• Aucun résultat trouvé

ARTheque - STEF - ENS Cachan | Options épistémologique exprimées par les enseignants-chercheurs et les enseignants du secondaire sur la démarche expérimentale

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "ARTheque - STEF - ENS Cachan | Options épistémologique exprimées par les enseignants-chercheurs et les enseignants du secondaire sur la démarche expérimentale"

Copied!
8
0
0

Texte intégral

(1)

OPTIONS ÉPISTÉMOLOGIQUES EXPRIMÉES PAR LES

ENSEIGNANTS-CHERCHEURS ET LES ENSEIGNANTS DU

SECONDAIRE SUR LA DÉMARCHE EXPÉRIMENTALE

Bernard DARLEY

Institut de Formation des Maîtres, Université J. Fourier, Grenoble

MOTSCLÉS: DÉMARCHE EXPÉRIMENTALE ÉPISTEMOLOGIE RÉALISME -POSITIVISME

RÉSUMÉ:La démarche expérimentale mise en œuvre par les enseignants de biologie est souvent comparéeàcelle décrite par Claude Bernard dans sonIntroduction à la médecine expérimentale,en conséquence de quoi ces derniers sont généralement classés parmi lespositivistes.Les résultats de l'enquête développés ici tendent à montrer qu'une assimilation trop stricte serait abusive et mérite d'être relativisée. Plutôtpositivistesdans leur réflexion sur leur discipline, ils seraient plutôtréalistes

dans leur manière d'appréhender le réel.

SUMMARY : The experimental approach used by teachers of biology is often compared to that described by Claude Bernard in hisIntroductionà la médecine expérimentale.Consequently, they are generally classed aspositivists.The results of the investigation developed here, tend to show that a too strict assimilation would he wrong. Being ratherpositivistin their way of thinking about biology, they would herealistin their approach of the real.

(2)

1. INTRODUCTION

Les résultats de l'enquête présentés ci-dessous font suite aux travaux engagés par André Giordan (1978) et Éliane Orlandi (1991) sur la démarche expérimentale mise en acte dans les classes d'enseignement secondaire. Cette mise en acte ne pouvant être dissociée du cadre épistémologique dans lequel elle a été pensée, c'est ce dernier que cette enquête vise essentiellementàpréciser. En effet, la méthodologie associéeàla démarche expérimentale ne prend sens qu'au travers du cadre épistémologique dans lequel elle est effectuée. Dire que la science se construità partir des faits n'aura pas le même sens pour un réaliste! et pour un idéaliste2alors que la définition, telle qu'elle est posée, peut être jugée satisfaisante par les deux parties. Mais, si la mise en application d'une démarche expérimentale centrée sur l'observation sansa priorithéorique sera totalement justifiée aux yeux d'un idéaliste positiviste, elle paraîtra, par contre, incongrueà un réaliste. De même, la discussion autour de la pertinenceà enseigner telle ou telle forme de démarche expérimentale (celle mise en acte dans les laboratoires ou celle décritea posteriori)doit s'inscrire dans un double cadre d'analyse: celui des options épistémologiques et celui des modèles d'enseignement implicites (ou explicites) des enseignants.

2. MÉTHODOLOGIE

L'attribution,à un individu défini, d'un choix épistémologique donné aurait nécessité une série d'entretiens approfondis et ce que l'on aurait gagné en précision aurait été perdu en représentativité. L'utilisation d'un questionnaire permet de travailler sur un échantillon plus grand et de définir les principales orientations des populations testées.

Ce questionnaire était constitué de trois parties:

- un ensemble de quatre questions ouvertes oùilétait demandé de donner sa propre défmition de la démarche expérimentale, du fait scientifique, de ce qu'est une théorie et de la manière dont se construit la connaissance en biologie;

- unQ.sort3composé de 16 affirmations sur lesquelles les enseignants avaient à se prononcer selon une échelle allant de -2 (désaccord total)à+2 (accord total). Sept versions de ceQ.sort ont été testées avant qu'il ne soit diffusé. Les items ont été adaptés de citations tirées d'ouvrages d'épistémologie ou d'entretiens avec des collègues enseignants-chercheurs ou enseignants du secondaire ;

- une grille permettant d'exprimer une classification dans le choix des items.

