• Aucun résultat trouvé

L' intégration au travail des personnes ayant des incapacités

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "L' intégration au travail des personnes ayant des incapacités"

Copied!
207
0
0

Texte intégral

(1)

1+1

Acquisitions and Direction des acquisitions el Bibliographic services Branch des services bibliographiques 395 Wellinglon Street 395. rue Wellington

Ottawa.Onlario Ottawa (Onlario)

K1AON4 K1AON4

NOTICE

AVIS

The quality of this microform is

heavily

dependent

upon

the

quality of the

original thesis

submitted

for

microfilming.

Every effort has been made to

ensure the highest quality of

reproduction possible.

If pages are missing, contact the

university

which

granted

the

degree.

Sorne pages may have indistinct

print especially if the original

pages were typed with a poor

typewriter

ribbon

or

if

the

university sent us an inferior

photocopy.

Reproduction in full or in part of

this microform is governed by

the

Canadian

Copyright

Act,

R.S.C.

1970,

c.

C-30,

and

subsequent amendments.

Canada

La qualité de cette microforme

dépend grandement de la qualité

de

la

thèse

soumise

au

microfilmage.

Nous avons tout

fait pour assurer une qualité

supérieure de reproduction.

S'il manque des pages, veuillez

communiquer avec l'université

qui a conféré le grade.

La

qualité

d'impression

de

certaines pages peut laisser

à .

désirer, surtout si

les pages

originales

ont

été

dactylographiées

à

l'aide d'un

ruban usé ou si l'université nous

a fait parvenir une photocopie de

qualité inférieure.

La reproduction, même partielle,

de cette mlcroforme est soumise

à

la Loi canadienne sur le droit

d'auteur, SRC 1970, c. C-30, et

ses amendements subséquents.

(2)

L'INTEGRATION AU TRAVAIL

DES PERSONNES AYANT DES INCAPACITES

LUCIE LEGAULT

INSTITUT DE DROIT COMPARE

UNIVERSITE McGILL, MONTREAL

NOVEMBRE J.994

Mémoire soumis

à la Faculté des études supérieures

en vue de l'obtention du diplôme de maîtrise en droit.

(3)

.+.

National Library of Canada

Bibliothèque nationale du Canada

Acquisitions and Direction des acquisitions el Bibliographie Services Branch des services bibliographiques 395 Wellinglon Sireet 395. rue Wellinglon

Qnawa. Onlaria Ottawa (Onlûrio)

K1A0N4 K1AON4

THE AUTHOR HAS GRANTED AN

IRREVOCABLE NON-EXCLUSIVE

LICENCE ALLOWING THE NATIONAL

LmRARY OF CANADA TO

REPRODUCE, LOAN, DISTRmUTE OR

SELL COPIES OF HISIHER THESIS BY

ANY MEANS AND IN ANY FORM OR

FORMAT, MAKING THIS THESIS

AVAILABLE TO INTERESTED

PERSONS.

THE AUTHOR RETAINS OWNERSHIP

OF THE COPYRIGHT IN HISIHER

THESIS. NEITHER THE THESIS NOR

SUBSTANTIAL EXTRACTS FROM IT

MAY BE PRINTED OR OTHERWISE

REPRODUCED WITHOUT HISIHER

PERMISSION.

ISBN

0-612-05498-5

Canad~

L'AUTEUR A ACCORDE UNE LICENCE

IRREVOCABLE ET NON EXCLUSiVE

PERMETTANT A LA BmLIOrrlEQUE

NATIONALE DU CANADA DE

REPRODUIRE, PRETER, DISTRmUER

OU VENDRE DES COPIES DE SA

THESE DE QUELQUE MANIERE ET

SOUS QUELQUE FORME QUE CE SOIT

POUR METTRE DES EXEMPLAIRES DE

CETTE THESE A LA DISPOSITION DES

PERSONNE INTERESSEES.

L'AUTEUR CONSERVE LA PROPRIETE

DU DROIT D'AUTEUR QUI PROTEGE

SA THESE. NI LA THESE NI DES

EXTRAITS SUBSTANTIELS DE

CELLE-CI NE DOIVENT ETRE IMPRIMES OU

AUTREMENT REPRODUITS SANS SON

AUTORISATION.

(4)

REMERCIEMENTS

C'est Monsieur Louis Leclerc qui a éveillé en moi l'intérêt pour ce sujet de recherche. Mesdames Madeleine Caron et Suzanne Thibaudeau m'ont encouragé sur cette voie. Je les en remercie.

Par ailleurs, toute ma gratitude va à Madame Colleen Sheppard qui a accepté de diriger mes recherches. Son encadrement et ses commentaires ont fourni un apport considérable à la réalisation de ce projet.

Je remercie également Monsieur Jérôme DiGiovanni pour sa disponibilité et sa générosité. Nos entretiens m'ont permis de mieux saisir la réalité des personnes ayant des incapacités et ont contribué à approfondir ma réflexion sur le sujet de l'intégration.

J'aimerais en outre exprimer ma reconnaissance aux personnes suivantes pour les informations ou

Id

documentation qu'elles m'ont fournies: Mesdames Sue Williams et Priti Shah (CCDPH), Monsieur Philippe De Massy

(CDPQ) et Mesdames Denise Gagnon (FTQ) , Jeanne D'Arc Mallette (EIC) et Esther Paradis (CEQ).

Je désire de plus remercier les membres du Comité des bourses du Barreau du Québec pour la confiance qu'ils m'ont témoignée en m'attribuant une bourse de perfectionnement.

Les dernières personnes, mais non les moindres, dont j'aimerais

souligner l'appui sont mes parents et beaux-parents, mon frère Benoit et de bons amis: Line, Alain, Judith et Madame B. Merci à mon conjoint Christian pour son dévouement et son encouragement.

(5)

RESUME

Ce projet de recherche analyse la situation cl'emploi des pC'n"';l..")nt1L....~; d)'dut des incapacités et les mesures existantes pour Eavoriser leur

intégration au travail. Il en ressort qu'il s'exerce de la

discrimination systémique contre ces personnes et qu'en out: rc, le}.. mesures actuelles d' intégration souffrent de nombreuses lacunes. lJ0~; stratégies sont proposées pour combler ces carences. Ces st: rdl09 1.es s'inspirent d'une étude comparative avec des modèles étrangers

d'intégration au travail des personnes ayant des incapacités. Les solutions proposées sont de l'ordre de réformes législatives et de modifications à l'organisation du travail.

ABS'l'RAC'l'

This reasearch project analyses the employment status of disabled

persans as weIl as the existing measures te enhance their integratien in the work place. This analysis demonstrates that this group is

confronted with patterns of systemic discrimination and that the actual integration rneasures bear numerous gaps. Different strategies are proposed in order to fill these gaps. A comparative study with foreign integration models contributes to the elaboration of these st~ategies.

The proposed solutions reside in leglslative reforms and modifications to employment rules and practices.

(6)

TABLE DES MATIERES

IN'rRODUCTION 1

REMARQUES PRELIMINAIRES: TERMINOLOGIE ET DEFINITION DE

L'INCAPACITE 5

1. INTEGRATION AU TRAVAIL: CONSTAT D'ECHEC la

1.1. DONNEES SUR LES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES la

1.1.1. DONNEES SUR LA POPULATION 11

1.1.2. DONNEES SUR L'EMPLOI 12

1 . 1 . 3. DONNEES SUR LA SCOLARITE . . . .. 16

1. 1.4. DONNEES SUR LE REVENU . .. . .. . .. .. .. .. . .. .. .. .. .. .. 2a 1.1.5. DONNEES SUR LES QUEBECOIS AYANT DES INCAPACITES .. 21

1.2. OBSTACLES A L'INTEGRATION AU TRAVAIL 22 1.2 .1. OBSTACLES ATTITUDINAUX . . . 22

1.2.2. OBSTACLES ORGANISATIONNELS 30 (A) ACCESSIBILITE . . • . . . • . . . • . . . 30

(B) TRANSPORT ADAPTE . . . • . . . 32

(C) EVALUATION DES EXIGENCES D'EMPLOI ...•... 33

(7)

(E) ACTIVITES SYNDICALES ET CONVENT.WNS

COLLECTIVES J"

(F) SERVICES DE fIAIN-D' OEUVRE J"

(G) PROGRA~INES DE FORNATION J'J

(H) SECURITE DU REVF.NU . . . .. '10

(1) ATELIERS PROTEGES . • . . . • . . . •1:!

