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État des lieux complémentaire des pratiques orthophoniques concernant l'évaluation initiale des troubles développementaux du langage écrit

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État des lieux complémentaire des pratiques

orthophoniques concernant l’évaluation initiale des

troubles développementaux du langage écrit

Anne-Laure Hittinger

To cite this version:

Anne-Laure Hittinger. État des lieux complémentaire des pratiques orthophoniques concernant l’évaluation initiale des troubles développementaux du langage écrit : approche d’une méthode d’évaluation professionnelle à travers des entretiens menés auprès de 31 orthophonistes libéraux en Lorraine déjà questionnés en 2003. Médecine humaine et pathologie. 2004. �hal-01893341�

(2)

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(3)

UNIVERSITE HENRI POINCARE, NANCY 1 FACULTE DE MEDECINE DE NANCY

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ECOLE D'ORTHOPHONIE DE LORRAINE

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Directeur: Professeur C.

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ETAT DES LIEUX COMPLEMENTAIRE DES PRATIQUES

ORTHOPHONIQUES CONCERNANT L'EVALUATION

INITIALE DES TROUBLES DEVELOPPEMENTAUX DU

LANGAGE ECRIT

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Approche d'une méthode d'auto-évaluation professionnelle

à

travers des entretiens menés auprès de

31

orthophonistes

libéraux de Lorraine déjà questionnés en 2003

TOME 1: Mémoire

MEMOIRE

Présenté en vue de l'obtention du

CERTIFICAT DE CAPACITE D'ORTHOPHONISTE

Par

Anne-Laure HITTINGER

Juin 2004

MEMBRES DU JURY:

Président: Rapporteur: Assesseurs :

Monsieur X. DUCROCa, Professeur en neurologie

Madame E. LEDERLÉ, orthophoniste

Madame

1.

DECK, orthophoniste

Monsieur P. CLAUDON, psychologue, Docteur en psychopathologie

(4)
(5)

UNIVERSITE HENRI POINCARE, NANCY 1 FACULTE DE MEDECINE DE NANCY

ECOLE D'ORTHOPHONIE DE LORRAINE

Directeur: Professeur C. SIMON

ETAT DES LIEUX COMPLEMENTAIRE DES PRATIQUES

ORTHOPHONIQUES CONCERNANT L'EVALUATION

INITIALE DES TROUBLES DEVELOPPEMENTAUX DU

LANGAGE ECRIT

Approche d'une méthode d'auto-évaluation professionnelle

à

travers des entretiens menés auprès de

31

orthophonistes

libéraux de Lorraine déjà questionnés en 2003

TOME 1: Mémoire

MEMOIRE

Présenté en vue de l'obtention du

CERTIFICAT DE CAPACITE D'ORTHOPHONISTE

Par

Anne-Laure HITTINGER

Juin 2004

MEMBRES DU JURY:

Président: Rapporteur: Assesseurs :

Monsieur X. DUCROCQ, Professeur en neurologie Madame E. LEDERLÉ, orthophoniste

Madame 1. DECK, orthophoniste

Monsieur P. CLAUDON, psychologue, Docteur en psychopathologie

(6)

Mes sincères remerciements,

A Monsieur le Professeur DUCROCQ,

Pour m'avoir fait l'honneur d'accepter de présider mon jury de mémoire.

A Madame Emmanuelle LEDERLÉ,

Qui a accepté de diriger ce mémoire malgré ses nombreuses obligations, Qui n'a épargné ni son temps, ni ses précieux conseils,

Qu'elle soit assurée de ma parfaite gratitude pour son soutien indéfectible qui m'a permis de progresser.

A Monsieur Philippe CLAUDON,

Qui m'a été d'une grande aide, notamment dans les prémices de ce travail de recherche,

Qui s'est montré encourageant et de riche conseil.

A Madame Isabelle DECK,

Pour les manifestations stimulantes de son intérêt et ses observations constructives qui ont enrichi ce travail.

A Muriel BOT,

Qui m'a tenu régulièrement au courant de sa démarche de recherche, qui m'a ensuite guidée tout au long de ce mémoire,

Pour sa disponibilité, ses conseils avisés, ses avis éclairés, son soutien à tous niveaux, son intérêt et son enthousiasme jamais démentis,

Qu'elle sache combien je lui suis reconnaissante de sa précieuse contribution.

A Madame Christine MAEDER, Madame Chantal MONTINET, Mademoiselle Bénédicte SANSEY et Monsieur Vincent MIDOLO,

Pour m'avoir reçue lors d'entretiens préliminaires,

Pour s'être prêtés au jeu des questions-réponses tout en m'éclairant de leurs judicieuses remarques.

Aux 31 orthophonistes libéraux de Lorraine,

Qui ont accepté de me recevoir et de me consacrer de leur temps, Pour leur chaleureux accueil, leur patience et leurs encouragements.

(7)

Mes chaleureux remerciements,

A ma mère et Lili,

Pour leur précieuse aide

lors de la transcription écrite des 31 entretiens réalisés.

A mes parents et à mon frère Mathieu,

Pour leur soutien moral pendant toute la durée de mes études, Pour leur confiance sans faille,

Pour tout le reste.

A Didier,

Pour son aide, notamment en informatique, Pour sa présence,

sa patience inébranlable, son appui de chaque instant.

(8)

SOMMAIRE

INTRODUCTION

PARTIE 1 : ELABORATION DE LA QUESTION DE DÉPART Chapitre 1 : Le cadre général

Chapitre 2: L'ancrage dans une recherche déjà menée

1. La thématique de cette recherche initiale 2. Premiers questionnements issus de "limites" 3. Des limites méthodologiques

Chapitre 3: Les orientations de ma recherche PARTIE 2: LECTURES EXPLORATOIRES Chapitre 1 : Le langage écrit et ses troubles

1. Définitions

2. L'orthographe sous l'angle de la neuropsychologie cognitive 3. Approche socioculturelle et langagière de l'écriture

4. Les « pathologies du langage écrit»,versant orthographe

Chapitre 2: L'évaluation des troubles du langage écrit

1. L'évaluation d'un patient dans le cadre d'un bilan orthophonique 2. Bilan initial des troubles du langage écrit

Chapitre 3 : Recherche d'un outil méthodologique

1. L'observation directe 2. Le questionnaire 3. L'entretien

PARTIE 3: MISE AU POINT DU DISPOSITIF DE RECHERCHE Chapitre 1 : La problématique, les objectifs et les hypothèses

1. Problématique 2. Objectifs 3. Hypothèses

5

6 7 7 8 9 9 11 12 12 18 30 40 45 45 51 65 65 73 77 90 91 91 93 93

Chapitre 2: Choix d'une méthode de recueil de données 95

1. Les outils de recueil de données non retenus: le questionnaire et l'observation 95 2. En quoi l'entretien me semble plus adapté pour répondre à mes objectifs 99 3. Difficultés pouvant être rencontrées au cours d'un entretien 104

Chapitre 3: Constitution d'une population et construction d'un guide

d'entretien 115

1. Constitution de la population 115

(9)

PARTIE 4 : ANALYSE DES CORPUS 139 Chapitre 1 : Analyse en lien avec le premier objectif: approfondissement de l'état des lieux des pratiques orthophoniques de bilan de langage écrit réalisé

en 2003 par M. BOT 141

1. Tentative d'explication des incohérences relevées par M. BOT dans les réponses

au questionnaire initial 142

2. Tentative de réponse aux trois questions posées initialement 190

Chapitre 2 : Analyse en lien avec la seconde hypothèse: l'entretien comme outil favorisant un "retour réflexif" de l'orthophoniste interviewé sur sa propre

pratique 211

1. Apport d'informations nouvelles 211

2. Changements constatés depuis le questionnaire de M. BOT 215

3. "Retour réflexif" induit par l'entretien 220

CONCLUSION

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

TABLES DES MATIERES

ANNEXES

227

231

240

(10)

INTRODUCTION

La loi du 6 mars 2002, portant rénovation des relations conventionnelles entre les professions de santé libérales et les organismes d'Assurance Maladie, a donné le signal d'une nouvelle dynamique de responsabilisation de tous les acteurs de santé.

