FACULTÉ
DEMÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNÉE 1901-1902 57
HYSTÉRIE
ET
ooOOOo®
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE
Présentée et soutenuepubliquement
le 29 Janvier 1902
PAR
Jean
DUPIN-DULAU
Né à Sabres (Landes), le 11 juin 1879
Élève du Service de Santé de la Marine
ANCIEN INTERNE PROVISOIRE LAURÉAT DES HOPITAUX (Médaille d'argent, 1901)
Examinateursde laThèse
MM.'DEMONS professeur PIÉCHAUD professeur—
VILLAR agrégé } Juges.
DENUCÉ agrégé....
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront fai
diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE DU MIDI — PAUL
CASSIGNOL
91 — RUE PORTE—DIJKAUX — 91
1902
Facilité de Médecine et_deJPharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS,doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
l'ROF˧§EI]RS MM. MIGÉ
DUPUY
)
( Professeurs honoraires.MOUSSOUS
\
Cliniqueinterne Clinique externe Pathologie et théra¬
peutique générales.
Thérapeutique
Médecine opératoire. Clinique d'accouche¬
ments
Anatomie pathologi¬
que Anatomie
Anatomie générale et histologie
Physiologie Hygiène Médecine légale
MM.
PICOT.
PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
VERGELY.
ARNOZAN.
MASSE.
LEFOUR.
COYNE.
CANNIEU V1AULT.
JOLYET.
LAYET.
MORACHE.
AGIlIdGÉ* IdA SECTION DE MÉDECINE (Pat/iolog
MM. SABRAZÈS.
LE DANTEC.
HOBBS.
Physique médicale...
Chimie
Histoire naturelle ...
Pharmacie
Matière médicale....
Médecine expérimen¬
tale
Clinique ophtalmolo¬
gique
Clinique des maladies chirurgicalesdes en¬
fants
Clinique gynécologique Clinique médicaledes maladiesdesenfants Chimiebiologique...
Physique pharmaceu¬
tique
IdXIdUClCld :
ie interneetMédecine MM. MONGOUR.
CABANNES.
MM.
BERGONIÉ.
BLAREZ.
GUILLAUD.
FIGUIER.
DE NABIAS
FERRÉ.
BADAL.
P1ECHAUD.
BOURSIER.
A. MOUSSOUS DENIGÈS.
SIGALAS.
légale.)
Accouchements.jMM-
anDERODIAS.SECTIONDE CHIRURGIE ET'ACCOUCHEMENTS
(MM. YILLAR.
Pathologie8
externe) CHAYANNAZ.
)
BRAQUEHAYE( BÉGOUIN.
SECTION DESSCIENCESANATOMIQUES ETPHYSIOUOGIQUES
Anatomie
JMM. GENTES.
| Physiologie MM. PACHON.nutiiuimc ) /-i A ~\T A T TTC1CAVALIE. Histoire naturelle. BEILUE.
SECTION DES SCIENCESPHYSIQUES
Chimie MM. BENECH. | Pharmacie M. DUPOUY.
€0t:ai* c» il i* a,Éil ao a t a a ai ad * :
Clinique desmaladies cutanées et syphilitiques MM. DUBREUILH.
Clinique des maladiesdes voies urinaires •.
Maladies du larynx, des oreilles etdunez Maladies mentales
Pathologie interne
Pathologie externe .
Accouchements Physiologie Embryologie Ophtalmologie
Hydrologie etMinéralogie Pathologie exotique
LeSecrétairede la Faculté:
POUSSON.
MOURE.
REGIS.
RONDOT.
DENUCpj.
FIEUX.
PACHON.
PRINCETEAU LAGRANGE- CAR LES.
LE DANTEC.
LEM AIRE.
^
Par délibération
du 5 août1879, la Faculté aarrêté que les opinions émisesdans lesThèsesqui luisontprésentées doivent être considérées comme propres à leurs auteurs, qu'elle n'entendleurdonner niapprobation niimprobation
A MONSIEUR LE DOCTEUR BOURRU
DIRECTEUR DU SERVICE DE SANTÉ DE LA MARINE
DIRECTEUR DE L'ÉCOLE PRINCIPALE DU SERVICE DE SANTÉ DE LA MARINE OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE
DOCTEUR DEMONS
PROFESSEUR DE CLINIQUE CHIRURGICALE A LA FACULTE DE MÉDECINE
DE BORDEAUX
MEMBRE CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE
OFFICIER DE LALÉGION D'HONNEUR
OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
AVANT-PROPOS
Avant d'entrer dans l'avenir, l'inconnu mystérieux et redoutable, nous voulons remercier ceux
qui
nous yont
préparé.
A tous nos maîtres de la Marine et de la Faculté, merci ! Quelques-uns, que nous avons pu
voir de plus près, ont
été pour nous d'une
bienveillance particulière
:M. le Dr Baudrimont,chez qui nous avons
accompli
une première année d'externat, nous a faitapprécier
sonsavoir
et son affabilité. Nous garderons
souvenir de
sesbonnes
leçons.Que MM. Auché, Fieux, Mesnard,
Chambrelent et Verger
qui furent nos chefs deservice àl'hôpital dePellegrin, soient
assurés de notre reconnaissance pour
leurs conseils et leur
enseignement.
Que M. le Dr Régis, qui nous a
donné le sujet de notre
thèse, et nousa, dans la suite, aidé si
puissamment de
sa science et de la clartéincomparable de
sonesprit, soit
per¬suadé qu'ilest de ceux qu'on
n'oubliera
pas.Nous remer¬
cions également à ce titre M. le
Prof, agrégé Bégouin.