(J) EDUCATION SPECIALISEE 47

2. MISE EN OEUVRE DE L'INTEGRATION AU TRAVAIL • . . • . . . • . . . • . . • . . . . 52

2.1. DUALITE D' APPROCHES • . • • . . • • • • • . . . • 52

2.2. MESURES LEGISLATIVES D'ACCES A L'EGALITE • . . • • . . . 55

2.2.1. PROGRAMMES D'ACCES A L'EGALITE EN EMPLOI 55

2.2.2. PROGRAMMES D'OBLIGATIONS CONTRACTUELLES . . . • . . . . 57

2.2.3. PROGRAMMES DE L'OFFICE DES PERSONNES

HANDICAPEES DU QUEBEC . • • • . . . • . . . • . . . • • • • . . • • • • • . . • . . . 59

2.3. MESURES LEGISLATIVES ANTIDISCRIMINATOIRES E'r

DEVELOPPEMENTS JURISPRUDENTIELS • • • . . . • . . • . . • . . . • 63

2.3.1. MESURES LEGISLATIVES ET CONCEPTS JURIDIQUES •.••.• 63

2.3.2. DEVELOPPEMENTS POSITIFS DANS LE DOMAINE DU

DROIT AL' EGALITE • . . . • . • • . • • • . . . • • • • . . • • • . . . 71

(8)

lB) APPLICATION AUX PERSONNES AYANT DES

INCAPACITES 75

2.3.3. DEVELOPPEMENTS RELATIFS A L'OBLIGATION

D'ACCOMMODATION " " BB

(A) PRINCIPES GENERAUX BB

lB) APPLICATION AUX PERSONNES AYANT DES

INCAPACITES 99

2.3.4. DEVELOPPFMENTS RELATIFS A LA DEFENSE D'EXIGENCE

PROFESSIONNELLE NORMALE lOB

(A) PRINCIPES GENERAUX " lOB

(B) APPLICATION AUX PERSONNES AYANT DES

INCAPACITES " 110

3. MODELES ETRANGERS D'INTEGRATION AU TRAVAIL 119

3.1. MODELE AMERICAIN " 119

3.1.1. OBLIGATION CONTRACTUELLE " 119

3.1. 2. "THE AMERICANS WITH DISABILITIES ACT" 122

3.2. MODELE ALLEMAND 132

3.2.1. MESURES GENERALES 132

3.2.2. "THE SEVERELY DISABLED PERSONS ACT" l3B

4. FAIRE DE L'INTEGRATION AU TRAVAIL UNE REALITE SOCIALE 143

(9)

4.1.1. LOIS miNIBUS 1.1.1 4.1.2. PROGRANNES D' ACCES ;\ L'EG.~["I1'E. . . .. 1.1"

4.1. 3. EDUC!>'TION ET FOR~lt\TION 1',11

4.2. NODIFICATION DE L'ORGANISATION DU 1'RAVAIL 1(; 1

4.2.1. CHANGENENT DE LA NORNE DU TRAVAIL 161

4.2.2. ELABORATION D'UNE PROCEDURE D'IN1'EGRJ\1'ION 166

4 • 2 .3. IN1'ROSPECTION DU NONDE SYNDICAL . . . • . . . .. 17 0

CONCLUSION • • • . . . • • • • . . . • • . . . • . . . • . . . • . . . • . . 175

(10)

In her book "Everyone Here Spoke Sign Language", cul turai anthropologist Nora Groce described hot\!

an unusually h1gh rate of profo~nd hereditary deafness in Martha's Vineyard trom the

seventeenth through the early tt'lentieth century created a setting where the cultural meaning of deafness was quite different than it has been elsewhere in the United States. Deal people were completely integrated inta Martha's Vineyard society, and everyone spoke sign language. Even people t"ho ~.,ere not hearing impaired sometimes communicated with one another in sign language. ( ... ) Groce noted in her study

of Martha's Vineyard: "Perhaps the best

description of the status of deaf individuals on the Vineyard ~tlas given to me by an island woman in her eighties, when I asked about those who

~"ere handicapped by deafness when she was a girl. "Oh", she said emphatically, "those people weren't handicapped. They were just deaf" .1

INTRODUCTION

Ce projet de recherche repose sur la prémisse suivante: l'intégration au travail des personnes ayant des incapacités est un objectif social

fondamental. J'en étais convaincue avant de m'intéresser au sujet. Ces quelques mois de recherche et de rédaction nlont fait qu'enraciner cette

conviction. En 1991, il Y avait au Canada 2 297 135 adultes en âge de

travailler qui avaient des incapacités. De ces personnes, moins de la moitié occupaient un emploi rémunéré. La très grande majorité de celles qui sont sans emploi peuvent et veulent travailler, mais les obstacles sont grands, si grands que plusieurs abandonnent l'espoir de travailler. Et cela, dans un pays qui a toutes les ressources humaines, techniques et financières pour réaliser l'intégration au travail des personnes ayant des incapacités.

En terme d'objectifs généraux, je désire démontrer que les personnes ayant des incapacités constituent un groupe désavantagé sur le marché du

1 Martha MINOW, Making All the Difference. Inclusion, Exclusion and American Law, Ithaca, Cornell University Press, 1990, pp.a5 et 94.

(11)

travai1, contre lequel i l s ' exerce de la di sc r iminat.ion ~~\'~~t'.;IlI'\q\ll~. 1\\1 ailleurs, je veux mettre en lumière le fait que les lIleSlll"l:.~~_; lèq.i:;\.ll i\'t'~: d'accès à l'égalité existantes sont insuffisantes pout' llH.:.'ttl"L' f.ill .\ l'l' désavantage. Il m'importe de plus de démontrer que c0rtdill~~ COUt"<lllt:; jurisprudentiels. dans le domaine de la discrimination, ne }~Ol1t- pd::: compatibles avec l'intégration au travail des personne::.. dYdnt dt':: incapaci tés. Je souhaite enfin proposer des solutions r'2ill.hüe:; l'·t efficaces à l'exclusion actuelle du marche du travail des peniOI1Ilt.... :; ayant des incapacités.

Ce projet comporte quatre chapitres, lesquels sont précôdés de brèvC'~1 remarques préliminaires. Ces dernières portent sur la tct"lninoloqie utilisée dans le domaine de 11incapacité et sur la définition (h:~ l'incapacité.

Le premier chapitre constate l'échec de l'intégration au trùvall des

personnes ayant des incapacités au Canada, en analysant leur situation d'emploi. Plus précisément. cet échec est constaté par l'entremise de récentes données de Statistique Canada sur la situation socio-économique des Canadiens ayant des incapacités, à savoir des données sur la

population, l'emploi. la scolarité et le revenu. Une partie du chapitre rapporte des données exclusives aux Québécois ayant des incapacités. Cilr sans se limiter à ce groupe. ce projet met un accent particulier sur la situation qui prévaut au Québec.

On constate également l'échec de l'intégration au travail par

l'identification et l'analyse de nombreux obstacles à l'intégration au travail des personnes ayant des incapacités. La plupart de ces

obstacles relèvent d'un problème d'attitude face à l'incapacité. Certains obstacles, quoique liés à l'attitude, se rattachent à l'organisation du travail et des services connexes au travail.

Le second chapitre porte sur la mise en oeuvre de l'intégration au

travail. Il procède à l'analyse critique des mesures législatives qui sont susceptibles d'aider les personnes ayant des incapacités à

(12)

celles-ci ont à leur disposition deux types de mesures qui reposent sur des approches distinctes: des mesures particulières d'accès à l'égalité et des mesures générales interdisant la discrimination.

Ayant expliqué cette dualité d'approches, le chapitre se penche ensuite sur le contenu des mesures. Les mesures d'accès à l'égalité se

composent, au niveau fédéral. du programme d'accès à l'égalité et du programme d'obligations contractuelles. Au Québec. l'Office des

personnes handicapées du Québec administre trois programmes destinés aux personnes ayant des incapacités.

Quant aux mesures antidiscriminatoires, elles sont prévues dans les

chartes et lois sur les droits de la personne. Etant donné leur

caLactère général, il s'avère indispensable d'analyser la jurisprudence les ayant interprétées. Ces mesures ont engendré des développements jurisprudentiels très positifs dans le domaine général du droit à

l'égalité. Par contre, à l'intérieur de ce àomaine général, des développements particuliers touchant les notions d'obligation d'accommodation et d'exigence professionnelle normale s'avèrent problématiques pour les personnes ayant des incapacités.

Le troisième chapitre étudie, dans une perspective comparative, les

modèles américain et allemand d'intégration au travail des personnes ayant des incapacités. Ce sont deux modèles forts intéressants, quoique conceptuellement très différents. Le modèle américain repose

principalement sur une loi qui interdit la discrimination fondée sur l'incapacité dans plusieurs domaines, dont celui de l'emploi. Dans ce domaine, la loi reconnaît des droits aux personnes ayant des

incapacités, notamment le droit à une accommodation raisonnable. Le programme américain d'obligations contractuelles fait également l'objet d'une analyse comparative. Quant au modèle allemand, il a la

particularité de mettre en place d'une part, des mesures générales pour favoriser l'intégration au travail de l'ensemble des personnes ayant des incapacités et d'autre part, des mesures particulières, notamment une obligation d'embauche, pour favoriser l'intégration au travail des

(13)

personnes ayant des incapacités graves. Le chapitre examine ces deux composan~esdu modèle allemand.