1 le réaliste admet quela connaissance saisit des «choses» ayant une existence indépendante de la pensée. Le réalisme croit en la pennanence d'une réalité «en soi» indépendammentde toute observation (Jarrosson et Largeaut)

2Postulat idéaliste:iln'y adeconnaissance que d'idées. Le monde ou l'univers sont définis commela représentation d'une conscience ou d'un sujet pensant. Il n'y a pas de réalité en soi autre que celle perçueparl'esprit (Jarrosson et Largeaut).Les positivistes sont associé aux idéalistes (pour une analyse du positivisme voir Kolakowski et Kremer-Marietti)

(3)

Quatre indicateurs ont été utilisés:

- les sommes algébriques des réponses pour chaque item ramenées en % du score maximum possible (ou minimum pour les scores négatifs) compte tenu de l'effectif de l'échantillon (ex. : pour un échantillon de 68 personnes le score maximum possible est de +2 x 68

=

+

136) ;

- les fréquences des réponses positives et négatives;

- la comparaison des moyennes des réponses par le calcul des écarts-réduits; - les choix exprimésàl'aide d'une grille particulière.

L'association de ces deux premiers indicateurs donne une image assez précise de la conviction ou des hésitations d'une population face à un item. Un score très moyen associé à une fréquence des réponses positives élevée témoignera d'un accord réservéàl'item posé. En revanche, un score voisin de 0 avec des fréquences de réponses positives et négatives très déséquilibrées témoignera de l'existence d'un noyau de convaincus ayant donné des réponses maximales face à une majorité à tendance dubitative.

Les écarts-réduits permettent de mettre en évidence les items où les différences de score sont significatives. La taille des deux échantillons testés est de 68 pour les enseignants-chercheurs et de 64 pour les enseignants du secondaire.

3. ANALYSE DES RÉSULTATS

Les enseignants du secondaire présentent des résultats significativement différents des enseignants-chercheurs pour les items 3, 5, 8, 10 et 15; la différence pour l'item 14 est très proche de la significativité (écart-réduit égal à 1,94, le seuil de significativité étant égal à 1,96).

En première analyse, l'ensemble des réponses apportées par les enseignants-chercheurs et les enseignants du secondaire a une apparente homogénéité. Les items 1 et 5 viennent en tête des choix suivis du 10 et du 6 et font tous, par ailleurs, des scores supérieurs ou très voisins de 70% en fréquence de réponses positives, suivis, tant pour les choix que pour les scores, de l'item 16.

Si la science se construit àpartir des faits (item 1), il est cohérent que, dans ce cadre épistémologique, l'observation soit première (item 5) et qu'un bon chercheur soit d'abord un bon observateur (item 10). La théorie, point d'orgue de la démarche, est une synthèsea posterioride l'ensemble des faits observés et analysés (item 6). Ces cinq items peuvent être interprétés comme représentatifs d'un point de vue positiviste affirmé où les lois naturelles sont établies, comme le préciseA. Comte dans son Discours sur l'esprit positif, dans la constante subordination de l'imaginationàl'observation. Principe qui fait de la construction de la connaisance un processusa posterioriet qui est rappelé dans le rejet des items 9 et 12.

Bien que débattue, la neutralité du chercheur face à son sujet d'étude (item 3) l'emporte malgré tout dans l'opinion des enseignants du secondaire (56,6% contre 30%, encore qu'une formulation conditionnelle du type "le chercheur!kmiI rester neutre faceàson sujet d'étude" aurait, vraisemblablement emporté d'avantage de suffrages).

(4)

RÉSULTATS

%curn :somme algébrique des résultats exprimés en% par rapport au maximum possible % + : fréquence des réponses positives, +1 et +2 confondus

% -: fréquence des réponses négatives, -1 et -2 confondus Enseignants secondaire1Enseignants-chercheurs

%cum %+

%-1 - la science expérimentale se construità partir des faits 65,6169,1 82,9/89,8 12,5/6 2 - c'est une idée a priori qui està l'origine d'une théorie -12,5/1 ,5 39,1142,6 50/39,7 3 - un bon chercheur est toujours neutre face à son sujet 19,2/-23 56,6/26,5 0,2157,4 d'étude

4 - le processus de la découverte est linéaire ( la

vérification expérimentale d'une hypothèse génère la -0,8/5,9 48,4/55,9 2,2141,1 suivante ete.)

