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A PROPOS DES CONDITIONS D’EFFICACITÉ DE LA LUTTE CONTRE L’ANALPHABÉTISME pp. 5-26.

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Academic year: 2022

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AKA Adou

Email:akaadou@hotmail.com YEO Soungari Email : ysoungari@yahoo.fr

IREEP/Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody/Abidjan

RÉSUMÉ

Dénoncé tout au long du 20ème siècle comme un véritable éau social, l’analphabétisme est de plus en plus intolérable en ce 21ème siècle. Et pourtant, la plupart des pays ont, à travers le monde, souscrit aux programmes engagés à son encontre Éducation Pour Tous, par exemple). Si malgré tous ces efforts, le phénomène persiste, c’est peut-être pour des raisons d’inef cacité des stratégies

mises en œuvre. Le présent article se propose d’examiner la question et d’ouvrir quelques pistes d’amélioration dont notamment, la formation des agents qui, sur le terrain, conduisent de façon concrète, cette lutte.

Mots-clés : Alphabétisation fonctionnelle, Analphabétisme, Ef cacité, Lutte, Stratégie.

ABSTRACT

Denounced throughout the 20th century as a social scourge, illiteracy continues to worry even humanity in the years 2016. Yet most countries, around the world, endorsed the programs initiated against him (“Education for all² for example).

If, despite all these efforts, the phenomenon persists, it may be

for reasons of inefficiency of the strategies implemented. This article will examine the matter and to open some areas for improvement including the training of agents in the field, leading concretely, this struggle.

Keywords: Functional literacy, illiteracy, Efficiency, Fighting, Strategy

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INTRODUCTION

« Améliorer de 50 % les niveaux d’alphabétisation des adultes, et notamment des femmes, d’ici 2015, et assurer à tous les adultes un accès équitable aux programmes d’éducation de base et d’éducation permanente », tel était l’un des objectifs de l’Education Pour Tous (EPT) fixés au forum mondial de Dakar en 2000. Depuis cette période (UNESCO, 2013), la réalisation de cet objectif de l’EPT progresse moins rapidement que celle d’autres objectifs.

D’après des statistiques assez récentes (UNESCO, 2015), il y aurait actuellement dans le monde près de 781 millions d’adultes analphabètes. Si le taux d’analphabétisme a légèrement reculé de 18 % en 2000 à 14 % en 2015, il faut cependant relever que le nombre d’analphabètes a continué d’augmenter, ce qui signi e que l’objectif de Dakar prévoyant de réduire l’analphabétisme de moitié n’a pas été atteint (Unesco, 2015). D’après Robert Lafon (1987) « l’analphabétisme est l’état d’une personne qui ne connaît pas l’alphabet, c’est-à- dire, qui ne sait ni lire, ni écrire par absence de tout rudiments d’instruction ». Considéré à raison, aux plans national et

international comme un véritable fléau, l’analphabétisme est décrié dans tous les pays du monde et principalement dans ceux qui constituent les pays en voie de développement. Mais, en dépit de l’importance des moyens mis en oeuvre pour le résorber et l’ingéniosité des projets et stratégies montés à son encontre, l’analphabétisme continue son petit bonhomme de chemin, décourageant ainsi, sur son passage, certaines bonnes volontés. Et pourtant, la lutte doit continuer tant que l’ennemi n’est pas tombé. Que faire donc ?

Dans les pays économiquement développés, si quelques fois l’on peut parler d’analphabétisme, il s’agit, dans la plupart des cas, de travailleurs immigrés qu’il apparaît nécessaire d’instruire, les populations autochtones touchées étant généralement en nombre très réduit. Autrement d it , ce ma l e st l’ un e de s caractéristiques principales des États neufs, des État pauvres.

Beaucoup de projets initiés dans ce domaine n’ont pu connaître l’issue attendue, à savoir pourvoir les béné ciaires d’instruments intellectuels de base susceptibles de leur permettre de mieux contribuer à l’effort national de lutte contre le sous-développement et la pauvreté. Pourquoi donc ?

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L’explication de cet état de fait renvoie à plusieurs éléments. Il y a d’abord la volonté politique de juguler le fléau qu’est l’analphabétisme. Les discours politiques favorables à la lutte contre l’analphabétisme n’entraînent pas toujours la mise en œuvre des moyens ef caces pour le vaincre. Mais même quand cette volonté existe, les voies et moyens propres à le réduire manquent et l’on se tourne alors vers les fameux bailleurs de fonds dont les priorités ne sont évidemment pas toujours ceux des demandeurs. Mais que l’on dispose de suf samment d’argent ou pas, le fait de pouvoir compter avec des ressources humaines s u f f i s a m m e n t q u a l i f i é e s constitue un atout déterminant d o n t m a l h e u r e u s e m e n t be au coup d’i ni tiat eur s d e projets d’alphabétisation ne semblent pas avoir toujours eu une conscience suffisamment nette. Se faire une idée claire de l’alphabétisation et de son enjeu dans l’évolution des nations, former des spécialistes capables d’animer des projets bien celés dans ce domaine, n’est-ce pas être déjà au cœur de la lutte ef cace contre l’analphabétisme?

Le présent texte dont la visée est d’apporter quelques éclairages sur cette question se structure en trois parties essentielles: la

première se consacre à l’examen des « fondements de la lutte contre l’analphabétisme ».

La seconde porte sur « les forme s de la lutt e contre l’analphabétisme ». En n, une dernière partie suggère quelques pistes pour permettre aux projets de pouvoir disposer d’agents ou d’animateurs d’alphabétisation plus performants.