Le dernier chapitre de ce projet de recherche met de l'avùnt des voies de solutions aptes à faire de l'intégration ùu travail des pen;onnC'~; ayant des incapacités une réalité sociale canadienne. Dans un premier temps, des initiatives législatives sont proposées. Il s'agit de l'introduction d'une loi omnibus sur l'incapacité. de réformes

importantes au niveau des mesures d'accès à l'égalité et de l'ùdoption de mesures particulières dans les domaines de l'éducation et de lü formation. Ces propositions ont notamment le souci d'éliminer les obstacles à l'intégration identifiés dans le premier chapitre et de combler les lacunes des mécanismes actuels de mise en oeuvre révélées dans le second chapitre. Certains éléments de propositions s'inspirent en outre des modèles étrangers d'intégration étudiés dans le troisième chapitre.

Dans un second temps, il est proposé de modifier l'organisation du travail de manière à ce que celle-ci n'ait plus l'effet d'exclure les personnes ayant des incapacités. Cela implique d'abord de changer la norme du travail dans laquelle les personnes ayant des incapacités ne se reconnaissent pas. Ensuite, il est impératif que les employeurs

élaborent - et respectent scrupuleusement - une procédure d'intégration au travail qui tienne compte des besoins des personnes ayant des

incapacités. Enfin, le monde syndical doit mettre le cap sur

l'intégration au travail des personnes ayant des incapacités non reliées au travail, notamment en négociant à l'avenir des conventions

collectives exemptes d'effets discriminatoires envers les pernonnes ayant des incapacités .

(14)

REMARQUES PRELIMINAIRES: TERMINOLOGIE ET DEFINITION DE l'INCAPACITE

En 1980, l'Organisation mondiale de la santé 2 a mis au point une

classification des conséquences des troubles. maladies et traumatismes

intitulée Classification internationale des déficiences, incapacités et

handicaps. 3 La CIDIH visait à pallier les lacunes de la classification

fondée sur un modèle médical curatif et à harmoniser la terminologie

dans le domaine de l'incapacité. 4 Cette classification présente les conséquences des troubles, maladies et traumatismes dans un ordre progressif.

Selon ce modèle. la conséquence directe d'un trouble, d'une maladie ou

d'un traumatisme est une dysfonction organique appelée déficience.

Celle-ci entraîne à son tour des limitations fonctionnelles qualifiées

d'incapacités. Enfin, de ces incapacités découlent des désavantages ou

des obstacles dans la réalisation des rôles sociaux appelés handicaps.

Illustrons la CIDIH à l'aide d'un exemple: une personne, interprète de

formation. subit un accident cérébro-vasculaire qui engendre une

paralysie du visage (déficience). Cette paralysie entraîne une

limitation au niveau de la communication orale (incapacité), laquelle la

limitera dans l'exercice de sa fonction d'interprète (handicap).

Il se dégage entre autres de cette classification que les notions

d'''incapacité'' et de lIhandicaptt correspondent à des réalités distinctes. La première est la réduction ou l'absence chez une personne Itde la

capacité d'exécuter une activité de la manière ou dans la plénitude

2 3

4

Ci-après citée "OMS".

ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTE, Classification internationales des

déficiences, incapacités et handicaps, Genève, 1980 (ci-après citée "CIDIH") .

COMITE PERMANENT DES DROITS DE LA PERSONNE ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPEES, Etude concernant les droits de la personne et

la condition des personnes handicapées, Bruce Halliday, président,

Chambre des communes, 3e sess., 34e législ., fasc. no.3, 26 septembre

(15)

considérée comme normale pour un être humain".5 La seconde €Gt un désavantage social découlant de cette réduction ou absence de capacité.

La classification de l'OMS semble suggérer que le handicap découle exclusivement è-es caractéristiques de la personne ayant des

incapacités. 6 Les instances ayant appliqué cette classification ont toutefois reconnu que les caractéristiques de l'environnement

contribuent aussi - et fortement - à l'apparition du handicap. Un environnement peut très bien s'avérer plus handicapant que les

incapacités elles-mêmes. Tel est le cas, par exemple, d'un immeuble inaccessible aux personnes se déplaçant en fauteuil roulant.

Il semble progressivement se former un consensus au Canada quant au

bien-fondé de la classification de l'OMS. Déjà, en 1984, l'Office des

personnes handicapées du Québec la retenait pour l'élaboration de sa politique globale d'intégration des personnes ayant des incapacités intitulée liA part ... égalell

•7 Il en va de même de la conunission royale

d'enquête sur l'égalité en matière d'emploi dont le rapport final fut déposé en 1984. 8 Statistique Canada a également adopté la CIDIH dans le

5 ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTE, op. cit., note 3, p.143.

6 Cette faiblesse de la CIDIH fut d'ailleurs notée par M. Patrick Fougeyrollas, président de la Société canadienne sur la

Classification internationale des déficiences, des incapacités et des

handicaps, lors de son témoignage devant le Comité permanent des

droits de la personne et de la condition des personnes handicapées,

le 26 septembre 1991. Voir COMITE PERMANENT DES DROITS DE LA

PERSONNE ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPEES, op. cit., note 4, pp.9 et 10.

7 OFFICE DES PERSONNES HANDICAPEES ~U QUEBEC, A part ... égale.

L'intégration sociale des personnes handicapées: un défi pour tous. Drummondvil1e, 1984, p.31 et suiv. (ci-après citée "OPHQ").

8 COMMISSION ROYALE D'ENQUETE SUR L'EGALITE EN MATIERE D'EMPLOI,

Rapport de la Commission sur l'égalité en matière d'emploi, j. Rosalie S. Abella, commissaire, Ottawa, centre d'édition du

gouvernement du Canada, approvisionnements et services Canada, 1984, p.43 (ci-après cités "Commission sur l'égalité en matière d'emploi"

et "Rapport Abella"). La Commission, présidée par la juge Rosalie S. Abella, avait le mandat de faire enquête sur la situation d'emploi des femmes, des membres de minorités visibles, des autochtones et des personnes ayant des incapacités. Le Rapport Abella révéla que ces

(16)

cadre des enquêtes de 1986 et de 1991 sur la santé et les limitations d'activités au Canada. 9 Plusieurs autres organismes et associations ont adopté la classification de l'OMS.10

Je partage cette opinion quant au bien-fondé de la CIDIH. La

distinction qu'elle établit entre l'incapacité et le handicap a l'énorme avantage de permettre une double intervention: sur la personne elle-même. pour accroître ses capacités et sur son environnement, pour le

rendre favorable à la réalisation de ses rôles sociaux.

L'un des objectifs de ce projet de recherche est de démontrer que le statut de "personne handicapée" est, dans une large mesure, socialement imposé et qu'une intervention efficace sur l'environnement peut

grandement diminuer et même éliminer les situations de handicap. C'est pour cette raison que j'ai préféré l'expression "personnes ayant des incapacités" à "personnes handicapées" pour désigner le groupe sous étude. 11

groupes étaient sous-représentés et défavorisés sur le marché du travail et proposa des mesures pour remédier à cette situation. 9 STATISTIQUE CANADA, Enquête sur la santé et les limitations

d'activités 1986 - Guide de l'utilisateur. Ottawa, 1988, p.1 (ci-après citée "ESLA 1986"); STATISTSQUE CANADA, Enquête sur la santé et les limitations d'activités 1991 - Guide de l'utilisateur. Ottawa, 1993, pp.3-5 (cl-après citée "ESLA 1991").

10 COMMISSION DES DROITS DE LA PERSONNE, (1989) vol.12, nos.2-3 Forum

droits et libertés 3; GROUPE D'ETUDE SUR LES PERSONNES HANDICAPEES,

Prêts à travailler ... ensemble - Rapport final. Tanis DOE,

coordonnateur et président du Comité de l'emploi de la Coalition des organisations provinciales ombudsman des handicapés (COPOH),

Manitoba, septembre 1991, p.2; FEDERATION DES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES DU QUEBEC, Personnes handicapées - Définitions.

septembre 1993, p.5; COMITE D'ADAPTATION DE LA MAIN-D'OEUVRE POUR L'INTEGRATION ET LE MAINTIEN EN EMPLOI DES PERSONNES HANDICAPEES OEUVRANT SUR LE TERRITOIRE DE L'ILE DE MONTREAL, Outil de gestion des ressources humaines pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes ayant des limitations fonctionnelles - une perspective

d'ensemble, Montréal, mars 1994, p.8.

