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En Auxois. Terres à froment et charrues de chevaux

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Academic year: 2022

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En Auxois

Si le baillage de Montcenis est dépeint comme misérable et stérile, il n'en est pas de même de celui d'Arnay-le-Duc où une branche de la famille de Louis Berdin mon grand-père, a ses origines.

C'est d'Arconcey qu'est issue la famille Michon que nous retrouverons plus tard à Autun et qui comptera beaucoup dans la vie de mon grand-père, orphelin de père et de mère à un an. Par ses alliances, la famille Michon étend ses racines sur un cercle assez étendu qui comprend Pouilly-en-Auxois, Chailly-sur-Armançon, Châtellenot, le village de Dionne, Marcilly, Mont-Saint-Jean et, plus au nord, Eguilly. Dans cette campagne plus ouverte, des alliances se sont nouées entre les habitants des paroisses voisines.

Le tableau dressé de ce terroir par les visiteurs du fisc est plus optimiste que celui des terres boisées qui s'étendent entre Mesvres, Broye, Torcy et Montchanin où vécurent les ancêtres de ma grand-mère.

Terres à froment et charrues de chevaux

Dans ce baillage d'Arnay-le Duc, la terre est fertile, propre à cultiver le froment et l'avoine. On y mange un pain de froment ou tout au moins de conceau.

Sur cette terre moins lourde, les charrues sont attelées aussi bien de chevaux que de boeufs. De même les charrois. On imagine à quel point l'élevage du cheval peut rendre plus confortable la vie des campagnes. Sans chevaux, on ne se déplace guère sur les grands chemins, on ne franchit pas d'obstacles, on ne communique pas avec la province, les villes et les bourgs voisins.

Cette région, moins austère que les morvans, semble réjouir nos visiteurs qui s'y déplacent plus à l'aise et y voient de quoi tirer plus de ressources pour les caisses royales et les armées, pour nourrir hommes et montures et se refournir en chevaux.

Une région sans chevaux est un désert à traverser. La vigne même trouve là sa place sur les pentes auxquelles s'adossent les villages. Certaines maisons sont couvertes de paille, mais on trouve aussi des toits de laves dont le poids nécessite de fortes

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charpentes. Les procès-verbaux font état de mobilier. Les habitants sont dits

«commodes» ou encore «aisés». Chacun de ces villages a un certain nombre d'artisans qui fournissent en commodités les habitants : maréchaux, charpentiers, couvreurs en laves, cordonniers, tailleurs de cheminées, tailleurs d'habits. Ils ont aussi marguillier et recteur d'école et on trouve plus de paroissiens capables de signer de leur nom les actes des registres paroissiaux. Le recteur d'école est rétribué par les paroissiens non seulement pour son enseignement, mais aussi pour sa participation à la vie paroissiale , en particulier aux sépultures .On sent, à la lecture des procès- verbaux des intendants dijonnais qu'ils se sentent là plus à l'aise et moins étrangers.

Avec un juste partage des richesses du sol, les paysans pourraient y vivre de leur travail dans une confortable aisance et dans la sécurité matérielle. C'est sans compter avec la rapacité des seigneurs de ces terres qui en tirent de quoi entretenir leurs compagnies militaires et figurer à la cour de Versailles. La couverture de pierre du clocher de l'église de Thoisy-le-Désert, qui nous étonne encore aujourd'hui, pourrait servir de symbole à la relative richesse de ce terroir, comparée à la fragile charpente de l'église d'Arleuf et à la toiture d'aisseaumes de sa nef.

Une famille influente d' Eguilly

Eguilly appartient au comte de Choiseul. Cette famille illustre, originaire de Champagne, compte parmi ses membres un maréchal de France appartenant au parti de Mazarin pendant la Fronde qui s'est illustré en battant Turenne à Rethel en 1650, César de Choiseul, comte de Plessis-Praslin, un évêque, Gilbert de Choiseul.

François Eleonor de Choiseul, comte d'Eguilly est un haut personnage qui entretient des troupes importantes. Son château est une forteresse. La fille du comte honore, en parrainant un de leurs enfants, les Bannelier qui sont de mes ancêtres.

En 1625, les Bannelier étaient nombreux dans la paroisse d'Eguilly. La plupart des quarante-et-un «habitants» qu'elle comptait alors étaient tous main- mortables , à l'exception d'un chef de famille de la tribu Bannelier, sans doute Jean, celui qui, avec deux autres habitants, vient présenter les roles de la taille au sieur TISSERAND, le visiteur provincial.

