• Aucun résultat trouvé

Le Père Noël de la Poste. Valérie-Inés de La Ville & Antoine Georget. La surprenante histoire de son secrétariat ( ) P.I.E.

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Le Père Noël de la Poste. Valérie-Inés de La Ville & Antoine Georget. La surprenante histoire de son secrétariat ( ) P.I.E."

Copied!
24
0
0

Texte intégral

(1)

P.I.E. Peter Lang P.I.E. Peter Lang

Au cours des années 1950, de rares enfants eurent la joie de recevoir un courrier signé du Père Noël. Victime de son succès, cette initiative discrète de receveuses des Postes a dû être portée à la connaissance de la hiérarchie du ministère des PTT. Ce dernier a offi ciellement lancé en 1962 le « Service du courrier du Père Noël » avec la participation active de Françoise Dolto comme toute première secrétaire. Ainsi, depuis plus de cinquante ans, chaque lettre adressée au Père Noël est traitée par son secrétariat, qui rédige la carte réponse et la distribue avec la complicité des postiers avant la nuit de Noël.

L’histoire de ce service révèle deux mouvements opposés : l’un issu du terrain, élan généreux tourné vers les rêves des enfants ; l’autre, porté par la hiérarchie, visant à diffuser la culture commerciale et marketing. Les frictions récurrentes entre ces deux logiques révèlent la transformation du rituel de la lettre au Père Noël, au cœur des tensions qui se nouent entre les pratiques de transmission familiale, les enjeux éducatifs promus par l’école et la montée en puissance de médias de masse ciblant les jeunes audiences. Mais, au-delà, la mission de ce secrétariat original exprime un engagement collectif pour le bonheur des enfants et incarne profondément l’identité même de l’administration postale.

Valérie-Inés de La Ville est Professeur des Universités et enseigne les sciences de gestion. Elle dirige le Centre européen des produits de l’enfant de l’Université de Poitiers et étudie la socialisation économique du jeune consommateur, les processus d’innovation et les enjeux de responsabilité sociétale des entreprises s’adressant à la jeunesse.

Antoine Georget, spécialisé en stratégie et marketing, a été ingénieur de recherche au Centre européen des produits de l’enfant de l’Université de Poitiers, où il a approfondi l’histoire d’entreprise. Il est actuellement chef de projets culturels & éditoriaux au sein d’Aristophil et ses musées des Lettres et Manuscrits.

Valérie-Inés de La V ille & Antoine Georget Le Père Noël de la P oste

ISBN 978-2-87574-231-5

Le Père Noël de la Poste

La surprenante histoire de son secrétariat (1962-2012)

Valérie-Inés de La Ville & Antoine Georget Histoire de la Poste

et des communications

Échanges et territoires

3

3

3

(2)

P.I.E. Peter Lang P.I.E. Peter Lang

Bruxelles

Au cours des années 1950, de rares enfants eurent la joie de recevoir un courrier signé du Père Noël. Victime de son succès, cette initiative discrète de receveuses des Postes a dû être portée à la connaissance de la hiérarchie du ministère des PTT. Ce dernier a offi ciellement lancé en 1962 le « Service du courrier du Père Noël » avec la participation active de Françoise Dolto comme toute première secrétaire. Ainsi, depuis plus de cinquante ans, chaque lettre adressée au Père Noël est traitée par son secrétariat, qui rédige la carte réponse et la distribue avec la complicité des postiers avant la nuit de Noël.

L’histoire de ce service révèle deux mouvements opposés : l’un issu du terrain, élan généreux tourné vers les rêves des enfants ; l’autre, porté par la hiérarchie, visant à diffuser la culture commerciale et marketing. Les frictions récurrentes entre ces deux logiques révèlent la transformation du rituel de la lettre au Père Noël, au cœur des tensions qui se nouent entre les pratiques de transmission familiale, les enjeux éducatifs promus par l’école et la montée en puissance de médias de masse ciblant les jeunes audiences. Mais, au-delà, la mission de ce secrétariat original exprime un engagement collectif pour le bonheur des enfants et incarne profondément l’identité même de l’administration postale.

Valérie-Inés de La Ville est Professeur des Universités et enseigne les sciences de gestion. Elle dirige le Centre européen des produits de l’enfant de l’Université de Poitiers et étudie la socialisation économique du jeune consommateur, les processus d’innovation et les enjeux de responsabilité sociétale des entreprises s’adressant à la jeunesse.

Antoine Georget, spécialisé en stratégie et marketing, a été ingénieur de recherche au Centre européen des produits de l’enfant de l’Université de Poitiers, où il a approfondi l’histoire d’entreprise. Il est actuellement chef de projets culturels & éditoriaux au sein d’Aristophil et ses musées des Lettres et Manuscrits.

