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Oxygénothérapie haut débit ou ventilation non invasive dans l'insuffisance respiratoire aiguë ? Effets physiologiques et indications

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114 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XIX - n° 3 - mai-juin 2016

MISE AU POINT

Oxygénothérapie haut débit ou ventilation non invasive dans l’insuffisance

respiratoire aiguë ?

Effets physiologiques et indications

High flow nasal cannulae oxygen therapy

or noninvasive ventilation in acute respiratory failure?

Physiological effects and indications

J.P. Frat*, R. Coudroy*, A.W. Thille*

* Service de réanimation médicale, CHU de Poitiers.

L’

oxygène (O2) reste actuellement la première étape du traitement symptomatique de toute insuffisance respiratoire aiguë (IRA).

Cependant, elle peut connaître des limites dans les formes les plus sévères d’hypoxémie avec signes cliniques de détresse respiratoire aiguë (DRA).

Les dispositifs et/ou les techniques d’oxygénation non invasives disponibles dans la prise charge des patients en DRA comprennent tout d’abord la ventilation non invasive (VNI) utilisée depuis les années 1990 (1-3), et plus récemment, l’oxygéno- thérapie nasale humidifiée et réchauffée à haut débit (OHD) [4-7]. Ces divers dispositifs ont des caractéristiques physiologiques différentes et des indications spécifiques. Leur finalité est d’éviter l’intubation endotrachéale et la ventilation méca- nique invasive, car elle est associée à une morbi- dité et une mortalité plus élevées (8). Depuis les années 1990, plusieurs travaux ont montré l’intérêt de la VNI au cours de l’IRA, due à une exacerbation de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) [3] ou à un œdème aigu du poumon d’ori- gine cardiogénique (1, 9). Plus récemment, l’OHD, initialement développée en pédiatrie, s’est éga- lement avérée efficace chez l’adulte dans la prise en charge des patients en IRA hypoxémique (4-6, 10).

Dans cet article, nous développerons principa- lement l’intérêt de l’utilisation de l’OHD dans l’IRA hypoxémique, où les bénéfices de la VNI n’ont pas été démontrés.

La ventilation non invasive

La VNI peut être réalisée selon 2 techniques et dis- positifs différents : la VNI à 1 seul niveau de pression (Continuous Positive Airway Pressure [CPAP]) et la VNI à 2 niveaux de pression (Positive Pressure Support [PPS]), dont le mode le plus souvent utilisé est l’aide inspiratoire (AI) [11]. Habituellement, le niveau d’AI est réglé pour obtenir un volume courant entre 6 et 8 ml/kg et le niveau de pression expiratoire posi- tive (PEP) entre 4 et 10 cm H2O. Les effets physio- logiques de la VNI reposent essentiellement sur la possibilité de générer une pression positive dans les voies aériennes durant l’expiration et également à l’inspiration pour la VNI avec AI (2, 12).

Ventilation non invasive : CPAP

La CPAP génère une pression continue qui est maintenue grâce à l’adaptation du débit de gaz dans le dispositif (12). Cette pression positive est supé- rieure à la pression atmosphérique et transmise au patient via une interface qui est le plus souvent un masque facial (12). Pendant l’inspiration, aucune pression supplémentaire n’est générée, le volume courant dépend donc uniquement de l’activité des muscles respiratoires. Ainsi, l’augmentation de la pression intrathoracique sous CPAP est responsable des principaux effets physiologiques sur la fonction

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La Lettre du Pneumologue • Vol. XIX - n° 3 - mai-juin 2016 | 115 du travail respiratoire, expliquent ses bénéfices dans l’insuffisance respiratoire aiguë hypoxémique, où son

utilisation permet de diminuer le taux d’intubation et la mortalité, notamment dans les formes sévères. Ventilation non invasive

Summary

In acute respiratory failure, noninvasive ventilation (NIV) is indicated in COPD exacerba- tion and cardiogenic pulmonary edema as it is associated with a decrease of intubation and mortality rates. High-flow oxygen therapy through a nasal cannula (HFNC) is a technique whereby heated and humidi- fied oxygen is delivered to the nose at high flow rates. These high flow rates generate low levels of positive pressure in the upper airways, and the fraction of inspired oxygen can be adjusted by changing the fraction of oxygen in the driving gas. The high flow rates may also decrease physio- logical dead space by flushing expired carbon dioxide from the upper airway, a process associated with a good comfort that potentially explains the observed decrease in the work of breathing, especially in patients with severe acute hypoxemic respiratory failure.