Exceptionnellement, le village ne comptait alors aucune charrue et les habitants d'Eguilly faisaient labourer les terres par des laboureurs des villages voisins. Certes la terre est fertile, mais le seigneur était exigeant ; il levait en effet sur les récoltes une dîme de sept gerbes l'une. C'est le partage le plus sévère que j'aie rencontré dans la province. En 1625, le village venait de subir un gros dommage : il devait pourvoir à la réparation de l'église dont la voûte s'était effondrée. C'est une très lourde dépense pour un village qui ne disposait que de trois cent journaux de terre pour subvenir aux besoins de quarante et un foyers d'habitants.

En 1645, lorsqu'Antoine DROUAS de LA PLANCHE visite à nouveau Eguilly, c'est François Bannelier (s 588) marié à Jehanne Tainturier (s 589), qui présente les rôles du taillon de la paroisse, accompagné de Chrétien Guittard. La

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paroisse compte alors trente-neuf habitants, «tant pauvres que riches», dont sept veuves. Ils sont toujours maimortables et s'il y a désormais dix laboureurs, il n'y en a « aucun qui laboure sur ses terres ». Les dix charrues labourent les terres de la seigneurie ; le village entier est son domaine propre sur lequel le comte fait travailler laboureurs aussi bien que manouvriers. Il lève toujours sur les récoltes une dîme de sept gerbes l'une. Six foyers se distinguent des autres par leur cote de taille entre trente et quinze livres. Faute d'être propriétaires, ces gros laboureurs sont sans doute fermiers du domaine seigneurial. Parmi eux figure toujours un membre de la famille Bannelier. La paroisse, de peu d'étendue, a de bonnes terres, propres à froment, et, tout alentour, quantité de prés. L'église n'est pas encore restaurée. Les habitants, à l'exception des six plus riches, propriétaires de leur charrue, tiennent leur bétail à cheptel ; leurs maisons sont en bon état, couvertes de paille ou de laves. On peut déjà dans ce village constater une hiérarchie entre riches et pauvres. A la génération suivante, Jean Bannelier (s 294), fils de François, né avant 1644, est un laboureur aisé qui a de quoi vendre en surplus de sa subsistance : il est laboureur-marchand. Alors que son frère Charles épouse la fille d'un marchand de Thoisy-le-Désert, Jean s'allie à la famille Millot de Pouilly-en-Auxois.

Jeanne Millot (s 295) lui donnera au moins neuf enfants, tous nés entre 1665 et 1685 à Eguilly. L'un d'eux, Jean Charles, né en 1673, a eu pour marraine Charlotte de Choiseul, fille du comte d'Eguilly, François Eleonord de Choiseul. Son aînée de deux ans, Jeanne Bannelier, épousera mon ancêtre Jean Charton (s 146), un laboureur de Chailly-sur-Armançon.

Des paroisses étendues et prospères

Le village de Chailly a un finage beaucoup plus étendu que celui d'Eguilly.

Lorsque TISSERAND l'inspecte en 1625, ce sont trois frères Loydreau qui lui présentent les rôles de la communauté. L'un d'eux est vraisemblablement le père de Jeanne Loydreau (s 293), l'épouse d'Etienne Charton (s 292), laboureur à Chailly. Il n'y a rien d'étonnant à ce que cette famille se soit alliée aux Bannelier, puisque des laboureurs de Chailly louaient leurs services aux fermiers d'Eguilly. Les deux paroisses étaient économiquement dépendantes l'une de l'autre et les deux familles du même niveau social.

Non loin de là, à Châtellenot, la famille Gibassier a ses racines. Pour être plus précis, les Gibassier étaient établis au «village» de Dionne, distant du bourg et desservi aussi bien par le curé de Chailly que par celui de Châtellenot. Jean Gibassier (s 580), fils de Matthieu Gibassier (s 1160) dont la naissance remonte au XVIe siècle (ca 1588), né quant à lui à Dionne le 15 avril 1620, a épousé une Pierrette Roze baptisée en 1620 dans la paroisse de Chailly. Les mariages se sont négociés en série car de nombreux Gibassier sont mariés à des frères et soeurs Roze!