5 - dans la démarche expérimentale, la 10phase à

mettre en œuvre est celle de l'observation qui permet de

découvrir les faits, de générer des hypothèses et d'élaborer 65,6/39,7 82,8169,1 12,5/22,1 une théorie

6 - une théorie est une synthèse faite à partir de l'analyse 66,4/56,6 89,1179,4 3,1/13,3 d'une accumulation de faits

7 - les découvertes scientifiques sont souvent dues à un fait 32,8/18,4 61,1/55,9 3,4/26,5 essentiel apparu par hasard

8 - mettre en place une démarche expérimentale c'est partir

d'une théorie et bâtir une hypothèse que l'on vérifiera -12,5/48,5 46,9/73,6 8,4/16,2 expérimentalement

9 - le chercheur n'utilise pas les faits pour bâtir sa théorie -7,9/-9,6 32,1/36,7 5,6145,6 mais pour la vérifier

10 - un bon chercheur est quelqu'un qui observe d'abord 70,3/42,6 84,4/72 Il - un fait n'est porteur d'informations que lorsqu'il Il,5/-2,2 41,5/42,6 peut être replacé dans un cadre théorique

12 - ce sont lesa prioridu chercheur plus que les faits qui -14,4/-18 34130,9 1,5/51,5 orientent la démarche expérimentale

13 - pour qu'une théorie soit scientifique, elle doit Il,5/22,1 41,5/50 être réfutable

14 - une découverte est toujours liée au climat 23,1144,9 58,3/75 scientifique de son époque

15 - une découverte scientifique c'est la confirmation 18,3/-8,1 54,7/39,7 8,3,/47,1 momentanée d'une théorie

(5)

Celte opinion est, par contre, franchement rejetée par les enseignants-chercheurs (à 57,4% contre 26,5%). Là se dessine une première faille entre enseignants du secondaire et enseignants-chercheurs avec une différence des moyennes des réponses significative. Les premiers conservent une position positiviste affirmée (la connaissance doit suivre l'observation et non la précéder, le chercheur doit donc avoir une position neutre face à l'objet), alors que les seconds adoptent une position plus réaliste (en conformité avec leur réponse à l'item 2 où les accords l'emportent), admettant que la connaissance (postulée) puisse anticiper sur l'objet.

L'accord aux items 5 et 10, s'il reste très fort, est moins massif chez les enseignants-chercheurs que chez les enseignants du secondaire (69% contre 83% et 72% contre 84%) avec, là encore, des différences significatives. Au-delà des chiffres très élevés dans les deux cas, c'est la répartition des réponses qui est intéressante et qui justifie la différence significative enregistrée. Les proportions de réponses très affirmatives (+2) sont en effet beaucoup plus faible chez les enseignants-chercheurs que chez les enseignants du secondaire (44,1 % contre 66% et 34% contre 63%).

Les réponses aux questions ouvertes confirment ces écarts: 67,8% des enseignants du secondaire font explicitement partir la démarche expérimentale d'une observation contre seulement 9,5% des enseignants-chercheurs. Par contre, ces derniers sont 62% à la définir d'abord comme une démarche de résolution de problème (contre 32,2% des enseignants du secondaire), accordant une grande importance aux termes "problèmes", "hypothèses", "questions", sans préciser davantage leur genèse. Les références nombreuses aux travaux antérieurs laissent penser que cette genèse puisse ne pas procéder d'une simple observation.

