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Quelle prise en charge des patients nouvellement diagnostiqués et non éligibles à la greffe ? L’arrivée de l’immunostimulation

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Quelle prise en charge des patients nouvellement diagnostiqués et non éligibles à la greffe ?

L'arrivée de l'immunostimulation

Aurore Perrot,Service d'hématologie, institut universitaire du cancer de Toulouse, France;Equipe génomique et immunologie du myélome UMR 1037 - Inserm, Centre de recherches en cancérologie de Toulouse, France

Hélene Augé,Service d'hématologie, CHRU de Nancy, France

Lauriane Clément-Filliatre,Service d'hématologie, CHRU de Nancy, France Tirés à part : A. Perrot

Perrot.Aurore@iuct-oncopole.fr

Liens d'intér^et : Les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intér^et en rapport avec cet article.

Care for newly diagnosed patients who are not eligible for transplant The arrival of immunostimulation

Myélome multiple, immunosénescence, anticorps monoclonaux Multiple myeloma, immunosenescence, monoclonal antibodies

Résumé

S

i le pronostic du myélome multiple a été nettement amélioré par le développement des inhibiteurs du protéasome et des immunomodulateurs, la maladie reste incurable et la durée de survie est de l'ordre de cinq ans chez les patients non éligiblesa la greffe. Le second tournant dans l'histoire des thérapeutiques du myélome est sans nul doute l'arrivée de l'immunothérapie, dont l'activité permet notamment de restaurer des fonctions immunitaires antitumorales. Les anticorps monoclonaux anti-CD38 s'associent particulierement bien aux immunomodulateurs : leur synergie permet des réponses durables et cette combinaison devient la nouvelle référence des patients nouvellement diagnostiqués non éligi- blesa la greffe. Si le myélome est en soi associéa une diminution des fonctions immunitaires (dysfonction des lymphocytes B, T et NK, ainsi que des cellules dendritiques mais également action de cellules T régulatrices et de cellules myéloïdes suppressives), le vieillissement participe égalementa l'immunosénescence. Le ciblage thérapeutique du systeme immunitaire paraît par conséquent particulierement intéressant dans le contexte

Abstract

W

hile the prognosis of multiple myeloma has been significantly improved by the development of protea- some inhibitors and immunomodulators, the disease remains incurable and the survival time is aroundfive years in patients not eligible for transplantation. The second turning point in the history of myeloma therapies is undoubtedly the arrival of immunotherapy, whose activity notably restores anti-tumor immune functions. The anti-CD38 monoclonal antibodies combine particularly well with immunomodulators: their synergy allows lasting responses and this combination becomes the new benchmark for newly diagnosed patients not eligible for transplantation. If myeloma is in itself associated with a decrease in immune functions (dysfunction of B, T and NK lymphocytes, as well as dendritic cells but also action of regulatory T cells and suppressive myeloid cells), aging also participates in the immune system. - senescence.

Therapeutic targeting of the immune system therefore appears to be particularly advantageous in the context of the elderly. A better understanding of the mechanisms of anti-

Pour citer cet article : Perrot A, Augé H, Clément-Filliatre L. Quelle prise en charge des patients nouvellement diagnostiqués et non éligibles à la greffe ? L'arrivée de l'immunostimulation.

Hématologie2020 ; 26(supplément 2) : 12-20. doi : 10.1684/hma.2020.1545

Revue

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des sujets^agés. Une meilleure connaissance des mécanismes de la dysfonction immunitaire antitumorale est nécessaire pour optimiser l'utilisation de l'immunothérapie dans l'arsenal des médicaments du myélome.

tumor immune dysfunction is necessary to optimize the use of immunotherapy in the arsenal of myeloma drugs.

D

éfini par la prolifération de plasmocytes clonaux dans la moelle osseuse, le myélome est multiple de par les sympt^omes variés qu'il peut engendrer mais aussi de par l'hétérogénéité biologique, évolutive et pronostique. L'^age médian de survenue est de plus de 70 ans et le nombre de nouveaux patients^agés et tres^agés s'accroît avec l'augmentation de l'espérance de vie de la population ; certaines études épidémiologiques prédisent un accroissement de 57 % de l'incidence totale entre 2010 et 2030[1].