I -FONDEMENTS DE LA LUTTE CONTRE L’ANAL- PHABETISME

René Maheu, ancien Directeur Général de l’UNESCO déclarait, il y a déjà quelques décennies, que « l’analphabétisme des masses constitue non seulement un déni de l’un des droits fondamentaux de l’homme, c’est- à-dire le droit à l’éducation, mais aussi un grave obstacle au développement économique et une menace pour la paix ».

Aussi, les gouvernements des pays concernés, conscients de cet état de choses, se montrent- ils de plus en plus convaincus que l’apprentissage de la lecture et de l’écriture est indispensable à l’évolution des populations.

Partant de là, ils sont tous d ’ a c c o r d p o u r c o n s i d é r e r l’analphabétisme comme un mal qu’il faut juguler, qu’à cet effet, la coopération entre régions ou

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entre pays est indispensable, et il faut utiliser les méthodes les plus efficaces, mais aussi les moins coûteuses à la fois en argent, en matériel et en personnel. C’est dans ce cadre que se justi e l’existence d’un certain nombre d’organismes nationaux et internationaux dont l’UNESCO. Il convient par ailleurs de souligner que la lutte contre l’analphabétisme ne se fait pas dans un but uniquement philanthropique. En effet, en-dessous des nombreux projets d’alphabétisation dont il n’est pas nécessaire de faire le recensement ici, se trouvent des raisons sociales, des objectifs économiques et politiques.

I-1. Aspect socio-économique de la lutte anti-analphabé- tisme

Si l’analphabétisme qui affecte en particulier les populations des pays sous-développés ne date pas d’aujourd’hui, il n’a cependant pas toujours été gênant. En effet, tant que dans une société donnée, vivant en quasi « autarcie » et fidèle à ses traditions, personne ne sait ni lire, ni écrire, le fait de l’analphabétisme ne soulève a priori aucun problème. Il ne devient problème qu’à partir du moment où cette société, par suite d’un rapprochement avec

d’autres peuples, s’aperçoit de l’insuffisance de ses horizons traditionnels et de la nécessité, pour survivre, d’adopter un nouveau mode d’existence basé sur l’apport de la science et de la technologie moderne. Dès lors, l’alphabétisation devient un besoin des plus importants dont la satisfaction pose un grand nombre de problèmes.

A mesure que la cadence du progrès technique s’accélère et que la poussée démographique devient importante, le problème de l’analphabétisme prend de l’acuité. D’après Mary Burnet (1965), les réponses essentielles données à la question « pourquoi voulez-vous apprendre à lire ? » posée à des personnes adultes, lors d’une enquête au compte de l’UNESCO, furent les suivantes :

- « pouvoir tout lire, surtout les journaux, afin de mieux s’informer…. »

- « pouvoir garder ses secrets en écrivant et en lisant ses propres lettres….. »

- « pouvoir accéder à un emploi meilleur, ou pouvoir mieux gérer ses propres affaires…. »

- « pouvoir acquérir ou conserver un certain prestige social ».

On voit donc à travers ces réponses, que les problèmes qui se posent à l’analphabète

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sont nombreux et qu’ils rendent difficile, son adaptation au train de vie actuel. Une fois transplanté à la ville, l’illettré s e h e u r t e à l ’ i mp é r i e u s e nécessité de savoir lire. Comme le disait un éducateur, « une ville, c’est un livre », ce qui est vrai dans la mesure où l’on trouve partout des signaux, des affichages, des indications de prix de marchandises, etc. Avec l’exode rural que connaissent tous les pays du monde, en particulier, ceux dits en voie de développement, les villes regorgent de gens venus des c a m p a g n e s , a v e c l ’ e s p oi r de trouver un emploi et des conditions de vie « meilleures ».

Malheureusement, ils sont souvent déçus et quand ils arrivent à en trouver, on ne leur offre que des salaires de misère parce que justement ils sont illettrés et très souvent sans aucune quali cation qui convienne aux préoccupations des entreprises et de l’administration.

Si l’alphabétisation de tout ce monde peut être considérée a priori, comme très positive pour les intéressées, force est de reconnaitre qu’elle constitue aussi une contribution très importante au développement économique et social du pays.

Dans ce même ordre d’idées,

Kofi Anan, ancien Secrétaire Général de l’ONU soulignait que

« l’alphabétisation est un facteur déterminant du changement et un outil pratique d’autonomisation en ce qui concerne chacun des trois principaux aspects du développement durable, à savoir le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement ».

Dans ce sens, la lutte doit se mener à la fois au niveau des villes et des zones rurales.

I -2. Aspect politique du pro- blème

En se référant à l’histoire de la lutte contre l’analphabétisme, on se rend compte du fait qu’un bon nombre de projets se sont soldés par un échec, ou n’ont jamais pu démarrer. Les raisons à cela sont loin d’être toujours techniques ou nancières comme on semble souvent les faire paraître. En effet, la pression de l’opinion internationale oblige bien des puissants et des États de ce monde à se déclarer favorables au principe de l’instruction universelle.

Mais, il y en a parmi eux qui, vraisemblablement s’imaginent que leur situation politique et sociale risque d’être compromise le jour où ce vœu se réaliserait, car nul n’ignore que l’instruction

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pourrait susciter bien d’autres aspirations, sources sûres de revendications par la suite. Pour ceux qui restent convaincus de la nécessité de la mener, la lutte contre l’analphabétisme peut être initiée de plusieurs manières: Parfois, ce sont les gouvernements eux-mêmes qui suscitent délibérément ce besoin, convaincus de ce que l’alphabétisation contribuera certainement à améliorer les conditions d’existence des masses. Mais dans beaucoup de cas, les cours d’alphabétisation sont organisés en réponse à une demande spontanée qui, des fois, se manifeste avec tellement de force que les gouvernements, pour des raisons diverses, se gardent de les encourager, malgré des discours tout à fait favorables bien entendu. La tendance dans ce cas est, bien évidemment, à décourager toute initiative dans ce sens. C’est ce qui, de nos jours, rend le problème de plus en plus dif cile à résoudre. Madame Welthy Fisher, fondatrice de l’ONG Internationale Américaine World Éducation, œuvrant en Inde, pour le compte de l’UNESCO, il y a de nombreuses années, disait :

