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~ McGill University' Faculty of Management
Le (la) metteur Ce) en sc~e de théitre: un (e)
gestionnaire.
Par:
Laurent Lapierre1
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Cette thèse est préàentée pour satisfaire aux exigences partielles en vue de l'obtention du grade de Philosophiae Doctor (ph.D.)
Copyrigh t
©
1984Tq,ute citation, traduction ou reproduction par quelque moyen que ce 80~~,
est strictement interdite sans la permission écrite de l'auteur. , o ' ,
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llESUME
Dans cette recherche, nous avons qual1fi~ d'.dhocratie rudilaentaire, en nous inspirant de Hintzberg (1979 a), le lIOde de .tructuration de ces petites entreprises que sont les cmapagnies de-production tbEâtralé. En postulant l'iaportance essentielle du produit
lui~ême dans la gestion de ces entreprises, l'objet de cette recherche porte sur la pratique de use en scène c01IIIIle pivot de la structuration du projet par lequel se réalise la repdsentation th~âtrale.
Nous. aVODS identifié trois types de pradque de la aise en
scène: le premier type est dominé par la recherche de l'efficacité de la reprhentation dramatique, le second par la recherche de l ' intério-rité et le troisième par la recherche de th~âtralit~ et de théitrali-sation nouvelles. ,Le premier type, qui s' apparente ~ l'action apollinienne, est caractérisé par un .ode objectif de conception de l'imaginaire théâtral, un mode prosctif d'~lsboration du produit dans le temps et un ~ode autocratique de contrôle dans les relations inter-personnelles. Les deux autres types, qui sont des ,variantes de l'action dyonysiaque, sont caractériaés par un mode subjectif de conception, un mode réactif d'élaboration du produit et uu., mode allocratique de con-trôle. Ces trois types de pratiques s~t des manifestations du mode personnel de structuration que nous avons identifié comme typique des' adhocraties rudimentaires. En inversant le titre de cette recherche,
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---cle gestionnaire: un metteur en scène?J, nous avons appliqué ~ cas
partic~ier qu'est la mise en ~c~ne, à celui plus général de la gestion dans les adhocraties rudimentaires. Les objets de pratique sont envisagés comme étant à la fois objets d'affection et de connaissance et la pratique de la gestion est reconceptualisée de la même mani~re que la
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pratique de la mise en sc~ne, en termes des dimensions affective et
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cognitive sous-jacentes l la vision du gestionnaire et du produit final, de la relation étroite entre cette vision et son opérationnalisation et de l'influence des réalités interne et externe' du gestionnaire aussi ' : n que celle de l'entreprise. Cette
recher,~he
exploratoire a été.
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conduite <tans Ull(' perspective holistique, c'est-à':'dire, con.idhant la
pratique de la mise en sc~ne comme un fait total. Les métrhodee de Il l'observation participsllte et de 1 'f"ntretien gu:ldé ont
8~rvi
à
recueillir le matl'riel sur lequel el! base la discussion .•
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ABSTRACT
In ehis research. following Mintzberg (1979 a) , the structuring mode of these small enterprises. which are the theatrical production companies. has been named rudimentary adhocracy. In postulating the essential importance of the product ,itself in the manageméIrt of these enterprises, the subject of this 'research la the praxis of the theatre director while structuring the project by which the theatrical representation happens.
In this research we have Identified three types of praxis of directing: the first one Is characterized by a search for the effectiveness of dramatic representation, the ~econd one by a search for interiority and the third one by a search for new theatrality and theatralization. The first type, which is related ta the CApollonian' action, is caracterized by an objective mode of -conception of theatrical imaginary; a proactive mode of elaboration of the product within time and an autocratie mode of control in interpersonal relat\ons. The two other types, which are variants of the tDionysiac. action, are charac-terized by a subjective mode of conception, a reactive mode of elaboration of the product and an allocratic mode of control. These three types of ~raxis are manifestations of the personal mode of struc-turing which we have identified as typical of rudimentary adhocracy. In inverting the title: «The Manager: a Director?" this research leads to the application of the particular case of directing to the general one of management in rudimentary adhocracy. The abjects of praxis are seen
.
as being Bt the same time objects of affection and abjects of knowledge, and the praxis of management is reconceptualized in the same way as i8 praxis of directing, i~ terms of the affective and cognitive dimensions underlying the ~nagera vision of the end product, the tight interrelation befween that vision and its operationalization, and th'e influence of the internaI and external realities of the manager as much as of the enterprise. This exploratory research has been conducted within an ho.listic perspective, 1.e., considering the praxis of directing as a total facto Participant observation and guided interview has been used ta collect the material upon which the discussion is based. ! ,.
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RF.HERCIF.MF.NTS ~
Ma première pensée va aux metteurs en scène qui ont accepté de bonne grâce de participer ~ c~tte recherche, de livrer aussi ouver-tement leurs pensées, leurs façons de concevoir leur tnl ••
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de le faile .•• Sans les nommer pour r~specter l'anonymat d~ cette recherche, je veux les remercier vivement pour m'ayoir permis d'entrer dans leur monde comme si j'~tais un des leurs.Merc:f li mon directeur de thèse, Henry Mint:tl>erg,
a
Andrée Beaulieu-Green, à Manfred F.R. Kets de Vries etCà Richard Salisbury pour leur exemplarité et leurs avis écla:frés_~~ cours de cette démarche. ~esremerciements s'adr~~sent a~s6i à Roger Gosselin qui fut membre de mon comitp de surveillance pendant lA phase,II du programme de doctorat.
Merci aux deux femmes de ma vie: ma compagne Renée et ma fille Danielle. Un doctorat est un cheminement qui se fait indivi-duellement, mais qui est
impos~ihle
sans un,grand support, une grande compréhension et du renoncement de sa famille immédiate.Je voudra:fs signaler l'inspiration de ma fille de 5 ans qui, assise en face de moi à une table de travail, dans mon studio au
sous-601, griffonnait Bur des bouts de papiers qu'elle plaçait ensuite sur
,
différentes pileR, et au bout d'une demi-heure complétait un dessin, un graphique ou un signe dans un langage incompréhensible pour moi, jetait Bon crayon en disant: «J'ai fini ma thèse, papa. et toi?. Elle en D fait plusiE'\lTR pendant que j'en fajsais une. A cinq. ans, elle
semble entendre et comprendre hjen des choses qui m'échappent. L'enfance est précoce et l'âge adulte retarde. C'est sans doute de désirs que l'enfance progresse et que l'âge adulte régresse. On a parfois l'impression que les enfants sont plus grands et plus mûrs et que les adultes sont plus enfantins qu'ils (les enfants et les adultes) nt' Je croient généralement. iv 1 1
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Je voudrais reaercier l'Ecole des Hautes Etudes Ca..erciales
de Kontrbl où je suilt> professeur de .anag_ent et, de coaporteaent. On
.'a fait confiance et on .'a aasur~ des conditions favorables. Caa.e
l'''e des institutions ne se manifeste que par le biais des individus.
je voudrais D.01Imler aes patrons successifs: Pierre Laurin. Andr~
Thibaudeau et Jean-Guy De.forges qui .'ont encouragé l embrasser la carriire universitaire, Francine Séguin qui .'a finalement convaincu
1
d~treprendre ces études de doctorat. et Jean-Marie Toulouse et Pierre
H ey qui . ' ont supporté par la suite. Je veux aussi signaler le
support que j'ai reçu de la direc~ion de la recherche.
