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Master

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La responsabilité civile des parents pour les dommages causés par leurs leurs enfants en droit privé européen

LABAUME, Antoine

Abstract

Aperçu comparatif de la responsabilité civile des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs dans les différents pays d'Europe. La présente contribution s'intéresse ensuite aux fondements de cette responsabilité afin de proposer une solution de lege ferenda.

LABAUME, Antoine. La responsabilité civile des parents pour les dommages causés par leurs leurs enfants en droit privé européen. Master : Univ. Genève, 2013

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:38046

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(2)

Leading cases du droit privé et du droit international privé européen Sous la direction du Professeur Thomas KADNER GRAZIANO

La responsabilité civile des parents pour les dommages causés par leurs enfants en

droit privé européen

Mémoire de séminaire de maîtrise

Antoine L

ABAUME

Travail achevé le 22 avril 2013

(3)

Déclaration contre le plagiat

Chainaz, le 22 avril 2013

J'atteste que dans ce texte toute affirmation qui n'est pas le fruit de ma réflexion personnelle est attribuée à sa source et que tout passage recopié d'une autre source est en outre placé entre guillemets.

Antoine LABAUME

(4)

Table des matières

Déclaration contre le plagiat ... I

Table des matières ... II

Table des abréviations ... IV

Bibliographie ... VI

Introduction ... 1

I. Un aperçu comparatif de la responsabilité des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs en droit privé européen ... 2

A. Les conditions relatives aux parents ... 3

1. L’autorité sur l’enfant ... 3

a) L’autorité d’un point de vue matériel ... 3

b) L’autorité d’un point de vue formel ... 4

2. La cohabitation ... 4

a) La cohabitation au sens matériel ... 5

b) La cohabitation au sens juridique ... 5

3. Analyse de l’exemple à l’aune des conditions relatives aux parents ... 6

B. Les conditions relatives à l’enfant ... 6

1. L’âge de l’enfant ... 7

a) Un régime de responsabilité indépendant de l’âge de l’enfant ... 7

b) La variation du régime de responsabilité en fonction de l’âge de l’enfant ... 7

2. Le fait dommageable de l’enfant ... 8

a) Un fait illicite et/ou objectivement fautif ... 9

b) Un fait causal ... 11

3. Analyse de l’exemple à l’aune des conditions relatives à l’enfant ... 11

a) L’âge de Laurent ... 11

b) Le fait dommageable de Laurent ... 12

C. La faute des parents, nœud gordien de leur responsabilité ... 13

1. Une responsabilité pour faute, sans renversement du fardeau de la preuve... 14

a) L’absence de présomption de faute dans les dispositions spéciales ... 14

(5)

b) La responsabilité des parents dans les pays sans dispositions

spéciales sur celle-ci ... 15

2. Une responsabilité pour faute présumée ... 18

a) L’exonération par la preuve de l’absence de faute de surveillance ... 18

b) L’exonération par la preuve de l’absence de faute de surveillance et d’éducation ... 20

c) L’exonération par la preuve de l’absence de causalité ... 22

3. Une responsabilité sans faute ... 23

4. Analyse de l’exemple à l’aune de la faute des parents et solution ... 25

a) Pas de responsabilité des parents de Laurent ... 26

b) Responsabilité des parents de Laurent pour le coup de poing seulement ... 28

c) Responsabilité des parents de Laurent pour le coup de poing et le placage ... 29

II. La responsabilité des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs : fondements, conditions, proposition de lege feranda ... 29

A. Les fondements de la responsabilité des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs ... 30

1. Les arguments fondant la responsabilité des parents ... 30

a) Arguments rejetés ... 30

b) Arguments acceptés ... 31

2. Les arguments adoucissant la responsabilité des parents ... 32

B. Détermination des conditions de la responsabilité des parents . 32 1. Les conditions relatives aux parents... 32

2. Les conditions relatives à l’enfant ... 33

3. L’exonération des parents ... 33

C. Proposition de lege ferenda ... 34

Conclusion ... 35

Annexe : bases légales de la responsabilité des parents ... 36

(6)

Table des abréviations

ABGB Allgemeines Bürgerliches Gesetzbuch (Code civil autrichien)

A.C. Law Reports: Appeal Cases (Droit anglais)

al. alinéa(s)

art. article(s)

ATF Arrêts du Tribunal fédéral suisse (Recueil officiel) BGB Bürgerliches Gesetzbuch (Code civil allemand) BW Burgerlijk Wetboek (Code civil hollandais) CCB Código Civil Brasileiro (Code civil brésilien) CCC Code civil chinois, Livre VIII

CCE Codigo civil español (Code civil espagnol) CCF Code civil français

CCG Code civil grec

CCI Codice civile italiano (Code civil italien) CCS Code civil suisse (RS 210)

cf. confer

chap. chapitre(s)

ch. chiffre(s)

consid. considérant(s)

COS Loi fédérale complétant le code civil suisse (Code des obligations) (RS 220)

Cr. App. R. (S.) Criminal Appeal Reports (Sentencing) (Droit anglais) DCFR Draft Common Frame of Reference (Cadre Commun

de Référence) éd. éditeur(s) ou édition

E.R. English Reports (Droit anglais) et al. et alii (et les autres)

etc. et cetera

EWHC England and Wales High Court (transcript, neutral citation) (Droit anglais)

hyp. hypothèse(s)

(7)

JCP Juris-Classeur périodique (La Semaine Juridique), édition générale (LexisNexis) (Droit français)

KC Kodeks cywilny (Code civil polonais)

let. lettre(s)

LORPM LEY ORGÁNICA 5/2000, de 12 de enero, reguladora de la responsabilidad penal de los menores (Loi organique espagnole réglant la responsabilité pénale des mineurs)