M. le Prof, agrégé Denucénous
honora de
saprotection, et,
qu'il nous permette de le dire,
de
sonamitié. Nous lui en
exprimons notre vive gratitude.Nous avons passé un an
d'externat dans le service de
M. le Prof. Démons, et nous avons
admiré
commeil possède
au plus haut point la science
chirurgicale, comme il sait
allier la rapidité et la
sûreté
dans uneopération, comme il
est grand par son sang-froid et
la précision de
son coupd'œil en face d'un danger. Sa bonté nous toucha en mainte circonstance.Il nous fait le grand honneur de présider notre thèse; nous le prions d'accepter notre sincère reconnais¬
sance.Nous associons à son nom le nom de M. le DrVerdelet, alors chef de clinique, qui fut toujours pour nous
d'une
bienveillance spéciale et d'une constante amabilité.
INTRODUCTION
Durant notre séjour en
qualité d'interne à l'hospice de
Pellegrin, nous avons eu labonne fortune d'observer
une maladequi présenta destroubles
assezsinguliers,
une asso¬ciation d'annexite, de
péritonite
etd'hystérie, étrange mé¬
lange de lésions organiques, de
phénomènes névropathi-
ques, et même de simulation voulue, au
moins
versla fin.
M. le Prof. Régis, qui vit cette
malade,
nous engageaà
prendre soigneusement son observation età la faire entrer
dans une thèse. Sur ses conseils, nous en avons tiré notre sujet. Ce travail traite donc de l'hystérie dans ses rapports
avec quelques lésions
d'ordre chirurgical ayant trait surtout
à l'appareil génital de la femme. Nousy
joindrons également
les lésions du péritoine, car il est rare
qu'une affection des
organesgénitaux, au moins internes, ne
s'accompagne
pas d'une réaction péritonéale, etl'on sait la prédilection de l'hystérie
pour lepéritoine.
Nous ne prétendons pas
régler la question, le sujet est
trop complexe et notre expérience tropinsuffisante. Après
les remarquables travaux de
Charcot,Pitres, Gilles de laTou-
rette, à qui nous empruntons
largement,
— onn'emprunte
qu'aux riches, — il serait téméraire d'énoncer
des conclu¬
sionsgénéralesaupoint de vue
de la névrose
pure.Nous
nous borneronsdonc à l'exposé des faits en yajoutant quelques
réflexions qu'ils nous ont suggérées, sans
prétention. Nous
nous attacherons surtout à démontrer la difficulté qu'il y a souvent à séparer ce qui appartient aux
lésions organiques
et cequi appartient
à-la névrose,
en un motà faire
undiag¬
nosticqui guidera le traitement.
Nous nous rendonsparfaitement compte de ce que cette
étude peut avoir de diffus, mais nous avons
fait de
notre mieux; et, s'il nous est permis d'alléguerune excuse, nousnous en prendronsà l'hystérie elle-même; il est
très difficile
d'être absolument précis dans quelque chose
d'aussi divers
quel'est
l'hystérie
dans sesmanifestations.Nous avons divisé notre travailen
deux parties
:1° Le
premier chapitre traite des lésions dues à l'hystérie
pure, des
simulations hystériques se rattachant principale¬
mentà l'appareil
génital de la femme et au péritoine. Nous
rechercherons à quoi
rapporter
cessimulations, comment
on peut les
différencier des lésions organiques et les traiter.
2o Ledeuxième chapitre
s'occupe de l'hystérie associée a
des lésions organiques,
portant toujours sur les mêmes
organes. Ces
associations hystérô-organiques revêtent des
aspects divers que nous passerons
en revue. Nous nous
occuperons
également du diagnostic et du traitement.
Puis viendront lesconclusions.
«
I
■
I
te'.,.•• i
v.; ,
mm'
CHAPITRE PREMIER
SIMULATIONS
HYSTÉRIQUES
L'hystérie est une affection
essentiellement simulatrice.
Beaucoup l'ont dit avant nous. Nous le répétons après beau¬
coup d'autres. Et cela n'empêchera probablement pas nom¬
bre de médecins ou de chirurgiens des plus habiles de se tromper, d'attribuerà tort à des causes organiques ce qui
n'est que névrose. La question est
délicate.
Mais laissons pour le moment
le
diagnosticde côté,
etvoyonsce qu'on entend exactement par
simulation hystéri¬
que.Une grave erreur serait de laconfondre avec la simula¬
tion de
l'hystérie; cette dernière peut exister. D'après
Joire (i), elle existait même beaucoup
autrefois, rendue facile
par la diversité dessymptômes et
le
peude connaissance de
la maladie. Elle avaitson point de
départ dans
cefait
quele
simulateur voulait éviter une charge, se soustraire à une obligation, un travail. De tels exemples n'étaient pas rares
au régiment. Il peut arriver même que
dans
cebut,
ou un but analogue, une véritable hystériquesimule de façon
vou¬lueun accident hystérique. A ce
point de
vue, ons'est peut-
être un peu trop
préoccupé dans
cesderniers temps de
«réhabiliter » les hystériques;
suivant la mêrnè voie
que Charcotetd'autres, Ballet soutient queles perversions ins¬
tinctives n'appartiennent pas
à l'hystérie. «Il
yaexagération
évidente »
(Régis).
