la disparition de l ’Europe. Ce n ’est pas seulement la mort de l ’histoire qui est écrite dans India Song c ’est la mort de notre histoire. […]

J ’avais trouvé le lieu pour dire la fin du monde. Le colonialisme, ici, c ’est un détail, le co- lonialisme, la lèpre et la faim aussi. Je crois qu ’ici la lèpre a gagné plus loin et la faim aussi.

La faim, elle est aussi à venir, voyez, dans India Song, elle vient. (Duras, 1977, p. 77) Il va de soi que l ’anéantissement acquiert ici une dimension universelle. Ce qui sert à amplifier le désastre et à généraliser le malheur. Chez Duras, la vie et la mort n ’existent l ’une indépendamment de l ’autre, manifestant une sorte d ’alternance entre apparition et disparition, création et destruction :

Parce que  la  terre, c ’est  comme le  reste, comme la  patience, ça use, dit le  barman.

Il a fallu trente millions d ’années […] pour que l ’homme dispose de soixante-quinze cen- timètres de terre végétale, alors à la fin, on a beau replanter tout ce qu ’on mange, la terre, elle en a marre. […] Avec leur bombe atomique, on sera liquidé avant, dit Henri. […] – C ’est curieux dit le barman, même en partant de l ’époque glacière, on en revient toujours aux bombes atomiques. C ’est comme qui dirait, une loi. (Duras, 1952, p. 390-391)

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2. Un destin inexorable

Confrontés à la vanité de leur existence, les personnages durassiens se révèlent in- capables de lutter contre un destin implacable. L ’exemple parfait en est la mère dans Un barrage contre le Pacifique qui, après avoir consacré sa vie à dénoncer l ’adminis- tration coloniale et la corruption, avoue son échec. Elle reconnaît son impuissance vis à vis d ’une destinée contre laquelle il est aussi vain de lutter. Après avoir admis son fiasco, la mère se résigne à devenir indifférente en déclarant : « Je ne vois pas ce que je pourrais faire de  plus si je  me levais. Moi, je  ne  peux plus rien pour personne  » (Duras, 1950, p. 351). Aussi Maud, la protagoniste des Impudents, se comporte-t-elle de la même façon en acceptant, sans rien faire, le « cours infernal » (Duras, 1992, p. 227) de son existence : « Elle n ’en voulut pas une minute à son frère d ’accaparer l ’homme qu ’elle aimait. La fatalité en avait décidé ainsi. Que pouvait-elle, en effet, contre une séduction qui l ’étonnait toujours elle-même ? » (Duras, 1992, p. 90). Une telle attitude caractérise également le voyageur de commerce de Nathalie Granger.

Celui-ci ressent le poids du destin sur sa vie. On observe ses efforts désespérés avant tout lors de sa confrontation avec des client(e)s :

Aucune réaction de la part des femmes. Lui n ’est pas en colère. Il est “dégonflé”, plat.

Se tient devant elles comme devant la fatalité de sa propre vie. Elles ne s ’excusent pas.

Ils se regardent comme s ’ils étaient tous les trois ensemble devant cette même fatalité.

Que le voyageur nommerait : malchance. (Duras, 1973, p. 62)

La précision et la brièveté de son propos mettent en relief la futilité de la parole et de l ’action.

L ’inutilité de  cette dernière reste évoquée aussi dans Le  Marin de  Gibraltar, où la romancière l ’exprime à travers la métaphore du bateau pris dans une vaste tem- pête. « [S]on mouvement continuel et vain » (Duras, 1952, p. 346) est souligné par le fait qu ’il « n ’avançait pas et durait comme il pouvait » (Duras, 1952, p. 346). Ce pro- blème est abordé également dans Les Petits chevaux de Tarquinia dont « la trame, […] est une succession d ’événements minuscules et inopinés dont aucun n ’abou- tit jamais » (Duvignaud, 1995, p. 18-19). Les protagonistes font le même en remet- tant tout au lendemain, « tant la paresse ou simplement le poids étrangement lourd de notre propre existence nous cloue au sol » (Duvignaud, 1995, p. 18-19). Il va de soi que les personnages durassiens décident parfois de délaisser leur engagement et de se concentrer sur leur vie quotidienne. Ainsi, dans Un barrage contre le Pacifique, la nar- ratrice attire l ’attention sur la valeur tragique de la passivité des paysans : « Leur misère leur avait donné l ’habitude d ’une passivité qui était leur seule défense de- vant leurs enfants morts de faim ou leurs récoltes brûlées par le sel » (Duras, 1950, p. 53). Il s ’avère souvent que les personnages durassiens ignorent contre qui ou quoi lutter, car ils doivent affronter des forces obscures, appelées par la narratrice tantôt