L.R. Law Reports (Droit anglais)

n. numéro(s) de paragraphe

n° numéro

nbp. note(s) de bas de page

NJW Neue Juristische Wochenschrift (Droit allemand) OZ Občanský zákoník (Code civil tchèque)

p. page(s)

PCC Power of Criminal Courts (Sentencing) Act 2000 (Droit anglais)

PETL Principles of European Tort Law (Principes du Droit Européen de la Responsabilité Civile)

ph. phrase(s)

Q.B. Law Reports : Queen’s Bench (Droit anglais)

Q.B.D. Law Reports : Queen’s Bench Division (Droit anglais) RS Recueil systématique du droit fédéral suisse

sec. section(s)

ss et suivant(e)s

SZ Sammlung Zivilsachen (Droit autrichien)

v. versus

W.L.R. Weekly Law Reports (Droit anglais)

§ paragraphe(s)

(8)

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(12)

Introduction

C’est l’heure de la récréation. Sur le terrain de sport du collège qu’il fréquente, Laurent, âgé de 13 ans, participe à une partie de rugby organisée par ses camarades, sous l’œil attentif d’un surveillant.

Arnaud, âgé aussi de 13 ans, saisit soudain le ballon et se prépare à marquer l’essai. Laurent s’élance et, par un placage parfaitement conforme aux règles du jeu, parvient à arrêter Arnaud dans sa course.

Malheureusement, Arnaud tombe mal et se blesse à l’œil1. Il subit des frais médicaux et perd l’usage de son œil. Dans cette situation, les parents de Laurent (qui sont mariés et vivent ensemble) sont-ils responsables du dommage causé par leur enfant à son camarade ? N’est-ce pas plutôt le collège qui doit répondre d’un tel dommage ? Ou bien encore, Arnaud ne doit-il pas supporter seul les conséquences de cet accident ? La réponse à ces questions change-t-elle si le collège est un pensionnat ? Et qu’en est-il si Laurent n’a pas effectué un placage conforme aux règles du jeu, mais a profité de l’occasion pour décocher un magistral coup de poing au visage d’Arnaud, qu’il ne supporte pas ? Enfin, l’analyse doit-elle changer si Laurent, au lieu d’avoir 13 ans, est âgé de 17 ans ?2

Si la responsabilité des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs est suffisamment bien établie dans la majorité des pays européens pour constituer une « règle européenne commune »3, son régime et ses conditions d’application sont en revanche très différents d’un pays à l’autre et méritent donc d’être présentés à l’aide d’un aperçu comparatif des ordres juridiques européens (I). Cet aperçu portera d’abord sur la Suisse (art. 333 al. 1 CCS4), lieu de rédaction de la présente étude, puis sur l’Allemagne (§

832 al. 1 BGB), dont la culture juridique a inspiré celle de la Suisse.

La France (art. 1384 al. 4 et 7 CCF) présente un intérêt particulier, car

1 État de fait tiré, et partiellement adapté, de l’arrêt : Cour de Cassation Française 2ème Chambre Civile 10.05.2001 (arrêt Levert), JCP 2001 II 10613.

2 Cet état de fait et ses variantes serviront d’illustration aux différentes étapes de cette étude. S’agissant du placage, la question d’une éventuelle acceptation des risques du rugby par la victime ne sera pas traitée, car nous considèrerons que le dommage dépasse en gravité ce que l’enfant pouvait accepter.

3 GALAND-CARVAL : Comparative Report, Part I, n. 18, in : SPIER, p. 289 ss.

4 Pour le texte des bases légales, voir infra l’annexe.

(13)

ses solutions sont uniques en Europe. L’Italie (art. 2047 et 2048 CCI) s’en rapproche cependant par certains aspects. A l’inverse, l’Angleterre et la Suède ne connaissent pas de règles particulières régissant la responsabilité des parents, tandis que l’Autriche (§ 1309 ABGB) s’apparente à de tels systèmes en raison de son régime de responsabilité sans renversement du fardeau de la preuve. En Hollande (art. 6:169 BW), en Pologne (art. 427 KC) et en Espagne (art. 1903 al.

2 et 6 CCE, art. 3 et 61 ch. 3 LORPM), l’âge de l’enfant emporte des conséquences importantes sur le régime de responsabilité, alors qu’il ne le modifie pas dans les droits tchèque (sec. 422 OZ) et grec (art.

923 CCG). Ensuite, un survol d’Israël, du Brésil (art. 932 ch. I et 933 CCB), qui a effectué la première codification complète de droit civil au 21e siècle5, et de la Chine (art. 32 CCC) permettra d’apporter un regard mondial sur la question. Enfin, il faudra considérer les solutions supranationales, telles que les Principles of European Tort Law6 (art. 6:101 PETL) ou le Draft Common Frame of Reference7 (art. VI.-3:104 DCFR). En raison de l’imperfection de la traduction française des PETL8, la version anglaise de ces deux textes et de leurs commentaires sera privilégiée.

Devant la grande diversité des solutions révélée par cet aperçu comparatif, il sera alors nécessaire de s’intéresser aux fondements de la responsabilité des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs, afin de pouvoir en déterminer les conditions et proposer une solution de lege ferenda (II).

I. Un aperçu comparatif de la responsabilité des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs en droit privé européen

Pour que naisse la responsabilité des parents, aussi bien ceux-ci (A) que l’enfant lui-même (B) doivent remplir certaines conditions.

Ensuite, il reste généralement aux parents la possibilité de s’exonérer,

5 BRÜGGEMEIER,p. 203.

6 PETL, p. 2 ss ; voir MORETEAU, p. 19 ss, pour la version française.

7 VON BAR/CLIVE, p. 3083 ss, concernant la responsabilité civile ; voir UNIVERSITÄT OSNABRÜCK,p. 28 ss pour la version française.

