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Fables de La Fontaine (Livres VII à XII) Thèmes et sujets

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Fables de La Fontaine (Livres VII à XII)

Thèmes et sujets

PAR

Christophe Reffait

Agrégé de Lettres modernes Ancien élève de l'École normale supérieure de Fontenay - Saint-Cloud

Presses Universitaires de France

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M A J O R B A C D I R I G É E P A R P A S C A L G A U C H O N ET C O D I R I G É E P A R É R I C C O B A S T

ISBN 2 13 048030 6

Dépôt légal — 1 édition : 1996, août 2 édition corrigée : octobre, 1997

© Presses Universitaires de France, 1996 108. boulevard Saint-Germain, 75006 Paris

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Le travail du fabuliste

LE GENRE A L'ŒUVRE

D ' o ù v i e n n e n t l e s F a b l e s ?

On se trouve les Fables en main et mille questions se posent : comment un genre littéraire peut-il aujourd'hui paraître indisso- ciable d'un auteur ? Comment lire cette ample comédie à cent actes divers (V 1) dont l'apparente variété thématique désoriente? Com- ment comprendre des textes où récit et morale se mêlent, où par- fois le récit intègre la morale, où souvent il l'exorbite ? Et que dire d'un style qui enchante, voire conduit à de multiples contresens tout en paraissant naturel ?

Le Dictionnaire de l'Académie donne en 1694 à l'article

« Fable », revu par La Fontaine, la signification plurielle du mot : la fable est d'abord une histoire, dans les deux sens du terme, chose feinte, c'est-à-dire fiction, et argument, c'est-à-dire sujet. Les autres sens tirent le mot dans le champ de l'imaginaire: la Fable est au XVII siècle le nom qu'on donne à l'ensemble des mythes gréco- latins, et elle signifie aussi fausseté, mensonge; c'est d'ailleurs le sens conservé de nos jours. L'adjectif «fabuleux» recouvre à peu près ces acceptions, quoique l'adjectif signifie « inventé » avant de signifier «merveilleux».

On voit que cette définition de la fable est générale à défaut d'être générique ou formelle: elle ne dit rien de ce que sont les textes qu'on nomme fables. La fabula est histoire, fiction, affabula- tion. L'étymologie en fait une histoire parlée, une parole soumet-

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tant l'auditeur à son charme, et invitant par suite son conteur à l'orner. Si la fable comme fabula peut donc être le nom de toute fic- tion, la fable dans le sens des Fables est au contraire une forme bien définie de séduction.

Appliqué aux Fables de La Fontaine et de ses prédécesseurs, le nom d'apologue est plus savant et moins incertain. L'apologue est l'illustration allégorique d'une leçon de morale explicite. Est-ce à dire qu'il faut trouver un autre nom, par exemple le seul mot fable, pour les récits où la moralité n'est pas expressément formulée?

Cela réclamera précision. Quant au caractère allégorique de l'apo- logue (il représente des animaux voire des végétaux se comportant comme des humains), il est lié à l'oralité et aux origines ancestrales de la fable.

L'apologue a une double origine occidentale et orientale. Les fables grecques attribuées au poète légendaire Ésope (VI siècle avant J.-C.) forment un ensemble d'environ trois cents courts récits en prose, assortis d'une moralité. Elles ont été rassemblées, mises en vers mais aussi retravaillées dans leur schéma narratif par Phèdre à Rome au I siècle. Du côté indien, le Panchatantra, recueil de contes animaliers, a inspiré Pilpay ; avec d'autres sources perses et arabes, l'ensemble ainsi constitué était connu en Occident à la fin du Moyen Age. Les fonds occidental et oriental s'interpénè- trent d'ailleurs puisque les fables d'Ésope pourraient avoir une parenté arabe et que les fables de l'Arabe Locman sont inspirées d'Ésope. Remarquons simplement la contiguïté générique de l'apo- logue avec le conte animalier ancestral, dont le schéma narratif est principalement celui de la prédation (où l'on remarque d'ailleurs que l'allégorie animale induit son propre argument), mais qui ne comporte pas de morale explicite.