Chailly sur Armançon, en 1625, comptait quatre-vingts «habitants», tous mainmortables, dont la plupart étaient manouvriers. La dîme seigneuriale y était

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moins lourde qu'à Eguilly, mais variait selon les «climats», c'est-à-dire selon le rendement des terres, de vingt gerbes l'une en montagne et de douze gerbes l'une dans les terres plus fertiles situées en plaine. POUFFIER, le visiteur de 1656, notait qu'elle appartenait au marquis de la Boulaye, que le finage très étendu abritait quatre-vingt-dix-huit foyers qui payaient entre deux sols et quarante-quatre livres de taille. Elle n'avait que dix-sept charrues et demie, ce qui semble fort peu au regard de certaines paroisses du Morvan, mais le sol était moins pénible à retourner et le labourage plus rapide.

Selon les termes du visiteur, les habitants de Chailly étaient «réputés aysés».

Jamais de tels mots ne sont venus sous la plume des inspecteurs des montagnes de Marmagne ou Montcenis, appliqués à tout un village.. Les maisons des habitants étaient de pierre, couvertes de laves ; elles leur appartenaient, ainsi que leur

«jardinage», par dimission, en paiement de rentes, pour certains, par admodiation pour d'autres. Ils ont, écrivait-il, «quantité de bétail lesquels ils tiennent en commune ou en propriété». Mais ces gros éleveurs, même propriétaires du bétail, subissaient la pression économique du marquis de la Boulaye, puisqu'ils avaient besoin de louer ses prés, n'ayant que quelques pâquiers pour communaux. Ils avaient en communauté des rentes importantes à payer au seigneur et étaient obligés de don- ner à moudre leurs grains à l'un des deux moulins que possédait le marquis et de cuire leur pain à ses fours banaux. On y trouvait un laboureur « fort commode » ayant une maison bien meublée, du bétail, des terres et des prés en propre, qui faisait exception. Le notaire et le cordonnier étaient, eux aussi, bien meublés. On trouvait au bourg charron, charpentier, tonnelier, tisserands et un chirurgien . Le maître d'école, Louys Chappuis, était allié avec la famille Gibassier; sa signature se rencontre au bas de tous les actes.

Les paysans de Chailly ne vivaient pas dans la précarité, mais avaient beau- coup à payer en monnaie sonnante qu'ils acquéraient en faisant commerce de bétail aux foires voisines.

A Dionne, en épousant Jean Gibassier (s 580), Pierrette Roze (s 581) entrait dans une petite communauté villageoise. Dionne, visitée par POUFFIER en 1656, ne comptait que six foyers. Elle faisait l'objet d'un procès-verbal particulier à cause de sa situation isolée. Quatre de ses six habitants étaient laboureurs, tenant au total six charrues complètes de boeufs ou de chevaux qu'ils avaient en propre. Toutes les maisons étaient en bon état et couvertes de laves. Les habitants disposaient de prés et de bois à titre de cens, qui leur étaient admodiés à raison de soixante mesures de froment et autant d'avoine, une mesure de pois, vingt et un sols, six deniers et six fromages par an. Le cens était fixe : à eux de faire produire le maximum à ces terres et à leur cheptel pour leur enrichissement personnel. En revanche ils étaient mainmortables, ce qui encourageait l'enracinement des six familles dans ce petit hameau sur une colline moins abrupte que Châtellenot. Ils avaient à payer, outre la taille, vingt et une livres pour l'entretien des garnisons. C'est dire que nos Gibassier devaient travailler dur pour avoir du numéraire grâce à la vente des surplus en grains et des bestiaux.

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Jean Gibassier assura avec son frère Emiland la collecte de 1675. Dionne avait quelque peu grossi .Le « village » comptait alors onze contribuables dont six étaient laboureurs. Les Gibassier étaient des trois qui possédaient leur héritage et leur bétail. Les autres tenaient les bêtes qu'ils nourrissaient à cheptel des Loydreau de Chailly. Le hameau manquait cruellement de communaux, les habitants ayant vendu une partie des prés pour faire face à leurs charges. Ils manquaient surtout de bois pour leur chauffage, n'ayant en communaux que «quelques petites broussailles».

Jean maria son fils Laurent avec la fille du meunier des moulins de Melin, paroisse de Marcilly, Dimanche Jannin (s 582). Le meunier tenait ses moulins à

«cense perpétuelle» de la duchesse d'Elbeuf , ce qui induit que son loyer n'était pas sujet à révision . Le visiteur POUFFIER estimait qu'il était «réputé aysé».