Une différence intéressante apparaît entre les réponses à l'item 8, très fortement approuvé par les enseignants-chercheurs (73,6%) alors qu'il est très partagé chez les enseignants du secondaire (48,4% de rejet contre 47% d'accord, avec une somme algébrique négative). Là encore, l'analyse de la répartition des réponses est éclairante. Si les enseignants-chercheurs sont très catégoriques dans leur accord (47% de +2), les enseignants du secondaire sont plus réservés (14% de +2) alors qu'ils sont beaucoup plus catégoriques dans le rejet (37,5% de -2). Pour les enseignants du secondaire,la théorie peut difficilement se concevoir à l'origine d'une démarche expérimentale puisqu'elle est la synthèse de l'analyse d'un ensemble d'observations. Pour les enseignants-chercheurs par contre,il ne semble pas y avoir incompatibilité entre les deux propositions. On peut en effet penser que peu de chercheurs ont démarré leur recherche sans référence aucuneà un travail préalable, sans s'inscrire dans un cadre théorique donné, qu'il soit librement choisi ou imposé par les circonstances. Référence immédiate que ne peut pas faire l'enseignant du secondaire qui aura probablement tendance à

considérer, dans l'absolu, la démarche expérimentale comme apparaissantde novoet se concluant par l'émission de la théorie.

Les réponses à l'item Il renvoient au cadre de lecture d'une observation. Les enseignants du secondaire pensent qu'il ne doit pas être vide, le fait n'ayant de sens que dans un contexte scientifique donné, adoptant ainsi une position plutôt positiviste, alors que les

(6)

enseignants-chercheurs sont très partagés (les "anti" sont plus catégoriques, les "pour" légèrement plus nombreux). Un fait est-il intrinsèquement porteur d'infonnations, ce qui lui confèrerait une existence propre détachée de tout contexte d'analyse, ou bien a-t-il besoin de ce contexte pour exister et prendre sens? Il semble qu'ici les deux thèses, réaliste et idéaliste, s'affrontent en un point où la nuance entre les deux est particulièrement difficileàfaire. Si, pour les réalistes, un fait est, en soi, porteur de sens, ce dernier n'en sera que plus perceptible si l'esprit est préparéàle recevoir. Pour les idéalistes, le sens même du fait est défini par les conditions dans lesquelles il aura été observé puisqu'un objet n'a d'existence que relativement à son observateur.

La réponse très positiveàl'item 16 relance l'interrogation. L'idée d'une vérité scientifique inscrite dans les faits ne peut se comprendre qu'en accordant aux faits une réalité en soi porteuse d'un message que le chercheur devra découvrir. L'objet étant porteur de connaissance, il a donc bien une existence en soi. Ce qui nous ramène à une thèse réaliste de la science où la connaissance est fondée par l'objetàl'inverse de l'idéalisme positiviste où c'est la connaissance qui fonde l'objet.

Cette option se trouve confirmée, chez les enseignants du secondaire, par leurs réponses aux questions ouvertes. Les définitions qu'ils donnent des faits scientifiques sont, pour 49% d'entre elles, de type réaliste ("événement concret", "réalité", "quelque chose qui est", "observation irréfutable", "résultat irréfutable", "démontré", "prouvé", "avéré"). Les résultats sont plus modestes chez les enseignants-chercheurs où seulement 38% donnent une définition du fait scientifique susceptible de le classer dans l'option réaliste (mais ils ne sont que 13,8% dans l'option idéaliste). Définitions où l'on retrouve des locutions telles que "phénomène réel", "réalité irréfutable", "vérité scientifique", "constatation indéniable", etc.

Au crédit de l'option réaliste on peut ajouter les réponsesàl'item 7, nettement positives dans les deux populations. Le fait scientifique a bien une existence propre, indépendante du chercheur puisqu'un évènement aléatoire est susceptible de le révéleràce dernier. Pour un idéaliste, un tel item n'a pas de sens puisque tous les "faits" associés au protocole expérimental sont "essentiels" dans la mesure où l'absence de l'un quelconque d'entre eux, modifiant les conditions expérimentales, changerait sinon la nature du résultat, au moins sa perception par l'expérimentateur.

Les résultats de l'item 14, s'ils ne sont pas significativement différents (écart-réduit de 1,94 pour un seuil de 1,96), n'en restent pas moins intéressants. 30,3% des enseignants du secondaire et 16,2% d'enseignants-chercheurs rejettent l'idée qu'une découverte scientifique est toujours liée au climat! scientifique de son époque. Pour ces enseignants, la "découverte scientifique" est bien la mise en évidence d'un fait ou d'une loi, existant par eux mêmes en toute objectivité. Point de vue qui est confirmé, pour les enseignants-chercheurs principalement, par les réponsesàl'item 15, qui associe étroitement "découverte" et "théorie". La théorie est, par définition, incertaine alors que la découverte, une fois faite et confmnée, devient pérenne et non obligatoirement associéeàune théorie particulière.