Valérie-Inés de La V ille & Antoine Georget Le Père Noël de la P oste

Le Père Noël de la Poste

La surprenante histoire de son secrétariat (1962-2012)

Valérie-Inés de La Ville & Antoine Georget

P.I.E. Peter Lang

Histoire de la Poste et des communications

Échanges et territoires

3

3

3

(3)
(4)
(5)

Le Père Noël de la Poste

La surprenante histoire de son secrétariat (1962-2012)

P.I.E. Peter Lang

(6)

Histoire de la Poste et des communications Échanges et territoires

Collection représentée par Muriel Le Roux, IHMC – CNRS – ENS – Université Paris 1, France Assistant éditorial : Sébastien Richez, CHP, France Comité éditorial

Reynald Abad, Université Paris-Sorbonne, France

Anne-Claude Ambroise Rendu, Université de Limoges, France Kenneth Bertram, Université Libre de Bruxelles, Belgique Eugénie Briot, Université Paris-Est Créteil, France

Anne Burnel, Direction des archives du groupe La Poste, France François Cadilhon, Université Bordeaux 3, France

Jean-Luc Chappey, IHMC – CNRS – ENS – Université Paris 1, France Matthieu Flonneau, Université Paris 1, France

Patrick Fridenson, EHESS, France

Andrea Giuntini, Université de Modène, Italie Eric Godelier, École Polytechnique, France

Pascal Griset, Université Paris-Sorbonne – ISCC – CNRS, France Muriel Le Roux, IHMC – CNRS – ENS – Université Paris 1, France Michel Margairaz, Université Paris 1, France

Michèle Merger, IHMC – CNRS – ENS, France Valérie Schafer, ISCC – CNRS, France

Sylvie Schweiter, Université Lyon 2, France Laurent Tissot, Université de Neuchâtel, Suisse

Nicolas Verdier, Géographie-cités – CNRS, Paris, France

Comité pour l’histoire de La Poste 44, Boulevard de Vaugirard CP V 312

F-75757 Paris Cedex 15 www.laposte.fr/chp josiane.foynat@laposte.fr

(7)

Histoire de la Poste et des communications

Échanges et territoires

Valérie-Inés de La Ville & Antoine Georget

Le Père Noël de la Poste

La surprenante histoire

de son secrétariat (1962-2012)

(8)

Information bibliographique publiée par « Die Deutsche Bibliothek »

« Die Deutsche Bibliothek » répertorie cette publication dans la « Deutsche National- bibliografie » ; les données bibliographiques détaillées sont disponibles sur le site <http://

dnb.ddb.de>.

Ce livre est le fruit d’une collaboration scientifique entre le Comité pour l’Histoire de la Poste et l’Université de Poitiers représentée par Madame Valérie-Inés de la Ville, Professeur des Universités, membre des laboratoires Centre de recherche en gestion (CEREGE EA 1722) et Maison des Sciences de l’Homme et de la Société (MSHS USR CNRS 3565) qui a encadré le travail empirique effectué par Antoine Georget, ingénieur de recherche au Centre Européen des Produits de l’Enfant.

Remerciements chaleureux au dessinateur Antoine Chereau, « croqueur » régulier de l’activité postale, qui a créé un dessin unique et original pour illustrer ce livre.

Illustration de couverture : © Antoine Chereau.

Cette publication a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.

Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’éditeur ou de ses ayants droit, est illicite. Tous droits réservés.

© P.I.E. PETER LANG s.A. éditions scientifiques internationales Bruxelles, 2014

1 avenue Maurice, B-1050 Bruxelles, Belgique www.peterlang.com ; info@peterlang.com Imprimé en Allemagne

ISSN 2295-2950

ISBN 978-2-87574-231-5 eISBN 978-3-0352-6483-8 D/2014/5678/91

(9)

Table des matières

Préface ... 9

Introduction ... 13

I. Initiatives « déviantes » et première institutionnalisation (1950-1970) ... 21

1.1. Un travail en « perruque » par amour des enfants ... 23

1.2. Noël 1962 : le ministère des PTT et le Père Noël officialisent leur union ... 32

1.3. La crise d’adolescence du secrétariat du Père Noël ... 45

1.4. La Poste au service du Père Noël ou… le Père Noël au service de la Poste ? ... 58

II. L’Opération Père Noël s’ouvre aux mondes (1980-2000) ... 65

2.1. Le Père Noël, acteur de la socialisation aux nouvelles technologies des PTT ... 67

2.2. Le « Père Noël de Libourne » devient une icône mondiale ... 77

2.3. Le Père Noël, un médiateur bienveillant entre l’école et la Poste ... 87

2.4. Le Père Noël en situation de décrochage scolaire ? ... 99

III. Le secrétariat du Père Noël du troisième millénaire ... 107

3.1. Un benchmark international sur les « sosies » du Père Noël de Libourne ... 111

3.2. Un secrétariat du Père Noël responsable et solidaire ... 122

3.3. Les valeurs du secrétariat du Père Noël sous tension… ... 137

3.4. … Au risque de banaliser le Père Noël de Libourne ? ... 152

(10)

8

Conclusion ... 161

Remerciements ... 179

Glossaire ... 183

Statistiques ... 187

Liste des directeurs du CRC/SCC de Libourne ... 191

Index des noms cités... 193

Bibliographie ... 195

Histoire de la Poste et des communications Échanges et territoires ... 199

(11)

Préface

Après Cher Père Noël publié en 2012 aux éditions Télémaque il, fallait que le beau travail du Comité pour l’histoire de la Poste piloté par Muriel Le Roux (CNRS) avec Sébastien Richez et Josiane Foynat (CHP), et réalisé par Valérie-Inés de La Ville et Antoine Georget (Université de Poitiers) lorsqu’ils m’avaient prêté main forte pour aboutir à un livre destiné au grand public, engendre une publication plus scientifique et plus universitaire : c’est chose faite.

Ce travail est remarquable en bien des points. Il constitue avant tout un formidable outil de mémoire : il nous rappelle qu’il était possible dans une grande administration, il y a plus de cinquante ans, que le « Père Noël de la Poste » naisse d’initiatives individuelles, pour des raisons sentimentales, à une époque où les grandes entreprises n’étaient pas encore paralysées par ceux des juristes et autres contrôleurs de gestion qui ne comprennent pas que leur précieux métier consiste à veiller au respect des bonnes règles de gestion des organisations sans pour autant cesser de rester des facilitateurs, habilités à débloquer les grandes machines plutôt qu’à les enrayer.

