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L'astronomie au gré des saisons, 2019-01-15
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Voyage vers l’inconnu
Tapping, Ken
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Ken Tapping, le 15 janvier 2019
Le 1erjanvier 2019, la sonde New Horizons a survolé
l’objet le plus éloigné jamais exploré par une mission spatiale : un amas de glace et de roche en forme de poupée russe appelé Ultima Thulé — ce qui signifie « fin du monde connu » ou « début de l’inconnu ». Depuis son début, cette mission spatiale qui constitue un hommage aux prouesses du génie et de la
navigation spatiale nous révèle des objets nouveaux et fascinants. Pourquoi déployer de tels efforts, direz-vous? Pourquoi est-ce important? Cela s’inscrit tout simplement dans notre quête pour comprendre d’où nous venons et le pourquoi de notre existence. Le système solaire s’est formé il y a 4,5 milliards d’années lors de la contraction d’un immense nuage de gaz et de poussière cosmiques. La Terre et les autres planètes n’étaient alors que d’immenses amas de roche en fusion. La roche a fini par se refroidir, et 3,8 milliards d’années plus tard, la Terre (Mars aussi probablement) était devenue suffisamment froide pour permettre à l’eau liquide de former des océans, des lacs et des rivières à la surface. Ces eaux renfermaient les substances chimiques organiques à l’origine de la vie comme nous la connaissons. Les premiers organismes vivants sont donc apparus dans les océans, et
probablement ailleurs dans le Système solaire, il y a 3,5 milliards d’années. Ces substances chimiques ne peuvent subsister dans la roche en fusion. Alors comment se sont-elles retrouvées ici au moment opportun? D’où provient toute cette eau? Je vous propose ici une brève histoire qui, toutefois, ne répond pas à ces questions.
L’étude de la Terre et d’autres planètes du reste ne nous apprend rien sur ces énigmes. Même les roches les plus anciennes sur Terre ne sont pas faites de la matière primordiale. Tout ce qui se trouve à la surface a été remâché par la tectonique des plaques, un procédé qui recycle en continu la croûte terrestre. Mars ne peut rien nous apprendre non plus. Même la roche à la surface de la Lune, pourtant dépourvue d’atmosphère et de vie, n’est pas originale. Heureusement, il subsiste encore ailleurs beaucoup de matériaux inutilisés datant de la formation du système solaire. Cette matière se trouve toutefois à plusieurs milliards de kilomètres de nous, aux confins du système solaire, des régions obscures tellement froides que rien ne peut s’y évaporer ni s’y transformer. La matière primordiale est concentrée dans un grand nuage appelé « ceinture de
Kuiper ». La nature et la constitution des objets qui orbitent autour du Soleil dans cette région nous intéressent grandement. On a toutefois pu découvrir que dans au moins un cas, ces objets ne sont pas aussi froids, sombres et inertes que nous le pensions.
New Horizons a été lancée le 19 janvier 2006 à partir de cap Canaveral. Son objectif était Pluton, considérée alors comme étant la neuvième planète du système solaire et la plus éloignée. Depuis, la planète naine a été déclassée, car il s’agit en fait d’un des plus gros objets de la ceinture de Kuiper et le plus rapproché. La sonde New Horizons devait aller capter les premières images rapprochées de Pluton et de ses satellites, puis s’aventurer plus profondément dans la ceinture. La mission spatiale s’est révélée un immense succès. La sonde a atteint son objectif à l’été 2015 et nous a révélé que Pluton et ses satellites n’étaient pas les sphères rocheuses glacées et criblées de cratères que l’on imaginait, intactes depuis des milliards d’années. Pluton est au contraire un monde doté d’une
atmosphère et soumis à des activités géologiques et climatiques, couvert de glaciers d’azote, de dunes et d’autres reliefs semblables à ceux que l’on voit en Arctique, sans oublier des substances chimiques organiques.
Encore en bon état, la sonde a poursuivi sa mission jusqu’à son deuxième objectif : un astéroïde de la ceinture de Kuiper appelé Ultima Thulé. Cet objet est plus conforme à l’idée que nous nous faisons des astéroïdes, mais il est fort probable que les données qui nous parviendront au cours des prochains mois
contrediront cette vision. Comme la sonde est toujours fonctionnelle et qu’elle n’a pas épuisé son carburant, il est possible qu’elle visite encore une ou deux autres cibles. Maintenant, comme nous avons franchi la limite marquée par Ultima Thulé, il serait peut-être bon de renommer cet astéroïde.
Perdant de son éclat à mesure qu’elle s’éloigne de nous, Mars demeure visible au sud en soirée. Vénus brille intensément à l’est au petit matin, tandis que Jupiter est bas dans le ciel de l’aube. La Lune sera pleine le 13 janvier.
Ken Tapping est astronome à l’Observatoire fédéral de radioastrophysique du Conseil national de recherches du Canada, à Penticton (C.-B.) V2A 6J9. Tél. : 250-497-2300, téléc. : 250-497-2355