Au Moyen Age, les fables sont christianisées et deviennent des exempla allégués pour illustrer les prêches. Elles s'inscrivent paral- lèlement dans la littérature sous forme d'ysopets, de lais ou de fabliaux, donc en langue vulgaire versifiée. Les contes animaliers comme le conte politique Le Roman de Renart dérivent aussi du genre.

La naissance de l'imprimerie renforce la pratique pédagogique de la fable et permet de fixer d'autres contes animaliers dont s'est servi La Fontaine. C'est la Renaissance qui restitue à Ésope et Phèdre leurs fables, auxquelles s'ajoute l'apport humaniste italien du XVI siècle. Notons à ce propos la contiguïté avec la fable du genre de

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l' emblème, né de l'humanisme et en vogue aux XVI et XVII siècles : l'emblème est constitué d'une gravure suivie d'une fable et de son commentaire, le tout surmonté d'un titre. On trouve alors des recueils mixtes de fables et d'emblèmes mais ce dernier est fixé dans sa forme et ne peut avoir la finalité politique, éventuellement sati- rique, qu'a la fable à partir de la fin du XVI siècle.

Que retenir de tout cela ? Principalement que le genre de l'apo- logue touche à l'oralité, à l'allégorie et à la pédagogie. Qu'il est suf- fisamment pratiqué pour qu'à l'époque de La Fontaine, ou plutôt peu après la parution de son premier recueil, Antoine Furetière (1619-1688), Charles Perrault (1628-1703) ou encore Fénelon (1651-1715) composent aussi des fables, même si l'apologue ne semble pas un genre assez noble pour apparaître parmi les formes recensées dans L'Art poétique de Boileau en 1674. Enfin le fait que la généalogie du genre soit aujourd'hui rendue opaque par la réus- site de La Fontaine n'en est que plus admirable.

I. É c r i r e de la p o é s i e d a n s l a s e c o n d e m o i t i é d u V I I siècle

Lorsqu'il publie son premier recueil de Fables en 1668, La Fon- taine a déjà offert à son protecteur Nicolas Fouquet une version de son poème Adonis ; cette idylle est publiée retouchée en 1669, bien après l'arrestation du surintendant en 1661. A partir de 1659 et pour célébrer la construction et les arrangements du château de Vaux-le-Vicomte par Fouquet, il a entamé Le Songe de Vaux, et a publié en 1662 l'élégie Aux nymphes de Vaux, avant de composer une Ode au Roi pour la défense de son protecteur emprisonné.

Enfin en 1665, La Fontaine a publié une première partie de ses Contes et nouvelles en vers, grivoiseries inspirées de Boccace et de l'Arioste, dont les autres parties paraîtront en 1666 et 1671 et qu'il sera amené à renier par pénitence un an avant de mourir. Les Nou- veaux contes de 1674 seront d'ailleurs trop licencieux pour ne pas être interdits de vente.

Avant la publication du deuxième recueil des Fables (livres VII à XI; 1678), La Fontaine publie en 1669 le roman Les Amours de

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Psyché et de Cupidon, œuvre teintée de préciosité, épousant la tra- dition pastorale et mythologique, et dans un autre registre il fait paraître un Recueil de poésies chrétiennes et diverses ainsi que le Poème de la captivité de Saint Malc en 1673. Le livret Daphné écrit pour Lulli en 1674 ainsi que Astrée, tragédie lyrique de 1691, ont aussi peu de succès que la comédie Le Rendez-vous de 1683.

Pour comprendre pourquoi de cet œuvre pluriel il ne semble res- ter que les Fables, on parle parfois de leur originalité au regard de la poésie du XVII siècle. Il est plus juste de dire que le fabuliste y a inclus des formes poétiques et une prosodie pratiquées dans le siècle et demi qui a précédé, et qu'il les a ajustées de manière frap- pante à un projet de peinture morale de la société qui relève d'un souci propre à la fin du Grand Siècle. En conséquence, il est plus juste de montrer que d'autres ouvrages de La Fontaine sont trop inféodés à des traditions voire des conventions littéraires pour avoir autant de relief que les Fables.