M. leProf.
Démonsnouscitait le
casd'une
Ô) De la simulation hystérique [Bull. raéd.
du Nord, 1893, XXXII,
p. 113-130).
femme de son service qui
présentait tous les symptômes
d'uneobstruction intestinale, avec ballonnement
énorme du
ventre, arrêt des matières et
des
gaz, sueurs,abaissement
de températureet cyanose
intense;
ons'était décidé à l'opé¬
rer, avec son consentement,
lorsqu'on s'aperçut
quela
cyanose
était produite à-l'aide d'une boule de coton bleu
foncé quela
malade
sepassait
surle
corpsaprès l'avoir fait
macérer dans sabouche. On découvrit ainsi toute
la
super¬cherie. M. le Prof. Démons ajoutait que de
tels exemples
n'étaient pas très rares. La
malade qui fait l'objet de notre
Observation IX avait un truc pour faire
monter la colonne
mercurielle dans le thermomètre, et était
résolue elle aussi à
une opération,
si l'opération avait été jugée nécessaire.
Ce sont chosesqu'il faut
connaître; elles ajoutent
encoreà
la difficulté.
Ce qu'on
entend
parsimulation hystérique est totalement
dissemblable. Pour répéterune
phrase de Joire,
«l'hystérique
simule pour cette
seule raison qu'elle est hystérique
».Sans
doute, on peut trouver
à
saconduite, à
sonétat dans le cas
de lésion, un motif, mais qui
n'intervient
pasdirectement
dans la production
de la lésion;
cemotif
aexercé son
influence
précédemment
pourcréer chez l'hystérique un état
mental
particulier, seul
en cause aumoment présent. Quand
elle simule, la malade se trompe
elle-même, beaucoup plus
qu'elle ne trompe son
médecin.
« Il faut, dit Charcot
(Leçons du mardi à la Salpêtrière),
prendre
l'hystérie
pour cequ'elle est, c'est-à-dire pour une
maladie
psychique
parexcellence
».D'où vient cette psychi-
cité ? Question
ardue et
nonentièrement réglée. P. Janet (*)
en France, Mobius,
Strumpel, Breuer et Freud (2)
enAllema¬
gne insistent sur
les troubles psychologiques qui entraînent
les troubles physiques. «
La suggestibilité, qui est le signe
d'une maladie mentale, est avant tout celui de
l'hystérie
».Il
(!) Pierre Janet, Etatmental des hystériques; accidents mentaux,
1 vol.,
Paris 1894.
(s) Breuer etFreud,
Nèurolog. Centralblatt, 1893.
— 17 —
se produit chez les hystériques des «
idées
fixes », parfois méconnues, mais jouant un rôle capital, dont la genèse aurait lieu à la faveur d'« états subconscients»; le défaut de synthèse, qui caractérise l'hystérique, favorise la formationde ces idées fixes quise développent complètement et isolé¬
ment à l'abri de la conscience personnelle, et qui se mani¬
festent par les troubles les plus variés, d'apparence unique¬
mentphysique.
M. le Prof. Régis, sans préjuger en rien de la nature, de l'essence intime de
l'hystérie,
attire l'attention sur les trèsnombreuses analogies qui existent entreelle et les intoxica¬
tions : analogie d'origine, puisque l'hystérie est due le plus souvent, on le sait, à des causes toxiques héréditaires ou personnelles; analogie symptomatique, car tous les symp¬
tômes des intoxications, troubles de sensibilité, de motilité, troubles du sommeil, troubles délirants, accidents con- vulsifs,se retrouvent avec les mêmes caractères dans l'hys¬
térie.
Quoi qu'il en soit, et là-dessus tout le monde est d'accord, et les faits sont là, l'hystérique se conduit comme un intoxi¬
qué délirant, a des idées fixes et est essentiellement sujet à
l'auto-suggestion.
Il faut savoir cela pour s'attaquerà
l'ori¬gine du mal.
Il
importaitd'exposer
ces donnéesgénérales,parce qu'elles dominent l'étiologie des accidentshystériques
; ilétait
bonde faire .une incursion dans le domaine psychique pour
expliquerle domaine physique qui lui est ici
subordonné.
Pas n'estbesoin d'ailleurs d'aller toujours chez les hystéri¬
ques pour prouvercette influence du moral sur lephysique.
Combien ne voit-on pas de gens, d'étudiants en
médecine
— et pour notre part nous en avons vu,
quelques-uns
un peunévropathes,
mais d'autres pas suspectsdu
tout —qui,à propos de rien, s'imaginent avoir une maladie dont ils viennent de lire les symptômes? Les
malades imaginaires
étaient inventés avant Molière,et ne sont pasvéritablement
imaginaires
; ils croient être malades; la condition estsuffi-
D. 2
- 18 -
santé pour
l'être. Qu'on
suppose uninstant que la personne
soit hystérique, que
l'idée
germe enterrain prédisposé, prêt
à la recevoir, à l'accroître, nous seserons pas
loin d'avoir
une lésion constituée.
Voilà pour les
simulations hystériques
engénéral. Il
importait
d'autant plus de fournir cette démonstration dans
lecas particulier, que
les malades sont plus exposés à se
suggestionner pourdes
organesdont ils s'occupent le plus
volontiers et le plus
souvent. Or, à notre avis, il n'est guère
d'organes qui soient
plus aptes à donner à la femme des
préoccupations
que sonappareil génital. Quel humoriste
prétendait
quela femme était constituée par un appareil
génital et un
système
nerveuxrelié à l'autre par des con¬
nexions étroites? Cette boutade n'est pas
loin d'être vraie
pour
certaines hystériques. Ne faudrait-il pas en grande
partie
lui rapporter la vieille théorie
—légende presque
— quel'hystérie résidait dans l'appareil génital. C'était se
tromper de
système, s'imaginer
quel'appareil génital avait
la prépondérance, au
lieu qu'il
nevient qu'en seconde ligne.