« déveine » ou « malchance », tantôt fatalité ou destin. Ainsi, le père de M. Jo, dans

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Un barrage contre le Pacifique, qui a fait tout son possible pour amasser une fortune considérable, comprend la vanité de ses efforts, car le fils n ’est pas capable de réaliser ses rêves :

Monsieur Jo était l ’enfant dérisoirement malhabile de  cet homme inventif. Sa très grosse fortune n ’avait qu ’un héritier, et cet héritier n ’avait pas une ombre d ’imagination.

C ’était là le point faible de cette vie, le seul définitif : on ne spécule pas sur son enfant.

On croit couver un petit aigle et il vous sort de dessous le bureau un serin. Et qu ’y faire ? Quel recours a-t-on contre ce sort injuste ? […] Il n ’avait jamais vu d ’injustice que celle qui l ’avait frappé, lui, en son fils. Et cette fatalité étant organique, irrémédiable, il ne pouvait que s ’en attrister. (Duras, 1950, p. 64)

Ne voulant aucunement se soumettre à la fatalité, il cherche à vaincre le destin en envoyant son fils en France pour étudier, ce qui augmente son malheur comme le suggère, avec ironie, l ’auteure. La jeune fille de L ’Amant évite de s ’opposer au destin en se contentant de se lamenter sur son sort, sur « ce dégoût […] qu ’elle a quelquefois de la vie, quand ça la prend, qu ’elle pense à sa mère et que subitement elle crie et elle pleure de colère à l ’idée de ne pouvoir changer les choses, faire la mère heureuse avant qu ’elle meure, tuer ceux qui ont fait ce mal » (Duras, 1984, p. 123). De cette façon, étant sans illusion sur l ’issue tragique de leurs actions, les personnages durassiens se distinguent par leur « conscience aiguë [et] […] assurée de la vanité des choses » (Vircondelet, 1996, p. 86).

Dans son univers tragique, les  actions sont loin de  modifier des  événements, d ’améliorer la vie des personnages ou même de la rendre supportable. Il n ’est donc pas étonnant que la plupart des histoires s ’ouvrent in medias res et dévoilent une si- tuation tragique où tout est déjà arrivé, soit une crise dont les conséquences sont irréversibles. Pour cette raison, le temps utilisé fréquemment par l ’écrivaine est le fu- tur antérieur qui exclut toute promesse d ’avenir meilleur et  neutralise l ’ouverture sur le futur. Il convient de citer ici Bernard Alazet qui explique ainsi la prédilection durassienne pour ce temps :

C ’est par ce qu ’elle se donne pour objet d ’écriture – ce qui n ’aura pas lieu et qui comme tel se vit –, entendons ce qui n ’aura pas lieu et qui comme tel s ’écrit, que Marguerite Duras rejoint ce rituel tragique de la création. Toute histoire que décline son œuvre témoigne d ’abord de ce qu ’elle ne sera pas, de ce qu ’elle n ’aura pas été. Mise en scène d ’un futur anté- rieur qui conjugue le devenir au passé révolu, et barre d ’un tracé tragique tout avènement des mots. Il est à ce titre peu étonnant que la structure narrative ou théâtrale de nombreux textes de Duras, tels Moderato Cantabile ou India Song, épousent avec tant de minutie le cadre formel de la tragédie classique. (Alazet, 2001, p. 41)

Il semble intéressant de remarquer qu ’aussi les rencontres amoureuses chez Duras sont frappées par le sceau de la fatalité qui pousse les personnages l ’un vers l ’autre,

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l ’un par une force, à la fois, imprévisible et irrésistible. Étant donné cet état de choses, il s ’avère vain de lutter contre la fascination et « le ravissement » qu ’engendre la passion.

