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Les obstacles et les leviers du développement de compétences dans le secteur du commerce de détail.

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Academic year: 2021

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UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE Faculté d’éducation

Les obstacles et les leviers du développement de compétences dans le secteur du commerce de détail

par

Marc-André Gazé

Essai présenté à la Faculté d’éducation En vue de l’obtention du grade de

Maîtrise en sciences (M.sc.) Maîtrise en orientation professionnelle

Mai 2016

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UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE Faculté d’éducation

Les obstacles et les leviers du développement de compétences dans le secteur du commerce de détail

Par

Marc-André Gazé

Cet essai est évalué par un jury composé des personnes suivantes :

Patricia Dionne Directrice d’essai

Rachel Bélisle autre membre du jury

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SOMMAIRE

Cet essai porte sur les obstacles individuels et organisationnels au développement de compétences du personnel œuvrant au sein du secteur du commerce de détail. Il vise à comprendre les enjeux du développement de compétences des personnes travaillant actuellement dans ce secteur. L’objectif général de la recherche est d’identifier quels sont les obstacles et les leviers de la mise en place de formation soutenant le développement de compétences dans le secteur du commerce de détail. Pour soutenir cet objectif, cette étude prend ses assises sur diverses définitions, dont la notion de compétences, de Michaud, Dionne et Beaulieu (2006) et la définition du développement de compétences de Le Boterf (2013). La typologie des obstacles individuels provenant des travaux de Cross (1981) et de ceux de Darkenwald et Merriam (1982), ainsi que des catégories d’obstacles à la participation à des activités de formation en organisation, tirées de Solar, Baril, Lauzon et Roussel (2014) sont utilisés afin de soutenir théoriquement les analyses de cet essai.

Sur le plan de la méthodologie, cette recherche est effectuée à partir d’une analyse secondaire d’une entrevue semi-dirigée provenant du corpus du projet ayant donné lieu au rapport intitulé Tous ces chemins qui mènent à un premier diplôme. Orientation des adultes sans diplôme dans une perspective d’apprentissage tout au long de la vie (Bélisle et Bourdon, 2015). L’étude-source visait à « cerner les besoins d’orientation des adultes sans diplôme, tout en s’intéressant aux services d’orientation connus, reçus et souhaités » (Bélisle et Bourdon, 2015, p. 5). L’analyse montre que plusieurs obstacles existent pour les travailleuses et les travailleurs de ce secteur d’activité, dont principalement les obstacles informationnels quant aux ressources disponibles en orientation pour les aider dans leurs choix professionnels. Les données permettent de dégager que les obstacles individuels et organisationnels s’influencent mutuellement. Plusieurs obstacles organisationnels, par exemple une culture organisationnelle ouvrant peu de possibilités de discussions sur les projets de formation et de carrière influence

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les obstacles individuels, notamment les obstacles dispositionnels. En effet, au regard des obstacles organisationnels, la personne interviewée remet en question et il doute de son projet de formation en emploi. Plusieurs leviers observés dans l’organisation sont présentés pour contrer les obstacles tels que le bilan de développement de compétences en emploi (Michaud, Savard, Paquette et Lamarche, 2011) et la discussion de carrière en contexte organisationnel (Goyer, 2010). Les conseillères et les conseillers d’orientation. (c.o.) peuvent contribuer par leur expertise à la mise en œuvre de ces leviers. Enfin, les résultats apportent un éclairage sur les obstacles et les leviers au développement de compétences d’un secteur d’activité, qui est peu documenté, le commerce de détail.

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TABLEDESMATIÈRES

SOMMAIRE ... 4

REMERCIEMENTS ... 8

INTRODUCTION ... 9

PREMIERCHAPITRE–PROBLÉMATIQUE ... 12

1. LA FORMATION CONTINUE SELON DES CONTEXTES NATIONAUX : POLITIQUES ET LÉGISLATION ... 13

2. LE SECTEUR DU COMMERCE DE DÉTAIL ... 20

2.1 Le comité sectoriel de main-d’œuvre des services automobiles ... 21

2.2 Le comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de détail ... 21

2.3 Le comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de l’alimentation ... 23

2.4 Portrait des pratiques en formation continue : commerce de détail ... 24

2.5 Portrait des pratiques en formation continue : commerce de l’alimentation 26 3. LES MESURES DE FORMATION ET DE DÉVELOPPEMENT DE COMPÉTENCES DANS LE COMMERCE DE DÉTAIL ... 26

4. OBJECTIF GÉNÉRAL DE RECHERCHE ... 30

DEUXIÈMECHAPITRE–CADRECONCEPTUEL ... 31

1. LA COMPÉTENCE ET LE DÉVELOPPEMENT DE COMPÉTENCES ... 31

1.1 La compétence ... 31

1.2 Le développement de compétences ... 35

2. TYPOLOGIE DES OBSTACLES AU DÉVELOPPEMENT DE COMPÉTENCES ... 38

3. LES OBJECTIFS SPÉCIFIQUES ... 43

TROISIÈMECHAPITRE–MÉTHODOLOGIE ... 44

1. BUTS, OBJECTIFS ET MÉTHODES DU PROJET-SOURCE ... 44

2. LE TRAVAIL SPÉCIFIQUE DE L’ESSAI ... 45

3. ASPECTS ÉTHIQUES DU PROJET D’ESSAI ... 46

QUATRIÈMECHAPITRE–ANALYSEDESRÉSULTATS ... 48

1. OBSTACLES INDIVIDUELS ... 48

2. OBSTACLES ORGANISATIONNELS ... 53

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CINQUIÈMECHAPITRE–DISCUSSION ... 63 CONCLUSION ... 70 RÉFÉRENCESBIBLIOGRAPHIQUES ... 72

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier plusieurs personnes qui m’ont soutenu durant l’écriture de ce beau projet. Je ne peux passer sous silence la contribution essentielle de ma directrice d’essai, Patricia Dionne, qui a été une source d’inspiration et d’efficacité pour compléter cet essai.

Guylaine Michaud, avec qui j’ai conçu mon plan rigoureusement et m’a donné la motivation pour écrire sur ce sujet.

Rachel Bélisle, pour l’utilisation de l’entrevue semi-dirigée, sans quoi cet essai n’aurait pas eu lieu.

Charles Fournelle, pour tous les sacrifices qu’il a effectués pour mon retour aux études et son support inconditionnel.

Roselyne Lampron, pour sa collaboration à l’arborescence de mon plan d’écriture et à sa rigueur impressionnante dans son travail.

Émilie Côté, pour son esprit compétitif et sa présence lors de moment de découragement.

Thomas Critchley, pour son écoute et les moments de délire.

Ma famille et mes amis, pour leurs encouragements et leurs appuis qui m’ont permis de préserver mon état d’esprit.

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INTRODUCTION

Les organisations du Québec sont assujetties à la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre (2015). Selon l’article 3 de cette loi « tout employeur, dont la masse salariale à l’égard d’une année civile excède le montant fixé par règlement du gouvernement, est tenu de participer pour cette année au développement des compétences de la main-d’œuvre en consacrant à des dépenses de formation admissibles un montant représentant au moins 1 % de sa masse salariale ». (Ibid.) Pourtant, le taux d’investissement en formation de la part des employeurs a chuté de 18 %, tous secteurs confondus, selon le plus récent rapport de la Commission des partenaires du marché du travail (2014). Dans un contexte de travail instable, constamment en changements (Le Boterf, 2013), cette baisse d’investissement dans la formation du personnel devient un enjeu central à considérer. Cet enjeu est particulièrement saillant dans les secteurs d’activité où la formalisation de la formation en emploi demeure embryonnaire. Le secteur du commerce de détail - qui représente un salarié sur sept dans l’ensemble au Québec - fait partie de ces secteurs d’activités. Cet essai vise à comprendre les enjeux du développement de compétences des personnes travaillant actuellement dans le secteur du commerce de détail. L’objectif général de la recherche est d’identifier quels sont les obstacles et les leviers de la mise en place de formation soutenant le développement de compétences dans le secteur du commerce de détail.