Le choix du traitement de premiere ligne repose sur l'éligibilité à un traitement intensif par le melphalan à haute dose avec autogreffe. Au-delà de 65 à 70 ans, et en fonction des comorbidités, le traitement intensif n'est pas proposé, au profit de combinaisons administrées en ambulatoire pour une durée prolongée voire continue, associant soit le melphalan à plus faible dose à du bortézomib et de la prednisone, soit le lénalidomide à de la dexaméthasone, soit le bortézomib, le lénalidomide et la dexaméthasone[2].

Le pronostic a été nettement amélioré par le développement des inhibiteurs du protéasome et des immunomodulateurs, mais c'est sans nul doute l'immuno- thérapie qui constitue le nouveau tournant de l'histoire du traitement du myélome.

Elle peut^etre définie comme une approche thérapeutique qui agit sur le systeme immunitaire, ayant pour objectif d'éduquer et d'activer les défenses immunitaires d'un patient afin qu'elles éliminent elles-m^emes les cellules cancéreuses. Cette approche paraît particulierement pertinente dans le myélome, pathologie ou le fonctionnement du systeme immunitaire est fortement perturbé.

Syst eme immunitaire

et myélome

De nombreuses dysfonctions du systeme immunitaire ont été observées dans le myélome :

– diminution du nombre et de la fonction des lymphocytes B, T, NK et des cellules dendritiques ;

– sécrétion de cytokines immunosuppressives : facteur de croissance transfor- mant b (TGF-b), facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (VEGF) et facteur de croissance hépatocytaire (HGF) ;

– augmentation des cellules immunosuppressives : lymphocytes T régulateurs, cellules myéloïdes suppressives[3].

Dysfonction B, T et NK

La diminution des plasmocytes normaux résultant en une hypogammaglobuliné- mie et une susceptibilité aux infections (notamment de la sphere ORL et bronchopulmonaire par des germes encapsulés) est connue de longue date. Mais l'immunité cellulaire est également altérée sous l'effet direct des plasmocytes tumoraux qui secretent du TGF-b, des interleukines (IL-10, IL-6), de la prostaglandine E2. Les cellules NK, éléments clés de l'immunité innée au pouvoir cytotoxique élevé, sont diminuées dans le myélome : outre la diminution quantitative de la fraction circulante, a été observée une sous-expression des récepteurs activateurs tels NKG2D, NKp30 ou CD244 et CD226[4], conduisant à l'altération fonctionnelle des cellules NK.

Patients non éligibles à la greffe

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L'expression de PD-1 est également augmentée sur les cellules NK, permettant aux plasmocytes exprimant PD-L1 d'inhiber la cytotoxicité NK par la voie PD-1/PD-L1[5].

R^ ole des cytokines immunosuppressives

Le TGF-ß n'est pas seulement produit par les plasmocytes clonaux, mais aussi par les lymphocytes T régulateurs CD4+CD25+et les cellules stromales médullaires. Il induit la phosphorylation de SMAD3, conduisant à la diminution de la production d'interférong(IFN-g) médiée par le récepteur Fc CD16, et donc à l'inhibition de la cytotoxicité dépendante des anticorps (ADCC)[6].

Action inhibitrice des cellules myéloïdes suppressives

Les MDSC (myeloid-derived suppressor cells) ou cellules myéloïdes suppressives sont capables d'inactiver les lymphocytes T et de favoriser les tumeurs par plusieurs mécanismes[7]:

– en les privant d'acides aminés (arginine, cystéine) essentiels à leur activation ; – en produisant des especes réactives de l'oxygene et des peroxynitrites qui inhibent les lymphocytes T CD8 en catalysant la nitrosylation des récepteurs (TCR) qui deviennent moins réactifs ;

– en produisant du TGF-b et de l'IL-10, deux cytokines qui induisent des lymphocytes T régulateurs ;

– en produisant des facteurs angiogéniques comme le VEGF qui participent à la croissance tumorale.