Avant même que Jacques Marette ne transforme sa sœur Françoise Dolto en secrétaire particulier du Père Noël, des postières n’avaient pas supporté que les lettres des enfants restent sans réponse et se perdent dans les nuages et dans les dédales de leur entreprise. Elles n’ont alors ouvert aucun parapluie juridique ou hiérarchique, activé aucun principe de précaution. Elles n’ont pas hésité à enfreindre la règle du secret des correspondances et le serment qu’elles avaient prêté pour ne pas laisser les enfants sur leur faim… Courage au quotidien de fonctionnaires ordinaires qui risquaient la radiation à vie pour leur sens de l’autre…

C’est encore la mémoire de l’entreprise qui nous rappelle que la Poste a plusieurs fois failli instrumentaliser et dévoyer le mythe du Père Noël au risque d’en faire une « ordure », pour plagier le titre de la pièce créée par la troupe du Splendid en 1979. Elle a plusieurs fois essayé de le trans- former en VRP multicarte chargé de vendre les produits de la Poste et de France Télécom. Un conseiller en placements du portefeuille plus qu’en placements du cœur, au risque de faire que le Père Noël de la Poste, l’in- vention géniale du ministre Jacques Marette et des postières qui l’avaient précédé, devienne le fossoyeur du vrai Père Noël de toujours, de celui qui a franchi l’Atlantique à la recherche du nouveau monde, dans la peau de Saint Nicolas, avec les sans-papiers et les immigrants du XVIIe siècle.

(12)

Le Père Noël de la Poste

10

Ce qui est remarquable dans le travail de Valérie-Inés de La Ville et d’Antoine Georget, c’est qu’il nous rappelle à quel point une histoire qui pourrait paraître secondaire, celle du secrétariat du Père Noël aujourd’hui basé à Libourne, peut servir de miroir et de révélateur, à la fois des soubresauts de l’histoire en général, et de ceux de l’histoire de la Poste en particulier. Mai 68, les chocs pétroliers, la révolution copernicienne de l’administration, l’évolution du concept de service public, le glissement vers une société de masse et de consommation, la métamorphose des enfants, le triomphe certainement provisoire de la société du tout à l’égo et du grand narcissisme de chacun, le triomphe de la VPC qui devient la vente à distance puis le e-commerce, et de temps à autres, une tendance parfois exagérée à la grande braderie des services publics qui ne peuvent pas devenir un enjeu de spéculation : tout est écrit et donc traçable dans l’ADN du Père Noël de la Poste.

À ce titre les analyses du livre que vous allez lire constituent un bel outil de réflexion et de prospective. N’est-ce pas en nous rappelant d’où vient la Poste, en nous rappelant les valeurs fondamentales qui ont forgé les valeurs des postiers depuis des générations, qu’il nous permet de donner un avenir et une perspective à une entreprise chère au cœur de tous les Français ?

L’histoire du secrétariat du Père Noël nous rappelle la réalité de la communauté humaine qui pour survivre ne peut pas tout résumer à la vision ultra-libérale d’un monde sans règles qui réhabiliterait la loi de la jungle et le triomphe inévitable et fatal du fort sur le faible ou de la matière sur l’esprit.

Lorsqu’Antoine de Saint-Exupéry imagina et rédigea Le Petit Prince, le monde comptait 2 milliards d’habitants. 70 ans plus tard, nous sommes plus de 7 milliards de terriens.

À la fin du siècle dernier, sur une planète déjà surpeuplée, les inventeurs de l’Internet, les précurseurs du Web et du Cloud ont inventé l’économie collaborative, l’économie solidaire, l’économie du partage et de la générosité. Ils nous ont rappelé que tout ne pouvait pas se résumer à la barre de fraction d’un compte d’exploitation, d’un article de loi, à la marchandisation universelle ou au triomphe du « tout à l’ego ». Ils nous ont rappelé que la vente n’est qu’une modalité des rapports économiques qui incluent aussi l’échange et le don. Saint-Exupéry ne disait pas autre chose dans Citadelle : « Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n’existe point de marchands d’amis, les hommes n’ont plus d’amis ».

Le Père Noël de la Poste a toujours été un acteur de socialisation, en même temps qu’un médiateur, un facteur de confiance, d’humanisme et de contact. Il a toujours su depuis un peu plus de 50 ans porter le sens

(13)

Préface de l’intérêt général, celui de l’équité, celui de la présence humaine et de la générosité. Un sens de l’éthique garant de la confiance. Un grand- père mythique qui n’a cessé de grandir dans les rêves des enfants, qui a été officiellement incarné en 1962 par un ministre génial et qui reste aujourd’hui un formidable symbole du vivre ensemble et un formidable antidote contre les principaux fléaux qui menacent la planète surpeuplée du troisième millénaire : le renouveau des guerres de religion, la flambée des guerres entre générations, le triomphe du narcissisme, la perte du sens de l’autre, et le triomphe de la matière sur l’esprit.