Keywords

Acute respiratory failure High flow oxygen therapy Non invasive ventilation respiratoire et cardiovasculaire. Au cours de l’œdème

pulmonaire aigu (OAP), F. Lenique et al. ont montré que la diminution du travail respiratoire (Work of Breathing [WOB]), exploré par les variations de la pression œsophagienne au cours du cycle respi- ratoire, était plus marquée pour des niveaux de pres- sion élevés (supérieurs à 10 cm H2O). Ce phénomène s’expliquant principalement par l’amélioration de la compliance pulmonaire et non par la compen sation d’une potentielle pression expiratoire positive intrin- sèque comme observé chez les patients atteints de BPCO. La traduction clinique est l’amélioration de la polypnée et la diminution de la pression partielle en CO2 (PaCO2). De plus, la CPAP permet une amélio ration de l’oxygénation comparativement à l’oxygénation standard (1). Dans le contexte d’une insuffisance cardiaque, les effets physiologiques cardiovasculaires comprennent essentiellement une amélioration du débit cardiaque et du volume d’éjec- tion systolique grâce à la diminution de la postcharge ventriculaire gauche sous l’effet de la pression posi- tive intra thoracique (12). La revue de littérature de F.M. Vital et al., de 2013, qui a repris 32 essais compa- ratifs, soit les données de 3 000 patients, montre des bénéfices cliniques significatifs de la CPAP compara tivement à l’oxygéno thérapie standard dans la prise en charge de l’OAP cardiogénique, avec une diminution du recours à la ventilation mécanique invasive (RR = 0,52) et également de la mortalité hospitalière (RR = 0,66) [13]. Cependant, il n’a pas été démontré de supériorité de la VNI avec AI sur la CPAP dans cette indication sur une méta-analyse incluant 7 essais et 290 patients au total, en termes de recours à l’intubation, de réso lution de l’OAP, de survie, ou encore que le patient soit hypercapnique ou non (14).

De même, il ne semble pas qu’il existe un risque augmenté de survenue d’infarctus du myocarde avec l’une ou l’autre technique (15).

Ventilation non invasive avec AI : ventilation spontanée avec AI et PEP La VNI avec AI génère, en plus d’une pression continue ou pression expiratoire positive (PEP), une pression positive au cours de l’inspiration ou AI supérieure à la PEP. En pratique, la VNI peut être réalisée à l’aide

d’un ventilateur dit “lourd de réanimation” ou d’un ventilateur “dédié” fonctionnant avec une turbine et une interface utilisant le plus souvent un masque bucconasal. La VNI avec AI diminue la charge de travail des muscles respiratoires : tout d’abord grâce à la PEP, qui permet de contrebalancer au cours de l’inspiration la PEP intrinsèque, en particulier chez les patients en exacerbation de BPCO, et grâce à l’AI, qui permet de générer un volume courant d’autant plus grand que son niveau est élevé (2). Les indications de la VNI avec AI comprennent ainsi l’OAP, comme précédemment indiqué, et également l’exacerbation de BPCO, où, là aussi, elle permet de diminuer le recours à la ventilation invasive et la mortalité. Sur 14 études comparant la VNI au traitement standard seul, la VNI a un bénéfice significatif se traduisant par la diminution de la mortalité (RR = 0,52), celle du recours à l’intubation (RR = 0,41) et une amélioration du pH, de la PaCO2 et de la fréquence respiratoire dans la première heure (16).

Dans l’insuffisance respiratoire aiguë de novo, c’est- à-dire en dehors de l’exacerbation de BPCO ou de l’OAP, les bénéfices de la VNI sont controversés. Le taux d’échec de la VNI au cours des IRA hypoxémiques en réanimation est important et varie de 25 à 62 % selon les études et les populations étudiées (17‑21).

