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Génériques des médicaments antiépileptiques

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Texte intégral

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M. Maeder-Ingvar G. B. Foletti

introduction

La préoccupation de restreindre les coûts de la santé nous con­

cerne tous. Comment le patient peut­il être soigné le mieux possible en bénéficiant des progrès de la technologie médi­

cale et du développement des traitements sans escalade des coûts ? Dans le budget global, les médicaments représentent 21% des coûts de la santé en Suisse.1 Le remplacement du médicament original par un générique pourrait être attractif vu le prix inférieur du générique. Le taux actuel de substitution par des génériques est estimé à 63%,2 donc relativement élevé. Dans ce contexte, il faut tenir compte des différents groupes de traitements médicaux, par exemple : antalgiques, anti­infectieux, etc.

épilepsie

L’épilepsie est une maladie chronique avec une prévalence de 1%. Les traite­

ments ne sont en général pas très coûteux mais il s’agit de prescriptions à long terme. De plus, l’épilepsie est une affection où le patient vit avec une incertitude et la menace d’une éventuelle récidive de crises et leurs conséquences aussi bien sur le plan médical que social.

antiépileptiques

Les traitements antiépileptiques ont en général une pharmacocinétique com­

pliquée, et leur effet se développe par le biais de différents mécanismes d’action.

De plus, une interaction entre les médicaments est possible, ce qui peut soit di­

minuer l’effet, soit augmenter les effets indésirables. Les effets secondaires sont en général importants et dose dépendants. Le dosage est individuel et la fenêtre thérapeutique étroite par rapport à d’autres substances. Dans le cadre du suivi médical, le contrôle des crises doit être attentivement surveillé de même que les effets secondaires, ce qui nécessite parfois la mesure des taux sériques pour s’assurer d’une absorption en rapport avec l’effet clinique.3 La perte de contrôle Generics

Generic substitution of antiepileptic drugs (EAD) have limited use because epilepsy is a chronic disease, seizure recurrence has an im­

portant impact of the quality of life and the potential risk of accidents. EADs have a narrow therapeutic window, non negligible side ef­

fects and complex interactions. Bioavailability of generic EADs, tested in healthy men during a limited period of time must be within the 90% IC, in which means that serum levels can range from 80% to 125 % of the original drug.

A slight drop in serum level could increase the risk of seizure recurrence, as indicated by se­

veral publications. Although no formal studies regarding cost effectiveness and the rate of seizure recurrence is available yet, the prevai­

ling consensus recommends not to replace an original antiepileptic drug by a generic, due to the harmful risk of seizure recurrence.

Rev Med Suisse 2010 ; 6 : 907-9

La limitation des coûts de la santé est une des grandes préoc­

cupations dans la pratique de la médecine actuelle. L’expiration du brevet d’un médicament original peut laisser la place à des génériques moins chers. Malheureusement, la biodisponibilité des génériques peut être différente et osciller entre 80 et 125%

de celle des médicaments d’origine. L’épilepsie est une maladie chronique nécessitant un traitement sur le long terme. Les anti­

épileptiques ont en général une fenêtre thérapeutique étroite.

Dans le cadre d’un changement pour un générique, une dimi­

nution des taux du médicament augmente le risque d’une réci­

dive de crises épileptiques avec possibilité de blessure ainsi qu’un impact défavorable sur le plan sociomédical. En conclu­

sion, la modification d’une thérapie, qui a stabilisé la comitialité en substituant le médicament d’origine par un générique, n’est pas conseillée.

Génériques des médicaments antiépileptiques

le point sur…

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5 mai 2010 Dr Malin Maeder-Ingvar

Unité d’épileptologie Service de neurologie

Département des neurosciences cliniques

CHUV, 1011 Lausanne malin.maeder-ingvar@chuv.ch Dr Giovanni B. Foletti Département de neurologie Institution de Lavigny 1175 Lavigny