Il a dû veiller sur la Banque postale cet ange gardien barbu et bedonnant vêtu de rouge : en 1984, lors de la sortie du film Les Ripoux, les français se moquaient parfois des « Chèques postaux ». Celle qui deviendrait le 1er janvier 2006 la « Banque Postale » était à l’époque brocardée comme une banque de pauvres. Après l’affaire des « subprimes » en 2007, qui a bien failli ruiner les banques de la planète, leurs clients et les États, beaucoup de gens ont réalisé que la banque de La Poste n’était après tout qu’une simple et véritable banque populaire qui n’avait jamais cherché à spéculer sur le dos de ses clients et qui restaient digne de confiance parce qu’elle avait su respecter une éthique, celle du service public. Ce n’est pas un hasard si cette « Banque Postale » constitue aujourd’hui la locomotive qui entre en synergie avec les trois autres métiers de la Poste : celui du courrier, celui du colis et celui du contact.

Ce livre issu d’une recherche proposée par le Comité pour l’histoire de La Poste est le symbole de ces valeurs, et que le CHP ait décidé en toute indépendance de le publier n’est pas neutre.

À l’ère du zapping, du triomphe de l’éphémère et de la mousse médiatique cette démarche nous rappelle à quel point la mémoire constitue le bien le plus précieux des entreprises : ce réservoir de leur histoire, de leur culture, de leurs valeurs qui peut servir de vivier à leur développement et contribuer à nourrir leur avenir. Dans l’amnésie, il n’y a pas d’avenir. La maladie du XXIe siècle, la maladie d’Alzheimer ne guette pas seulement les individus : elle guette les organisations, les entreprises et les civilisations.

Comme sa filiale Philaposte qui édite les beaux timbres de France, la Poste a su concevoir des « poules aux œufs d’or ». Philaposte, le secrétariat du Père Noël de Libourne (sous-ensemble du service après- vente de La Poste) et le Comité pour l'histoire de la Poste en sont de bons exemples. Ils produisent à la fois du rêve, du sens et de la cohésion. Ils font plus encore pour cimenter la confiance qui unit la Poste aux Français que des millions d’euros d’investissements publicitaires.

Ce sont là de beaux outils : puisse l’entreprise créée par Louis XI en 1477 ne jamais tuer ses poules aux œufs d’or. Ces petits volatiles

(14)

Le Père Noël de la Poste

12

qui pourraient sembler modestes et considérés par certains comme des options facultatives, mais qui n’oublient pas de nous rappeler à quel point La Poste nous est précieuse et indispensable : jour après jour, elle contribue à garantir la bonne cohésion de la Cité. Elle nous protège des barbaries modernes.

Jean-Pierre Guéno

(15)

Introduction

Le 18 septembre 2012, Jean-Paul Bailly, alors président du groupe La Poste, déclarait que « lorsqu’on dirige une entreprise qui a été fondée sous Louis XI (1477), on ne peut pas ne pas s’intéresser à l’histoire »1. À l’approche du cinquantième anniversaire du célèbre « secrétariat du Père Noël » (SPN) de La Poste, service officiellement lancé en 1962, le Comité pour l’histoire de la Poste a décidé d’entreprendre une étude socio-historique sur ce service original, avec le concours de la Direction du courrier. Le « secrétariat du Père Noël » se dévoile comme un service qui réceptionne les lettres adressées au Père Noël – affranchies ou non – et qui répond gratuitement via une carte réponse signée du célèbre homme à la barbe blanche. De nos jours, ce service redevient actif de la mi-novembre à fin décembre, au sein du Service client courrier. Installé à Libourne en Gironde, sous l’égide de la Direction du courrier, il fait partie du folklore traditionnel des fêtes de fin d’année.

Lors de sa création au début des années 1960, il s’agit d’un service totalement inédit, voire pionnier par rapport à d’autres pays. Mis en place par le ministère des Postes, Télégraphes et Téléphones (PTT), il aurait permis à la Poste de se rapprocher des parents, ses usagers, et des enfants, ses futurs usagers, en s’insérant dans l’intimité familiale des moments de fête qui comptent pour les Français… Qu’un ministère puis une entreprise aient réussi à maintenir un lien privilégié, sur une aussi longue période, avec une icône mondiale de l’enfance, paraît à ce stade de la découverte une intrigue suffisamment forte pour justifier la réalisation d’une recherche approfondie.

Le courrier de Noël constitue un type de correspondance très particulier pour l’organisation postale. D’abord par le volume, puisqu’il s’agit de traiter en six à huit semaines les nombreuses missives dont les statistiques de 2012 établissent à plus de 1,5 million de lettres adressées au Père Noël. Ensuite par la technique car chaque année survient une rude mise à l’épreuve de la robustesse de la chaîne de traitement postal, et en particulier un test quant à l’efficience de sa logistique. Le

« secrétariat du Père Noël » ouvre ainsi une fenêtre sur le savoir-faire postal et sur la capacité de l’organisation à absorber des surcharges de

1 Intervention introductive de Jean-Paul Bailly, président du groupe La Poste, à la journée d’étude « Autour de la pensée managériale en France : pour une approche croisée », organisée par le Comité pour l’histoire de La Poste, le 18 septembre 2012 au siège du groupe.

(16)

Le Père Noël de la Poste

14

travail considérables en quelques semaines. Enfin, le « secrétariat du Père Noël » constitue également un miroir de l’évolution de la place de l’enfant dans la société contemporaine. Sur cinquante ans, le « secrétariat du Père Noël » a accompagné la transformation du « sentiment » d’enfance et des

« imaginaires enfantins » qui y sont associés – tant de la part des adultes que des enfants eux-mêmes. Les choix faits par l’organisation postale pour créer, maintenir et développer ce service original sur une aussi longue période seraient susceptibles de révéler une part de l’évolution du

« sentiment d’enfance » contemporain.