11 Contra: David VICKERS et Orville ENDICOTT, "Mental Disabi1ity and Equality Rights" dans Anne F. BAYEFSKY et Mary EBERTS (dir.),

Equality Rights and the Charter of Rights and Freedoms. Toronto, Carswell, 1985, p.381, aux pages 383 et 384.

(17)

Il m'apparaît de toute première importance que l'ensemble des instdllces canadiennes oeuvrant dans le domaine de l'incapacité reconnaissent cette distinction entre l'incapacité et le handicap et adoptent une

terminologie harmonisée. Il s'agit d'une étape prélimindire ~ tù réalisation de l'intégration au travail, et sociale en géneral, des personnes ayant des incapacités.

Je désire, avant d'entamer le premier chapitre. définir plus amplement le terme incapacité afin qu'il soit clair pour le lecteur quelles sont les personnes visées dans ce projet. 12 L'incapacité est un terme large qui vise, cormne cela fut mentionné précédenunent. la réduction ou

l'absence de la capacité d'exécuter une activité d'une manière considérée comme normale pour une personne. Les incapacités, aussi appelées limitations fonctionnelles, découlent des déficiences. Ces dernières peuvent être classées ~n plusieurs catégories, à savoir les déficiences intellectuelles, du psychisme, sensorielles, des organes non sensoriels, du squelette et de l'appareil de soutien et les déficiences esthétiques. 13 Quant aux incapacités, elles relèvent des nombreuses manifestations de l'activité humaine: la locomotion, la communication, le comportement, la motricité. l'apprentissage, les soins corporels, etc. 14

Je souligne en terminant qu'il peut très bien arriver qu'une personne ait une déficience qui n'entraîne pour elle aucune limitation

12 Certaines lois sur les droits de la personne définissent l'incapacité ou le handicap. Voir à cet effet le tableau 15, infra, partie 2.3.1. La colonne intitulée "Particularités" identifie les articles

pertinents. Pour la définition de la Commission des droits de la personne du Québec, voir COMMISSION DES DROITS DE LA PERSONNE DU QUEBEC, Les notions de déficience et de désavantage dans la

définition du motif handicap, résolution COM-275-9.2.1., séance du 5 décerncre 1986. Le cadre de ce projet ne commande pas un examen

approfondi de la définition de l'incapacité dans la législation et la jurisprudenr.e. Il est suffisant d'indiquer que la tendance générale au Canada consiste à donner un sens large à l'incapacité. Voir Ede c. Forces armées canadiennes, (1990) 11 C.H.R.R. D/439 (T.C.D.P.). 13 Voir OFFICE DES PERSONNES HANDICAPEES DU QUEBEC, op. cit., note 7,

p.32. 14 Id., p.33.

(18)

fonctionnelle. Pensons à une personne ayant une déficience esthétique, par exemple d'importantes cicatrices au visage. Objectivement, cette personne n'est pas une personne ayant des incapacités car elle n'est pas limitée dans l'accomplissement de ses activités. Elle peut néanmoins rencontrer des obstacles sur le marché du travail. ou ailleurs. parce que sa déficience esthétique est perçue comme une incapacité. Ce

phénomène s'appelle celui de la perception de l'incapacité. Il se peut par ailleurs qu'une déficience soit perçue. par opposition à réelle. L'expression "personnes ayant des incapacités" vise indistinctement les personnes dont les incapacités sont réelles et celles dont les

incapacités sont perçues. 15

15 Certaines lois sur les droits de la personne incluent la perception

de l'incapacité parmi les motifs illicites de discrimination. Voir

Code des droits de la personne, S.R.O. 1990, c.H-19, art.10(1)

(Ontario) et Human Rights Act. R.S.N.S. 1989. c.214. art.3(1)

(Nouvelle-Ecosse). Il est par ailleurs admis dans la jurisprudence

que l'interdiction de la discrimination sur la base de l'incapacité

vise tant l'incapacité réelle que perçue. Voir notamment Biggs c.

Hudson, (1988) 9 C.H.R.R. 0/5391 (B.C. Human Rights Counci1) (dans le contexte du SIDA) et Hamlyn c. Cominco Ltd., (1990) 11 C.H.R.R. 0/333

(19)

1.INTEGRATION AU TRAVAIL: CONSTAT D'ECHEC

L'objectif de ce premier chapitre est d'analyser la situation d'emploi des Canadiens qui ont des incapacités. Nous réaliserons cet objectif. dans un premier temps, en examinant des données statistiques sur les Canadiens ayant des incapacités. Nous nous intéresserons plus

précisément à des données sur l'emploi, l'éducation et le revenu. Dans un second temps, nous verrons quels sont les obstacles à la réalisation de l'intégration au travail des personnes ayant des incapacités.

1.1.DONNEES SUR LES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES

En 1986 et plus récemment, en 1991, Statistique Canada a réalisé des

études sur l'incapacité, toutes deux intitulées "Enquête sur la santé et les limitations d'activités".16 Il S'agit d'enquêtes postcensi.t.aires visant à constituer une base de données nationale sur l'incapacité. 1?

Comme nous le verrons ci-après, les enquêtes de 1986 et de 1991 ont

révélé que les personnes ayant des incapacités vivent une situation de sous-emploi, de sous-scolarisation et de pauvreté. 1B

16 ESLA 1986 et ESLA 1991, op.cit., note 9.

17 L'ESLA comporte deux volets: une enquête auprès des enfants et des adultes vivant dans un ménage et une autre auprès des adultes vivant

dans un établissement institutionnel. Pour les fins du sujet sous

étude, seules les données portant sur les adultes âgés de 15 à 64 ans

et vivant dans un ménage seront considérées car seule cette portion

de l'enquête touche le domaine de l'emploi.

18 Les résultats qui suivent proviennent de l'enquête de 1991, à

l'exception des données sur le revenu qui ne sont pas disponibles.

Les données de 1986 serviront, au besoin, à évaluer l'évolution de la

situation. Une mise en garde s'impose toutefois quant à la

comparaison des données des deux enquêtes. En 1991, Statistique Canada a eu recours à une méthodologie d'enquête différente de celle de 1986 qui a permis de dénombrer de manière plus exhaustive les personnes ayant des incapacités liées à des difficultés

d'apprentissage, à des problèmes de santé mentale et à la déficience intellectuelle. Cela a contribué à l'augmentation du nombre de

personnes ayant des incapacités. surtout chez les personnes ayant des incapacités légères. D'autre facteurs, comme le vieillissement de la

(20)

1.1.1. DONNEES SUR LA POPULATION

En 1991. les Canadiens ayant des incapacités qui étaient âgés de 15 à 64 ans et qui vivaient dans un ménage étaient au nombre de 2 297 135. Ils représentaient 12,7% de la population canadienne âgée de 15 à 64 ans et vivant dans un ménage. En 1986, leur représentativité était de 10,4%.19

TABLEAU 1: CANADIENS AYANT DES INCAPACITES ET VIVANT DANS UN MENAGE -REPARTITION SELON L'AGE

15 - 34 ANS 29,4%

35 - 54 ANS 43,2%

55 - 64 ANS 27,4%

TABLEAU 2: CANADIENS AYANT DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE - REPARTITION SELON LE SEXE

FEMMES HOMMES

50,5% 49,5%

TABLEAU 3: CANADIENS AYANT DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 34 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE - REPARTITION SELON LE DEGRE D'INCAPACITE

INCAPACITE LEGERE 54,4% INCAPACITE MOYENNE 31,6% INCAPACITE GRAVE 14,0%

population et la plus grande propension des gens à déclarer des limitations d'activités et des obstacles auxquels ils font face, ont également influencé les résultats. Voir STATISTIQUE CANADA, ESLA 1991, op. cit., note 9, p.xi.

19 Toutes les données sur la population proviennent de l'ESLA de 1991: STATISTIQUE CANADA, Enquête sur la santé et les limitations

d'activités 1991, Caractéristiques de l'emploi et du niveau de scolarité chez les adultes ayant une incapacité, cat.no.82-554,

(21)

COHHENTAIRE

Il ressort des données sus-mentionnées que les personn8S ilYdnt dl~S incapacités constituent un important segment de la population

canadienne, soit 12,7% des personnes âgées de 15 à 64 ans et viV~lnt d(H1~"; un ménage.

Il est surprenant de constater que les personnes âgées de 55 Ù 64 ùns forment le groupe le plus restreint. Des facteurs comme

l'intensification du vieillissement de la population et le processus naturel du vieillissement porteraient, il me semble, à évaluer ce groupe à la hausse. Il est par ailleurs intéressant de noter qu'une proportion à peu près égale de femmes et d'hommes ont des incapacités. Il aurait été raisonnable, à mon avis, d'estimer la proportion d'holrunes plus élévée, compte tenu de leur présence traditionnellement supérieure sur le marché du travail et donc, des risques accrus d'accidents ou de troubles liés au travail.