Or, les individus se sentent voués, a priori, à une issue fatale, car leurs combats s ’avèrent inutiles et ne provoquent aucun changement. C ’est dans cette optique que l ’on peut interpréter La Musica deuxième. Cette pièce de théâtre raconte l ’histoire d ’un couple qui, après son divorce, se rencontre, afin de parler d ’un bonheur passé. Toutefois, selon Gilles Costaz, « plus ils évoquent cet amour clos, plus ils le ressuscitent […] Mais avec le jour, inéluctable, la fin de l ’histoire surviendra. C ’est avant le lever du jour les der- niers instants de leurs dix dernières heures » (Costaz, 1985, p. 62). Leurs retrouvailles ne servent qu ’ à sceller une rupture définitive ainsi qu ’ à rester fidèles à l ’histoire d ’un amour impossible, comme le montre l ’exemple suivant : « Lui : – je ne comprends pas ce qui se passe. (un temps.) la fin et le commencement mêlés… […] Elle : – Il y a cette solution – ne rien faire – rien – inventer ça » (Duras, 1985, p. 16).

Les personnages durassiens se soumettent à un destin aussi cruel qu ’inexorable.

Antihéros, ils acceptent leur sort, en  s ’habituant à  leur existence. Ils se  replient sur eux-mêmes et ne cessent de s ’interroger au lieu d ’agir. Leur résignation véhicule un tragique existentiel, analysé en ces termes par Clément Rosset : « Le tragique, considéré d ’un point de vue anthropologique, n ’est pas dans un “manque à être”, mais dans un “plein à être” : la plus dure des pensées étant non de se croire dans la pau- vreté, mais de savoir qu ’il n ’y a “rien” dont on manque » (Rosset, 1971, p. 38). C ’est, en quelque sorte, l ’inertie et l ’absence de but qui font naître ce sentiment.

3. L ’absence de sens de la vie

L ’œuvre durassienne se laisse interpréter comme la réflexion sur la vanité de la condi- tion humaine. Il s ’avère que l ’individu ne réussit pas à accepter une réalité funeste et privée de sens. Alain Vircondelet, dans sa biographie consacrée à Duras, soutient que l ’écrivaine offre à ses lecteurs une « ample méditation sur le “sort inconcevable d ’exister”, sur le voyage symbolique de la vie, l ’éternelle errance, l ’inexplicable et ab- surde malédiction de vivre, la douleur d ’avoir découvert trop tôt “le gouffre commun des orphelins du monde” » (Vircondelet, 1991, p. 28). En effet, les personnages du- rassiens se sentent tout à fait perdus dans le monde où ils ne parviennent même pas à contrôler leur destin qui dévoile la nullité de toute action humaine. Ces individus

errent dans un  univers cellulaire, hermétique, dans un  petit endroit délibérément clos où ils deviennent fantoches tragiques. D ’autant plus tragiques qu ’ils sont sans des- tinée, à la différence des héros raciniens. Rien ne vient survoler leur aura […]. Ni passé, ni conscience. Seul le désert. Seul le vide. (Vircondelet, 1972, p. 85)

L ’absence de sens du destin reste caractéristique de plusieurs textes durassiens, tels Le Square, Le Marin de Gibraltar ou encore Détruire, dit-elle. Ils soulèvent aussi

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la question de l ’origine de l ’ être humain. Celle-ci se révèle obscure et l ’avenir de la vie sur terre demeure incertain. Il convient de citer ici Duras qui confirme cette vérité morne lorsqu ’elle déclare : « La vie est une erreur, c ’est une sorte d ’épiphénomène planétaire d ’une absurdité totale » (Beaujour et Mascolo, 1981).