8 KADNER GRAZIANO, p. 237.

(14)

à moins que le fardeau de la preuve d’une éventuelle faute ne repose sur la victime (C)9. Il faut noter ici que les droits anglais, suédois et israélien ne connaissant pas de régime spécial de responsabilité des parents pour les dommages causés par leurs enfants, cette responsabilité ne sera abordée qu’au moment de l’étude de la faute et de l’exonération des parents10.

A. Les conditions relatives aux parents

Dans la quasi-totalité des pays, les parents doivent exercer une certaine autorité sur l’enfant (1), à laquelle s’ajoute parfois l’exigence d’une cohabitation avec celui-ci (2). L’analyse de l’exemple doit donc débuter par celle des conditions relatives aux parents de Laurent (3).

1. L’autorité sur l’enfant

Selon les pays, l’autorité est considérée d’un point de vue matériel (a) ou formel (b).

a) L’autorité d’un point de vue matériel

Le droit suisse est le seul ordre juridique qui utilise un critère purement matériel, à savoir la notion de chef de famille. Il s’agit de la personne exerçant en fait l’autorité domestique, celle-ci n’étant pas fondée sur des critères formels (lien de parenté, autorité parentale), qui ne constituent que des indices11. Ainsi, si les parents sont en principe chefs de famille, cette qualité peut aussi appartenir à d’autres personnes, mêmes morales (colonie de vacances, internat)12.

Le droit espagnol se rapproche cependant du droit suisse. En effet, malgré la référence à la notion de garde et d’autorité parentale, l’autorité factuelle sur l’enfant est seule pertinente13.

9 Afin de circonscrire l’étendue de cette étude, les conditions générales de préjudice et de causalité (sauf spécificité propre au sujet), le concours de responsabilités et les actions récursoires, ainsi que le cas particulier de l’enfant- employé ne seront pas traités.

10 Cf. infra I.C.1.b.

11 FUCHS, p. 161-162 ; WERRO, n. 422-423.

12 WERRO,n. 427.

13 MARTÍN-CASALS/RIBOT/SOLÉ FELIU : Spanish Law, n. 73 et 87, in : MARTÍN- CASALS, p. 369 ss.

(15)

b) L’autorité d’un point de vue formel

En droit allemand, l’obligation de surveillance (Aufsichtspflicht) pèse sur le titulaire de l’elterliche Sorge14, tandis qu’elle découle en droit autrichien de la détention de l’Obsorge15 (§ 1309 et § 177 ss ABGB). Le droit français fonde la responsabilité des parents sur l’autorité parentale16. Il en va de même pour les droits néerlandais17, polonais18, italien19 et grec20.

Le droit tchèque retient la seule qualité de parent pour imposer le devoir de surveillance, avec cependant une atténuation de celui-ci pour le parent qui n’aurait pas la garde de l’enfant21.

Les PETL, en utilisant le terme anglais de charge, semblent se référer à la garde de l’enfant22, sans préciser s’il s’agit d’une notion matérielle ou formelle. Le DCFR reste général avec le terme de parental care, à comprendre vraisemblablement comme l’autorité parentale, au vu du commentaire du texte23.

2. La cohabitation

La plupart des ordres juridiques se content du critère de l’autorité des parents sur l’enfant (notamment : l’Allemagne24, l’Autriche25, la Hollande26, la République tchèque27). Cependant, certains pays exigent en plus la cohabitation des parents avec l’enfant au moment de l’acte dommageable, celle-ci pouvant répondre à un critère matériel (a) ou juridique (b).

14 ALBILT, p. 14.

15 ABGB-HUBER, § 1309 n. 2.

16 GALLIOU-SCANVION, n. 185 ; BRUN, n. 416.

17 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 8, in : SPIER, p. 171 ss ; VAN BOOM : Dutch Law, n. 38, in : MARTÍN-CASALS, p. 293 ss.

18 NESTEROWICZ/BAGIŃSKA : Polish Law, n. 8, in : SPIER, p. 185 ss.

19 COMANDÉ/NOCCO : Italian Law, n. 53, in : MARTÍN-CASALS, p. 265 ss.

20 DACORONIA : Greece, n. 16, in : KOZIOL/STEININGER, p. 324 ss.

21 HRÁDEK : Czech Law, n. 71, in : MARTÍN-CASALS, p. 111 ss.

22 PETL, p. 114.

23 VON BAR/CLIVE,p. 3436-3437.

24 NIBOYET, p. 133 : cet auteur montre que les possibilités d’exculpation des parents leur offrent une protection suffisante et prennent en compte la réalisation ou non d’une cohabitation avec l’enfant.

25 ABGB II/1-REISCHAUER, § 1309 n. 2.

26 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 8, in : SPIER, p. 171 ss.

27 TICHY : Czech Law, n. 9, in : SPIER, p. 55 ss.

(16)

a) La cohabitation au sens matériel

La Suisse applique de nouveau un critère purement matériel, à savoir le ménage commun avec l’enfant. Celui-ci suppose que le chef de famille et l’enfant habitent ensemble pendant un certain temps, afin de laisser au premier « suffisamment de temps pour prendre les mesures adéquates de prévention des atteintes »28. La durée des vacances scolaires d’automne suffit par exemple pour admettre le ménage commun29.

Pour les mineurs capables de discernement (art. 2048 CCI), l’Italie exige aussi la vie commune avec les parents30. Cependant, la vie commune ne cesse que si l’enfant n’habite plus avec ses parents, et que ce fait ne leur est pas imputable à faute ; elle ne cesse pas en cas d’interruption temporaire31. On est donc proche d’un concept juridique de cohabitation.

Enfin, le droit espagnol regarde de façon très factuelle avec qui le mineur se trouvait quand le fait dommageable s’est produit32. C’est aussi ce que semble faire le droit brésilien (art. 932 ch. I CCB).

b) La cohabitation au sens juridique

La France est le seul pays à retenir explicitement une notion juridique de la cohabitation33, en la définissant comme « la résidence habituelle de l'enfant au domicile des parents ou de l'un deux »34. Comme le relève alors un auteur, cette condition ne permet plus en principe aux parents de s’exonérer ; c’est donc l’autorité parentale seule qui devient la « condition essentielle » de la responsabilité des parents35.