L'esprit de cette loi est de substituer à une maîtrise quantitative des dépenses de

santé une maîtrise qualitative des soins, notamment par la diffusion de nouveaux outils conventionnels, tels des Accords de Bon Usage des Soins (AcBus) passés avec les instances professionnelles représentatives et des Contrats de Bonne Pratique (CBP) par lesquels les professionnels de santé s'engagent individuellement.

Dans ce contexte, les orthophonistes sont aujourd'hui invités à s'interroger sur

la qualité et l'efficacité de leurs pratiques. Cette démarche n'est pas nouvelle dans

les pays anglo-saxons1, mais elle commence seulement à faire son chemin en

France. Quelques orthophonistes français sont ainsi intervenus pour la première fois

sur le thème «le défi de la validation des pratiques », lors du Se Congrès Européen

du Comité Permanent de Liaison des Orthophonistes Lagopèdes (CPLOL), qui s'est

tenu à Edimbourg, en septembre 2003.

Or, se demander si une rééducation orthophonique est efficace est bien souvent une démarche qui apparaît dès la formation initiale en orthophonie. C'est

pourquoi une discussion à ce sujet avec Muriel BOT, en janvier 2003, m'a

particulièrement interpellée. Cette étudiante en 4e et dernière année d'études

d'orthophonie avait choisi de chercher, à travers son mémoire pour l'obtention du

ceo,

ce qu'implique l'évaluation scientifique de l'efficacité des interventions

orthophoniques dans le cadre particulier des troubles développementaux du langage écrit.

C'est donc avec grand intérêt que j'ai suivi l'évolution de cette recherche. Trouvant ensuite regrettable que ne soient pas exploitées les riches conclusions de

1 Cf. par exemple l'article de Pam ENDERBY, {{ La rééducation orthophonique est-elle efficace? »,

(11)

ce travail, j'ai décidé de consacrer mon mémoire pour l'obtention du Certificat de Capacité en Orthophonie à la poursuite de cette recherche innovatrice.

Je me suis donc appuyée sur les résultats obtenus par M.

BOT

au cours de son

enquête, dans le but d'approfondir son état des lieux des pratiques orthophoniques

concernant l'évaluation initiale des troubles développementaux du langage écrit,

chez quelques orthophonistes libéraux de Lorraine.

Pour commencer, je livrerai une synthèse de mes recherches bibliographiques concernant trois thématiques de mon mémoire:

le versant production du langage écrit et ses troubles: après avoir défini les termes se rapportant à cet aspect du langage écrit, j'exposerai deux points de vue différents, l'orthographe sous l'angle de la neuropsychologie cognitive et l'approche socioculturelle et langagière de l'écriture, puis je décrirai les troubles touchant la production du langage écrit;

l'évaluation du langage écrit: je commencerai par définir ce qu'est un bilan

orthophonique avant d'envisager le bilan initial des troubles du langage écrit suivant trois courants de pensée;

les outils méthodologiques envisagés pour mon enquête, c'est-à-dire l'observation directe, le questionnaire et l'entretien.

Suite à cette partie concernant mes lectures exploratoires, j'exposerai ma problématique ainsi que mes objectifs et mes hypothèses.

J'annoncerai ensuite quelle a été la méthodologie mise en œuvre pour ma recherche ainsi que la population qu'elle a visée.

Enfin, j'analyserai les résultats de mon enquête et tenterai de déterminer si mes deux objectifs de départ ont été atteints.

(12)

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-

Partie

1 :

Ela6oration de la question de départ

l '

Chapitre

1:

Le cadre genéral

Chapitre 2 : L'ancrage dans une recherche déjà

menée

-1.jThematique âe cette recherche initiale

2:Premiers questionnements issus de "limites" 3. Des limites méthodOlogiques

'

e hapit re'3 : Les orientations de ma

-recherche

Partie

2:

Lectures exploratoires

Partie

3:

Mise au point du dispositif de rècherche

Partie

4:

Analyse des corpus

\

(

(13)

Avant d'entrer dans ce travail de recherche proprement dit, il convient de définir le cadre dans lequel il s'inscrit: j'exposerai rapidement la politique actuelle de maîtrise des dépenses de santé et ses conséquences pour les professionnels de santé que sont les orthophonistes. Par ailleurs, j'expliquerai en quoi ce travail de recherche se place dans la lignée du mémoire qui l'a précédé et dont il se veut une suite. J'annoncerai enfin les orientations de ma recherche.

Chapitre 1·

Le cadre général

Responsabiliser tous les acteurs de santé est le principal objectif de la loi du 6 mars 2002 qui modifie les relations conventionnelles entre les professions de santé libérales et les organismes d'Assurance-Maladie. Concrètement, les législateurs entendent substituer à une maîtrise quantitative des dépenses de santé une maîtrise qualitative des soins, notamment par la création de nouveaux outils conventionnels tels des contrats et des accords, ainsi que la mise en place de dispositifs incitatifs pour les professionnels. C'est pourquoi l'année 2003 consacre la qualité des soins comme axe majeur de la régulation du système de santé en France avec l'envoi à

tous les professionnels de santé d'un Contrat de Bonne Pratique (CBP),

conformément à l'avenant du 18 décembre 2002.

Les orthophonistes, comme tous les autres professionnels de santé, sont donc encouragés à s'interroger sur la qualité et l'efficacité de leurs interventions.

S'interroger sur la qualité et surtout l'efficacité d'une rééducation orthophonique est, me semble-t-il, une démarche qui apparaît déjà au cours de la formation initiale. Quel étudiant ne se demande-t-il pas si les rééducations qu'il a pu mener aux cours de stages ont permis de faire progresser les patients? N'échappant pas à cette légitime interrogation, j'ai pensé pouvoir y trouver une réponse le jour où, alors que j'étais

moi-même étudiante de 3eannée, une étudiante de 4e année (fin d'études du CCO),

Muriel BOT, m'a parlé de son sujet de mémoire, en janvier 2003. Mon

questionnement initial a rapidement évolué puisque j'ai alors compris que cette interrogation, que je ne pensais être que le fruit d'un manque d'expérience et

(14)

d'assurance, s'est en fait révélée être une préoccupation générale et plus particulièrement une préoccupation des pouvoirs de santé.

Chapitre 2'

L'ancrage dans

une

recherche

déjà

menée

Très intéressée par les interrogations et la démarche de Muriel BOT, j'ai alors suivi l'évolution de sa réflexion jusqu'à l'aboutissement de sa recherche et la

soutenance de son mémoire pour l'obtention du

eeo

en juin 2003.

1.

La thématique de cette recherche initiale

Muriel BOT a tenté dans un premier temps de répondre à la question:

«comment aborder l'évaluation scientifique de l'efficacité des interventions orthophoniques dans le cadre particulier des troubles du langage écrit? ».

Le fruit d'une réflexion sur cette question de départ a conduit Muriel BOT à la modifier: elle s'est alors plutôt demandé ce qu'impliquait une évaluation scientifique de l'efficacité des interventions orthophoniques dans le domaine de l'évaluation initiale des troubles du langage écrit chez l'enfant. Il lui est en effet rapidement apparu qu'elle devait faire des choix, qu'elle ne pouvait traiter tous les aspects des questions qu'elle soulevait au fur et à mesure de l'avancement de sa recherche et ce, pour une question de temps. Elle a donc cherché à m'associer autant que possible à son travail de recherche, afin que je puisse peut-être le poursuivre dans mon mémoire de fin d'études. Mon sujet de mémoire s'est donc imposé de lui-même quand il s'est agi de m'engager à mon tour dans un travail de recherche: il me fallait poursuivre ce travail si bien engagé, reprendre les données obtenues et les conclusions auxquelles était parvenue Muriel BOT afin de pousser plus loin la réflexion.

Ayant souhaité faire un état des lieux de la notion d'évaluation et des pratiques d'orthophonistes libéraux concernant l'évaluation initiale des troubles

(15)

développementaux du langage écrit, Muriel BOT a envoyé un questionnaire à tous les orthophonistes libéraux de Lorraine. Elle a choisi cet outil dans le but de recueillir les dires des professionnels sur leurs pratiques.