Remarquons que dans ses textes, l ’auteure sensibilise le lecteur au manque de sens de la vie. Un exemple intéressant en est la pièce de théâtre Les Eaux et forêts, dont les personnages (Mr Thompson, Mrs Johnson et Mrs Thompson) mettent en relief le caractère vain de la pensée et de l ’action humaine :

Homme. – Et puis du temps. Oui pour penser, du temps, du temps… des tonnes…

et un parc […] tout, j ’ai tout, tout. Et non seulement j ’ai, mais je fais, j ’agis, je m ’actionne.

Je fais. Je pense. Je varie. Quelquefois je pense je pense je pense. Quelquefois je fais je fais je  fais. Quelquefois je  pense à  ce que je  fais, quelquefois non, je  fais ce  que  je pense, je pense, je fais, je pense, pense, je fais, quelquefois j ’en ai marre, j ’en ai marre… marre.

[…] J ’prends des boulons et je te les visse dans tout ce que j ’trouve […]. Je m ’dis pourquoi ? J ’me d ’mande pourquoi qu ’j ’ai vissé des boulons comme ça toute la journée ; pourquoi ? pourquoi ? […] J ’ai beau fouiller, je trouve plus rien.(Duras, 1965, p. 40-41)

Il semble que la vanité soit omniprésente dans la vie de l ’homme qui, par sa quête du sens de l ’existence, se trouve dans une situation inextricable, écrasé par le monde où « survit seule l ’espèce humaine à la tête vide » (Mascolo, 1979, p. 156). Celui- ci se révèle plein d ’ignorance, d ’indifférence et d ’absurde. La futilité de la vie fait que  la  mère d ’Un barrage contre le  Pacifique pourrait être comparée à  une sorte de « Sisyphe moderne […] rebâtissant ce que les marées viennent de détruire. L ’iné- vitable, le fatal, l ’impossible liaison… » (Vircondelet, 1996, p. 24). Duras, dépassant la dialectique de l ’existentialisme, démontre

une absurdité qui participe d ’une harmonie d ’ensemble, où domine l ’outrance [et dé- crit un univers où] l ’horreur n ’atteint jamais un seuil d ’intolérance, [où] l ’insoutenable spectacle se joue jusqu ’ à son dernier acte [et où il est] impossible d ’attraper le sens de ce qui se fait là. (Lebelley, 1994, p. 53-54)

Elle ne vise pas à expliquer ou dissimuler l ’inanité de l ’existence. A contrario, l ’au- teure attire l ’attention sur le gouffre dans lequel doit exister l ’individu. Sa vision, par le fait d ’attribuer un aspect tragique à la condition humaine, s ’approche de l ’univer- sel. Duras, focalisée sur la vie concrète, persuade que l ’homme ne connaît pas le salut et n ’échappe pas à son conflit avec les forces inexorables de l ’univers. Pour cette raison, son œuvre « est essentiellement tragique, tragique parce que justement, c ’est la totalité de la condition humaine qui entre en jeu et non pas l ’homme de telle ou telle société, ni l ’homme vu à travers, et aliéné par une certaine idéologie » (Ionesco, 1966, p. 154).

Les ouvrages durassiens expriment une quête métaphysique, celle des origines et de l ’identité, en témoignant, du désarroi et du sentiment de manque ressentis par

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l ’ être humain. Celui-ci est constamment en quête de lui-même, de quelque chose de difficile à cerner. L ’individu se voit obligé d ’accepter le sort voué à l ’échec et une éternelle lutte pour trouver un  sens de  son existence. Il  ressent un  manque dans un univers dominé par le néant, entendu comme le non-être. Son attitude traduit la conviction de l ’écrivaine selon qui l ’homme est un être mutilé, comparé à un objet égaré. Une telle carence se manifeste en particulier dans La Vie tranquille où la narra- trice se définit comme une forme creuse, dépourvue d ’identité propre :

La pensée de ma personne de même est froide et lointaine. Elle est quelque part hors de moi, paisible et engourdie comme l ’une d ’entre toutes ces choses qui sont sous le soleil.

Je suis une certaine forme dans laquelle on a coulé une certaine histoire qui n ’est pas à moi.