« On m’a souvent dit : ces gens-là s’accommodent fort bien de leur pauvreté. N’allez pas leur mettre le doute au cœur. Ce qu’on perd

de vue quand on est soi-même instruit, commente-t-elle, c’est que les illettrés ont déjà le doute au cœur ». Ainsi, de nombreux gouvernements se trouvent devant un dilemme : s’ils se rendent compte de l’incidence positive de l’alphabétisation complète des citoyens sur la vie économique et sociale du pays, ils semblent cependant craindre pour leur propre sécurité sociale et politique, dans la mesure où ils sont persuadés qu’une fois lettré, chacun voudra s’exprimer, revendiquer ses droits, prendre des positions politiques et refuser par là-même, qu’on le mène mains et pieds liés n’importe où. Mais n’est-ce pas là une aspiration légitime

? Il s’agit en effet de choisir : il y a alors d’une part, ceux qui croient en la démocratisation du système social, et qui optent, sans se soucier de ce genre de risque, pour l’alphabétisation, l’i nstruc t ion po ur t out le monde, et d’autre part, ceux qui préfèrent maintenir les peuples, dans leur grande majorité, dans l’obscurantisme le plus abject.

Hélas, dans cette deuxième catégorie, il ne manque pas d’exemples à travers l’histoire de l’humanité. Le maintien des masses dans l’analphabétisme le plus complet a toujours été l’une des principales caractéristiques

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des pouvoirs antinationaux et dictatoriaux dont regorge le tiers monde. Pour l’émancipation de tous les pays et des masses qui en constituent les populations, une lutte efficace et résolue doit être engagée et conduite contre ce fléau social qu’est l’analphabétisme.

II- LES FORMES DE LUTTE CONTRE L’ANALPHABE- TISME

L a l u t t e c o n t r e l’analphabétisme peut prendre plusieurs formes. On peut en gros distinguer l’alphabétisation traditionnelle, et l’alphabétisation dite fonctionnelle.

II- 1. L’alphabétisation tradition- nelle ou classique

Dans les débuts de la lutte contre l’analphabétisme, l’on s’était limité à faire acquérir aux individus, la capacité relative de déchiffrer des lettres, puis de les combiner pour constituer des mots (méthode analytique) ou d’identi er, à partir de mots écrits, les lettres à étudier, à apprendre à les reproduire et les utiliser dans d’autres mots ou des phrases (méthode globale).

Autrement dit, l’alphabétisation c o n s i s t a i t s i m p l e m e n t à apprendre à lire à une personne

de sorte qu’elle comprenne le sujet de sa lecture, et à écrire un message simple ayant trait à sa vie quotidienne (UNESCO, 1951)1. Cette première conception de la lutte anti-analphabétisme s’est révélée assez lacunaire et a connu de ce fait, de nombreux échecs dont l’une des explications possibles se résume dans l’af rmation suivante d’un éducateur originaire de l’Inde:

«Si l’histoire des mouvements d’alphabétisation dans le monde est jalonnée de déceptions et d’échecs, c’est que trop souvent, on a commencé les cours avant d’avoir donné aux futurs élèves, un vif désir d’apprendre à lire et à écrire». Des fois, l’analphabète se fait une raison d’apprendre à lire et à écrire; mais lorsqu’il s’aperçoit de ce que le fait de

« savoir lire » ne résout pas toujours tous ses problèmes, il se décourage, devient hostile à toute autre nouvelle proposition d’alphabétisation, et nit même par décour ager les autres éventuels candidats. Ainsi, l’alphabétisation traditionnelle n’a pas tardé à se révéler comme une perte de temps pour ceux- là mêmes à qui elle s’adressait.

1- En 1951, l’Organisation des Nations unies pour l’édu- cation, la science et la culture (Unesco) dé nissait la personne alphabétisée comme celle «capable de lire et d’écrire, en le comprenant, un exposé simple et bref des faits, en rapport avec sa vie quotidienne»

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Devant une telle situation, il fallait trouver d’autres solutions.

On en est donc venu à une nouvelle approche, à savoir l’alphabétisation fonctionnelle.

II- 2. L’alphabétisation fonc- tionnelle

C’est au milieu des années 1960 qu’apparut un nouveau concept, celui d’alphabétisation f o n c t i o n n e l l e . E n 1 9 7 8 , l’UNESCO considérait qu’« est fonctionnellement analphabète, u n e p e r s o n n e i n c a p a b l e d’exercer toutes les activités pour lesquelles l’alphabétisation est nécessaire dans l’intérêt du bon fonctionnement de son groupe et de sa communauté et aussi pour lui permettre de continuer à lire, à écrire et à calculer en vue de son propre développement et de celui de sa communauté » ( Enc ar t a, 1 99 8 ) . P o ur l e s spécialistes, l’alphabétisation fonctionnelle doit permettre au sujet d’acquérir la capacité de lire et d’écrire avec une aisance suf sante pour utiliser ces compétences à des fins pratiques et pour communiquer avec des personnes instruites de son groupe social. Ainsi, l’alphabétisation fonctionnelle se révèle comme la clé qui ouvre les « portes de l’avenir » puisque celui qui a atteint ce niveau a appris à apprendre lui-même.

Dès lors, il n’a plus à se contenter de ce que les autres veulent bien enseigner, car il peut trouver personnellement, ce qu’il désire savoir. Il peut améliorer sa condition professionnelle et de vie, et contribuer plus ef cacement à la vie politique et socio-économique de son pays.

