Maths expertes – Chapitre 9 Page 1
Chapitre IX : Utilisation des matrices – Chaînes de Markov
I- Suites de matrices
1) Suites de matrices colonnes Définition 1 :
Soit 𝑛 un entier naturel.
On appelle suite de matrices colonnes, notée (𝑈 ), des matrices colonnes dont tous les coefficients sont des termes de suites numériques.
Exemple 1 :
La suite (𝑈 ) définie par 𝑈 = (−1) 𝑛 3𝑛 − 1
est une suite de matrices colonnes dont les coefficients sont des suites définies pour tout entier naturel 𝑛 par : 𝑢 = (−1) , 𝑣 = 𝑛 et 𝑤 = 3𝑛 − 1
Remarque 1 : On définit de la même façon les suites de matrices lignes.
Définition 2 :
On dit que la suite (𝑈 ) converge vers 𝐿 signifie que, pour chaque emplacement, la suite des coefficients de 𝑈 converge vers le coefficient de 𝐿 correspondant.
Exemple 2 :
1) Pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑈 = −2 × 0,4 − 3 3 × 0,4 + 1 La suite (𝑈 ) converge vers 𝐿 = −3
1 2) La suite (𝑈 ) définie par 𝑈 = (−1)
𝑛 3𝑛 − 1
diverge.
2) Suites de matrices définies par récurrence
Propriété 1 : Soit (𝑈 ) une suite de matrices colonnes telle que, pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑈 = 𝐴𝑈 où 𝐴 est une matrice carrée.
On a alors, pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑈 = 𝐴 𝑈 Exemple 3 : suites couplées
On considère deux suites (𝑢 ) et (𝑣 ) définies par 𝑢 = 1, 𝑣 = −2 et, pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑢 = 3𝑢 − 4𝑣
𝑣 = −𝑢 + 2𝑣
On définit les matrices : 𝐴 = 3 −4
−1 2 et, pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑈 = 𝑢 𝑣
L’écriture matricielle du système est donnée par : 𝑈 = 𝐴𝑈 et ainsi 𝑈 = 𝐴 𝑈 = 23 077
−9 009 Exemple 4 : suite récurrente linéaire d’ordre 2
On considère la suite (𝑢 ) définie par 𝑢 = −1, 𝑢 = 2 et, pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑢 = 3𝑢 − 2𝑢 On définit les matrices : 𝐴 = 0 1
−2 3 et, pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑈 = 𝑢 𝑢 L’écriture matricielle du système est donnée par : 𝑈 = 𝐴𝑈 …
Maths expertes – Chapitre 9 Page 2 Propriété 2 : Soit (𝑈 ) une suite de matrices colonnes telle que, pour tout 𝑛 ∈ ℕ, 𝑈 = 𝐴𝑈 + 𝐵.
Si (𝑈 ) est convergente, alors sa limite 𝑈 est une matrice colonne solution de l’équation matricielle 𝐴𝑈 + 𝐵 = 𝑈.
La matrice colonne 𝑈 ainsi définie est appelée état stable de la suite (𝑈 ).
Remarque 2 :
Si la matrice carrée 𝐼 − 𝐴 est inversible, alors il existe un état stable 𝑆 tel que 𝑆 = (𝐼 − 𝐴) 𝐵 II- Les chaînes de Markov
1) Graphe orienté pondéré
Définition 3 : Un graphe probabiliste est un graphe orienté et pondéré dans lequel : - Il y a au plus un arc d’un sommet à l’autre ;
- La somme des poids des arcs issus d’un même sommet est égale à 1.
Remarque 3 :
1) Les poids des arcs sont des probabilités (ce sont des nombres réels compris entre 0 et 1).
2) Un graphe probabiliste indique les différents états possibles d’une situation (par les sommets), ainsi que les probabilités de passer d’un état à un autre (par les poids des arcs).
Exemple 5 :
Le premier graphe est un graphe probabiliste d’ordre 2 et le deuxième est d’ordre 3.
Définition 4 : Soit G un graphe probabiliste d’ordre 𝑛 dont les sommets sont numérotés de 1 à 𝑛.
La matrice de transition 𝑀 de G est la matrice carrée d’ordre 𝑛 telle que 𝑚 est égale à la probabilité portée par l’arc reliant le sommet 𝑖 au sommet 𝑗 s’il existe et 0 sinon.
Exemple 6 : Les matrices de transition associées aux graphes de l’exemple précédent sont, en supposant les sommets classés dans l’ordre alphabétique :
𝑀 = 0,6 0,4
0,2 0,8 et 𝑀 = 0,1 0,1 0,8 0,05 0,5 0,45 0,05 0,05 0,9
Remarque 4 : La somme des termes appartenant à une même ligne vaut 1.
A B
>
<
>
<
0,6 0,8
0,2 0,4
Maths expertes – Chapitre 9 Page 3 2) Chaîne de Markov à 2 ou 3 états
Définition 5 :
On considère une suite de variables aléatoires (𝑋 ) permettant de modéliser l’évolution par étapes successives d’un système aléatoire comportant différents états (2 ou 3).
À l’étape 𝑛 = 0, la loi de probabilité 𝑋 s’appelle la distribution initiale du système.
À l’étape 𝑛, la loi de probabilité 𝑋 s’appelle la distribution après 𝑛 transitions.
Lorsqu’à chaque étape, la probabilité de transition d’un état à un autre ne dépend pas de 𝑛, on dit que la suite (𝑋 ) est une chaîne de Markov.