1
Kes ·remercieaents vont aussi 1 Tbérise Doyon qui a
dactylographié lies entrevues .avec les aetteurs en sc~ne et l France
Barabé qui a dactylographié cette th~se. Son sourire. sa bonne humeur,
ne se sont pas démentis. .ême lorsqu'il s'agissait d' apporter des eorrections. Jamais je n'ai senti chez France de l'impatience ••• si ce 'n'est contre ss machine et la technologie.
Je voudrais terminer en signal~t les 'échanges provoquants
et fructueux que j'ai eu avec des confrères et des amis durant ces études trop longues. Malgré les inévitables rivalités confraternelles. je voudrais mentionner les échanges francs et honnêtes que j'ai eus avec Alain Noël et la lecture critique que Jean-Yves LeLouarn a faite de la
première version de ma thèse. Je voudrais remercier enfin Nicole
Dansereau. Claude Pichette et François Colbert pour leur lecture
minutieuse et leurs questions pertinentes. Je demeure évidemment seul
responsab1Et.de ce qui est avancé dans cette thèse.
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Léopold, mon pèreavec'l'expression de ma gratitude.
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MISE EN SJTUATWN I?E_ LA RECHERCHE,
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! ' Prpsentation et objet de la rechercheCHAPITRE 1
La mise en scène de tbé~t-r(): de .18Il-lg~e::.Js5-Lt..LjUln"EL-_ _ _ _
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CHAPITRE 2
La nature du produ1 t t,h~âtre )
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CHlU'TTRE 3 .
La structurat:lutr' de l'entreprise tbéâtrale: une adbocraUe rud1lleu'taire
G o
CliAPITRE 4
L' affecUvi té. la connalssancè
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et la pratique-actionCHAPITRE 5 f~' J.Cf> méthodes et
la
mê thodologie.
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ANALYSE E'l' 1 N'l.'ERPRETATION DU MATERIEL RECUEILLI
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...-Première section
De la misE' t'n scène comme structuration du produit spectacle de théâtre
CP.ÂI'ITRE 6
La recherc1Je de l'efficacité de la représentation théâtra,le
CHAPITRE
7
La recherche de la sens~bilité psr l'esprit de troupe
CHAPITRE 8
La recherche de théâtrali té nouveJ le dans un esprit de démesure
CHAPITRE 9
Essence de la mise en fcène
DeuxiÈme section
v
Ge6tionnaires, metteurs en scène et gestion de l'entreprise théâtrale
CHAPITRE 10
Typologie de pratici~ns metteurs en scène
CHAPITRE Il
Structuration du projet de mise en spectacle et insertion dans 1'entreprise de théâtre
CONCI.USION
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Le gestionnaire: \un metteur en
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1TABLE DES MA.TIERES
PREMIERE PARTIE: MISE EN SITUATION DE LA RECHERŒE
INTRODUCTION
CHAPITRE 1: LA MISE EN SCENE DE THEATRE: DE LA GESTION
- Un tournant
- L'~re du mett'eur en scène
- Mise en sc~ne et gestion
La gestion: action, prat ique et art ..
- La gt!stion: un champ" de savoir spécifique
- Postulat sous-Jaceht à la gestion
- Lac gestion: tributaire du savoir génér-al
- La gestion: un comportement
Notes du Chapitre 1 '
li
CHAPITRE 2: LA NATURE DU PRODUIT SPECTACLE DE THEATRE - Ses caractéristiques essentielles
· Un bien de communication accteur-spectateur Un bien vivant
Un bien symbolique
• Un bien archa!que et prospectif
• ~len "libertaire" et "arbitraire"
1>
• Un bien de convent ion ludique
- Quelques caractéristiques cirçonst:ancielles • Un bien éphémère et non-reproductible ',..
" • Un bien aristocratique "
· Un bien charismatique, autocratique
- Essais et définition
• Une définition du produit théâtre
• Une définition du processus d~ réalisation
Notes du chapitre 2
CHAPITRE 3: LA STRUCTURATION DE L' ENTREPRI SE THEATRALE:
UNE ADHOCRATIE RUDIMENTAIRE DiletDIl.e managéria1
- La structuration des entreprises: un état de la question
L'entreprise de théâtre: une adhocratié rudimentaire
- La structuration du corps opérationnel
Les facteurs contingents ~
• L'âge et la taille '
La technologie L'environnement Le pouvoir
- Les paramètres du design
Le design des post"es individuels Le design de la superstructure
Le design des liens latéraux et verticaux Le' design de la prise de décision
- Rés~é Notes du chapitre 3 lx Page 1 2 7
8
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1215
16
17
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20
22
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..CHAPITRE 4: L'AFFECTIVITE. LA CONNAISSANCE ET LA
PRA TIQUE-ACTION
- Une vision globale
- La recherche et l'explicitation des perspectives adoptées - Les perspectives d'investigation de la personnalité et
de- l'action humaine
- Deux positions'épistémologiques fondamentales
• La position lockéenne . La position kantienne - L~ cognitif et l'affectif
- L'affectivité et la connaissance: le sujet et les relations d'objets
- Le développement du sujet: les objets du présent et les objets du passé
- Le mode de pensée subjectif et le mode de pensée objectif - Les personnes créatrices~ le génie, la folie et la
normalité
- Contradictions et inconscient La vision et l' opérationalisation Le temps et l'inconscient
Les dimensions de notre cadre conceptuel et les polarités de notre grille d'analyse
- Le mode de conception de l'imaginaire théâtral - Le mode d'élaboration du produit dans le temps
- Le mode contrôle dans les relatio'ns interpersonnelles
~otes du chapitre 4
CHAPITRE '): LES METHODES ET LA METHODOLOGIE - Une recherche de nature exploratoire
Des méthodes dites qualitatives
Fait social tota!, perspective phénomén~logique et holistique
Suj et et obj et de la recherche
La relation observateur-observé et la relation intervieweur-interviewé
- Réalisation de la recherche - Développement et analyse
- La recherche qualitative: un art - Quelques postulats sous-jacents
• Déterminisme psychologique. intentions et volonté · La notion de structure
· Trois voies d'accès à la connaissance - La recherche qualitative/et l'écritur~
Notes du c~itre 5 1) ()
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105 110 119 125 133 134 1% 138 140 141 Q 143 147 152 155 , 156 160 162 167 174 177 181 183 183 185 190 191 1941·
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SECONDE PARTIE: ANALYSE ET INTERPRETATION DU MATERIEL
RECUEILLI
PREMIERE SECTION: DE LA HISE EN SCENE COMME STRUCTURATION
DU PRODUIT SPECTACLE DE THEATRE
A) Quelques contingences
• Age et ressources des entreprises et caractéris~ique~
des produits-spectacles à réaliser B) Les personnes
Notes
CHAPITRE 6: LA RECHERCHE DE L'EFFICACITE DE LA REPRESENTATION DRAMATIQUE
a) Le mode de conception de l'imaginaire théâtral - Incubation, travail seul .•.