Ces échecs aboutissent à l’instauration d’une venti- lation invasive après intubation trachéale. La disparité de ce taux d’échec entre les études s’explique par une grande hétérogénéité des patients étudiés : œdème pulmonaire, décompensation de BPCO, pneumo- pathie communautaire, syndrome de détresse respi ratoire aiguë (SDRA), etc. Le bénéfice de la VNI instaurée précocement est à l’évidence plus marqué pour les IRA hypercapniques consécutives à une décompensation de BPCO et pour les IRA hypo- xémiques consécutives à un œdème pulmonaire cardio génique que pour les IRA de novo.

L’oxygénothérapie humidifiée et réchauffée à haut débit

L’OHD est un dispositif d’oxygénation disponible chez l’adulte depuis 2006. Les premières études cliniques ont montré une tolérance et une oxy- génation meilleures comparativement à l’oxygéno-

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MISE AU POINT

Oxygénothérapie haut débit ou ventilation non invasive dans l’insuffisance respiratoire aiguë ?

thérapie standard (4). Parallèlement, des études ont montré les effets physiologiques propres à ce dispositif justifiant les effets bénéfiques observés dans l’IRA hypoxémique (5, 22-24).

Principes de fonctionnement et effets physiologiques de l’OHD Les principes de fonctionnement de l’OHD reposent sur les 4 éléments suivants (25) :

un générateur de débit délivrant de hauts débits air-O2 réglables de 10 à 70 l/mn selon les dispositifs, capables de couvrir le débit inspiratoire instantané (de pointe) du patient ;

une FiO2 contrôlée ajustable de 21 à 100 % grâce à un analyseur d’O2 selon les modèles ;

un humidificateur chauffant installé sur le circuit inspiratoire permettant l’humidification des voies aériennes de façon plus efficace ;

une interface simple et confortable comprenant des canules nasales, conçues pour administrer des hauts débits de gaz et atténuer la condensation d’eau.

Les principaux effets physiologiques comprennent la couverture du débit expiratoire de pointe, un effet PEP et un lavage de l’espace mort qui concourent à une diminution du travail respiratoire et à l’amélio- ration du confort comparativement à l’oxygéno- thérapie standard.

Couverture du débit inspiratoire et humidification des voies aériennes

L’OHD permet une meilleure adéquation entre la demande ventilatoire d’un patient en DRA, carac- térisée par un débit inspiratoire de pointe élevé, pouvant atteindre 120 l/mn, et l’apport d’une FiO2 élevée grâce à un haut débit, limitant ainsi un phénomène de dilution de l’O2 avec l’air ambiant et aboutissant à une meilleure maîtrise de la FiO2 administrée (26). L’apport d’une FiO2 élevée et maîtrisée sous OHD est illustré dans l’étude de M.A. Sim et al., réalisée chez 13 volontaires sains évalués au repos et en situation de DRA simulée par contention thoracique (27). En effet, seule l’OHD permettait d’obtenir la FiO2 la plus élevée (proche de 90 %) et stable durant les 2 conditions expéri mentales, comparativement aux dispo- sitifs d’oxygénation conventionnelle dans le cadre desquels la FiO2 pouvait chuter de 12 à 24 % entre les 2 conditions expérimentales. La FiO2 maximale mesurée sous masque à haute concentration était de 68 % (27).

Le réchauffement et l’humidification appliqués au cours de l’OHD permettent de rendre les hauts débits de gaz ainsi utilisés compatibles avec la physio logie des voies aériennes et potentiellement d’en améliorer le confort, car proches de l’hygro- métrie présente au-delà de la frontière de saturation isothermique. Un meilleur confort sous OHD a été rapporté comparativement à l’oxygénothérapie, au masque haute concentration ou à la ventilation non invasive chez des patients en DRA (4-6, 10). De plus, une hygrométrie optimisée permet de préserver la clairance mucociliaire en limitant l’assèchement des sécrétions trachéobronchiques et de prévenir l’augmen tation des résistances des voies aériennes supérieures (VAS) [28-30]. L’intérêt d’une humidifi- cation active sur les capacités d’expectoration a par ailleurs été particulièrement démontré chez des patients porteurs de bronchectasies (31).