Je mets à la porter, ce sérieux et cette indifférence avec lesquels on se charge de ce qui ne vous appartient pas. Je pense bien cependant qu ’il pourrait exister un événement qui serait le mien tellement que je l ’habiterais tout entier. (Duras, 1944, p. 136)

Le personnage principal, Francine, est présenté comme une  figure obscure au comportement incohérent, obsédée par « l ’envie de changer d ’existence » (Duras, 1944, p. 62). Un tel désir la pousse à s ’éloigner de la maison familiale et à s ’isoler au bord de la mer, afin de chercher elle-même. Sa quête existentielle s ’exprime à tra- vers le doute concernant elle-même et le monde : « Je ne sais plus comment on pense » (Duras, 1944, p. 127). Elle ne parvient pas à trouver un sens dans sa vie et sa tentative d ’élucidation de son moi demeure vaine :

Il devait m ’arriver quelque chose. J ’attendais que surgisse un matin quelque événe- ment qui me guérisse définitivement de l ’attente ridicule qu ’était devenue ma vie depuis que j ’étais à T… Mais il y a quinze jours que j ’y suis et rien n ’est arrivé. (Duras, 1944, p. 117)

Ainsi, son introspection s ’achève par l ’aveu d ’un échec amer et irrévocable. Les ré- cits postérieurs à La Vie tranquille se concentrent sur une quête d ’ être fondamen- tale au cours de laquelle les protagonistes se libèrent progressivement de leur vie an- cienne, comme dans le roman Le Marin de Gibraltar. Ce texte présente un couple qui se sépare. Le protagoniste vit une crise existentielle qui se traduit par des réflexions sur le sens de la vie, de l ’amour et de la mort. Il se sent malheureux, incapable d ’ac- cepter son sort, à savoir son travail de fonctionnaire et sa partenaire, une femme qui le laisse indifférent. Suivant le conseil de son ami, le narrateur décide de rompre avec sa vie ennuyeuse :

Ces phénomènes dont j ’étais l ’objet m ’impressionnaient un peu sur moi-même. […]

Et ce fut ainsi, en essayant de ne penser à rien, à des choses anodines, en essayant de me rappeler quel jour on pouvait bien être, que l ’enfer commença. […] Fallait-il à mon âge, avoir ces soucis-là ? Quel âge avais-je ? […] Non, décidai-je, je n ’allais pas demander cette

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retraite proportionnelle à mes années de service. Je célébrerai mon anniversaire en […]

oubliant tout à fait ce genre de soucis-là, ces calculs, à la lueur desquels il était évidemment trop tard pour entreprendre quoi que ce soit. […] De nouveau je fus la proie de calculs infernaux. (Duras, 1952, p. 57-59)

Le monologue du personnage révèle sa véritable situation. Le recours aux phrases interrogatives traduit ses hésitations entre un monde stable et un avenir incertain.

L ’introspection faite par le  protagoniste lui permet de  réfléchir sur  la  possibilité de changer le rythme monotone de son existence :

J ’étais un homme libre, sans femme, et qui n ’avait plus aucune autre obligation. […]

Mais on  aurait demandé à  cet homme pourquoi il  avait décidé de  quitter l ’État civil, qu ’il aurait été incapable de le dire. Je venais de rompre avec le monde du bonheur dans la dignité et le travail, parce que je n ’avais pas réussi à les convaincre de mon malheur.

En somme, je ne tenais plus mon destin d ’aucun autre que de moi-même, et désormais ma cause ne concernait que moi seul. (Duras, 1952, p. 124)

À travers ce fragment, l ’on comprend la contradiction entre l ’opinion publique et  l ’avis personnel d ’un homme accablé, se  rendant compte de  la  nature illusoire du bonheur. Libre et seul, il fait la connaissance de la belle Anna, qui cherche son amant, le  marin de  Gibraltar. Toutefois, la  quête de  cet homme mystérieux n ’est qu ’un prétexte ; elle masque l ’angoisse métaphysique des personnages durassiens par rapport au néant qui menace leur vie. Ils tentent d ’oublier l ’écoulement inévitable du temps, « l ’enfer de la vie quotidienne »(Duras, 1952, p. 53). Bien qu ’ils sachent qu ’il est impossible de trouver le marin disparu, l ’essentiel, c ’est la recherche elle- même, comme le montre le passage suivant :

– Parce que ce sont ces histoires-là que je préfère.