2.

Premiers questionnements issus de "limites"

A partir des conclusions auxquelles est parvenue M. BOT au terme de dix mois de recherche, il m'a semblé nécessaire, dans un premier temps, de relever toutes les incohérences, imprécisions et manques mis en évidence dans les réponses au questionnaire.

L'analyse des réponses a permis à M. BOT de mettre en évidence « des

représentations hétérogènes et "limitées" de la notion d'évaluation chez les orthophonistes répondants », ce qui l'a conduite à s'interroger sur les différences de terminologie présentes au sein de la profession.

Pour ce qui concerne les pratiques, Muriel Bot a remarqué qu'il «semble

exister un "décalage" entre les pratiques orthophoniques et la littérature scientifique ». D'après elle, ce décalage met en évidence une insuffisance des données de la littérature relatives aux troubles secondaires du langage écrit qui, au dire des orthophonistes répondants, sont les principaux troubles rencontrés sur le terrain.

Par ailleurs, les orthophonistes répondants disaient utiliser d'autres critères

diagnostiques que les résultats aux tests, critères qui ne sont pas trouvés dans la

littérature. Cette constatation a conduit M. BOT à s'interroger sur « le choix des

critères de jugement» qui pourrait être fait dans les études tentant de mesurer

(16)

3.

Des limites méthodologiques

Les limites méthodologiques de cette première étude concernent d'abord la population de l'enquête: la population visée se limite d'une part aux orthophonistes de Lorraine, pour des raisons financières. Les résultats obtenus ne peuvent donc en

aucun cas être généralisés à la France entière. D'autre part, les répondants au

questionnaire ne sont pas représentatifs a priori des orthophonistes de Lorraine puisque, par manque de renseignements statistiques, M. BOT n'a pu comparer le

groupe de répondants à l'échantillon interrogé.

La seconde limite est constituée par l'outil méthodologique lui-même: le questionnaire a permis seulement d'approcher des représentations et n'a pu recueillir

que des dires sur des pratiques. M. BOT a cependant tenté de « dépasser le simple

recueil de dires », de «pratiques déclarées », en utilisant une méthode de croisement de données qui lui a permis de relever certaines incohérences dans les

réponses. Cependant, étant donné le temps imparti à l'élaboration d'un mémoire de

fin d'études, M. BOT n'a pu lever ces incohérences comme elle le souhaitait afin de pouvoir valider la totalité de ses hypothèses.

Mon travail s'inscrit donc dans le prolongement de cette recherche initiale.

Chapitre 3 . Les orientations de ma recherche

Dans un premier temps, il m'a fallu relever toutes les incohérences, imprécisions et manques mis en évidence par M. BOT dans les réponses au

questionnaire, ce que je me suis efforcée de faire, avec un souci d'exhaustivité.

J'ai ensuite essayé de regrouper cet ensemble en essayant de catégoriser les domaines de travail concernés, pour mettre au point ma méthode de travail.

Je me suis ainsi intéressée:

aux finalités, au choix et à l'utilisation des outils d'évaluation, aux critères intervenant dans la décision de prise en charge,

(17)

Ces trois grands axes m'ont conduite à explorer, au cours de mes lectures, les thématiques suivantes:

le versant production du langage écrit et ses troubles (M. BOT ayant déjà

traité ce qui concerne la lecture),

l'évaluation du langage écrit,

les outils méthodologiques susceptibles de m'aider à mener à bien mon travail de recherche.

(18)

Partie

1:

Elaboration de la question de départ

(

Partie

2 :

Lectures exploratoires

,

Chapitre 1 : Le langage écrit et ses troubles

1. 19éfinitions ;'e

2.L'orthographe sous l'angle de la neuropsychologie cognitive

3.Approche socioculturelle et langagière de l'écriture

4.Les « pathologies du langage écrit'», versant orthographe

Chapitre 2 : L'évaluation des troubles du langage écrit

1.L'évaluation d'un patient dans le cadre d'un bilan

{

orthophonique

2.Bilaninitial des troubles du langage écrit

Chapitre 3 : Recherche d'un outil méthodologique

1.L'observation directe

2.Le questionnaire

3.L'entretien

,

Partie

3:

Mise au point du dispositif de recherche

(19)

Chapitre

l '

Le langage écrit et ses troubles

Mes lectures exploratoires se sont évidemment orientées vers le domaine du

langage écrit, puisque au cours de mes entretiens, j'approche le thème de

l'évaluation initiale des troubles du langage écrit. En amont de l'évaluation, que

j'explorerai dans un second chapitre, il m'a semblé primordial d'étayer mes

connaissances en matière de langage écrit et de ses "troubles". Pour pouvoir être à même de conduire ces entretiens auprès d'orthophonistes libéraux, je dois être capable de relever des éléments pertinents et cela ne me sera possible que si je m'appuie sur de solides supports théoriques. Par ailleurs, j'ai choisi d'axer ma recherche bibliographique sur le versant production du langage écrit. M. BOT traite en effet dans son mémoire de l'acte de lire et de ses troubles: mon travail de recherche lui succédant, il m'a semblé inutile de revenir sur la définition de la lecture, celle de l'identification des mots, et sur les troubles pouvant être rencontrés dans cette activité de lecture. Je renvoie donc le lecteur intéressé par le versant

compréhension (c'est-à-dire la lecture) au chapitre 4 du mémoire de M. BOT2.

Dans ce chapitre consacré à la production écrite et à ses troubles, je tenterai dans un premier temps de regrouper quelques définitions qui ont pu être données

pour décrire ce que les auteurs nomment tantôt «production écrite », tantôt

«écriture », tantôt « orthographe ». Je m'intéresserai ensuite à l'orthographe telle

qu'elle est décrite en neuropsychologie cognitive puis à une approche socioculturelle et langagière de l'écriture. J'aborderai enfin les troubles concernant le versant production du langage écrit.

1.

Définitions

Mon incursion dans la littérature dédiée à la production écrite (celle à laquelle j'ai eu accès) m'a tout d'abord fait sentir le contraste existant entre le nombre d'ouvrages qui lui sont consacrés et ceux qui concernent la lecture. Une enquête

(20)

réalisée en 1994 par BROWN et ELLlS3 a montré que le rapport entre le nombre

d'articles relatifs à la lecture et celui concernant les travaux consacrés à

l'orthographe était, en 1974, de 15/1 en faveur de la lecture. Quelle(s) explication(s)

peut-on trouver à ce constat? Tout d'abord, la production écrite serait la modalité la

moins utilisée dans la vie quotidienne d'après P. ZESIGER4 (par rapport à la

compréhension età la production orales mais aussi à la compréhension écrite). Il est

également possible d'imaginer que les difficultés d'approche expérimentale de l'orthographe peuvent expliquer que ce domaine a longtemps été délaissé par les

chercheurs au profit de celui de la lecture. En effet, toute recherche s'intéressant à

l'orthographe doit composer avec des difficultés de contrôle expérimental, que ce soit au niveau de la présentation des stimuli et de l'enregistrement des réponses ou au

niveau du contrôle des variables intermédiaires impliquées dans les tâches

proposées. Le nombre de recherches sur la production écrite tend cependant à

augmenter: ce rapport est passé à 7/1 en 19925. En témoigne le nombre plus

important, ces dernières années, d'articles concernant l'orthographe et ses troubles

dans les revues orthophoniques spécialisées: la revue Rééducation Orthophonique

a par exemple consacré un numéro complet à l'orthographe en décembre 19996.

Par ailleurs, cette revue de la littérature se rapportant au versant production

du langage écrit m'a confrontée à l'emploi de différents termes dont j'ai eu de prime

abord du mal à distinguer la nuance. Quelles distinctions font en effet les auteurs

entre les termes de «écriture », « orthographe» ou encore « production écrite» ? Il

m'a semblé important de reprendre ici quelques définitions d'auteurs afin d'essayer d'y voir plus clair.

2 M. BOT, Etat des lieux de la notion d'évaluation et des pratiques orthophoniques concernant

l'évaluation initiale des troubles développementaux du langage écrit, p.38-47.