Écrire cette histoire du « secrétariat du Père Noël », depuis ses débuts à nos jours, a nécessité de soulever un certain nombre de questions passionnantes.

Avant tout, il s’agissait de faire plus ample connaissance avec l’univers du Père Noël. Comme l’ont souligné de nombreux anthropologues, la relation au Père Noël peut être interprétée comme l’actualisation d’un certain nombre de traditions et de rituels fortement ancrés dans la vie des enfants depuis la fin du XIXe siècle, tels que la venue de Saint Nicolas souvent accompagné de son compère le père Fouettard, ou bien encore les contes relatifs au père Janvier et autres ancêtres présents dans l’arbre généalogique déjà bien établi du Père Noël2. En effet, sa figure est fondamentalement syncrétique : elle actualise de nombreux folklores préexistants, qui modernisent et popularisent auprès du plus grand nombre la logique de don et contre-don des étrennes de Nouvel An, dont l’origine remonte à l’Antiquité romaine3. En outre, « l’inflation festive », qui entoure le rite contemporain de Noël, célèbre la permanence des liens familiaux. Elle place l’enfant en son centre, car ce dernier incarne le passage de la mort à la vie, les générations futures et la permanence du lien intergénérationnel4. Mais au-delà de cette dimension anthropologique, ce personnage a aussi été en partie façonné et institué par les grands magasins apparus dès la fin du XIXe siècle en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Ils lui ont progressivement assigné un rôle d’ambassadeur,

« d’une sorte de capitalisme sentimental »5, qui valorise l’importance du lien intergénérationnel et suscite des émotions collectives à travers une consommation festive et débridée. Ainsi, la fête de Noël reste la fête préférée des Français : « Noël est bel et bien devenu pour la majorité

2 « L’arbre généalogique du Père Noël selon Jean-Claude Baudot et le CNRS », in Guéno J.-P., Cher Père Noël !, Paris, Télémaque, 2012, n.p.

3 Perrot M., Le cadeau de Noël. Histoire d’une invention, Paris, Éditions Autrement, coll. « Leçons de choses », 2013, 174 p.

4 Segalen M., Rites et rituels contemporains, Paris, Armand Colin, 2009, coll.

Sociologie-Anthropologie, 2e édition, p. 98.

5 Segalen M., op. cit., p. 99.

(17)

Introduction des Français une fête familiale plus que religieuse, dont les acteurs et défenseurs les plus zélés aujourd’hui sont les jeunes ménages, de sensibilité communiste ou écologiste, employés ou artisans »6.

À la difficulté initiale que représente le fait de porter un « regard extérieur » sur un service particulièrement original en ce qu’il témoigne d’un imaginaire enfantin très évolutif, s’en ajoute une autre. Elle est liée au fait que ce service est porteur d’une « culture postale » en constante actualisation à travers la confrontation de systèmes de valeurs parfois en opposition. Dans le cas particulier de la Poste comme institution pluriséculaire, méconnaître l’origine d’un certain nombre de pratiques, leurs principes fondateurs d’un point de vue philosophique, socio- politique ou managérial, constitue bien évidemment une grave erreur susceptible de conduire à des analyses relativement frustes et, en tout cas, superficielles. Il devient donc indispensable de maîtriser plusieurs dimensions ; connaître le sens de ces valeurs postales et l’histoire de cette institution ; comprendre ce qu’ont été les carrières de hauts cadres de La Poste ; appréhender l’évolution de métiers emblématiques de l’institution comme ceux de facteurs, conseillers financiers et receveurs ; décrypter le contexte historique ayant présidé aux évolutions du statut transformant la Poste en Établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) pour enfin aboutir en 2010, à la création d’une société anonyme à capitaux publics.

D’un point de vue académique, nos disciplines de référence relèvent des sciences de gestion. Néanmoins, mener une analyse historique des pratiques managériales pour comprendre en profondeur l’évolution d’une organisation et pouvoir construire son devenir7, contraint à appliquer la rigueur caractérisant la méthode historique à l’analyse des différentes sources primaires et secondaires auxquelles les professionnels de la conservation, documentalistes et bibliothécaires, ont permis d’accéder.

Il s’est avéré indispensable, devant la masse et l’extrême diversité des documents, de constituer une base de données qui a été également nourrie par la numérisation de divers articles de presse, notes de service, courriers officiels. Archives audiovisuelles, presse nationale, publications internes destinées aux postiers, rapports et statistiques produits par le Service client courrier de Libourne, complètent des circulaires, des notes de service, des dossiers de presse diffusés par La Poste, des photographies, des images, des articles de la presse régionale, nationale ou internationale, de revues internes et externes à La Poste, sans oublier l’ensemble des cartes réponses expédiées par le « secrétariat du Père Noël » (SPN) depuis cinquante ans.

6 Perrot M., Noël, Paris, Le Cavalier Bleu, 2002, Coll. Idées reçues, p. 57.

7 Fridenson P., 1994, « L’entreprise face à son histoire : quel enjeu pour le management ? », Les Annales de l’École de Paris, n° 1, p. 285-290.

(18)

Le Père Noël de la Poste

16

En outre, de nombreux dessins, objets et lettres que des enfants, mais aussi parfois des adultes, ont adressés au Père Noël de la Poste tout au long de la période sont passés entre nos mains. Cet assemblage formant le corpus des sources hétérogènes mais complémentaires, de cette recherche.