Enfin, les données indiquent que les personnes ayant des incapacités graves sont largement minoritaires par rapport à celles ayant des incapacités légères ou moyennes. 20

1.1.2. DONNEES SUR L'EMPLOI

Quelques définitions aideront à la compréhension des résultats de l'ESLA portant sur l'emploi.

INCAPACITE: L'Enquête sur la santé et les limitations d'activités emploie la définition

20 Statistique Canada évalue le degré d'incapacité selon un système de points basé sur l'incapacité d'exécuter une liste donnée de

fonctions. L'incapacité partielle d'exécuter une fonction équivaut à un point et l'incapacité totale à deux. Une incapacité légère

correspond à moins de 5 points, une incapacité moyenne à entre 5 et 10 et une incapacité grave à plus de 10. Voir STATISTIQUE CANADA. ESLA 1991. op. cit., note 19, p.3?1.

(22)

e

d'incapacité de l'Organisation mondiale de la santé. qui se l i t comme suit: " ... toute

réduction ou absence (résultant d'une déficience) de la capacité d'exécuter une activité de la manière ou dans la plénitude considérée comme normale pour un être humain. ,,21 pERSONNES OCCUpEES: Personnes qui, au cours de la semaine ayant précédé le dénombrement de l'ESLA de 1991: a) avaient fait un travail quelconque, à l'exclusion des travaux ménagers, des travaux d'entretien ou des réparations dans leur propre logement et du travail bénévole; b) étaient temporairement absentes de leur travail ou de l'entreprise à cause d'un conflit de t:ravail, d'une maladie ou d'une incapacité

temporaire, de vacances, ou encore pour d'autres raisons. 22

CHOMEURS: Personnes qui, pendant la semaine ayant précédé le dénombrement de l'ESLA de 1991: a) étaient sans travail, mais avaient cherché un emploi au cours des quatre semaines précédentes et étaient prêtes à travailler; ou b) avaient été mises à pied mais prévoyaient reprendre leur travail; ou c) avaient pris des dispositions précises en vue de se présenter à un nouvel emploi dans les quatre semaines suivantes. 23 INACTIFS: Personnes qui, pendant la semaine ayant précédé l'ESLA de 1991. ne voulaient pas ou ne pouvaient pas travailler compte tenu des conditions existant sur le marché du travail. 24

Je suis d'avis que la terminologie française utilisée par Statistique Canada porte à confusion, notamment quant au statut de personne

inactive. Par exemple, une personne faisant des études ou du travail bénévole est considérée inactive. Pour plus de clarté, j'utiliserai ciaprès une terminologie se rapprochant de la terminologie anglaise

-"employed, unemployed or not in the labour force"- soit, une personne au

21 Id .• p. 370. 22 Id.

23 Id. 24 Id.

(23)

travail (plutôt que personne occupée), une personne en chômage et une personne ni au travail, ni en chômage (plutôt que personne inactive).

TABLEAU 4: SITUATION D'EMPLOI DES CANADIENS AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT D~,S UN MENAGE 25

PERSONNES AYANT DES PERSONNES N'AYANT PAS INCAPACITES D'INCAPACITE

AU TRAVAIL 48,2% (40% en 1986) 72,9%

EN CHOMAGE 8,1% l n en 1986)

7,n

NI AU TRAVAIL, 43,

n

(51% en 1986) 19,1'1, NI EN CHOMAGE

TABLEAU 5: SITUATION D'EMPLOI DES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE - REPARTITION SELON L'AGE

15 - 34 ANS 35 - 54 ANS 55 - 64 ANS

AU TRAVAIL 54,1% 57,0% 27. 9'li

EN CHOMAGE 12,3% 7,6% 4,4%

NI AU TRAVAIL, 33,6% 35,4% 67,8%

NI EN CHOMAGE

TABLEAU 6: SITUATION D'EMPLOI DES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE - REPARTITION SELON LE SEXE

FEMMES HOMMES

AU TRAVAIL 40,

n

55,8%

EN CHOMAGE 7,8% 8,4%

NI AU TRAVAIL, 51,5% 35,8%

NI EN CHOMAGE

25 Les données sur l'emploi proviennent de l'ESLA de 1991: STATISTIQUE

(24)

TABLEAU 7: SITUATION D'EMPLOI DES CANADIENS AY~,T DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE - REPARTITION SELON LE DEGRE D'INCAPACITE

INCAPACITE INCAPACITE INCAPACITE

LEGERE MOYENNE GRAVE

AU TRAVAIL 62,1% 37,4% 18,5%

EN CHOMAGE 8,8% 7,4% 7,2%

NI AU TRAVAIL, 29,1% 55.2% 74,4%

NI EN CHOMAGE

COMMENTAIRE

Un écart de 25% sépare les personnes ayant des incapacités de celles

n'en ayant pas quant à leur présence sur le marché du travail. En

effet. à l'époque de l'enquête, seulement 48,2% des personnes ayant des incapacités travaillaient contre rémunération, alors que cette

proportion s'élevait à 72,9% chez les personnes n'ayant pas d'incapacité.

Afin de déterminer l'ampleur du problème de sous-emploi vécu par les personnes ayant des incapacités. il faut identifier la proportion de personnes voulant travailler parmi celles qui ne travaillent pas.

Les résultats indiquent d'une part que 8,1% des personnes ayant des incapacités sont en chômage. Ce sont. comme le prévoit la définition d'une personne en chômage dans l'enquête, des personnes voulant

travailler.

D'autre part. l'enquête révèle que 43,7% des personnes ayant des incapacités ne sont ni au travail, ni en chômage. Pour diverses raisons, celles-ci ne désirent pas toutes travailler. Les résultats indiquent que 91,7% de ces personnes veulent travailler. 26 Cela revient

(25)

à dire que les personnes qui ne sont ni au travail, ni ("Il c1Hll1\,Hll' l't qui ont déclaré vouloir travailler représentent 40.1'~ des perSL)I\lh'~; dy.-mt" des incapacités. En additionnant ce pourcentage (40.1'(,) :, cC'lu.i nl~:: personnes en chômage (8,1%), l'on arrive à la conclusion que ·lH.:~'l. t!l':1 personnes ayant des incapacités sont absentes du marché du t1'':\\'1111 d Ion; qutelles voudraient travailler. Compte tenu du fait qu1un autl'L' .Hl,:~'I.

des personnes ayant des incapaci tés ont un emploi. cela laü.is0 lll1ù

faible proportion de personnes ne voulant pas travailler, soit J,6'1" Ces données démontrent avec éloquence la gravité du prob101l1e de ~;O\W­ emploi chez les personnes ayant des incapacités. Notons toutel:ohl que ces données ne permettent pas d'évaluer, parmi les personnes qui

occupent un emploi rémunéré, celles qui ont un emploi précaire ou pour lequel elles sont sur-qualifiées.

Les données spécifiques sur llâge, le sexe et le degré d'incapacité indiquent que le problème de sous-emploi touche certains groupe:::: de manière plus aiguë. Il s'agit des personnes plus âgées (55-64 ans) ùont seulement 27,9% travaillent, des femmes dont 40,7!~ ont un emploi ûlonl que cette proportion se situe à 55,8% chez les hOllunes et en[in. cles personnes ayant des incapacités graves. La situation atteint ~10n sommet chez ce groupe qui a un taux d1emploi de seulement 18%.

l ,1,3, DONNEES SUR LA SCOLARITE

TABLEAU 8: PLUS HAUT NIVEAU DE SCOLARITE ATTEINT PAR LES CANADIENS AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE27

PERSONNES AYANT PERSONNES DES INCAPACITES N'AYAN'r PAS

D'INCAPACI'rE

ANCUNE ETUDE 1,7% 0, 11!Ii

ETUDES PRIMAIRES 18.1% 7.7%

ETUDES SECONDAIRES 44,9% 113,1!Ii

27 Les données sur la scolarité proviennent de l'ESLA de 1991:

(26)

CERTAINES ETUDES POSTSECONDAIRES 10,8% 12,9%

'rITULAIRES D'UN CERTIFICAT OU 18,7% 22,3%

DIPLOl1E

TITULAIRES D'UN GRADE 5,9% 13,6%

UNIVERSITAIRE

TABLEAU 9: PLUS HAUT NIVEAU DE SCOLARITE ATTEINT PAR LES CANADIENS AYANT DES INCAPACI'rES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN l1ENAGE

-REPARTITION SELON LA SITUATION D'EMPLOI

AU TRAVAIL EN CHOMAGE NI AU TRAVAIL. NI EN CHO~IAGE ANCUNE ETUDE 1.2% 0.7% 2,4% ETUDES PRIMAIRES 11,2% 17,3% 25,7% ETUDES SECONDAIRES 43,0% 47,1% 46,7% ETUDES POSTSECONDAIRES 12,8% 11,3% 8,4% NON COl1PLETEES TITULAIRES D'UN 23,6% 19,3% 13,1% CERTIFICAT OU DIPLOME