3 P. ZESIGER, Orthographe et écriture, p.291. 4P. ZESIGER, ibid., p.291

5P. ZESIGER, ibid., p. 291-292.

(21)

1.1. Production écrite 1écriture 1

orthographe

J'ai choisi de citer les définitions que donnent P. ZESIGER et J.-P. JAFFRÉ ainsi que celle qui peut être trouvée dans le Dictionnaire d'orthophonie. J'estime en effet que ces trois définitions donnent un aperçu des différentes orientations, que j'ai pu trouver au hasard de mes lectures, concernant l'étude du versant production du langage écrit. Mon but n'est nullement de proposer une synthèse exhaustive des différents courants théoriques pouvant exister au sujet de la production écrite. Je me limite simplement à récapituler les connaissances que j'ai pu construire au cours de mes lectures.

Pour commencer, je reprends les définitions données par P. ZESIGER7 que

je serai amenée à citer plusieurs fois pour ce qui concerne des théories issues de la neuropsychologie cognitive. P. ZESIGER inclut dans la production écrite ce qu'il appelle ses «niveaux les plus spécifiques »,à savoir l'orthographe et l'écriture8.

Le terme «orlhographe » est utilisé pour « définir les processus impliqués dans la

récupération et/ou dans la génération de la forme orlhographique des mots 9 }).

L'orthographe désignerait donc les mécanismes mis en œuvre par le scripteur pour aller chercher dans son lexique orthographique la forme correcte d'un mot qui lui est

dicté et qu'il connaît déjà. Elle correspondrait également aux processus permettant

au scripteur d'inférer la forme orthographique d'un mot qu'il ne connaît pas à partir de mots appartenant déjà à son lexique et qui lui ressemblent (par exemple, écrire le mot inconnu "fustigation" par analogie avec le mot "condition").

Quant au terme « écriture », il recouvre «les processus responsables du contrôle

des mouvements graphiques 10}), c'est-à-dire les mécanismes permettant au

scripteur de tracer des signes, d'accomplir le geste d'écrire.

Un autre point de vue, plus historique, nous est donné par J.-P. JAFFRÉ,

linguiste et chercheur au CNRS: selon cet auteur, l'écriture renvoie à du

« tonciionnel », il la définit comme «l'ensemble des marques graphiques qui

7P. ZESIGER est chercheur en psychologie et en sciences de l'éducation.

SP. ZESIGER, Orthographe et écriture, op. cit., p. 291. 9P. ZESIGER, ibid., p. 291.

(22)

actualisent des principes, des lois de base11 ». Ces lois ou principes de base sont

qualifiés habituellement de «phonographique» et « sémiographique » et chacun de

ces principes remplit une fonction nécessaire à toute écriture. D'après J.-P. JAFFRÉ, la phonographie est le principe moteur de l'écriture: elle consiste à matérialiser à l'écrit les sons d'une langue, de manière plus ou moins régulière. En effet, suivant les langues, un son ne va pas forcément correspondre à un seul signe écrit ([z] peut s'écrire (s) ou (z)) et inversement, un signe écrit pourra s'oraliser de différentes façons ((c) lu [k] devant (a), (u), (0) mais [s] devant (e), (i) et (y)). Ces différences de régularité de correspondance alphabétique d'une langue à l'autre montrent, selon J.-P. JAFFRÉ, que si les phonographies sont nécessaires, elles ne sont jamais

suffisantes « car l'écriture ne perd jamais de vue sa « raison d'être» qui est de

donnerà voir du sens linguistique12 ». La sémiographie est centrée quant à elle sur

la représentation de structures signifiantes. Tout aussi nécessaire que la

phonographie, elle exerce sur elle des pressions qui peuvent parfois en modifier l'apparence. Par exemple le mot "monsieur" n'est pas une transcription de l'oral mais vient directement de l'ancien français "mon sieur'. Toutefois, J.-P. JAFFRÉ note que, dans le domaine de la sémiographie, la part de l'écriture et celle de l'orthographe

sont parfois difficiles à distinguer car «les habitudes perceptives des lecteurs

peuvent s'accommoder d'éléments peu fonctionnels à l'écrit13 », comme par exemple dans le mot "temps" où le (p) et le(s) ne sont pas prononcés à l'oral.

D'après J.-P. JAFFRÉ, l'orthographe serait plutôt de l'ordre de « l'institutionnel» :

elle désigne plutôt «d'anciens états d'écriture, façonnés par l'histoire, et qui ont

tendance à complexifier ces lois":» que sont la phonographie et la sémiographie.

J. GUION me paraît plus explicite lorsqu'il explique pourquoi, à son avis, l'orthographe fonctionne comme une institution. D'après lui, l'orthographe est une

« contrainte sociale» qui présente trois caractères essentiels: «elle préexiste à

l'individu», « elle

a

un caractère d'obligation» et « elle

a

ses règles, ses statuts, ses codes, au sens juridique du terme" », c'est-à-dire que l'individu ne peut les modifier.

De plus, «une institution est la résultante d'un processus historique: elle est la

11J.-P. JAFFRE, Orthographe et principes d'écriture en français, p.26.

12J.-P. JAFFRE, Orthographe et principes d'écriture en français, op. cit., p.29. 13J.-P. JAFFRE, ibid., p. 30.

14J.-P. JAFFRE, ibid., p. 26.

(23)

codification de contraintes sociales devenues progressivement autonomes16»,

encore un aspect partagé avec ce que J.-P. JAFFRÉ met lui-même en avant. Mais J.-P. JAFFRÉ reconnaît que la distinction entre écriture et orthographe n'est pas

toujours simple à établir: «Dans une société comme la nôtre, dotée d'une tradition

écrite ancienne, la différence entre écriture et orthographe n'est pas si facile à

éteblir"

».

Enfin, je reprendrai les définitions du Dictionnaire d'orthophonie, qui

m'apparaissent comme les plus consensuelles dans le domaine de l'orthophonie.

D'après les auteurs du Dictionnaire, l'écriture est la «représentation de la pensée et

du langage par des caractères graphiques de convention, propres à une

communauté linguistique donnée 18». Quant à l'orthographe, le Dictionnaire

d'orthophonie envisage plusieurs points de vue pour la définir: il s'agit tout d'abord

d'une « manière, considérée comme seule correcte, d'écrire les mots propres à une

communauté linguistique donnée: l'orthographe dite d'usage correspond aux graphies usuelles des mots et l'orthographe dite grammaticale aux graphies des mots selon leur fonction au sein de la phrase. L'orthographe peut être considérée comme un code ou une institution sociale ». Le lecteur attentif pourra remarquer ici la parenté de définition avec celle que proposent J.-P. JAFFRÉ et également J.

GUION: l'aspect «institutionnel» est en effet à nouveau évoqué. D'autre part, «d'un

point de vue linguistique, c'est un système complexe correspondant à un code graphique composé de graphèmes (correspondant aux phonèmes). Parfois, ils peuvent être soumis à des variables positionnelles: on les appelle alors phonogrammes. Ils constituent aussi des morphèmes (ou morphogrammes) ». Enfin, «du point de vue général de l'acquisition du langage écrit, on parle parfois d'orthographe phonétique pour décrire le stade où l'enfant commence à pouvoir

écrire des mots en appliquant strictement des correspondances

phonème-graphème 19».

16J. GUION, L'institution orthographe, op. cit., p.11.

17J.-P. JAFFRE, Orthographe et principes d'écriture en français, op. cit., p. 33.

18F. BRIN, C. COURRIER, E. LEDERLE, V. MASY, Dictionnaire d'orthophonie, op. cit., p. 66. 19F. BRIN, C. COURRIER, E. LEDERLE, V. MASY, Dictionnaire d'orthophonie, op. cit., p. 136.

(24)

P. ZESIGER propose donc une définition de la production écrite issue de

l'étude des troubles pouvant la toucher. Sa définition reste donc purement

instrumentale et ne prend pas en compte les aspects socioculturels de l'orthographe

et de l'écriture. J.-P. JAFFRÉ et J. GUION replacent, quant à eux, écriture et

orthographe dans leur contexte historique et social.