Ce travail sera présenté en cinq chapitres. Le premier chapitre, la problématique, traitera de l’apprentissage tout au long de la vie qui s’étend à toutes les sphères d’activités des personnes, dont celle de la vie professionnelle. Un survol sera effectué des quelques politiques nationales favorisant le développement de compétences. Cela sera suivi d’une description du secteur du commerce de détail et des mesures actuelles de formation et de développement de compétences mises en place dans ce secteur. Pour terminer, l’objectif général de cette recherche sera présenté.

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Le deuxième chapitre, le cadre conceptuel, explicitera les concepts et les notions centraux de cet essai. Pour débuter, la définition de la notion de compétence tirée de Michaud, Dionne et Beaulieu (2006) et celle du développement de la compétence de Le Boterf (2013) seront développées. Puis, la typologie des obstacles à la formation, repris des travaux de Cross (1981) et de ceux de Darkenwald et Merriam (1982), sera exposée. Ensuite, la typologie des obstacles organisationnels à des activités de formation en entreprise provenant de Solar, Baril, Lauzon et Roussel (2014) sera élaborée, pour terminer avec les objectifs spécifiques de la recherche.

Le troisième chapitre, la méthodologie, traitera de la description du projet-source de cet essai, la recherche dont le rapport est intitulé Tous ces chemins qui mènent à un premier diplôme. Orientation des adultes sans diplôme dans une perspective d’apprentissage tout au long de la vie (Bélisle et Bourdon, 2015) ainsi que des méthodes de collecte utilisées dont provient l’entrevue semi-dirigée choisie pour ce travail. Puis, la distinction du projet de cet essai comparativement au projet-source sera exposée. Pour terminer, la présentation des aspects éthiques de l’étude sera effectuée.

Le quatrième chapitre, l’analyse des résultats, présentera les résultats en fonction du cadre conceptuel sélectionné. On dénote, entre autres, qu’il existerait une tension entre les ressources personnelles et les ressources environnementales déployées par l’organisation. Aussi, l’organisation offre de la formation aux employés, mais, paradoxalement, il semble avoir peu d’espace pour discuter et considérer les possibilités de développement de compétences et de formation pour ceux-ci.

Le cinquième chapitre, la discussion, effectuera un retour global sur des enjeux soulevés lors de l’analyse des résultats. Ensuite, une comparaison des résultats avec ceux des études utilisées au sein de l’essai sera développée. D’ailleurs, on remarque que plusieurs obstacles existent pour les travailleuses et les travailleurs de ce secteur d’activité, dont principalement les obstacles informationnels quant aux ressources disponibles en orientation pour les aider dans leurs choix professionnels. Puis, divers

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leviers possibles pour contourner les obstacles constatés seront élaborés. Pour terminer, ce chapitre discutera des limites de la présente recherche et des critères de rigueur méthodologique qui ont été respectés.

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PREMIER CHAPITRE – PROBLÉMATIQUE

L’apprentissage tout au long de la vie est une perspective promue dans le contexte éducatif de la société actuelle (Commission canadienne pour l’UNESCO, 1997; Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie, 2010; OCDE, 2001). Ce concept explicité dans le Rapport Delors1 (Commission canadienne pour l’UNESCO,

1997) signifie que nous apprenons de la naissance à la mort. L’apprentissage tout au long de la vie constitue le socle de ce que Delors (1996) définit comme la société éducative où toutes les opportunités offertes par la société peuvent devenir une possibilité d’apprendre. Par ailleurs, la perspective d’apprentissage tout au long de la vie a incité l’adoption de plusieurs politiques publiques, entre autres au Québec, sur l’éducation des adultes et la formation continue (Gouvernement du Québec, 2002). La promotion de l’amélioration des compétences des personnes est soulevée au sein de cette politique, dans une perspective d’employabilité et d’adaptabilité sur le marché du travail, qui est constamment en mouvement (Bélisle, 2012). Ainsi, les gens sont amenés à poursuivre le développement de leurs compétences, grâce à la formation continue dans leur milieu de travail. Toutefois, les mesures visant l’apprentissage tout au long de la vie, déployées au sein du système public de l’emploi, sont très différentes d’un pays à l’autre. Ainsi, au cours de ce chapitre, une présentation de législations et de politiques sur la formation continue offerte aux travailleuses et aux travailleurs à travers divers pays sera effectuée. Ensuite, un portrait du secteur du commerce de détail, où la formation continue en emploi est peu développée, sera réalisé. Puis l’élaboration des mesures actuelles au sein de ce secteur d’activité sera exposée. Pour terminer, l’objectif général de la recherche sera divulgué.

1 Le Rapport Delors a été conçu par un groupe de 15 personnes, dirigé par Jacques Delors, qui a effectué de nombreuses consultations à travers le monde sur l’éducation au 21e siècle. Ce document a été remis à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) au printemps 1996. L’un des grands principes issus de ce document est celui de l’éducation tout au long de la vie (Commission canadienne pour l’UNESCO, 1997).

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1. LA FORMATION CONTINUE SELON DES CONTEXTES NATIONAUX : POLITIQUES ET LÉGISLATION

Du point de vue légal, la reconnaissance de l’apprentissage tout au long de la vie est enchâssée au sein de diverses politiques publiques, se manifestant différemment selon les contextes nationaux. D’ailleurs, tel que le souligne Bélisle (2012), ces politiques sont « dominées par l’idée que l’éducation, la formation et l’apprentissage préparent ou servent le travail, l’emploi et la qualification professionnelle, délaissant ou mettant en arrière-plan l’apprentissage qui ne relève ni de la formation de base scolaire, ni de la formation qualifiante/professionnalisante telle que la conçoivent les partenaires du marché du travail » (p.7). Ainsi, l’importance accordée à l’apprentissage tout au long de la vie passe notamment par la formation continue du personnel travaillant dans une organisation. La formation continue vise à ce que les personnes restent employables tout en rehaussant leurs compétences et leurs connaissances de base, et ce, en suivant des formations qualifiantes (Ibid.).

En France, le concept de formation continue fait partie intégrante d’une loi, soit la Loi du 4 mai 2004, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (Assemblée nationale, 2004). Cet accord a été promulgué afin de pallier aux inégalités et favoriser l’accès à la formation pour certaines minorités, telles que les jeunes, les ainés, les femmes et les salariés de petites et moyennes entreprises (PME)2.

L’article L950-1 de cette loi précise la participation de l’employeur au développement de la formation continue, soit de verser une contribution unique d’1 % de sa masse salariale. Subséquemment, le Code du travail a mis en place un dispositif pour les salariées et les salariés afin qu’ils puissent suivre les actions établies en formation continue, appelé le droit individuel à la formation (DIF). Ainsi, chaque travailleuse ou travailleur, disposant d’au moins une année d’ancienneté au sein d’une entreprise, a droit à vingt heures de formation par année cumulable sur six ans. De plus, les

2 Pour l’Institut de la statistique du Québec, les PME représentent « une entreprise ayant entre 1 et 499 employés inclusivement, et dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 50 millions de dollars » (Institut de la statistique du Québec, 2014, p. 22)

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personnes qui désirent bénéficier d’un congé pour formation peuvent le faire auprès de leur employeur, sous condition de détenir 24 mois d’ancienneté comme travailleurs, dont un an dans l’entreprise. Toutefois, la gestion des crédits de formation individualisés (CIF), qui provient du DIF, incombe aux employées et aux employés. Ils doivent aller rencontrer les personnes responsables de cette mesure dans leurs milieux afin de se prévaloir de leur droit et de discuter de leurs besoins de formation (Castra, 2011). Cette situation semble engendrer des problèmes, entre autres au niveau de l’accord des crédits de formation, chez les responsables qui n’endossent pas complètement leur rôle-conseil (Ibid.). Il est question de refus d’assistance de leur part, prétextant qu’ils ne sont pas là pour tout faire pour les salariés et encore moins de leur tenir la main, ce qui génère certaines réticences de la part du personnel à aller discuter de leur projet avec eux.