De fait, même si Adonis et Les Amours de Psyché sont réputés assez originaux, il apparaît que les élégies amoureuses ou même les Contes de La Fontaine sont vassaux de l'esthétique précieuse qui a dominé le siècle depuis L'Astrée d'Honoré d'Urfé en 1607-1624 à Clélie de Madeleine de Scudéry, qui est paru dans les années qui ont suivi la Fronde (1649) jusqu'au couronnement de Louis XIV. De même, sa poésie religieuse suit le modèle de Malherbe (1555-1628).

Que sert-il qu'on se contrefasse?, demande le fabuliste dans Le Loup et le Renard (XII 9), et cette question s'applique à lui-même.

Les Fables tireraient bel et bien leur valeur du fait que La Fontaine est resté fidèle à un projet qui semble le rapprocher de moralistes comme La Rochefoucauld ou La Bruyère, en y subordonnant l'hé- ritage poétique précieux et en y insufflant sa propre créativité sty- listique et son talent de conteur.

III. L a p r é f a c e

A quoi sert une préface ? L'auteur peut y exprimer des remercie- ments, demander la bienveillance du lecteur ou encore préciser son projet. La préface des Fables est tout cela à la fois. Elle est d'abord

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une captatio benevolentiae et s'ouvre sur le mot indulgence. Il s'agit de s'excuser du projet clairement annoncé par le titre original, Fables choisies, mises en vers par Jean de La Fontaine : la transpo- sition des pièces d'Ésope et de ses successeurs en vers français. Ce projet est conforté par un choix raisonné d'aînés auxquels La Fon- taine va faire une révérence intéressée.

► 1re section: (...)

Le maître de notre éloquence auquel le fabuliste fait allusion d'entrée est l'avocat Olivier Patru (1604-1681), qui avait repris en 1659 quelques fables d'Ésope en prose et estimait qu'une trans- position en vers français aurait nui à une qualité essentielle des apologues ésopiques, c'est-à-dire leur brièveté. La Fontaine recon- sidère cet avis tout en tirant sa révérence aux « anciens ». Il convoque d'abord l'exemple de Socrate, qui selon Platon aurait avant sa mort entrepris de mettre en musique, c'est-à-dire de mettre en vers, ces œuvres dont la vertu était de dire la vérité sous une apparence de mensonge. La Fontaine renforce cette référence grecque d'un exemple latin éclatant, celui de Phèdre, dont la briè- veté sera dite extrême alors même qu'il embellit la narration, comme le glisse plus loin le fabuliste. Suivent d'autres recomman- dations, que La Fontaine cite non sans se donner la primeur d'avoir effectué la mise en vers en français moderne: lorsque nos gens y ont travaillé (par exemple les auteurs des ysopets du Moyen Age), la langue était si différente de ce qu'elle est, qu'on ne les doit considérer que comme étrangers.

La seconde partie du titre est tout aussi trompeuse; les Fables que fait paraître La Fontaine ne sont qu'un choix, mais Houdar de la Motte doit écrire dans ses Fables nouvelles en 1719 : quoi qu'il en dise, ce qu 'il nous a laissé à glaner n 'en vaut presque pas la peine, et il a réduit les auteurs qui voudraient le suivre dans son genre à la nécessité d'inventer ou de traiter les mêmes sujets que lui.

► 2e section : (...)