Il me semble intéressant de juxtaposer ces définitions dans la mesure où chacune

peut apporter des éléments utiles à l'orthophoniste. Essayer d'identifier les

mécanismes qui entrent en jeu pour écrire et orthographier peut permettre à

l'orthophoniste de mieux cibler son projet de rééducation. Mais envisager les aspects

«tonctionnei» et « insiiiuiionnel » permet de ne pas perdre de vue l'objectif de toute

rééducation orthophonique, à savoir l'insertion (ou la réinsertion) d'une fonction dans

la vie personnelle et sociale du patient.

La distinction entre ces trois termes « production

éctite

», «

ottnoçreone

» et

« écriture » est donc loin d'être évidente à établir. Aussi me suis-je efforcée de

reprendre les termes utilisés par chacun des auteurs sur lequel je m'appuie pour la suite de la synthèse de mes lectures.

Cette partie me semblerait incomplète si je ne tentais pas de donner ici une définition de l'acte d'écrire. En effet, en tentant de donner des définitions des termes

«production écrite}}, « ortnoçreone » et

«éctiiure

», je me suis centrée sur le

produit de l'acte d'écrire. " me semble maintenant important de me placer du point de vue du scripteur: qu'est-ce qu'écrire?

1.2. L'acte d'écrire

C'est durant les cours sur la "pathologie" du langage écrieo que nous avons

été amenés, nous, étudiants en orthophonie, à nous interroger sur cet acte d'écrire

qui nous paraissait si évident. Nous avons tout d'abord pu isoler plusieurs fonctions de cet acte:

reproduire la forme sonore du langage, traduire la pensée d'autrui,

(25)

se raconter,

communiquer par l'intermédiaire d'un support.

«Ecrire» nous est apparu avant tout comme un acte créateur. Mais un acte qui

dépend de multiples facteurs: moteurs, psychomoteurs, sensoriels, biologiques (maturité), cognitifs, psycho-affectifs, culturels et sociaux.

La définition de l'acte d'écrire ne peut cependant, à mon avis, se résumer ainsi

à une suite de fonctions et de facteurs relativement vagues et imprécis, qui

pourraient éventuellement s'appliquerà d'autres actes que celui d'écrire. Il me paraît

nécessaire d'essayer de cerner le fonctionnement de l'acte d'écrire avant d'en envisager la pathologie. Il me semble que c'est en comprenant les mécanismes mis en jeu dans la production écrite que le lecteur pourra saisir ce que c'est qu'écrire. L'acte d'écrire peut toutefois être envisagé sous divers éclairages: celui de la pédagogie, celui de la psychologie, celui de la psycholinguistique, etc.. Cependant, dans un souci de concision, je me contenterai d'explorer la production écrite au

travers de la neuropsychologie cognitive, discipline à laquelle l'actualité accorde une

large place, et d'une perspective socio-culturelle et langagière, qui me semble pouvoir compléter les aspects non "pensés" par la neuropsychologie cognitive.

2.

L'orthographe sous J'angle de la neuropsychologie

cognitive

Dans un premier temps, je vais m'intéresser de plus près à des modèles

proposés pour expliquer les processus orthographiques chez l'adulte. Ces modèles

ont été élaborés à partir de l'étude de productions d'adultes cérébro-Iésés et

aujourd'hui ils servent également à rendre compte des réalisations des enfants. Les

chercheurs en neuropsychologie cognitive sont donc partis de l'étude de la

pathologie pour parvenir à des modélisations du fonctionnement de la production

écrite chez l'adulte puis chez l'enfant ordinaire. C'est une démarche de recherche qui a été fréquemment utilisée dans l'histoire, il est cependant souvent reproché aux chercheurs en neuropsychologie de n'avoir qu'une vision purement instrumentale du développement des différentes fonctions cognitives, et en particulier de celle qui nous occupe, la construction de la capacité à produire de l'écrit.

(26)

Je m'attacherai justement plus particulièrement, dans un deuxième temps, à décrire

les étapes de développement de l'orthographe chez l'enfant21.

2.1. Le processus orthographique chez le scripteur expert

Le modèle le plus fréquemment cité dans le domaine de l'orthographe est le

modèle à double voie (formulé par MORTON en 1980, à partir de travaux auprès

d'adultes cérébro-Iésés), à l'élaboration duquel des psychologues d'orientation

neuropsychologique ont largement contribué et qu'ils se sont efforcés d'affiner au fil des années, en proposant notamment d'y ajouter une troisième voie. Ce modèle est fondé sur le postulat que les mots familiers et les mots non familiers sur le plan orthographique sont traités par des procédures distinctes.

Pour produire des mots non familiers, le scripteur utilise la voie phonologique ou

procédure d'assemblage. Quant aux mots familiers, les processus nécessaires à leur

production constituent la voie lexicale ou procédure d'adressage (cf. Fig. 1 élaborée d'après H. KREMIN22) .

21 L'ensemble de ce chapitre prend appui sur les deux chapitres d'ouvrage suivants: A.CONTENT, P. ZE8IGER, L'acquisition du langage écrit, p. 181-203.

P. ZE8IGER, Orthographe et écriture, p. 291-307.

(27)

~tRCl;;;pnON ,I\UDITIVE A

l

B 1

...

[~;:;;:;~~i~;~i~~~"'CO-- A

j

r'

~

., [-- Lexique phonologique , d'entrée ! ~=-...

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.:

82 A

[0-'---Lexique 1 phonologique de 1 sortie I--'-"--'''--~ 1 1 1 Bufferphonoloqique

..-Production orale Production écrite/épelée

Fig. 1 :Représentation des mécanismes impliqués lors de l'écriture sous dictée:

A: voie non lexicale (assemblage) ; 8 : voie lexicale (adressage)

81 : voie lexico-sémantique ; 82 : voie lexicale directe

Mais à cet endroit, une question se pose d'emblée: rendre compte des processus de

production écrite de mots est-il de même nature que rendre compte de

(28)

2.1.1. La voie phonologique ou procédure d'assemblage

Après avoir analysé les propriétés acoustiques et/ou phonétiques du stimulus (ce qui est également le cas dans la procédure d'adressage), le scripteur devant produire un mot non familier doit tout d'abord segmenter l'émission sonore en

phonèmes/" puis convertir ces phonèmes en qraphèmes'". Ces opérations sont

possibles grâce à la mémoire tampon phonologique (ou buffer phonologique) qui

stocke la représentation phonologique du mot pendant les processus de

segmentation et de conversion.

2.1.2. La voie lexicale ou procédure d'adressage

Pour produire à l'écrit un mot familier, le scripteur va rechercher sa

représentation orthographique dans son lexique orthographique qui est une sorte de

mémoire à long terme de la structure des mots écrits.

En production spontanée, c'est l'information transmise par le système sémantique (où sont représentées les significations des mots) qui permet l'activation des représentations stockées dans le lexique orthographique.

En situation de dictée, la récupération des représentations orthographiques est

consécutive à l'activation successive de la forme phonologique du mot dans le

lexique phonologique d'entrée (permettant de reconnaître les mots entendus) puis de sa signification dans le système sémantique.

2.1.3. La voie complémentaire ou voie lexicale non sémantique

L'observation de certains patients cérébro-Iésés pouvant, sous dictée,

orthographier correctement des mots même irréguliers sans les comprendre suggère l'existence d'une troisième voie: l'activation des représentations orthographiques se

ferait directement à partir du lexique phonologique d'entrée.

L'existence de cette voie pourrait également expliquer les confusions occasionnelles entre mots homophones hétérographes (comme "vin! vingt", "tant/ temps", etc.) observées chez le sujet normal: si le scripteur ordinaire écrit par exemple "vin" à la

23 Un phonème est un son ou un bruit de la chaîne parlée résultant de la combinaison de plusieurs

traits articulatoires. C'est la plus petite unité distinctive de la chaîne orale.

24 Un graphème est un signe écrit représentant un phonème de la langue orale: il peut être simple et

correspondre dans ce cas à une lettre ou être complexe, c'est-à-dire correspondre à plusieurs lettres. C'est la plus petite unité distinctive etfou significative de la chaîne écrite.