Pour en revenir au sujet, la
préoccupation des femmes au
point de vuede leur appareil génital est hors de doute; les
premiers
écoulements menstruels, surtout s'ils s'accompa¬
gnent de
coliques, chez des jeunes tilles non averties, peu¬
vent créer une frayeur intense et
l'idée d'une maladie
grave;
elles s'imaginent volontiers
queleur dernière heure
est venue. D'ailleurs, en dehors de cette
frayeur, il existe, d'après Friedmann (»),
uneforme de trouble mental pério¬
dique qui
survient
auseuil de la puberté, dépendant de trou¬
bles mentruels et se terminantavec le retour à
la normale
de la fonction; chez des
individus prédisposés
commeles
hystériques,ce
trouble peut devenir permanent. Considérons
une femme mariée dont la
pensée
estaiguillée constam¬
ment vers une grossesse future;
elle fera
sanspeine des
pseudo-grossesses.
Baldy (in Philadelphia Policlinic, 1896)
(') Friedmann, Mïtnch med. Woch11°
1, 1894.
— 19 —
s'exprime sur ces divers troubles de
manière
assez pitto¬resque : « Souvent, ces affections ont originellement pour causel'époque du mariage, l'insuccès d'une grossesse, qui disposeà regarder de travers cet organe toujours en faute, l'ovaire ». Les exemples se multiplieraient; on voit laconsé¬
quence : rien d'étonnant à ce que les
accidents
hystériquesse localisent souvent sur l'appareil
génital
: « Lorsqu'un symptôme, dit Gowers, est définitivement conçu, la crainteou le désir fontson intronisation commode ». La conception d'abord ; car les hystériques, habituellement perspicaces,
connaissent parfaitement le symptôme qu'elles
simulent;
la crainte ou le désir le font naître. Conception du symp¬
tôme, crainte ou désir, trois mots qui résument
l'étiologie
des simulationshystériques.
Nous appelons donc simulations
hystériques
deslésions
sans substratum anatomique,dues à la psychicité particu¬
lière des hystériques. On pourrait simplement les définir des lésions
hystériques.
La base sur laquelle se développe l'acci¬dent est ici le système nerveux. C'est évidemment à lui qu'il faut rapporter les tumeurs fantômes, les fausses gros¬
sesses
hystériques.
Pour ce qui est des névralgies,et de toutce qui est décrit sous la dénomination «
hyperesthésies des hystériques
», il nous semble qu'elles dépendentprincipale¬
ment des centres deperception et du
système
nerveux cen¬tral. A moins d'admettre des modifications de tout le sys¬
tème
périphérique,
— ce qui est inadmissible — on ne con¬cevrait pas qu'une ovaralgie par exemplene
disparaisse
pas après l'ablation de l'ovaire et que le moignon restedoulou¬
reux; on ne concevrait pasfacilementdans ce cas
des locali¬
sations non expliquées; pourquoi
plutôt là qu'ailleurs. On
neconcevrait pas enfin qu'une névralgie se
réveille, aussi¬
tôt quel'attention du malade a été attirée de ce côté par une
intervention quelconque.
Puisque nous en sommesà des hypothèses,
n'est-il pas rationnel de penserqu'ils'agit de
mo¬difications
physiologiques
parfoispassagères, parfois d'une
ténacitédésespérante,
sous la dépendance des centreset
de l'état mental de l'individu, de tel système de nerfs
?
Il semble que ces
simulations hystériques, de
parleur
nature même, assortissent
exclusivement à la neuro-patho¬
logie. Il n'en est pas
moins vrai
que parleur forme, leur
marche, elles
ressemblent souvent à des lésions chirurgi¬
cales, et, comme
telles, ont
puêtre traitées chirurgicalement.
Quelquefois ce
fut à juste titre.
Loin de nous la prétention
d'affirmer
quesi l'on voulait
rapporter
toutes les simulations hystériques aux causes
invoquées, on en
pourrait très bien saisir la filiation. Chez
des enfants, des cas de
simulation sont très difficiles à
expliquer.
Peut-être
ya-t-il des choses qui nous échappent.
Maisnous n'avons pas entendu tout
expliquer.
Lésions simulées.—Toutes ou presque,
les observations
en sont nombreuses. Liaras et Bouyer
(Revue de largngo- logie, d'olologie et de rhinologie de Bordeaux, 13 et 20 avril
1901) ont
publié plusieurs
casd'algies hystériques de la
mastoïde. On connaît les pieds
bots hystériques qui manquè¬
rent souvent être opérés,
qui le furent parfois (*). Depuis
qu'on
connaît l'appendicite, pas mal de névropathes ont cru
avoir cette maladie; elle a fait
fortune dans
ceinonde-là.
Nous en citons deux exemples; ces cas
touchent notre sujet
d'assez près.
Robey (Med. and
surg.Journal, <4 mai 1899)
signale
chez
unhomme fatigué par des travaux intellec¬
tuelsqui
avait
eu uneattaque d'influenza et un abcès pérlty-
phlitique,
l'apparition d'attaques appendicitiformes pour les¬
quelles
onfit la laparotomie : l'abcès pérityphlitique était
absolument guéri,
l'appendice
enparfait état; il met ces atta¬
ques sur
le compte de l'hystérie. M. Brissaud (Presse médi¬
cale, 1897, n°
25) rapporte
uncas d'appendicite fantôme,
existant comme seul
symptôme
avecvomissements durant
depuis quatre
mois, mais conservation d'un bon état géné¬
ral. Unbeaujour,
l'appendicite disparaît et est remplacée par
une hémianesthésie.
(9 Sicard et A.Riche,
Hystérie traumatique. Double pied bot hystérique
[Presseméd.,1898, ii,
225).