- Travail avec les concepteurs - La direction des répétitions
b) Mode d'élaboration du produit-spectacle dans le temps c) Mode de contrôle dans les relations interpersonnoel1es Notes du chapitre 6
CHAPITRE 7: LA RECHERCHE DE LA SENSIBÙITE PAR L'ESPRIT DE
198 200 201 201 204 206 207 208 Z:08 210 212 215 220 232 , TROUPE 233
a) Mode de conception de l'imaginaire théâtral ~34
- Idée de base et incubation 235
- Travail avec les concepteurs 238
- La direction des répétitions 244
b) Mode d'élaboration du produit dans le temps ?5l c) Mode de contrôle dans les relations interpersonnelles 260
- Types de comédiens 266
Notes du chapitre 7 270
CHAPITRE 8: LA RECHERCHE DE THEATRALITE NOUVELLE DANS UN ESPRIT DE DEMESURE, D'EXCES
a) Mode de conception de 'l'imaginaire théâtral
Rompre avec les idées, les formes et les façons reçùes - Conception par sous-cellules
Direction des répétitions
• Le comédien est responsable: on répète peu • Le système de la maquette
• Les rapports metteur en scène comédiens b) Mode d'élaboration du produit dans le temps - Pas de dichotomie conception-réalisation - L'prganisation de la représentation
- Ecart entre la conception et la réalisat~on
271 272" "272 274 281 281 284 28'6 " , 291 293 296 " 300 e .,
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,c) Mode de contrôle dans les relations interpersonnelles Notes du chapitre 8
" o 0
CHAPITRE 9: ESSENCE DE LA MISE EN SCENE Trois styléS et trois aspects essentiels " La quête de la nouveauté, du renouvellement
" Le caractère dialectique de l'imaginaire et du réel Le théâtre un moyen de connaître
Personne et personnage
" Décalage entre le conÇu et le réalisable Décalage ent~e le conçu et le réalisé " "La magie du théâtre"
La naIssance du spectacle et "les bleus du metteur -én scène"
" Le'co~trôle pàr laoséduction, par la conviction " Leaqership charismatique???
Evofution personnelle des metteurs en scène Conséquences èt résultats
Mise in scène de théâtre, gestation et gestion Notes
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ch~pitre 9~ " "'UEUXIËME ,SECTION: GESJ'IONNAIRES METTEURS EN SCENE ET GESTION DE L'ENTREPRISE THEATRALE
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"'CHAPÎTRE 10: TYPOLOGIE' DE PRATICIENS METTEURS· EN SCENE - Des professionnels de la mise en scène et des metteurs en
scène par.accident ou par obligation
j
: ',,: -. Les "professionnels" de la mise en scène " .. LLeasrmeCehteteruCrhse dene slC'èenfef_iaCnacimiatCt-eudresla représentation théâtrale " La rech~rche de théâtralité et de théâtralisa~ion nouvelles ./ • La quête d' In)r,ériorit,é- Les lI!et t'eurs e~ "scène par accident ou par ~bligation
Les acteurs IfIetteurs en 'Scène
L'auteur de cQmmande~metteur en scène " Le metteur eR scène didactique
Prépondérance ac tuelle de's "pro f ess ionnels" de la mise en scène
Metteurs en scène apolliniens et/ou dionysiaques
~ Le phénomène vs la conception qu'on s'en fait, le tout, la ~
. synthèse vs les partiesi l'analyse - Types p~atiques vs types purs ou idéaux Notes du, chapitre
10
" 302 306 308 309 315 316 318 319 321 322 324 326 328 332 334 335 337 339 340 342 343 344 345 352 360 365 372 372 377 380 382 385 390 391 396 xii
1
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CHAPITRE
ll~STRUCTURATION DU PROJET DE MISE
E~SPECTACLE ET SON INSERTION AU SEIN DE
L'ENTREPRISE THEATRALE
Facteurs contingents
• Age, ressources et encadrement vs mission et objectifs de l'entreprise
• Pouvoir par la persuasion et la séduction et contrôles externes
Structures techno-esthétiques nouvelles
• Concurrence et pression internes pour la nouveauté - Paramètres du design structurel
Le regroupement par produit
Le choix des pièces et le choix des metteurs e~ scène • Autonomie artistique du metteur en scène: mythes et
réalité
Choix des concepteurs et des interprètes
• La
spécialisation et la compartimentation des tâches Le budgetLa dimension politiqtk
- Le rôle de l'assistant metteur en scène-régisseur - Une adhocratie rudimentaire et un mode personnel de
structuration Notes du chapitre Il
CONCLUSION:
LE GESTIONNAIRE: UN METTEUR EN SCENE?
- Le théâtre et la vie ... organisationnelle • Proposition !fI
Structure, nature et culture · Proposition fl2
Mode personnel de structuration · Proposition f/3
• Proposition f/4
- Trois dimensions de la pratique de la gestion '. Le mode conception de l'imaginaire
Proposition fl5
Le mode d'élaboration du produit et des politiques dans le temps
Proposition /16 Proposition fil
• Proposition 118
• Mode de contrôle dans les relations interpersonnelles Proposition fl9
Proposition fIlO
- Gestion stratégique ou pratique de la gestion - Une perspective interprétativ~
• Proposition H1l
- Types de pratiques et types de gestionnaires · Proposition #12
· Proposition H13
- Objet de pratique: objet de connaissance et d'affection · Proposition H14 Notes de la conclusion Bibliographie
dU
398 400 401 402 403 406 407 407 408 410 416 423 424 427 428 432 435 436 437 439 440 441 441 442 443 444 444 447 450 452 452 452 453 457 ,.-459 459 460 461 463 465 466 468 469 471 472' /
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PREMIF.RE PARTIE
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PRESENTATION ET OBJET
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RECHERCHE
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Lu misè en scène de théâtr~ eRt une gestion de produit très
particuliè!e. re]evant à la fois de la gestion et de l'art. Nous aVons
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fnit le pari qu'en ~tudiant une gestion aussi peu conventionnelle. il y
avait beaucoup à apprendre sur la gestion.
Comme son titre l'indique, cette recherche de nature
explo-ratoire porte sur le metteur en scène de théâtre.
c'
eAt dans uneperspective,mnnagériale que cette recherche a été conduite, le concept
de pratique ayant servi cl' unité de réflexion pour étudipr cette gestion
particulière. La première partie de la recherche sera consacrée à la ~
misa t'Il Rituat:lon de la recherche. chacun des chapitres servant à
élaborer les fonde,,!llents théorjques, les postulats et les hyppthèses
sous-jacents. à notre démarche ~t
A
la discussion.Un premier chapitre est consacré à présenter la pratique de
la mise en scène de th~âtre qu:l, au cours
devenu une fonction autonome, une fonction
"-théâtrale. Le mLttpur en scène est devenu
du vingtième sièc)e. est centrale dans la pratique
-ce gestionnaire de produit
tesponsable de l'unité du spectacle, de la repr~RPntatlon dramatique.
Ce premier chapitre est aussi l'occasion de poser & quelques-uns des
postulats ~ous-ja('ents à III gestion et li ]a connaisHance en gestion.
Le c1wpi tre deuxième est consacré
a
défini~ la natùré duproduit théâtre. Ln mise en scène de théâtre est une délllaTche
parti-culière dont l'objet est la tranH:ftion entre l'imagil1~ire'littéraire et
l'imag:lnaire théâtral réal isé sur Act-ne. Ce produit a aussi ceci de
particulier qu'il est'un~ représentation.
Le troiElième chapitre porte sur la structuration de l'
en-treprise th[âtrllle qui- combine à lA fois les CAractéristiques de la'
"
structurp très simple ~t de ]'adhocratie de production :Identifiées par
"
.