Récemment, la Loi du 5 mars 2014 (Assemblée nationale, 2014) a procédé à quelques changements en France, dont le remplacement du DIF par un Compte personnel de Formation (CPF), qui désormais reste actif tout au long de la carrière de la travailleuse ou du travailleur. Même si la personne rompt le lien d’emploi avec son employeur, elle a toujours accès à son CPF, que ce soit lors d’une fin d’emploi, d’une période de chômage ou d’un départ à la retraite. Dorénavant, le CPF s’adresse autant aux demandeurs d’emploi qu’aux employées et aux employés. Ce compte est crédité chaque année, jusqu’à un maximum de 150 heures sur neuf ans. L’employeur est dans l’obligation, tous les deux ans, d’effectuer un entretien professionnel avec les salariés afin de connaitre les perspectives d’évolution de carrière de ceux-ci. De plus, le personnel peut bénéficier d’un bilan de compétences tous les six ans. Les dispositions mises en place par le gouvernement supposent la responsabilisation du développement de compétences des travailleuses et des travailleurs aux employeurs. Ces mesures sont plus encadrées et elles fournissent des accès protégés qui paraissent plus avantageux (CPF) qu’en Amérique du Nord, où il n’existe rien de comparable.

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Les États-Unis ont une forte décentralisation du système de formation professionnelle, déléguant ainsi les responsabilités aux organisations (Bernier et Lesemann, 2009). Toutefois, le gouvernement a élaboré certaines stratégies sur le plan national et régional pour favoriser la formation continue au sein de domaines particuliers. Par exemple, en 2003, une initiative pour remédier à un manque de personnel qualifié pour combler des postes au sein de secteurs spécifiques, tels que la santé ou le commerce de détail, a été créée, soit la High Growth Job Training Initiative, pour permettre aux citoyens de bénéficier de ces nouvelles opportunités de formation et d’emploi (Nightingale, Eyster, Trutko, O’Brien et Chambers, 2008). Ainsi, une alliance entre les entreprises, les établissements d’enseignement et le marché du travail a été établie pour développer les compétences des personnes. Depuis, d’autres actions de la part du Gouvernement, plus spécifiquement du Department of Labor’s Employment and Training Administration ont été lancées, dont le projet Community-Based Job Training Initiative (CBJTI), en 2005, et le projet Workforce Innovation in Regional Economic Development (WIRED), en 2006 (Le Bureau de la responsabilité du gouvernement des États-Unis, 2008). Le projet CBJTI consiste à établir un partenariat entre le marché du travail et le système de formation professionnelle, afin d’augmenter le nombre de places au sein des centres de formation et de contribuer au développement de compétences des travailleuses et des travailleurs pour atteindre les exigences des employeurs. Pour sa part, le WIRED est mis en place afin que les régions partout à travers les États-Unis puissent déployer des stratégies pour collaborer au développement de la main-d’œuvre. En comparaison à la France, ce pays n’a pas d’accès légal spécifique sur le plan de la formation continue. Quant au Canada, la formation de la main-d’œuvre est en partie de juridiction provinciale.

Au Canada, l’État fédéral assume un rôle important quant aux législations entourant la formation continue, mais l’éducation demeure un champ de compétence provinciale (Bernier et Lesemann, 2009). Toutefois, certaines mesures, pour chacune des provinces, ont été élaborées pour aider les organisations à accroître les compétences des individus et de faciliter la certification et la reconnaissance de l’apprentissage en

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milieu de travail. Ainsi, pour la Colombie-Britannique, l’organisme qui encadre les programmes de formation professionnelle est l’Industry Training Authority (ITA) (Industry Training Authority, 2015). Son mandat est de faciliter la formation pour les métiers professionnels. Pour inciter les entreprises à investir dans le développement de compétences de la main-d’œuvre, cette province a instauré le programme Training Tax Credit, en 2007 (Gouvernement de la Colombie-Britannique, 2015), qui accorde des crédits d'impôt remboursables pour les personnes salariées et les employeurs engagés dans des programmes d'apprentissage administrés par l’ITA. Le Gouvernement offre un crédit aux employeurs à partir du salaire versé à un apprenti pour les 24 premiers mois d’un programme, qu’il soit certifié Sceau rouge ou non. Quant à eux, les apprentis reçoivent une subvention durant leur formation. La certification Sceau rouge vise à augmenter la mobilité des travailleuses et des travailleurs qualifiés entre les provinces du Canada (Sceau rouge, 2015). Près d’une cinquantaine de métiers sont désignés Sceau rouge pour le moment.

L’Ontario accorde aussi un crédit d’impôt pour la formation compagnonnique afin d’encourager la formation en milieu de travail. Ce crédit d’impôt fait référence à l’article 89 de loi de 2007 sur les impôts (Gouvernement de l’Ontario, 2013). Il est offert aux entreprises, pendant les 48 premiers mois de formation des apprentis, qui embauchent et forment des individus pour occuper l’un des 150 métiers spécialisés. La Loi en vigueur pour la formation en milieu de travail, est la Loi de 2009 sur l’Ordre des métiers de l’Ontario et l’apprentissage (Gouvernement de l’Ontario, 2015). Elle vise à soutenir l’acquisition de compétences d’un métier grâce au programme d’apprentissage en milieu de travail (PAMT), en obtenant un certificat de qualification professionnelle. Ces deux provinces sont citées à titre d’exemple seulement, plusieurs autres mesures sont utilisées à travers le Canada, mais l’accent sera plutôt mis sur la province du Québec.

Au Québec, la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre, qui existe depuis 1995 et qui a connu diverses mises

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à jour, exige des employeurs dont le chiffre d’affaires est de plus de deux millions de dollars d’investir un montant équivalent à 1 % de leur masse salariale dans la formation du personnel (Gouvernement du Québec, 2015). On entend par employée, employé3,

toute personne qui se présente à un établissement de son employeur ou qui reçoit un salaire versé par celui-ci. L’entreprise est libre de choisir le moyen qui lui convient pour répondre à cette loi, soit d’établir un plan de formation, d’accueillir un stagiaire, mettre en place un plan de formation offert par un ordre professionnel ou un établissement d’enseignement, etc. Les objectifs de cette loi sont les suivants : favoriser l’essor de l’investissement en formation, l’élaboration de modes de formation et de reconnaître les compétences des salariées et des salariés en emploi (Ibid.). Ainsi, cette loi vise à favoriser l’adaptation et la mobilité en emploi des travailleuses et des travailleurs. Les entreprises dont le total des dépenses en formation est inférieur à 1 % ont la possibilité de verser le montant restant aux Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre du gouvernement du Québec. Grâce à cette mesure, le Québec a constaté une augmentation du pourcentage du nombre d'établissements (toutes tailles confondues) désirant contribuer à améliorer les compétences des individus. Ce pourcentage est passé de 79,4 % en 2008 à 88,4 % en 2010 (Commission des partenaires du marché du travail, 2013a). Pourtant, la proportion d’organisations qui ont investi réellement dans la formation de leurs effectifs a stagné durant cette période, et ce, malgré une hausse de 16,1 % (entre 2009 et 2010) du nombre d’entreprises assujetties à la loi (Commission des partenaires du marché du travail, 2012).

La Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre a mené à plusieurs initiatives au Québec, telles que l’élaboration d’un guide de référence pour les normes et les exigences professionnelles associées à un métier, de programmes d’apprentissage en milieu de travail (PAMT) et de certificats de qualification professionnelle (Bédard, Bernier, Lejeune, Pulido et Lesemann, 2011).

3 On considère les gestionnaires, les professionnels, les techniciens, le personnel de soutien, les stagiaires et toutes autres catégories de travailleuses, travailleurs.

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Les normes professionnelles décrivent les exigences propres aux fonctions d’un travail, d’un métier ou d’une profession. Les entreprises peuvent s’en servir pour organiser la formation de leurs salariées et leurs salariés ou pour établir des plans de formation. Elles peuvent même être utilisées pour l’embauche et l’entraînement à la tâche du personnel. Ces normes peuvent contribuer à créer des programmes plus structurés, comme le PAMT.