— 21 —
Après
cesquelques citations rapides, nous voulons parler
plus
longuement des simulations hystériques portant sur l'appareil génital de la femme et le péritoine. D'abord, quels
sont les
symptômes des lésions pelviennes en général que
simule de préférence
l'hystérie? Car il
yen a qu'elle simule
avecune sorte de
prédilection
: cesont les symptômes d'or¬
dre sensitif, la douleur en
l'espèce. Une hystérique
seplaint
de douleurs vagues du
bassin,
uneautre de douleurs plus
localisées soit dans les fosses
iliaques, droite
ougauche,
soit au niveau de l'utérus. Ces
douleurs font
penserà quel¬
que
phlegmasie du bassin, et souvent la malade suggestion¬
née en est absolument
persuadée. On examine, et
on netrouve pas de
lésions apparentes,
onles rapporte à la névro-
pathie et non
à
tort,surtout si
onconnaît l'état de la malade:
« L'hystérie, disent
Labadie-Lagrave et Legueu, constitue la
cause la mieux reconnue des névralgies
ovariennes et pel¬
viennes. »
Souventelles en imposent pour une
lésion sérieuse et ne
sont pasécartées aussi
facilement.
L'ovaralgie est connue
depuis longtemps, elle fait partie du
groupe des
hyperalgésies viscérales hystériques dont parlent
longuementPitres, et
après lui Gilles de la Tourette.De même
l'hystéralgie. Gillesde la
Tourette
—à qui
nousempruntons
largement — lui consacreune assez
longue étude dans son
ouvrage, la décrit sous forme
de douleurs spontanées, s'irra-
diant dans les lombes et jusque dans
les membres infé¬
rieurs. L'ensemble
symptomatique
quel'on observe alors a,
dans cés derniers temps,été
décrit
parquelques chirurgiens
sous le nom de grandes
névralgies pelviennes et donné nais¬
sance à un nombre considérabled'opérations
des plus injus¬
tifiées.
Lediagnostic demande une
connaissance exacte des carac¬
tères de ces douleurs3 « elles
présentent fréquemment des
phénomènes paroxystiques
particuliers et font partie d'un
ensemble symptomatique
où l'on retrouve les éléments
constitutifs d'une attaque
d'hystérie
avec ou sansconvul-
sionS ». Briquet, dès 1859, parie longuement de
l'hystéralgie,
qu'on peut confondre avec des maladies organiques du petit bassin. Il insiste sur l'absencede fièvre dans l'hystérieetsur ce que «les douleurshystériques
sont toujours plus vio¬lentes, plus variables et ont moins de tenueque les douleurs qui dépendent d'une
phlegmasie
». Ces assertions sont con¬testables. N'y a-t-il pas une fièvre
hystérique?
Les caractères donnés par Briquet de la douleur sont difficiles à apprécier.La connaissance des antécédents de la malade, d'une hysté¬
rie existant auparavant, la coexistence d'autres phénomènes hystériques, en somme l'observation d'un état spécial où la douleur en question ne survientque comme un
symptôme,
la production dephénomèneshystériquespar la pression des
zones
hyperesthésiées
presque toujours hystérogènes, unis à un examen minutieux du bassin par les moyens en notre pouvoir, sont des signes de plus grande importance. Malgré tout, des erreurs ne sont pas évitées : parce quel'hystérie
existe, il ne faut pas se laisser aveugler par l'hystérie. Quel¬ques cas sont d'une difficulté extrême. Une lésion assez commune chez la femme, l'ovarite
scléro-kystique,
peut pas¬serinaperçue. Le principal signe, le seul quelquefois, c'estla
douleur. Ou bien l'ovaire est peu augmenté de volume, et cette augmentation de volume n'est pas appréciable, ou bien
chez une malade difficile à palper cet accroissement ne peut être senti. De là, une certaine circonspection pour uneopé¬
ration, inutile s'il s'agit d'ovaralgie simple, qui pourrait
être
bienfaisante s'il s'agit d'ovarite
scléro-kystique.
Un second groupe de lésions comprend celles où n'inter¬
vient pas seule la douleur, où la tuméfactionse montre,où il
existedu retentissement soit surles organes qui ont des rap¬
portsde contiguïté avec l'utérus ou lesannexes, soit surdes organesplacés à distance, commel'estomac etl'intestin. Ace groupe se rattachent les tumeurs fantômes; parfoiselles
dis¬
paraissent et reparaissent, ce qui permet d'en reconnaître
la
nature, maisparfois aussi elles restentavecune
désespérante
ténacité et peuvent passer pourdes tumeurs de l'utérus,
de
l'ovaire ; à ce groupe se
rattachent
encoreles fausses
gros¬sesses ou grossesses nerveuses
survenant chez des hystéri¬
ques
désireuses d'avoir des enfants
ouayant
peurd'en avoir:
absence des règles ou
écoulement insignifiant, ballonne¬
mentdu ventre, vomissements,
phénomènes caractéristiques
ducôtédes seins, perception des
mouvements du fœtus et
même des battements du cœur, rien n'y manque, sauf
le
produit de laconception. Combien de médecins s'y sont
laissé tromper, ont
diagnostiqué
une grossesse,entretenant
ainsi la femme dans son erreur et fortifiant la lésion, pour ainsi dire. Un cas historique 'de
fausse
grossesseest celui
de sœur Jeanne des Anges, supérieure
des religieuses de
Loudun. Elle raconte elle-mêmequ'elle avait tous
les signes
qu'on en peut avoir. Lesexemples
ensont d'ailleurs
assez fréquents. M. le Prof,agrégé Sabrazès Ç) rapporte l'histoire
d'une femme du Gers, ayant eu
trois
ou quatre grossessesnerveuses avec sécrétion lactée, turgescence de l'utérus,
grossesses affirmées par médecins et
sages-femmes, et dont
la première alla jusqu'à huit mois ;
à
cemoment, Lanne-
longue la vit, démentit la grossesse, et tout rentradans
l'ordre. Une étude
complète
de ces grossesseset de
ces tumeurs à été faite, après Fabre(2),
parKheifetz (3) dans
une thèse de Parisen 1898. Ce dernier explique cesfausses tu¬
meurssoit par le tympanisme
stomacal
ouintestinal, soit
par des contractures musculaires. D'ailleurs, la seule
pré¬
sencede l'hystérie, les caractères
soigneusement étudiés de
ces tumeurs permettront de
découvrir leur nature hystéri¬
que. Cependant Simpson conte que
six foison
secrut
en présenced'une tumeur de l'ovaire dans un casde tympanitehystérique.