4Leterme de "climat" a été préféréàcelui de "contexte" trop restrictif car généralement associé au seul contexte scientifique.Leterme de climat renvoyant également au contexte social et politique.

(7)

4, CONCLUSION

Si l'ensemble de ces résultats ne pennet pas de trancher sans contestes sur les options dans lesquelles ranger les enseignants-chercheurs comme les enseignants du secondaire, on peut toutefois penser que leur adhésion totaleà l'option positiviste est loin d'être évidente. Plus que la démarche elle-même qui reste, dans sa fonne et quelle que soit l'option choisie, globalement la même (les réalistes comme les idéalistes utilisent l'observation et l'énoncé d'hypothèses comme fondements de leur démarche), c'est la perception du monde qui nous entoure et notre capacitéàle connaître qui différencient réalistes et idéalistes. Si les enseignants du secondaire apparaissent plus particulièrement imprégnés de positivisme (schéma linéaire de la démarche expérimentale, centration de cene dernière sur l'observation, construction des hypothèses comme des théories par synthèsea posteriori), il n'en demeure pas moins que leur relation au réel, qui apparaît dans leurs réponses aux questions ouvertes, tient plus du réalisme que de l'idéalisme. De même que pour les enseignants-chercheurs les faits existent par eux-mêmes et non pas, comme le définit Bruno Latour (1988), «en tant que différence entre deux inscriptions». La position épistémologique de ces deux populations pourrait donc se définir comme constituée d'une part de positivisme caractérisant leur vision de la science et d'une part de réalisme pragmatique dans sa mise en acte.

Chez les enseignants du secondaire, ce positivisme pourrait trouver son origine dans l'approche qu'ils ont eu de la démarche expérimentale au travers des travaux pratiques qu'ils ont suivis au cours de leur cursus universitaire (Darley et Clément, 1991), alors que chez les enseignants-chercheurs Bruno Latour (1989) a bien montré combien les règles de mise en texte des articles scientifiques étaient imprégnées de celles établies par Claude Bernard. Mais l'idéalisme positiviste apparaît davantage comme une réflexiona posteriori sur la science et la façon dont elle s'est construite, que comme une option pragmatiquement heuristique dans la science en action. Aux fonnulations réalistes des chercheurs dont il a étudié le comportement pendant deux ans, B. Latour oppose sa vision positiviste de la science sans pour autant convaincre5. Pour Émile Meyerson(De l'explication des sciences, 1927) le positivisme vaàcontre-fil de la pratique des chercheurs, ces derniers s'intéressant, dans leur pratique de recherche, autant au "pourquoi" des lois qu'au "comment".

La typologie en cours en philosophie des sciences ne semble donc pas adéquate pour définir les enseignants de biologie. Vouloir les ranger avec les positivistes et en faire une base d'analyse quant aux conséquences possibles de ce choix (plus implicite qu'explicite) sur leur modèle d'enseignement pourrait, en effet, entraîner quelques contradictions. Si les enseignants de biologie sont positivistes comment leur enseignement peut-il se fonder sur un mode de raisonnement où le fait est intrinsèquement porteur de sens? Où la généralisationàl'ensemble d'une population d'une

5"Employer de telles expressions (la substance a été découverte au moyen de.. .) reviendraitàvéhiculer laftJllSse impression que certains objets sont présents a priori et qu'ils ne font qu'attendre que des savants veuillent bien en révéler l'existence. Nous ne prêtons pas du tout aux scientifiques l'intention d'utiliser des stratégies comme le dévoilement de vérités données au départ, et jusque là dissimulées". Il ne semble pas concevable, pour B. Latour qu'un scientifique puisseêtreréaliste. Il interprète donc ce réalisme, apparent au travers des locutions utilisées, comme un artéfact"d'une certaine forme de discours utilisé dans les descriptions des processus scientifiques" et non pas comme un choix volontaire(H.Latour, 1988)

(8)

propriété établieàpartir d'un seul cas particulier, est la règle établie? Leur mode de raisonnement n'est pas plus inductifsensus strictoque leur épistémologie n'est strictement positiviste. Une partie des contradictions épistémologiques mises en évidence par S. Johsua (1990) dans la pratique des enseignants de physique trouve une explication dans la coexistence d'une part de réalisme et de positivisme chez ces enseignants.