Par exemple, la double dimension archivistique qui supporte ce travail – locale et nationale – transparaît clairement au sujet de la médiatisation du service. Les archives de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) offrant les journaux télévisés, tout autant que les archives départementales de la Gironde dévoilant par Le Résistant de Libourne, la façon dont la presse locale traitait le sujet du SPN implanté à Libourne, ont permis de retracer la visibilité du service à travers un double prisme. D’un relatif anonymat initial à une dimension internationale assumée, les étapes de l’évolution d’une communication très faible dans les années 1970 jusqu’au moment où le ministère des PTT a commencé à communiquer dans les médias témoignent également de l’ouverture communicante des PTT vers la société à travers ce service public plutôt inhabituel.

La mise en histoire du service du SPN suppose une imprégnation de la culture de l’organisation postale, de ses normes, de ses rites professionnels, de ses symboles, ainsi qu’une connaissance intime de ses structures du pouvoir, de ses valeurs implicites ou explicites, de ses codes de langage, de ses méthodes de travail, etc. En effet, si le dépouillement des archives internes offre une première vision de la généalogie du service, il était tout aussi important de retrouver différents témoins, acteurs de l’histoire du SPN, afin de mieux percevoir le contexte organisationnel dans lequel ils ont mené leur action pour contribuer au développement de ce service8. Un appel aux postiers a permis de recueillir plusieurs témoignages d’anciennes secrétaires du Père Noël, et en particulier de retrouver la toute première secrétaire du Père Noël ! Par ailleurs, en consultant les sources écrites, les noms de plusieurs personnes qui ont travaillé au sein du SPN ou à son contact, tout au long de la période étudiée ont pu être identifiés. Placée sous de bons auspices, cette recherche a bénéficié d’un fort effet « boule de neige » entre les acteurs du SPN retrouvés, et d’autres personnes d’abord supposées comme introuvables pour devenir finalement contributrices.

8 Nous nous sommes appuyés sur les réflexions de Michel de Certeau à propos de l’importance de la micro-histoire (cf. De Certeau M., L’Écriture de l’histoire, Paris, Gallimard, 1975, 358 p.). Avec l’aide du CHP, un appel à témoignages a été publié dans la revue de la Fédération nationale des associations de personnel de La Poste et de France Télécom pour la Recherche historique (FNARH) – et retraités de La Poste – et a également été relayé sur le site Internet de La Poste.

(19)

Introduction Ces personnes ont été contactées essentiellement par téléphone. Une première fois pour leur présenter et leur expliquer l’objet de la recherche, leur faire préciser leur rôle au sein du SPN et convenir d’un deuxième rendez-vous téléphonique environ deux jours après, afin de les interroger plus longuement. Cette façon de procéder laissait le temps au témoin de rassembler ses souvenirs sur la période où il avait travaillé en lien avec le SPN. Les témoins ont aussi raconté leur « vécu » concernant le SPN et à la fin de leur récit, l’entretien a porté plus précisément sur certains aspects suggérés par les archives écrites. Les trente témoins ont toujours réservé un accueil chaleureux à cette recherche et au-delà de leurs souvenirs personnels, ces acteurs, directs ou indirects du SPN, ont transmis des documents complémentaires, non conservés dans les archives. Ils ont été également des informateurs précieux quant à l’ambiance de travail qui régnait dans ce service original. Le temps que les anciens directeurs ou agents de ce service si particulier ont consacré à rechercher dans leurs dossiers personnels des documents pouvant contribuer à cette enquête en dit long sur l’attachement qu’ils ressentaient, parfois près de vingt ou trente ans après leur passage dans ce service. Grâce à leur contribution, des éléments révélateurs de certaines tensions ayant marqué différentes étapes de la vie de ce service ont pu apparaître.

Du croisement des archives et des échanges avec les témoins est donc née une réflexion autour d’une dizaine d’axes interprétatifs, peignant le tableau général du SPN. Structure temporaire et hybride, il fallait commencer par en revenir aux origines et aux motifs de sa création, ceci permettant ensuite d’ouvrir l’étude de l’évolution de son organisation pendant cinquante ans.

L’évolution des dénominations attribuées à ce service postal est clairement apparue. Tout d’abord désigné « service du courrier du Père Noël », il s’intitule ensuite « secrétariat du Père Noël » et apparaît finalement sous le vocable « Opération Père Noël ». Toutefois, les appellations

« Opération Père Noël » et « secrétariat du Père Noël », qui désignent le service de traitement du courrier du Père Noël, ne se recouvrent pas totalement. En effet, le terme « Opération Père Noël » regroupe l’ensemble des procédures postales et des processus opérationnels mis en œuvre pour recueillir, traiter et répondre à l’abondant courrier du Père Noël : rappel de la réglementation, information de l’ensemble des recettes principales des postes au mois d’octobre, centralisation des courriers sur un site unique, rédaction des réponses du Père Noël et distribution à leur destinataire si possible avant le 24 décembre. Le terme « Opération » évoque directement un aspect important de la culture postale : la rigueur militaire qui a inspiré dès l’origine l’organisation postale avec sa hiérarchie marquée et ses différents types d’uniformes car l’ensemble du personnel assume une

(20)

Le Père Noël de la Poste

18

fonction de représentation de l’État. Le « secrétariat du Père Noël » est une autre appellation apparue au début des années 1970, qui fait référence à un autre univers, celui des relations publiques et des médias. En effet, il n’est que la partie émergée de l’iceberg, en ce qu’il constitue la vitrine médiatique de « l’Opération Père Noël », ensemble plus vaste, complexe et invisible de procédures indispensables pour traiter le courrier du Père Noël. Le « secrétariat du Père Noël » regroupe dans un local spécialement décoré pour l’occasion les secrétaires qui répondent, selon une cadence soutenue, aux courriers adressés au Père Noël. Quand ce dernier s’y rend pour superviser le travail de ses secrétaires, il y dispose d’un siège majestueux afin de se reposer un moment ou bien pour s’entretenir avec les journalistes qui ont été invités à visiter le secrétariat.