Brighten rapporteunautre
caspersonnel. Dans
les cas de doute, la chloroformisation
devient
un moyen puissant, infaillible, de diagnostic ;elle fait disparaître toute
(9Sabrazès, Hystérie et grossesse (Bulletin médical, Paris
1896, X,
p. 1059).
(2) Fabre, Mars, médical 1883, XX.
(3) Kheifetz, Thèse de Paris 1898.
— 24 -
trace de tumeur dépendantde l'hystérie ; la tumeurse mon¬
tre de nouveau au réveil. La chloroformisation résoudra de
façon
définitive la question des
tympanitesdépendant
de la névrose, et en dernier ressort il faudra y recourir. Nous voulons signaler un symptôme qui se rencontre fréquem¬ment dans lestympanites banales se traduisant simplement
par un
ballonnement abdominal,
etquesignalentsouventles
malades, notamment la malade de notre ObservationII : le développement del'abdomen
n'estpas uniforme ; on ren¬contredes bosselures variant deplace et de volume. Souvent déplus,
parla pression,
on provoquedes gargouillements
dus aux gaz intestinaux.
Une autre catégorie de tympanites ayant l'air plus graves constitue ce qu'on a appelé les
pseudo-péritonites. Elles sont
relativement très fréquentes, et fréquemment méconnues.
Bristowe 0) a
publié
un casde tympanite hystérique où
onpensa
à la péritonite aiguë généralisée. De même Porcher (2),
Gramshaw (3), Dauchez
(4), Tournier
etSerrigny (5), Deniau.
La sensibilité exquise accompagnant un léger
ballonnement
du ventre, les vomissements porracés,
l'accélération du
pouls(120 à 130 pulsations dans
un casde Briquet), l'altéra¬
tion de la face qui prend l'aspect
hippocratique, reprodui¬
sent absolument le tableau de la péritonite vraie.
Piorry,
dans son Traité de
diagnostic,
vaà rencontre de
cetteaffir¬
mation, et signale comme moyen
de diagnostic le faciès
excellent, la non altérationdu pouls ; de plus,
les malades
exécutent des mouvements qu'ils n'exécuteraient pas dans
le
(fi Bristowe, On pseudo-peritonitis inhistoria (Brit. med. Journal, 22
février1890, p.401.
(2) Porcher, Hysteria simulating acute peritonitis (Annalist,
New-York,
1848-1849, t. III, p. 12).
(3) Gramshaw, Hysteria simulating peritonitis {Med. Times and
Gazette,
nouvelle série,t. VII, p. 199, Londres 1853).
(*) Dauchez, Accidents péritonéaux revenant périodiquement
chez
une hystérique; guérison {Francemédicale,1882,
p.890).
(•">)Tournier et Serrigny, Pseudo-péritonite hystérique chez une névro¬
pathe(Province médicale, Lyon 1895, t. IX).
— 25 —
casde
péritonite véritable. De fait, il estassez de règle, comme
le ditPiorry, que
les accidents hystériques de cette nature
n'altèrentpas le
faciès des malades et ont moins de retentis¬
sement sur les autres
systèmes. Dans
cesderniers
cas, une observationattentive, mettant endéfaut la connaissance
queles
hystériques ont généralement de leurs lésions, fera seule
lalumière.
Quant aux
péritonites chroniques hystériques, qui peu¬
vent simuler les péritonites
chroniques de toute nature, et
en particulier
la péritonite type,
nousvoulons dire la péri¬
tonite tuberculeuse, elles seront
difficiles à diagnostiquer.
M. Pitres, montrant cette difficulté dans un cas
qu'il
nous a permis deprendre, parle d'absence de réaction fébrile,
d'épanchement
liquide dans le ventre, et de l'amaigrisse¬
ment très modéré. Mais il a soin d'ajouter que « ces
raisons
nesont pas absolument
convaincantes, et
que,s'il n'en avait
d'autres à fournir, il n'oserait
affirmer qu'il
aaffaire à une
simple hyperalgésiehystérique de l'abdomen
».L'hypnotisa-
tion, qui fut
possible
et provoqua unapaisement subit de
tousles troubles, « donna au
diagnostic la certitude qui lui
manquait. »
On voit par les
considérations qui précèdent et les diver¬
gences entre auteurs, qu'il est
très difficile de démêler les
stigmates de la névrose dans
telle
outelle simulation, et
qu'on ne saurait leur assignerdes
signes précis.