28 WERRO,n. 423.

29 Tribunal Fédéral Suisse 05.11.1953, ATF 79 II 350, 353, consid. 2 (admis implicitement).

30 DONATO BUSNELLI/BARGELLI/COMANDÉ : Italian Law, n. 16, in : SPIER, p. 159 ss.

31 DONATO BUSNELLI/BARGELLI/COMANDÉ : Italian Law, n. 18, in : SPIER, p. 159 ss.

32 MARTÍN-CASALS/RIBOT/SOLÉ FELIU : Spanish Law, n. 87, in : MARTÍN-CASALS, p. 369 ss.

33 LEBRETON, n. 48.

34 Cour de Cassation Française 2ème Chambre Civile 20.01.2000, JCP 2000 II 10374.

35 LE TOURNEAU,n. 7428-1.

(17)

3. Analyse de l’exemple à l’aune des conditions relatives aux parents

Dans le cas de Laurent, celui-ci se trouve au collège. Ses parents ont l’autorité parentale sur lui, et sa résidence habituelle se trouve bien chez eux. Ainsi, sous l’angle des droits français et italien, les conditions d’autorité parentale et de cohabitation (ou vie commune) sont remplies36. La condition d’autorité parentale est donnée pour l’Allemagne, l’Autriche, la Hollande, la Pologne, la Grèce et le DCFR. Les parents ont bien le devoir de surveillance exigé par le droit tchèque. La condition de garde des PETL est satisfaite. Enfin, l’enfant vit bien de façon effective chez ses parents (en dehors du temps passé à l’école) au sens du droit espagnol.

La situation est plus compliquée en droit suisse et appelle une distinction entre l’école et l’internat. S’agissant de l’école, le ménage commun avec les parents n’est pas interrompu par le temps passé dans celle-ci, et la direction de l’école n’a pas le caractère de chef de famille37. Les conditions relatives aux parents de Laurent sont donc satisfaites. En revanche, l’internat forme un ménage commun, soumis à l’autorité domestique de l’encadrement qui endosse la qualité de chef de famille38. Cette qualité appartient donc successivement et exclusivement aux parents et à la direction de la pension39. Si donc Laurent est dans un pensionnat, ses parents ne sont plus chefs de famille, et leur responsabilité ne peut pas être engagée sur le fondement de l’art. 333 al. 1 CCS.

B. Les conditions relatives à l’enfant

Après les conditions relatives aux parents, l’âge de l’enfant (1) et son fait dommageable (2) sont autant de facteurs déterminants pour la responsabilité des parents. L’étude de l’exemple montrera l’importante de ces composantes (3).

36 Cf. par exemple, pour le droit français : Cour de Cassation Française 2ème Chambre Civile 10.05.2001 (arrêt Levert), JCP 2001 II 10613.

37 FUCHS, p. 239.

38 Tribunal Fédéral Suisse 23.01.1918, ATF 44 II 7, 8-9 ; FUCHS, p. 238 ; BSK ZGB I-GIRSBERGER, art. 333 CCS n. 2 ; CR CC I-WESSNER,art.333CCS n. 7.

39 Tribunal Fédéral Suisse 15.03.1945, ATF 71 II 61, 63, consid. 1.

(18)

1. L’âge de l’enfant

L’âge de l’enfant40 ne modifie pas le régime de responsabilité des parents dans la plupart des ordres juridiques (a), mise à part quelques exceptions remarquables (b).

a) Un régime de responsabilité indépendant de l’âge de l’enfant

Les droits suisse, allemand, français, tchèque, grec, brésilien et chinois, ainsi que les PETL, ne distinguent pas le régime de responsabilité des parents en fonction de l’âge de l’enfant. Celui-ci sera seulement pertinent pour apprécier l’étendue du devoir de surveillance (voire d’éducation) des parents41.

Malgré la référence du paragraphe 1308 ABGB (auquel renvoie le paragraphe 1309 ABGB) aux Unmündige (enfants de moins de 14 ans ; § 21 ch. 2 ABGB), le droit autrichien n’effectue pas non plus de différence entre les enfants âgés de plus ou moins 14 ans ; l’applicabilité du paragraphe 1309 ABGB dure tant que le besoin d’éducation et de surveillance subsiste, soit jusqu’à 18 ans42.

b) La variation du régime de responsabilité en fonction de l’âge de l’enfant

Le droit hollandais instaure trois régimes de responsabilité. Si l’enfant a moins de 14 ans, ses parents encourent une responsabilité stricte43 : en un mot, ils sont toujours responsables44, et ne peuvent pas échapper à leur responsabilité en prouvant l’absence de faute. Si l’enfant a entre 14 et moins de 16 ans, les parents répondent pour faute présumée45. A partir de 16 ans, l’enfant est traité comme un adulte (dans le domaine de la responsabilité civile)46, et les parents ne

40 Dans l’ensemble des ordres juridiques étudiés, la majorité est fixée à 18 ans. Le cas particulier de l’émancipation n’est pas abordé ici.

41 Cf. infra C.

42 Österreichischer Oberster Gerichtshof 27.01.1971, SZ 44/8 ; Österreichischer Oberster Gerichtshof 29.11.2006, n° 7Ob251/06x, disponible sur : www.ris.bka.gv.at/Jus/ (dernière visite le 20 avril 2013) ; HARRER, p. 42 ; ABGB-HUBER, § 1309 n. 12.

43 VAN BOOM : Dutch Law, n. 11, in : MARTÍN-CASALS, p. 293 ss.

44 HONDIUS, n. 3.

45 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 12, in : SPIER, p. 171 ss ; VAN BOOM : Dutch Law, n. 11, in : MARTÍN-CASALS, p. 293 ss.