Sur ce socle identitaire et statutaire pouvait émaner l’évolution de la philosophie et des missions de ce service si particulier. Une fois cet éclairage touchant l’essence même du SPN, il s’agissait de mesurer son imbrication au sein de l’immense univers de la Poste. D’abord dans une dimension de notoriété, aussi bien par son rôle et son utilité à la politique de communication de l’ancien ministère puis de l’entreprise, que par son traitement par les médias pour en mesurer les retombées nationales et internationales. Ensuite par l’intégration du SPN dans la chaîne de production des services postaux et son exposition proactive ou concurrencée vis-à-vis d’autres opérations, postales ou non, autour du Père Noël.

Le « secrétariat du Père Noël » ainsi étudié en ordre marche au sein de la Poste, il devenait possible de se pencher sur les fruits du service et la matière propre à son fonctionnement, à savoir le courrier adressé au Père Noël et les cartes adressées en guise de réponse aux enfants.

Une analyse multiple portant sur les supports matériels employés, la lexicologie employée, la production illustrative et la symbolique des messages permettait de dégager les dimensions à l’œuvre dans cette correspondance particulière. Le parti a été pris de citer dans cet ouvrage le plus possible de documents originaux – qui comportent souvent des erreurs orthographiques – de façon à les partager directement avec le lecteur et restituer la spontanéité des lettres adressées au Père Noël9. Néanmoins, mettre en forme un discours historique constitue un exercice particulièrement délicat qui nécessite des qualités rédactionnelles pour ne pas ennuyer le lecteur, mais aussi pour donner vie aux acteurs qui ont fait l’histoire du secrétariat en retraçant les débats auxquels ils ont pris part.

Savoir raconter suppose d’éviter les répétitions et de faire des transitions logiques, mais aussi de faire passer de nombreux éléments qui cassent le

9 L’orthographe – parfois approximative ! – des courriers adressés au Père Noël ainsi que des témoignages de secrétaires sont reproduits selon l’orthographe originale.

(21)

Introduction cours logique de la narration : la présentation des thèses contradictoires, le développement des conjectures, les commentaires de graphiques, la reconnaissance de l’imperfection d’une source.

Enfin, le choix d’inclure une analyse approfondie du corpus spécifique que constitue l’ensemble des cartes réponses du Père Noël depuis 1962 a semblé judicieux. Au-delà des cartes réponses elles- mêmes, de nombreuses sources complémentaires sont mobilisées dans cette analyse sémiotique : publications internes et externes de la Poste, articles de presse, interviews d’acteurs clés du service et émissions de télévision, ce qui a permis de croiser les informations reconstituées à propos des différents illustrateurs et des auteurs des textes. Une analyse de type sémiotique des cartes réponses individuelles adressées par le SPN aux enfants ayant envoyé un courrier au Père Noël, a été conduite car leur évolution apporte un éclairage complémentaire à la progression de l’analyse historique. En revanche, il n’est pas présenté d’analyse détaillée des lettres envoyées par le SPN pendant dix ans aux écoles car ce corpus n’apporte pas d’information réellement déterminante par rapport à celui des cartes réponses individuelles. La confrontation de leurs différents regards a permis de dégager les grands axes d’évolution des cartes réponses du Père Noël depuis 1962 en tenant compte à la fois des enjeux de communication institutionnelle de la Poste, de l’évolution du contexte organisationnel de « l’Opération Père Noël », ainsi que des objectifs pédagogiques propres aux enseignants du cycle 1 et 2 (maternelle et CP) dans l’institution scolaire.

L’analyse figurative détaillée des cartes (illustration et texte) rassemblées selon les différentes périodisations proposées pour l’analyse historique met en perspective les commentaires qu’elles suscitent d’un point de vue historique, didactique et managérial. L’analyse figurative de chaque carte permet de faire l’inventaire de leurs traits distinctifs, selon les motifs illustratifs et les textes écrits qui les accompagnent, et qui se rapportent à des unités sémantiques relevant d’une schématisation du monde réel (un paysage, un « bonhomme », un traîneau, etc.). On notera que cette schématisation peut se manifester selon des significations

« réalisées » (image du vrai) ou « virtualisées » (image d’un réel possible).

L’analyse figurative permet ensuite de dégager des « thèmes » ou concepts, idées, sentiments, états d’âme qui, dans une culture donnée, sont associés aux figures : le paysage renvoie au thème de l’hiver, le bonhomme à la fête de Noël, le traîneau au Grand Nord, etc. Le mouvement du traîneau dans le ciel renvoie au thème de l’ubiquité, l’expression du visage du

« Père Noël » à la joie ou à la bonté, etc. Ces analyses figuratives puis thématiques constituent l’inventaire préliminaire des formes discursives

(22)

Le Père Noël de la Poste

20

nécessaires à l’étude sémio-narrative de tous types de récits10. Il est ainsi possible de brosser les premiers éléments d’une brève synthèse sémio- narrative élaborée à partir de l’analyse thématique qui met en lumière des évolutions majeures de la philosophie ayant présidé à la réalisation des cartes réponses du Père Noël.