Traitement. — Mises de côté les erreurs
évidemment,
une opération chirurgicaleest-elle de mise dans les simulations
hystériques
en général, etcelles
que nousenvisageons en
particulier ?Nous avons l'air d'énoncer unparadoxe
enpro¬
nonçant le mot chirurgie dans
quelque chose qui paraît
essentiellement médical. Il n'en est pas
moins vrai,
commenous le disions plus
haut,
quemême dans des cas avérés de
névropathie pure,
délibérément, des praticiens ont opéré. En
ce qui concerne les annexes, les
chirurgiens n'étaient
pas d'accord, et ne le sont guère encoreaujourd'hui
surla ques¬
tion de savoir s'il faut ou non les enlever dans les cas
d'ova-
ralgïe,
d'hystéralgie
et d'une façon générale de ce qui est désigné sous la dénomination de névralgies pelviennes, si, les organes enlevés, la névralgie disparaît?Après Hégar, qui fit la première castration en Amérique, après Battey, Péan fut le premier qui la pratiqua en France pour troubles nerveux. A la suite vinrent Lucas-Champion- nière, Terrier, Terrillon, plus tard Richelot. Ils avaient une bonne excuse dans cet état vraiment pitoyable de femmesse plaignant continuellement de douleurs pelviennes,marchant courbées en deux, ne mangeant pas, et dont la santé s'alté¬
rait progressivement; la plupart cle ces femmes d'ailleurs réclamaient à grands cris une
intervention
chirurgicale, menaçaient d'aller trouver tous les opérateurs, couraient cle clinique en clinique ; les hystériques de cette catégorie, vou¬lant êtreopérées à tout prix, ne sont pas rares. Les chirur¬
giens purent avoir la pensée de les soulager et se targuer d'ailleurs dequelques succès.
La réaction vint. Parmi les critiques cle la castration, citons Poullet, Doléris, Pichevin (Thèse de Paris 1899, Abus de la castration chez la
femme).
Ils signalèrentles dangers de lacastration et montrèrent qu'est vraie généralement cette phrase de Charcot : « Il semble que l'ablation desannexes
prédispose les femmes à être plus susceptibles d'un choc
nerveux qui ramène non seulement les accidents
primitifs,
mais même des accidents plusgraves». QuénuF)rapporte
le
cas typique d'une institutrice à qui il enleva les annexes, avecM.Terrier,pour névralgiepelvienne; tout alla bien pen¬
dant quelques mois, et l'opérée put reprendre son métier;
mais, à la suite d'une grande frayeur qu'elle eutà l'occasion
d'un incendie, elle fut prise de paralysie du côté gauche,
cle
hoquet hystérique, etc., et elle recommença à souffriraprès
cet accident. Rien n'est probantà cet égard comme la statis¬
tique faite par Angelucci et Pieraccini ; ces deux auteursse sont livrés à une enquête internationale sur lesrésultats que
(!) Larabie-Lagraveet Legueu, Traité de gynécologie.
les
opérations gynécologiques ont fournis chez les hystéri¬
ques : sur
109
cas, onn'a constaté d'effets favorables que
chez 17 personnes,
chez les 92 autres les effets ont été nuls
ou nuisibles; ils necomptent pas
moins de 77 femmes dont
l'étatnerveux aurait empiré
à
la suitede l'opération chirur¬
gicale.
Selon nous, l'acte opératoire ne
sauraitêtre de mise
que dansun cas, lorsqu'on veut s'enservir
comme moyende
suggestion.
Ceci découle de l'étiologie même des accidents
etde la naturede l'état mentalhystérique,
auquel
nousavons consacré une étude assez longue au commencementde
ce chapitre.L'intimidation produite
parl'appareil opératoire
peut influer sur l'esprit d'une
hystérique, de telle sorte qu'elle
peutamener la cessation des
symptômes. Si elle
nesuffit
pas, l'intervention sanglante sebornant à l'incision des tissus
superficiels et la suture sera
susceptible d'amener le résultat
désiré. Peut-être faudrait-il mettre sur le compte de la sug¬
gestion seule les guérisons obtenues par
les chirurgiens qui
pratiquèrent la castration. Liaras et Bouyer
rapportent dans
leur travail des curesdues à ce procédé.
Pourcequi est des
simulations hystériques de
l'appareil génital,
onn'a guère
essayécette thérapeutique: M. le
Prof Démons
pensequ'elle
pourrait donner des résultats, mais qu'elle est
très difficile¬
ment praticable, surtout dans les
hôpitaux,
en ce sens que le secret estdifficilementgardé et que lamoindre indiscré¬
tion commise détruit lebénéfice delà
suggestion.
OBSERVATIONS
Nous nous sommes attaché à ne donner que
quelques
observations où la simulation hystériquefût nettement éta¬
blie, soit par la cessation brusque des
troubles observés,
soit parl'opération, soit par l'examen
des pièces chez des
su¬jets morts d'un autre accident et où fut faite une autopsie.
M. le Prof. Pitres a bien voulu nous donner la fin de l'obser-
— 28 -
vation de
pseudo-péritonite
publiée dans son ouvrage: le péritoinefut examiné après la
mort. Nousle
remercions vive¬ment.
Observation I (Robey)
Douleurspelviennes etabdominales de nature hystérique faisant
penser à quelque phlegmasie pelvienne, ayant disparu brus¬
quement.
Mrs I)..., âgée de trente ans.
Accouche enjuillet 1898 d'un enfant vivant, plein de santé. Je la vis
pourla premièrefoisdeux mois après son accouchement, et elle m'ap¬
pritque sagrossesseavait été normale, saufun prurit pour lequel
elle
avait étésoignée sans succès, etquelques accès de subconscience où elle pouvaitentendre, mais où elle était absolument incapable de parler, une
sensation en somme nemanquantpas d'un certain charme.
Cessensations n'étaientpas survenues àl'occasion d'autres grossesses ni àaucune autreépoque de sa vie.
MrsD... est unefemme petite, délicate, qui a toujours été très ner¬
veuse, très émotive, maisayanttoujoursjoui d'unebonnesanté Récem¬
mentelle a perdu son enfanttoutd'un coup, ets'est beaucoup
tracassée
pour safortune.