Le PAMT vise à développer des compétences en entreprise en utilisant la formule du compagnonnage pour exercer un métier réglementé (Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, 2015a). Durant la période d’apprentissage, l’apprenti est jumelé à un compagnon détenant de l’expérience dans l’entreprise, qui lui transmet son savoir-faire. Le compagnon et l’apprenti disposent d’un guide d’apprentissage leur permettant de structurer leur démarche en fonction des compétences à acquérir, fondées sur la norme professionnelle du métier concerné. Pour se prévaloir de ce programme, l’entreprise doit effectuer une demande auprès d’Emploi-Québec pour vérifier son admissibilité. Certains critères doivent être respectés tels que l’individu doit avoir 16 ans, il doit déjà travailler dans l’entreprise et on doit retrouver dans l’entreprise où travaille l’individu un travailleur expérimenté dans le métier visé qui doit pouvoir agir en tant que compagnon auprès de celui-ci. L’entreprise peut, selon certaines conditions, bénéficier d’un crédit d’impôt remboursable pour la durée de ce programme. En 2006, 90 % des entreprises québécoises en avaient bénéficié et la grande majorité considérait cet avantage comme un incitatif à utiliser le PAMT (Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, 2015b). Une fois le PAMT terminé, la salariée ou le salarié reçoit un certificat de qualification professionnelle émis par l’État. Ce certificat est un document officiel attestant que l’individu a atteint le degré de compétence exigée par la norme professionnelle du métier (Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, 2015a).

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L’un des acteurs clés qui veillent au bon fonctionnement de ce programme est la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT). Instaurée en 1997, cette instance nationale regroupe des représentants provenant de différents milieux (enseignement, communautaire et gouvernemental, etc.) et de différents statuts (employeurs et salariés) (Commission des partenaires du marché du travail, 2013b). Encadrée par la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre, elle est aussi enchâssée dans la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale. La CPMT élabore et applique les règlements entourant la loi sur les compétences, tout en visant l’accroissement du développement des effectifs au Québec. Elle a initié Investissement compétences, qui offre des services-conseils et des mesures de soutien financier aux entreprises dans le but de favoriser la formation de la main-d’œuvre (Investissement compétences, 2015). Reconnus formellement par la CPMT, les comités sectoriels de main-d’œuvre (CSMO) définissent les besoins de main-d’œuvre et ils développent la formation continue en fonction de leur secteur d’activités (Commission des partenaires du marché du travail, 2015). Composés de représentant patronal, syndical et de travailleuses et de travailleurs du secteur, ils analysent les problèmes de main-d’œuvre dans leur secteur tout en proposant des actions pour y remédier. On compte 29 CSMO qui contribuent au développement de diverses stratégies d’apprentissage en milieux de travail, dont celui du secteur du commerce de détail.

En lien avec ce qui précède, les entreprises au Québec sont assujetties à une loi les obligeant à investir dans la qualification des travailleuses et des travailleurs. Le taux d’investissement en formation de la part des employeurs a chuté de 18 % entre 2011 et 2012 selon le rapport d’activité de la Commission des partenaires du marché du travail (2014). Dans un contexte de travail instable, où l’on retrouve des changements constants au sein des entreprises dus aux impacts de nombreux facteurs (technologiques, financiers, stratégiques, concurrentiels, culturels, etc.) (Le Boterf, 2013), cette baisse d’investissement dans la formation continue, de la part des entreprises, semble être un enjeu central à considérer. De même, puisque cette

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responsabilité est partagée autant par les employeurs que les employées et les employés, cette diminution importante soulève un questionnement sur les répercussions possibles chez les travailleuses et les travailleurs. De plus, l’ensemble des initiatives de formation continue mise en place par l’État semble viser surtout un processus d'individualisation, où la personne est responsable du développement de ses compétences (Bernier, 2011). En dépit de la loi sur le développement et reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre, aucune clause au sein de cette législation ne donne un droit particulier aux salariées et salariés pour se former (Ibid). Aucun congé pour formation ou le droit de s’absenter pour une formation n’existe pour le personnel, qui dépend de la décision de son employeur. Certaines personnes employées, provenant de secteurs d’activité où la formation continue en entreprise n’est pas implantée, paraissent tributaires des décisions des employeurs dans leur accès aux possibilités de formation continue en entreprise. Le secteur du commerce de détail représente l’un des secteurs d’activité où il semble y avoir certaines lacunes quant à la formation continue. Ce secteur, représentant un salarié sur sept dans l’ensemble de la province, rencontre certaines difficultés dans l’établissement de programmes de formation en entreprise (Conseil québécois du commerce de détail, 2013). Une analyse permettant d’approfondir la réalité de cette industrie au niveau du développement de compétences des individus sera amorcée dans la section suivante.

2. LE SECTEUR DU COMMERCE DE DÉTAIL

Selon Industrie Canada (2015), le secteur du commerce de détail représente l’ensemble des entreprises dont l’exercice de base est de vendre des produits en petites quantités aux clients, habituellement sans être transformés, et à leur procurer des services connexes. Au sein de cette industrie, on y retrouve, au Québec, trois comités sectoriels de main-d’œuvre des domaines suivants : services automobiles, commerce de détail et alimentation.

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2.1 Le comité sectoriel de main-d’œuvre des services automobiles

Le comité sectoriel de main-d’œuvre des services automobiles (CSMO-Auto) se distingue des deux autres comités sectoriels sur plusieurs aspects. Par exemple, en 2014, on retrouve près de 9 946 établissements, dont 86 % des personnes salariées sont des hommes et 46 % des salariés sont âgés de 45 ans et plus (CSMO-Auto, 2014), comparativement aux deux autres secteurs, où l’on retrouve majoritairement des femmes âgées de 15 à 24 ans. On retrouve 18 métiers spécialisés au sein de ce secteur, comparativement à quatre métiers spécialisés en alimentation, et aucun dans le commerce de détail. Contrairement aux deux autres secteurs, 69 % des employeurs n’ont pas d’enjeu de rétention de personnel et 90 % des emplois sont à temps plein (Ibid.). De plus, près de 72 % des organisations ont fait participer leur personnel à des activités de formation, autres que celles attribuées à la tâche, au cours des trois dernières années (Ibid.). Donc, comme on dresse un portrait global nettement différent, autant sur les pratiques de gestion, que sur le plan de la formation continue, ce secteur ne sera pas considéré pour la suite de l’essai.

2.2 Le comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de détail

Détail Québec est le comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de détail (Détail Québec, 2015). En 2012, le secteur du commerce de détail recensait 46 000 établissements au Québec (Conseil québécois du commerce de détail, 2013). Ce secteur représente 14 % de l’ensemble des entreprises québécoises (Fédération canadienne des entreprises indépendantes – FCEI, 2014) ses activités sont principalement dédiées à la vente au détail de marchandises (Industrie Canada, 2010). Tout comme c’est le cas dans le reste du Canada, le commerce de détail au Québec (300 000 personnes salariées) est composé d’une forte majorité de petites entreprises, dont 72 % comptent moins de dix travailleuses et de travailleurs (Comité sectoriel de main-d'œuvre du commerce de détail, 2012). Au Québec, la majorité des propriétaires sont francophones (85 %), ils ont plus de dix ans d’expérience en gestion (71 %) et leur entreprise se situe dans le milieu urbain (68 %) (Fédération canadienne des entreprises indépendantes – FCEI, 2014). On dénombre une moyenne de 12,5 employés par

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entreprise, dont le tiers est âgé de 15 à 24 ans et travaille à temps partiel (Détail Québec, 2015).