~Mintzberg (1979 n). Ce chapitre sera l'OccAsion d'émettre un certain
-
}.nombre d'llypothèses sur la 8tnlcturation des projets de mise en
spec-tacle au s~in de l'entreprise
théâtrale.-,
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Le metteur en scène de théâtre étant un cr~ateur et un
ge~tionn8ire ch~rgé
deréali~r
un produit,~trième
chapitre seraconsacré à l'exploration des processus mentaux Actifl;J dans la
connais-sance et la c.réation et des dimensions affect:lvc et cognitive
sous-jacentes non seulement à la création, mais à toute pratique,.(<'Nous ne
prftpndons pas cependant que l'affectiv:lt~, la cognition et la pratique
soient des domaines séparés. Comme ils sont intégrés dans l'action
humaine, nous prptendons plutôt que les objets de pratiques sont à la
fois des objets d'affection et des objets de connaissance.
A la fin du chapi tr~ 4, en nous basant sur ] es
considé-rationfl th~oriques, les postulats et les hypothèses des premiers
chapitres, nou~ élaborons le cadre conceptuel et lâ grille d'analyse par
lesquE>]s nous étudions la pratique de la mise en scène comme mode de
structuration du produit th~âtre et du projet de mise en spectacle. Le
cadre conceptuel comprend trois dimensions présentées comtne des dua,lités dont les pôles constituent la gril]c d'analyse. JI y a d'abord le mode
de concept:lon de l'imaginaire théâtral, dualit~ constituée des modes
objectif et subjectif; le mode d'élaboration du produit dans le temps, duali té consU tuée des modes proactif et réactif; enfin le mode de contrôle dans ]es relations interpersonnelles, dualité constituée des modes autocratique et allocratique. NOlis avons fait l'hypothèse de deux
patterns cohérents de pratique de la mise en scène correspondant
.
à deuxtypes de metteurs en scène. be premier pattern serait constitué du mode
objectif de conception de l'imaginaire, du mode proactif d'élaboration
du produit et. du mode autocratique de contrô~e. Le second pattern
serait constitué des modes subjectif, réactif et al1ocratique.
Le .dernier c_hapitre de cette première partie de mise en
sitUAtion de la recherche (chapitre 5) sera consacr~ aux questions de
méthodes ('t de méthodologie. Cettf' recherche a ~té condu:fte dans
l'esprit des méthodes, dites qualitatives; nous avons utilisé une
approche phénoménologique, ho] fatique. la pratique de la mise en scène
étant ('on81Mr~e comme un fait total. I.e chapitre présentera d'abord
les deux méthodes qui ont ét~ utilisées pour recueillir le matériel
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empirique servant de base à notre discussion: l'observation
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participante et ]' entretien guidé. NO\If~ présenterons ensuite la démarche que nous avons suivie pour recueillir ce matériel. l'analyser et dégager ies structures conformantes d~ diverses pratiques de mise en
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scène.
La seconde partie de notre recherche porte sur l'analyse et à l'interprétation du matériel recueilli. Les trois premiers chapitres seront consacrés à l' analyf>e des trois m:lses en 8C'ène que nous avons observées. Cette élnnlyse s'emploiera B fAire ressortir la 8j:ructure conformante qui fait le mieux 6tat des diffprences de ces trois pra-tiques comme l'indique chacun des titres de chapitres: la recherche de l'efficacité de la représentati0n dramat~que (chapitre 6), la recherche
,
de la senBibilitÉ par l'esprit de troupe (chapitre 7) et la recherche de
fi
théâtralité nouvelle dans un esprit de démesure (chapitre
8).
Après avoir fait n'fl!wrtir les différences de ces trois
'"
pratiques de mise en scène, le chapitre 9 sera consacré à dégager de nos observations ce qui constitue J'essence de ]a mise en scène, ce qui est apparu commun à chacune des pratiques. On y verra que la théâtralité, l'a sensibilité et l'efficacité sont trois aspects essentiels de toute pratique de mise en scène. La quête incessante de nouveauté, le caractère diblpctique de ]'imaginairl' et du réel, la pratique de la mise en scène comme moyen de connaltre. le contrôle par ]e charme, la conviction et la séduction et l'évolution dans le style de leadership sont apparus des aspects communs
n
loutes les piatiques sur lesquelles nous ~Jahorerons au cours de ce chapitre.La deuxième section de cette partie consacrée
à
l'analyse età l'jnterpr~tation du matériel recueilli sera l'occasion d'élaborer une
•
typologie de pratidcns metteur!> en scène (chapitre 10). Vingt ~
entretiens gui des nous serviront è vérifier si on trouve une
confirmation avec ce que nos observntions nous avarent montré. On verra que nous avon~ jdentifié deux grandes catEgorie~ de metteurs en scènes: les metteurs en scène par accident qui appartiennent sensiblement à la première génération dC's mettpurs en sc~ne (Ot les «professionnels. de la mise en scène, ceux de 18 deuxième génération qui en font carrière •
.
)..
.6
Chez ces derniers. on trouve trois types qui correspondent ~troitement
aux trois types de pratiques identifiés lors de nos observations •
. Chez ] ef! professionnels de la mise én scène aussi bien que
•
chez les metteurs PD scène par acc~dent, on verra qu'il a ~té possible d'identifier deux grands types de praticiens: les metteurs en scène apolliniens et les m('tteurs en scène dionysiaques. confirmant ainsi l'hypothèse de deux pattcrnR cohérents de pratique posée au chapitre 4.
Au chapitre Il, nous verrons comment la structuration du produit et du projet de mise en spectacle par et autour de la 'pratique de la mise en ~pectacle contribue il documenter le type structurel de l' adhocraU e rudimentaire. çe type structurel qui combine à la fois les caractériRtiques de la structure très simple et de l' adhocratie de production.
Rn conclusion, nous verrons en quoi ce qu'on a appris de la mise en scène perme~ une vision et une compréhension différentes de la pratique de la gf'stion. Notre discussion oscillera donc entre les \ rétiu] tats obtenus à partir dt' notre base empirique et une réflexion plus spéculative sur ]a gestion en général. Noue élaborerons sur le mode personnel de structuration caractéristique des entreprises de type adhocratie rudimentaire. sur le mode de conception, le mode
d'élaboration ct le mode -dé contrôle qu'on y rencontre, sur la pratique ()
de la gestion conceptualisée il partir de la pratique de la mise en scène, sur les types de pratique de la gestion et Bur les types de gestionnaires.
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CHAPITRE 1
T,Al.f1SE EN 5CFNE DE THII:ATRE: DE LA GESTION
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~~llIlI~liXt i.BI4M'!)t4IPipkl.l! 1ailla
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Un' tournant
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c'est sous l'influence des tournées européennes du IMeiningert (1874-1890). un troupe de jeunes comédiens fondée par le Duc
"
de Meiningen de Saxe. suivant les enseignements de Goethe. que l'im(lortaDce df' la fonction intégratrice.' unificatrice et directrice du mettéur en scène se révéla et devait connaitre une renaissance avec le début du vingtième siècle.