Les résultats analysés ici ne sont qu'une première approche. Un tel questionnaire est forcément imparfait, les formulations des items n'ayant pas toujours le caractère univoque recherché. Les résultats sont néanmoins intéressants au sens où les clivages entre enseignants du secondaire et enseignants-chercheurs sont moins nets que les entretiens préliminaires ne le laissaient prévoir. Il semble que l'on retrouve, au travers de la coexistence des options réalistes et positivistes tant chez les uns que chez les autres, les difficultés à faire coexister la science en acte (que ce soit dans la recherche ou dans la mise en évidence de "faits scientifiques" au cours d'une séquence d'enseignement) et la science énoncée sous forme de publications scientifiques ou de cours plus ou moins magistraux.

BIBLIOGRAPHIE

DARLEY (B.), CLÉMENT (P.), Éléments d'analyse sur l'une des origines possibles de l'approche inductiviste de la démarche expérimentale chez les enseignants de collège et lycée,Actes du congrès del'Association EuropéennedeDidactique de la Biologie,Rome 1991.

GIORDAN(A.),Une pédagogie pour les sciences expérimentales,Paris: Le Centurion, 1978. JARROS SON(R),Invitationàla philosophie des sciences,Paris: Seuil, col. "Points Sciences", 1992.

KREMER-MARIETTI(A.),Positivisme,Encyclopœdia Universalis, 1984.

JOHSUA (M.-A.), JOHSUA (S.), 1987, Le fonctionnement didactique de l'expérimental dans l'enseignement scientifique,R.D.M.,8, 3, pp 231-266,1987.

JOHSUA (M.-A.), JOHSUA (S.), 1987, Le fonctionnement didactique de l'expérimental dans l'enseignement scientifique,RD.M.,9,1, pp 5-27,1987.

KOLAKOWSKI(L.),La philosophie positiviste,Paris: Denoël, 1976. LARGEAUT(J.),Idéalisme,Encyclopœdia Universalis, 1984. LARGEAUT(J.),Réalisme,Encyclopœdia Universalis, 1984. LATOUR (B.),La science en action,Paris:LaDécouverte, 1989.

LATOUR (B.), WOOLGAR (S.),La vie de laboratoire,Paris:LaDécouverte, 1988.

ORLANDI (É.), Conceptions des enseignants sur la démarche expérimentale, Aster, 13, I.N.R.P., 1991.

VERIN (A.), PETERFALVI (B.), Un instrument d'analyse des modèles implicites de l'enseignement scientifique chez les enseignants,Aster,1, I.N.R.P., 1985.

Références

Documents relatifs

lucida ring-barked smaller trees (5 over 10), as well as the relative higher percentage of re-growth area recorded for these trees (Fig. 7A) were due or linked to the

Voici une liste de différents systèmes de production d'énergie électrique : cellules photovoltaïques, centrale hydraulique, centrale nucléaire, centrale à biomasse,

Objectif : Cette étude réalisée à l’Ouest du Niger dans les Communes de Simiri et de Tamou a pour objectif d’identifier des bio-indicateurs des sols fertiles et des sols

La DGAFP (bureau du statut général et du dialogue social – SE1 et bureau des politiques sociales, de la santé et de la sécurité au travail – PS2) reste à votre disposition

• Elargir les domaines de spécialisations : les infirmières en pratique avancée ont besoin de recevoir une formation plus générale, parce que si elles sont trop spécialisées,

Motif du crime L’argent : Arabella Tanios pensait hériter de la fortune de sa tante à son décès. Elle était tellement insatisfaite de vivre avec son mari, qu'elle a voulu

Dans ce fait, la mise en place d’une SDL droite est réser- vée aux patients opérés d’une pneumonectomie gauche, en cas de malformation anatomique de la bronche souche gauche et

Dans le premier chapitre de ce travail, je construis pour les corps algébriques non-galoisiens un appareil analogue à celui que fournit le groupe de Galois pour les corps galoisiens,