(29)

place de "vingt", c'est qu'il n'a pas accès au sens de ce mot, du fait peut-être d'une ambiguïté de la phrase dans laquelle il se trouve.

Quelle que soit la voie utilisée, les informations sont maintenues dans le

« buffer çrepnemioue » (mémoire de travail activant des modules de conversion,

appelée également par certains auteurs «mémoire tampon ortncqrephioue » ou

« graphémique ») pour aboutir ensuite à la réalisation motrice de la séquence écrite

qui peut prendre différentes formes: étape allographique (noter une valeur

phonétique avec différents signes graphiques possibles), épellation orale, écriture dactylographiée ou encore assemblage de lettres mobiles.

2.2. L'acquisition de l'orthographe

Dire que l'acquisition de l'orthographe se fait sur plusieurs années, allant des années préscolaires jusqu'à l'adolescence, voire jusqu'à l'âge adulte, suppose d'envisager l'orthographe comme un ensemble déterminé d'éléments à acquérir. Les recherches à ce sujet ont abouti à plusieurs modélisations de cette acquisition sous forme d'étapes, dont chacune se caractérise par une manière particulière de traiter les mots écrits en production.

Je m'interroge ici sur l'apparente synonymie que des chercheurs en

neuropsychologie cognitive semblent établir entre « orthoçrephe » et « production de

mots écrits» . savoir «orihoqreptuer » signifie-t-il strictement la même chose

qu' « être en mesure de produire des mots

écnts

» ? Comment expliquer alors, par

exemple, que le scripteur expert soit capable d'écrire "j'en veux vingt au lieu de "j'en veux vin" ? Le mot qui est prononcé [VE] peut s'écrire "vin", "vingt", "vînt" ou encore "vain" : selon certaines théories en neuropsychologie cognitive, le scripteur peut donc aller chercher dans son lexique orthographique le mot qui lui est dicté sous la forme

[VE] mais il est capable de produire ce mot sous différentes formes écrites. Comment

dès lors opérer un choix? C'est toute l'importance du co-texte, de la construction syntaxico-sémantique auxquels ces chercheurs ne font pas référence. Et c'est à mon

avis à ce niveau que se situe la différence entre « ottnoqrephe » et «production de

mots écrits » : le scripteur saura « otthoqrephier» s'il est capable de prendre en compte le sens de la phrase qu'il doit écrire et non pas de produire les mots les uns

(30)

à la suite des autres sans tenir compte de leurs liens. Je rejoins en cela l'opinion de

C. BAUDESSON et O. SANDEVOIR pour qui «l'orthographe d'une langue ne se

limite pas

à

des mots isolés, même si l'on

a

pris soin de les présenter en contexte. Les acquisitions en orthographe lexicale ne sont pas superposables aux acquisitions

en

motpnoeyntexe"

».

Pour expliquer comment s'acquiert l'orthographe selon les théories de neuropsychologie cognitive, je partirai du plus général en proposant une "synthèse" de ce que les différents modèles avancent comme étapes de l'acquisition de l'orthographe. Ces différentes étapes illustrent le fait que l'enfant se base sur des indices qui varient au cours de l'apprentissage pour produire des mots écrits. Puis je décrirai un modèle en particulier, celui de U. FRITH, un "classique" de la littérature portant sur le langage écrit.

2.2.1. Les principales étapes de cette acquisition

A.CONTENT et P. ZESIGER citent les auteurs des principaux modèles de

l'acquisition de l'orthographe et précisent qu'« il se dégage un consensus autour de

l'idée que le sujet passerait par divers stades (ou utiliserait diverses stratégies) dans le processus d'apprentissage qui va le mener des premiers gribouillis supposés représenter des mots écrits à la meîtrise de l'orthographe conventionnelle26».

A.CONTENT et P. ZESIGER préfèrent envisager le passage de l'une à l'autre phase

sous la forme d'un continuum plutôt que sous celle de paliers comme il est proposé dans certains modèles qui distinguent, de manière parfois arbitraire, des sous-stades

correspondants à des niveaux de maîtrise différents au sein d'un même stade.

'Y L'orthographe« symbotioue »ou «pré-communicative »

L'enfant est confronté au système écrit dès son plus jeune âge mais il n'en comprend que tardivement l'utilité ou même les liens avec le langage oral. Au départ, l'enfant qui dit écrire fait des gribouillis indifférenciés, du point de vue de l'adulte.

Puis ceux-ci se distinguent petit à petit quand l'enfant prend conscience que chaque

mot doit être représenté différemment des autres puisqu'il est différent. Au fur et à

(31)

mesure de son évolution, l'enfant intègre des pseudo-lettres ou des lettres à sa production écrite.

y L'orthographe« phonétique»

Un grand pas est franchi lorsque l'enfant comprend que l'écrit représente non pas des concepts mais des mots du langage oral. L'enfant doit alors avant tout prendre conscience des relations existant «entre les unités graphiques de l'écrit et les unités sonores de la perote" ». Ce processus passe par une analyse de plus en plus fine

de la parole: c'est le développement de la « conscience phonologique» (ou analyse

de la structure segmentale de la parole). D'après J. GOMBERT, l'enfant est capable

d'un certain recul et d'une réflexion sur les sons de la parole aux alentours de 3-4

ans. Dans les langues dites «transparentes », où à un son correspond un seul

graphème, l'enfant peut déjà à ce niveau produire à l'écrit un nombre important de mots corrects, une fois qu'il a appris le système de conversion phonème-graphème. En français en revanche, peu de mots sont réquliers'", l'enfant doit donc également intégrer les différentes représentations écrites possibles de certains phonèmes (par exemple, le son [s] peut se représenter à l'écrit par la lettre s ou la lettre c) ainsi que les règles de la combinatoire (savoir par exemple que c'est placé devant les lettres e et i que la lettre c va produire à l'oral le son [s]). Ainsi, par ce développement, l'enfant élabore ce qui constitue, chez l'adulte, la voie phonologique (cf. supra) et qui est

appelé, chez l'enfant, la « stratégie alphabétique» d'après le modèle proposé par U.

FRITH.

y L'orthographe« lexicale» ou « conventionnelle»

L'élaboration de représentations orthographiques prend du temps et certains auteurs font l'hypothèse qu'elle se ferait par mémorisation des lettres situées aux

extrêmes du mot pour se compléter vers l'intérieur'". Des auteurs tels que

SPRENGER-CHAROLLES, SIEGEL & BECHENNEC (1997) ou encore R. TREIMAN

26A. CONTENT, P. ZESIGER, L'acquisition du langage écrit, op. cit., p.193.

27A. CONTENT, P. ZESIGER, ibid., p. 195.

28 Les mots réguliers ont pour caractéristique d'avoir une représentation écrite qui découle d'une

stricte correspondance phonème-graphème, comme par exemple les mots "lavabo" ou encore "moto",

29 Selon PERFETTI (1989) et SEYMOUR (1990) repris par A. CONTENT, P. ZESIGER, L'acquisition

(32)

(1993)30ont montré qu'en fin de première année de scolarité primaire, les mots étant plus fréquemment rencontrés par les enfants sont mieux écrits que les mots peu fréquents. Ce processus de mémorisation de l'orthographe des mots serait donc déjà actif à ce moment.

A l'heure actuelle, il n'a pas encore été déterminé comment se construit le lexique orthographique dans lequel sont stockées les représentations orthographiques des mots. Certains auteurs penchent pour l'intervention de facteurs phonologiques: c'est la capacité de reconnaître des mots sur la base d'indices complets" ou redondants" qui permettrait la mise en place d'un lexique orthographique. D'autres auteurs ont

suggéré que les «capacités de mémorisation visuelle» pourraient également jouer

un rôle dans l'apprentissage de l'orthographe lexicale mais les données tendant à le prouver restent limitées33.

~ L'orthographe« par analogie»

Il existe une alternative aux manières décrites ci-dessus d'orthographier un mot:

c'est l'orthographe par analogie qui combine l'orthographe phonétique et

l'orthographe lexicale. Je citerai ici l'exemple donné par A. CONTENT et P.