TITULAIRES D'UN GRADE 8,2% 4,2% 3,6%

UNIVERSITAIRE

TABLEAU 10: PLUS HAUT NIVEAU DE SCOLARITE ATTEINT PAR LES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES ET VIVANT DANS UN MENAGE - REPARTITION SELON L'AGE

15 - 34 ANS 35 - 54 ANS 55 - 64 ANS

ANCUNE ETUDE 2,0% 1,7% 1,4% ETUDES PRIMAIRES 5,6% 15,9% 34,8% ETUDES SECONDAIRES 53,2% 43,0% 39,1% CERTAINES ETUDES 15,1% 10,1% 7,2% POSTSECONDAIRES TITULAIRES D'UN 19,3% 21,5% 13,5% CERTIFICAT OU DIPLOME

TITULAIRES D'UN GRADE 4,7% 7,8% 4,1%

(27)

TABLEAU Il: PLUS HAUT NIVEAU DE SCOLARITE ATTEINT PAR LES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE -REPARTITION SELON LE SEXE

FE~n-lES Hmn-IES ANCUNE ETUDE 1,7% 1,7% ETUDES PRIMAIRES 16,4% 19,8% ETUDES SECONDAIRES 46,5% 43,3% CERTAINES ETUDES 11, 0% 10,6% POSTSECONDAIRES TITULAIRES D'UN 18,9% 18,5% CERTIFICAT OU DIPLOME

TITULAIRES D'UN GRADE 5,6% 6,2%

UNIVERSITAIRE

TABLEAU 12: PLUS HAUT NIVEAU DE SCOLARITE ATTEINT PAR LES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE -REPARTITION SELON LE DEGRE D'INCAPACITE

INCAPACITE INCAPACITE INCAPACITE

LEGERE ~IOYENNE GRAVE

ANCUNE ETUDE 0,9% 2,0% 4,1% ETUDES 12,5% 23,3% 27,7% PRIMAIRES ETUDES 47,4% 42,8% 40,3% SECONDAIRES CERTAINES 12,3% 9,1% 8,5% ETUDES POSTSECONDAIRES TITULAIRES D'UN 19,6% 18,3% 15,9% CERTIFICAT OU DIPLOME TITULAIRES D'UN 7,2% 4,6% 3,5% GRADE UNIVERSITAIRE

(28)

COMMENTAIRE

Il ressort des données ci-dessus que les personnes ayant des incapacités

sont sous-scolarisées. Les données du taLleau 8 permettent de constater qu'il existe un écart important entre la scolarité de ce groupe et celle du groupe des personnes n'ayant pas d'incapacité. En effet, 8,1%

d'entre elles n'ont fait aucune étude ou seulement des études primaires. Chez les personnes ayant des incapacités, cette proportion se situe à 19,8%. Par ailleurs, un écart significatif apparaît au niveau

universitaire: 13,6% des personnes n'ayant pas d'incapacité sont titulaires d'un grade universitaire, alors que seulement 5,9% des personnes ayant des incapacités détiennent pareil diplôme.

Les données du tableau 9 révèlent que les personnes ayant des

incapacités qui occupent un emploi sont beaucoup plus scolarisées que celles qui nlen occupent pas. En effet, 31,8% des personnes au travail

sont titulaires d'un certificat. d'un diplôme ou d'un grade

universitaire. Chez les personnes en chômage, ce taux se situe à 23,5% et chez celles qui ne sont ni au travail, ni en chômage, il est encore plus bas, soit de 16,7%. Cela démontre qu'il existe un lien direct entre la scolarisation et l'intégration au travail.

Les données des tableaux 10 à 12 indiquent que les personnes du groupe d'âge des 55 à 64 ans et celles ayant des incapacités graves sont les

moins scolarisées, alors qu'aucune différence significative de scolarité

ne s'établit entre les femmes et les hommes. Plus précisément. il

ressort clairement de cette partie de l'enquête que le niveau de

scolarité décroît au fur et à mesure que s'accroissent l'âge et le degré

(29)

1.1 .4. DONNEES SUR LE REVENU

TABLEAU 13: REVENU DES CANADIENS AYANT DES INCAPACITES, AGES DE 15 A 6.1 • ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE28

MOINS DE 1 000$ 21,5% DE 1 000 - 4 999$ 16,1% DE 5 000 - 9 999$ 18,1% DE

la

000 - 14 999$ 11,3% DE 15 000 - 19 999$ 7,6% DE 20 000 - 24 999$ 7,2% DE 25 000 - 29 999$ 5,6% 30 000$ ET PLUS 12,5%

Le tableau ci-dessus démontre qu'une proportion importante de personnes ayant des incapacités se trouve dans une situation financière précaire. En effet, près de 56% des personnes visées par l'enquête ont déclaré avoir touché un revenu inférieur à

la

000$ en 1985, Les données de l'ESLA de 1986 indiquent par ailleurs qu'environ 23% des personnes interrogées ont déclaré qu'une partie ou la totalité du revenu qu'ils ont touché en 1985 leur avait été versé en raison de leurs

incapacités ,29 Enfin, 37% des personnes ayant des incapacités ont affirmé devoir acquitter des frais supplémentaires pour l'achat de

28 Les données sur le revenu proviennent dp. l'ESLA de 1986: STATISTIQUE CANADA, Enquête sur la santé et les limitations d'activités 1986

-Faits saillants: personnes ayant une incapacité au Canada, cat.no.82-602, Ottawa, 1990, pp.3-21. Notons que le tableau 13 exprime le revenu brut gagné en 1985 et provenant de toutes sources, Par ailleurs, la rubrique "moins de 1 000$" inclut les revenus nuls ou négatifs. Voir aussi CANADA, SECRETARIAT D'ETAT, Profil économique des personnes ayant des incapacités au Canada - Analyse des tendances

sociales, Ottawa, 1990;

(30)

médicaments non remboursés par un programme d'assurance ou un programme gouvernemental. 30

1,1,5. DONNEES SUR LES QUEBECOIS AYANT DES INCAPACITES

Selon l'ESLA de 1991, le nombre de Québécois âgés de 15 à 64 ans, vivant

dans un ménage et ayant des incapacités s'élève à 423 540 personnes. 31 Cela ~~présente 18,4% de la population canadienne ayant des incapacités. Les données sur l'emploi au Québec démontrent une présence sur le marché du travail inférieure à la moyenne canadienne. En effet, 38,5% des Québécois ayant des incapacités occupent un emploi, alors que la moyenne

canadienne se situe à 48,2%.32 Il n'y a toutefois pas d'écart quant aux

personnes en chômage: elles représentent 8% de la population ayant des

incapacités au Québec et 8,1% au Canada. Par conséquent, la proportion

de personnes ayant des incapacités qui ne sont ni au travail, ni en

chômage est plus élevée au Québec - 53,5% - que dans l'ensemble du pays - 43,7% - L'écart entre le Québec et la moyenne canadienne se fait

30

31

surtout sentir chez les personnes âgées de 35 à 54 ans, chez les femmes et chez les personnes ayant des incapaci tés .I\oyennes et graves.

Il ressort des deux enquêtes postcensitaires de Statistique Canada que les Canadiens qui ont des incapacités et qui sont en âge de travailler

ont les trois caractéristiques suivantes: scolarisation, sous-emploi et pauvreté. Il m1apparait que la première caractéristique explique en partie la seconde et que la troisième soit la conséquence

inévitable des deux premières.

Id.

Les données sur le Québec proviennent de l'ESLA de 1991: STATISTIQUE CANADA, op. cit., note 19, pp.2, 14, 16, 18 et 26. Pour une analyse statistique plus approfondie, basée sur l'ESLA de 1986 toutefois, voir: OFFICE DES PERSONNES HANDICAPEES DU QUEBEC, La main-d'oeuvre

ayant des incapacités au Québec, collection statistiques,

Drummondville, 1993.

32 Cet écart est moins important chez la population n'ayant pas

d'incapacité: 68,5% des québécois n'ayant pas d'incapacité occupent

(31)

1.2. OBSTACLES A L'INTEGRATION AU TRAVAIL

Il existe de nombreux obstacles à l'intégration au travail des personnes

ayant des incapacités. Il serait illusoire de vouloir tous les analyser. Par conséquent, cette partie portera sur les principaux obstacles à l'intégration qui seront présentés en deux catégories, à savoir les obstacles attitudinaux et les obstacles organisationnels. Notons que cette classification a quelque chose d'artificiel car la plupart des obstacles organisationnels sont intimement liés aux nombreux préjugés et mythes entourant l'incapacité ou, en d'autres termes, aux obstacles attitudinaux.