Effet PEP et augmentation du volume pulmonaire de fin d’expiration

Plusieurs travaux ont montré que l’OHD permettait de générer un effet PEP externe. Cet effet PEP pourrait varier, chez des volontaires sains, de 3 à 7 cmH2O en moyenne selon le débit de gaz utilisé (10 à 60 l/mn) et l’importance des fuites buccales (23). Il diminuerait d’autant plus que les individus sont de grande taille et serait moins marqué chez l’homme que chez la femme pour des conditions similaires d’utilisation. Cette différence semble pouvoir être reliée à la variation de confor mation anatomique du nasopharynx, plus étroite, notamment, chez la femme que chez l’homme.

Ces données physiologiques ont été confirmées en situation clinique après une chirurgie cardiaque avec des niveaux de pression moindres, autour de 1,5 à 3 cmH2O (32). De plus, l’analyse des volumes pulmonaires par tomographie thoracique par impé- dance électrique a montré que l’utilisation de l’OHD, compara tivement à l’oxygénothérapie convention- nelle, était associée à une augmentation du volume courant mais aussi du volume pulmonaire en fin d’expiration, de manière corrélée à l’augmentation de la pression des voies aériennes (+ 3 cmH2O en moyenne). À noter : l’effet bénéfique de l’OHD sur le volume pulmonaire était d’autant plus marqué dans cette étude que l’indice de masse corporelle des patients était élevé (33).

Lavage-rinçage de l’espace mort rhinopharyngé

Un autre effet physiologique de l’OHD est d’induire un phénomène de “lavage-rinçage” de l’espace mort anatomophysiologique et par conséquent du CO2,

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Figure. Dispositif d’oxygénothérapie à haut débit comprenant un mélangeur air- oxygène (a) ; une chambre d’humidification et réchauffement (b) ; un circuit conduisant le mélange gazeux, réchauffé à 37 °C et humidifié à 44 mg/l (c) ; administré au patient via des canules spécifiques (d).

grâce à l’importance de la turbulence du débit de gaz continu délivré au niveau du rhinopharynx (22).

Ce phénomène de “lavage-rinçage” contribue à réduire l’espace mort et à améliorer la ventilation alvéolaire.

Réduction des résistances des voies aériennes

L’OHD permettrait de contrebalancer la part résis- tive du travail respiratoire due à l’augmentation des résistances des voies aériennes au niveau pharyngé, secondaire au déphasage des activités des muscles inspiratoires (essentiellement le diaphragme) et des muscles dilatateurs du pharynx en maintenant une pression pharyngée positive (34).

Diminution du travail respiratoire et fonction respiratoire

Enfin, F. Vargas et al. ont montré chez 12 patients en DRA que l’effort inspiratoire exprimé par le produit pression-temps/cycle inspiratoire, mesuré par une sonde œsophagienne (PTPes/breath) [Pressure Time Product/Breath Ratio], était significativement diminué et de manière comparable sous OHD et CPAP versus oxygénothérapie au masque (24). Paral- lèlement, l’oxygénation sous OHD était meilleure qu’au masque à réserve. Dans cette étude, le confort et la sensation de dyspnée n’étaient pas modifiés au cours des différentes sessions. Cependant, d’autres travaux ont montré une amélioration de ces variables comparativement à l’oxygénothérapie standard ou à la VNI (4-6).

Enfin, tous ces effets physiologiques de l’OHD, comprenant une amélioration du travail respi- ratoire, du confort et de l’oxygénation pourraient, à terme, faire considérer l’OHD davantage comme une technique d’assistance ventilatoire que comme une simple méthode d’oxygénation des patients en DRA.

Matériel à disposition et principes de réglage

Différents dispositifs spécifiquement dédiés à l’OHD (figure) ont été mis au point selon la capa cité du générateur de débit et le type d’humidi ficateur utilisé. Ceux actuellement disponibles sur le marché sont les suivants : le Precision Flow® et le Vapotherm 2000i® (Vapotherm, États-Unis), l’Hydrate® OMNI (Hydrate, États-Unis), l’Optiflow et l’AIRVO 2 (Fisher & Paykel Healthcare, Nouvelle-Zélande).