• \,1 à
TJe Duc de Meiningen. qui subventionnait la otroupe. mit 1 'honneur le long travllH de 'préparation sous la dïreht10n d'un metteur
i
en scèneomaitre d'oeuvre, une étude minuti'euse du texte, un réalisme très grand dans la cOl\ception et la réalisation visuelle et donc une
~ élaboration de décors' 'com,truits. un souci constant d'exactitude historique et de vt'rité dans les costumes et les accessoires, '·le naturel dans l'interprétation et une discipline stricte destinée à maintenir la cohésion de la troupf'.
\
Les acteUJ;S et les actrices étaient au servj.ce des pièces à '~
monter •.. et de la troupe, pouvant être appelés à jouer un grand rôle dans une pièce et un peti t rôle dans une autre. Ce,tte idée d'une soumission de l'acteur à ~'ligne directrice n'a pas toujo~ été bien
. .
accueillie par les acteurs et les actrices. La situation chaotique qui avait présidé à la préparation des spectB;cles jusque là leur avait permis d'assumer un rôle de leadership et une grande autonomie dans la mise en scène de leurs
pr~pres
rôles, (Ptgnarre, 1975; Goodman.~,~
Les historien" du théâtre (Blanchard 1948; Chinoy. 1963;
Pignarre, 1975) s'ent.em!<·nt pour reconnaltrE" que l'existence distincte de cette fonction mise t'n spe~tacle confiée à une 'personne ayant-f/Jl' spécialement la respnnsabilité de «l'unitÉ. de la représentation est'une
\ ~
réali té du XXième siècl e. Jusque là, des personnes s'etaient oc!cupé
de
mettre en scène, mais ce n'était pas leur responsabilité première. Dansle théâtre grec, le dis~ascalos (le régisseur en ch~f) était responsab~e
de la bonne march@ de la représentation, .ais 11 était sous l'autoritê
o
dp poète et du chorège et 11 jouissait d'une marge d'initiative fort ('
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.9
'1'
limitée. Au moyen-âge, le cmattre de jeu' ou cIe maître des secrets' dirigeait le ri tuel liturgique des mystères, mais i l s'agissait de cérémonies statiques, sans thpâtralitp 6pectaculaire. Plus près de nous, on peut citer d~s auteurs célèbres, Shakespeare et Molière, et des acteurs non moins célèbres, Stanislavski. qui ont aussi mis en scène sans en faire profess~on.
Les historiens du théÂtre reconnaissent cependant que l'influence des cMeiningcn a constitué un point tournant,' Les tournées de la troupe en Europe Avaient contribué à diffuser leur façon de faire du théâtre, de monter et de jouer les pièces. Stanislavski et Antoine furent parmi les premiers à avoir subi «l'influence déterminante' de la troupe allemande (Pignarre, 1975). cI~ mise en scène dans la ligne du réalisme historiqué' dont parle Stanislavski (1980) est le résultat direct de l'influence de la troupe du Duc de Saxe et de l'impression d'exactitude ct d'efficacité qui se dégageait des représentations que la
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troupe donnait.
J
" Dans le domaine plus vaste dE' le gestion, on peut aU!lEd considérer le tournant" du siècle counne" ayant marqué le début d'un passage d'un mode artisanE'] à un mode plus profesf,jonnel de gestion. De tous les temps, quel que fwit le modèle socio-politique ou le modèle de , production. il Y a eu des ge~ qui dirigeaient et d'autres qui étaien~ dirigés. Les contributions de Weber, dto 'l'ayfor et de Fayol. avec leurs accents respectifs sur la rationalisation de
1.'
autorité, sur la spécialisation et la sépnration de 1~ direction de l'exécution et sur la fonction gestion vont aussi dans le sens d'une prof~sRionnallsation du rôle de gestiGIHlIdre. La direction iclcnt:ique qu'on peut constater dans le domaine spécifique du théâtre et dans le domaine plu& général de la gl'stion peut êtTl' dû à un haflard historique ou à une coincidence. Même~1' 11 demeure hors de notre propos de prouver une tellto ass'ertion, il est très v~aisemblbbJp que ce qui s'est passt dans le domaine du théâtre n'ait été que le reflet d'un phénomène social plus vaGte.
c
(
, ,
- L'ère du metteur en scène
6
,
, .10Il semble qu',On en soit arrivé auj ourd 'hui à ce q'u' .on appelle de plus en plus à un cthéâtré de metteur en scène. (Clurman,
...
1972). On parle de ce phénomène 'autant en AmErique du Nord qu'en' Europe.
«En France, l'histoire du théâtre en ce moment, c'est l'histoire de la mise en scène. Le poids du metteur en scène est très grand. C'est lui qui a
le pouvoir artistique et ce pouvoir s'exerce au détriment du poète dramatique et de l'acteurt.
,
(Jacques Lasalle, metteur en scène à La Comédie Française, causerie prononcée à l'Université de ·Montréal, le 28 septembre 1981)
Affirmer que le pouvoir artistique est passé du poète dramatique et de l'acteur au metteur en scène. c'est affirmer que le pouvoir est passé des artisans de la première heure (auteurs et acteurs) à l'organisateur
\
du ,spectacle, du côté de celui qu gère le produit spectacle. Cette J
opinion, est c.onfirmée par les analystes et les critiques tant américai~d
,
, que français actuels (Clurman. 1972; Tempkine, 1977 et 1979) et aété
c,onfirmé~ par le témoignage des, metteurs en scène que nous avons
rencontrés.
grandement
~directions
de théâtre
Au Québec, .on ~'accorde pour dire que le théâtre ,est encore , r~ (1 un théâtre d'auteurs. Ce'p' endant, la relève et les' nôuvt!lles o ,
, ' il
artistiques qu .ont connues les compagnies instituti.onnelles (Reichenbach. Br(lssard, Bastien, de Andrea, 'Lepage, Maher, Suissa ••• ) s.ont presque exclusivement
théâtre par la mise en, scène. Quand
des personnes qui 'sont venues au ils sont venuE! pàr le métier
(J
d'acteur, comme c'est le ca~ de Bastien, de Lepage et de Haher, Ils s~ consacrent, après coup exclusivement
à
la direction et à la mise en~cè,pe. Tassé, qui a pris la relève de Lemieux au Théâtre du Bols-de-Coul.onge» ~st un des seuls cas où' se perpétue la tradition de l'acteur-directeur. IL s'est donc prod~it ;.écemmen~ un changement imliortant et très générali-sé par rapport il, la génération
r
d'acteurs-directeur'8 qui a p;récédé et fondé les compagnies
1
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.
'~, '
.11
in~titutionnellecs d~
tlféât.re'. Le fait "que la revue Jeu ait consacré, enl ,
1982. un numéro spécial aux «questions' de mise en scène' peut être ,considere comme un indtce' de l'importance accrue de la mise en scène
'dans le théâtre quélfécois. L'article de présent~tion du numéro spécial de la revue s'intitulait de façon significative: «De l'âge de la parole
à 1" èrt;! du signe'. La 'parole. c'est le fait de l'auteur et de l'acteur. alors que le signe c'est la théâtralisation, le fait du metteur en scène.