Les MDSC sont augmentées dans le contexte du myélome comparativement à des donneurs sains [8]et leur présence est associée à la rechute et une mauvaise réponse au traitement[9]. Néanmoins, l'action des thérapeutiques antimyéloma- teuses classiques est controversée, une étude ayant montré que le nombre et la capacité suppressive des MDSC n'étaient pas modifiés par l'exposition au bortézomib et au lénalidomidein vitro[10].

Syst eme immunitaire et vieillissement

De nombreuses données suggerent des modifications fonctionnelles et une dérégulation du systeme immunitaire liées à l'^age, résumées sous le terme

« immunosénescence », favorisant le développement d'infections, de cancer et de pathologies auto-immunes [11]. Les principales modifications sont l'involution thymique, l'altération des réponses cellulaires T et B, une diminution de la diversité de répertoire des lymphocytes T, une augmentation des populations mémoires, le déséquilibre des immunoglobulines en faveur des IgG et IgA, une inflammation chronique, appelée inflamm-aging, et une mauvaise capacité de réponse aux nouveaux antigenes (conduisant notamment à une altération des réponses vaccinales).

Toutes ces données biologiques soutiennent l'hypothese que le myélome est lié à une prolifération de plasmocytes clonaux permise par un systeme immunitaire vieillissant et inhibé voire corrompu. Les mécanismes soutenant ce dysfonction- nement immunitaire restent incompletement élucidés, mais certains aspects simplifiés peuvent^etre schématisés (figure 1).

Standards actuels

en premiere ligne des patients inéligiblesa la greffe

Melphalan, prednisone et bortézomib : le schéma VMP

Le melphalan est le premier agent alkylant actif contre le myélome. Utilisé depuis les années 1960 en monothérapie puis en association avec la prednisone dans le

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schéma MP, il est la base des premieres combinaisons approuvées en Europe. Si le schéma MP + thalidomide n'est aujourd'hui plus utilisé, l'association MP et bortézomib (Velcade1) VMP constitue l'un des deux standards remboursés en 2020. L'étude VISTA a démontré la supériorité de VMP sur MP en termes de réponse, de taux de réponse complete, de temps jusqu'à progression et de survie globale[12]. Les premieres tentatives pour améliorer ce schéma se sont révélées peu concluantes : le remplacement du melphalan par de la thalidomide (VTP), du bortézomib par du carfilzomib (KMP) ou l'adjonction de thalidomide (VMPT) n'ont pas permis de bénéfice significatif[13–15]. Il aura fallu attendre l'immunothérapie pour que la combinaison quadruple VMP + daratumumab détr^one le VMP[16].

Lénalidomide + dexaméthasone : le schéma Rd

L'analysefinale de l'essai FIRST, publiée en 2018, confirme la supériorité en survie globale, avec une médiane de pres de 60 mois, d'une combinaison double lénalidomide + dexaméthasone (Rd) administrée jusqu'à progression par rapport au schéma triple MPT[17]. Second standard remboursé (depuis 2017) en premiere ligne chez les patients inéligibles au traitement intensif, Rd a l'avantage d'^etre une association tout orale et bien tolérée. Cette étude comportait également un bras Rd 18 (avec arr^et du traitement planifié à 18 mois), dont les résultats de survie ne sont pas différents de ceux du bras Rd continu. Ce schéma de référence se voit déjà challengé par des combinaisons triples, voire quadruples, avec adjonction, à la base Rd, d'inhibiteurs du protéasome et/ou d'anticorps monoclonaux notamment.