1.2.1. OBSTACLES ATiiTUDINAUX

Les seules barrières à l'intégration au travail des personnes handicapées sont humaines. Je

suis paraplégique depuis 1963, c'est le

cinquième emploi que jloccupe, avec quelques périodes de chômage, où j'ai dû répondre à bien des annonces et frapper à beaucoup de portes. Une fois, on m'a répondu: liNon, on ne prend pas

dl handicapés ici." Pourquoi? Personne nia voulu me répondre. ( ... ) J'avais beau leur dire que jlavais de l'expérience dans ce travail-là, que mes mains, elles nlétaient pas paralysées, rien n'y a fait. 33

Les personnes ayant des incapacités affirment sans équivoque que les

obstacles liés aux attitudes figurent parmi les plus nuisibles à leur intégration au travail. Les attitudes négatives auxquelles elles font face les limitent considérablement quant à l'embauche, la formation, le

maintien en emploi et llavancement.

33 Gloria ESCOMEL et Claudine BASTIDE, "Intégrer des personnes

handicapées au travail: où est le problème?", (1989) vol.12, nos.2-3

Forum droits et libertés 13. Voir aussi Dianne POTHIER, "Miles Ta Go: Sorne Personal Reflections on the Social Construction of

Disability", (1992) 14 Dal. L. J. 526: "The greatest handicap l face as a visually disabled person is not the physical limitations

occasioned by the poor eyesight, but rather the attitude of others toward my disability." (p. 526)

(32)

C'est d'ailleurs la conclusion à laquelle est arrivée la Commission sur l'égalité en matière d'emploi dans le rapport qu'elle a déposé en

1984. 34 Le Conseil canadien de la réadaptation et du travail abonde dans le même sens. 35

L'Office des personnes handicapées du Québec a identifié plusieurs

problèmes attitudinaux dans le document "A part. .. égale" dans lequel i l énonce sa politique d'intégration sociale des personnes ayant des

incapacités:

Une déficience, physique ou mentale, et surtout des limitations fonctionnelles apparentes, sont abusivement associées à un manque de capacité Ou de productivité pour le travail. ( ... ) Les

employeurs sont souvent mal informés et croient que les personnes handicapées ne sont pas

apparemment rentables selon une approche de gestion visant entre autres la productivité, l'assiduité et la sécurité au travail. Pourtant des recherches existent qui démontrent le

contraire. ( ... ) Le milieu syndical est aussi imprégné de préjugés et de mythes. Malgré

quelques initiatives intéressantes, on rencontre souvent un manque de collaboration, ou tout au moins de l'indifférence, au sujet de

l'intégration au travail des personnes

handicapées. Enfin, on offre peu de soutien aux personnes handicapées pour leurs initiatives dans le monde des affaires. Aurait-on, là aussi, tendance à associer les limitations fonctionnelles à un manque d'imagination et de capacités pour entreprendre des activités économiques viables dans le secteur privé?36

Par ailleurs, le Comité pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées oeuvrant sur le territoire de l'île de Montréal

34 COMMISSION ROYALE D'ENQUETE SUR L'EGALITE EN MATIERE D'EMPLOI, op.

cit., note 8, p.44.

35 Rob Mc INNES , "Le CCRT: une convergence plus prononcée", (1993) vol. 6, no.4 Habileté et entreprise 4, 5. Le CCRT constitue un réseau

pan-canadien d'individus et d'organismes dont la mission consiste à

promouvoir et à soutenir l'emploi égal et équitable des personnes ayant des incapacités.

(33)

souligne dans son premier rapport un fréquent problème d'attitude d\l

sein de la main-d'oeuvre n'ayant pas d'incapacité:

Les employés pensent de leur côté que travailler

avec une personne ayant des incapacités, c'est

être placé en situation de danger ou encore assumer un surcroît de travail en raison de la déficience et des limitations fonctionnelles de la personne. 37

Un autre problème de mentalité est identifié au niveau de

l'administration des programmes de formation. Le Groupe d'étude sur

l'emploi et les personnes handicapées affirme dans son rapport Einai intitulé "Prêts à travailler ... ensernble" que les personnes en autorité concluraient parfois sans fondement au manque de connaissances. de capacités ou encore à un risque trop élevé pour inscrire une personne il un programme. 38

Dans un ordre d'idées plus général, deux phénomènes attitudinaux

semblent particulièrement irriter les personnes ayant des incapacités. Il y a d'abord le phénomène de l'infantilisation des personnes ayant des incapacités qui consiste à les traiter comme des personnes sans défense

37 COMITE D'ADAPTATION DE LA MAIN-D'OEUVRE POUR L'INTEGRATION ET LE MAINTIEN EN EMPLOI DES PERSONNES HANDICAPEES OEUVRANT SUR LE

TERRITOIRE DE L'ILE DE MONTREAL (CAMO), op. cit., note la, p.37 (ci-après cité IIComité d'adaptation de la main-d'oeuvrell ou IICAMOIt

) . [,e

CAMO est le résultat d'un projet de concertation entre les

gouvernements du Québec et du Canada, les associations québécoises de personnes handicapées, des réprésentants d'entreprises et trois

grandes centrales syndicales québécoises: CSD, FTQ, CSN. Le Comité, qui a été crée le 4 juin 1993 et dont le mandat s'étend jusqu'en

1996, a pour objectif général l'élaboration et la mise en oeuvre

d'une stratégie d'intervention visant à accroître l'intégration et assurer le maintien en emploi des personnes ayant des incapacités dans les entreprises oeuvrant sur le territoire de l'île de Montréal. 38 GROUPE D'ETUDE SUR L'EMPLOI ET LES PERSONNES HANDICAPEES, op. cit.,

note la, p. 7. Le Groupe d'étude sur l'emploi et l.,s personr,es handicapées a été crée en 1990 par le ministère de l'Emploi et de llImmigration du Canada. Il avait pour mandat ùe travailler avec des organisations de consommateurs afin d1identifier les obstacles à l'intégration dans les services et programmes d'emploi du

gouvernement fédéral et de faire des recommandations pour éliminer

(34)

qui sont incapables de faire des choix pour elles-mêmes. Par

conséquent, on les surprotège. on décide à leur place en passant outre leurs opinions et on perçoit leur moindre réalisation comme un exploit. Le témoignage qui suit illustre ce phénomène pouvant aussi être qualifié de paternalisme:

"I was talking to a client, and one of the guys

came in. He said, "Patty, l just heard yeu went

to the other departments all by yourself! Isn't

that wonder fuI!II This was right in front of a

client. ,,39

Le second phénomène irritant pour les personnes ayant des incapacités est celui de la politique de pure forme qui consiste pour un employeur à

faire un effort d'intégration symbolique dans le seul but de projeter

une image corporative positive ou de se conformer aux exigences minimales de la loi. Comme le démontre la citation suivante, la personne ayant des incapacités a alors l'impression de servir de

symbole:

"When l interviewed Patty, we talked about tokenism. She said her job situation was fine at present, but that when she was first hired

she believed her company, a large insurance

firm, took her on so the bosses could proudly

say, "We don't discriminate. We hire the

disabled.,,40

Les attitudes négatives face à l'incapacité sont généralement le

résultat de préjugés et de mythes qui eux, sont habituellement le fruit

de l'ignorance. La Fédération des travailleurs et travailleuses du

Québec41 s'est intéressée à ce problème et a identifié les principaux

39 Gwyneth F. MATTHEWS, Voices from the Shadows, Toronto, Women's Press,

1983, p.160. Voir, au même effet, GROUPE D'ETUDE SUR L'EMPLOI ET LES PERSONNES HANDICAPEES, op. cit., note 10, pp.9 et 10 et annexe II,

pp.4 et 5; David M. LEPOFSKY et Jerome E. BICKENBACH, "Equality Rights and the Physically Handicapped" dans Anne F. BAYEFSKY et Mary EBERTS (dir.), Equality Rights and the Charter of Rights and

Freedoms, Toronto, Carswell, 1985, p.323, à la page 326. 40 G.F. MATTHEWS, op. cit., note 39, p.159.

(35)

mythes entourant l'incapacité dans une brochure destinée à ses mernbres. 42

Certains mythes, qualifiés par la FTQ de mythes à portée négative.

véhiculent la conception erronée de la personne ayant des incapacités 011

tant que fardeau pour l'entreprise: productivité moindre, ~bsence de polyvalence, absentéisme élevé, risques accrus à la sécurité. atteinte à l'image corporative, mésadaptation socioaffective. chambardement de l'organisation du travail et coût élevé de l'adaptation des lieux de travail.

D'autres mythes, qui s'avèrent tout aussi mal fondés que les précédents et qui sont souvent leur antithèse, projettent l'image du super-employé. Ces mythes reposent sur la présomption que les personnes ayant des

incapacités sont tellement heureuses d'avoir un emploi que leur travail sera sans faille. Ils se fondent aussi sur la conception de l'emploi-privilège, c'est-à-dire qU'en embauchant une personne ayant des

incapacités, un employeur lui fait une faveur et qu'en retour, il est en droit de s'attendre à une performance supérieure.