Dix ans plus tard, en 1685, alors que les armées n'étaient plus retenues aux frontières de Bourgogne, visitant cette partie de l'Auxois, Prosper BAUYN vantait encore la fertilité du terroir qui produisait froment, conceau, orge et avoine, mais dont les habitants supportaient de lourdes charges seigneuriales. Laurent Gibassier (s 290) était un des douze habitants et des cinq laboureurs du «village», avec son frère Antoine. Lors du passage du visiteur, il avait eu de sa femme Reine Jannin, épousée en 1670 à Châtellenot, dans l'église proche de l'austère château haut perché, huit enfants dont l'un était mort quelques jours après sa naissance. L'aîné avait quinze ans. Comme tous les habitants, Laurent était mainmortable, mais il ne manquerait pas d'héritiers pour reprendre la charrue sur ses terres ; son frère Anthoine, lui, avait vu disparaître jusqu'alors chacun de ses quatre enfants en bas âge. Tous deux furent convoqués pour présenter les rôles de la taille ce 8 mai 1688 à Prosper BAUYN, conseiller en la chambre des comptes de Dijon. Laurent était propriétaire de sa maison, de ses terres et de son bétail. Il payait , comme son aïeul, au seigneur comte de Villers Lafaye une cense de cent-vingt mesures de grains, moitié en froment, moitié en avoine, une mesure de pois, six fromages, vingt six deniers une maille, sans oublier la poule traditionnelle. Aux Carmélites de Beaune, il devait une gerbe sur seize de sa récolte. Comme le finage de Dionne était peu étendu, il se faisait payer des journées de labour dans le finage voisin de Châtellenot.

De ses trois derniers enfants, deux au moins n'auront vécu que quelques mois. Laurent Gibassier et Reine Jannin n'assistèrent pas au mariage de leurs filles Françoise et Emilande (s 145) avec les frères Jean et François Michon (s 144), qui, contrairement à l'usage, eut lieu dans la paroisse des époux et non des épouses, à Arconcey, mais ils donnèrent leur consentement, Françoise n'ayant pas atteint l'âge de la majorité qui était pour la jeune fille de vingt-cinq ans. Les deux frères Michon non plus n'étaient pas majeurs, ayant moins de trente ans. Le curé d'Arconcey note un peu confusément consentements et présences, avec un rajout entre les lignes.

Seuls des parents des frères Michon assistaient à la cérémonie, mais personne de la famille Gibassier. Laurent Gibassier n'était plus laboureur, mais simplement

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manouvrier; sans doute était-il déjà vieillissant et avait-il laissé la charrue à ses trois aînés.

Arconcey, une riche paroisse

Arconcey, où s'est établie et s'est accrue la famille Michon, a conservé sa belle église paroissiale du XIème siècle, entourée de son cimetière clos et dont le tympan est abrité sous un porche néo-classique.

C'est là qu'ont été baptisés, mariés et enterrés les Michon, les Collot, les Mylanvois, les Follot, qui font partie de ma famille. La voûte ogivale repose sur des colonnes trapues qui ont conservé leurs chapiteaux romans. On sent que l'église a été au cours des siècles remaniée et embellie grâce à la richesse de ses plus opulents paroissiens. Mes ancêtres reposent sous le porche ou dans la nef. Moingeot Michon (s 576) y a été enterré en 1673 «du côté de l'épître», ainsi que l'a noté le curé de la paroisse.

Moingeot Michon et Reyne Noël, son épouse étaient récemment établis à Arconcey en 1644, à la naissance de leur fils Jean Michon (s 288). C'est le seul de leurs enfants qui soit né à Arconcey. Moingeot avait alors la trentaine. Entre 1643 et 1673, date de sa sépulture, on ne trouve aucune mention de lui dans le registre de la paroisse. Mais il avait probablement à Arconcey un frère aîné, Emiland Michon, dont l'épouse Denise Bouchot a mis au monde trois enfants à Arconcey entre 1636 et 1642. Reyne Noël avait probablement un frère Denis Noël et une soeur Jeanne Noël, établis eux aussi de fraîche date dans la paroisse. Aucun des registres des paroisses voisines antérieurs à 1640 ne porte mention des familles Michon, Bouchot ni Noël

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De vieilles familles d'Arconcey