Ces derniers sont actuellement les plus largement utilisés en France et en Europe. Il est éga lement

possible de délivrer une OHD à partir de la fonction

“ oxygénothérapie” de certains venti lateurs lourds de réanimation, tels que l’Evita XL® et l’Evita Infinity® V500 (Dräger, Allemagne) ou le Monnal T60® et T75® (Air Liquide Medical Systems, France).

Le réglage des paramètres d’un dispositif d’OHD comprend le choix de la FiO2 (21 à 100 %), du débit de gaz frais délivré (10 à 70 l/mn avec le système Optiflow), à adapter selon la tolérance, la situation clinique du patient et la température de l’humidi- ficateur chauffant (37 °C ou sur la position “venti- lation invasive” avec l’humidificateur MR850 dédié de l’Optiflow). L’ensemble du dispositif d’OHD doit être idéalement préparé 10 à 15 mn avant son utili sation afin que l’humidi ficateur chauffant puisse atteindre sa température optimale de fonction nement.

L’OHD dans l’IRA hypoxémique

Historiquement, les premières études ont évalué l’OHD après une chirurgie cardiaque, proba blement motivées par l’effet PEP de l’OHD potentiel- lement bénéfique sur le travail respiratoire dans cette popu lation (32). Par la suite, les effets physiologiques (hauts débits et niveau de FiO2), les aspects techniques de l’OHD et les travaux réalisés en pédiatrie ont amené à proposer cette technique dans la prise en charge de l’IRA hypo- xémique de l’adulte.

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MISE AU POINT

Oxygénothérapie haut débit ou ventilation non invasive dans l’insuffisance respiratoire aiguë ?

Les premiers travaux cliniques publiés chez l’adulte en IRA hypoxémique ont évalué la faisa bilité, les conséquences physiologiques et le confort sous OHD. Ainsi, plusieurs équipes ont montré tout d’abord que l’OHD améliorait significa tivement la dyspnée, la fréquence respira- toire, le confort et l’oxygénation dès les premières minutes, compara tivement à l’oxygénothérapie convention nelle (masque Venturi ou masque à haute concentration [MHC]) chez des patients en IRA hypoxémique (4).

Par la suite, d’autres études prospectives obser- vationnelles ont évalué, en plus de la faisabilité et des paramètres physiologiques, l’impact clinique de l’OHD dans l’IRA. Ainsi, B. Sztrymf et al. ont rapporté, chez 38 patients de réanimation en IRA sévère, que l’OHD améliorait significativement les signes cliniques de DRA et l’oxygénation tout au long des 48 premières heures, et ce dès la quinzième minute d’utilisation pour la fréquence respi ratoire et la SpO2, dès la première heure pour l’oxygénation comparativement à l’état de base sous oxygéno thérapie par MHC (10). Par ailleurs, le pH ou la PaCO2 n’étaient pas modifiés sous OHD.

Seulement 9 patients sur 38 (24 %) ont dû être par la suite intubés, alors que les cliniciens estimaient que 42 % des patients auraient pu nécessiter de l’être. L’absence d’amélioration significative de la fréquence respiratoire (dès la trentième minute), de l’oxygénation (dès la quinzième minute pour la SpO2 et dès la première heure pour la PaO2) et la persistance d’une respiration abdominale paradoxale (dès la quinzième minute) étaient des facteurs associés à l’échec précoce de l’OHD en analyse univariée (10).

De même, J.P. Frat et al. ont évalué, dans une étude pilote prospective observationnelle, le bénéfice de l’OHD en association à la VNI chez 28 patients de réanimation avec une IRA hypoxémique sévère (PaO2/FiO2 < 200). L’OHD permettait, là encore, d’améliorer significativement l’oxygénation, les signes de DRA se traduisant par une diminution de la fréquence respiratoire comparativement à l’état de base sous oxygénothérapie conventionnelle (35).

Dans ce travail, le taux d’intubation (36 %) était plus bas que celui classiquement rapporté dans cette indication dans les études antérieures (17- 21). Les facteurs associés à l’intubation étaient une fréquence respiratoire supérieure à 30 cycles/mn après une heure sous OHD (35).