Exemple 7 : Une mouche se déplace entre les trois ampoules d’un feu tricolore.
Si elle est sur le orange, elle y reste dans 10% des cas ou se déplace sur le vert dans 80% des cas ou le rouge dans 10% des cas.
Si elle est sur le rouge, elle y reste dans 50% des cas ou se déplace sur le vert dans 45 % des cas ou le orange dans 5% des cas.
Si elle est sur le vert, elle y reste dans 90% des cas ou se déplace sur le orange ou le rouge dans 5%
des cas.
On note 𝑋 la variable aléatoire donnant la position de la mouche à l’étape 𝑛.
Au début de l’expérience, pour 𝑛 = 0, la mouche est sur le vert.
Ainsi 𝑃(𝑋 = 𝑉) = 1, 𝑃(𝑋 = 𝑂) = 𝑃(𝑋 = 𝑅) = 0
À chaque étape, la probabilité pour la mouche de se déplacer vers l’une des ampoules ne dépend pas de 𝑛 mais seulement de sa position précédente donc la suite (𝑋 ) est une chaîne de Markov.
On lui associe le deuxième graphe de l’exemple 5 et la matrice de transition 𝑀 . 3) Chaîne de Markov et suite de matrices
Propriété 3 :
On considère une chaîne de Markov à 2 (respectivement à 3) états et 𝑃 la matrice de transition associée.
Soient 𝑛, 𝑖 et 𝑗, 3 entiers naturels tels que 𝑛 ≥ 1, 1 ≤ 𝑖 ≤ 2 et 1 ≤ 𝑗 ≤ 2 (resp. 1 ≤ 𝑖 ≤ 3 et 1 ≤ 𝑗 ≤ 3).
La probabilité de passer de l’état 𝑖 à l’état 𝑗 en 𝑛 étapes est égal au terme de la ième ligne et jème colonne de la matrice 𝑃 .
Exemple 8 : Dans un pays, les clients ont le choix entre deux opérateurs téléphoniques A et B.
Chaque année, 40% des clients de A changent pour l’opérateur B et 20% des clients de B vont vers A.
Cette situation peut être modélisée par le premier graphe de l’exemple 5.
La matrice de transition est 𝑀 = 0,6 0,4 0,2 0,8 .
Pour calculer la probabilité de passer de l’état 1 (A) à l’état 2 (B) en 3 étapes (années), on calcule 𝑀 : 𝑀 = 0,6 0,4
0,2 0,8 = 0,376 0,624 0,312 0,688
Définition 6 :
On considère une chaîne de Markov à 2 états (resp. 3) et 𝑃 sa matrice de transition.
On note 𝑈 la matrice ligne à 2 colonnes (resp. 3) dont le terme de la jème colonne est la probabilité qu’à l’étape n, la variable aléatoire 𝑋 soit égale à j.
Autrement dit : 𝑈 = (𝑃(𝑋 = 1) 𝑃(𝑋 = 2)) (resp. (𝑃(𝑋 = 1) 𝑃(𝑋 = 2) 𝑃(𝑋 = 3)))
Remarque 5 : La matrice 𝑈 représente la distribution initiale et la matrice 𝑈 la distribution après 𝑛 transitions.
Maths expertes – Chapitre 9 Page 4 Propriété 4 :
Pour tout entier naturel 𝑛 ≥ 1, 𝑈 = 𝑈 × 𝑃 et 𝑈 = 𝑈 × 𝑃 .
S’il existe un entier 𝑛 tel que la matrice 𝑃 ne contient pas de 0 alors la suite (𝑈 ) converge vers la matrice 𝑈 vérifiant 𝑈 = 𝑈𝑃 et cette limite ne dépend pas de 𝑈 .
On dit que la matrice 𝑈 représente la distribution invariante du système.
Remarque 6 :
1) Attention à l’ordre des matrices dans le produit.
2) 𝑃 ne contient pas de 0 signifie qu’en 𝑛 étapes, on peut passer de n’importe quel état à n’importe quel autre.
3) Cas particulier : si la matrice 𝑃 ne contient pas de 0, alors la suite (𝑈 ) converge.
Exemple 9 : Dans l’exemple des opérateurs téléphoniques, résolvons le système 𝑈 = 𝑈𝑀 : (𝑥 𝑦) = (𝑥 𝑦) 0,6 0,4
0,2 0,8 ⇔ (𝑥 𝑦) =⇔ 𝑥 = 0,6𝑥 + 0,2𝑦
𝑦 = 0,4𝑥 + 0,8𝑦(0,6𝑥 + 0,2𝑦 0,4𝑥 + 0,8𝑦)
⇔ 𝑥 = 0,6𝑥 + 0,2𝑦
𝑦 = 0,4𝑥 + 0,8𝑦 ⇔ 0,4𝑥 − 0,2𝑦 = 0 0,4𝑥 − 0,2𝑦 = 0
Les deux équations sont identiques, on ajoute l’équation 𝑥 + 𝑦 = 1 (logique au vu de la situation) 0,4𝑥 − 0,2𝑦 = 0
𝑥 + 𝑦 = 1 ⇔ 𝑦 = 2𝑥 3𝑥 = 1 ⇔
𝑦 =2 3 𝑥 =1 3 La distribution invariante est .
La matrice de transition ne contient pas de 0 donc les distributions de probabilités convergent vers cette distribution invariante.
Ainsi, à terme, la probabilité de choisir l’opérateur A se rapproche de 1/3 et celle de choisir B se rapproche de 2/3.