46 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 9, in : SPIER, p. 171 ss.

(19)

peuvent être responsables que selon les principes généraux de la responsabilité civile, soit pour faute personnelle à prouver par la victime47.

La Pologne connaît deux catégories d’âge. Lorsque l’enfant a moins de 13 ans, les parents sont soumis à une responsabilité pour faute présumée. Au-delà de 13 ans, les parents répondent selon le régime général de la responsabilité civile, en cas de négligence personnelle, à prouver par la victime48.

Le DCFR instaure le même régime, mais avec une limite d’âge fixée à 14 ans49.

L’Espagne connaît un système très particulier depuis 2005. Si la responsabilité des parents est en principe une responsabilité pour faute présumée, il en va bien autrement si l’enfant a plus de 14 ans et a commis un crime ou un délit ; dans ce cas, les parents sont directement et strictement responsables aux côtés de leur enfant50.

Il faut enfin remarquer ici que si le droit italien n’instaure pas de distinction en fonction de l’âge de l’enfant, il connaît cependant deux dispositions légales pour la responsabilité des parents. Leur mise en œuvre dépend de la capacité de discernement de l’enfant, qui se confond avec sa capacité délictuelle. Si celle-ci est donnée, l’art. 2048 CCI est applicable. Dans le cas contraire, on applique l’art. 2047 CCI51. Les conditions d’application de ces deux articles sont partiellement différentes52.

2. Le fait dommageable de l’enfant

S’agissant du fait dommageable de l’enfant, la plupart des pays exigent un fait illicite et/ou objectivement fautif, selon le sens accordé à ces termes dans les différents ordres juridiques (a). Seule la France

47 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 13, in : SPIER, p. 171 ss ; VAN BOOM : Dutch Law, n. 11, in : MARTÍN-CASALS, p. 293 ss.

48 NESTEROWICZ/BAGIŃSKA : Polish Law, n. 6, 7 et 10, , in : SPIER, p. 185 ss.

49 VON BAR/CLIVE,p. 3435-3436.

50 MARTÍN-CASALS/SOLÉ FELIU : Spanish Law, n. 9 et 26, in : SPIER, p. 231 ss ; MARTÍN-CASALS/RIBOT/SOLÉ FELIU : Spanish Law, n. 66-67, in : MARTÍN- CASALS, p. 369 ss.

51 DONATO BUSNELLI/BARGELLI/COMANDÉ : Italian Law, n. 14-16, in : SPIER, p.

159 ss ; COMANDÉ/NOCCO : Italian Law, n. 7 et 42, in : MARTÍN-CASALS, p. 265 ss.

52 Cf. infra I.B.2.a., I.C.2.b.

(20)

(et vraisemblablement les PETL) se satisfait d’un simple fait causal pour admettre la responsabilité des parents (b).

a) Un fait illicite et/ou objectivement fautif

En droit suisse, le fait de l’enfant doit être illicite53 et objectivement fautif54. « On distingue l'illicéité de résultat (Erfolgsunrecht), qui suppose l'atteinte à un droit absolu du lésé, de l'illicéité du comportement (Verhaltensunrecht) »55, qui exige que l'auteur ait « violé une norme de comportement ayant pour but de protéger le bien juridique en cause »56. La faute objective correspond à l’aspect extérieur du comportement, soit la non-conformité volontaire ou par négligence de celui-ci avec le comportement généralement attendu57. Ce critère ne tient pas compte de l’âge de l’enfant ; si ce dernier est incapable de discernement, on doit simplement se demander si son comportement aurait constitué une faute et entraîné sa responsabilité civile, s’il avait été capable de discernement58.

Le droit allemand arrive au même résultat en exigeant une illicéité objective, soit la réalisation des conditions objectives d’un acte illicite (§ 823 ss BGB)59, à moins que l’exécution de cet acte n’exige aussi des éléments subjectifs (par exemple en cas d’escroquerie) qui doivent alors être réalisés60 « au sens naturel »61. A cette condition s’ajoute aussi l’exigence de faute objective, même si elle n’en porte pas le nom. En effet, si le fait dommageable, accompli à la place de l’enfant par un adulte, ne pourrait être qualifié ni d’intentionnel, ni de négligent, la responsabilité des parents ne peut être engagée62.

Selon le droit autrichien, ni l’illicéité de l’acte en tant que violation d’une norme de comportement63, ni le fait qu’un adulte placé

53 OFTINGER/STARK II/1,§22n. 71 ; WERRO,n. 428.

54 OFTINGER/STARK II/1,§22n. 69.

55 Tribunal Fédéral Suisse 18.04.2007, ATF 133 III 323, 330, consid. 5.1.

56 Tribunal Fédéral Suisse 18.10.2006, ATF 133 V 14, 19, consid. 8.1.

57 OFTINGER/STARK I,§5n. 40.

58 OFTINGER/STARK II/1,§18n. 47, § 22nbp. 164.

59 Deutscher Bundesgerichtshof 6. Zivilsenat 24.03.2009, NJW 2009, 1954, consid. 8.

60 NIBOYET, p. 134 ; Palandt-SPRAU, § 832 n. 7.

61 NIBOYET, p. 134.

62 KÖTZ/WAGNER, n. 340.

63 ABGB II/1-REISCHAUER, § 1309 n. 3.

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dans les mêmes circonstances engagerait sa propre responsabilité64, ne sont des conditions de la responsabilité des parents. On n’est donc pas loin du simple fait causal français65. Cependant, il semble qu’il faille malgré tout un Erfolgsunrecht, soit une forme d’illicéité de résultat, caractérisée par l’absence d’Eingriffsrecht66 (légitime défense, etc.).