ZESIGER: «si le sujet ne conneîi pas rorthographe correcte du mot "gomme': il

peut néanmoins récrire correctement en mobilisant soit ses connaissances lexicales relatives aux mots "pomme", "comme", "somme", etc., soit ses connaissances sub-lexicales indiquant que la rime "omme" est souvent transcrite par -OMME en

trençee"

». Selon certains auteurs, cette stratégie pourrait déjà être efficace chez des enfants de 7 ans.

~ L'orthographe basée sur la morphologie

Ce n'est que depuis peu que des chercheurs s'intéressent de plus près au rôle que joue la morphotoqie'", et notamment la morphosyntaxe, dans l'apprentissage de

30Auteurs repris parA.CONTENT, P. ZESIGER, L'acquisition du langage écrit, op. cit., p.197.

31 Selon ALEGRIA & MOUSTY (1997) ainsi que U. FRITH (1985), repris par A. CONTENT, P.

ZESIGER, ibid., p. 197.

32Selon PERFETTI (1997), repris parA.CONTENT, P. ZESIGER, op. cit., p. 197.

33 D'aprèsA.CONTENT, P. ZESIGER, ibid., p.197.

34A.CONTENT, P. ZESIGER, ibid., p.198.

35 La morphologie est la« partie de la linguistique qui étudie la forme des mots et/ ou de la syntaxe

(morphosyntaxe), ainsi que les règles de combinaison qui régissent leur formation » (F. BRIN, C. COURRIER, E. LEDERLE, V. MASY, Dictionnaire d'orthophonie, p.121).

(33)

l'orthographe. Une distinction est faite entre la « morphologie f1exionnelle26 » (accord

en genre et en nombre, conjugaison) et la «morphologie dérivationnel/e36»

(changement de catégorie grammaticale, champ dérivationnel). La majorité des

chercheurs s'accordent à dire que l'apparition de compétences morphologiques

survient assez tard dans l'apprentissage de l'orthographe. La prise en compte des

éléments morphologiques de la langue se ferait apparemment de manière

progressive, pouvant commencer dès la première année de scolarité primaire.

Après avoir brièvement exposé les stades d'acquisition de l'orthographe les plus

couramment proposés dans la littérature à laquelle j'ai eu accès, je me propose de

considérer d'un peu plus près le modèle de U. FRITH datant de 1980 et revu en

1985 par son auteur.

2.2.2. Le modèle de U. FRITH

Selon U. FRITH, l'apprentissage de l'orthographe nécessiterait le passage par

quatre étapes ou quatre «stades »:

? le «stade symbolique» qui est celui durant lequel l'enfant construit ses

connaissances sur la langue (ou connaissances métalinguistiques): il devient capable de définir ce qu'est une lettre, un mot, une phrase, une ligne, etc.,

';;> le« stade logographique » durant lequel l'enfant copie des formes écrites dont il

a mémorisé les caractéristiques visuelles,

'r le «stade alphabétique» qui correspond à la période où l'enfant devient

capable de convertir des sons en lettres,

';;> enfin, le «stade orthographique» qui voit l'émergence d'une «production

fondée sur le rappel de représentations de la forme écrite des mots ou des morphèmes stockés dans le lexique37».

Les critiques ayant été faites à ce modèle concernent essentiellement la notion de

« stades» utilisée par U. FRITH, qui implique l'idée d'une succession stricte dans le

36A.CONTENT, P. ZESIGER, L'acquisition du langage écrit, op. cit., p.199.

(34)

développement. les études ayant été faites depuis sa parution tendent à montrer que plusieurs procédures peuvent être utilisées conjointement par l'enfant pour

parvenir à orthographier un mot. Il faudrait donc plutôt parler de « stratégies» que de

«stades ». Par ailleurs, l'existence d'une stratégie logographique dans le cadre du développement de l'écriture est actuellement fortement remise en question par des

auteurs comme L. SPRENGER-CHAROllES et S. CASALlS38.

2.3. Les relations entre lecture et orthographe

la tâche d'orthographier passe par l'évocation de mots écrits, ce qui nécessite la maîtrise de plusieurs compétences, notamment la capacité de structurer ses idées et de les coder sous une forme linguistique. Or la première différence entre lecture et

écriture a trait aux caractéristiques des unités à traiter: « en lecture, les graphèmes

sont écrits donc permanents; en production, les unités

à

traiter (phonèmes) sont plus fugaces et posent des problèmes de discrimination et d'identification avant d'être traduits (J.-P. JAFFRÉ et M. FAYal, 1997)39 ». Cela ajoute donc une étape supplémentaire par rapport à la lecture où il s'agit de reconnaître des mots. Comme

le rappellent

o.

ROCH et C. FRANCOIS, «écrire est une activité de rappel (de

formes orthographiques), alors que lire est une activité de reconnaissance, la

reconnaissance étant plus facile que le rappel (P. MOUSTY et J. AlEGRIA,

1996)40». En effet, d'après ces auteurs et d'autres comme L. EHRI et C. A.

PERFETTI, orthographier un mot nécessite de disposer de représentations

orthographiques complètes alors qu'il est possible de lire avec des représentations partielles, soit en s'aidant du contexte, soit en opérant un choix parmi un nombre restreint de candidats dans le lexique.

Au delà de cette différence fondamentale entre les activités de lecture et

d'orthographe, il faut remarquer que les modèles permettant de décrire ces deux

activités ont les mêmes caractéristiques de base, à savoir deux voies possibles de

traitement, par assemblage ou adressage. Que ce soit pour lire ou écrire, il est nécessaire de passer par un même lexique orthographique et de connaître le

38

o.

ROCH, C. FRANÇOIS, Synthèse des modèles théoriques et réflexion sur la rééducation de

l'orthographe, p.231.

(35)

système alphabétique. La médiation phonologique joue également un rôle en lecture et en orthographe. Outre ces ressemblances au niveau des processus, ces deux

activités apparaissent également interdépendantes dans leur développement.

L'interaction entre la lecture et l'orthographe dans le développement est décrite par

deux auteurs: L. EHRI et U. FRITH. Mais dans un souci de concision, je me

contenterai de reprendre le modèle de U. FRITH dont j'ai déjà décrit les fondements

(cf.2.2.2.).

L'intérêt du modèle conçu par U. FRITH réside principalement dans le fait que l'acquisition de la lecture et de l'orthographe prennent appui l'une sur l'autre, conduisant à un développement décalé dans le temps. Dans ce modèle, le régulateur des acquis et le stimulateur de changement sont tantôt la lecture, tantôt l'écriture (cf. Fig. 2, d'après F. ESTIENNE41) .

lecture lecture écrilure écnture

s .;::

symbü1rqu,e L '" IQgographique /\ z: alphabèl1que

o

==orthogf~lphiqJ)e

Fig. 2 : Modèle d'acquisition de la lecture et de l'écriture (modifié d'après Frith, 1986)

40 D. ROCH, C. FRANCOIS, Synthèse des modèles théoriques et réflexions sur la rééducation de

l'orthographe, op. cit., p. 230.

(36)

L'étape 81 correspond au moment où l'enfant comprend que l'écrit a une signification. En début d'apprentissage, U. FRITH postule une avance de la lecture (ou bien de la reconnaissance de mots écrits?) sur l'écriture de mots (ou la production de mots écrits ?), la stratégie logographique (traitement de l'information

écrite sur la base d'indices visuels) apparaissant d'abord au niveau de la

reconnaissance et seulement ensuite dans la production. Puis ce serait l'écriture qui

prendrait le pas sur la lecture: à l'étape 82, l'enfant commence à conférer une

signification stable à certaines lettres et à certains mots et c'est en tentant de les

écrire qu'il découvre le système alphabétique. Enfin, la stratégie orthographique apparaîtrait d'abord sur le versant de la lecture, les mots écrits pouvant être plus facilement reconnus que produits sur la base d'indices orthographiques.

Cependant, une récente étude de L. RIEBEN (réalisée, il est vrai, sur un

nombre restreint d'enfants, 21 au total) portant sur la recherche et la copie de mots, n'a pas permis de retrouver les décalages alternés systématiques entre lecture et

écriture que décrit U. FRITH : « Il s'agit plutôt de considérer qu'un éventail complet

des stratégies de lecture et d'écriture peut être observé dans un intervalle temporel à

peine plus long qu'une année, située, pour des enfants dans la norme, entre 4/5 ans et 5/6 ans42».