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du patient lors de la survenue de crises est une problémati­

que journalière. Le patient risque de se blesser, parfois même de manière grave. La récidive peut avoir des consé­

quences sociales et économiques dans le cadre du travail et pour la conduite automobile. Une récidive de crise amène souvent à une consultation médicale, parfois en urgence, et nécessite une hospitalisation dans certains cas.4

génériques

Le brevet d’une substance expire après dix ans. Le prix d’un médicament est fixé en tenant compte du coût de dé­

veloppement. Une partie des gains de l’industrie pharma­

ceutique est réinvestie dans la recherche de nouveaux produits mais aussi dans la formation médicale.5 La biodis­

ponibilité est définie par la fraction de la substance retrou­

vée dans la circulation systémique. Selon l’OMS, pour les génériques, elle doit se situer dans l’intervalle de confian­

ce à 90%. Il en résulte une possible différence des taux sé­

riques des génériques, qui peuvent osciller entre 80 et 125% des concentrations du médicament original. Il peut y avoir une différence de vitesse de dissolution et de demi­

vie, ainsi que des intolérances aux additifs. En plus, la bio­

disponibilité est déterminée sur de petits groupes (mini­

mum douze personnes) de volontaires sains de sexe mas­

culin, pendant une durée limitée (environ douze semaines).

Cette population test n’est donc de loin pas représentative d’une population telle que les différents sous­groupes de patients épileptiques traités (enfants, patients âgés, femmes en âge de procréer, patients avec comédications et/ou co­

morbidités importantes (dysfonction hépatique ou rénale, troubles cognitifs et consommation régulière d’alcool)).4

coûtsdela santé

Dans le cadre d’une épilepsie, l’impact médicosocial est plus important en cas de récidive de crises. Le patient est alors absent du travail ou de l’école. En cas de nécessité, il aura recours à une consultation médicale, parfois en ur­

gence, surtout en cas de blessure. Dans les cas graves, une hospitalisation pourra être nécessaire. La conduite d’un véhicule devra être suspendue, avec des conséquences professionnelles et sociales néfastes. Ces facteurs mènent également à une augmentation indirecte des coûts de la santé.

étudescliniques

Dans la littérature actuelle, on trouve plusieurs indica­

tions montrant que la substitution d’un antiépileptique pour un générique peut être défavorable. Par exemple, pour la lamotrigine (Lamictal), dont le brevet a expiré en 2004 en Suisse, les nombreux génériques mis sur le marché ont oc­

casionné une confusion chez certains patients du fait de leur aspect différent ; de plus, certains génériques n’ont pas été disponibles à long terme. Vu l’index thérapeutique étroit, la substitution d’un médicament original par un gé­

nérique peut conduire à une diminution des taux sanguins et donc à une récidive des crises.4 Au Danemark, un cas, traité par des doses élevées de lamotrigine, a développé,

après substitution par un générique, des effets secondaires sous forme d’un syndrome d’hypersensibilité progressif.6 Au Canada, une augmentation des coûts médicaux a été rapportée lors du passage à des génériques de la lamotri­

gine.7

Concernant la carbamazépine (Tégrétol), une substance fréquemment prescrite sous une forme galénique permet­

tant une libération contrôlée, lors d’une substitution par un générique, l’absorption est plus rapide, ce qui conduit à une augmentation des effets secondaires.8­10

La phénytoïne est une substance avec une cinétique non linéaire et un index thérapeutique très étroit. Les géné­

riques n’ont pas montré une stabilité satisfaisante11 et il en est résulté une diminution des taux sériques avec récidive des crises.12

La substitution du topiramate (Topamax) par de multi­

ples génériques, évaluée sur le plan clinique et économi­

que chez 948 patients (étude de cohorte ouverte), a montré une augmentation des hospitalisations, des lésions surve­

nues dans le cadre de crises et une augmentation des coûts des soins. L’effet était moindre en cas de remplace­

ment par un seul générique.13

Deux ans après l’expiration du brevet du zonisamide (Zonegran) aux Etats­Unis, il y avait dix­sept produits gé­

nériques différents disponibles sur le marché, ce qui a induit une certaine confusion chez les patients et des difficultés pour assurer le traitement à long terme.14

Une étude, effectuée par le biais d’un questionnaire envoyé aux médecins traitants de 50 patients épileptiques bien contrôlés, a montré, après remplacement par des gé­

nériques (phénytoïne, valproate, gabapentine et zonisa­

mide), une augmentation des crises ; chez 21 patients, les taux sériques étaient diminués. L’étude a conclu à un effet défavorable sur la qualité de vie, à une perte de la capa­

cité à conduire et une perte de jours de travail.15

Ainsi, l’expérience accumulée a conduit les organisations d’épileptologues de différents pays, comme l’Angleterre, le Pays de Galles, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne, l’Ecosse, la Suède, les Pays­Bas et les Etats­Unis, à formuler des re­

commandations pour la prescription des génériques d’an­

tiépileptiques, et ceci de manière nuancée et adaptée à la pratique des différents pays.