La Hollande67, l’Italie68 et l’Espagne69 connaissent deux hypothèses en fonction de la capacité délictuelle de l’enfant : si l’enfant a cette capacité, on exigera que son acte engage sa propre responsabilité civile ; si cette capacité lui fait défaut, il faudra un acte objectivement illicite, soit un acte qui engagerait sa propre responsabilité s’il avait la capacité délictuelle. En droit hollandais, l’âge de 14 ans constitue (de façon irréfragable) la limite entre les deux hypothèses70. Il faut aussi ajouter en droit espagnol que si l’acte de l’enfant âgé de 14 ans ou plus (art. 3 LORPM) constitue un crime ou un délit, on passe au régime de responsabilité stricte des parents fondé sur l’art. 61 ch. 3 LORPM71.

Le DCFR (qui ne connaît de régime spécial de responsabilité des parents que pour les enfants de moins de 14 ans72) requiert un comportement qui, à l’aune du standard de conduite d’un adulte prudent, constitue une négligence : de nouveau, on se demande si l’enfant serait responsable s’il était majeur73.

Enfin, les droits polonais74 (pour les mineurs âgés de moins de 13 ans ; au-delà de cet âge, les parents sont responsables selon le principe général de responsabilité civile, indépendamment de la qualification du fait de l’enfant75), tchèque76 et grec77 exigent un acte illicite (soit un acte contraire au droit).

64 ABGB-HUBER, § 1309 n. 3.

65 Cf. infra I.B.2.b.

66 ABGB II/1-REISCHAUER, § 1309 n. 3.

67 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 10 et 12, in : SPIER, p. 171 ss ; VAN BOOM : Dutch Law, n. 41-42, in : MARTÍN-CASALS, p. 293 ss.

68 COMANDÉ /NOCCO : Italian Law, n. 56, in : MARTÍN-CASALS, p. 265 ss.

69 MARTÍN-CASALS/RIBOT/SOLÉ FELIU : Spanish Law, n. 89-90, in : MARTÍN- CASALS, p. 369 ss.

70 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 10 et 12, in : SPIER, p. 171 ss ; VAN BOOM : Dutch Law, n. 41-42, in : MARTÍN-CASALS, p. 293 ss.

71 Cf. supra I.B.1.b.

72 Cf. supra I.B.1.b.

73 VON BAR/CLIVE,p. 3435-3436.

74 NESTEROWICZ/BAGIŃSKA : Polish Law, n. 9, in : SPIER, p. 185 ss.

75 Cf. supra I.B.1.b.

(22)

b) Un fait causal

Depuis 1984, la jurisprudence française applique l’art. 1384 al. 4 CCF à la lettre : « il suffit que [le mineur] ait commis un acte qui soit la cause directe du dommage invoqué par la victime »78. Les conditions d’illicéité et de faute objective sont oubliées ; seule la causalité doit être prouvée. « Licite ou illicite, correct ou incorrect »79, l’acte causal de l’enfant entraîne la responsabilité des parents. Ceux-ci deviennent ainsi responsables du « fait [même] normal » du mineur,

« qui n’engagerait point la responsabilité d’un adulte ! »80.

Il faut mentionner ici les PETL, dont la solution n’est pas claire. Il semble cependant que l’on s’oriente là aussi vers une responsabilité pour simple fait causal81.

3. Analyse de l’exemple à l’aune des conditions relatives à l’enfant Il faut examiner l’âge (a) et le fait dommageable de Laurent (b).

a) L’âge de Laurent

Dans le cas de Laurent, son âge n’a d’influence directe sur le régime de responsabilité de ses parents qu’en Hollande, en Pologne, en Espagne et selon le DCFR. Si Laurent a 13 ans, ses parents encourront ainsi une responsabilité causale stricte en Hollande, une responsabilité pour faute présumée en Pologne, en Espagne et selon le DCFR. S’il a 17 ans, ses parents seront soumis au régime général de responsabilité pour faute, à prouver par la victime, en Hollande (dans ce pays, la faute serait présumée si Laurent avait 15 ans, par exemple), en Pologne et selon le DCFR ; en droit espagnol, la faute demeurera présumée, et si Laurent a commis un crime ou un délit, ses parents seront même directement et strictement responsables. S’agissant de l’Italie, il est hautement probable que Laurent ait à 13 ans la capacité

76 HRÁDEK : Czech Law, n. 87, in : MARTÍN-CASALS, p. 111 ss.

77 KERAMEUS : Greek Law, n. 4, in : SPIER, p. 133 ss.

78 Cour de Cassation Française Assemblée Plénière 09.05.1984 (arrêt Fullenwarth), JCP 1984 II 20255 ; confirmé notamment par l’arrêt Cour de Cassation Française 2ème Chambre Civile 10.05.2001 (arrêt Levert), JCP 2001 II 10613.

79 LEBRETON, n. 83.

80 LE TOURNEAU,n. 7434-7435.

81 PETL, p. 115.

(23)

délictuelle (il doit être capable de comprendre les implications de ses actes et de s’autodéterminer82) : l’art. 2048 CCI sera donc applicable (sinon, c’est l’art. 2047 CCI qui entrera en ligne de compte). Pour les autres pays, l’âge de Laurent ne changera pas le régime de responsabilité applicable.

b) Le fait dommageable de Laurent

Reste encore à examiner le fait dommageable de Laurent, soit d’abord le placage infligé à Arnaud dans le pur respect des règles du jeu. Sous l’angle du droit suisse, la condition d’illicéité est remplie, car il y a atteinte à un droit absolu d’Arnaud, son intégrité corporelle : on a donc une illicéité de résultat. Il manque en revanche la condition de faute objective, car Laurent a adopté un comportement conforme à ce qui aurait été attendu d’un individu raisonnable placé dans les mêmes circonstances. La responsabilité des parents de Laurent ne peut donc pas être engagée. Il en va de même pour le droit allemand, car, bien que l’illicéité objective soit vraisemblablement donnée (atteinte à l’intégrité corporelle ; § 823 al. 1 BGB), un adulte placé dans les mêmes circonstances n’encourrait aucune responsabilité, en l’absence de toute négligence. Cette conclusion s’impose aussi selon le DCFR.