Son prurit n'a pas été causépar des écoulements vaginaux, ni par
de
l'urine concentrée en cet endroit. La membrane muqueuse du vagin
était seulementlégèrement plus rougequ'à l'état normal, mais le tou¬
cher était si douloureux que la malade poussait des cris !
Le prurit disparut graduellementaprès des couches normales, et
les
étatssubconscientsne firentplus leur apparition.
Elle dit qu'elle n'avait jamais eu de troubles menstruels,etelle
désira
pour ne pas s'y exposer, car elle avait horreur de cela, que sa
convales¬
cencefut conduite très doucement.
Deux mois plus tard, je fus appelé à voir la maladepour une
douleur
de l'abdomen qui avaitété croissant pendant sept jours. Début
graduel
et douleur sourde,jamais soudaine et aiguë.
Il n'y avait pas lamoindre nausée ou vomissement et les
déjections
étaient d'apparence normale et se faisaient sans la moindre gêne.
— 29 -
Ellese disait incapable de
bien marcher, surtout
endehors de sa
chambre; il lui semblait
qu'elle allait trébucher
aumoindre objet ; du
côté de la porte
gauche, elle semblait être
un peuplus stable, mais
mêmealors ses amislui disaient «
qu'elle marchait
en sedandinant
comme uncanard ».
L'étatde songe etde
prurit avait
reparu,et elle avait de plus main¬
tenantdel'urticaire. Elle avait eu une toux
convulsive pendant
une semaine, et, au momentde mavisite, elle
seplaignait d'une douleur
aiguë dans le
côté droit à l'inspiration, et également de douleurs dans
lesfossesiliaques.
Examen: facerouge. Température
lOloFarenheit, pouls 120. Lan¬
gue blanche,
saburrale. Rien
auxyeux.Cœur sain.
Poumons : respiration unpeu
rude (très légèrement)
sur uneligne
passantle long du 9e espace
intercostal droit; quelques râles disséminés.
Abdomen: très sensible partout,
même
autoucher le plus délicat
;un moment,elle criacommesi elle
souffrait très fort pendant
que mes doigts étaientencore à un pouceau-dessus de
sa peau.Lasensibilitéestplus
marquée
àla surface. Pas de point spécial de
sensibilité. On nesentpas
l'ovaire.
Rien à la percussion.
Les cuisses etlesjambes sont
sensibles; tressaillements au moindre
pincement,
réflexespatellaires exagérés;
pasde trépidation épileptoïde.
Sens tactilediminuésur la partiedroite
de l'abdomen
;semblant de
diminutionsurlescuisses etlesjambes.
Sensation de chaleur
non per¬çue. Déploiement
exagéré de pudeur,
nonobservé
auxvisites précé¬
dentes. Marche très lente ; chaque pas est
fait
avec uneprécaution
extrême, la jambe est
attirée
avecraideur. Toucher vaginal
:rien. Tou¬
cher rectal insuffisant, la malade gigottant, criant
et mettant
sesdoigts
dansla main qui examine.
En deuxjours, la toux et
la douleur pleurale avaient complètement
disparu,la sensibilité
abdominale était moindre. L'urticaire
nedisparut
qu'après quelques jours d'une
diète légère.
Dixjours après, ily avait encore
quelque petite sensibilité généra¬
liséeà toutl'abdomen, et la malade
dit qu'elle
setrouvait
enparfait
état.
— 30 —
Observation II (Personnelle et inédite).
(Prise dans le Service de M. leL)r Baudrimont.)
Tympanite hystérique.
Eugénie B..., trente huitans, sansprofession. Entre à l'hôpital dans
leservice de M. Baudrimont,où nous étions alors externe, le5 mai 1899, pour douleurs abdominales accompagnées de ballonnement du
ventre.
Antécédents héréditaires. -- Très jeune elle a perdu ses parents.
Mais on lui adit que son père est mort d'accidents cérébraux dont elle
ne peut préciser lanature, et pourlesquels on avait été obligé de l'in¬
terner. Mèred'apparence chétive.
Antécédentspersonnels. — Seporte assez bien pendantsa jeunesse,
àpart quelques accidents convulsifs vers l'âge de deux1ou trois ans, accidents mis sur le comptede vers intestinaux. Etait de naturetimide.
A douze ans, entre dans un orphelinat àPaimbœuf. Elleyapprendun jour que son frère venait d'être tué, cette nouvelle la saisit tellement qu'elle perd connaissance. Elle dit n'avoir pas eu de convulsions. A la suite, avait des rêveries, où, dit-elle, « elle ne pensait à rien », se
rapprochant beaucoup d'un état subconscient.
Réglée à seize ans, ses règles s'arrêtent ensuite pendant sept ouhuit mois, puis reprennent etsont assez régulières. A cette époque, la ma¬
lade entre commeinfirmière dans un hôpital. Elle reste toujours émo¬
tive.
Elles'est mariée il y a trois ans, a unenfant bienportant, eta fait,
il y a huit mois environ,une fausse couche de deux mois.
Il y asix mois environ entre âl'hôpital Saint-André pour des étouf-
fements qu'on rapporte à de la dyspnée urémique. L'examen des urines dénote un peu d'albumine. Ses douleurs disparaissent assez brusque¬
ment, ce qui fitsupposer que sanévropathie pouvait bien être en cause.
Maladie actuelle. — Elle entre maintenant pour la seconde fois à l'hôpital. Plus trace d'étouffements, mais douleurs abdominales, constipation et ballonnement du ventre : anorexie, vomissements.
Quelques pertes blanc verdàtre.