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Les analogues du GLP-1, LEADER charismatiques contre le diabète ?

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| La Lettre du Cardiologue • N° 497 - septembre 2016

ÉDITORIAL

Les analogues du GLP-1, LEADER charismatiques contre le diabète ?

The analogs of GLP-1, charismatic LEADERs against diabetes?

A près 50 ans d’études randomisées, le bénéfice cardiovasculaire de la lutte contre l’hyperglycémie reste établi à un niveau de preuve médiocre : il a fallu un suivi prolongé de l’essai randomisé UKPDS pour montrer une réduction de la mortalité chez des patients britanniques ayant un diabète récent,

et une méta-analyse des données des essais plus récents évaluant des stratégies de contrôle glycémique ambitieux chez des patients avec un diabète plus ancien, souvent en prévention secondaire, pour montrer un effet modeste (réduction du risque relatif de 10 %) sur l’incidence de l’infarctus du myocarde, sans effet sur la mortalité. Dans ce contexte, les résultats de l’essai EMPA-REG il y a un an concernant l’empagliflozine, et surtout – puisque ce médicament est disponible en France – ceux, en juin dernier, de l’essai LEADER évaluant le liraglutide, un analogue du GLP-1 (Glucagon-Like Peptide- 1), sont revigorants (1).

Qu’est-ce que le GLP-1 et ses analogues ? Le GLP-1 est une hormone incrétine qui contribue à l’homéostasie glucidique de l’organisme après l’alimentation. Lors de celle-ci, le GLP-1 est produit et sécrété par des cellules endocrines du tube digestif. Elle a de nombreux effets qui se conjuguent pour “favoriser” l’assimilation des glucides : elle ralentit le transit intestinal, ce qui étale dans le temps l’arrivée dans la circulation du glucose, et elle agit au niveau des cellules bêta pour amplifier vigoureusement la sécrétion d’insuline, spontanément trop faible dans le diabète de type 2. Plusieurs analogues ont été élaborés pour contourner le handicap pharmacologique de la demi-vie courte du GLP-1 natif. L’exénatide et le liraglutide, des traitements injectables, sont disponibles en France. Ils ont un effet puissant sur la glycémie, mais sont aussi associés à un effet intéressant, bien qu’en général modeste, sur le poids et la pression artérielle ; le liraglutide est aussi associé à une accélération du pouls, par un mécanisme inconnu.

Comme le requièrent les agences du médicament, un essai, LEADER (Liraglutide Effect and Action in Diabetes: Evaluation of Cardiovascular Outcome Results), a évalué en aveugle la sécurité cardiovasculaire du liraglutide à sa dose maximale de 1,8 mg/jour contre placebo chez 9 340 patients, pendant 4 ans. L’hypothèse testée était la non-infériorité, qui a été confirmée. Les analyses exploratoires pré-planifiées ont suggéré une réduction significative du critère principal de jugement,

le triple composite cardiovasculaire habituel (décès de cause cardiovasculaire, infarctus du myocarde ou AVC non fatals), de 13 % (IC

95

: 3-22), et de la mortalité de 15 % (3-26 %). Les participants à LEADER avaient de nombreuses comorbidités, outre le diabète de type 2 : antécédents cardiovasculaires ou multiples facteurs de risque. Faut-il alors considérer que le liraglutide est un traitement indispensable chez un diabétique jugé fragile sur le plan cardiovasculaire, du fait d’un bénéfice s’étendant au-delà de la simple réduction de la glycémie ?

Pr Ronan Roussel

1,2,3

1 Inserm U1138, Centre de recherche des Cordeliers, Paris.

2 Université Paris-Diderot, Sorbonne Paris Cité, Paris.

3 Service de diabétologie-endocrinologie et nutrition, département hospitalo-universitaire FIRE, hôpital Bichat, AP-HP, Paris.

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5 C’est sans conteste un médicament pertinent pour un patient correspondant

à cet essai : outre le haut risque cardiovasculaire, le diabète était ancien (12 ans en moyenne) et la corpulence importante, de plus de 32 kg/m

2

(le remboursement en France n’est acquis qu’en cas d’obésité ; chez les sujets plus minces ayant la même ancienneté du diabète, le recours à l’insuline comme alternative est très fréquent). Une autre caractéristique était remarquable : du fait des critères d’inclusion, l’HbA1c initiale était très élevée, à 8,7 % en moyenne, ce qui n’est pas anodin quand un traitement est un puissant hypoglycémiant, et que le bras témoin reçoit un placebo. Bien sûr, les soignants avaient la consigne d’adapter le traitement antidiabétique en cours d’essai, mais leur étaient interdits les analogues du GLP-1 et les inhibiteurs de la DPP-4 : ne restaient que l’insuline, les sulfamides (inducteurs d’hypoglycémies) et les glitazones (inductrices d’insuffisance cardiaque congestive). Ces traitements étaient plus utilisés in fine dans le bras témoin, ce qui complique l’interprétation des résultats : juge-t-on de la sécurité de la drogue active, ou de l’insécurité, par exemple, des sulfamides du bras témoin ?