En revanche, la famille de Jeanne Collot (s 289), qui a épousé en 1664 Jean Michon, le fils de Moingeot et Reyne, de huit ans et demi son cadet, a son berceau à Arconcey, ainsi que celle de Jeanne Mylanvois (s 579), sa mère. Dès les premières décennies du siècle, nous trouvons des Mylanvois à Arconcey où plusieurs d'entre eux exercent le métier de «maréchal», c'est-à-dire maréchal-ferrant. Au milieu du siècle, Jeanne Collot comptait une vingtaine de cousins dans le village, portant les patronymes de Collot, Mylanvois et Robelot. Alain Collot, son oncle, était collecteur de la taille lorsque le sieur TISSERAND a visité la paroisse et un beau-frère de Denys Noël, frère de Reyne, Jean Chamilly, était alors procureur d'office. Ce sont eux qui présentèrent au visiteur les roles de taille des années 1621, 1623 et 1625.

Arconcey comptait alors cinquante-cinq «habitants» imposables sur un territoire «de grande étendue et de grand rapport». Déjà, on signalait au rapporteur que des «forains», tirant des revenus de la paroisse, n'y payaient pas la taille. La somme importante de neuf cent-soixante livres était répartie entre les cinquante-cinq

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résidents imposables.

Les «villages» écartés de Juilly-l'Eschenault et Lagneau

Lagneau ne comptait en 1645 que six foyers, tous pauvres et de condition franche. Les maisons étaient ruinées, couvertes de paille. Jacques Chappuis qui devait plus tard, en 1669, marier son fils François à une Mylanvois du bourg, y menait une des «deux charrues labourant la terre de Monsieur d'Arconcey et celle du sieur Lardilly d'Arnay-le Duc», un de ces bourgeois forains, celui-ci, qui n'étaient pas imposés à Arconcey.

L'autre «village», Juilly-l'Eschenault, comptait six feux, dont ceux des frères Follot. Les quatre charrues du hameau appartenaient à des métayers, «labourant les terres de la seigneurie». Ce «village»dont les maisons étaient «en assez mauvais état»

avait fourni en 1644 des logements aux gens de guerre.

Fluctuations de la population

En 1645, Claude Robelot, marié à une Mylanvois, échevin d'Arconcey, faisait visiter la paroisse à DROUAS de la PLANTE. Il s'agissait là d'un propriétaire de la paroisse dont la famille se trouverait plus tard à la tête d'un puissant domaine. Mais en 1645, Arconcey était passée de cinquante-cinq à quarante «habitants». Claude Robelot se sera sans doute enrichi dès cette époque, admodiant ou rachetant des maisons et des terres abandonnées des habitants. Arconcey a alors vingt charrues qui «labourent les terres de la seigneurie».

Onze ans plus tard Claude POUFFIER pouvait constater une hausse de la population. Le rôle dénombrait soixante-six habitants pour une somme de cent- quarante-neuf livres. Les laboureurs étaient au nombre de seize, mais ils tenaient leurs boeufs ou chevaux à commande ainsi que tout leur bétail, à l'exception de deux propriétaires qui ne sont pas désignés nommément dans le rapport. Les autres payaient au seigneur en communauté une rente annuelle de quatre-vingt-treize livres. Ils lui devaient en outre trois corvées de charrue et une taille de cent-quatre livres. Le rapporteur concluait néanmoins, pour le bourg et pour le «village» de Lagneau : «les habitants sont réputés aysés».La situation était plus mauvaise à Juilly- l'Eschenault qui n'appartenait pas aux de Sercey, mais à la Sainte-Chapelle de Dijon.

Les frères Follot y étaient laboureurs . Mais le village avait emprunté neuf-cents livres en principal à un notaire d'Arnay-le Duc. Les maisons étaient toujours « en assez mauvais état ».

Dix ans plus tard, en 1666, lors de l'enquête systématique diligentée par l'intendant BOUCHU, le seigneur de la paroisse, François de Sercey, chevalier d'honneur de la Chambre des Comptes de Dijon qui a la réputation de «gentilhomme de mérite», a rétabli la prospérité dans le village à son profit. Il est riche de cinq mille livres de rentes que lui versent les cultivateurs de ses terres. Les quarante arpents

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cultivables du village, situés pour les trois-quarts en plaine, lui appartiennent ainsi que les bois et deux prairies..Il a l'exclusivité de la vigne où il a fait venir des vignerons manouvriers. Il a aussi dans son château une domesticité convenant aux besoins de son rang.