Cet axe interprétatif complémentaire contribue à rendre palpables au plus haut point les éléments qui constituent les traits caractéristiques de l’enfance ; ceux-ci se sont aussi transformés au cours des cinquante dernières années, période qui dévoile également la surprenante histoire de ce « secrétariat du Père Noël »…

10 Courtés, J., Analyse sémiotique du discours : de l’énoncé à l’énonciation, Paris, Hachette supérieur, 1991, Coll. Hachette université, 302 p.

(23)

I. Initiatives « déviantes » et première institutionnalisation (1950-1970)

En France, la revue l’Intermédiaire des Chercheurs et Curieux a lancé une enquête approfondie dès 1897 pour dater l’apparition du Père Noël, mais en vain1. Il semble difficile de savoir si les enfants s’adressaient déjà à lui. En revanche, l’illustration de Boutet de Monvel pour le « Deuxième jeudi de Saint Nicolas », dans la revue Saint Nicolas publiée par Delagrave en 1880 atteste que les enfants écrivaient déjà massivement à Saint Nicolas qui s’exclame : « Mais c’est une véritable pluie de lettres, mes chers enfants ! Je ne me plains pas de cette averse, au moins ; tout au contraire, j’en suis enchanté. Seulement, j’ouvre mon parapluie afin de ne pas être aveuglé »2.

Deuxième jeudi de Saint Nicolas

Source : Revue Saint-Nicolas, 1880, Éditions Delagrave.

1 Manson M., Histoire(s) des jouets de Noël, Paris, Téraèdre, 2005, p. 83.

2 Nous remercions Michel Manson de nous avoir transmis cette référence qui atteste d’une tradition de correspondance adressée à Saint Nicolas bien antérieure à celle de la lettre au Père Noël.

(24)

Le Père Noël de la Poste

22

Toutefois, Martyne Perrot souligne que l’entrée « Père Noël » ou

« Bonhomme Noël » n’apparaît qu’en 1904, dans le Nouveau Larousse illustré avec la définition suivante : « Personnage céleste qui, dans les croyances enfantines, est chargé de distribuer des jouets, des friandises, etc. aux enfants sages pendant la nuit de Noël. On le représente avec une longue barbe et un manteau à capuchon, couvert de neige. C’est dans les souliers devant la cheminée qu’il dépose ses cadeaux »3.

Après la Seconde Guerre mondiale, la fête de Noël entremêle des logiques de dons intrafamiliaux avec des stratégies marchandes de plus en plus affirmées de la part des grands magasins à travers leurs vitrines et catalogues de Noël que les enfants apprécient particulièrement. La vocation consumériste de Noël s’affirme. En 1946, Tino Rossi témoigne de la popularité du personnage du Père Noël auprès des enfants à travers sa célèbre chanson Petit Papa Noël.

Pendant cette même période, plusieurs postiers constatent à l’approche des fêtes de Noël, une augmentation significative des lettres adressées au Père Noël. Ce flux peut paraître anecdotique car il émerge dans une période de croissance soutenue du trafic postal – la circulation d’objets passant de 4,6 milliards en 1948 à 8,3 milliards en 19624. Toutefois, ces correspondances posent un problème particulier car elles sont adressées à un « destinataire inconnu »…

La procédure de l’Administration est très claire : lorsque le destinataire d’une correspondance est inconnu, l’agent doit faire parvenir celle-ci à sa direction qui la transmettra à la Recette principale de Paris (Paris RP), 52 rue du Louvre, plus exactement au Service du « dépôt central des rebuts ». C’est une ordonnance royale de 1771 qui organisa pour la première fois ce service postal, le seul habilité à briser le secret de la correspondance pour essayer de retrouver d’éventuelles informations sur le destinataire, afin d’assurer la bonne réception du courrier.

Aussi, l’actuel Service client courrier de Libourne trouve ses origines dans un règlement du 20 décembre 1748 qui prescrit l’envoi des correspondances n’ayant pu être distribuées à l’Hôtel des Postes de Paris.

Une ordonnance royale du 12 janvier 1771 donne au service l’autorisation d’ouvrir les plis clos pour identifier leur destinataire. L’ordonnance du 20 janvier 1819 permet d’étendre les recherches relatives aux expéditeurs, limite la durée de garde du courrier et prépare la vente des objets non restitués au profit de la collectivité. Logé tout d’abord dans les locaux de l’Hôtel des Postes de Paris de 1748 à 1914, puis situé dans chaque

3 Perrot M., Noël, Paris, Le Cavalier Bleu, 2002, p. 34.

4 Morgana L., L’invention du contrôle de gestion à La Poste, 1923-2003 : ou la spirale du diable ?, Paris, L’Harmattan, 2008, Coll. Histoire de l’innovation et entreprise, p. 76.

Références

Documents relatifs

- discrimination visuelle et acquisition d’un capital de mots - reconnaissance des mots père noël, cadeaux, forêt, etc … - lecture d’une recette. - lecture d’une phrase du

Consigne : reconstitue la phrase dans les différentes écritures.. LE PERE NOËL APPORTE

Chut… j'enfile mes

Fiche réalisée par Céline Lamour-Crochet, illustrations : Olivier Daumas, avec l’aimable autorisation des éditions Bilboquet.. Que fait le Père Noël quand il ne distribue pas

aidé à faire les tâches ménagères rangé régulièrement ma chambre. Voici le cadeau qui plairait

J’associe l’image au mot qui lui correspond en les

Je vais chercher les jouets et je les colle sur les cadeaux... La tournée du Père

http://www.logicieleducatif.frLa tournée du Père NoëlJe découpe les images... La tournée du Père