De plus, ce manque relatif d’options thérapeutiques, combiné à l’inertie bien connue dans le traitement du diabète, a conduit à une différence importante d’HbA1c entre les 2 bras tôt dans l’essai, qui ne s’atténue que partiellement ultérieurement. Dans ces conditions, quelle contribution à la réduction du risque cardiovasculaire peut-on attribuer au meilleur contrôle métabolique dans LEADER ? Pour répondre à cette question, les méta-analyses (contrôle glycémique intensif versus conventionnel), binaires par nature, ne suffisent pas : il faut avoir une perspective quantitative, qui s’appuie sur la différence effective d’exposition à l’hyperglycémie (2). Estimons celle-ci dans un essai donné, par exemple, en multipliant la différence moyenne d’HbA1c entre les 2 bras par la durée de suivi : le résultat est analogue aux paquets-années du fumeur (grosso modo, cela équivaut à l’aire sous la courbe de l’HbA1c entre les 2 bras au cours du temps [figure, p. 6], qui est la seule façon, dans certaines

études, d’estimer l’exposition). La figure, p. 6, représente la réduction relative du critère cardiovasculaire de chaque essai, en fonction de la différence d’exposition à l’hyperglycémie dans cet essai : la corrélation est très significative, ce qui suggère que, effectivement, la réduction de l’hyperglycémie chronique est un levier efficace dans la réduction du risque cardiovasculaire, pour peu que l’on ait une bonne différence d’HbA1c pendant plusieurs années. On peut tirer une droite de régression, dont la pente est le “rendement cardiovasculaire” de l’équilibre glycémique, soit environ 26 % de réduction du risque relatif pour 1 point d’HbA1c en moins pendant 10 ans. LEADER a, certes, une différence d’HbA1c moindre sur une durée plus courte, mais la différence d’exposition à l’hyperglycémie est substantielle. On peut juger sur la figure, p. 6, que le point estimé pour cette étude est en dessous de la droite de régression, sans en être très éloigné : une part importante du bénéfice cardiovasculaire du liraglutide pourrait être simplement tiré de son bon effet hypoglycémiant.

Des études précliniques portant sur le GLP-1 et ses analogues ont suscité des espoirs pour les nombreux patients diabétiques et insuffisants cardiaques : malheureusement, aucun bénéfice n’a été rapporté dans LEADER sur le critère secondaire des

hospitalisations pour insuffisance cardiaque, alors que, comme on l’a évoqué, des traitements réputés délétères comme les glitazones étaient plus utilisés dans le bras témoin. Les résultats récents de l’étude indépendante FIGHT (Functional Impact of GLP-1 for Heart Failure Treatment) vont également dans ce sens, le liraglutide, comparé

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Figure. Réduction du risque relatif d’événements cardiovasculaires majeurs (MACE) dans les essais évaluant les médicaments fondés sur les incrétines ou le contrôle intensif de la glycémie, en fonction de la différence entre les bras de randomisation de l’exposition à l’hyperglycémie pendant l’essai et son suivi. Les données de LEADER (lira- glutide) et du DCCT-EDIC (diabète de type 1) n’ont pas participé au calcul de la droite de régression.

R2 = 0,91

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2

TECOS EXAMINE

ELIXA SAVOR

VADT ACCORD

ADVANCE

KUMAMOTO DCCT-EDIC UKPDS

LEADER

Différence d'exposition estimée à l'hyperglycémie (en % HbA1c x années) Réduction du risque relatif d’événements ischémiques majeurs (MACE)

au placebo, n’améliorant pas la stabilité clinique des patients (diabétiques ou non !) avec insuffisance cardiaque et fraction d’éjection réduite (3).

Les analogues du GLP-1 occupent déjà une part importante du marché des anti- diabétiques : celle-ci est confortée par LEADER, qui montre un bénéfice cardiovasculaire cliniquement pertinent, porté, tout ou partie, par le puissant effet hypoglycémiant du liraglutide. Le sémaglutide, un autre analogue du GLP-1 du même laboratoire, devrait enfoncer le clou selon une annonce récente, en avant-première des résultats qui seront présentés lors du congrès européen de diabétologie mi-septembre. Pris ensemble, ces essais permettront d’affiner la population la plus à même de tirer parti de cette classe de traitements injectables, dont le coût journalier est élevé. Pour l’instant, les indications de supériorité sont acquises essentiellement chez des patients en prévention secondaire, et l’extrapolation à la population sans antécédent cardiovasculaire, bien plus large, reste une question ouverte.

R. Roussel déclare avoir des liens d’intérêts avec Astra­

Zeneca, Boehringer Ingelheim, Eli Lilly, Janssen, MSD, Novo Nordisk, Sanofi.

1. Marso SP, Daniels GH, Brown- Frandsen K et al.; LEADER Steering Committee; LEADER Trial Investigators. Liraglutide and cardiovascular outcomes in type 2 diabetes. N Engl J Med 2016;375(4):311-22.

2. Steg PG, Roussel R.

Randomized trials to evaluate cardiovascular safety of antihyperglycemic medications. A worthwhile effort? Circulation 2016, sous presse.

3. Margulies KB, Hernandez AF, Redfield MM et al.; NHLBI Heart Failure Clinical Research Network. Effects of liraglutide on clinical stability among patients with advanced heart failure and reduced ejection fraction: a randomized clinical trial. JAMA 2016;316(5):500-8.

Toute

l’équipe Edimark vous souhaite

une belle rentrée 2016 en pleine forme

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