Bortézomib, lénalidomide et dexaméthasone : le schéma VRd

Le groupe SWOG a comparé de fac¸on randomisée les combinaisons Rd et VRd dans l'étude SWOG-S0777[18], le bortézomib y étant administré par voie intraveineuse et en bihebdomadaire. Le schéma VRd est supérieur à Rd en termes de réponse, de survie sans progression (43versus 30 mois) et de survie globale (75 versus FIGURE1

Dysfonction B

Hypogammaglobulinémie Infections

Augmentation lgG et lgA Altération des réponses B

Diminution de la diversité des LT Altération des réponses T

PD-1 / PD-L1

TGFβ − IL-10 TGFβ − IL-10 VEGF

MDSC

T - Lymphocytes NK - Lymphocytes Cellules MDSC

Système immunitaire et myélome chez les sujets âgés +

+

Immunosénescence Inflamm-aging

Cellules dendritiques Dysfonction T, NK

Système immunitaire et myélome chez les sujets âgés.

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64 mois). M^eme si la population était sélectionnée, avec un^age médian de 63 ans, ces résultats ont permis l'approbation européenne du VRd en avril 2019. Ce schéma est en attente de remboursement en France et devrait devenir dans un futur tres proche le standard de choix pour des patients ^agés fit (non fragiles).

L'existence d'une toxicité non négligeable (avec 82 % d'effets indésirables de grade3 pour le bras VRd) fait envisager une adaptation posologique chez les sujets^agés : un schéma VRd lite, avec des cycles de 35 jours ou le lénalidomide est administré à 15 mg/j de J1 à J21 et le bortézomib à 1,3 mg/m2à J1, J8, J15 et J22, semble associé à une bonne efficacité et une tolérance plus acceptable[19]. Malgré l'adaptation posologique, ce schéma VRd reste difficile à prescrire chez les patients tres^agés et fragiles : asthénie, neuropathie périphérique, troubles digestifs sont les principaux effets indésirables limitant. La prescription prolongée du bortézomib est généralement impossible du fait de la toxicité neurologique et la poursuite par le lénalidomide seul ne permet pas un contr^ole tres prolongé de la maladie.

Intér^ et de

l'immunothérapie en premiere ligne hors autogreffe

Lénalidomide

Les IMIDs ont une double action, combinant un effet anti-tumoral direct et une activité d'immunomodulation améliorant les réponses immunes, notamment en favorisant la prolifération des cellules effectrices[20]. Chez des patients traités par Len/Dex pour un MM de haut risque, les taux de lymphocytes T CD4+, de cellules T CD8+ et de cellules NK augmentent progressivement sous traitement[21]. Au-delà de l'aspect quantitatif, il a été démontré que le lénalidomide augmentait la cytotoxicité des cellules NK et l'activité des lymphocytes T cytotoxiques[22]et inhibait la prolifération et la fonction des cellules T régulatrices [23]. Il peut également réguler négativement l'expression de PD-L1 sur les plasmocytes tumoraux et celle de PD-1 sur les cellules T cytotoxiques et NK[24], luttant ainsi contre l'action inhibitrice de la synapse immune descheck-pointsimmunitaires.

Enfin, des données récentes suggerent que le lénalidomide augmente la capacité des cellules dendritiques plasmacytoïdes à produire de l'IFN-a, interféron de type 1 à activité antitumorale et antivirale[25].

Anticorps anti-CD38

Le daratumumab est le premier anticorps monoclonal thérapeutique ciblant l'antigene CD38, hautement et uniformément exprimé sur les plasmocytes tumoraux. Le CD38 est une glycoprotéine transmembranaire de type II qui a des fonctions d'adhésion, de transduction du signal intracellulaire et une activité enzymatique. Le CD38 n'est pas uniquement exprimé par les plasmocytes ; il est présent à la surface des lymphocytes T et B régulateurs, les cellules NK, les monocytes et les cellules MDSC. Le CD38 a par ailleurs été impliqué dans la voie métabolique de nicotinamide adenine dinucléotide (NAD) qui aboutit à un enrichissement de la niche médullaire en adénosine (ADO). L'ADO y agirait comme un modulateur favorisant la survie des plasmocytes tumoraux et entraînant une immunosuppression au niveau du microenvironnement médullaire.