– Les fausses histoires ?

– Non, si tu veux, les histoires interminables. Les bourbiers.

– Moi aussi, dit-elle.

– Je vois, dis-je en riant. (Duras, 1952, p. 242)

Il s ’avère que l ’attente du marin ne s ’achève jamais. Anna n ’est pas même convain- cue de l ’existence de ce dernier.

4. Les enjeux du désespoir

Une immersion totale dans le malheur et une expérience tragique rendent les person- nages durassiens sûrs de leur incapacité à échapper au sort commun. Désespérés, ils décident de ne plus vivre d ’illusions en acceptant la déception et le malheur comme

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les composantes de leur existence. Tel est justement le cas des protagonistes du Marin de Gibraltar qui préfèrent les « choses ingrates du monde » (Duras, 1952, p. 258) aux « situations privilégiées » (Duras, 1952, p. 259), ayant le courage d ’exister sans espoir trompeur. Il en va aussi pour la jeune fille de L ’Amant, qui accepte sa situation : Je suis dans une tristesse que j ’attendais et qui ne vient que de moi. […] c ’est un bien- être cette tristesse, celui d ’ être enfin tombée dans un malheur que ma mère m ’annonce depuis toujours quand elle hurle dans le désert de sa vie. […] je ne fais pas du malheur dans lequel je me trouve une question personnelle. (Duras, 1984, p. 57-58)

La vanité de se débattre, de faire du désespoir une affaire individuelle est possible, paradoxalement, grâce au renoncement à l ’espoir. C ’est parce qu ’il a su se familiariser avec le tragique de son existence et le supporter que le jeune homme des Chantiers parvient à réussir dans sa vie et à se rencontrer avec la jeune femme qui le fascine :

Ainsi cette rencontre, insensiblement, cessait, pour l ’homme, d ’ être un  événement de sa vie. Il avait cessé de le voir en spectateur difficile, qui exige la perfection, quand on ne peut attendre pareille perfection que de l ’art. […] Cela venait simplement de ce qu ’il avait eu le courage d ’accepter une première désillusion, comme elle-même avait eu le courage d ’accepter le chantier. […] Ou plutôt, c ’était cela, c ’était cette déception même, du début qui était devenue encourageante. C ’est le fait qu ’elle ait été possible. (Duras, 1954, p. 197) Il en  résulte que  la  force de  l ’homme n ’est pas dans son aspiration à  un  idéal inaccessible, mais dans le  désenchantement entendu en  tant que  changement.

Dès que l ’idée de la mort n ’effraie plus la jeune femme, elle peut affronter la vie telle qu ’elle se présente avec ses désappointements et sa fin fatale. Le désespoir durassien traduit non seulement une prise de conscience de l ’intolérable de l ’existence et l ’im- puissance de l ’ être humain à créer un univers parfait, mais aussi une acceptation de cette évidence, dépassant l ’absurdité de la vie.

Encore un aspect de ce problème est digne d ’attention. Rejeter les mirages prouve une certaine lucidité chez l ’ être humain qui connaît ses limites et admet son impuis- sance à modeler l ’univers et son être profond. Les personnages durassiens se révèlent des individus désespérés, mais forts, capables de surmonter leurs tendances morbides et suicidaires. Maud, le personnage principal des Impudents, allongée sur la berge de la rivière, aurait pu tout simplement s ’y laisser glisser et mettre fin à sa vie, « mais, elle n ’y songea même pas et on l ’eut bien étonnée en lui parlant de suicide, car elle ne troublait son désespoir d ’aucun souci d ’héroïsme » (Duras, 1992, p. 157). Rodrigo Paestra, dans Dix heures et demie du soir en été, n ’était pas attentif aux demandes de Maria qui aspirait à le soustraire au double crime passionnel, en voulant qu ’il

sorte un court instant de l ’ingénuité du désespoir, qu ’il se souvienne de certaines don- nées générales de la conduite humaine, de la guerre, de la fuite, de la haine. Du relais