L’alphabétisation fonctionnelle veut aboutir à l’acquisition de compétences professionnelles et de connaissances utilisables.

Dans ce sens, tout programme doit être conçu en fonction des besoins collectifs et individuels.

P ar ai ll eu rs, d ans un t el programme, l’acquisition de la culture, de l’écriture et la formation, qu’elle soit technique, professionnelle, scientifique, socio-économique, civique, etc., doit être considérée comme c o m p o r t a n t d e s a c t i v i t é s i nt ég r é e s , i n d i s s o c ia b l e s . En outre, les programmes d’alphabétisation fonctionnelle doivent être exibles et permettre de ce fait, un ajustement à des objectifs immédiats, à des situations particulières.

E n r és u m é , l ’ o b j e c t i f d e l’alphabétisation fonctionnelle est de mobiliser, de former et d’éduquer la main d’œuvre encore sous-employée, que ce soit dans les villes ou dans les zones rurales, a n de la rendre plus productive, plus utile à

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elle-même, ainsi qu’à la société entière. En intervenant ainsi, elle vise à la fois la formation intellectuelle et civique du travailleur, et son adaptation au nouveau mode de développement.

Lorsque l’action est bien menée, les résultats se ressentent au niveau de la productivité globale des entreprises et par extension, au niveau du développement national. En raison de la valeur p é d a g o g i q u e a u j o u r d ’ h u i reconnue à cette approche, nous nous permettrons d’y insister un peu plus.

II- 2-1. Stratégie pédagogique d e l ’ a l p h a b é t i s a t i o n fonctionnelle

Elle consiste à adapter la lutte aux exigences du plan global de développement et à dé nir les systèmes pédagogiques les plus appropriés (Freire P, 1974). Pour cela, il faut :

a) – définir les objectifs de formation et les priorités;

b) – définir un système p é d a g o g i q u e p e r m e t t a n t d’atteindre ces objectifs.

Au niveau de chaque problème, les contenus doivent être établis à partir de deux sources, à savoir les objectifs visés et les besoins et désirs des individus eux-mêmes ainsi que ceux du

milieu dans lequel ils vivent.

L’alphabétisation fonctionnelle requiert, comme toute autre fo rme d ’ensei gnement , un personnel quali é qui, presque toujours, comprend une cellule de conception et des agents chargés de la mise en œuvre sur le terrain, des stratégies arrêtées. La cellule de conception doit en principe comprendre un sociologue et si possible, un psychopédagogue ou à défaut, un psychologue suf samment ouvert aux questions relatives à l’éducation, afin de mieux s’informer sur la population concernée, ainsi que sur les aspects psychologiques des différents apprentissages que comporte le programme. La stratégie pédagogique en matière d’alphabétisation fonctionnelle trouve son assise dans un certain nombre de principes de base ; à savoir, le principe de convergence et celui d’une pédagogie spéciale

II-2-1-1. Principe de convergence

Tout problème doit être étudié sous ses différents aspects, c’est- à-dire technique, scienti que, socio-économique, politique, mathématique, etc. Autrement dit, les méthodes doivent être conçues comme des méthodes d’études de problèmes et c’est par cette étude et à travers elle

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que s’opère l’acquisition des connaissances et se réalise la formation. Ce processus revêt donc une phase d’étude et une phase d’action auxquelles doit être incorporé l’apprentissage de l’écriture, de la lecture et du calcul.

II-2-1-1-1. Étude du problème

T r o i s p r i n c i p e s e s s e n - tiels doivent être observés dans l’étude du problème.

- le problème doit être énoncé sous forme de questions précises, en vue d’une prise de conscience claire chez les participants;

- on procède ensuite à une analyse descriptive et explicative des données du problème, en vue de l’utilisation des notions connues et de l’acquisition de connaissances nouvelles;

- le groupe de formation doit être amené à proposer, une ou des solutions au problème étudié.

I I - 2 - 1 - 1 - 2 . P h a s e d’action

Il s’agit de prendre une décisio n et de l’ap pliquer e f f e c t i v e m e n t , e n v ue d e l’adoption, à court, à moyen ou à long terme, de nouveaux comportements. L’étude du

problème doit offrir l’occasion d ’ ap p re nd re l e s s y m b ole s du langage mathématique et assimiler le raisonnement qui les sous-entend. Ainsi conçu, l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul acquiert une signification pratique du vécu, en favorisant la xation des connaissances relatives au problèm e posé, l’accè s aux autres sources écrites d’information et l’acquisition d e no u v e au x s ch é m as d e pensées. La convergence des différents éléments de réponse aux questions soulevées par le problème entraîne donc l’intégralité des activités de formation en elles-mêmes.

I I - 2 - 1 -2 . P é d a g o g i e spéciale

II-2-1-2-1. Méthodes d ’ a p p r e n t i s s a g e t e c h n i c o - p r o f e s s i o n n e l e t socio-économique.

- Activités pratiques en milieu agricole

Elles prennent généralement la forme soit de démonstration de méthodes, soit de démonstration par comparaison de résultats.

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- Activités pratiques en milieu industriel

En général, la formation se fait sur les lieux de travail : l’entreprise intéressée dispose d’ un ateli er de for mati on conséquemment équipé pour des activités pratiques.

- Activités de formation théoriques en salle

Elles peuvent précéder ou prolonger les activités pratiques, et visent une analyse aussi com p lète qu e p oss ible du problème abordé sous ses différents aspects. La liaison entre les activités pratiques et les activités théoriques doit être assurée par le contenu du thème- problème et par des supports pédagogiques appropriés, tels que les affiches, les moyens audiovisuels.