La proportion d’employés âgés de 25 à 64 ans représente 66 % de la main-d’œuvre, qui est plus faible en comparaison à l’ensemble des industries (84 %). Une majorité de la main-d’œuvre est féminine. Les femmes représentent 58 % des personnes salariées (Comité sectoriel de main-d'œuvre du commerce de détail, 2012). En ce qui concerne les professions, on retrouve une plus grande proportion du personnel de vente et de service à la clientèle, soit 48 %, comparativement à l’ensemble des industries (Détail Québec, 2015). Cependant, on compte un nombre moins élevé de professionnelles et de professionnels ou de personnel de soutien administratif, soit 5 %. Certains postes prédominent, tels que les conseillères-vendeuses et les conseillers-vendeurs, représentant 37 %, suivi des postes de direction avec 13 %, ainsi que les caissières et les caissiers à 10 %. Près de 17 % des travailleuses et des travailleurs sont sans diplôme et 34 % disposent d’un diplôme d’études secondaires. Le secteur se démarque par un taux de roulement de 25 % par année. Ce roulement est particulièrement saillant au sein des métiers de vente et de service à la clientèle (37 %) et pour le personnel à temps partiel (44 %). Ce taux de roulement est principalement dû aux personnes étudiantes et au personnel à temps partiel. En ne considérant pas les personnes étudiantes, la durée moyenne d’ancienneté de travail de la main-d’œuvre est de 14 ans; il passe à huit ans pour le même employeur et au sein du même poste, à six ans (Ibid.).

Par ailleurs, en ce qui concerne les programmes d’apprentissage que l’on retrouve dans le système éducatif menant à un emploi spécifique dans le domaine du commerce de détail, il existe certains programmes tels que celui en vente-conseil ou vente de produits de quincaillerie conduisant à un diplôme d’études professionnelles (Inforoute FPT, 2015). Au niveau technique, il y a le programme de supervision en commerce de détail et de gestion de commerce (Ibid.). Au niveau universitaire, le baccalauréat en commerce de détail est disponible, mais se retrouve seulement à l’Université Laval à Québec (Université de Laval, 2015).

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De nombreux défis pour l’industrie du commerce de détail sont à considérer, entre autres, la rareté de main-d’œuvre (Détail Québec, 2015). Pour parvenir à remédier à la situation, les experts du milieu suggèrent de dispenser une formation aux personnes salariées et d’enrayer le biais de perception observé chez les commerçants que de former une employée ou un employé augmente les chances de le perdre (Ibid.). En 2011, 41 % des organisations, d’une masse salariale de 250 000 $ et plus, au sein de ce secteur, avaient investi moins de 1 % en formation de leurs employés (Institut de la statistique, 2013). Ce constat laisse supposer que cette perception est encore présente chez les dirigeants. La formation des travailleuses et des travailleurs comporte des défis en soi, surtout sur le plan logistique, c’est-à-dire sur le plan du temps à trouver pour organiser ces activités et du remplacement du personnel en formation (Comité sectoriel de main-d'œuvre du commerce de détail, 2012). Les experts conseillent aussi aux employeurs de déployer des plans de carrière pour leurs salariées et leurs salariés, surtout pour ceux âgés de 25 à 34 ans. (Ibid.)

2.3 Le comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de l’alimentation

Enfin, le dernier comité sectoriel de main-d’œuvre que l’on retrouve dans ce secteur est celui du commerce de l’alimentation (CSMOCA). En 2014, on comptait près de 160 000 personnes salariées au sein de cette industrie et ce secteur rapportait des revenus de plus de 20 milliards de dollars par année (CSMOCA, 2015). On y retrouve 51 % de femmes, 26 % des travailleuses et des travailleurs n’ont pas de diplôme, 22 % détiennent un diplôme d’études secondaires et 28 % possèdent un diplôme postsecondaire (Petit, Morissette et Bourhis, 2014). Tout comme Détail Québec, on retrouve un nombre élevé de jeunes adultes âgées de 15 à 24 ans et plus d’un tiers du personnel travaille à temps partiel (Ibid.). Plusieurs diplômes d’études professionnelles existent au sein de ce secteur d’activité, permettant d’occuper un métier spécialisé, tels que boulanger, boucher, pâtissier, etc. (Inforoute FPT, 2015).

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On retrouve sensiblement les mêmes défis entourant la rareté de la main-d’œuvre et sa fidélisation au sein de ce secteur d’activité. Contrairement à Détail Québec, la reconnaissance des compétences pour les métiers spécialisés est dans la mire du CSMOCA (CSMOCA, 2015). À cet effet, un projet de formation a été conçu afin de promouvoir et de sensibiliser les propriétaires aux divers outils à leur disposition afin de reconnaître l’expérience des personnes salariées occupant des métiers spécialisés tels que boulanger, pâtissier, poissonnier et boucher (Ibid.). Au niveau des pratiques de gestion des ressources humaines, certaines problématiques sont néanmoins à souligner. Certains établissements peuvent atteindre un taux de roulement de 300 % par année pour des postes d’entrée, ce qui est considérable (Petit, Morissette et Bourhis, 2014). On constate que la gestion de rendement des travailleuses et des travailleurs est négligée par les superviseurs. L’évaluation de rendement est effectuée de façon informelle dans la plupart des cas, elle comporte des lacunes importantes attribuables entre autres, à l’absence d’objectifs précis communiqués aux salariées et aux salariés (Ibid.).

2.4 Portrait des pratiques en formation continue : commerce de détail

Ainsi, selon le diagnostic sectoriel de la main-d’œuvre du commerce de détail au Québec, 66 % des entreprises, comprenant des services de gestion des ressources humaines, n’ont pas de plan de développement de compétences dans leur milieu (Comité sectoriel de main-d'œuvre du commerce de détail, 2012). Un plan de gestion de la relève est utilisé par 38 % des établissements dans ce secteur, alors qu’un plan écrit de développement de compétences de la main-d'œuvre est utilisé seulement par 34 % d'entre eux. En 2012, une personne salariée sur quatre affirme n’avoir reçu aucune formation ou avoir suivi une formation datant de plus de deux ans (Comité sectoriel de main-d'œuvre du commerce de détail, 2012). De plus, ce sont dans les entreprises où la main d’œuvre est le plus facilement remplaçable que l’on retrouve le plus fort pourcentage de répondants n’ayant pas effectué de formation durant l’année (Foucher et Morin, 2006). En termes de pratiques en ressources humaines, 35 % des personnes employées n’ont pas de description de poste, 42 % n’ont pas reçu de manuel

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d’employé, 47 % n’ont pas eu de discussion avec leur employeur sur les possibilités d’avancement et la moitié n’ont pas reçu d’évaluation de rendement de la part de leur supérieur (Comité sectoriel de main-d'œuvre du commerce de détail, 2012). Ainsi, les études semblent montrer certaines lacunes dans les pratiques en gestion des ressources humaines.

Selon le Comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de détail (2012), une personne employée sur quatre aimerait recevoir davantage de formation. Toujours selon ce diagnostic, les sources de formation les plus utilisées seraient dispensées par les membres du personnel, des consultants, formateurs externes ainsi que des fournisseurs de services. On constate une certaine préférence chez les personnes salariées pour une formation pratique avec présence d’une ressource humaine, soit du coaching par une travailleuse ou un travailleur détenant de l’expérience, de l’entraînement à la tâche et des ateliers en salle (Ibid.). On estime l’intérêt pour la formation en ligne à 47 % chez les personnes salariées et à 50 % chez les employeurs (Ibid.). De plus, 54 % des travailleuses et des travailleurs seraient enclins à suivre une formation menant à une certification de qualification professionnelle.