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de l ’aurore rose sur son pays. Des raisons communes d ’exister, à la longue, à la fin, même après la disparition de ces raisons. (Duras, 1960, p. 65)

Maria aspirait à persuader Rodrigo, en le sauvant de « l ’ingénuité du désespoir », à savoir de la naïveté, de la nécessité d ’oublier l ’idéal auquel il n ’a pu accéder. Se rap- peler des « raisons communes d ’exister » signifie rester fidèle à celles-là bien qu ’elles soient associées au désespoir et au tragique, comme la guerre, mais aussi au sou- rire du monde, comme l ’aurore rose. Emblématique à cet égard reste la constatation du personnage du voyageur de commerce dans Le Square : « si vous cherchez le soleil, c ’est à partir de la nuit » (Duras, 1955, p. 99). La perte de l ’espoir semble dispenser les personnages de Duras du souci de se préoccuper de l ’avenir, leur permettant ainsi de vivre pleinement le moment présent. Cette attitude caractérise la mère du Barrage, qui a connu la vanité de l ’espoir :

Elle avait aimé désespérément la vie et c ’était son espérance infatigable, incurable, qui en avait fait ce qu ’elle était devenue, une désespérée de l ’espoir même. Cet espoir l ’avait usée, détruite, nudifiée à ce point que le sommeil qui l ’en reposait, même la mort, sem- blait-il, ne pouvait plus dépasser. (Duras, 1950, p. 142)

Chez Duras, bien que  l ’individu entreprenne des  démarches, afin de  changer la réalité ou d ’améliorer son sort, ses efforts se révèlent insignifiants. De cette façon, ses textes expriment « la vanité de la Vie qui s ’achève » (Bajomée, 1989, p. 144), à sa- voir la vanité de tout engagement face à une fatalité cruelle de la condition humaine.

Ils manifestent « une tragédie moderne, représentation intense d ’une situation sans issue » (Borgomano, 1990, p. 100), marquée par le non-sens et la douleur.

RÉFÉRENCES

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Vircondelet, A. (1991). Marguerite Duras. Biographie. Paris, France : Éditions François Bourin.

Vircondelet, A. (1996). Marguerite Duras. Vérités et légendes. Photographies inédites. Paris, France : Édition du Chêne, Hachette-Livre.

RÉSUMÉ  : L ’œuvre de  Marguerite Duras est une  profonde réflexion sur  la  vani- té de la condition humaine. Ses ouvrages présentent l ’individu qui se rend compte de l ’impossibilité à vivre dans un monde privé de sens et hostile où tous les efforts pour changer le cours des événements ou d ’améliorer son sort se révèlent insigni- fiants. Ainsi, ils expriment la vanité de toute action humaine, de tout engagement par rapport à une fatalité cruelle des êtres humains. Cet état de choses, résulte, semble-t-il, d ’un lien inséparable de la vie et de la mort, inscrit dans la nature humaine.

Les textes durassiens reflètent la fin d ’un tel monde ainsi que les avatars absurdes d ’un malheur inévitable. De façon dramatique, l ’auteure démontre le tragique exis- tentiel lié, en particulier, à l ’injustice, au désespoir, à la souffrance. Impuissants, éga- rés dans un univers incertain, les personnages durassiens se soumettent passivement à un destin inexorable.

Mots-clés : Duras, vanité, désespoir, malheur, mort

Emptiness and tragedy of human existence in the work of Marguerite Duras ABSTRACT: Duras ’s work is a deep reflection on the emptiness of the human condition.

In her works, a man realizes his/her inability to live in a senseless, unfriendly world in which all efforts to change the course of events or improve fate turn out to be futile.

Therefore they express senselessness of any activity or commitment of the individual as confronted with the cruelty of fate.

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This state of affairs results from the inseparable connection between life and death inscribed in human nature. The works by Duras reflect the end of the world so per- ceived and the absurd manifestations of the inevitable disaster. In this dramatic way, the author shows the tragedy of human existence associated, in particular, with the despair of suffering and injustice. The protagonists who are powerless and lost in pre- carious reality submit passively to unrelenting fate.

Keywords: Duras, emptiness, despair, misfortune, death

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