Pour donner une indication de ce phénomène nouveau de la préséance plus grande du metteur en scène dans la pratique théât~ale,
,mentionnons qu'il arrive de plus ,en plus au théâtre, comme dans le cas du cinéma où les films sont identifiés par leur réalisateur (metteur en scène) et non par leurs «auteurs' (scénaristes. dialoguistes ... ). qu'on parle davantage des spectacles d'Ariane Mnouehkine, de Peter Brooks, de Georgio Strehler... plutôt que des spectacles de Shakespeare. de Molière, de ~izet, de Pirandello •••
Cette préséance accrue du metteur en scène dans la pratique
'1
théâtrale ne Va pa,s sans créer des oppositions violentes parini les gens
•
de théâtre. Certains parlent 'du «mythe actuel du metteur en scène'. Pour eux, le me t teur en scène ne serai t pas nécessaire, ou du moins, son
u ' '
influence serait beaucoup moins déterminante si le système de production
"
,était celui de ,la troupe dé comédiens permanents. Un metteur en scène
6 ,
de la première gét;lération des' directeurs artistiques de nos entreprises, théâtraies nous a affirmé que le etriangle magique' du théâtre était constitué du poète. dramatique, d"une troupe d'acteurs et d'un grand
p~blic. .Le metteur en scène ne figure pas dans ce triangle magique.
Jean Vilar (1955) en France et Albert MilIaire (1982) ~u Québec vont .même jusqu!à parler de «la mort ,du metteur en scène., d'abord pour
signifier que son travail «ne devtait pas se voir', et aussi pour indiquer qu'il ne s' a,gi,t pas d'un Ifrt à part entière au théâtre, mais plutôt d'une fonction intégratrice d'autres contributions artistiques plus spécifiquement 'théâtralès. Pour un metteur en .scène entre autres, ce sont les oasfects. gestion et orgahisati.on inhérents à la fonction mise en scène qui empêê.he selon lui que la mise en scène puisse être
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r~ " 1 ! ê !{.' II
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.12considérée comme un art essentiel du théâtre ou une' fonction àO part entière. Le metteur en scène est perçu comme un «parasite» des véritables créateurs. Ceci étant dit, même chez ces adversaires du metteùr en scène pour qui le théâtre demeure essentiellement le fait àe l'auteur et de l'acteur, on reconnalt que les plus grandes réalisations théâtrales actuelles sont le fait de metteurs en scène: Brook,'
'.
Mnouchkine, Strehler... On mentionne rarement des metteurs en scèn~
québécqis. Chez les metteurs en scène de la génération actuelle des
.
0 dire~teurs artistiques on mentionne Brassard, Reichenbach et RonfaÏ>d et chez ceux de la première génération t on mentionne Jean Gascon e't PaulHébert (1) (fi)
- Mise en scène et gestion
Notre r,ederche a pour object,if d'étudier la mise en scène dans une perspective managériale. La mise en scène à la fois coo.ne gestion de produit (conception et réalisation de la mise en spectacle) et plus largement comme gestion de projet. Le metteur en scène, en plus d'être responsable des différentes- dim~nsions ,esthétiques de la conception du produit est aussi responsable du respect de's échéanc~' (le soir de la première étant l'échéance ultime) en Q plus d'être parfois
• 0
responsable de l'enveloppe budgétaire qui est allouée à la production du spectacle dont on lui confie la mise en scene.
Les études qui traitent de la gestion. des Emtreprises artis'tiques sont peu nombreuses. Outre des études consacrées aux entreprises du Ctiers se"cteurl (McGill et Wooten. 1975; Suke1, 1978), i l existe ,;,n certain nombre d'études qui
tent~nt
d'appliquer normativement\les principes de la saine gestion aux entreprises d'arts d' interpré-tation ou aux entreprises de spectacle. Reiss (1974) offre un manuel de la ges tion des arts. Langley (1974) propose des principes et une prat
1-u' ,:, i 1.
1
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tlrUst:fques continuent de prévoir def; déficits et fie contentent de faire
du lobbying efficuce plutô~ que d'apporter des changements majeurs à
" '
leur.f,p~tion et Raymond et Grdser (1975 et 1978), fidèles à l'orien-tation normativ{' _du Harvard Business Srhool proposent une bonne facon de
gérer l('El putreprfses artistiques. Adizes (1975) et Lflpierre (1978)
font plutôt ressortir le caractère inévitable pour l'artiste d'être centré sur Ron produit plutôt que sur le marché et montrent le coût pour
l'8~tiste et l'lncidencp sur la gestIon de l'entreprise artistique dé
c~tte orientat:l on produit.
économique.
Des études ont aussi fté cond\lHcti dans une perspective L'économie des arts d'interprétation et l'économie des
pntreprises de spectacJ c possède déjà quelques classiques. L'étude de
Baumo] et Bowen 0_9.06) el leur démonstration du dilemme économique, lIa
,
maladie de Baumol., qui justifie l'aide toujours accrue que les pouvoirs
publics (ou les mécènes privé~) doivent apporter aux a'rts
d'interpré-tation est maintenant devenu célèbre (2) . Leroy (1980) traite de ] a
relation entre J' psthétique et ]' éconorni que dans les arts du spectacle
vivant en montrant l'interact:lon entre les aspects technocratiques, sociaux et esthptiques du système. de production de spectacles vivants. La thèse réccnte de Busson (1983) traite aussi de l'influence de
l'économ:lque sur 1('6 choix esthétiques et de l'insertion du théâtre dans
l t' champ culturel.
10utes ces études font ressortir l'importance du produit
lui-même Bur ]a gefltion de l'entreprise et Bur son économie. n'une
part, on propOHe à l'entreprise de concevoir ou de trouver le bon
prodtd t à offrir compte tt:nu oeR opportunités offertes par des segments
de marché prée:! h pt d'autre part, on prendra pour ~cquis que l '
entre-priR~ artistique est centrf.e Bur son produit, qu t on doit en tenir compte
dans sa gestion générale et dans le choix des segments de marché auxquel s le produit sera offert pour lui assurer le rayonnement le plus
szand,
la 8urv1.e de l'entreprise nécesd tant l'intervention de mécènes."
'\
\produ!r
Cependant, i l y a très peu d' t'tudes sur la gestion du
·14
de théori t'R du produit culturel (l\l du produi t spectacle vivant. I l Y a
~
d'abord un certain nombre de publicIlt:10118 par les praticiens eux-mêmes.
Ces ouvrages de réflexion touchent le théâtre en général et différents aspects particuliers, dont la m:lf;e en scène. Au nombre de ces réflexions, mentionnons StAn~slavski (1980). Craig. (1921), Brecht (1963), Artaud (1964), Vilar (1955) et C1urman (1972). Il Y a ensuite un cE'rtain nombre d' études faites par des analystes ou des critiques qui tentent de rendre compte de la pratique des metteurs en scène ou du discours de ces metteurs en scène -sur leur pratique. Cole et Chinoy
(963), Tempkine (1977 et 1979) et le numéro spécial de la revue Jeu (no 4, 1983) entrent dans cette catégorie. Mt>ntionnons enfin une étude universitaire (Veinstein, 1955) qui traite de la condition esthétique d~
ln mise en scène thfâtrale. mais en restant à un niveau conceptuel, au n:lveau du débat théoriquf' de l'opposition entre ]ll littérature dramatique et la représentation théâtraJf:', entre l'interprétat:lon et la création, discutant de la pertinence et des mérites relat;l.fs de chacun des éléments du débat à la lumière de rHle:xions de théoriciens et de prat:! ciens.