La population du village est remontée à soixante-huit «habitants».Mais la plupart des habitants sont « journaliers et mendiants »; le rapport ne fait pas le compte des laboureurs peu nombreux, dans la catégorie desquels se classera, après le décès de son père Moingeot, Jean Michon (s 288). Les habitants se plaignent de manquer de communaux. Le Seigneur de Sercey a profité sans doute de la récente crise du village pour en acheter une partie à la communauté ; l'opération se nomme une «aliénation». Mais les anciens du village parlent aussi de communaux «usurpés»

dans un passé lointain, en 1597 et même en 1580 , du temps des premiers De Sercey qui acquirent le château. Il est bien rare que les paysans aient gardé la mémoire des usurpations commises sur leur communauté. Même manquant de communaux, ils sont généralement incapables de dire s'ils en ont eu d'usurpés. Ceux d'Arconcey étaient sans doute plus avertis et mieux instruits, même si ce n'était que par la tradition orale.

La descendance de Jean Michon et Jeanne Collot

C'est entre cette enquête de l'intendant Bouchu et celle en 1688 de Prosper BAUYN que se multiplièrent les Michon à Arconcey. Trentenaire à son mariage, Jeanne Collot n'en mit pas moins au monde huit enfants pendant les vingt années qui suivirent, entre 1665 et 1684. Il semble que le premier enfant soit arrivé tardivement, après cinq ans de mariage. Il eut pour parrain son oncle Jean Collot que tous au village surnommaient «le cavalier» car il avait servi douze ans dans le régiment du duc de Nevers. Le second ne vécut que cinq mois. Jeanne se retrouva vite enceinte d'un troisième enfant. Jeanne, sa fille, naquit en juin 1674 et son frère Reyné en juin 1675. Mais bientôt la mort de l'aîné en 1676 vint endeuiller le ménage.

Jean mourut avant ses six ans accomplis. La mort des enfants n'était pas rare en ce temps-là. Elle était acceptée ; on enterra l'enfant comme son petit frère dans le fond de l'église, auprès des fonts baptismaux. Les quatre derniers enfants du couple vécurent et se marièrent à Arconcey

Mais le couple eut encore le chagrin de perdre, à l'âge de vingt-deux ans, sa fille Jeanne qui depuis plusieurs années déjà secondait sa mère dans les tâches domestiques et filait la laine en surveillant le troupeau. Ils. eurent la joie de connaître quelques-uns des petits-enfants que mirent au monde Françoise, Reyné, Jean, François et Etiennette. Le grand-père et la grand-mère étaient généralement parrain ou marraine du premier enfant des couples. Le premier garçon de Jean , né le 22 janvier 1707, fut nommé Jean comme son parrain qui était Jean l'ancien, son grand-père., agé de soixante-trois ans. Ce fut le grand-père paternel Jean Tainturier, cordonnier au village, qui parraina le premier fils d'Etiennette. Mais Jeanne Collot devait être morte en 1702, car la fille aînée de son fils Jean eut pour marraine sa

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tante, Pierrette Gibassier

Sans être propriétaires, les époux Michon ont cultivé une terre qui rapportait quinze mesures pour trois mesures de semence sur un journal de terre. Le paternalisme du Seigneur de Sercey a empêché que déguerpissent leurs paysans de condition franche. La paroisse a un curé et un vicaire, un recteur d'école qui signe les registres paroissiaux. A Hugues Collard, le marguillier, s'est adjoint son fils Hugues, recteur d'école. Nous retrouverons plus tard un de leurs descendants mêlé à l'histoire des Michon ; désormais les Michon sauront lire et signer de leur nom, ainsi que bien des habitants d'Arconcey.

1675: l'assiette de la taille mal acceptée

Les élus du Parlement, conscients des injustices de la répartition des cotes de la taille tentent de réglementer l'établissement des rôles. La visite de J. Ch.

BERNARD de VAUX devra donc être plus méticuleuse. Lorsqu'il arrive à Arcon- cey , le 3 septembre 1675, il semble qu'il ait quelques difficultés avec les habitants. Il convoque les collecteurs qui sont un membre de la famille Fondard et Regnot Collot, un frère de Jeanne Collot. Le collecteur de l'année précédente étant absent, les nouveaux collecteurs ne peuvent lui présenter que le rôle de l'année 1675 qui s'élève à six-cent trente-deux livres. La guerre a enlevé à la communauté quatre contribuables. Deux autres ont quitté la paroisse. Les habitants décédés ont laissé douze veuves .à la tête des exploitations. Le chiffre de soixante-dix «habitants»

recensés ne correspond donc plus aux potentialités de la communauté.