Concernant les droits hollandais, italien et espagnol, et quelque soit l’âge et la capacité délictuelle de l’enfant, les parents ne peuvent pas non plus être responsables. En effet, si l’enfant a la capacité délictuelle, il n’a commis aucune faute et n’est donc pas responsable ; et s’il n’a pas cette capacité, sa responsabilité ne serait pas engagée dans le cas contraire, comme on vient de le voir. Enfin, la condition d’illicéité posée par les droits polonais, tchèque et grec n’est pas remplie non plus : Laurent n’a pas adopté de comportement contraire au droit. Ainsi, dans l’ensemble des ordres juridiques mentionnés ci- dessus, le placage de Laurent n’entraîne pas la responsabilité des parents ; la libération intervient au niveau du fait dommageable de l’enfant. En revanche, la jurisprudence française (et vraisemblablement les PETL) permet de continuer l’analyse, puisque la condition de fait causal est remplie : Laurent a bien causé

82 COMANDÉ/NOCCO : Italian Law, n. 2, in : MARTÍN-CASALS, p. 265 ss.

(24)

directement par son placage le dommage subi par Arnaud. Il en va de même pour le droit autrichien : Arnaud ayant subi une lésion sans Eingriffsrecht de Laurent, il y a bien un Erfolgsunrecht.

La variante, soit le coup de poing porté volontairement au visage d’Arnaud, mérite en revanche une toute autre analyse. Sans avoir besoin de rentrer dans les détails de chaque ordre juridique, il est ici évident que l’acte est illicite (que ce soit une illicéité objective, de comportement ou de résultat) et objectivement fautif. Si Laurent a la capacité délictuelle, il engage sans aucun doute sa propre responsabilité ; et s’il ne l’a pas, une personne capable de discernement, un adulte, l’engagerait dans les mêmes circonstances.

De plus, il est très vraisemblable qu’un tel acte constitue un délit en droit pénal espagnol ; si donc Laurent a 17 ans, l’art. 61 ch. 3 LORPM trouve à s’appliquer. Enfin, l’acte de Laurent est bien causal dans la survenance du dommage. Dans cette variante, on constate donc que la condition relative au fait dommageable est remplie pour tous les droits étudiés.

C. La faute des parents, nœud gordien de leur responsabilité

Après les conditions relatives aux parents et à l’enfant, la faute des premiers et son traitement par les différents ordres juridiques constituent vraiment l’élément clé de la mise en œuvre de leur responsabilité, et surtout de leur exonération. La situation la plus confortable pour les parents est l’absence de présomption de faute, cette dernière devant être prouvée par la victime. Ce régime s’applique principalement dans les pays qui ne connaissent pas de dispositions spéciales sur la responsabilité des parents, et qui méritent donc une attention particulière à ce stade (1). Cependant, dans la plupart des droits, la faute des parents est présumée, et ceux-ci sont responsables, à moins qu’ils ne prouvent avoir satisfait à leur devoir de surveillance, voire d’éducation (2). Enfin, certains pays connaissent un régime de responsabilité causale, ne laissant quasiment aucun espoir de salut aux parents (3). L’analyse de la faute des parents de Laurent permettra de terminer la résolution de l’exemple (4).

(25)

1. Une responsabilité pour faute, sans renversement du fardeau de la preuve

L’absence de renversement du fardeau de la preuve de la faute est rare dans les pays qui disposent d’un régime spécial de responsabilité des parents pour le fait de leur enfant (a). En revanche, cette situation est la règle dans les pays qui ne connaissent pas de tel régime (b).

a) L’absence de présomption de faute dans les dispositions spéciales Parmi les ordres juridiques déjà étudiés, seuls l’Autriche, la Hollande, la Pologne et le DCFR instaurent une responsabilité pour faute à prouver par la victime, et ce uniquement à partir d’un certain âge de l’enfant pour les trois derniers droits.

En droit autrichien, si l’enfant a moins de 14 ans, la victime ayant la capacité délictuelle doit d’abord prouver qu’elle ne l’a pas amené (veranlasst) à accomplir l’acte dommageable (§ 1308 ABGB ; cette disposition n’est pas applicable à la victime n’ayant pas la capacité délictuelle, soit ayant moins de 14 ans83). Ensuite, toute victime doit prouver la violation objective du devoir de surveillance des parents et sa causalité dans la survenance du dommage. Si cette preuve est apportée, c’est alors aux parents de prouver l’absence de faute84. Le devoir de surveillance est apprécié en fonction des circonstances particulières de chaque cas concret85, avec pour référence les mesures qu’auraient prises ex ante des parents raisonnables86. L’âge de l’enfant et son caractère, la dangerosité de la situation mais aussi les contraintes professionnelles et les autres obligations familiales des parents sont autant de critères à prendre en compte87. Doctrine et jurisprudence insistent enfin sur l’importance d’accorder à l’enfant grandissant toujours plus de liberté d’action : une surveillance « auf

83 ABGB-WITTWER/HUBER, § 1308 n. 2.

84 Österreichischer Oberster Gerichtshof 06.10.1961, SZ 34/137 ; ABGB II/1- REISCHAUER, § 1309 n. 9 ; ABGB-HUBER, § 1309 n. 13.

85 ABGB II/1-REISCHAUER, § 1309 n. 4 ; ABGB-HUBER, § 1309 n. 14.

86 Österreichischer Oberster Gerichtshof 26.08.2004, n° 3Ob128/04a, disponible sur : www.ris.bka.gv.at/Jus/ (dernière visite le 20 avril 2013) ; HARRER,p. 42 ; ABGB-HUBER, § 1309 n. 7.