II-2-1-2-2. Métho de d’apprentissage de la lecture

L’apprentissage de la lecture doit viser, dès le départ, à développer la lecture idéo- visuelle, c’est-à-dire l’aptitude à percevoir simultanément les symboles et leur signi cation.

Aussi, dès le départ, la lecture doit-elle être véhiculaire et dans

cette optique, la méthode globale semble préférable. Ainsi, on apprendra le « tout » ou le mot avant la « partie », c’est- à-dire la lettre, ou la syllabe.

Cette démarche dite méthode globale, est empruntée à ce que nous avions quali é plus haut, d’alphabétisation classique, avec un effort d’amélioration à la fois de son contenu et de sa forme pour la rendre plus performante, au regard des exigences de l’alphabétisation fonctionnelle. En effet, du point de vue technique, on peut retenir deux étapes essentielles qui peuvent être résumées comme suit :

- L es s ujets acquiè rent d’abord globalement un certain nombre de mots (non choisis au hasard) qu’ils retrouvent ensuite dans des contextes de plus en plus variés. Il s’agit là d’une application des théories de la Gestalt (théorie de la forme).

- Ils procèdent ensuite à d e s c o m p a r a i s o n s , à d e s rapprochements a n d’identi er d e s é l é me n t s s e m b l a b l e s (syllabes, lettres) qui seront utilisés pour l’entraînement à la lecture de syllabe ou de mots comme l’indique le schéma qui suit:

Phrase---mots---syllabes---lettres---syllabes---mots.

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II-2-1-2-3. Méthode d’apprentissage de l’écriture

L’apprentissage de l’écriture doit s’insérer dans l’activité globale de formation et d’acquisition des symboles graphiques, et doit être synchronisé avec celui de la lecture. Le principe reste le même, c’est-à-dire qu’il faut former des mots entiers et procéder en même temps à des exercices de comparaison de forme de lettres, n d’isoler la lettre étudiée. Cela facilite l’entraînement graphique et le développement.

II-2-1-2-4. Initiation au calcul

Le calcul doit être conçu comme un outil de travail et d’action. Il doit aider le sujet à comprendre et à résoudre les problèmes qui se posent à lui. Par ailleurs, dans une certaine mesure, l’apprentissage du calcul permet à l’analphabète en formation d’améliorer son raisonnement logique. Il ne faut pas oublier que les analphabètes savent déjà calculer, mais de manière relativement empirique.

Aussi, convient-il de tenir compte de ces connaissances de base et de fonder l’enseignement du calcul sur la mathématisation des situations-problèmes vécues.

Cette façon de procéder facilite le

passage de l’opération concrète à sa traduction symbolique.

Les méthodes et instruments péd agogiques d oivent être expérimentés préalablement à leur vulgarisation, afin de les ada p ter aux cont enus des programmes, au profil professionnel de l’instructeur, aux besoins et à la psychologie des adultes analphabètes.

II-2-2- Le cas FIBAKO/

IVOIREMBAL.

Le cas présenté ici a pour vocation d’illustrer l’approche ci-dessus décrite. FIBAKO et IVOIREMBAL sont deux c o mpo s a n te s d ’ un g r o up e industriel installé à Bouaké, ville importante située au Centre de la Côte d’Ivoire. La première de ces deux entreprises, FIBAKO produit à partir du Sisal, des fils et cordages qui servent à la confection des sacs et autres emballages destinés aux producteurs du monde a g ri co l e e t in du s tr i e l . L a seconde, IVOIREMBAL, s’occupe de la fabrication d’emballages industriels divers. La grande majorité des ouvriers de ces usines se compose de personnes ne sachant ni lire, ni écrire, c’est-à-dire des analphabètes.

Non seulement leurs tâches quotidiennes leur impose une certaine adresse, notamment

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au niveau de l’utilisation de machines dangereuses mais aussi, la matière sur laquelle ils travaillent comporte également des risques, des dangers qui exposent leur santé. Il s’agit du Sisal2. Pour les responsables de cette unité de production, con sc ient s d e ce qu e d es ouvriers sachant lire et écrire, seraient plus performants et permettraient d’éviter bien des accidents, intoxications, maladies etc., ou tout au moins, d’en réduire le nombre, n’ont pas hésité, lorsque nous les avions contactés dans le cadre de notre programme de prospection, à retenir comme

a c t i o n e n f a v e u r d e s t ra vail le urs, d es se ssi ons d’alphabétisation fonctionnelle.

Comment avions nous travaillé?

La procédure mise en œuvre comportait plusieurs étapes.

1- L’entretien avec les respon- sables de l’entreprise.

C e t t e p r e m i è r e é t a p e consistait à recueillir auprès des intéressés, un certain nombre de données qui nous permettaient à la fois de clari er la demande, et d’identi er un certain nombre de concepts clés et de centres

2 «Agave du Mexique» dont les feuilles ont des bres qu’on utilise pour faire des sacs, des cordes (famille des agavacées) - in Le petit Larousse 2000 (Dictionnaire)

d’intérêts à prendre en compte dans l’élaboration du contenu des sessions de formation.

2- L’observation de l’environ- nement immédiat de travail.

Cette phase avait pour but de nous permettre d’identi er, de décrire de façon objective, les équipements et matériel de travail et d’en expliquer le fonctionnement, ainsi que les procédures qui sous-tendent la production. Au cours de cette visite guidée par un des chefs d’atelier (agent de Maîtrise), l’identification des concepts clés et des principaux centres d’intérêt se poursuivait et se systématisait. Il s’agissait donc d’une phase fondamentale de la démarche d’élaboration d u c o n t e n u e n m a t i è r e d’alphabétisation fonctionnelle.

