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Parlons d’autre chose

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2242 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 21 novembre 2012

actualité, info

Parlons d’autre chose

Le prix Nobel de médecine récemment attri­

bué à John Gurdon et Shinya Yamanaka est amplement mérité et constitue de surcroît un palmarès intelligemment construit. Il recon­

naît les mérites du précurseur, John Gurdon, dont le travail visionnaire sur l’équivalence génomique des cellules somatiques aura mis plus d’une décennie à être accepté ; il célè bre le cadet qui en démontre la conséquence lo­

gique, à savoir que la réactivation de la pluri­

potentialité1 de cellules différenciées est pos­

sible et qu’elle dépend d’un très petit nombre de facteurs. Un fil rouge réunit à un demi­

siècle de distance ces deux découvertes et balise du même coup l’une des questions les plus fondamentales de la biologie du déve­

loppement : comment concilier la logique du semblable – le génome diploïde qui est con­

servé en entier à chaque division cellulaire – avec la logique du différent, à savoir que la différenciation cellulaire génère un large éven­

carte blanche

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 21 novembre 2012 2243

1 http://blog.ehesp.fr/

2 Crystal E. Tan, Glantz SA. Association between smoke­

free legislation and hospitalizations for cardiac, cerebro­

vascular, and respiratory diseases. Circulation 2012;126:

2177­21.

3 Hurt RD, Weston SA, Ebbert JO, et al. Myocardial infarc­

tion and sudden cardiac death in Olmsted county, Min­

nesota, before and after smoke­free workplace laws.

Arch Intern Med 2012;29:1­7.

tail de types cellulaires et que ce processus paraît être à sens unique, allant de pair avec une fixation croissante des destins cellulaires ? La découverte que ce fléchage unidirection­

nel est beaucoup plus superficiel qu’on le croyait, qu’il est en quelque sorte inessentiel et révocable, pose un défi conceptuel à la biologie et à ceux des philosophes qui s’inté­

ressent à celle­ci.

Que toute cellule soit «potentiellement toti­

potentielle» déboulonne la notion reçue de potentialité et c’est tout l’aristotélisme intuitif de l’embryologie classique qui s’effrite. C’est même toute l’ontologie des objets du déve­

loppement, gamètes, cellules, embryon, orga­

nisme constitué, qui doit être réorganisée, avec des implications majeures pour certai nes questions normatives comme celle dite «du statut éthique de l’embryon». En effet, les tours de passe­passe sémantiques («l’embryon est une personne potentielle» ou «l’embryon est une personne avec du potentiel») souvent in­

voqués par les adversaires de la recherche sur l’embryon humain révèlent leur vacuité : ces affirmations sont soit fausses, soit tauto­

logiques. L’ironie, c’est que la recherche sur les cellules pluripotentielles induites, dont une des motivations était de trouver une source de cellules pluripotentielles autre que l’em­

bryon lui­même, a du même coup détruit l’ar­

gumentation éthique que motivait cet aspect de la recherche. Comme le disent le biologiste et philosophe Giuseppe Testa et ses collabo­

rateurs : «Par un tournant vraiment ironique du destin, les efforts de recherche visant à repro­

grammer des cellules adultes pour con tour­

ner les problèmes d’éthique supposés soule­

vés par les cellules souches embryonnaires ont fini par démanteler les arguments sur les­

quels ces problèmes étaient fondés.»2 Que reste­t­il de ces questions biologiques et philosophiques essentielles dans le reflet

qu’ont donné les médias de ces découvertes et du prix qui les récompense ? Rien ou pas grand­chose. Un exemple : une chaîne de té­

lévision franco­allemande emblématique des médias «de qualité» organise un débat sur les cellules souches. De quoi sera­t­il question dans l’entièreté de la discussion ? De la re­

cherche humaine de l’immortalité, effort légi­

time ou hubris insupportable, de la valeur dis­

cutable de la longévité extrême… vous voyez le topo. Ce sont de tels malentendus fonda­

mentaux qui constituent le premier obstacle au débat démocratique sur les applications des sciences du vivant.

1 A vrai dire, le terme de «reprogrammation cellulaire»

généralement utilisé est assez malheureux, car il laisse entendre que le programme initial est perdu et qu’il de­

vrait être reconstitué de l’extérieur.

2 Testa G, et al. Breakdown of the potentiality principle and its impact on global stem cell research. Cell Stem Cell 2007;1:153­6.

Pr Alex Mauron

Institut d’éthique biomédicale CMU, 1211 Genève 4 alexandre.mauron@unige.ch

© istockphoto.com/Osman Safi

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