Au vu de cette littérature, en s’attachant uniquement à des preuves solides on peut retenir deux choses : a) concer­

nant une possible réduction des coûts par le remplacement des génériques, l’analyse nécessaire du rapport coûts­bé­

néfices n’a pas été faite et on ne peut donc pas conclure ;16 et b) concernant la récidive des crises après substitution des médicaments originaux par des antiépileptiques géné­

riques, Perucca17 constate que la relation de cause à effet n’est pas établie.

conclusion

L’utilisation des génériques des antiépileptiques est restreinte, car l’épilepsie est une affection chronique dans laquelle la récidive des crises a un impact important sur la qualité de vie et le risque de blessures. Les antiépilep­

tiques sont des traitements avec une fenêtre thérapeutique étroite, des effets secondaires et des interactions com­

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plexes, à la suite desquels un abaissement des taux sé­

riques peut conduire à la réapparition des crises. Selon le consensus actuel, il n’y a pas d’indication à modifier une thérapie qui a stabilisé la comitialité en remplaçant le mé­

dicament d’origine par un générique. Comme cité dans une

publication récente et d’ailleurs comme règle générale dans la pratique de la médecine : «If it ain’t broke, don’t fix it».5 Par contre, il est possible de débuter un traitement antié­

pileptique par un générique, pour autant que celui­ci soit disponible à long terme.

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5 mai 2010 1 Santé Suisse, 2007.

2 Hamikwka LT. Generic anticonvulsant use in child- ren : Do we have evidence to recommend brand for- mulations ? Arch Neurol 2009;66:1417-8.

3 Streuli RA. Substitution par un générique : à quoi faut-il prêter attention ? Forum Med Suisse 2009;9:849.

4 ** Krämer G, Biraben A, Carreno M, et al. Cur- rent approaches to the use of generic antiepileptic drugs. Epilepsy Behav 2007;11:46-52.

5 ** Yu-tse N. The value of specifying brand name antiepileptic drugs. Arch Neurol 2009;66:6.

6 Sabroe TP, Sabers A. Progressive anticonvulsivant hypersensitivity syndrome associated with change of drug product. Acta Neurol Scand 2008;117:428-31.

7 Le Lorier J, Duh MS, Paradis PE, et al. Economic impact of generic substitution of lamotrigine : Projected costs in the US findings in Canadian setting. Current Med Res Opin 2008;24:1069-81.

8 Oles KS, Penry Jk, Smith LD, et al. Therapeutic bioequivalency study of brand name versus generic carbamazepine. Neurology 1992;42:1147-53.

9 Meyer MC, Straughn AB, Mhatre RM, et al. The re- lative bioavailability and in vivo correlations for four marketed carbamazepine tablets. Pharm Res 1998;15:

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10 Olling M, Mensinga TT, Barends DM, et al. Bioavai- lability of carbamazepine from different products and the occurrence of side effects. Biopharm Drug Dispos 1999;20:19-20.

11 Rosenbaum DH, Rowan AJ, Tuchman L, et al.

Comparative bioavailability of a generic phenytoin and Dilantin. Epilepsia 1994;35:656-60.

12 Burkhardt Rt, Leppik IE, Blesi K, et al. Lower phe- nytoin serum levels in persons switched from brand to generic phenytoin. Neurology 2004;63:1494-6.

13 Duh MS Paradis PE, Latrémouille-Viau D, et al. The

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14 * Berg M. What’s the problem with generic anti- epileptic drugs ? A call to action. Neurology 2007;68:1245- 6.

15 * Berg MJ, Gross RA, Tomaszewski KJ, et al. Generic substitution in the treatment of epilepsy : Case evidence of breakthrough seizures. Neurology 2008;71:525-30.

16 * Heaney DC, Sander JW. Antiepileptic drugs : Ge- neric versus branded treatments. Lancet Neurol 2007;

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17 Perucca E, Albani F, Capovilla G, et al. Epilepsy working group on generic products of antiepileptic drugs. Epilepsia 2006;47(Suppl. 5):16-20.

* à lire

** à lire absolument

Bibliographie

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