Enfin, J. Messika et al. ont rapporté, dans une étude observationnelle incluant 45 patients pré- sentant un SDRA sévère (PaO2/FiO2 à 137 mmHg)

et traités en première intention par OHD, que seulement 18 d’entre eux (40 %) ont été intubés par la suite (36).

Ces travaux ont été suivis par l’étude FLORALI, prospective, multicentrique, randomisée et contrôlée, comparant l’oxygénothérapie au MHC, à l’OHD et à la VNI (associée à l’OHD) et éva- luant l’impact de ces 3 stratégies sur l’intuba- tion et la mortalité (37). Trois cent dix patients en IRA hypoxémique (PaO2/FiO2 < 300) non hyper capnique ont été inclus et répartis selon leur traitement dans les 3 groupes. Les résultats préliminaires ont montré que le taux d’intuba- tion n’était pas significativement différent entre les groupes, bien qu’inférieur chez les patients traités par OHD (38, 47 et 50 % dans les groupes OHD, oxygène standard et VNI, respectivement).

Cependant, la mortalité en réanimation et celle à J90 étaient significativement plus basses dans le groupe traité par OHD (22, 13 et 31 % dans les groupes OHD, oxygène standard et VNI, respec- tivement). Enfin, chez les patients les plus hypo- xémiques (PaO2/FiO2 < 200), le taux d’intubation était significativement plus bas dans le groupe OHD (35, 53 et 58 % dans les groupes OHD, oxygène standard et VNI, respectivement). Cette étude montre l’effet bénéfique de l’OHD dans la prise en charge de l’IRA hypoxémique, y compris dans les formes les plus sévères.

L’étude du sous-groupe de patients immuno- déprimés, excepté ceux avec une neutropénie profonde exclus de l’étude originale, montre éga- lement un effet bénéfique de l’OHD dans cette population, mais suggère un effet délétère de la VNI. Celle-ci était associée à une mortalité et un taux d’intuba tion plus élevés, alors qu’aucune différence n’était observée entre les patients traités par oxygéno thérapie standard ou OHD (38). L’effet délétère de la VNI pourrait être dû à des lésions pulmonaires induites par la ventilation ou volume induced lung injury, notamment les grands volumes courants générés par les patients en DRA.

Ainsi, la prise en charge actuelle de l’IRA hypo- xémique non hypercapnique doit comprendre l’OHD en première intention et remplacer les autres techniques d’oxygénation. La sélection des patients est importante, car l’existence de défaillances supplémentaires (notamment hémo- dynamiques) est associée à l’échec de l’OHD (36).

L’utilisation de critères d’intubation prédéter minés permet de ne pas retarder ce geste, retard qui peut aggraver le pronostic, comme cela a été rapporté avec la VNI.

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Conclusion

L’OHD apparaît donc comme une réelle inno vation technologique, bien tolérée et facile à mettre en œuvre, permettant d’optimiser l’oxy génation lorsque l’oxygénothérapie convention nelle atteint ses limites.

Les caractéristiques techniques et les effets physio- logiques de l’OHD comprennent principa lement l’apport d’une FiO2 élevée, un effet PEP et un effet de lavage-rinçage de l’espace mort rhino pharyngé.

Les travaux publiés plaident pour une utili sation

de plus en plus large de l’OHD, notam ment dans la prise en charge de l’IRA hypoxémique et en post- extubation. Cependant, il faut rester vigilant sur l’indi cation de l’OHD, qui doit concerner des patients mono défaillants respiratoires. De plus, l’utilisation de l’OHD ne doit pas faire repousser indûment les limites de l’oxygénothérapie, au risque de retarder dange- reusement une intubation, ce qui impose de prédéter- miner des critères d’intubation, tels que la survenue d’une nouvelle défaillance et l’absence d’amélioration des signes respiratoires ou de l’oxygénation.

J.P. Frat déclare avoir des liens d’intérêts

avec Fisher & Paykel Healthcare, qui a mis à sa disposition du matériel pour la réalisation d’études cliniques

et qui a remboursé ses frais de participation à des congrès.

R. Coudroy et A.W. Thille n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts.

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