Détail Québec, en collaboration avec le Ministère du Travail, Emploi et Solidarité sociale, offre des certifications qualifiées à titre de conseillère-vendeuse, conseiller-vendeur et de superviseure ou superviseur de premier niveau pour les personnes employées expérimentées (Détail Québec, 2015). Pour être admissible au certificat qualifié de conseillère-vendeuse ou conseiller-vendeur, la personne salariée doit avoir travaillé au moins un an dans ce type de poste, doit considérer avoir les compétences nécessaires pour pratiquer ce métier et être âgé d’au moins 16 ans. Pour le certificat de superviseure ou superviseur de premier niveau, la personne salariée doit avoir un an et demi d’expérience comme superviseure ou superviseur de premier niveau, dont six mois comme conseillère-vendeuse ou conseiller-vendeur, considérer détenir les compétences nécessaires pour cette profession et être âgée minimalement de 16 ans. Ce processus est gratuit pour les employeurs et se déroule sur le lieu de travail de la

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personne salariée. Une fois le programme complété, les travailleuses et les travailleurs reçoivent un certificat de qualification professionnelle émis par l’État. Détail Québec propose aussi des formations sur mesure en fonction des besoins des dirigeants d’entreprise (recrutement, fidélisation du personnel, rémunération, etc.) (Ibid.).

2.5 Portrait des pratiques en formation continue : commerce de l’alimentation Quant au secteur de l’alimentation, des programmes de formation spécifiques ont été implantés par des magasins de grande surface, dont l’École des viandes (Sobeys), l’Académie Provigo et l’École des professionnels Metro-Richelieu (Petit, Morissette et Bourhis, 2014). Ainsi, ce sont principalement les personnes salariées qui travaillent dans un rayon spécialisé qui reçoivent de la formation. Les PAMT permettent de développer des compétences au sein de divers métiers de boucher, poissonnier, boulanger et pâtissier, qui sont aussi des stratégies de formation privilégiées par les commerçants (SCMOCA, 2015). La durée du programme varie selon le métier, soit entre 12 et 24 mois. L’employeur peut se prévaloir d’un crédit d’impôt pour le salaire versé à l’apprenti ainsi que pour le salaire du compagnon. Une fois terminée, la personne salariée reçoit aussi un certificat attestant qu’elle a réussi avec succès la formation pour le métier spécialisé. Malgré les possibilités d’évoluer au sein de ce secteur, les plans individualisés de formation sont plutôt rares, dû principalement aux opportunités d’avancement limitées au commerce même (Petit, Morissette et Bourhis, 2014). Ainsi, le portrait du développement de compétences au sein de ce secteur d’activité doit être effectué afin de mieux saisir la réalité des salariées et des salariés à ce niveau.

3. LES MESURES DE FORMATION ET DE DÉVELOPPEMENT DE COMPÉTENCES DANS LE COMMERCE DE DÉTAIL

Quelques études sur les mesures de formation et de développement de compétences en organisation au Québec ont été menées, dont certaines traitent du commerce de détail. Tout d’abord, les pratiques et les politiques de gestion des ressources humaines semblent nuire à l’employabilité des personnes salariées dans ce secteur d’activité. En

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effet, selon les besoins du secteur du commerce de détail, en grande partie, l’investissement dans le personnel n’est pas suffisamment valorisé (Tremblay et De Sève, 2006). La formation à long terme n’est pas une priorité pour les différents dirigeants, ceux-ci donnent des formations ponctuelles liées aux besoins immédiats de la tâche quotidienne. En effet, la formation en cours d’emploi est celle la plus souvent offerte dans les petites et moyennes entreprises (Goyer, 2010). Selon Foucher et Morin (2006), on retrouve dans les PME des pratiques de gestion moins développées et formalisées, des fonctions en ressources humaines centrées sur le dirigeant, dont la prise de décision s’effectue dans l’action et intuitivement, ainsi qu’un manque de ressources financières et humaines. Toutefois, certaines différences doivent être mentionnées au sein même des PME, entre autres au niveau des objectifs poursuivis, du stade de développement de l’entreprise ainsi que de leur croissance ou de leur expansion visée par la direction (St-Pierre, Julien et Morin, 2010). Ces composantes amènent des impacts stratégiques poursuivis qui distinguent chacune de ces entreprises pour rendre ce secteur hétérogène. Cependant, d’après Michaud et Savard (2013), on remarque, pour la plupart des PME, une absence de plan stratégique ou l’utilisation des stratégies intuitives ou peu formalisées. L’effet d’un manque de ressources humaines et financières amène, entre autres, une difficulté chez les PME à développer de la formation adaptée à leurs besoins (Tremblay et De Sève, 2006). Selon cette recherche mixte auprès de 16 organisations, dont 8 dans le commerce de détail au Québec, différents éléments expliquent ces difficultés. Parmi ceux-ci, mentionnons la variabilité des horaires de travail des personnes employées, leur facilité à travailler avec les nouvelles technologies de l’information et l’accès difficile aux institutions de formation, tant sur le plan de la distance que sur les horaires dispensés pour la formation.

Il existe peu de recherches empiriques traitant spécifiquement des croyances concernant la formation du personnel qui influenceraient les pratiques de gestion en formation (Foucher et Morin, 2006). Cependant, selon Tremblay et De Sève (2006), de façon générale, la culture organisationnelle et les pratiques de gestion influeraient sur

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le niveau de formation effectuée au sein d’une organisation. En effet, tel que le mentionnaient Foucher et Morin (2006), les auteurs d’une recherche réalisée auprès de 300 PME québécoises, dont 44 entreprises provenant du secteur du commerce et de la vente, « les PME qui adoptent une orientation stratégique fondée sur les ressources humaines soutiennent mieux la formation et, de façon spécifique, investissent plus en cette matière que les entreprises où les compétences du personnel constituent moins la base d’un avantage concurrentiel » (p. 169). L’une des variables qui a un impact important sur le plan du développement de compétences dans ce secteur est la perception favorable du propriétaire vis-à-vis de la formation continue (Tremblay et De Sève, 2006). On remarque également que les dirigeants qui détiennent un niveau de scolarité plus élevé sont plus enclins à offrir des activités de formation aux travailleuses et aux travailleurs. Donc, ces éléments, selon Tremblay et De Sève (2006) « peuvent compenser les difficultés liées à une petite taille [de l’entreprise] ou encore à l’éloignement des centres de formation » (p. 164). Par contre, si les formations sont considérées comme plus ou moins nécessaires, une répercussion négative s’ensuit sur l’offre et sur la participation des personnes salariées aux activités de formation.

L’existence d’un manque de connaissance chez les gestionnaires quant à leur impact sur le développement de compétences des travailleuses et des travailleurs est un phénomène que l’on perçoit dans ce secteur d’activité. En effet, selon une étude, réalisée auprès de 222 personnes salariées et de 38 supérieurs du commerce de détail, l’hypothèse des chercheurs a été confirmée, qu’il existerait une perception favorable du développement de compétences chez les personnes en fonction de la perception de soutien que leur offre leur supérieur (Quenneville, Simard et Bentein, 2008). La qualité de la relation avec le supérieur serait un facteur d’engagement envers l’organisation pour les travailleuses et les travailleurs de ce secteur d’activités (Bourhis et Chênevert, 2010). Pralong (2008) a aussi fait ressortir un lien entre les évaluations de rendement effectuées par les gestionnaires et la motivation des personnes salariées à développer leurs compétences. L’influence du supérieur est non négligeable, lorsqu’il est question de développement de compétences chez les travailleuses et les travailleurs. La situation

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de la formation continue dans le secteur du commerce de détail du point de vue des employées et des employés est aussi à considérer.

Selon Bourhis et Chênevert (2010), après avoir fait passer un questionnaire auprès de 200 personnes salariées du commerce de détail, ils en déduisent que plusieurs pratiques en gestion des ressources humaines, dont les possibilités offertes pour le développement de compétences et les conditions de travail, influencent considérablement le niveau d’engagement des personnes employées, soit sur leur motivation à continuer de travailler au sein de l’organisation qui les ont recrutés. Ainsi, selon les auteurs, la formation continue serait une priorité à considérer afin de fidéliser les travailleuses et les travailleurs de cette industrie, tout en atténuant le taux de roulement. De plus, les PME sont concernées davantage par l’investissement en formation continue, car les salariées et les salariés atteignent rapidement le plafond salarial, contrairement au personnel travaillant au sein d’une grande entreprise selon Solar, Baril, Lauzon et Roussel (2014).