De nouveaux réglements ont été appliqués concernant la répartition des cotes : « ils faisoient leurs tailles à tous rolles par quatre habitants par devant le Maître d'école et donnoient la collecte à rabais au dessous d'un sol par livre ». Le maître d'école est un nouveau venu dans la paroisse, Georges Cunisset, originaire de Poitiers. Est- il accepté de la population ? Ce sera plus tard à nouveau un Collard qui exercera la charge. Les maîtres d'école sont investis de la responsabilité de la rédaction écrite du rôle de taille. Ainsi les habitants élus ne devraient plus être à la merci des plus puissants qui, maîtrisant l'écriture, s'attribuent une cote incontrôlable par la communauté analphabète. C'est la réponse aux innombrables remontrances enregistrées par les enquêteurs lors des visites antérieures.

Le nouveau règlement a été appliqué également à Châtellenot et à Huilly.

Mais il existe encore des communautés où aucun habitant ne sait écrire, comme à Lacroix, hameau de Marcilly. Les maîtres d'école sont rétribués par la paroisse sous l'autorité ecclésastique. Mais ils reçoivent peut-être aussi des «escollages» des parents de leurs élèves les plus aisés, ce qui pourrait faire douter de leur im- partialité. Il n'en est pas fait mention dans les paroisses de Bourgogne, mais le fait est attesté ailleurs dans le royaume.

A Arconcey, en 1675, la propriété de la terre est aux mains de nombreux forains, que le rapport de Bernard de Vaux énumère précisément .Les quinze ou seize laboureurs, qui ne font que onze charrues complètes, sont tous, à l'exception

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d'un seul, métayers. Outre le seigneur qui a deux ou trois métayers, les pro- priétaires résident à Châtellenot, Saulieu, Arnay-le Duc... Les habitants tiennent leur gros et menu bétail en nourriage de ces mêmes propriétaires, ainsi que leur maison et la terre « en rente ou louage ». Il n'y a que quelques maisons en bon état.

Ils ne semblent guère empressés auprès du visiteur chargé d'appliquer la nouvelle réglementation. C'est la première fois que la visite de pot en pot est impossible « partie des portes étant fermées à cause de la récolte », et cela un 3 septem- bre ! Est-ce à cause de la mobilisation de certains chefs de famille ? Font-ils totalement confiance aux deux seuls représentants de tout le village pour trans- mettre leurs remontrances ? Dépouillés de leurs héritages, ils se déchargent des déclarations de leurs redevances seigneuriales « attendu que c'est leurs propriétaires qui les acquittent ». Ils semblent avoir abdiqué la possibilité de se faire entendre.

Le seul à tirer parti de l'appauvrissement général est un nommé Robelot, imposé à cent-vingt livres. La cote suivante est de vingt-cinq livres. Il y en a douze de dix à quinze livres, trente-trois de cinq à six livres. C'est dire à quel point sa richesse écrase toute la communauté. Il a un métayer à Arconcey et des possessions à Huilly. C'est lui peut-être qui a déplacé un habitant sur Huilly, alourdissant la cote des autres. Ils n'ont encore rien acquitté de la taille de l'année en cours ce trois septembre. Sans doute se sont-ils concertés pour refuser leur cote-part. Le mécon- tentement général est évident.

Les deux coqs de village d'Arconcey

En 1688, lorsque Prosper BAUYN visite à nouveau Arconcey, on peut enregistrer l'émergence bien accomplie de deux propriétaires issus de la com- munauté paysanne, à l'abri de la seigneurie de M. de Sercey, fort riche lui-même. Le collecteur Pierre Fondard appartient à une famille ancienne et très nombreuse d'Arconcey. Les habitants se plaignent du seigneur qui exige une dîme de sept gerbes l'une, le même taux qu'à Eguilly. Le taux de la dîme varie selon la fertilité du terrain, plus forte au centre d'Arconcey que dans le hameau de Juilly-l'Eschenaultoù

«la dîme ne se lève que de quinze gerbes l'une», soit moins de la moitié. Cette inégalité de traitement séculaire et en partie justifiée dresse les habitants de la paroisse les uns contre les autres et les plus taxés dénoncent en outre deux propriétaires qui trouvent des arrangements avec la seigneurie, Claude Jobard et la veuve de François Robelot.