Q~ant aux' études de produit spectacle dens une p,rspective ,
,
managériele. c'est-à-dire, dans la perspective de la gestion même du produit. elles sont à peu près inexistantes. CE' n'est pas la premi~re
fois cependant qu'une étude sur la ges~ion du produit spectacle est
f8it~ dans le cadre d'une faculté de management universitaire. On peut
citer. par exemple, une "tude sur la gestion du prodùit théâtre (Goodman et Coodman. 1972; Goodman. 1981), une étude sur le produit
cinématographique (Morley et S:lJver, 1977) et une étude de la gestion du produit musique populaire, (Peterson .i't Berger, 1971). Notre étude potte
•
~pécifiquement sur la gestion de la mise en spectacle. A notre
connaissance. c'est la première étude sur la mise en sc~ne de th~âtre
dans une perspective msnagéria1e.
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11
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·15
- ~estion: action, pra~jque et art
«Rechercher la simplicité, mais aussi s'en méfier'
(.To~,:ph-LoUiS La Grange, 1736-1813)
«Scck simplicity. and distrust i t '
(Alfred North Whitehead. 1861-1947)
Postuler que la mise en scène est de la gestion implique que
nous nOU8 penchions sur ce qu'est ]8 gestion. Certains glorifient ou
décrient 1eR cheJ:cheurs qui décrivent et présentent simplement les phénomènes complexes. alors que d'autres glorifient ou dec'I"ient les
chercheurs qui décrivent et présentent de façon complexe des phfnomènes
simples. On parle rarement des chercheurs qui décrivent et presentent
simplement l~s phénomènes simp1eE et qui décrivent et prfse.~nt de
façon comp] exe les phénomènes complexes. La gestion est il la fois un
Q phénomène simple et un phénomène complexe. En tant qu'action. la
gestion est un phénomène simple. L'action est un tout, une synthèse, et
par conséquent, un phénomène simple.
L'étude de la gestion est par contre complexe parce que pour
l'expliquer, la comprendre, il faut dé-composer l'action,
la
réduire en. éléments simples et analyser ces composantes en elles-mêmes et dans
leurs intcrrelation~. En réduisant l'action qui est synthèse, on
s'éloigne du tout et par conséquent on en rend l'étude complexe. De
plus, l'étude de l'action humain!' CAt rendue complext: d'une part à cause
des] tmite!; dt·f. capacités rrflex1ves de notre cerveau sur l'action
elle-même et Rur ce qui la C<JtlRe et, par voie de consÉ-quences, à cause
des limjtes et deR jnsuffisances de nos cOI\\laissances sur cette action même.
Dans cette recberche, nous avons opté pour une compdhension
de la gestion par hs notions d'action, de ptatirule, et d'art. On
~vy
définit l'action par: Cce que fait quelqu'un et pÂr quoi i l réalise une
intention ou une impulsion' (Le Robert 1: 21). Par pratique on entend:
~
,-.
'~"'''''''''''~~IItI;;.$ _;.b~'~''''A;~_[lJIl'I~''''''''''''';';1!\'lI''·!I>~~'''l!l!t'''I'''I.''''''''''''<' "~Y""""''''!'<''''~l''!l''~''''''
., (Î ~ ""0 l ! ~ ~ tZt;;;a:;UI~jfVftf'
Jt'-t ..
--(
(1.e Robert 1: 1505). Le nlClt latin praxis est aussi défini: «Activité en
vue d'un réflultat (opposé à la connlliaaanN' d'une part et à l'être
d'autre part), (Le Rohert 1: 1506). L' art ~8t défini comme «un ensemble
de moyens, de procédés réflés qui tendent li une certaine fin ••• ensemble
des activités humaines créEltrices visant à l'expression par- les oeuVres
de l'homm~. d'un idéal esthétique' (Le Robe~t 1: 107).
~
- La gestion: un champ de savoir e:pfocifique
Comprendre IEl f{'stion par les notiona d'action, d.e pratique et d'art ne nie pas 1eR possibilitfFI d'étude du phénomène cependant (3) •
Dans un document de travElil, un ~roupe de profpsReurs-chercheurs de
l'Ecole des Hautes Rt\ldE'B Commerciales de Montr~al (Chaussé et al. J
1983) a soutenu qu'en plus d'être un champ d'action, la gestion était
':-
".aussi 'devenue, au cours des dernières décennies, un champ de savoir
spécifique. La gestion, c'est d'une part un champ d'action (l'exercice
de la gestion), c'est-à-dire, un pratique, un art (l'àrt d'insuffler une direction, l'art de la prise en charge, de l'inter-vention ••• ) et
d'autre part, la gestion c'est devenu un champ de savoir 8péciflqu~ (la
réflexion sur l'exercicE' de la gestion). Ce champ de savoir spécifique
s'est surtout déVelOPjé dans des institutions universitaires et a,
commencé à émerger ('orome hamp de savaiI autonome depuis le début de ce
siècle (et surtout BU ours des dernières décennies). Le nombre de
facultés, d'écoles ou d' insti tuts de recherrhe en gestion témoignE'nt de
l'àutonomisation de la gestion comme champ de savoir ~pé~ifique.
Affirmer que la gestion CRt devenue un champ de savoir spéCifique déve loppi> daDe des institut ions universitaires. c'est reconna1tre qu'on en t'Rt arrivé à circonscrire un objet d'analyse plus
lui appl iquer des méthodes d'investigation, des gri\les
et d'E:xplication et qu'on en pst arrivé à un enlilemble de
ont fini par const Huer un corpus de connaissances
spécifiques li l'objet d'anaIYRf'. Comme champ de savoir spécifique, la
gestion comporte un certain nombre dl' rubriques que l'on r-etrouve
"
ma1ntenant dans la plupart des manuels ou des étûdes en gestion: pris~
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de 'décision, 1 denti té, objectifR, stra~égi f~, structun~tion, pouvoir,
(4) ..
1
contrale, culture,.. .
Définir ] fi ge.stion' en se servant des notions d'action, de
pratique et d'a~t, c'e~t m~ttre l'accent sur l'agent, sur l'acteur qui
cause ce qui
aT~ive,
sur les plans, les projets i rêaliser, sur ce quise passe quand d~B gen~ sont réunis et que des ressources sont utilisées
pour atteindre un résultat. La gestion, c'est l'art de celui qui prend
la responsabilité de la destinée d'une organisation donnée(S). Cette
définition à'oppose donc, dans l'accent qu'elle met, sur une conception
b
de la gestion considérpp conne une science ayant Be& IOis,fiables, comme
un processus pré-conçu et dl application universelle (planifier,
organiser, diriger, contrôler), comme une série d'étapes logiques ou
d' opérntions suivies grâce auxquelles 011 atteint- une fin. Quand on
ajoute que la gestion est un art, même si ]~ gestion est un art en
partie techniqu~, c'est-à-dire, reposant à
Id
fois .sur l'application de'- "---.of/
connaissances et sur l'utiliflfltion d'un certain nombre d'outils ou de
techniques, on fait référence à des aptitudes et à des habiletés d'ordre
technique, mais surtout cl' ordre humain, habiletés qui misent sur la
connaissance et la IDflitrise de moyens par lesquels on arrive à ce"rtaines
fins.
- Postulat sous-jacent à la gestion
En plus d'être orientée verEl une tâche à accomplir, un
rPE;mltat
n
atteindre, ]a gestion impliqut: nért'ssairement l'obligation deù convaincre, de persuader, d'amener les gens li adhérer à un proj et qu'ils
n'ont pas conçu.