Ces mythes, que la FTQ qualifie de mythes à portée positive, sont ceux de la super-productivité, de l'absentéisme zéro, de la ponctualité absolue et de l'absence d'esprit revendicateur accompagnée d'une

fidélité absolue à l'entreprise. Un dernier mythe consiste à croire que les épreuves qu'une personne ayant des incapacités a dû surmonter lui ont insufflé une force morale et un équilibre mental exceptionnels. En bout de ligne, tous ces mythes ont l'effet pernicieux d'imposer aux employés ayant des incapacités des exigenges plus élevées qu'aux

employés n'en ayant pas. Le témoignage suivant démontre que ces mythes sont bien réels, et combien dommageables:

42 FEDERATION DES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES DU QUEBEC, Personnes handicapées - Les mythes. septembre 1993. Cette brochure a été produite dans le cadre d'une campagne d'information et d'éducation sur l'incapacité entreprise par la FTQ en 1993.

(36)

"Doris, a retired teacher, disabled by polio sinee she was thirteen. explained why she feit she had to become Super-teacher: "1 always felt l had to be superior in my work. l had to be the best in arder te get as much credit as the person who did far less, but was physically able.l ... ) A disabled person takes a lot On the job that isn't fair; you're nct treated in the same light as a nondisabled person. l had to be superior in arder ta be considered average. ,,43

Il existe certainement d'autres mythes en sus de ceux mis en lumière dans la brochure de la FTQ. J'en ai identifié deux qui relèvent de la conception de l'emploi-privilège. L'un repose sur la croyance que les personnes ayant des incapacités se satisfont de postes monotones et peu attrayants pour les autres employés et l'autre. sur la croyance que les personnes ayant des incapacités se satisfont de postes peu rémunérés. Le témoignage qui suit illustre ce dernier mythe:

"Do you feel you are adequately paid? oidi said no: III think the position assessment isn't high enough. 1••• ) They have me listed as a clerk l, which is rock bottom. There's a lot more to my job than typing, filing, and answering phones. In addition to aIl that, Ideal with permits and copyrights, l answer my own correspondence, l deal with the clients." 1••• ) You feel there's prejudice involved? "Oh, yes,Il she replied.

"Definitely, there is. l know that if l weren't so "needy" and so "limicedll no one else would do

it." No one else would do so much for so little pay? l asked. oidi nodded. "It's as simple as

that.,,44

A mon avis, une politique d'intégration au travail ne doit pas présenter les personnes ayant des incapacités comme des super-employés car elles ne le sont pas. Elles sont des employés compétents qui, comme la main-d'oeuvre n'ayant pas d'incapacité, ont besoin d'encadrement, de

formation continue, de stimulation, d'un environnement de travail et

43 G.F. MATTHEWS, op. cit., note 39, pp.16l et 162. 44 Id .. p.167.

(37)

d'équipements adéquats, d'un salaire satisfaisant et de bonnes conditions de travail pour performer de façon efficiente.

La matérialisation de l'intégration au travail des personnes ayant des incapacités nécessite au préalable l'abolition des nombreux obstacles attitudinaux auxquels elles font face. L'intégration ne pourra devonir réalité que lorsque mythes et préjugés auront été éliminés et qu'une personne ayant des incapacités sera appréciée sous le même jour qu'ulle personne n'en ayant pas. Voyons plus concrètement par quels moyens cela peut se faire.

Le Comité d'adùptation de la main-d'oeuvre a fait la proposition suivante pour éliminer les préjugés face à l'incapacité:

( ... )il faudrait offrir au personnel de

l'entreprise des sessions d'information et de formation structurées sur la problématique de l'intégration au travail des personnes ayant des incapacités. Une telle stratégie

d'intervention, pour atteindre l'objectif de changement des mentalités et des comportements. exige un engagement formel de la haute direction de l'entreprise et des représ~ntants syndicaux. Ces sessions devront être vues comme un

programme de développement et de perfectionnement du personnel. 45

En effet, l'éducation constitue un puissant outil de changement des mentalités. La démarche d'information et d'éducation entreprise par la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec auprès de ses membres constitue en ce sens une initiative très positive qui devrait servir de modèle à d'autres associations de travailleurs, ainsi qu'à des associations d'employeurs. 46 Il m'apparaît par ailleurs que

l'intégration scolaire représente un outil efficace de changement des mentalités. De nombreux mythes et préjugés sur l'incapacité pourraient

45 COMITE D'ADAPTATION DE LA MAIN-D'OEUVRE, op. cit., note 10, pp.3? et 38.

(38)

être abolis par le côtoiement sur une base quotidienne des enfants ayant des incapacités et de ceux n'en ayant pas. 47

Dans son rapport final, le Groupe d'étude sur l'emploi et les personnes handicapées a recommandé la mise sur pied d'une campagne d'éducation publique de grande envergure sur l'élimination des obstacles à l'emploi des personnes ayant des incapacités. Le Groupe a toutefois souligné qu'à elle seule, l'éducation du public ne viendrait pas à bout de ces obstacles et a recommandé des amendements législatifs pour activer le changement des mentalités. 48 Tel fut également l'avis exprimé par la juge Abella alors qu'elle présidait la Commission sur l'égalité en matière d'emploi. Elle déclare, dans son rapport final:

Les lois concrétisent les engagements. Elles fixent des objectifs et proclament une ferme intention d'empêcher ou d'encourager certains comportements. Elles définissent les limites d'un comportement acceptable. 49

Je suis également d'avis que la législation a un rôle important à jouer en tant qu'instrument de changement social, surtout lorsque ce dernier tarde à se produire. SO Tel est le cas en matière dl intégration au travail des personnes ayant des incapacités où le changement des

47 Pour plus de détails sur l'intégration scolaire voir infra, partie 1.2.2.(J).

48 GROUPE D'ETUDE SUR L'EMPLOI ET LES PERSONNES HANDICAPEES. op. cit.,

note 10. p.21.

49 COMMISSION ROYALE D'ENQUETE SUR L'EGALITE EN MATIERE D'EMPLOI. op. cit., note 8. p.223.

50 Par analogie. je souligne que la Cour suprême du Canada a clairement indiqué dans l'arrêt Action Travail des Femmes c. Compagnie des

chemins de ter nationaux du Canada. [1987] 1 R.C.S. 1114. que l'abolition de certaines inégalités exige l'adoption de mesures

actives d'accès à l'égalité: "Il a été constaté que la discrimination dont étaient victimes les femmes au eN avait des racines profondes.

{... } Lorsqulon a affaire à un tel cas de "discrimination

systémique", il se peut qu'une ordonnance (d'adoption d'un programme d'accès à l'égalité) comme celle rendue par le tribunal (de première instance) soit le seul moyen de réaliser l'objet de la Loi canadienne

Figure

TABLEAU 1: CANADIENS AYANT DES INCAPACITES ET VIVANT DANS UN MENAGE - -REPARTITION SELON L'AGE
TABLEAU 4: SITUATION D'EMPLOI DES CANADIENS AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT D~,S UN MENAGE 25
TABLEAU 8: PLUS HAUT NIVEAU DE SCOLARITE ATTEINT PAR LES CANADIENS AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN MENAGE27
TABLEAU 9: PLUS HAUT NIVEAU DE SCOLARITE ATTEINT PAR LES CANADIENS AYANT DES INCAPACI'rES, AGES DE 15 A 64 ANS ET VIVANT DANS UN l1ENAGE
+5

Références

Documents relatifs

La concertation apparaît comme le plus important de tous les concepts abordés. La concertation  est  associée  aux  termes  « être  ensemble », 

Toutefois, cette distinction n’est pas perçue au niveau de l’aire visuelle primaire, mais des signes de celle-ci sont observées aux aires frontales, ce qui peut suggérer

This rather simple model allows a rapid and easy estimation of the KH depth as a function of the operating parameters (incident laser power, focal spot diameter, welding speed)

Les propriétés mécaniques générées par la nitruration sont bénéfiques pour une meilleure résistance à la fatigue du matériau.. L’influence des propriétés mécaniques

Pour réaliser cette thèse, nous avons fait des recherches approfondies dans diverses archives – notamment à la galerie Foksal de Varsovie, au Centre for Contemporary Art

We find that surprisingly, adding a tariff for renewables financed by a tax on electricity consumption to a cap on emissions and a subsidy for energy efficiency will reduce the

Il peut notamment déterminer les cas où l’employeur peut, afin de favoriser la sélection à titre permanent d’un ressortissant étranger, présenter une demande de validation de

être épaulé dans la sensibilisation et la formation de votre milieu de travail à propos des caractéristiques et des besoins de la personne que vous accueillerez;.. être soutenu