La veuve de François Robelot est la plus riche d'Arconcey. Avec son métayer elle a fait un « prétendu accomodement ». Elle a de grands bâtiments où elle loge ce

« rentier », c'est-à-dire le métayer qui lui verse des rentes , deux charrues en propre, un troupeau de cent moutons, des vaches, des prés. Selon ses accommodements, elle et son rentier sont imposés en commun . A eux deux ils ne sont imposés qu'à quatre-vingt livres, beaucoup moins que la cote exigée de son époux en 1675. Cette maîtresse femme se bat ongles et dents pour transmettre à ses trois fils un riche

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patrimoine. Ces fils occupent des offices importants: premier huissier au parlement, avocat, procureur au parlement. La veuve qui a donc de l'entregent menace les habitants de procès. Elle prétend encore faire diminuer sa cote de trente livres « à cause d'un étalon qu'elle tient de manière que sa cotte et celle de son métayer ne seront plus que de cinquante livres de laquelle elle prétend faire payer à son métayer vingt-huit livres et partant elle ne payera plus de taille que vingt-deux livres ». Or l'étalon, prétexte à faire baisser sa cote n'est pas sans lui rapporter: «Nous étant informé où elle tenoit l'étalon ils nous ont dit que pendant les mois de juin et de juillet elle le gardoit en son écurie à la conduite d'un paysant auquel ceux qui amenoit [sic] les cavalles donnoit trois sols six deniers outre l'escu et que le reste de l'année elle lenvoyoit à Huilly, chez le rentier de son fils ou il travailloit a la charrue ».

On voit poindre dans cette campagne de l'Auxois un capitalisme bourgeois, aussi arrogant et moins protecteur que la noblesse, moins bien toléré des petits. Le Tiers-Etat, dès la fin du XVIIe siècle, est loin de constituer une masse homogène aux intérêts communs.

Quant à Claude Jobard qui a en propre deux charrues et admodie ses terres à des particuliers, il a en mains de forts atouts pour transiger sur sa cote. Les asséeurs n'osent l'imposer à ce qu'il devrait porter « a cause qu'il y a beaucoup de particuliers qui luy sont debteurs ». Nous retrouverons ailleurs ce poids exercé par le prêteur sur ses débiteurs. Sa richesse n'est pas ostentatoire : sa maison est mal meublée, mais ses granges sont « bien remplies de grains ». C'est une sorte d'Harpagon rural, qui prête à bon escient. On imagine que, lors des années de disette, telles 1692 et 1709, il tentera de spéculer sur les hausses du cours des grains.

Arconcey épargnée par la disette

Si les laboureurs ont de quoi subsister, ils n'ont pas néanmoins la propriété de leurs terres, ni parfois de leur charrue complète d'animaux de trait. Ils voient avec inquiétude les capitaux étrangers, ceux des « forains », se fixer dans leurs paroisses et ils dénoncent ces propriétaires cupides. Plus instruits que les paysans des morvans et moins misérables, ils résistent mieux aux fléaux de ces grands froids. Ils auront en revanche à faire face aux citadins armés qui viennent enlever de force le blé des granges de l'Auxois. Les marchands d'Auxois voient parfois leur richesse pillée. « A Pommard, les villageois rassemblés par le tocsin, trouvant plus de 200 hommes armés, durent laisser saisir un grenier plein de blé qu'avait constitué un marchand de l'Auxois » ; «Les Beaunois réussirent à enlever 8.000 mesures de bled en Auxois, à main armée, malgré les paysans qui s'attroupoient».» (Pierre de SAINT JACOB op. cit..). Ils défendent une richesse qui n'est pas la leur, conscients de la famine qui les menacerait si elle échappait à leur surveillance. Quant aux spéculateurs , ils verront leurs calculs déjoués par la baisse des prix des grains qui suivra la hausse escomptée.

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Toute la région ne s'en tire pas sans dommages : ainsi, à Eguilly, « la plupart des habitants ont quitté ». Les registres paroissiaux entre 1707 et 1717, 1718 et 1721, nous font défaut pour confirmer cette perte de foyers.

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