Par ailleurs, d’après Goyer (2010), les discussions de carrière qui peuvent être amorcées par le supérieur lors des évaluations de rendement avec les personnes salariées devraient être déployées davantage au sein des PME, dans une perspective de développement de compétences. Selon cette recension des écrits sur les modalités de développement de carrière dans le contexte des PME au Québec, diverses ressources en gestion de personnel devraient être fournies à la direction ou développées par celle-ci, afin d’appuyer ce type de discussion avec les travailleuses et les travailleurs.

Au terme de ce qui précède, les études montrent que plusieurs problèmes semblent prendre forme au sein de cette industrie en ce qui concerne la formation continue. Leurs résultats permettent notamment d’envisager un enjeu au niveau de la perception des dirigeants et de leurs visions du développement de compétences des travailleuses et des travailleurs. En effet, une gestion à court terme du développement de compétences axé principalement sur l’exécution des tâches quotidiennes et un investissement

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insuffisamment valorisé dans la formation des salariées et des salariés auraient un impact sur la formation continue. De plus, choisir de former davantage les employées et les employés pourrait être une stratégie bénéfique pour contrer certaines difficultés auxquelles fait face le secteur du commerce de détail. Par exemple, un taux de roulement élevé pourrait diminuer en faisant participer les salariées et salariés à des activités de formation et en les rencontrant pour discuter de leur carrière. Ainsi, leur sentiment d’appartenance envers l’organisation pourrait augmenter et cela pourrait éventuellement avoir une influence positive sur la rétention du personnel à long terme. Par ailleurs, force est de constater que peu d’études, s’intéressant spécifiquement à la formation continue au sein du commerce de détail, ont été réalisées. Cela sous-tend la pertinence scientifique de réaliser des travaux traitant de la formation continue pour les travailleurs et les travailleuses de ce secteur.

4. OBJECTIF GÉNÉRAL DE RECHERCHE

Cet essai s’inscrit dans une perspective visant à comprendre les enjeux du développement de compétences des personnes travaillant actuellement dans le secteur du commerce de détail. L’objectif général de la recherche est d’identifier quels sont les obstacles et les leviers de la mise en place de formation soutenant le développement de compétences dans le secteur du commerce de détail.

Or, le chapitre suivant permettra de mieux circonscrire la notion de développement de compétences, qui est au cœur de ce projet. Ensuite, la typologie des obstacles de formation en entreprise sera définie.

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DEUXIÈME CHAPITRE – CADRE CONCEPTUEL

Afin de répondre à l’objectif principal de recherche, certains concepts qui guideront les analyses dans le cadre de cet essai seront explicités. Le concept de compétence étant polysémique, plusieurs définitions seront exposées. Toutefois, l’utilisation de la définition de Michaud, Dionne et Beaulieu (2006) sera privilégiée et principalement élaborée au sein de ce chapitre. Puis la définition du développement de compétences proposée par Le Boterf (2013) est présentée. De plus, divers obstacles individuels et organisationnels peuvent survenir et empêcher le plan de formation ou de développement de compétences de se réaliser. Pour décrire les obstacles individuels, la typologie de Cross (1981) bonifiée par les travaux de Darkenwald et Merriam (1982) sera précisée. Ensuite, une synthèse des catégories d’obstacles à la participation à des activités de formation en organisation, provenant de Solar, Baril, Lauzon et Roussel (2014), sur lesquelles prennent appui les analyses de cet essai, sera établie. Pour terminer, les objectifs spécifiques de la recherche seront situés.

1. LA COMPÉTENCE ET LE DÉVELOPPEMENT DE COMPÉTENCES

1.1 La compétence

Le premier usage historique du terme compétence remonte à 1690, il serait alors considéré comme une « capacité due au savoir, à l’expérience » (Rey, 2012). Cette première définition se réfère à une conception de la mobilisation d’un savoir, qui peut s’être acquis et se réaliser à la fois dans le contexte scolaire et au sein de différents contextes (ex. : professionnels, familiaux et communautaires).

Le recours au concept de compétence a connu une expansion à partir des années 1980, où l’accroissement du chômage était fulgurant (Camus, 2003). Face à cette crise de l’emploi, plusieurs acteurs pointaient du doigt l’arrimage entre la formation et le marché du travail comme étant le problème principal. Pour ces acteurs, la formation traditionnelle ne correspondait plus aux besoins des organisations, donc

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l’évaluation des travailleuses et des travailleurs est devenue nécessaire (Ibid.). Les dirigeants sont de plus en plus invités à considérer, non seulement les acquis scolaires, mais aussi les « capacités comportementales […] désignées sous le terme compétences » (Charraud, 1994, dans Camus, 2003, p. 122). Le recours au concept de compétence s’étend donc dans les décennies qui suivent et la définition se complexifie avec le temps (Michaud, Dionne et Beaulieu, 2006). Dès lors, la notion de compétence est présente autant dans le milieu scolaire (Ministère de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (MEESR), 2013) que le milieu du marché du travail (Saba et Dolan, 2013). Les diplômes d’études professionnelles illustrent bien ce croisement entre le Ministère et les entreprises. En effet, les études menant à une certification dans un métier spécialisé, tels que boulanger ou pâtissier, permettent aux personnes de développer des compétences nécessaires pour l’exercice de leur future profession. Ces compétences sont reconnues au sein des entreprises, qui les embauchent grâce à l’obtention de leur diplôme.

En s’appuyant notamment sur les travaux de Le Boterf (2004) et de Tardif (2004), Michaud et al. (2006) considèrent le concept de compétence comme étant « un savoir-agir complexe fondé sur la mobilisation et sur l’utilisation efficace d’un ensemble de ressources par un individu dans un contexte donné » (p. 73-74). Cette définition s’inspire de celle fournie par le Programme de formation de l’école québécoise – Éducation préscolaire, enseignement primaire (MEQ, 2001), qui la considère comme étant « un savoir-agir fondé sur la mobilisation et l’utilisation efficaces d’un ensemble de ressources » (p. 4). Toutefois, la définition fournie par Michaud et al. (2006) spécifie que les ressources mobilisées ont été contextualisées au domaine de l’orientation professionnelle. Selon eux, le savoir-agir représente une capacité à utiliser, de manière efficace, une variété de ressources personnelles et environnementales pour l’accomplissement d’une tâche. La mobilisation, quant à elle, fait référence à la combinaison des ressources, telles que les intérêts, les valeurs, les connaissances et les qualités de la personne (Ibid.). Ainsi, selon Michaud et al. (2006), la mobilisation des ressources est une chose, mais il faut aussi savoir les mobiliser et agir le plus

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efficacement selon les situations. La figure 3 de Michaud et al. (2006) illustre bien le principe de la mobilisation à travers la dynamique entre les ressources personnelles, environnementales et le savoir-agir.

Source : Michaud, G., Dionne, P. et Beaulieu, G. (2006). Le bilan de

compétences : regards croisés entre la théorie et la pratique. Québec : Septembre

éditeur. (p. 75)

Figure 1 : La compétence, un processus dynamique

Tardif (2006), à partir du savoir-agir, présente certaines caractéristiques majeures de la compétence qui la rend complexe, soit ses aspects intégrateurs, combinatoires, développementaux, contextuels et évolutifs. Débutons avec le caractère intégrateur, qui situe la compétence au cœur d’un ensemble de savoirs (savoir, faire et savoir-être). Les savoirs deviennent des ressources que l’on peut mobiliser au sein de savoirs-agir complexes. Ainsi, l’aspect intégrateur renvoie à l’idée que chaque compétence mobilise une grande diversité de ressources que la personne intègre lorsqu’elle met en œuvre des savoirs-agir complexes. Ensuite, le caractère combinatoire signifie que la compétence « prend appui sur la mobilisation et la combinaison efficaces d’une variété

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de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations et met nécessairement plusieurs éléments en relation complémentaire et synergique » (Tardif, 2006, p. 28). Puis, la partie développementale met l’accent sur la progression de la compétence selon les ressources que la personne mobilise, le type d’apprentissage qu’elle réalise et les situations dans lesquelles elle se place ou est placée pour favoriser ce développement. Ainsi, une compétence peut se développer dépendamment si la personne a la possibilité de recourir à des ressources personnelles et environnementales pour le faire. Par la suite, le caractère contextuel fait référence à la mise en œuvre de la compétence dans des contextes particuliers en fonction d’une intention qui conduit à une action. Pour terminer, d’après Tardif (2006) le caractère évolutif représente, pour la compétence, l’aspect intégratif « de nouvelles ressources et de nouvelles situations sans que sa nature soit compromise » (p.26). Cela veut dire qu’une nouvelle situation nous amène à développer une compétence, où de nouvelles ressources sont mobilisées, pour enrichir celle-ci. Ainsi, nous intégrons des nouveaux éléments pour les déployer dans une plus grande variété de situations.