87 Österreichischer Oberster Gerichtshof 27.01.1971, SZ 44/8 ; Österreichischer Oberster Gerichtshof 29.11.2006, n° 7Ob251/06x, disponible sur : www.ris.bka.gv.at/Jus/ (dernière visite le 20 avril 2013) ; ABGB II/1- REISCHAUER, § 1309 n. 4 ; ABGB-HUBER, § 1309 n. 5-6.

(26)

Schritt und Tritt » n’est donc pas exigée pour les grands enfants88, et si un événement dommageable survient dans le cadre de la liberté d’action accordée à l’enfant, cela n’implique pas d’office une surveillance insuffisante89.

Pour les enfants de plus de 13 ans en Pologne, 14 ans selon le DCFR et 16 ans en Hollande, ces ordres juridiques ne connaissent pas de dispositions spéciales régissant la responsabilité des parents. Une éventuelle responsabilité de ceux-ci repose donc sur les principes généraux de la responsabilité civile pour faute personnelle, à prouver par la victime90. Ainsi, l’art. 415 KC s’appliquera en Pologne, et ne sera retenu en pratique que si les parents ont commis une négligence grave91. En Hollande, ce sera l’art. 6:162 BW92, et selon le DCFR, l’art. VI.–3:10293. Comme ces responsabilités se fondent sur les règles générales, elles ne méritent pas une analyse plus approfondie dans cette étude : comme le dit un auteur, les parents ne sont en principe pas responsables94.

b) La responsabilité des parents dans les pays sans dispositions spéciales sur celle-ci

L’Angleterre ne connait pas de régime spécial de responsabilité des parents pour le dommage causé par leur enfant mineur : ceux-ci ne sont donc pas, de façon générale, responsables d’un tel dommage95. Ils peuvent cependant être exceptionnellement responsables pour leur fait propre, s’ils ont expressément autorisé la commission du dommage, s’ils ont ratifié l’acte de l’enfant96, ou si le dommage causé par l’enfant est dû à leur contrôle négligent sur ce dernier au regard de

88 Österreichischer Oberster Gerichtshof 15.01.2004, n° 2Ob154/02i, disponible sur : www.ris.bka.gv.at/Jus/ (dernière visite le 20 avril 2013) ; ABGB II/1- REISCHAUER, § 1309 n. 4 ; ABGB-HUBER, § 1309 n. 4.

89 HARRER,p. 41.

90 Cf. supra I.B.1.b.

91 NESTEROWICZ/BAGIŃSKA : Polish Law, n. 6, in : SPIER, p. 185 ss.

92 HAENTJENS/DU PERRON : Dutch Law, n. 13, in : SPIER, p. 171 ss ; VAN BOOM : Dutch Law, n. 11, in : MARTÍN-CASALS, p. 293 ss.

93 VON BAR/CLIVE,p. 3435.

94 HONDIUS, n. 3.

95 Common Bench 23.05.1860, Moon v. Towers, 141 E.R. 1306, 1308 ; PERCY, n.

2-298 ; Clerk & Lindsell on Torts-DUGDALE, n. 8-173 ; ROGERS, n. 24-18.

96 Common Bench 23.05.1860, Moon v. Towers, 141 E.R. 1306, 1308.

(27)

l’acte qui a causé le dommage97. Cette troisième hypothèse est la plus fréquente et celle qui se rapproche le plus des solutions civilistes déjà étudiées, bien que demeurant très différente. Elle est une forme du tort of negligence qui est soumis à des conditions strictes, à prouver par la victime (comme pour toute autre action)98. Il faut d’abord une situation de duty of care, c’est-à-dire une situation où le droit attache une responsabilité au carelessness. Il faut ensuite la violation du duty of care et un rapport de causalité entre celle-ci et le dommage, ce dommage ne devant enfin pas être trop imprévisible99. S’agissant du duty of care, le droit anglais est très libéral. En effet, tant qu’il n’est pas établi qu’une personne qui a été négligente avait un duty of care envers la personne lésée, il ne peut y avoir de responsabilité : « a man is entitled to be as negligent as he pleases towards the whole world if he owes no duty to them »100. Et il n’y a de duty of care que quand une personne se trouve vis-à-vis d’une autre dans une telle position que quiconque faisant preuve de bon sens reconnaîtrait immédiatement que, s’il ne se conduisait pas avec la vigilance ordinaire exigible au regard des circonstances, il créerait un danger d’atteinte à l’intégrité corporelle ou à la propriété de l’autre personne101. Cela suppose une proximité spatiale ou relationnelle directe entre le débiteur et le bénéficiaire du duty of care102 ; la lésion de ce bénéficiaire doit pouvoir être raisonnablement et probablement anticipée103. Appliquée aux parents, la notion de duty of care n’est donc pas absolue mais dépend des circonstances concrètes. Ainsi, des parents ayant des enfants en bas âge (sans « road sense » suffisant) et habitant au bord d’une route passante ont un duty of care envers les usagers de cette route : ils doivent faire en sorte que leurs enfants ne puissent accéder sans surveillance à la route, puisqu’il est prévisible qu’ils provoquent

97 ROGERS, n. 24-18.

98 PERCY, n. 2-298 et 5-22.

99 Clerk & Lindsell on Torts-DUGDALE, n. 8-04.

100 Court of Appeal 03.02.1893, Le Lievre and Dennes v. Gould, [1893] 1 Q.B. 491, 497.

101 Court of Appeal 30.07.1883, Heaven v. Pender, Trading as West India Graving Dock Company, [1882-1883] L.R. 11 Q.B.D. 503, 509.

102 House of Lords 26.05.1932, M'Alister (or Donoghue) (Pauper) v. Stevenson, [1932] A.C. 562, 580-581.

103 House of Lords 05.08.1942, Hay or Bourhill v. Young, [1943] A.C. 92, 104.

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