En se liant à un épitope unique du récepteur du CD38, le daratumumab agit par une double action :

– une activité antitumorale gr^ace à l'induction d'apoptose par l'effetcross-linking médié par le fragment Fc, à la phagocytose par les macrophages [26] et à la cytotoxicité médiée par le complément et/ou par les anticorps[27];

– une activité immunomodulatrice en éliminant les lymphocytes T et B régulateurs et les MDSC, en favorisant l'expansion des lymphocytes T CD4helpers et CD8 mémoires, ce qui créé une réaction immunitaire adaptative[28].

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Son activité dans le myélome serait également en lien avec une inhibition de l'activité enzymatique du CD38, résultant en une diminution de l'activité immunosuppressive de l'ADO au sein de la niche médullaire.

Un autre anticorps anti-CD38, l'isatuximab, qui cible un épitope différent, est en cours de développement. Il a été retenu de par sa capacité à entraîner directement la mort des plasmocytes, médiée par la voie de l'apoptose caspase-dépendante mais aussi la voie lysosomiale [29]. Cette action indépendante des cellules immunitaires effectrices, est également indépendante du fragment Fc. Il a également été décrit que l'isatuximab induisait la production d'especes réactives de l'oxygene, contribuant à la mort cellulaire.

Mécanismes de résistance et synergie

La résistance à l'action antitumorale directe de l'isatuximab peut passer par le niveau d'expression du CD38 : en effet, l'activité de l'isatuximab est en partie liée à l'expression du CD38. Les immunomodulateurs (IMiD) augmentent les effets apoptotiques directs de l'isatuximab et certaines données soutiennent que cette synergie est plus marquée avec le pomalidomide qu'avec le lénalidomide[29].

Les IMiD peuvent également limiter la résistance aux anti-CD38 qui passeraient par les effets immunomodulateurs. Chez les patients traités par daratumumab en monothérapie, le taux de lymphocytes T activés diminue lorsque les patients progressent[28]. Des analyses de séquenc¸age (RNAseq en single cell) chez des patients traités par daratumumab + IMiD révelent que les patients répondeurs ont une expression de CD28 supérieure sur les lymphocytes T, une proportion supérieure de T mémoires, et une signature de macrophages activés M1[30], ce qui témoigne de l'activation de l'immunité antitumorale.

Au-delà de la cytotoxicité médiée par les anticorps et les macrophages, les IMiD augmentent l'expression du CD38 sur les lymphocytes T régulateurs, ce qui majore l'inhibition des T reg induite par l'isatuximab[31].

Devant une progression sous traitement à base d'anticorps anti-CD38, l'ajout de certaines molécules, comme l'ATRA, capables de réverser la résistance pourrait

^

etre une option[32]. Leswitchpour un autre anti-CD38 avec un mode d'action différent pourrait aussi^etre envisagé, mais malgré les différences fonctionnelles entre les différentes molécules[33], la question de la résistance croisée entre les anticorps anti-CD38 reste entiere.

Perspectives

Les deux schémas actuels remboursés en premiere ligne, VMP et Rd, sont nettement optimisés par l'arrivée de l'immunothérapie et notamment des anticorps anti-CD38 en premiere ligne. Les études ALCYONE [16]et MAIA [34]

démontrent que l'adjonction du daratumumab aux schémas VMP et Rd améliorent les taux de réponses, la survie sans progression et la survie globale pour l'étude ALCYONE. Les résultats de l'étude MAIA sont particulierement spectaculaires : la projection de la PFS médiane dans le bras Dara-Rd est de l'ordre de 60 mois, ce qui correspond aux meilleurs résultats jamais montrés en premiere ligne de traitement chez des sujets non éligibles à l'autogreffe (figure 2), rivalisant avec les résultats des approches des sujets jeunes incluant le traitement intensif avec autogreffe. Ces études ont permis l'obtention d'autorisations de mise sur le marché (AMM) européennes des schémas VMP + daratumumab et Rd + daratumumab en ao^ut 2018 et en octobre 2019 respectivement. Ces schémas devraient apparaître dans les futures recommandations européennes qui seront mises à jour en 2020 et pourront^etre prescrits en France lorsque les autorités de santé auront évalué les dossiers afin defixer les niveaux de service médical rendu, d'amélioration de ce service médical rendu puis les prix de remboursement.