En effet, un des principes importants est, rappelons-le, qu’à travers l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul, l’apprenant acquière des connaissances nouvelles, pertinentes par rapport à son environnement, à son travail. Il ne s’agit donc pas, en le formant, de le limiter à des généralités, mais plutôt, de lui faire faire des apprentissages signi catifs en rapport avec son contexte de vie et de travail. Recueillir des données pertinentes liées

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à ce contexte comme matériau à exploiter, tel était l’objectif de cette seconde phase.

3- Entretien avec les ouvriers, béné ciaires de cette formation.

Il s’agit ici d’une autre phase du processus de recueil des données pertinentes à prendre en compte. Il fallait en effet écouter les personnes travaillant dans les ateliers et sur les machines qu’il nous avait été donné d’observer.

Nous avions ainsi pu recenser auprès d’elles, des concepts d’ordre socioprofessionnel, mais également, les différents types de dif cultés et de problèmes qu’ils sont quotidiennement appelés à résoudre. Quels sont les grands problèmes qu’ils vivent dans leur pratique professionnelle, comment les expliquent-ils et comment les résolvent-ils, etc.

Grâce à leur disponibilité et à leur intérêt par rapport au projet, nous avions pu trouver, à travers les réponses fournies, les solutions aux questions qui se posaient.

4- Traitement des matériaux rassemblés

Les données ainsi recueillies ont été, dans leur ensemble, soumises à une analyse qui nous a, par la suite, permis de dégager les idées essentielles. A partir de

ce premier travail, l’organisation pédagogique du contenu a pu être envisagée. Quels sont les concepts intéressants à retenir ? Quels sont les principaux messages techniques à faire passer à travers cette formation ? Quelle est la progression pédagogique à suivre ? Quelle formule pédagogique retenir? Comment opérer l’évaluation de chaque séquence d’apprentissage ? Etc.…

Telles sont là, quelques unes des préoccupations qui avaient animé l’équipe à ce stade de la démarche empruntée. Des réponses pertinentes y ont été apportées.

5- Confection des ouvrages Le contenu une fois élaboré, les différents problèmes relevés à travers les interrogations ci- dessus, il s’agissait de passer à la phase de confection des ouvrages nécessaires, à savoir le livre « Élèves » et le livre

« Maître ». C’est dans le livre

« Élèves » que se trouve consigné le message à faire passer auprès des béné ciaires, les différentes séquences d’apprentissage à réaliser par eux, à savoir la grammaire, le vocabulaire, les exercices en rapport avec les différents instruments à

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acquérir qui sont la lecture, l’écriture et le calcul. L’action d’alphabétisation fonctionnelle ne peut être ef cace sans ces supports écrits indispensables à l’entraînement systématique des apprenants3. Il importe qu’en plus de cet ouvrage (livre

«élèves ») d’autres documents soient identi és, confectionnés et mis à la disposition des apprenants pour leur permettre de continuer de s’entraîner à la lecture par exemple, en dehors notamment des séances de formation. Quant au livre du « Maître » il s’agit en fait d’un ouvrage à vocation plutôt méthodologique, devant servir de guide au formateur dans son intervention pédagogique.

Les deux types d’ouvrages, et en particulier, celui destiné aux apprenants, ont fait l’objet d’une validation avant d’être utilisés;

cette validation est passée par un pré-test dont le but était de découvrir les imperfections d’ordr e pédag ogique et de contenu de ces ouvrages avant leur exploitation en classe.

6- Le calendrier des sessions.

Le calendrier de réalisation du projet est le résultat de

3- Les supports écrits peuvent être complétés par des supports audio ou audiovisuels qui pourraient rendre l’apprentissage encore plus ef cace. Le coût constitue toutefois, le frein essentiel à cette association de supports.

négociation avec le demandeur de la formation. Il s’était en effet, agi de dé nir ensemble les jours et les horaires qui conviennent à la fois aux bénéficiaires et plus particulièrement au demandeur dont évidemment, les objectifs de production doivent nécessairement pouvoir se poursuivre dans le même temps. Pour l’entreprise retenue dans la présente étude de cas, les séances de formation avaient été proposées pour les ns de journée précisément tous les soirs, de 17 h à 19 h ou de 18h à 20h. La durée de chaque séance variant de 1h30 à 2 heures.

Chaque groupe de formation comptait de 12 à 15 personnes.

Par ailleurs, pour chaque groupe de participants, le contenu était structuré en trois modules A, B et C ; de niveau de dif culté croissant. Au total, chacun de ces trois modules comptait environ 120 heures, l’ensemble de la formation pour chaque groupe de bénéficiaire étant estimé au départ à 360 heures.

7-Organisation et animation des sessions :

Les séances avaient lieu au sein même de l’entreprise F I B A K O I V O I R E M B A L q u i disposait de quelques salles ré s er vé e s à la f o rma tio n . L ’ a v an t a g e p r e m i e r d e la

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réalisation de la formation sur site est le fait qu’elle évite aux béné ciaires d’avoir à résoudre des problèmes de déplacement;

mais il existe aussi un autre avantage qui réside dans le fait que s’agissant également d’un perfectionnement par rapport au poste de travail, le fait de se retrouver dans son environnement professionnel, o f f r e a u x i n t é r e s s é s d e s références concrètes relatives aux différents concepts et faits autour desquels les contenus et les modules sont bâtis. Il existe cependant quelques désavantages dont le fait par exemple que les bénéficiaires puissent être dérangés de façon régulière, parce qu’on aurait besoin d’eux pour des urgences.

Dans le cas d’espèce cela ne s’est pas souvent produit en raison des horaires retenus.