Pour Le Boterf (2013), être compétent c’est « d’être capable d’agir et de réussir avec compétence dans une situation de travail. […] Être compétent, c’est mettre en œuvre une pratique professionnelle pertinente, tout en mobilisant une combinaison appropriée de ressources (savoir, savoir-faire, comportement, mode de raisonnement…) » (p. 109). Il effectue une distinction entre ce concept et celui d’avoir des compétences, qui constituent selon cet auteur des ressources pour agir avec compétence, telles que des connaissances, des méthodes de raisonnement ou des aptitudes physiques.

Cependant, d’après Camus (2003), la définition du concept de compétence reste tout de même floue. Ce concept est considéré par cette auteure comme un construit idéologique, variable dans les pratiques qui y sont associées. Par exemple, pour les centres de bilan en Europe, le sens associé est plutôt psychologiquement déterminé, tandis qu’en pratique privée, elle appuierait le modèle managérial. Donc, il existe

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autant de modèles de compétence que d’usages que l’on en fait (Ibid.). Ipso facto, la conceptualisation du développement de la compétence varie aussi en fonction de ces milieux.

1.2 Le développement de compétences

Pour Le Boterf (2013), les ressources environnementales rendues disponibles pour la mobilisation ainsi que la combinaison des compétences sont différentes, à la fois, d’une organisation à une autre, que d’un poste à un autre au sein même d’une organisation. Ainsi, une personne peut développer ses compétences de travail d’équipe dans un poste de boulanger au sein d’une entreprise multinationale, puis continuer de développer celles-ci en occupant le poste d’assistant-gérant pour la même organisation ou en occupant un poste de boulanger dans une plus petite entreprise. Cet auteur établit un continuum au regard des tâches nécessitant la mobilisation de savoirs-agir complexes. Il situe d’un côté des tâches à exécuter et de l’autre, des tâches nécessitant la mobilisation et la combinaison de savoirs-agir complexes. Par exemple, lorsqu’une personne salariée se retrouve plus près d’une situation routinière et répétitive, la compétence se limite à l’exécution.

Par ailleurs, quand la travailleuse ou le travailleur se retrouve dans une situation complexe, avec une prise d’initiative, la compétence nécessiterait plusieurs savoirs-agir. Ainsi, les deux situations de travail, dans le même poste, peuvent coexister au sein de l’organisation et permettre le développement d’une compétence. De plus, selon cet auteur, toute compétence possède une dimension individuelle et sociale. En effet, la personne qui mobilise une compétence combine ses ressources (qualités, connaissances, expériences, etc.) et celles de son environnement (collègues, manuels d’employés, banques documentaires, etc.). Ainsi, le concept de compétence s’arrime avec les nouvelles exigences sur la façon de procéder ou d’agir dans l’environnement du travail de l’individu, comme l’apparition de nouvelles technologies. Ainsi, une caissière et un caissier qui reçoivent le paiement des produits des clients en 1980 et

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aujourd’hui effectuent toujours la même tâche. Toutefois, cette tâche a subi plusieurs modifications pour s'adapter aux changements technologiques du marché du travail. Donc, la tâche a nécessité aux caissières de développer leurs compétences selon les technologies mises en place par l’organisation.

Par ailleurs, Le Boterf (2013) a créé un modèle de conditions à réunir afin qu’une travailleuse ou un travailleur puisse agir avec compétence dans une situation professionnelle. Ce modèle inclut trois composantes principales. La première est le savoir-agir qui est l’arrimage et la mise en œuvre des ressources appropriées aux circonstances (connaissances, réseaux, etc.). Afin de développer le savoir-agir et développer ses compétences, il propose diverses façons, telles que le développement de ressources par la formation, l’entraînement à la tâche, l’accompagnement par coaching ou tutorat et l’organisation de parcours personnalisés. La seconde est le vouloir-agir qui traite de la motivation de l’individu d’intervenir dans une situation particulière. Selon cet auteur, l’organisation peut favoriser cette composante en accomplissant des actes de reconnaissance auprès de son personnel, des retours constructifs de la part des supérieurs ou en créant des passerelles permettant le développement de compétences au sein de différents postes ou d’une organisation. La dernière est le pouvoir-agir qui renvoie à la possibilité de la personne de prendre des responsabilités au sein du contexte organisationnel où elle évolue et ainsi développer ses compétences. Pour ce faire, l’organisation peut procéder à la délégation de responsabilités, mettre en place un réseau de ressources ou établir une gestion fondée sur la confiance avec les salariés.

D’autre part, pour Saba et Dolan (2013), qui proviennent du milieu de la gestion des ressources humaines, ils utilisent davantage le développement de compétences des personnes salariées en faisant référence aux activités d’apprentissage. Ces activités, permettent d’augmenter le rendement des employées et des employés en rehaussant leur capacité d’accomplir les tâches qui leur sont demandées par l’amélioration de leurs connaissances, de leurs habiletés et de leurs attitudes. Ainsi, selon ces auteurs, une

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formation est fournie aux personnes salariées lorsque leur rendement est déficitaire et lorsque cette situation peut être due à des lacunes observables sur le plan des connaissances, habiletés ou attitudes. Pour eux, la formation se rapporte à l’accroissement des habiletés nécessaires chez les personnes employées pour effectuer leurs tâches actuelles de façon adéquate. On évoque le développement de compétences comme étant aussi une manière de rehausser le sentiment d’appartenance des travailleuses et des travailleurs envers l’organisation. Certaines résultantes de cette pratique seraient un taux de roulement et un taux d’absentéisme moins élevés. Aussi, pour les personnes salariées, elles gagnent sur le plan des promotions et celui de la sécurité d’emploi. Plusieurs activités en ressources humaines sont concernées par le développement de compétences, telles que l’analyse de postes, l’évaluation du rendement et la gestion des carrières (Ibid.). Ainsi, le positionnement des auteurs semble se situer dans une logique centrée sur le déficit, ou pour corriger une compétence qui semble lacunaire, plutôt que sur le développement de l’individu.

Dans un autre ordre d’idées, pour Le Boterf (2013), la logique compétence pour ce qui est des entreprises représente la convergence de tous les dispositifs des ressources humaines vers cette conception, où les travailleuses et les travailleurs ne sont plus considérés seulement comme des ressources, mais comme des sources de création de valeur. À la différence de Saba et Dolan (2013), la logique derrière ces propos est axée sur le développement de chacun des employées et des employés, qui permet à l’organisation par la suite d’en bénéficier. Ainsi, lorsqu’il est question de la mobilité interne, au sein de l’organisation, la compétence ne se traduit pas que par le savoir-faire, qui se résume simplement à réaliser les tâches, mais aussi par le savoir-agir (prises d’initiatives, compétence multidimensionnelle, etc.). Cela signifie que l’employé doit, premièrement, pouvoir accomplir différentes tâches dépendamment du type de poste et deuxièmement, développer son savoir-agir, qui fait partie intégrante du poste. Donc, lorsqu’il traite du plan de formation, celui-ci est considéré comme un outil important soutenant le développement de compétences des individus autant au niveau du savoir-faire que du savoir-agir. Il en va ainsi pour l’engagement de la

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Figure 1 : La compétence, un processus dynamique

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