J,(. postulat sur lequel repose la pratique et l'art de la
gespon est le suiv:lnt: les organisations sont plus efficaces
(destinée, finalité . . . ) et plus efficipntes (rendement, productivité •.. )
qu~nd elles sont dirigées. Le postu] At n'implique pas que la direction
soit autocratique, aristocratique, olig:lrchique ou démocratique (qu'il
s'agisce d'une dém0cratie par ht Dl8jorité ou p~r le consensus), qu'elle
soit :fndividlwlle ou collég:f.Ble, que ]a direction resulte d'une
l
·18
,
autogestion ou d'une allogestion. Le postulat impliquE' l'Ieulement qu'il y ait d1rect:lon. La diuC't:lon peut être prise il ]~ fois au sens de 'p'!-lotage et au sens dt' Jn résultante d('~ diverses forces en présence
'b
dans les or'g-anisaÙons. Jusqu'à maintenant, l'idéologie pr(.pondérante en Occident a ~t~ celle d'une direct:lon donnée par des dirigeants ~ des dirigés. Convaincre, pE'Tsuader, et susciter l'adhésion de dirigés à un projet qU'il!:; ft' ont pas conc;u amène la problématique du contrôle et du
pouvoir dans la relation dirigeant/dirigé.
On fi fl88isté cependant à plusieurs remises en question des
pouvoirs relatifs de ceux qui dirigent et dt:' ceux qui sont dirigés. (cg. révolutions politiqut!s, révolutions sociales, révolutions indus-trielles •.. ) . On 8 assisté à la montée de l' id€:ologie de l'égalité.
~falgré cette idéologie (une idéologie est un «petit délire», comme on le
verra plus loin), il exiEte un état de fait: lefl êtres humains sont différE'nts. Ils sont différents d'abord dans leur motivation. Certains sont ambitieux, certaillf.· préfèrent diriger, certains préfèrent les chORes complexes alorb qtlC' les tendances contra:lres existent aussi. Les humains sont aussi
(et
Burtout) in~gaux dans Jeurs talents. Si on peut parler d'une idéologie de l'inégalité entretenue pour msintenir des~sservissements et de~ aliénations, cela n'infirme en rien l'état de
fait des inégalités fondamentales entre les talents des êtres humains. Sans présumer des
diff~rcnciations
et des hiérarchiesq{ii
appara!tront, nous postulons qu'il y a iné:v:ltflblement des différences et des hiérar-chies dans les rapports humains. On peut même se demander si laIl
pfln:lcipat1on, grandement valorisée au cours des dernières décennies eri
.
, se réclamant d'une ceTta~ne idéologie de ]'égali~é, n'a souventconsti-, (6) ,
tué qu'une nouvelle forme de msnipulat:lon s'ajoutant à la panoplie clef. habiletés interpersonnE'] les des managers qui s'adaptent, dans l'exercice de leur' ort, au goût de l'époque. à la dernière mode, à
l'évolution qui résulte du constant rapport de (oTces entre dirigeants et dirigés.
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- La gestion: tributaire du savoir général
Cependant, même si on peut parler maintenant de l'émergence d'un champ de savoir spé~jfique,à la gestion, donc ayant atteint une certaine autonomie, CP champ de savoir ne sera jamais un champ ferme. La praxis et l'art de lé! gestion. comme touteR les pratiques et tous les
•
arts, sont éclairés par unp réflexion aussi vieille que l'humanité, par des diflciplines qui ('Il ~tudient directement ou indirectement des
fa-cettes particulières ou qui l'analysent autant dans sa spécificité que dans sa totalité. La ge~tion, champ de savoir. table donc et continuera de tabler sur les découvertes de toutps les discjplines scientifiques et de tous 1eR champs de connaissance. A cause de son essence éminemment humaine, elle sera part i culièrement tributAire des découvertes e~ des connaissances qui nous viennent de toutes les sciences dites humaines.
Bien sur, ,.,~ à cause du sujet, toutes les scie6ces sont des \.. sciences humaines, mais il y a néanmoins, à cause de leur objet, des familles de disciplines scientifiques qu'on~appelle communément sciences humaines et dont les connaissances sont en rapport étroit avec l'étude et le champ de savoir de la gestion. On peut nommer les sciences de la personne (la psychologie, la psycNmalyse, la médecir.{', la
psychia-tri~ .•. ), les sciences sociales (lei sociologie, l'économique, les
sei ences politiquer;. ] e droit, l'anthropologie, l' ethnologi€, ... ), les
scienc~s __ de la vie (la biologj e, l'écologie ••• ) et des disciplines critiques (l'~pistémologie, la philosophie des sciences, la séroiologie, la linguistique. les moth{>mat1ques ... ).
La praxih ct l'art de la gestion ~'abreuvent donc non seulement au champ de savoir spécifique à la gestion, mais aussi
à
ces champs de savoir universel f; dont la praxis et ] e champ de savoir spéci-fiques à la gestion demeurent tous deux tributaires. La pratique de la geflUon a été et est souvent ]t' fait de gens qui ont eu dl's formationsdans des disc1p]ines de base (ingfnipur, avocat, sociologue, écono-miste ... ) et des contrihutions majeures au champ de savoir spécifique à la gestion nOUb viennent dl' chercheurs identifiés à des disciplines de base (sociologie, psychologie, philosophie .•. ). TJ eEt donc à souhaiter
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que non seulement leH
~estionnaires
profes8:1on~nels
ma:! s aussi lesar~cialistes et les chercheurs en gestion aient un cadre de rêfêrence
aussi vaste que pO~f.jb] e et qu'ils aient ulle connaisflance profonde de
l 'humanité et des êtres humains, de leurs quêtes existentielles, de leurs quêtes d'identité, de création et de production. de connaissance,
de bonheur, de productivité, de dom~nation, de richesse •••
- L~ gestio~: un comportement
Cette recherche s'inscrit dans le champ de BHvoir~spécifique
à la gestion. Ell~ veut contribuer à la connaissance de la gestion'd'un
type d'entreprise (le théâtre, un art d'interprétation) et à la
gesta-tion et la gesgesta-tion d'un produit (le ~pectacle de théatre).
Cette recherche s'inscrit aussi dans le champ de savoit
spéc;Lfique au comportemt>nt dit' organisationnel (7). Les champs de savoir
respectivement spéd tique.s à la gestion et au comportement
(organi-sationnel) sont d'ailleurs très connexes. En effet, étudier le travail
du manager (ses rôles, ses respo116abilites, ses actiene •.• ) et étudier
J'inCidence de la per~onnalité du mansger dans J'exercice de la gestion
(ses processus mentaux, ses façons d'imposer, de manipu1er(8), de
/
menacer, de cont~ôler, ses modes de relations interpersonnelles ••• ) sçnt
deR dimensions étroitement reliées à la pratique
oe
la gestion •. - /
En français, il est jntéressant de noter que les mots
•
gestion, gestation et comportement ont des signifjcations qui sont très rapprochées. Les vocables gestion et gestation originent tous les deux de la racine latine gerere (porter, faire), gestatio signifiant «action
de portert. Quact élU mot comportement quj vient du verbe comporter, on
y retrouve le sens de «porter" qu'il s'agisse de «trans-porter' ou de
csup-porter' dont la racine s{'rlll t comportare, ou qu' 11 s' agissè cd'
in-clure en soH ou. OP «comprendre en soU, implicites dans le mot
com-porter.
Si toutes les r('cherches cn gestion tablent d'une façon ou