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L'efficacité sans précédent de la combinaison Dara-Rd est le reflet clinique de la synergie anticorps anti-CD38 et IMiD démontrée in vitro. Les inhibiteurs du protéasome ne sont pour autant pas exclus du paysage thérapeutique des patients nouvellement diagnostiqués non éligibles au traitement intensif. Deux études randomisées évaluent actuellement l'adjonction d'un anticorps anti-CD38 au schéma VRd : l'isatuximab dans l'essai IMROZ et le daratumumab administré par voie sous-cutanée dans l'essai CEPHEUS. L'histoire des avancées thérapeutiques dans le myélome fait supposer que les quadruplets feront mieux que les triplets.

Une meilleure approche semble^etre la comparaison du nouveau standard anti- CD38 + Rd à anti-CD38 + VRd, en intégrant un objectif de duréefixe de traitement, soit prédéfinie au départ, soit décidée selon la profondeur de la réponse par la maladie résiduelle : c'est le schéma du futur essai randomisé de l'IFM, en premiere ligne des sujets^agés non fragiles.

A la surenchere des combinaisons évaluées dans des essais cliniques à visée d'enregistrement, on pourrait opposer des études stratégiques sur le long terme, intégrant des aspects médico-économiques et de qualité de vie, évaluant la possibilité d'interrompre à un moment des traitements prévus jusqu'à progression.

A l'heure ou d'autres techniques d'immunothérapie telles les anticorps bispécifiques, les T-cell engagers ou les cellules T à récepteurs antigéniques chimériques (CAR T) font l'objet d'un développement exponentiel et accéléré dans le domaine de la rechute, on peut anticiper qu'elles viendront dans un futur proche challenger les anticorps anti-CD38 des la premiere ligne, dans un objectif de traitement de duréefixe pour une meilleure qualité de vie.

Des études biologiques complémentaires seraient utiles pour évaluer l'intér^et et la place de l'immunothérapie en premiere ligne : des les premiers cycles d'induction, pendant toute la phase du traitement ou seulement en maintenance ? Peut-on monitorer par des analyses poussées des sous-populations lymphocytaires (ou d'autres marqueurs) la santé du systeme immunitaire et l'efficacité de l'immunothérapie pour un patient donné ? La restauration d'un systeme immunitaire efficient devrait-elle entrer dans l'évaluation de la réponse au m^eme FIGURE2

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Comparaisons indirectes des durées médianes de PFS Traitement de 1ère ligne des patients inéligibles à l’autogreffe

60 50 40 30 20 10 0

Schémas à base de VMP Schémas à base de RD VMP

(VISTA) VMP

(ALCYONE) Dara-VMP (ALCYONE) Rd

(FIRST) Rd (SWOG) Rd

(MAIA) RVD-lite RVD

(SWOG) Dara-RD (MAIA)

Comparaisons indirectes des durées médianes de PFS.

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titre que la maladie résiduelle qui mesure précisément la quantité de cellules tumorales persistantes ? Pourrait-on ainsi prédire un échappement aux traitements immunomodulateurs afin d'agir de fac¸on préemptive ? La poursuite des anticorps monoclonaux jusqu'à progression comme dans les études MAIA et ALCYONE sera-t-elle un jour remise en cause par des études d'arr^et de traitement ? Ces avancées sont majeures car elles impactent la survie des patients, mais cibler et explorer le systeme immunitaire génere de nombreuses questions. Y répondre est un challenge complexe d'autant que d'autres influenceurs de l'immunité tels le microbiote, l'alimentation, le stress ou l'activité physique peuvent s'inviter dans la danse.

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Patients non éligibles à la greffe

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Hématologie-vol.26n8supplément2,mai2020

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