Après deux pages de préface, La Fontaine n'a donc convoqué l'opinion de Patru que pour souligner la nouveauté de sa propre entreprise et suggérer l'impossibilité de l'imiter. Comment surpas- ser La Fontaine ? Peut-être en donnant un tour moins long à cette transposition des fables en français moderne et en vers, tour étant un mot, en l'occurrence une métaphore d'origine précieuse (c'est le

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tour du potier), qui mériterait une analyse lexicologique : c'est ici la manière dont la fable ésopique est mise en vers, et par suite aussi bien son économie que son schéma prosodique. Or rendre concises ces fables versifiées ne suffirait pas pour surpasser La Fontaine. Il a en effet pris soin, sous l'autorité explicite de Quintilien, d'égayer la fable à défaut d'en respecter la concision. On perçoit combien cet égaiement est abstrait ; on voit qu'il fait le caractère inimitable des Fables.

C'est in fine que viennent les arguments les plus forts de cette première moitié de la préface: égayer les fables ésopiques était nécessaire puisqu'elles étaient sues de tout le monde. Toute critique sur la longueur de la fable en vers tombe du même coup. Enfin sous prétexte de définir cet égaiement (dont toute recette paraît néanmoins impossible) et après une triple référence aux anciens, La Fontaine affiche sa véritable ambition. C'est ce qu'on demande aujourd'hui : on veut de la nouveauté et de la gaieté.

► 3e section : Mais ce n'est (...) proviennent d'elles.

Dans un second moment, la préface s'intéresse à la valeur morale et au contenu de l'apologue, c'est-à-dire à son utilité et à sa matière. L'apologue et la parabole sacrée ont en commun de montrer la vérité par l'exemple. Et le fabuliste se place sous l'au- torité de Platon pour faire des fables des leçons de sagesse «pro- portionnées» à l'esprit des enfants. En faisant allusion à Promé- thée et au Petit Monde, il trace une équivalence de nature si immédiate entre hommes et bêtes que l'allégorie animale n'est presque plus une allégorie.

► 4e section : J'ai déjà passé (...) bien espéré.

Cela n'a pour fonction que d'amener un autre plaidoyer de l'au- teur sur la forme de ses fables : alors que Ésope et Phèdre ont tou- jours nettement détaché le corps de l'apologue, c'est-à-dire la fable même (le récit), de son âme (la moralité), La Fontaine a décidé de subordonner sa formulation à l'impératif de plaire. Il s'est autorisé à taire la moralité lorsqu'elle était implicitement mais clairement contenue dans le récit, comme dans La Cigale et la Fourmi.

Autre licence donc, et non des moindres, qui permet d'ailleurs d'estimer combien la transition du récit à la moralité est un exer- cice difficile. Or La Fontaine ne fait ici pas autre chose que souli- gner l'art avec lequel il rend agréables des fables sues de tout le

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O n se t r o u v e les F a b l e s e n m a i n et m i l l e q u e s - t i o n s s e p o s e n t : c o m m e n t u n g e n r e l i t t é r a i r e p e u t - i l a u j o u r d ' h u i p a r a î t r e i n d i s s o c i a b l e d ' u n a u t e u r ? C o m m e n t lire cette a m p l e c o m é d i e à

c e n t a c t e s d i v e r s d o n t l ' a p p a r e n t e v a r i é t é t h é m a t i q u e d é s o r i e n t e ? C o m m e n t c o m p r e n d r e d e s t e x t e s o ù r é c i t et m o r a l e s e m ê l e n t , o ù la d é p a s s e ? E t q u e d i r e d ' u n style q u i e n c h a n t e , v o i r e c o n d u i t à d e m u l t i p l e s c o n t r e s e n s t o u t e n p a r a i s s a n t n a t u r e l ?

H u i t d i s s e r t a t i o n s , s y s t é m a t i q u e m e n t a p p u y é e s

s u r la c i t a t i o n d e s v e r s e s s e n t i e l s d e s F a b l e s ,

t e n t e n t d e r é p o n d r e à c e s i n t e r r o g a t i o n s e t f o n t

c o m p r e n d r e la p h i o l o s o p h i e d e c e t t e œ u v r e t o u t

C h r i s t o p h e Reffait e s t a g r é g é d e L e t t r e s

m o d e r n e s et a n c i e n élève d e l ' É c o l e n o r m a l e

s u p é r i e u r e d e F o n t e n a y S a i n t - Cloud.

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