L’animation des différentes séances d’alphabétis ation fonctionnelle avait été assurée par des animateurs ou agents d’alphabétisation. Il s’agit de jeunes gens (garçons et lles) recrutés avec un niveau d’études générales variant du BEPC à la classe de terminale, et entraînés plus ou moins à l’utilisation des méthodes d’alphabétisation fonctionnelle. Comme dans tout processus d’enseignement-

apprentissage, le formateur, ici, l’Agent d’alphabétisation, joue un rôle déterminant. C’est en effet, lui qui a, en charge d’aider les bénéficiaires à accéder à la maîtrise des instruments intellectuels pour lesquels, ils se retrouvent en situation d’apprenants. Dans le cas exposé ici, la pratique avait très tôt, mis en relief, les limites de ces animateurs, notamment, par rapport à leur niveau de maîtrise des méthodes et techniques p é d a g o g i q u e s a p p l i q u é e s à l ’ a l p h a b é t i s a t i o n . D e s nombreuses carences relevées, nous avions retenu qu’un accent particulier devrait être mis sur leur formation. Il s’agit en effet d’une formation professionnelle spécialisée qui ne saurait être réduite à une formation sur le tas essentiellement, ou laissée, comme c’est encore trop souvent le cas, à l’improvisation et à l’amateurisme. Comment envisager donc une formation professionnelle plus ef cace de cette catégorie de formateurs?

III- POUR DES AGENTS D’AL- PHABETISATION PLUS PERFORMANTS.

III-1. L’Agent d’alphabétisa- tion : un Enseignant, un Formateur

Être Enseignant ou Formateur

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est une profession, c’est-à-dire que ceux qui l’exercent en tirent les revenus qui leur permettent de vivre. C’est là une dé nition générale de la profession.

Carr, Saunders et Wilson (in Thines G. et Lempereur A., 1975, p.757), dépassent un peu ce premier niveau pour dire « qu’il y a profession quand un type d’activité ne s’exerce que moyennant l’acquisition d’une formation surveillée, la soumission à des règles et des normes de conduite entre les membres et à l’égard des non membres, et l’adhésion à une éthique du service social ». A travers cette dé nition, il apparaît une notion importante : la notion de formation. Il n’a en effet jamais paru discutable à qui que ce soit, que celui qui veut accéder à la profession d’Ingénieur, de Médecin, d’Avocat, de Menuisier, de Mécanicien, etc., soit formé à cela, c’est-à-dire qu’il doit passer par une phase plus ou moins longue au cours de laquelle il est mis dans des conditions lui permettant d’acquérir l’ensemble des savoirs, savoir-faire et savoir- être qu’exige la pratique de ladite profession. Eh bien, il n’en est pas autrement pour l’exercice de la profession de formateur en général, et en particulier pour l’agent d’alphabétisation. Quelles

sont donc les connaissances, c o m p é t e n c e s e t q u a l i t é s requises, et comment les dé nir

? Comment les faire acquérir aux futurs enseignants ?

III-2. Du contenu de la formation S’agissant de la formation des agents d’alphabétisation c o m m u n é m e n t a p p e l é s alphabétiseurs, l’analyse par laquelle nous avons abordé ces propos nous situe quelque peu sur l’étendue du contenu que les candidats alphabétiseurs doivent maîtriser. Les objectifs y c o r r e s p o n d a n t a y a n t été présentés au niveau de l’in tro ducti on, nous n ous contenterons ici, d’un simple rappel, à savoir qu’à la n de leur formation, les intéressés devront être capables :

- d e d é f i n i r d e f a ç o n opérationnelle, l’analphabétisme et l’alphabétisation;

- d’analyser les stratégies d e f o r m a t i o n d e s a g e n t s d’alphabétisation.

- d’utiliser les différentes approches en matière de lutte contre l’analphabétisme.

Une analyse de ces objectifs s p é c if i q u e s so u t e n u e p ar une étude de poste basée sur l’observation de l’agent

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d’alphabétisation au travail, devrait permettre de mieux af ner les compétences requises par la profession de formateur à laquelle ils se destinent, celle d’agent d’alphabétisation

ou mieux, de formateur en alphabétisation : Une première ré exion sur cette question nous autorise à proposer à cet effet, le diagramme suivant :

En effet, la pratique ef cace de s a p rof ess ion e xige de l’agent d’alphabétisation, de nombreuses tâches qui peuvent se repartir pour l’essentiel dans les grandes catégories indiquées dans le diagramme ci-dessus.

Quelles sont-elles ?

I I I - 2 - 1 . C o n c e p t i o n / Exploitation de Supports Pédagogiques.

Comme tout formateur, l’agent d’alphabétisation ne peut se passer d’un certain nombre de supp ort s p édag ogiqu es destinés soit à lui-même, soit au public auquel il s’adresse. Il

peut s’agir de documents écrits (ce qui est le plus courant), de supports audiovisuels, tels que les diaporamas, vidéos, transparents, visuels (images, affichages, etc.) ou sonores (bandes magnétiques, etc.).

Dans l’exercice de sa fonction, il peut se trouver devant au moins deux situations différentes. Tous les documents et supports existent déjà, sont confectionnés par d’autres personnes et il n’a alors qu’à apprendre à les exploiter, à les utiliser ef cacement. On lui apprendra donc à connaître ces supports et à être capables de les

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appliquer dans un cours. Si au contraire, ils n’existent pas, alors il est appelé non pas seulement à les connaître, et à les appliquer, mais, auparavant, à les concevoir, à les créer (ou les fabriquer), à les valider pour pouvoir les utiliser avec des chances de succès. Dans ces deux (2) cas, les compétences auxquelles le futur agent d’alphabétisation doit être formé varient de façon signi cative : en effet exploiter un document ou un livre « élève » déjà existant est différent du fait de créer soi-même ce support écrit pour pouvoir l’utiliser.

Une formation complète à ce niveau, devrait inclure ces deux dimensions.

III-2-2. Planification des s e s s i o n s o u a c t i o n s d’alphabétisation.