Une fois encore, le lecteur se heurte à la question de la synonymie entre

« écriture» et «production de mots écrits ». D'après ce que j'ai pu comprendre de leurs travaux, les auteurs cités ont étudié les stratégies nécessaires à la «production de mots écrits». Or, «orthographier» ne me semble pas se limiter à écrire bout à

bout des mots sans lien entre eux. Ces auteurs n'expliquent donc pas comment

l'enfant apprend véritablementà écrire, dans le sens d' «orthographier ».

Par ailleurs, les modèles, cités ici, permettant de rendre compte de l'acquisition de

l'orthographe, découlent directement de l'étude d'adultes ayant des lésions

neurologiques acquises, ce qui soulève une question fondamentale: qu'en est-il de

l'environnement dans lequel se développe l'enfant? Il ne viendrait, je pense, à l'idée

de personne de nier son influence sur le développement de l'enfant. Et pourtant, aucun auteur cité précédemment ne semble en faire mention (d'après mes lectures

(37)

qui n'ont été, bien sûr, que partielles). Dans les modèles que j'ai évoqués, tout paraît se dérouler hors contexte socio-culturel. Finalement, cela me semble comparable, en médecine, à une description de mécanismes qui se dérouleraient "in vitro". Reste à

exposer tout ce qui entre en jeu dans l'acquisition de l'orthographe "in vivo".

Pour ces raisons, l'approche neuropsychologique ne me satisfaisant que

partiellement, je me suis tournée vers un auteur qui s'est intéressé, dans ses travaux, au contexte socio-culturel dans lequel se construit l'enfant: G. CHAUVEAU.

Cet auteur propose une approche socioculturelle et langagière de l'écrit, à la fois de

la lecture et de l'écriture.

3.

Approche socioculturelle

et

langagière de J'écriture

L'écriture ne pouvant se résumer, à mon avis, à l'acquisition de mécanismes de

base et de savoir-faire instrumentaux décrits en neuropsychologie, il faut la replacer

dans le contexte socioculturel dans lequel elle se construit et s'inscrit. G.

CHAUVEAU reprend la description que fait VYGOTSKI du processus de

développement mental de l'enfant qui s'applique particulièrement, selon lui, à celui

du langage écrit: c'est un «processus d'appropriation d'expériences sociales

préexistantes 43». Autrement dit, l'enfant doit faire siennes les pratiques culturelles de

l'écrit de la société dans laquelle il vit et grandit, doit acquérir un rôle social de scripteur avant d'avoir la maîtrise des compétences techniques pour écrire.

A la suite de G. CHAUVEAU, je cherche à mieux comprendre comment l'enfant

entre dans le monde de l'écrit puis comment il découvre le «savoir-écrire ». Je

décris ensuite le «plurisystème » que constitue, d'après N. CATACH, le système

d'écriture du français, afin que le lecteur prenne conscience de ce que l'enfant, puis l'adulte scripteur, doit parvenir à maîtriser. Enfin, j'évoque les interactions scripteur experU apprenti scripteur qui ont été décrites par G. CHAUVEAU mais également par

42 L.RIEBEN, Les stratégies de recherche et de copie de mots se développent-elles conjointement ?,

p.88.

(38)

d'autres auteurs appartenant à un courant plutôt pédagogique: ces interactions peuvent en effet permettre à l'apprenti scripteur d'évoluer dans sa maîtrise de l'écrit.

3.1. L'entrée dans le "monde" de l'écrit

D'après G. CHAUVEAU44, cette entrée dans le monde de l'écrit comporte trois

dimensions essentielles:

- une dimension «linguistico-conceptuelle» qui consiste à comprendre le

système écrit et ce que c'est qu'écrire (ou que lire),

- une dimension « culturelle» : l'enfant pourra entrer dans l'écrit s'il a eu autour

de lui des exemples d'adultes lisant ou écrivant, qui lui ont donné l'idée d'une culture spécifique de l'écrit, et s'il a lui-même eu des expériences d'écriture et de lecture,

- une dimension « sociale» qui revient à partager les activités de lecture et

d'écriture avec des personnes qui savent lire et écrire.

C'est pour comprendre justement comment l'enfant découvre les fonctions et les pratiques culturelles de l'écriture que G. CHAUVEAU a analysé les productions écrites d'enfants de 4 ans observés dans leur milieu familial. Cette analyse lui a permis d'isoler cinq fonctions principales de ces premiers écrits'" :

- «agir sur les autres» (en écrivant en gros STOP pour barrer un accès, par exemple),

- « identifier ou personnaliser des objets» (en écrivant son nom dessus

notamment),

- «expliquer un dessin» (en l'annotant),

- «produire des récits» ( transcrire par une pseudo-écriture ce que l'on raconteà un interlocuteur),

- «communiquer à distance avec les autres» (en envoyant par exemple

une carte postale sur laquelle sont tracés quelques signes).

L'enfant cherche donc à écrire avant même d'avoir appris les mécanismes de

l'écriture: c'est parce qu'il ressent ce besoin d'écrire, qu'il s'approprie graduellement

44G. CHAUVEAU, Comment l'enfant devient lecteur, op. cit., p.150. 45G. CHAUVEAU, ibid., p. 151-153.

(39)

les différentes fonctions de l'écriture, qu'il pourra entrer dans l'apprentissage des règles qui la régissent. Ainsi, l'acquisition de l'écriture passe nécessairement par une dimension culturelle. D'après G. CHAUVEAU, le processus technique (la maîtrise du

savoir-écrire) «prend son sens et son efficacité en s'inscrivant dans un processus

a'eccutturetion"

ou d'intégration culturelle» qui passe simultanément par un

processus d'extériorisation (s'intégrer aux pratiques culturelles du groupe social) et

un processus d'intériorisation (intérioriser, assimiler ces mêmes pratiques

cultureües)'".

Les dimensions linguistico-conceptuelle et socio-culturelle évoquées par G.

CHAUVEAU me semblent évidemment primordiales pour permettre à un enfant

ordinaire d'entrer dans le monde de l'écrit. J'estime pourtant que s'il est nécessaire

de baigner l'enfant pré-lecteur et pré-scripteur dans ces deux dimensions, ceci n'en

est pas pour autant suffisant: les orthophonistes sont en effet amenés à rencontrer

des enfants dyslexiques et/ou dysorthographiques qui ont eu toutes les stimulations, les modèles adultes nécessaires et qui ne sont pas pour autant entrés dans l'écrit. Or

G. CHAUVEAU n'évoque pas, à ma connaissance, ces enfants, ce qui, forcément,

ne permet pas de répondre aux attentes d'orthophonistes confrontés aux

«pathologies du langage écrit».

Je vais maintenant m'intéresser à l'acquisition conceptuelle du savoir-écrire

chez l'enfant, décrite par G. CHAUVEAU.

3.2. La découverte du savoir-écrire

Dans ses travaux d'inspiration piagétienne, E. FERREIRO a cherché à

découvrir la psychogenèse du lire-écrire en tentant de mettre à jour « ce que l'enfant

conçoit et comprend, ce qu'il s'apprend lui-même de l'activité de lecture-écriture et du système interne de t'éctit" ». A la suite de ces travaux, G. CHAUVEAU a

souhaité étudier «l'évolution des idées des enfants non lecteurs sur l'écriture et la

46G. CHAUVEAU définit ainsi le terme d' « acculturation» : {( a) processus par lequel un individu ou

un groupe assimile la culture d'un autre groupe; b)adaptation d'un individu à une culture étrangère avec laquelle il est en contact », in G. CHAUVEAU, Comment l'enfant devient lecteur, p. 156.

47G. CHAUVEAU, ibid., p.156.

Figure

Fig. 1 :Représentation des mécanismes impliqués lors de l'écriture sous dictée:
Fig. 2 : Modèle d'acquisition de la lecture et de l'écriture (modifié d'après Frith, 1986)

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