La plani cation d’une session ou d’une action de formation quelle qu’elle soit, consiste en l’exécution d’un certain nombre de tâches, notamment :

- Identi er un besoin ou un ensemble de besoins

- Sélectionner le public-cible - Dé nir les objectifs visés - Élaborer le(s) contenu(s) - Construire la ou les stratégies (méthodes, techniques, moyens)

- Sélectionner le lieu

- Indiquer les périodes et dates, etc.

- Établir le calendrier et le négocier.

L’agent d’alphabétisation en tant que formateur doit pouvoir répondre à toutes ces préoccupations et il faut donc d’une manière ou d’une autre l’y former.

III-2-3. Animation des sessions ou actions d’alphabétisation.

Il s’agit ici de la phase dans laquelle l’Agent d’alphabétisation se trouve face à son public- cible pour l’aider à réaliser les apprentissages attendus d’eux.

La question qui se pose est celle de savoir comment l’amener à la réalisation effective de ces apprentissages. Cette question ramène on s’en doute, à la connaissance et à la maîtrise des méthodes, techniques et supports pédagogiques. En un mot, on devrait, dans le cadre de sa formation, lui donner les moyens d’être capable, face à toute situation d’alphabétisation d’identi er, de sélectionner les méthodes, techniques et supports les plus indiqués pour bâtir la meilleure stratégie pédagogique par rapport aux objectifs visés.

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I I I - 2 - 4 . É v a l u a t i o n d e s apprentissages.

En sa qualité de formateur, l’agent d’alphabétisation sera nécessairement confronté aux problèmes que pose l’évaluation.

Se renseigner et renseigner régulièrement l’apprenant sur sa progression par rapport aux apprentissages attendus et donc aux objectifs visés, est une préoccupation constante à laquelle il devra pouvoir faire face. C’est pourquoi ceux qui sont chargés de sa formation devront l’amener à définir les modalités d’évaluation cohérentes et adéquates, à construire des instruments de mesure et d’évaluation ables lui permettant de réduire autant que possible, la subjectivité, toujours aux aguets, en la matière. Voici donc là évoquées, quelques unes des compétences que le formateur d’agents d’alphabétisation doit s’attacher à faire acquérir aux apprenants. Mais comment y parvenir ? Telle est la deuxième question.

III-3 Stratégies de Formation.

P e n d a n t l o n g t e m p s , la formation à la fonction d’enseignant ou de formateur, même dans des structures assez modernes, a souvent consisté à faire observer aux

élèves - maîtres ou élèves - professeurs, des leçons données par un modèle c’est-à-dire un enseignant ou formateur ayant acquis une certaine expérience, et considéré comme très bon, très compétent. Les stagiaires sont ensuite mis en situation de pratique où chacun doit essayer à travers ses prestations, de faire comme ce « modèle », chaque séquence d onnant lieu à une séance plénière au cours de laquelle des critiques constructives sont adressées au prestataire. Mais cette approche pose un certain nombre de problèmes; entre autres, ceux liés à l’ambiguïté de la notion même de modèle, les risques pour le stagiaire de ne faire que copier l’autre, l’incapacité d’initiatives personnelles qui, à la longue, peut s’installer, etc. Les recherches en matière de stratégies, de méthodes et techniques pour la formation des enseignants ont abouti à la mise au point en 1963, à l’Université de Stanford (U.S.A.), de la technique du micro-enseignement (Allen D. et Ryan K., 1972). Dans les structures actuelles de formation des Enseignants et autres formateurs, cette technique est très usitée. Presque chacune d’elles dispose d’équipements spécialisés (vidéo et autres supports pédagogiques). Bien

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sûr, elle n’est pas parfaite, cette technique ou cette approche du problème de la formation des maîtres. Mais l’expérience montre que lorsque toutes les conditions sont réunies, elle peut être très opérationnelle. Pour la formation des agents d’alphabétisation, cette technique reste également valable, notamment lorsqu’il s’agit de faire acquérir aux intéressés les habilités et compétences professionnelles préalablement dé nies notamment avec eux. La technique du micro-enseignement n’exclura évidemment pas les autres approches pédagogiques, notamment toutes celles qui consistent en de la mise en situation des apprenants pour la réalisation d’apprentissages plus concrets et plus signi catifs : Jeux de Rôle, observation directe, exercice d’application, etc.

CONCLUSION

L’i mpor tance q u’i l fau t reconnaître à la fois à la nécessité de l’alphabétisation et aux agents qui doivent en être chargés est assurément proportionnelle au taux d’analphabétisme actuellement enregistré dans le monde en général et dans nos contrées sous-développées.

Les méthodes et techniques mises au point dans la lutte c o n t r e l ’ a n a l p h a b é t i s m e évoluent certes lentement, mais on avance tout de même.

Aujourd’hui, deux principales a p p r o c h e s p r é d o m i n e n t , à savoir l ’alphabétisat ion que nous avons qualifiée de traditionnelle et l’alphabétisation dite fonctionnelle. Toutes deux impliquent, pour être utilisées avec ef cacité, des aptitudes et compétences dont la maîtrise requiert une formation bien pensée. Contrairement à la p rat iqu e anc ie nne , on ne devrait plus se contenter de recruter les agents chargés d’a lp habé tis er le s ma ss es avec un niveau généralement très bas (CEPE, BEPC etc.) pour les envoyer directement s ur le t err ain de l’ac t ion pédagogique. Ce serait vouer cette formation à l’inef cacité généralement observée. Seule une formation préalable destinée à faire acquérir aux candidats formateurs en alphabétisation, une compétence professionnelle réelle peut permettre d’éviter un tel écueil. Elle devrait être exigée en préalable à l’accès au métier d’agent d’alphabétisation.

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BIBLIOGRAPHIE

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